Séance du vendredi 7 novembre 1997 à 17h
54e législature - 1re année - 1re session - 53e séance

PL 7467-A
a) Projet de loi de Mmes et MM. Michel Balestra, Claude Howald, Pierre Kunz, Claude Lacour, Jean-Philippe de Tolédo et Michèle Wavre modifiant la loi générale sur les contributions publiques (taxe sur les jeux d'adresse et de hasard) (D 3 05). ( -) PL7467Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission ad hoc des jeux
 Mémorial 1996 : Annoncé, 2803. Divers, 3179. Projet, 3802.
   Renvoi en commission, 3816.
Rapport de Mme Claire Chalut (AG), commission ad hoc des jeux
PL 7122-A
b) Projet de loi de Mme et MM. Elisabeth Reusse-Decrey, Max Schneider, Bernard Clerc et Jean-Pierre Lyon modifiant la loi sur l'exercice des professions ou industries permanentes, ambulantes et temporaires (salle de jeux) (I 2 03). ( -)  PL7122Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission ad hoc des jeux
Mémorial 1994 :  Projet, 4514. Renvoi en commission, 4526.
 Mémorial 1996 :  Renvoi en commission, 5827.
Rapport de Mme Claire Chalut (AG), commission ad hoc des jeux
PL 6916-A
c) Projet de loi de MM. Bénédict Fontanet, Charles Poncet et Jacques Torrent modifiant la loi sur l'exercice des professions ou industries permanentes, ambulantes et temporaires (I 2 03). ( -) PL6916Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission ad hoc des jeux
 Mémorial 1992 :  Annoncé, 6648. Projet, 7577. Renvoi en commission, 7582.
Rapport de Mme Claire Chalut (AG), commission ad hoc des jeux
M 1066-A
d) Proposition de motion de Mmes et MM. Michel Balestra, Claude Howald, Pierre Kunz, Claude Lacour, Jean-Philippe de Tolédo et Michèle Wavre concernant les jeux d'adresse et de hasard. ( -) M1066Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission ad hoc des jeux
 Mémorial 1996 : Divers, 3179. Lettre, 3188. Développée, 3817. Lettre, 3821.
  Renvois en commissions, 3827, 5827.
 Mémorial 1997 : Retrait, 5002. (Le Grand Conseil a pris acte le 26 juin 1997 du retrait    par ses auteurs de la proposition de motion 1066.)
Rapport de Mme Claire Chalut (AG), commission ad hoc des jeux
, remplacée par M. Christian Grobet (AG)

5. Rapport de la commission ad hoc des jeux chargée d'étudier les objets suivants :

LES PERSONNAGES

1. SOURCES

 Les procès-verbaux des séances de commissions;

 «Genève: l'année sociale en chiffres», éd. 1996 - H. G.;

 «RMCAS: Une expérience de 12 mois» - H. G.;

 Les statistiques de l'OCSTAT et du service du droit des pauvres;

 Les mémoriaux des séances du Grand Conseil des: 8 décembre 1845; 30 janvier 1886; 8 mars 1930; 28 mai 1930; 21 juin 1996.

2. Le projet de loi (texte complet) et le rapport de la majorité.

3. Le passé.

4. La foule: «Pour ou contre l'abolition» (in «Le Courrier» 25/26 janvier 1997).

Rapport de la majorité:

Mme Claire Chalut.

Rapport de la minorité:

M. Michel Balestra.

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Rapporteur: Mme Claire Chalut.

La commission des jeux a consacré 10 séances (du 27 septembre 1996 au 20 juin 1997) à l'examen des projets de loi 7467, 7122, 6916 et de la motion 1066 sous la présidence de, respectivement, MM. Nicolas Brunschwig et Jean-Claude Vaudroz.

Faut-il abolir la taxe du droit des pauvres?(pièce en 6 actes)

Acte 1er: «Un impôt (sic) discriminatoire», qu'ils ont dit...

Le 1er janvier 1995 est entrée en vigueur la loi sur la TVA: avant, mais aussi après cette date, il n'y avait personne pour revendiquer la suppression de la taxe du droit des pauvres et, pourtant, il en était largement débattu bien avant la votation fédérale sur cette loi. Pourquoi, quelques années après, cet engouement soudain à vouloir supprimer cette taxe? Qui demande cette suppression? Les consommateurs? Non ! Les organisateurs de spectacles? Mais n'anticipons pas sur le résultat de nos travaux...

Toutefois, avant de poursuivre, un grand merci aux procès-verbalistes, MM. Fatio et Deshusses, qui ont assisté et pris note, avec compétence et sang-froid, de l'essentiel de nos discussions et de nos «volées de bois vert» !

Rappelons-nous (et l'on verra plus loin pourquoi) les discussions homériques lors du tour de préconsultation autour du projet de loi 7467, poursuivies, ensuite, autour de la motion 1066.

L'exposé des motifs du projet de loi nous rappelle que cet «impôt discriminatoire» ! (...) pénalise gravement, à Genève, un secteur économique très intéressant en termes de croissance et d'emplois et, d'autre part, qu'il nuit à l'attractivité de notre canton (in Mémorial n° 26/IV, pages 3805 et suivantes). Plus loin, nous apprendrons qu'il est urgent d'engager la «réforme proposée, cela pour plusieurs raisons»: résumons.

Genève doit devenir la capitale culturelle (...) et disposer d'«un secteur de promotions événementielles dynamique et compétitif prioritaire».

Que «les 11 millions de francs de recettes [dévolus à l'Hospice général] qui disparaîtront dans un premier temps ne représentent QUE 0,4% de l'ensemble des moyens que la collectivité consacre à la santé publique et à la prévoyance sociale».

Et, de la bouche de M. Jean-Philippe de Tolédo, cette phrase pathétique: «En réalité, que fait-on pour encourager les manifestations de tout ordre? On taxe ! Oui, Mesdames et Messieurs les députés, le canton prélève 13% au titre du droit des pauvres sur les spectacles, que ceux-ci soient bénéficiaires ou non ! (...) En effet, les organisateurs sont taxés, non pas simplement sur le bénéfice réalisé mais sur les recettes. (...) A ces 13% s'ajoutent 6,5% de TVA; les taxes atteignent ainsi presque 20%, et c'est une charge quasiment insupportable pour les organisateurs dans le contexte de crise que nous connaissons». (...) «Les manifestations exemptées de la taxe du droit des pauvres - et cela prouve son importance - permettent à leurs organisateurs de survivre. (...) C'est le cas d'Athletissima à Lausanne, du Paléo Festival et du Festival Jazz Montreux» (ibid., Mémorial, pages 3808 et suivantes).

Et, cerise sur le gâteau: «La suppression du droit des pauvres améliorerait la QUALITÉ DE L'OFFRE en matière de spectacles et de manifestations et ABAISSERAIT LE PRIX DES BILLETS» (ibid.).

FRÉQUENTATION DES SALLES DE CINÉMA

(SPECTATEURS PAYANTS)

1991

1992

1993

1994

1995

Nombre de salles

27

27

33

37

38

Nombre de spectateurs

2 004 751

2 007 741

2 160 493

2 078 777

1 996 832

Mais dans sa grande générosité, M. de Tolédo n'a pas oublié (ouf !) I'Hospice général. En effet, il nous informe que la suppression du droit des pauvres doit être assortie de deux réserves: ce dernier rapporte 11 millions de francs, «lesquels sont donnés à l'Hospice général». Et qu'il faut «impérativement trouver une compensation pour ce montant, car on ne peut pas priver l'Hospice général d'un tel revenu» (ibid.).

Ces citations, volontairement un peu longues, résument bien les points essentiels qui seront défendus en commission par les auteurs du projet de loi et de la motion. Vous trouverez dans ce texte, émaillé de tableaux, les chiffres qui vous montreront que le secteur du spectacle notamment, sur le plan de la fréquentation, se porte plutôt bien. Ce n'est pas tout à fait la situation catastrophique que nous décriront les commissaires radicaux et libéraux. Le langage des chiffres est peut-être froid, mais il a le mérite de la réalité ! Et, à l'évidence, les recettes que les spectacles génèrent ne sont pas quantité négligeable et ceux de l'Hospice général montrent la nécessité, incontournable en cette période, de ces recettes (voir plus loin).

D'emblée, je tiens à rappeler, car contrairement à ce que l'on veut laisser croire - ce qui sera confirmé plus loin - le droit des pauvres est PAYÉ ENTIÈREMENT PAR LE CONSOMMATEUR, l'organisateur de spectacles étant, quant à lui, chargé de percevoir cette taxe «pour le compte de l'Etat» (voir art. 444). Les créateurs attendent-ils LA SUPPRESSION DU DROIT DES PAUVRES pour présenter au public des spectacles de qualité?... Si cela devait être le cas, il n'y aurait depuis fort longtemps plus de créations, plus de comédiens, de musiciens et plus de public non plus ! La recette du seul droit des pauvres ne suffit, de loin pas, à couvrir une création !...

(...) le dimanche 21 mai, pendant qu'un nouveau concert public se déroule au Palais des Tuileries, les troupes versaillaises s'infiltrent dans Paris (...).

Le dimanche 28, les dernières barricades sont prises d'assaut à Belleville, commune du Paris ouvrier, mais...

Oui, mais

ça branle dans le manche, les mauvais finiront / Et gare à la revanche / Quand tous les pauvres s'y mettront (bis) ! «La Semaine sanglante» (in: Florilège de la chanson révolutionnaire de 1789 au Front populaire, R. Brecy», 1978

PRODUIT DU DROIT DES PAUVRES PAR RUBRIQUE - 1992 à 1996

1992

1993

1994

1995

1996

Cinéma

3 171 935,85

3 409 857,55

3 445 176,00

3 401 195,90

3 311 903,80

Théâtres

2 290 545,80

2 401 802,60

2 510 392,00

2 169 082,90

2 347 940,00

Concerts

1 301 401,50

1 014 718,10

1 104 507,55

1 211 874,85

1 223 877,55

Variétés

335 126,15

465 098,50

677 336,90

624 131,05

99 512,10

Dancings, bals

1 660 921,55

1 682 292,60

1 969 918,35

1 654 780,70

1 615 291,70

Football

350 382,10

397 100,55

274 000,95

204 819,05

205 678,60

Sports divers

637 320,95

299 616,50

356 003,50

329 916,00

547 305,75

Musées

94 302,60

95 272,05

126 810,40

156 027,35

123 559,20

Expositions

993 374,95

929 496,40

818 956,90

857 877,00

1 108 153,20 

Conférences

78 609,75

58 685,30

67 814,15

68 740,65

61 823,75

Festivités

15 756,75

30 559,30

44 887,85

165 965,95

12 697,30

Cirques

283 506,45

280 221,50

294 919,60

298 046,35

273 195,50

Grand huit

135 630,00

139 291,00

139 894,00

233 696,05

156 877,60

Jeux aut./Bowlings

568 349,60

504 058,45

456 933,80

253 658,40

832 855,00

Machines à sous

1 587 330,40

1 695 594,80

1 650 874,85

1 748 400,55

1 788 622,95

Loteries

4 659 822,45

4 724 159,55

4 853 430,75

5 301 497,50

5 222 210,90

Lotos

316 342,15

333 702,80

344 032,65

33 874,10

334 132,40

Tombolas

175 173,05

151 650,70

136 837,70

163 517,10

128 654,95

Radio/TV Juke-box

166 655,00

161 484,80

158 280,00

153 655,00

153 875,00

Divers

44 065,85

42 551,25

45 582,15

46 282,35

22 597,95

Vente billetteries

159 318,50

165 568,50

169 494,00

167 882,60

172 602,00

TOTAUX

19 025 871,40 

18 985 626,15

19 372 784,05

19 541 926,60

20 643 367,20

Frais perception

1 111 869,55

1 124 419,85

1 051 173,80

1 128 268,60

1 129 483,95

En % du produit

5,85%

5,92%

5,42%

5,78%

5,47%

Remboursements

1 005,00

1 400,00

6 000,00

2 000,00

2 000,00

Hospice gén.70%

12 539 097,80

12 501 864,40

12 820 927,30

12 888 160,70

13 659 718,30

DASS 30%

5 373 899,05

5 357 941,90

5 494 682,95

5 523 497,30

5 854 164,95

Paradoxalement, des créateurs, il n'en sera quasiment pas question dans les discussions.

MUSÉES

1991

1992

1993

1994

1995

Art et Histoireet filiales

312 759

293 160

309 178

342 147

324 128

Voltaire1

0

0

0

6 720

3 722

Ethnographie

36 848

36 842

40 599

34 482

29 679

Histoire naturelle2

570 565

217 726

272 766

266 190

238 448

TOTAUX

920 172

547 728

622 543

649 539

595 977

1 En restauration entre 1990 et 1993.

2 Dont plus de 300 000 visiteurs en 1991: expo tempo- sur les dinosaures !

THÉÂTRES

Saison 1991/1992

Saison 1992/1993

Saison 1993/1994

Saison 1994/1995

Grand Théâtre

99 345

95 900

101 201

100 851

Comédie

32 170

32 102

31 717

28 535

Carouge1

74 511

74 981

78 901

0

Am Stram Gram

27 534

36 982

60 000

33 400

Poche

12 454

15 299

13 362

10 692

TOTAUX

246 014

255 264

285 181

173 478

1 Pas de chiffres pour la saison 1994/1995.

CONCERTS

1991

1992

1993

1994

1995

OSR, CIEM...

93

89

105

109

8

Jazz, variétés

7

3

3

11

10

Divers (fanfare...)

9

3

5

11

8

Cérémonies

Conférences

5

5

6

8

7

TOTAUX

114

103

119

137

33

1991 et 1993: pas de «variétés».

A propos des salles de jeux, dont il est question dans la motion, on le verra plus loin, le projet de loi fédéral veut leur donner un avenir différent. Les auteurs de la motion ont raison d'être prudents quant au mode d'exploitation de ces dernières.

Mais, une fois de plus, le bouc émissaire est et sera toujours le droit des pauvres, puisque M. Pierre Kunz, défendant sa motion, précise: «La 3e qualité de cette motion est de contribuer à ouvrir la voie à L'INDISPENSABLE RÉFORME DE L'IMPÔT DISCRIMINATOIRE ET COÛTEUX pour Genève qu'est devenu l'actuel droit des pauvres» (ibid.). Et de nous assurer que le développement de nouvelles salles de jeux produira les «gains attendus».

Ce rappel des discussions en Grand Conseil a été nécessaire pour comprendre la suite du récit de nos travaux en commission. A l'évidence, la formule «yaka» ne peut pas s'appliquer.

Le cousin des libéraux et radicaux - j'ai nommé le Parti démochrétien - sera beaucoup plus réservé, voire accueillera franchement ce projet de loi et la motion.

Fin du premier acte, que le spectacle continue !

ACTE 2: Le travail en commission

A l'instar du projet de loi 7467 et de la motion 1066, les projets de loi 7122 et 6916, déjà anciens (déposés, respectivement, l'un le 5 juillet 1994 et l'autre le 12 novembre 1992), ont également rejoint la commission, après un bref séjour à la commission judiciaire. La commission ne traitera, au cours de ses travaux, que le projet de loi 7467 accompagné de la motion 1066.

Le ton est donné: les auteurs de la motion et du projet de loi (le sort qu'il sera accordé aux projets de loi 6916 et 7122 sera décidé en fin de séances de notre commission) exposent les raisons du dépôt de ce projet de loi et de la motion. Ils se sont attachés à rappeler, dans les grandes lignes, ce qu'ils avaient déjà dit et défendu au cours de la séance de préconsultation du Grand Conseil.

Il leur est rappelé, en ce qui conceme les jeux d'adresse et de hasard, que le canton n'a pas compétence sur les jeux de hasard, qui sont du ressort de la Confédération. Quant aux jeux d'adresse, ressortissant au droit cantonal, rien n'est encore décidé estime une commissionnaire. En effet, la Confédération fait les yeux doux aussi de ce côté-là.

Par ailleurs, la rapporteure tient à disposition du Grand Conseil l'épais Message fédéral à ce sujet.

Il sera donc beaucoup plus question du droit des pauvres que du sort des casinos dont l'attrait séduit plus d'un, car on entrevoit là des possibilités de taxation accrues. Il est vrai qu'une partie des commissionnaires reste persuadée de pouvoir compenser la suppression du droit des pauvres par le biais de gains prometteurs des jeux... Mais, n'anticipons pas. Les avis des uns et des autres - et c'est un euphémisme - seront largement différents tout au long de ces travaux. Bonjour, l'ambiance !

ACTE 3: Comment faire «sauter» la taxe de 13% du droit des pauvres?

Lorsque l'on souhaite évoquer les avis des uns et des autres, on ne peut, dans un rapport, au risque d'ennuyer le lecteur, que faire une liste, de loin pas exhaustive ! Etablissons donc ce florilège. D'abord celui de ceux et de celles qui militent en faveur de la suppression de cette taxe (véritable épine dans le pied de l'Entente), pour ensuite établir celui de ceux et de celles qui s'y opposent:

Pour la suppression:

- Il faut alléger les charges pesant sur les manifestations culturelles et sportives pour élargir l'assiette aux jeux d'adresse et de hasard.

- Ce système est absurde, qui consiste à faire subventionner certaines organisations par la puissance publique et de leur infliger une remise de 13% sur les prix d'entrée. L'administration du droit des pauvres est une «encouble» pour les petites manifestations et devient un vrai casse-tête pour des gens pas très avertis.

- Il n'existe aucun canton suisse pour pratiquer ce type de prélèvement. Les manifestations d'importance, comme Paléo, Jazz Montreux, etc., sont exonérées. Ce montant [les 11 millions de francs pour l'Hospice général] ne représente qu'un petit 6,5% du budget total de l'Hospice général, qui s'élève à 170 millions de francs, alors que la subvention cantonale se monte déjà à 76 millions de francs et que l'Etat pourrait faire l'appoint durant la période transitoire !

- Le commerce local se porte mal et la concurrence entre les villes en matière de manifestations sportives et culturelles devient de plus en plus dure. Il est urgent de trouver une substitution à cette somme de 11 millions de francs, qui permette de rivaliser avec les prix français !

- Il faut dynamiser les grandes manifestations qui ont des retombées autrement plus importantes que les réunions confidentielles... La compensation de la taxe est un [sic] faux problème...

- Il va manquer, dans un premier temps, 11 millions de francs mais, en multipliant les salons de jeux et en augmentant la taxe s'y rapportant, nous y sommes...

- Les député(e)s ont toujours eu le souci de donner à l'Hospice général les moyens de son action et l'Etat compensera, cette fois encore, la diminution provisoire du rendement du droit des pauvres.

- Nous avons une réserve de 7 millions de francs [part revenant à l'Etat] qui nous permet d'expérimenter le modèle, au moins pendant deux ans, si l'on tient compte d'une vision d'avenir dynamique.

1991

1992

1993

1994

1995

Patinoire1

205 321

227 493

133 279

141 203

166 680

Piscine2

361 690

352 218

238 501

40 058

302 997

TOTAL ENTRÉES

567 011

579 711

371 780

181 261

469 677

1 Fermée de février 1993 à septembre 1994.

2 Fermée de septembre 1993 à octobre 1994, toutes deux pour travaux de rénovation.

SALONS et EXPOS

1991

1992

1993

1994

1995

Auto

681 140

683 107

685 220

654 439

675 761

Utilitaires

0

135 046

0

134 430

0

Invention

102 486

112 735

114 328

102 856

86 625

Livre

123 000

130 000

130 600

112 000

113 000

Foire de Genève

296 000

280 000

273 000

284 000

272 000

Télécom

133 860

0

0

0

190 000

TOTAUX

1 336 486

1 340 888

1 203 148

1 287 725

1 337 386

1993

1994

1995

Jeux automatiques (flippers, billard...)

1 880

1 671

1 740

Bowling

1 977

1 826

1 944

Casino: machines à sous, jeux de boule

13 145

12 784

13 524

Loteries: Loterie romande, pmur, banco, jass...

53 746

51 630

52 412

(Loto Express: dès septembre 1994)

TOTAUX

70 748

67 911

69 620

Dépense par habitant1.

182,00

173,00

175,00

1 Calculée sur la base de la population résidante moyenne du canton.

Pour le maintien de la taxe du droit des pauvres

- Pour les tenants de l'économie, il faut diminuer les impôts et taxes à grande échelle. Il faut conserver ce nom de «droit des pauvres» [suite à une réaction, en faveur d'un changement de nom] qui rappelle à chacun que des pauvres existent bel et bien à Genève.

- Nous sommes contre l'abrogation de cette loi, car l'exemple de la diminution de la TVA sur les prestations hôtelières a démontré que la répercussion n'a pas eu lieu... si ce n'est un jus d'orange gratuit au petit déjeuner !

- Nous n'entrerons pas en matière pour une suppression du droit des pauvres. Peut-être un aménagement de ce demier pourrait-il être envisagé, mais pas avant que nous soyons au clair sur la question des jeux.

- Sans compensation, pas d'entrée en matière ! Si la Confédération décide de nous laisser le bénéfice des jeux, alors nous pourrions remplacer le droit des pauvres.

- Une diminution des recettes dévolues à l'Hospice général serait inéluctablement compensée par une augmentation de la subvention prélevée sur le budget ordinaire de l'Etat, puisque la loi fait obligation à l'Hospice général d'équilibrer ses comptes.

- Nous ne sommes pas en mesure de priver l'Etat des recettes du droit des pauvres sans produits compensatoires. Il faut savoir que ce ne sont pas les prestations sociales qui ont augmenté, mais le nombre d'ayants droit.

- Ce n'est pas le public qui demande la suppression, mais bien les organisateurs de spectacles. On démantèle les recettes de l'Hospice général, alors qu'il croule sous les demandes d'aide.

D'autre part, la commission a écrit à M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, pour lui demander quelles seraient les conséquenoes financières éventuelles d'une suppression du droit des pauvres. Voici en substance sa réponse:

Comme dit ci-dessus, l'Hospice général est tenu, par la loi, d'équilibrer ses comptes. De plus, le problème serait plus aigu avec le tiers des recettes du droit des pauvres réservé au Conseil d'Etat pour des opérations ponctuelles, qui n'est pas garanti par le budget ordinaire de l'Etat.

ACTE 4: Les auditions

Nous avons successivement auditionné entre le 4 octobre 1996 et le 16 mai 1997:

1. MM. Pierre Genecand, directeur de GESREP, Daniel Perroud, directeur de DPO SA, et Michaël Drieberg, Arena;

2. MM. Pierre Desponds, président du Groupement des cinémas genevois, Philippe Maillard, directeur de la Loterie romande;

3. 3. MM. André Hediger, Alain Vaissade, conseillers administratifs de la Ville de Genève, respectivement chargé des département des sports et de la culture, et Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat, département de justice et police et des transports;

4. MM. Pierre-Olivier Barraud, président de la Société des hôteliers de Genève, et Edouard Givel, président du comité de défense du Casino de Genève, et Mme Nicole Codourey, administratrice de l'Arthur's Club;

5. M. Claude Torracinta, président de la commission administrative de l'Hospice général;

6. M. Heinz Pezenik, Flippomatic SA.

Par la force des choses, il faut admettre une synthèse de ces auditions. En effet, à l'exception de deux ou trois d'entre elles, les représentants des différents secteurs susmentionnés ont, globalement, aussi bien dans la forme que sur le fond, exprimé les mêmes préoccupations et doléances: il faut supprimer l'empêcheur de tourner en rond qu'est le droit des pauvres pour pouvoir être aussi compétitif, voire plus, que les autres cantons ou la France voisine !

Je me bornerai donc à relever, pour l'intérêt, n'est-ce pas? de ce rapport, les points particuliers aux uns et aux autres. Cependant, un arrêt significatif aux auditions n° 2 (M. Maillard), n° 3 (MM. Hediger, Vaissade et Ramseyer) et n° 5 (M. Torracinta) est nécessaire. Voici donc résumés les témoignages des «auditionnés»:

- Si les spectades, Motocross, Concours hippiques, Supercross, notamment, sont organisés à Zurich ou à Bâle, les gains restent plus élevés. En effet, la suppression du droit des pauvres permettrait de réduire les charges et de diminuer le prix des billets d'entrée (pour les jeunes).

- Le problème de Palexpo c'est que les halles sont vides. Il faut monter et démonter des gradins, le coût s'élève à près d'un million de francs.

- Pourquoi rester ici, puisque les appels du pied se font pour aller ailleurs avec, en prime, des gains supplémentaires... où la taxe du droit des pauvres n'existe pas.

- En ce qui concerne les cinémas, les responsables craignent surtout la concurrence de la France voisine (Archamps où Gommont arrive avec un projet de 12 salles [que penser, dès lors, du projet de multisalles de Balexert...].

- Ils s'exprimeront, aussi , sur l'impact qu'aurait la suppression du droit des pauvres sur la fréquentation (augmentation, concurrence, etc.). Le droit des pauvres, estiment-ils tous, est discriminatoire, tout en précisant qu'il faut quelque chose pour l'Hospice général. La taxe nous met (Arthur's Club) en concurrence avec les ... squats et leurs fêtes (où l'on donne une contremarque sous forme d'un coup de tampon sur la main) et qui ne paient pas de taxes, etc. [N. B.: la «contremarque» est couramment utilisée lors de fêtes de toutes sortes, bals, etc. Même Paléo l'utilise... c'est vous dire !]

2. M. Maillard, directeur de la Loterie romande, ne s'exprimera pas sur le droit des pauvres mais sur un domaine qu'il connaît bien, à savoir les jeux. Il explique, toutefois, que l'article 445 du projet de loi pourrait causer de gros ennuis puisqu'on y mentionne que la «taxe s'élève à 13% de la recette brute... ce qui rendrait la gestion impossible, alors qu'il faudrait parler de revenu brut des jeux. La taxe s'applique sur le résultat résiduel, c'est-à-dire après avoir effectué les ristournes.

Pour ce qui est de la «Romande des jeux», les cantons romands, sauf Fribourg, ont fait des suggestions. Il faut savoir que Berne a l'intention de supprimer les machines actuelles, dites d'adresse, gérées avec compétence cantonale, pour celles dites de hasard qui seront du ressort exclusif de la Confédération. Les établissements du type Kursaal, tel que celui de Genève, seraient menacés si Berne s'en tient à la votation populaire du 7 mars 1993. En effet, cette dernière lui donne toute latitude pour agir et parle de les ponctionner, à hauteur de 60%.

La Romande des jeux offre une économie d'échelle, des compétences reconnues et assure une collaboration cantonale nécessaire. La Confédération aura la haute main sur l'organisation et il n'y aura plus de concessions cantonales. En effet, Berne n'acceptera plus la concurrence des casinos B. M. Maillard s'exprime, ensuite, sur le document «Rien ne va plus? Analyse du fonctionnement de la Loterie romande», publié en septembre 1996 par un comité de soutien aux casinos (?), et informe que ce document contient des comparaisons totalement illogiques avec des entreprises étrangères, telles que la Française des jeux et la loterie anglaise.

[Ce document reproche aussi la non-transparence de leurs comptes et son «hégémonie» sur les jeux, ce qui est démenti par le rapport de la fiduciaire chargée de la vérificabon des comptes. La Loterie donne une réponse circonstanciée à ce document. Ces deux pièces sont également à la disposition du Grand Conseil.]

M. Maillard poursuit: la France connaît 3 étages de taxe, Etat, région et communes. L'autorisation d'exploiter est assortie d'un cahier des charges précis relatif à l'animation de la région. Divonne est exemplaire avec ses concerts, ses activités culturelles diverses.

[A ce stade des auditions, une commissionnaire propose la suspension des travaux sur les casinos (voir Motion 1066) tant que la loi fédéral n'est pas adopée et que la définition des jeux d'adresse n'est pas fixée... ce qui risque de prendre un certain temps, sinon un temps certain !]

Mais poursuivons le rythme des auditions:

3. M. André Hediger et Alain Vaissade ont souhaité s'exprimer plus particulièrement sur la motion 1066 et expliquent que la Ville a des conventions signées avec le groupe Gaon qui bénéficie d'un droit de superficie. Le Conseil d'Etat accorde la concession d'exploitation du casino à la société SECSA. La convention-spectacle prévoit qu'une partie des bénéfices de la salle des jeux soit utilisée pour le subventionnement du déficit de la salle de spectacle (1,3 million de francs en 1996). M. Hediger explique, ensuite, que la Ville est opposée au projet de la «Romande des jeux» qu'il estime dangereux et que cette dernière n'a aucune expérience. Elle n'apporte aucune garantie de redistribution des bénéfices en faveur de la Ville et du canton. M. Alain Vaissade: La Ville paie le droit des pauvres sur les billets des manifestations culturelles subventionnées. Il estime qu'il n'y a pas de raison de taxer la culture et il est favorable à la suppression du droit des pauvres, cependant l'Hospice général ne devrait pas en subir les conséquences !

M. Gérard Ramseyer est d'un autre avis sur certains des points évoqués ci-dessus. La Ville a mené des négociations avec le groupe Aaron pour lui confier le mandat de faire passer le nombre de machines à sous de 109 à 200. Il espère une augmentation du bénéfice. Le chiffre d'affaires actuel est de 13 millions de francs et il s'attend à le voir passer à 20 milions de francs. Le bénéfice, après paiement du droit des pauvres, est de 2 millions de francs. Ce bénéfice devrait passer de 1,8 à 2 millions de francs (actuellement) à 6 ou 7 millions de francs. Il remet, au cours de son audition, un document détaillé qu'il résume. [Ce document est également à disposition du Grand Conseil]. Voici en substance ce qu'il contient:

«L'adhésion du canton à la «Romande des jeux» est du ressort du Grand Conseil (voir avis de droit de M. J.-F. Aubert). Le Conseil d'Etat y serait plutôt favorable. Dans un avis de droit (du 10 octobre 1996) rendu par le professeur Aubert, ce projet intercantonal n'est pas incompatible avec la constitution fédérale (art. 35): l'introduction d'un monopole est justifié par l'intérêt public (maîtrise de l'offre des jeux, qui restent dangereux). Cependant, ce sont les six parlements cantonaux romands qui doivent donner la base légale.

A propos du droit des pauvres: ce n'est pas une «Genferei» ! En effet, 13 cantons perçoivent une taxe similaire, d'autres délèguent les communes [voir liste plus loin]. M. Ramseyer précise que si le droit des pauvres n'existait pas, le billet de cinéma ne serait pas moins cher: ex. à Nyon - où la taxe n'existe pas - le billet coûte 15 F. Le droit des pauvres n'empêche pas l'organisation de grandes manifestations, et c'est le spectateur seul et unique qui est assujetti. L'entrée en vigueur de la TVA est venue singulièrement compliquer les choses en raison du cumul (TVA + droit des pauvres) pour certaines activités, telles que les grands salons et expos commerciales et non pour les domaines culturels et sportifs. Par ailleurs, le droit des pauvres est compatible avec la TVA (il n'est pas un impôt de même nature: art. 2 de l'ordonnance fédérale sur la TVA).

Les cantons qui perçoivent une taxe similaire au droit des pauvres:

- Taxes cantonale: BS, AI, SG, TI, GE

- Taxe communale: BE, LU, NW, ZG, FR, SO, B, AR, GR, VD, NE, JU

- Taxe récemment abrogée: ZH, UR, GL

- Le département n'a pas trouvé

 de dispositions pertinentes SZ, OW, SH, AG, TG, VS

On est loin des cantons ou communes qui ne perçoivent rien (en réponse à «plus un canton ne prélève de taxe» !

Puis, il répond sur l'avenir du projet de loi 7122. «Ce projet de loi peut très bien rester en suspens dans l'attente de pouvoir prendre connaissance du projet de loi fédéral sur les casinos. Par ailleurs, il a perdu de son actualité».

M. Ramseyer s'exprime ensuite sur le projet de loi 7467 et la motion 1066: idée réaliste ou utopique, se demande-t-il? Vu que le «Romande des jeux» n'est pas prête à être créée et qu'au niveau fédéral les cantons n'ont - sur le plan fiscal - pas grand-chose à attendre, l'adoption du projet de loi 7467 signifierait, en tout cas pour 2 ou 3 ans. Est-ce bien le moment? Il conclut en apportant 4 propositions de son département [à leur lecture, ce sont plutôt des remarques ayant pour but d'attirer notre attention sur certains points]:

«que la taxe du droit des pauvres est bien acceptée par les personnes qui y sont assujetties, à savoir les «citoyens-spectateurs-joueurs», que le service du droit des pauvres n'a, pour ainsi dire, pas de contentieux avec les «organisateurs-percepteurs», sous réserve de quelques rares cas qui peuvent se compter sur les doigts de la main;

que la TVA ne touche en définitive que les grands salons et les expositions commerciales;

que l'effet réel net de la TVA n'est pas de 6,5%, mais seulement de 2 à 3% après déduction de l'impôt préalable;

qu'il n'est pas possible, à l'heure actuelle, de procéder ne serait-ce qu'à une estimation des éventuelles recettes que l'Etat pourra retirer des jeux de hasard (avec ou sans adhésion à la «Romande des jeux») après l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les casinos;

qu'il est indispensable de ne pas modifier la taxe du droif des pauvres dans la précipitation et LA TÊTE DANS UN SAC.» (CQFD !)

M. Ramseyer propose, en revanche, la diminution du droit des pauvres de 13 à 10%... mais, ATTENTION ! cela entraînerait une perte de recettes d'environ 3 millions de francs !

Et la longue marche des auditions continue...

5. M. Claude Torracinta apporte avec lui des chiffres, qui parlent d'eux-mêmes. Sur les recettes de 19 millions du droit des pauvres, les sommes versées à l'Hospice général ont été les suivantes:

 1992 13 millions de francs

 1993 12,5 millions de francs

 1994 12,8 millions de francs

 1995 13 millions de francs

 (1996) 13,6 millions de francs

Les charges RMCAS

 au 1er décembre 1996 =   926 bénéficiaires (*);

 au 31 décembre 1996 = 1 350 bénéficiaires,

soit une augmentation d'environ 450 bénéficiaires qui, à raison de 25 000 F/an, représente une charge supplémentaire de 11,2 millions de francs pour 1996.

(*) Est-ce une erreur de transcription dans le procès-verbal? Le chiffre mentionné ci-dessus correspond à la situation de fin novembre 1995. A fin décembre 1995, il y avait 981 bénéficiaires.

Assistance

1990 3 768 dossiers, soit 5 920 personnes (ou 1,55% de la population résidente prise en charge)

1995 6 223 dossiers, soit 11 506 personnes (ou 2,88% de la population résidente prise en charge)

Cela représente une augmentation, pour cette période, de 65% !

Assistance aux réfugiés:

au 31 décembre 1995 = 3 002 personnes;

au 31 décembre 1996 = 3 412 personnes.

Malgré une participation importante des frais par la Confédération, cette prise en charge a occasionné 6,5 millions de francs de frais supplémentaires au titre de l'encadrement.

M. Torracinta ne cache pas son pessimisme quant à l'avenir. Aussi informe-t-il que l'aide consentie par l'Etat (90 millions de francs «in globo»), couvre les obligations de l'Hospice général de manière très juste. Les conditions économiques actuelles inclinent à prévoir un budget de 100 millions de francs par an pour les deux ans à venir, lorsque l'on sait que 100 chômeurs en fin de droit génèrent une dépense de 2,5 millions de francs.

Il conclut en disant: si la dotation de 12 millions de francs provenant du droit des pauvres était supprimée, elle devrait être compensée par une subvention de l'Etat. En effet, pour lui, l'origine du fond importe peu. Pour 1996 nous avons eu besoin de 90 millions de francs.

NOMBRE DE CHÔMEURS ET OFFRES D'EMPLOI

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Nombre de chômeurs

5 509

9 644

14 580

15 680

14 279

14 653

16 215

Offres d'emploi

1 336

1 162

766

681

763

440

974

PRESTATIONS DE L'HOSPICE GÉNÉRAL LIÉES AU CHÔMAGE

1994

1995

1996

19971

A

285

286

315

435

B

264

143

99

74

C

276

323

401

473

D

91

99

100

67

1 Juillet 1997.

A. Complémentaires aux indemnités chômage, PCMM ou ET.

B- Fins de droits.

C. Sans droits = sans droit aux indemnités chômage, PCMM ou ET.

DD. Demande d'ET = en attente à l'OCE d'un emploi tempo.

REVENU MINIMUM CANTONAL D'AIDE SOCIALE

1995

1996

1997fin juillet

Nombre de dossiers (= chômeurs fin de droits)

981    

1 328    

891    

Coût moyen par dossier

2 197,35

1 951,50

2 034,70

Montant versé par année

18 457 727,50

27 902 669,60

12 989 494,60

ACTE 5: les propositions des commissionnaires

Les discussions, au sein de la commission, reprennent: supprimer, pas supprimer, enlever un petit bout ici, rajouter un petit bout là, faire plaisir aux uns et aux autres, etc. Bref, après plusieurs séances déjà, rien n'a encore été résolu. Certains commissaires ayant fait des propositions demandent au département de justice et police et des transports de faire les simulations financières allant dans le sens de ces propositions.

Il s'agit des propositions de MM. Bénédict Fontanet et Jacques Boesch, ce dernier, toutefois, en son nom personnel, l'Alliance de gauche étant, quant à elle, opposée à la suppression du droit des pauvres.

Le département fait également une simulation économique de sa proposition.

1. Proposition de M. Bénédict Fontanet (DC)

- suppression du taux de 5% grevant le caritatif;

- baisse de 50% de la taxe sur toutes les manifestations culturelles et sportives;

- maintien de la taxe actuelle sur les jeux, éventuellement augmentation du taux et ouverture d'une deuxième salle pour compenser.

Produit brut de la taxe 1996  20 467 892 F

Suppression du taux de 5% - 492 200 F

Baisse de 50% sur culturel

et sportif) - 4 547 396 F

Diminution du produit de la taxe - 5 039 596 F 15 428 296 F

Agrandissement de la salle

des machines à sous

(200 machines au lieu de 109) + 1 767 622 F 17 195 918 F

Taux de la taxe sur les 200 machines

porté à 25% (identique

à Montreux)  + 3 263 302 F 20 459 220 F

- L'ouverture d'une deuxième salle de jeux de 200 machines, au taux de 13%, équivaut à une recette supplémentaire de 3 535 244 F.

2. Proposition de M. Jacques Boesch (AdG)

- Suppression complète de la taxe, sauf sur les jeux.

Produit brut de la taxe 1996  20 467 892 F

Diminution du produit de la taxe - 7 768 550 F 12 699 342 F

Agrandissement de la salle

des machines à sous

(200 machines au lieu de 109) + 1 767 622 F 14 466 964 F

Taux de la taxe sur les 200 machines

porté à 25% (identique

à Montreux)  + 3 263 302 F 17 730 266 F

Pour atteindre l'équilibre, la taxe

devrait être portée à 35%  + 2 719 418 F 20 449 684 F

- L'ouverture d'une deuxième salle de jeux de 200 machines, au taux de 25%, équivaut à une recette supplémentaire de 3 399 273 F.

3. Proposition du département de justice et police et des transports

1. Abaissement du taux ordinaire de 13 à 10%.

2. Abaissement du taux réduit de 10 à 7% (excepté sur les loteries nationales et romandes).

3. Suppression du taux réduit de 5% (exonération du caritatif).

4. Suppression de la taxe de 25 centimes sur les billets de faveur gratuits.

Produit brut de la taxe 1996  20 467 892 F

1. Diminution de la taxe (13 à 10%) - 3 505 587 F

2. Diminution de la taxe (10 à 7%) - 242 897 F

3. Suppression du taux réduit de 5% - 492 205 F

4. Suppression de la taxe de 25 c - 92 321 F

Diminution de la taxe - 4 333 010 F 16 134 882 F

Agrandissement de la salle

des machines à sous

(200 machines au lieu de 109) + 1 767 622 F 17 902 504 F

Taux de 13% sur les machines à sous

porté à 25% (identique

à Montreux)  + 3 262 302 F 21 165 806 F

Si les commissaires de l'Entente penchent plutôt en faveur de la proposition de M. Fontanet, ils observent également des points positifs dans celle de M. Boesch.

En revanche, la gauche et les Verts restent sur leurs «pattes arrière» et la condition de la compensation par des recettes équivalentes est sans appel ! Avant de poursuivre nos travaux, le président renvoie les commissionnaires dans leurs groupes, à charge pour eux de revenir avec des positions afin de pouvoir procéder au vote sur ce projet de loi.

Au retour de nos groupes, les positions des uns et des autres - et c'est une lapalissade - n'ont pas varié et l'unanimité (!) souhaitée au début de nos travaux ne s'est pas réalisée.

En ce qui concerne l'Alliance de gauche, aujourd'hui encore moins qu'hier l'Etat ne saurait se passer de la recette du droit des pauvres ! L'apport de recettes supplémentaire rêvé par certains par le biais de l'augmentation du nombre de machines à sous (de 109 à 200) et l'agrandissement de la salle (qui est en cours) reste aléatoire. En effet, rien ne prouve qu'il y aura forcément plus d'amateurs pour ces petits objets. En revanche, cette opération sera surtout rentable pour l'exploiteur ! De plus, comme déjà dit, la Confédération ne tient pas à une multiplication de salles de jeux et elle veut, de surcroît, les contrôler. Les cantons risquent même d'être pénalisés dans le projet fédéral... Des recettes compensatoires de ce côté-là ne sont donc pas du tout garanties ! Et l'Alliance de gauche de préciser, encore une fois, qu'en cas de suppression de la taxe du droit des pauvres, l'Etat devra compenser, par le budget ordinaire, la subvention dévolue à l'Hospice général.

Pour les socialistes, il n'est pas question que l'on touche au droit des pauvres, mais ils seraient favorables à une augmentation des taxes sur les machines à sous, sans diminution sur les autres activités, afin de favoriser de nouvelles recettes.

Comme leurs collègues de l'Alliance de gauche et du parti socialiste, les Verts insistent également pour une compensation des recettes et, de ce fait, sont aussi opposés à la suppression du droit des pauvres.

Quant à l'Entente... eh bien, ça ne s'entendait plus très bien et ils avaient passablement perdu de leur arrogance et leur projet de loi était en train de prendre l'eau de toutes parts !

Les membres du parti démocrate-chrétien ne se sont pas concertés entre eux. De plus, un des leurs découvre qu'il est du conseil d'une des organisations professionnelles que nous avons auditionnées... et il se retire de la commission. Il n'a pas été remplacé. Il est vrai, comme nous l'avons déja dit, que les commissionnaires de ce parti, tout en étant favorables à des modifications de la taxe du droit des pauvres (voir proposition Fontanet citée plus haut), étaient opposés à sa suppression pure et simple.

Les plus fermes à camper sur leurs positions étaient les radicaux et les libéraux, ces derniers préconisaient un essai de la loi sur deux ans et suggéraient un taux de 25% de la taxe sur les machines à sous contre 5% sur les loteries professionnelles, dans le sens proposé par M. Boesch (voir sa proposition plus haut).

ACTE 6: Faites vos jeux... rien ne va plus !

La «compétitivité [quel mot stupide à orthographier] et l'avenir dynamique de Genève» auront pris du plomb dans l'aile !

Bref, la pièce n'était pas bonne... les acteurs, pas toujours à la hauteur... le peu de succès du spectacle en est la preuve puisque l'histoire se termine en eau de boudin ! Les discours oniriques, souvenez-vous, lors du débat de préconsultation au Grand Conseil, n'auront été qu'une chimère.

Nous sommes au terme de nos travaux en commission, cependant, avant de conclure, Mesdames et Messieurs les député(e)s, je me dois de vous conter cette petite histoire digne du «Canard enchaîné», au risque de me le voir reprocher, si je ne le fais pas, le restant de ma vie de citoyenne par les auteurs du projet de loi !

Tout d'abord, la commission (in corpore) mérite un grand «pan sur le bec», mais le président, M. Nicolas Brunschwig, en mérite un bien plus grand encore. En effet:

- le 7 février 1997, la commission avait voté l'entrée en matière du projet de loi 7467. Résultat: OUI = 6 voix. NON = 4 voix.

- Au cours de la séance du 11 avril 1997, M. Brunschwig se souvenait que la commission avait déjà voté l'entrée en matière et qu'elle aurait, sauf erreur ou omission, dû traiter et voter article par article... ce projet de loi !

MAIS, est-ce la veille du solstice de l'été ou de la Fête de la Musique? le 20 juin 1997, la commission, comme un seul homme (et femme), avait oublié ce qui s'était dit et fait aux mois de février et avril 1997 (!) et a voté POUR LA SECONDE FOIS L'ENTRÉE EN MATIÈRE du projet de loi 7467 dont le résultat sera le suivant:

ENTRÉE EN MATIÈRE DU PROJET DE LOI 7467

OUI  = 5 voix (3 L, 1 R, 1 PDC)

NON  = 6 voix (3 AdG, 2 PS, 1 Ve)

«Le président constate que la commission ne peut aller plus avant dans ses travaux et lève la séance» (in: procès-verbal du 20 juin 1997) et ouvre l'inscription des rapporteurs, que l'on ne vous présentera pas !

Cette petite histoire prouve que nos institutions sont bien faites (mieux que la tête des humains...), car la décision finale - et c'est cela le plus important - vous appartient !

Au cours de cette dernière séance, M. Balestra annonce qu'il retirera la motion 1066.

Mme Reusse-Decrey préfère attendre la décision de la Confédération et demande à réfléchir quant à l'opportunité de maintenir les projets de loi 6916 et 7122 en suspens.

Ainsi donc, au nom de la majorité de la commission, je vous invite également, Mesdames et Messieurs les député(e)s, à refuser cette entrée en matière et, partant, à refuser ce projet de loi 7467.

3. Du passé, ne faisons pas table rase !

Il faut parfois se plonger dans le passé pour mieux appréhender notre présent et viser notre futur. Pourquoi l'existence du droit des pauvres? Et à quoi, il sert? Moteur ! Action !

La bise glaciale de ce 8 décembre 1845 tourne comme un vieux fantôme dans la cour de l'Hôtel de ville. Dans la lumière laiteuse du jour finissant, on voit des ombres s'agiter derrière les grandes vitres éclairées de la salle du Grand Conseil. A l'intérieur, le 3e débat s'ouvre sur un projet de loi «relatif à la fixation et au mode de perception de la taxe sur les spectacles».

Il fallait faire face à l'indigence et des recettes moins précaires s'imposaient.

Jusqu'en 1845, seules les communes prélevaient un droit sur les spectacles. Des arrangements étaient possibles lorsqu'«il y avait déficit dans la recette». Ce que les textes nous apprennent est l'inscription dans la loi d'un fait déjà largement pratiqué, sur le plan communal, mais le but était d'assurer des revenus plus réguliers au «Bureau de bienfaisance» qui dépendait du département de justice et police.

Le 30 janvier 1886, la loi de 1845 est modifiée, car «l'ancienne loi accordait une trop grande latitude d'appréciation à la Direction de la police et l'exposait aux sollicitations presque irrésistibles des directeurs de spectacles qui prétendaient avoir subi des pertes dans leur entreprise et réussissaient souvent à payer une faible indemnité» (in: Mémorial - Séance du 30 janvier 1886, pages 30 et suivantes). Cette dernière loi fixait un taux maximum de 8% de la recette brute: variant entre 3 et 8% pour les spectacles et de 5 à 10% pour les spectacles temporaires.

Les députés constatèrent une diminution considérable des recettes et espéraient, avec l'acceptation de cette nouvelle loi, pouvoir relever «le rendement de la taxe et fournir ainsi à l'Hospice général, au profit de qui elle est perçue, un supplément de recettes dont, il a, le plus grand besoin» (ibid.).

Jusqu'à ce jour, cette loi n'a subi que quelques modifications de forme touchant, essentiellement, le niveau des taux de perception.

Pourtant, la loi du 18 juin 1927 apportera un changement de taille, à savoir: la rétrocession de 70% du produit à l'Hospice général et 30% à l'Etat à «charge pour lui d'affecter sa part à des oeuvres de bienfaisance» (Mémorial, Séances des 8 mars et 31 mai 1930).

Ainsi donc, durant plus de 150 ans, personne n'avait eu l'idée de vouloir la suppression de cette taxe. Ces lois ont été adoptées souvent à l'unanimité. En 1930, en acceptant une nouvelle modification de la loi (et l'on connaît les années de crises de cette période), les députés l'ont fait «sous peine de voir péricliter cette utile institution» [l'Hospice général] (ibid.).

De ce passé-là, ne faisons pas table rase et ne nous voilons pas la face, la précarité et ses funestes conséquences humaines s'installent et elles investissent déjà les beaux quartiers.

4. Pour ou contre l'abolition(de la taxe du droit des pauvres)

- Ursula Petzold, aministratrice de la Comédie: «Toute économie serait bienvenue, vu la baisse de nos subventions. Cependant, je serais mal à l'aise de la faire sur le dos des pauvres. Encore, si on était en période de vaches grasses... Mais actuellement on a de plus en plus besoin de l'Hospice général. En fait, s'il n'y a pas d'alternative pour compenser la suppression de cette taxe, il vaut mieux la garder.»

- Mme Perrière, propriétaire des cinémas Scala: «Je suis résolument contre le droit des pauvres. La charge est trop importante sur le billet et les spectateurs nous le reprochent souvent. Nous sommes prêts à baisser nos tarifs de 13% si cette taxe est abolie. D'ailleurs, nous affichons déjà les prix éventuels pour montrer à notre public ce qu'il en serait.»

- Christophe Marzal, copermanent du cinéma Spoutnik: «Pour vous dire franchement, nous étions contre le droit des pauvres. On s'était même imaginé se mettre dans l'illégalité et ne plus payer cette taxe très lourde pour nous. Or, après avoir lu dans la presse à quoi l'argent sert, on estime maintenant que ce prélèvement est juste. On a augmenté nos tarifs de 1 F au début de l'année pour pouvoir continuer à le verser. Cette légère hausse n'a pas changé la fréquentation et nous restons accessibles à 11 F l'entrée».

- Mme Widmer, responsable de l'AMR: «Pas simple ! Tant qu'on n'aura pas trouvé un moyen de compenser le trou que causerait une suppression du droit des pauvres, je ne vois pas pourquoi on l'enlèverait. C'est une charge, c'est sûr ! On en a parlé entre nous. Il en ressort que nous sommes conscients de l'affectation de ces sommes et qu'il nous faut regarder plus loin que nos porte-monnaie».

- Jack Yfar, directeur de l'agence Jack Yfar Farine Jacky: «J'ai toujours été contre. Cette taxe répondait à une nécessité jusqu'au début de la guerre, avant qu'on ait les assurances, la retraite, etc. Mais, et on le cache, la majorité de cet argent part aujourd'hui chez les refugiés et les requérants d'asile. Je veux bien qu'on les aide, mais après avoir soutenu les personnes âgées ou les démunis suisses. De plus, l'Hospice général engouffre d'énormes sommes dans son administration avec ses 900 fonctionnaires qui ne sont peut-être pas tous utiles. Pour devenir à la taxe, on pourrait au moins la baisser à 6,5%, comme la TVA, et s'il faut vraiment financer l'Hospice, on trouvera ailleurs, par exemple en taxant l'abonnement aux chaînes privées de télévision thématique.»

(PL 7467)

PROJET DE LOI

modifiant la loi générale sur les contributions publiques(taxe sur les jeux d'adresse et de hasard)

(D 3 05)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

TITRE IX

Taxe sur les jeux d'adresse et de hasard

(nouvelle teneur)

Art. 443 (nouvelle teneur)

1 Il est institué une «taxe sur les jeux d'adresse et de hasard» dont le produit, sous déduction des frais de perception et de contrôle, est versé à raison de:

a)

70% à l'Hospice général;

b)

30% à l'Etat, pour être affectés à des activités et à des entreprises en faveur de la santé publique et du bien-être social.

2 Toute allocation prise sur la part attribuée à l'Etat doit faire l'objet d'une loi si elle atteint ou dépasse la somme de 10 000 F pour la même oeuvre et dans la même année.

Art. 444 (nouvelle teneur)

1 Cette taxe est due sur tous les jeux d'adresse et de hasard organisés par les casinos ainsi que les loteries, les paris et les tombolas de tous genres.

2 Elle est perçue par l'entreprise ou les organisateurs responsables pour le compte de l'Etat; elle est immédiatement exigible.

3 Le département de justice et police et des transports surveille et dirige la perception de la taxe. Il prend toutes mesures nécessaires pour le contrôle des recettes.

Art. 445 (nouvelle teneur)

La taxe s'élève à 13% de la recette brute versée par l'ensemble des joueurs sous réserve cependant des exceptions suivantes:

a)

elle est réduite à 10% pour les loteries et tombolas organisées par les sociétés locales pour autant que ces manifestations ne comportent pas, à un titre quelconque, l'exercice d'une activité professionnelle ou commerciale, même accessoire, soit au profit de la société elle-même, soit de ses membres, soit encore d'autres personnes;

b)

elle est de 5% pour les loteries, paris, tombolas et autres jeux d'adresse et de hasard dont le produit net est intégralement versé à des oeuvres de bienfaisance.

Art. 446 et 447 (abrogés)

Art. 448 (nouvelle teneur)

1 Quiconque organise pour son compte ou pour le compte d'autrui un ou des jeux de hasard est tenu de se munir préalablement d'une autorisation du département de justice et police et des transports, de lui fournir les renseignements ou justifications nécessaires, notamment en ce qui concerne les recettes, de percevoir la taxe légalement due et d'en opérer le versement au département de justice et police et des transports dans le délai fixé.

2 Si les organisateurs n'ont pas accompli ces formalités dans le délai fixé, s'ils ne les ont accomplies qu'en partie ou s'ils ont refusé de fournir les renseignements et justifications demandés, ils peuvent être taxés d'office par le département de justice et police et des transports, d'après les indications dont il dispose, cela sans préjudice des mesures administratives ou pénales dont ils peuvent être l'objet.

3 S'il le juge nécessaire, le département de justice et police et des transports peut exiger le dépôt préalable de sûretés.

Art. 450 (nouvelle teneur)

1 Les contrevenants aux dispositions du présent titre ou de ses règlements d'exécution et ceux qui, de quelque manière que ce soit, entravent ou tentent d'entraver le contrôle de la taxe sur les jeux de hasard, notamment en refusant de fournir au département de justice et police et des transports ou à ses représentants les renseignements nécessaires, ou fournissent des renseignements incomplets ou inexacts, sont passibles de peines de police.

2 Ceux qui, sciemment, frustrent ou tentent de frustrer en totalité ou en partie la taxe sur les jeux d'adresse et de hasard sont passibles de l'emprisonnement jusqu'à un an et de l'amende jusqu'à 10 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement, sans préjudice du paiement des droits éludés.

Art. 452 (nouvelle teneur)

Indépendamment des sanctions pénales ci-dessus, le département de justice et police et des transports peut ordonner la fermeture temporaire ou définitive de tout établissement qui refuse, soit de percevoir la taxe sur les jeux d'adresse et de hasard, soit de la verser dans sa totalité au département de justice et police et des transports dans le délai fixé, ou qui a contrevenu à réitérées reprises aux dispositions du présent titre ou de ses règlements d'exécution.

Art. 2

Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

(PL 7122)

PROJET DE LOI

modifiant la loi sur l'exercice des professions ou industriespermanentes, ambulantes et temporaires

(I 2 03)

(salle de jeux)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi sur l'exercice des professions ou industries permanentes, ambulantes et temporaires, du 27 octobre 1923, est modifiée comme suit:

CHAPITRE II A (nouveau)

Salle de jeux

Art. 16 A (nouveau)

1 Dans le dessein de favoriser le tourisme, le Conseil d'Etat peut autoriser l'ouverture d'une salle de jeux destinée à l'exploitation d'appareils automatiques à sous servant aux jeux d'adresse avec gains en argent et relevant, en vertu du droit fédéral, de la législation cantonale. L'autorisation est soumise notamment aux conditions suivantes:

a) la salle de jeux peut être ouverte en un autre lieu que la salle de jeux de la boule au bénéfice d'une autorisation d'exploiter un kursaal au sens de la loi fédérale sur les maisons de jeu, du 5 octobre 1929, et de l'ordonnance fédérale concernant l'exploitation des jeux dans les kursaals, du 1er mars 1929;

b) la salle doit être située en ville de Genève en un lieu accessible aux touristes et indépendant d'un établissement hôtelier; l'âge d'admission à la salle est fixé à 20 ans révolus;

c) elle doit être exploitée par une société d'exploitation dont 75% au moins du capital-actions doit être propriété de l'Etat ou de la Ville de Genève;

d) les actions détenues par des particuliers, qui ne doivent pas être intéressés par la mise à disposition des appareils à sous, mais qui sont qualifiés pour participer à la gestion de la salle de jeux, sont nominatives et font l'objet d'une mise en soumission publique par la société d'exploitation tous les cinq ans; elles sont déposées en nantissement auprès d'un notaire et remboursées à leur acquéreur à leur valeur nominale si le conseil d'administration de la société d'exploitation, après une remise en soumission, porte son choix sur d'autres partenaires pour participer à la gestion de la salle;

e) les prestations aux tiers, notamment les loyers des appareils à sous qui doivent faire l'objet d'appels d'offres périodiques, ainsi que les investissements doivent figurer dans les comptes d'exploitation et être rémunérés et amortis conformément aux taux usuels qui seront fixés par le Conseil d'Etat;

f) le dividence versé aux actionnaires ne doit pas dépasser un taux de 10% par rapport au montant des actions, le solde du bénéfice revenant à la Ville de Genève, commune du lieu de situation de la salle de jeux, qui doit affecter ce bénéfice à des activités récréatives, culturelles ou sociales;

g) les statuts - de même que ses modifications éventuelles -, les contrats de location des appareils à sous ainsi que les comptes de la société d'exploitation seront soumis à l'approbation du Conseil d'Etat; il en est de même des contrats de mise à disposition des machines à sous, dont les bénéficiaires ne peuvent être associés à leur exploitation, ainsi que d'éventuels contrats entre actionnaires.

2 Le Conseil d'Etat fixe par règlement les autres conditions applicables à l'exploitation d'appareils à sous.

Art. 2

La présente loi entre en vigueur dès son approbation. Le Conseil d'Etat est chargé, dès cette entrée en vigueur, d'appliquer les nouvelles conditions à la société d'exploitation du Casino de Genève SA, mise au bénéfice de l'autorisation du 20 février 1991 d'exploiter des distributeurs automatiques basés sur le jeu de l'argent dans l'attente de la décision de maintenir cette salle ou d'en ouvrir une nouvelle en lieu et place. A cette fin, il détermine le montant des investissements consentis pour la création de la salle de jeux affectée à ces appareils et la part de ceux-ci qui aurait dû être amortie en fonction du rendement financier qu'a retiré l'exploitant de la salle.

(PL 6916)

PROJET DE LOI

modifiant la loi sur l'exercice des professions ou industriespermanentes, ambulantes et temporaires

(I 2 03)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur l'exercice des professions ou industries permanentes, ambulantes et temporaires, du 27 octobre 1923, est modifiée comme suit:

Art. 14, al. 1, lettre e, 2 dernières phrases(nouvelle teneur)

(...) Toutefois, de tels distributeurs peuvent être autorisés si leur exploitation est assurée soit par un établissement au bénéfice d'une autorisation de cabaret-dancing au sens de la loi cantonale sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement, du 17 décembre 1987, soit par un établissement au bénéfice d'une autorisation d'exploiter un kursaal au sens de la loi fédérale sur les maisons de jeu, du 5 octobre 1929. Le Conseil d'Etat est habilité à fixer l'âge d'admission et à déterminer la part des bénéfices d'exploitation de ces distributeurs qui doit être attribuée au profit du tourisme dans le canton de Genève.

(M 1066)

PROPOSITION DE MOTION

concernant les jeux d'adresse et de hasard

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- la réforme de l'article 35 de la constitution fédérale adoptée par le peuple suisse en mars 1993 sur la levée de l'interdiction des maisons de jeu, réforme qui réserve désormais aux cantons la compétence dans le secteur des machines à sous;

- le risque d'échauffement incontrôlé des activités de jeux de l'argent;

- le risque de concurrence anarchique et malsaine que pourraient entraîner aussi bien la privatisation des salons de jeux et des casinos que leur cantonalisation;

- la nécessité de maintenir leur caractère d'utilité publique aux gains réalisés dans le secteur des jeux et par conséquent de garantir la remise de ces gains à l'Etat ou aux institutions qu'il contrôle;

- la nécessaire réforme à apporter à l'actuel «droit des pauvres» et la baisse des recettes qui en découlera pour l'Etat et l'Hospice général,

invite le Conseil d'Etat

- à promouvoir la conclusion par les cantons romands d'une convention relative à un organisme chargé de coordonner et de contrôler, à des fins d'utilité publique, l'exploitation des jeux autorisés autres que ceux de loteries, dans les cantons romands;

- à confier à cet organisme la gestion des salles de machines à sous ou d'adresses ou de kursaals dont il autorisera l'ouverture.

Premier débat

Le président. La rapporteuse de majorité est Mme Claire Chalut, remplacée par M. Christian Grobet. Le rapporteur de minorité est M. Michel Balestra. Mais ce rapport n'a pas été déposé... Il n'y a donc pas de rapport de minorité.

Monsieur le rapporteur de la majorité, enfin, le rapporteur tout court, vous avez la parole si vous avez quelque chose à ajouter au rapport de Mme Chalut.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. En ce début de législature, avec la venue de nouveaux députés dans ce conseil, il n'est pas inutile de donner quelques explications au sujet de l'excellent rapport présenté et rédigé par Mme Claire Chalut. Bien entendu, elle aurait souhaité le défendre, mais elle ne s'est pas représentée aux suffrages des citoyens et citoyennes de ce canton.

Par rapport au précédent débat, les projets de lois se succèdent et se ressemblent ! Celui qui a été déposé par les députés Balestra, Howald, Kunz, Lacour, de Tolédo et Wavre a pour objet de supprimer l'un des plus anciens impôts de notre canton. J'ai voulu me renseigner, mais M. le conseiller d'Etat Ramseyer qui bénéficie de services compétents pourra mieux encore en retracer l'historique. Selon M. Bolle, cet impôt remonte au XVIIIe siècle. On en trouve trace dans une loi de 1815 et, bien entendu, Messieurs les radicaux, en 1845, en pleine époque fazyste ! Une époque qui vous est certainement très chère, n'est-ce pas, Monsieur l'historien Lescaze ! (Brouhaha.)

Cette loi a été renouvelée à plusieurs occasions, notamment à la fin du XIXe siècle. A cette époque, les radicaux avaient, sauf erreur, la majorité absolue dans ce conseil...

M. Daniel Ducommun. C'était la belle époque !

M. Christian Grobet, rapporteur. Oui, vous n'avez pas tout à fait tort, Monsieur Ducommun : à cette époque, le parti radical se situait à gauche ! (Rires.) Cela reviendra peut-être dans cette législature et, dans un élan de générosité, vous oublierez qui a déposé le projet de loi en question pour vous rallier à la position de la gauche ! Nous en serions heureux... (Exclamations.) Ah ! Je ne crois pas si bien dire ? Voulez-vous prendre ma place, Monsieur Ducommun ?

Le président. Venez-en aux faits, Monsieur le rapporteur !

M. Christian Grobet, rapporteur. Ce droit des pauvres est une fort ancienne institution de notre République. Elle taxait les divertissements, afin d'en faire profiter les personnes les plus démunies. Tel est le cas encore aujourd'hui, puisqu'en vertu des articles 443 et suivants de la loi sur les contributions publiques le titre neuvième de cette loi - ces dispositions que le projet de loi 7467 veut abroger - il est indiqué que le droit des pauvres revient à 70% à l'Hospice général et à 30% à l'Etat pour être affecté à des entreprises en faveur de la santé publique et du bien-être social.

S'il y a un impôt social par excellence, c'est bien le droit des pauvres ! C'est un des rares impôts affectés, et son produit doit effectivement profiter aux plus démunis de cette République.

Son rendement est de l'ordre de 19 millions par année et, dans la situation de crise actuelle où certains de nos concitoyens sont arrivés, hélas, au bout de leurs droits sociaux, la tâche de l'Hospice général s'est considérablement accrue pour répondre aux besoins d'une partie de la population vivant de manière de plus en plus précaire, à l'écart des plus favorisés...

M. John Dupraz. Tu parles comme un conseiller d'Etat !

M. Christian Grobet, rapporteur. Merci, Monsieur Dupraz, je compte sur votre suffrage ! (Rires.) Il n'en tient qu'à vous !

Nous avouons ne pas comprendre comment en cette période de crise sociale certains députés ont pu proposer de supprimer une recette provenant d'une des plus anciennes institutions genevoises. Il est vrai que des pressions ont été exercées par certains milieux...

Une voix. Lesquels ?

M. Christian Grobet, rapporteur. Je vais vous le dire ! Ces milieux ont été entendus par la commission ad hoc qui a examiné ce projet de loi. En tête, on trouve le responsable de l'exploitation d'une grande salle construite à Cointrin, dont je me félicite au demeurant, mais je trouve assez incongru que cette personne bénéficiant directement de prestations importantes de l'Etat - cette salle a été construite en vertu d'un droit de superficie gratuit, sauf erreur - de prêts de 10 millions de l'Etat et de 3 millions de la Ville de Genève, d'un parking construit par la Fondation des parkings, réclame en plus la suppression du droit des pauvres. Je trouve cela inconvenant.

Inconvenant, également, que certains gros exploitants de cinéma - n'oubliez pas qu'en Suisse romande il existe une société aux dividendes extrêmement confortables en train de créer une situation de monopole - essaient de nous faire croire que pour faire survivre les salles de cinéma il faudrait supprimer le droit des pauvres et que la concurrence de l'autre côté de la frontière serait de nature à mettre en péril les salles genevoises, comme si les gens étaient prêts à faire 10 km en voiture pour aller au cinéma !

Par ailleurs, la presse a relevé que malgré l'attrait représenté par la mise en exploitation d'un complexe multisalles le taux de fréquentation des cinémas genevois n'a pas baissé. (Exclamations.) Je vois que nous avons deux points communs et que nos prévisions se rejoignent, Monsieur Lescaze ! En effet, les cinémas genevois ne subiront pas de préjudice suite à l'ouverture de ces salles et les députés libéraux qui prônent la concurrence à longueur d'année devraient se déclarer satisfaits de l'ouverture d'un tel complexe. Du reste, les propriétaires de salles, à Genève, ont effectivement amélioré leur offre, car les places commençaient tout de même à atteindre des prix un peu élevés, notamment pour les jeunes.

Ce n'est pas la taxe pour le droit des pauvres qui va entraîner la mort des salles de cinéma, mais bien les loyers exigés par les propriétaires d'immeubles. (Exclamations.) Vous secouez la tête, mais je connais des salles qui ont fermé à cause des loyers ! Il s'agit du Manhattan et d'une autre salle à la rue de Carouge...

M. Claude Blanc. L'Empire !

M. Christian Grobet, rapporteur. Vous allez peu au cinéma, Monsieur Blanc ! (Rires.) Votre côté spirituel vous retient ! Vous ne vous souvenez que de l'Empire ! Mais, dans cette rue, il y avait le Corso où j'allais, gamin. Enfin, à chacun ses cinémas ! Notez que l'Empire a également eu des ennuis avec son bailleur... Le Manhattan a donc été fermé en raison du loyer exigé à la suite d'un achat spéculatif. Par la suite, cet immeuble est tombé en faillite. Ce qui démontre bien qu'il avait été acheté à un prix excessif...

Le président. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous conclure ? Il vous reste une minute !

M. Christian Grobet, rapporteur. Il est vrai que si les milieux économiques voulaient favoriser les salles de cinéma à Genève, il faudrait peut-être appliquer les recommandations de l'Asloca et procéder à des baisses de loyer parfaitement légitimes en raison de la diminution du taux de l'intérêt hypothécaire, plutôt que de réclamer la suppression de taxes pour les indigents de la République !

Les auteurs du projet de loi ont, avec une certaine habileté, cherché une compensation. Les nouveaux députés ne se sont peut-être pas rendu compte en lisant ce projet de loi que le titre 9 soumis à votre approbation...

Le président. Veuillez conclure, Monsieur le rapporteur ! Votre temps de parole est écoulé...

M. Christian Grobet, rapporteur. ...et qui s'intitule : «Taxe sur les jeux d'adresse et de hasard» remplace les dispositions sur le droit des pauvres. Mais le rendement de cette taxe n'est en aucune façon garanti, bien au contraire !

La seule conséquence possible de l'adoption de ces dispositions serait de priver la Ville de Genève d'une recette dont elle a absolument besoin. Je vous remercie, Monsieur Ramseyer - je vous rends parfois des compliments - d'avoir trouvé avec la Ville de Genève...

Le président. Monsieur le rapporteur, je suis obligé de vous interrompre.

M. Christian Grobet, rapporteur. Cela devrait vous faire plaisir que je félicite un représentant de l'Entente... à la veille des élections !

Le président. Oui, mais enfin vous avez largement dépassé votre temps de parole ! Vous pourrez la reprendre tout à l'heure...

M. Christian Grobet, rapporteur. J'espère que cette taxe servira aux affaires culturelles et, par voie de conséquence, je vous invite à refuser ce projet de loi, à maintenir le droit des pauvres et la taxe sur le produit des jeux de hasard tels qu'ils existent actuellement dans la loi.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Le droit des pauvres est régulièrement remis en question. A n'en pas douter, et quelle que soit l'issue du vote de ce soir, il le sera encore. Nous préférerions tous le voir supprimer, et les recettes qu'il engendre, tomber du ciel !

Forts de la conviction que toute sous-enchère fiscale est économiquement dynamique, quelques extrémistes libéraux et radicaux nous ont donc soumis le projet de loi 7467. L'ensemble des groupes politiques, y compris les auteurs du projet d'ailleurs, ne remet pas en cause la loi sur l'Hospice général et, par là même, son budget.

Dans l'hypothèse d'une abolition ou d'une diminution des recettes du droit des pauvres, d'où pourrait venir la compensation ? Premièrement, d'une très hypothétique attribution au canton de nouvelles ressources des jeux de hasard. Mais cette ressource est convoitée par toutes les collectivités publiques, à commencer par la Confédération. Elle nous laisse donc peu de place, sinon pour le rêve...

La deuxième possibilité serait une contribution supplémentaire par le budget ordinaire de l'Etat. Ben voyons ! Les «yakas», comme les a appelés la rapporteuse, ne séduisent ni M. Vodoz ni nous. Notons au passage que ne serait plus assuré le montant des 30% de recettes du droit des pauvres gérées par le DASS, à travers lesquels ce Grand Conseil a voté - et votera encore souvent, je l'espère - à l'unanimité des aides ponctuelles aux démunis d'ici et d'ailleurs pour des projets de développement social.

Pour terminer, je relèverai ce que Mme Maulini-Dreyfus, membre de la commission, nous a donné comme informations au caucus. Les auditions ont été parfois assez étranges. Les uns présentant des déficits strictement équivalents au droit des pauvres; les autres estimant que le droit des pauvres est le facteur discriminatoire pour des expositions internationales à Genève, hors Union européenne; d'autres, enfin, ne savaient pas exactement qui du client ou du producteur payait le droit des pauvres, ni à qui bénéficierait son abolition.

L'intervention la plus réfléchie restera celle que vous trouverez dans le rapport des coprésidents du cinéma Spoutnik. Au départ, ils se sont demandé pourquoi il y avait un droit des pauvres. Lorsqu'ils ont su à quoi il servait, ils l'ont admis. Leurs propos sont reproduits en page 25 du rapport. Notre groupe soutient leur audition ainsi que le rapport de Mme Chalut.

M. Nicolas Brunschwig (L). Je m'excuse d'aborder une fois de plus un débat fiscal, ce soir. Le premier était suffisamment lourd pour ne pas en générer un deuxième... Malheureusement, la nouvelle majorité a voulu que ces deux sujets soient abordés en priorité; nous le faisons donc.

Une voix. C'est ton projet !

M. Nicolas Brunschwig. Bien évidemment !

La position du parti libéral sur le droit des pauvres figure assez clairement dans les propositions faites par un ancien député de l'Alliance de gauche, M. Jacques Boesch. A la page 20 du rapport, il propose de supprimer le droit des pauvres sur les prestations et les spectacles sportifs ou culturels, ainsi que sur les associations de type caritatif; de compenser cette diminution de recettes par le biais d'une augmentation du taux sur les jeux d'adresse et de hasard, les machines à sous, les différentes loteries et autres. D'élever le taux actuel de 13% - sauf erreur - à 25%, taux équivalent à celui du Casino de Montreux, par exemple.

Par le double effet de l'augmentation du nombre de machines à sous dans la salle du Casino - sauf erreur, on passerait bientôt de cent neuf à deux cents machines - et de l'augmentation du taux à 25%, sur un total de 20 millions, le manque à gagner par la suppression des droits sur les types d'activités que je viens de décrire étant de 7,8 millions, on regagnerait 5 des 7,8 millions. C'est dire que le manque à gagner ne serait plus que de 2 à 3 millions.

Par ailleurs, une large partie de ces associations ou de ces activités de type sportif, social ou culturel est subventionnée par les collectivités publiques. Exemple le plus éloquent, le Grand Théâtre paie environ 1 million pour le droit des pauvres. La majorité de ce Grand Conseil semblerait vouloir confirmer que nous sommes dans un système où l'Etat taxe d'un côté, pour redistribuer de l'autre en générant des activités administratives, des fonctionnaires, etc. Sans parler des fameuses taxes de faveur et des billets à 25 centimes dont l'impression coûte plus cher que la taxe !

Toutes les personnes - elles sont nombreuses dans cette enceinte - ayant organisé des manifestations connaissent bien ce type de complications administratives en fonction de la législation, quoi qu'en dise M. le conseiller d'Etat Ramseyer... A l'origine, il y avait sans doute des raisons, mais cela ne correspond plus aux réalités quotidiennes.

Nous estimions que ces pistes tout à fait intéressantes auraient dû permettre de dépasser le débat philosophique. Nous ne voulions pas supprimer l'argent permettant d'accorder des subventions; telle n'était pas notre volonté. Mais nous voulions rendre cette taxe beaucoup plus productive et ciblée, pour définir ceux qui doivent la payer en fonction de la nature de leurs activités.

Les propositions de M. le député Boesch étaient légitimes et intelligentes. Elles auraient pu obtenir un large consensus. Malheureusement, il n'est plus là pour les défendre, et nous n'aurons pas la majorité pour faire valoir ses arguments.

Heureusement pour la démocratie, une initiative est en cours. Elle permettra à la population de voter sur ce sujet.

M. Claude Blanc (PDC). Je voudrais rappeler le Bureau à son devoir de vigilance qui consiste à observer la salle pour voir quels sont les députés qui demandent la parole et, lorsqu'ils les ont vus, de leur donner quittance. Sinon, nous allons attraper des crampes ! Vous avez un apprentissage à faire, les uns et les autres, même si vous avez trente ans de Grand Conseil !

Le titre 13 de la constitution de la République et canton de Genève définit l'assistance publique dans les articles 168 à 170. L'article 169 dit que les organismes chargés de l'assistance publique sont l'Hospice général et les autres organismes publics ou privés auxquels la loi attribue de telles tâches. L'article 170 A, que le déficit des organismes chargés de l'assistance publique est couvert par un crédit porté chaque année au budget de l'Etat.

Quoi que l'on fasse, quoi que l'on veuille, la constitution nous oblige donc à financer les organismes d'utilité publique. Comme l'a dit notre excellent collègue Christian Grobet... (Rires.) ...nous l'avons toujours fait essentiellement par le droit des pauvres. Si, d'une manière ou d'une autre, nous devions le supprimer ou l'amputer, il faudrait bien trouver dans le budget ordinaire de l'Etat les ressources nécessaires pour financer ces actions, comme la loi nous y oblige.

Inutile de vous faire un dessin sur les finances actuelles de l'Etat ! Si l'on veut supprimer des recettes, il faut soit supprimer des dépenses soit trouver de nouvelles recettes. Il n'y a pas de miracle !

Or on nous dit qu'on pourrait remplacer le droit des pauvres, en partie du moins, en augmentant le nombre des bandits-manchots. Permettez-moi de vous dire que je ne mange pas de ce pain-là ! Je n'en ai jamais mangé, d'ailleurs. Voilà quelques années, lors d'un débat, une éminente députée socialiste s'était élevée contre ces bandits-manchots. Nous étions les deux seuls à la commission à nous arc-bouter pour les interdire. Et maintenant que vous en avez, vous voulez les augmenter. Je considère cela comme un moyen immoral de récolter de l'argent, car cela entraîne des excès. Dans tous les casinos français - celui de Cannes, par exemple - exploitant ces bandits-manchots, il y a eu des problèmes d'argent sale et de corruption. Nous n'en voulons pas chez nous.

Le droit des pauvres n'est en fait pas payé par les organisateurs de spectacles ou de manifestations sportives, mais par les consommateurs. Ce sont les spectateurs du Grand Casino qui versent des millions à l'Etat. De même, ce sont les clients qui paient la TVA.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, il faut mettre un terme à ce débat pharisien en refusant ces projets de lois et la motion.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Ce rapport et le projet de loi dont il est question, ce soir, peuvent être marqués du signe de la confusion. L'auteur du rapport de majorité aurait dit - je ne pense pas la trahir - «C'est du chenil !». Ceux qui se souviennent de Claire Chalut auront reconnu son vocabulaire.

Confusion déjà dans les titres des projets de lois mentionnés : ce rapport ne traite en fait que du projet de loi 7467, considérant la proposition de MM. Kunz et de Tolédo qui étaient, en particulier, les auteurs du projet. Les deux autres projets de lois ont été laissés en suspens en attendant que la loi fédérale soit votée. Enfin, M. Balestra s'était engagé à retirer la motion 1066, mais nous ne connaissons pas encore la décision de son groupe. En principe, nous ne devrions même pas avoir de rapport sur cette motion. Voilà pour les précisions concernant le texte même.

Les auteurs ont voulu supprimer le droit des pauvres. C'est une étrange coïncidence, Monsieur Brunschwig, qu'on en parle ce soir, après le projet de loi sur la diminution de la fiscalité. Vous voulez décidément vider les caisses de l'Etat sans jamais trouver de solutions pour les remplir !

Confusion encore lors des travaux en commission. On nous a affirmé à plusieurs reprises que cette suppression permettrait à différents propriétaires ou gestionnaires de milieux culturels de mieux s'en sortir en étant concurrentiels au niveau suisse. Mais, en même temps, au cours des travaux, le discours a changé. On nous a dit que cela permettrait au contraire de faire baisser les prix d'entrée. On n'a donc jamais su s'il s'agissait de faire un cadeau aux milieux culturels - aux propriétaires de salles de cinéma, par exemple - ou, au contraire, si le public allait bénéficier de la suppression de la taxe du droit des pauvres. On a essayé de poser la question à certains groupes et à certaines personnes auditionnées sans obtenir de réponse. Tous ont répondu de façon extrêmement vague...

On nous a également affirmé que le public souhaitait la suppression du droit des pauvres, en nous donnant pour preuve des articles du «GHI». En revanche, on n'a pas beaucoup relevé l'initiative d'un cinéma, cité, je crois, par Mme Fabienne Bugnon. Aux guichets, il était expliqué à quoi servait le droit des pauvres et la raison de cette taxe. Le public a manifestement apprécié cette initiative.

J'en viens à la question des machines à sous. Vos propositions ne permettent pas de combler le trou que vous vouliez faire. M. Blanc vient de souligner le premier aspect, celui de l'éthique. Nous avions fortement combattu l'initiative cherchant à libéraliser les grands jeux, car nous condamnons tout ce qui a rapport aux jeux. C'est la porte ouverte à des difficultés d'ordre social et cela met des familles dans des conditions pénibles. Il est donc hors de question de tabler sur une augmentation des jeux d'argent pour combler le trou que vous voulez creuser.

Deuxième point qui nous a semblé aberrant tout au long des travaux : on légifère en comptant sur une recette qui n'est pas sûre. Tant que la loi fédérale ne sera pas votée, nous n'avons aucune idée de la rétrocession que nous devrons faire... (Exclamations.) Si, Monsieur Brunschwig ! La preuve c'est que vous venez de faire la confusion entre les jeux d'adresse et les jeux de hasard dont les recettes seront certainement distribuées de façons différentes. Vous avez constamment fait cette confusion.

Au niveau fédéral, il y aura une différence entre ces deux types de jeux. On ne peut donc pas légiférer au niveau cantonal en tablant sur une recette supplémentaire, alors qu'on se trouve dans le brouillard le plus complet sur les décisions qui seront prises à Berne, où il est question de prélever jusqu'à 80% des recettes. Vous le savez, car c'est une loi que vous avez soutenue en poussant le peuple à la voter. Ne faites pas ce signe-là, Monsieur Brunschwig ! C'est un dossier que je suis depuis très longtemps, étant auteur d'un des projets de lois déposés il y a cinq ans.

En commission, nous avons eu toute une série de projets, contreprojets et amendements qui ont divisé même les groupes entre eux. Visiblement, ce projet n'est pas mûr. Il ne correspond pas à ce que veut le public, et je doute fort que l'initiative passe.

Face à ce projet, ce soir, nous ne devons même pas entrer en matière.

M. Albert Rodrik (S). J'ai utilisé pendant deux décennies le produit du droit des pauvres. C'est dire que je sais ce que l'on en fait et comment on le fait.

Si, dans les années de prospérité, c'était un appoint bienvenu, depuis ces dernières années, c'est un tragique besoin pour mener une politique sociale.

Parmi notre fiscalité, s'il est un chapitre qui a souffert du passage du temps et qui a besoin d'un travail de réflexion qui va au-delà de la cosmétique, c'est bien ce chapitre du droit des pauvres.

Ce n'est pas une grosse rupture du secret de fonction que de dire qu'en grande partie ce travail de réflexion pour une réfection, si j'ose dire au sens immobilier du terme, de ce droit des pauvres, a été mené. Il est temps que nous en voyions le résultat.

Je crains, Mesdames et Messieurs les députés, que si ce travail de réflexion en profondeur sur une taxe dont nous avons besoin, mais qui doit être adaptée au passage du temps, ne vient pas, le prochain assaut contre celle-ci puisse avoir une légitimité que l'attaque de ce soir n'a pas.

M. Bernard Lescaze (R). Trois députés radicaux ne siégeant plus dans cette enceinte avaient jugé bon de signer les deux projets de lois portant sur le droit des pauvres.

Dans notre parti, depuis plusieurs années, des réflexions diverses se sont fait jour à propos de la légitimité ou non du maintien du droit des pauvres. Finalement, ce soir, après des discussions approfondies, le groupe radical pense à l'unanimité qu'il n'est effectivement pas encore temps d'abroger une taxe qui a trouvé et qui trouve encore sa pleine légitimité, comme plusieurs orateurs l'ont dit ce soir.

Ce rapport nous a offert plusieurs pistes de réflexion. Force est de constater que ceux qui réclamaient la suppression de la taxe dite «droit des pauvres» le faisaient par crainte d'une diminution de leur chiffre d'affaires. En ce qui concerne les salles de cinéma, ce n'est, pour l'instant, pas avéré. En ce qui concerne des organisations de spectacles à grande échelle, tels ceux de l'Arena, le problème de leur équilibre financier ne dépend en réalité pas du maintien ou non du droit des pauvres.

A l'avenir, les radicaux souhaiteraient que les taxes perçues sur les lotos de village, la pêche miraculeuse lors de kermesses ou auprès de petites associations caritatives soient totalement supprimées. En effet, cela donne parfois beaucoup de travail pour rien ! Un de nos collègues nous disait que dans nos campagnes genevoises on savait déjà s'arranger pour éviter de verser le droit des pauvres. (Brouhaha.)

Une voix. C'est l'immoralité radicale ! C'est pour la gauche catholique !

M. Bernard Lescaze. Dans les vogues de certaines communes réunies il y a cent ciquante ans on doit aussi savoir le faire !

J'aimerais rassurer M. le député Grobet. C'est vrai, le droit des pauvres est une très ancienne tradition genevoise. Les premiers documents d'archives y faisant allusion remontent au début du XVIIIe siècle. Auparavant, il existait probablement pour l'ensemble des spectacles et était justifié : il permettait aux privilégiés qui pouvaient s'offrir des loisirs de participer aux actions de charité et de bienfaisance publiques. Par le produit des 70% versés à l'Hospice général, cette justification qui existe depuis plus de deux siècles est restée fondamentalement la même.

Le groupe radical maintiendra donc sa position. C'était déjà la même en 1845, puis au cours des XIXe et XXe siècles, comme l'a rappelé Mme Chalut.

Ceux qui espéraient tirer profit de la société d'exploitation du Casino de Genève SA et des jeux de hasard liés aux machines à sous se trompent : par une convention entre la Ville et l'Etat, il a été décidé de la création d'un fonds culturel. Les bénéfices éventuels qu'on ne peut pas encore chiffrer seront, dès 1999, affectés à la culture, notamment au Grand Théâtre, à l'Orchestre de la Suisse romande, au Théâtre de Carouge, et j'en passe. D'autres mieux qualifiés que moi, M. Alain Vaissade par exemple, pourront nous donner la liste des bénéficiaires potentiels. Dans ces domaines-là, il ne faut jurer de rien.

Face au refus des auteurs de retirer leurs projets, aujourd'hui, l'essentiel est de ne pas entrer en matière. En effet, une initiative a été lancée et le peuple aura l'occasion de trancher. Les partisans du maintien du droit des pauvres disposent d'excellents arguments, et je ne doute pas de leur succès.

Je vous propose donc de ne pas continuer ce débat.

M. Nicolas Brunschwig (L). Je constate que le parti radical estime que ce n'est jamais le moment et a des avis changeants sur les différents sujets fiscaux que nous abordons, au cours de cette soirée en particulier.

Au-delà des considérations philosophiques, il existe des éléments financiers, matériels et techniques derrière ce projet de loi. En l'état de la législation fédérale, le droit des pauvres taxe les machines à sous sur le territoire genevois. Il y a un certain nombre de consultations et d'avant-projets sur les casinos, les grands jeux et autres, mais rien n'a été décidé ou voté par les autorités fédérales. Cela prendra sans doute encore beaucoup de temps.

A la page 6 de votre document, vous pouvez lire que les machines à sous ont rapporté 1,8 million, les loteries, 5,2 millions, etc. C'est sur ce type d'activités que l'on peut parfaitement prévoir une augmentation de taux.

Quant à la manière d'utiliser cet argent - pour commencer là où M. Lescaze a fini - il est clair qu'il y a une convention entre la Ville et le canton de Genève pour subventionner de manière plus importante un certain nombre d'activités culturelles. Fort bien ! Ces activités sont par ailleurs taxées par ce fameux droit des pauvres. Et c'est là où le chat se mange la queue ! Nous tournons dans un cercle complètement idiot et imbécile, digne des administrations soviétiques de la belle époque : on taxe pour subventionner ou on subventionne pour taxer !

C'est invraisemblable, et M. Rodrik l'a quelque peu évoqué ! Sans doute qu'arrivant avec ses compétences il a mesuré ses propos pour ne pas heurter trop fortement son groupe politique, mais sur le fond il a raison. Cette loi archaïque ne correspond plus aux objectifs et génère des activités administratives insensées.

Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.

M. Jean-François Courvoisier (S).  Il se trouve que j'ai été pendant quinze ans directeur d'une petite agence de spectacles et concerts. Si j'ai organisé des spectacles à la salle Louis-Simon, à Gaillard, à plusieurs occasions, ce n'était pas pour payer 13% de droit des pauvres en moins, mais l'infrastructure et la salle coûtaient trois fois moins cher que le Victoria-Hall, à Genève.

Le droit des pauvres ne jouait donc aucun rôle dans ma décision !

M. René Ecuyer (AdG). Ce sujet revient périodiquement, et l'on a souvent entendu des discours pour la suppression du droit des pauvres.

En fait, qui se plaint et crie le plus fort ? Ceux qui en ont les moyens ! Les organisateurs de spectacles ! Croyez-vous vraiment qu'ils baisseraient le prix du ticket si le droit des pauvres était supprimé ? (Exclamations.) Il n'y a pas que les cinémas !

Il faut discuter avec le public qui comprend très bien, lorsqu'on lui explique que sur 1 F payé pour le spectacle, 13 ct vont aux gens modestes.

Je ne peux pas soutenir la proposition du député Boesch, concernant les bandits-manchots, car on spécule sur une augmentation du nombre de ces machines, en étant persuadé d'augmenter ainsi les recettes. C'est difficile à prouver. Par ailleurs, ce ne sont pas les grands joueurs qui tentent leur chance sur de telles machines, mais des citadins, des ménagères, des gens pris par le jeu...

Des voix. Des ménagères ?

M. René Ecuyer. Excusez-moi ! ...des chômeurs... (Exclamations.) Mais oui ! (Brouhaha.) Bon ! Vous avez compris ce que je veux dire ! (Rires.) Des petites gens qui ont un peu d'espoir, mais, en fait, c'est la source de misères familiales. On peut se passer de ce genre d'expériences.

Il faut donc expliquer pourquoi cette taxe sur le droit des pauvres doit être maintenue. C'est un geste de solidarité parfaitement compris par ceux qui ont les moyens d'aller au spectacle.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. J'ai été choqué, Monsieur Brunschwig, de vous entendre déclarer que ce droit des pauvres était une activité qui n'avait pas de sens. Face à celles et ceux qui vivent aujourd'hui dans la détresse et bénéficient du produit de cette taxe, il y a une insolence que nous ne pouvons pas accepter.

Cela étant, je n'ai pas grand-chose à déclarer, car d'excellentes déclarations ont été faites. Je n'ai toutefois pas très bien compris la conclusion de M. Lescaze. A savoir, si effectivement le parti radical était aujourd'hui défavorable à la suppression du droit, il se réservait d'être en faveur de l'initiative lancée... (Exclamations.) Ah, bon ! Je me réjouis d'apprendre que ce n'est pas le cas aujourd'hui. Ni demain non plus, j'espère !

J'ai apprécié les propos d'un homme de bon sens, M. Blanc, qui a rappelé un point fondamental : on nous propose la suppression d'une recette sans nous donner la contrepartie. M. Brunschwig s'est efforcé évidemment de nous démontrer le contraire. Il a déclaré que les cinémas genevois baisseraient leurs prix si le droit des pauvres était supprimé. C'est exactement le même discours que tenaient les hôteliers, lorsqu'ils demandaient la diminution de la TVA. Après enquête, quasiment aucun n'a baissé ses prix. C'est tout juste si certains ont envisagé le verre de jus d'orange gratuit en signe d'accueil à leur clientèle...

Nous n'y croyons pas, Monsieur Brunschwig ! Par ailleurs, lorsque vous parlez de l'effet compensatoire du projet de loi proposé non pas par M. Boesch - il ne faut pas renverser les rôles - mais par les auteurs du projet de loi... (Exclamations.) Ecoutez, Monsieur Brunschwig, je ne sais pas si vous faisiez partie de la commission...

M. Nicolas Brunschwig. J'étais président !

M. Christian Grobet, rapporteur. Je vous en félicite ! (Brouhaha.) J'ai parlé avec M. Boesch pour être tout à fait au clair sur sa position. Il voulait voir si vous étiez effectivement en mesure de trouver une solution compensatoire et a pris vos propositions au pied de la lettre. Résultat, vous n'êtes pas en mesure de proposer une solution compensatoire !

Votre pseudo-solution compensatoire ne durerait pas très longtemps. Vous avez beau prétendre que le droit fédéral ne va pas s'adapter avant des lustres. Cela fait longtemps que le peuple suisse a voté sur cette question, et un projet de loi est en cours d'élaboration par une commission d'experts depuis quelque temps.

Je ne veux pas prétendre, comme conseiller national, tout savoir, mais je suis assez bien informé. Cette commission d'experts est arrivée au bout de ses travaux, et le parlement sera bientôt saisi d'un projet de loi qui aura vraisemblablement pour conséquence que les cantons ne verront pas grand-chose du produit des jeux.

Il existe un seul endroit, à Genève, pour les jeux d'adresse : la salle du Grand Casino. Je me réjouis que la Ville de Genève ait pu renégocier une clause un peu folle, acceptée à la majorité du Conseil municipal en 1968. Je rigole, car à l'époque j'étais rapporteur de minorité et je mettais en garde votre majorité au Conseil municipal, Monsieur Brunschwig, sur la générosité de cette clause dans le contrat sur le droit de superficie qui s'est effectivement révélée extrêmement favorable au gérant du Noga Hilton... La Ville a donc réussi à modifier cette clause, et le bénéfice des jeux reviendra à la Ville de Genève.

Par voie de conséquence, s'il y a une perception de taxe sur le bénéfice des jeux au profit de l'Etat, c'est évidemment une diminution de recettes pour la Ville de Genève... Il ne s'agit donc pas d'une augmentation réelle des recettes. (Brouhaha.) Je comprends très bien qu'à ce stade du débat M. Brunschwig n'écoute même plus...

M. Nicolas Brunschwig. Je vous écoute !

M. Christian Grobet, rapporteur. Vous savez que votre solution, ce n'est pas n'importe quoi... Vous êtes un excellent commerçant, votre magasin marche très bien, et vous avez tout de suite compris qu'on ne faisait que passer l'argent d'un tiroir-caisse dans l'autre. Finalement, il n'y a pas d'augmentation de recettes pour les pouvoirs publics. Votre solution compensatoire n'a aucun intérêt et doit être refusée.

Mesdames et Messieurs, je vous recommanderai donc de refuser ce projet de loi. Mais vous avez vu que le rapport de Mme Chalut porte en fait sur quatre objets. Monsieur le président, pour ne pas créer de confusion dans les débats, je n'aborderai pas les trois autres objets. Mais sitôt le vote terminé sur celui-ci, je me permettrai de reprendre la parole. (Exclamations.) Il faudra bien voter les projets de lois l'un après l'autre !

Le président. Oui, Monsieur le rapporteur, mais je voulais questionner précisément les auteurs des deux autres projets de lois, de même que l'auteur de la motion, ou la personne qui le représente en son absence, pour savoir quel sort ils entendent réserver à ces projets.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Lors de ma première intervention, j'ai dit que nous avions décidé, en commission, de les laisser en suspens en attendant la loi fédérale.

Pour ma part, en tant qu'auteur du projet de loi 7122, je confirme les propos tenus en commission. Quant à la motion, on attend la réaction du parti libéral, puisque M. Balestra s'est engagé à la retirer.

Le président. Nous ne voterons donc pas le projet de loi dont vous êtes coauteur.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. J'aimerais attirer votre attention, Monsieur le président, concernant les compétences du président du Grand Conseil.

Les projets de lois 7122, 6916 et la motion 1066 ont été déposés par des députés dont certains ne siègent plus ici. Cela implique que leurs projets devraient être repris formellement par des collègues de leur groupe. Je ne vois pas comment ces différents projets pourraient être retirés ce soir. A moins que tous les dépositaires le déclarent, ou que ceux qui sont censés leur succéder puissent engager les auteurs qui ne sont plus représentés ici.

Pour le bon ordre, il faudra procéder à des votes et renvoyer le projet 7122 en commission, dans la mesure où Mme Reusse-Decrey et, je présume, les autres auteurs, souhaitent le laisser en suspens. Il serait plus sage d'en terminer avec le projet 7467 pour aborder ensuite chacun des autres projets en raison des difficultés résultant du fait qu'ils ont plusieurs auteurs.

Le président. Les trois projets et la motion figurent au même point de l'ordre du jour. Ce n'est pas un hasard. Seul le premier de ces projets, le 7467, a été traité en commission. Les autres n'étant pratiquement pas traités, il faudra s'en référer à l'avis de leurs auteurs. Sinon, qu'on les retourne en commission, formellement. Je suis d'accord avec vous.

Mme Yvonne Humbert (L). La motion 1066 est retirée par son auteur, M. Michel Balestra.

M 1066-A

Le Grand Conseil prend acte du retrait de cette proposition de motion.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. La République vous a confié sa destinée, sous point 34, pour vous occuper d'un projet de loi au sujet duquel la commission refuse d'entrer en matière, d'une motion qui est retirée, et de deux textes de lois en suspens depuis plus de trois mille jours et devant le rester quelque temps encore.

C'est dire que l'on s'attaque à un point de l'ordre du jour quasi virtuel; un non-point de l'ordre du jour qui nous occupe depuis cinquante minutes...

J'aimerais tout de même insister sur quelques éléments. Il faut, tout d'abord, cesser de prétendre que le droit des pauvres est une pure «Genferei». Treize cantons suisses ont un tel droit et, dans plusieurs pays, ce droit s'ajoute à des TVA nettement plus importantes que chez nous. Genève n'est donc pas seule à présenter cette particularité.

Deuxièmement, comme M. Blanc l'a rappelé, cette taxe concerne le consommateur et non l'organisateur de spectacles. Il est tout de même symptomatique de constater que tout le rapport, toute la discussion en commission, a porté sur la situation détestable que connaîtraient - selon eux - les organisateurs qui ne sont en fait que les percepteurs de cette taxe et non ceux qui en vivent.

Ma troisième remarque a trait au problème des jeux de hasard. Dans l'exposé de Mme la rapporteuse de majorité, on constate que le droit des pauvres provient essentiellement de deux grands blocs : l'un formé par les cinémas, théâtres et concerts, qui représente environ 7 millions de taxe, le deuxième par les machines à sous et les loteries, 7 millions également. Le reste, comme dirait l'ineffable directeur de la SBS, c'est «peanuts» ! Ces 11 millions de francs, on aimerait les récupérer sur les produits du casino estimés à 9 millions, alors que je n'ai déjà pas compris comment on pourrait récupérer 11 millions sur une recette de 9 millions !

Mais ces 9 millions du Casino de Genève, en version élargie, ont été attribués non pas à la seule Ville de Genève, mais à la culture que se partagent la Ville et l'Etat. On aimerait donc non seulement prendre 11 millions là où l'on en gagne 9, mais on aimerait les affecter à autre chose, alors qu'ils sont déjà attribués !

J'en viens à l'évolution de la législation fédérale. Les cantons romands ont signé la naissance de la Romande des jeux, la semaine dernière, en sachant pertinemment qu'elle ne sera pas effective avant plusieurs années. Il est donc vain d'espérer une évolution législative rapide. Vain également d'espérer que la Confédération fasse, par hypothèse, des cadeaux aux cantons.

Enfin, c'est le maximum, ce projet de loi est en discussion, alors même que ses auteurs ont déposé une initiative ! Allons-nous dès lors perdre encore beaucoup de temps à discuter d'un projet de loi qui sera de toute façon défendu au travers d'une initiative populaire qui suivra son petit bonhomme de chemin ?

Pour terminer, j'aimerais rappeler à l'intention de M. le député Brunschwig, que j'ai, en cours de travaux, proposé quelques modifications issues du département. La première, essentielle, vise à réduire le coût du droit des pauvres pour les expositions qui paient la TVA, afin d'éviter le cumul des deux taxes, qui est préjudiciable.

J'aimerais entamer une deuxième réforme - mais j'attendrai dix jours, vous savez pour quelle raison ! - pour voir si l'on ne peut pas gérer administrativement de manière plus rapide et moins coûteuse l'administration du droit des pauvres. C'est effectivement une hérésie de distribuer des billets à 25 ct - ce n'est pas une découverte de M. le député Brunschwig - de subventionner une oeuvre de charité, d'organiser le concert d'une grande cantatrice qui chante pour cette oeuvre hautement respectable, et de percevoir un droit des pauvres sur ce spectacle dont le bénéfice va à une oeuvre soutenue par l'Etat ! Ça ne joue pas ! La loi devrait permettre, à l'avenir, de faire l'économie de ce passage.

Mais il y a plus ! Je rends attentifs tous ceux qui aimeraient, ce soir, en découdre avec les organisateurs de spectacles. A Genève, un travail n'a pas encore été conduit : il s'agit de savoir quel apport représentent les grandes salles de spectacles pour la vie économique. Je trouve indécent que l'on s'en prenne aux organisateurs sous prétexte qu'ils font suffisamment de recettes. Il serait intéressant de connaître le nombre de nuitées d'hôtel, de déplacements et le bénéfice que la République tire du travail d'une salle comme l'Arena. Le problème de cette salle n'est d'ailleurs pas du tout le droit des pauvres, mais des conditions de travail inacceptables, quand on sait ce que rapporte cette salle.

Faisons une fois ce travail ! Je me réjouis - si le peuple le veut - de pouvoir le conduire.

En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes réunis pour débattre du droit des pauvres pour la trente-troisième fois dans l'histoire du Grand Conseil genevois. A trente-deux reprises, nous avons refusé la suppression du droit des pauvres. J'ai averti les auteurs de ce projet de loi qu'il en irait de même la trente-troisième fois : ils n'obtiendront pas gain de cause !

Plutôt que de perdre votre salive et votre énergie pour une cause vouée à l'échec, concentrez-vous sur une autre modification qui consiste à conserver la recette, et faites en sorte que soit reconnue à sa juste valeur l'activité des entrepreneurs en spectacles ! En ce sens, ne serait-ce qu'à cause de l'initiative en cours, ce projet de loi devrait être refusé. Je souhaite bonne chance à la trente-quatrième tentative qui sera une initiative populaire. Il serait plus intéressant de plancher sur le problème des spectacles à Genève, afin que cette activité soit mieux considérée.

C'est le voeu que je formule en conclusion.

M. Nicolas Brunschwig (L). Je relève les quelques moments de lucidité de M. le conseiller d'Etat Ramseyer... (Brouhaha.) Il reconnaît qu'il y a effectivement un certain nombre de problèmes dans le dossier du droit des pauvres.

Je m'étonne cependant qu'il n'ait pas profité de ces quatre dernières années pour faire les modifications qu'une très large majorité de ce gouvernement serait prête à accepter.

Je m'étonne également des propos de M. Ramseyer qui ne comprend pas ces chiffres fantaisistes de 9 ou de 11 millions, et comment on peut taxer 9 millions, lorsque le chiffre d'affaires est de 11 millions ou l'inverse... Ces calculs figurent à la page 20 du rapport de majorité de l'ancienne députée de l'Alliance de gauche, Mme Chalut, et proviennent des services de M. Ramseyer. Ils ont été établis par MM. Bolle et Teuscher, aussi je m'étonne qu'il les conteste !

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Dans mes rares moments de lucidité... (Rires.) ...quand je regarde les étoiles, il m'arrive d'être plein d'humilité, Monsieur le député !

Si je n'ai pas profité de ces quatre dernières années pour faire ce travail, c'est que votre commission m'en a empêché ! (Exclamations.) Au moment où j'ai formulé ces propositions, vous avez voulu, contre vents et marées, continuer votre travail. Vous avez bien travaillé, Monsieur le député, puisque ce soir vous arrivez à l'échec que je vous avais annoncé ! J'aurais aimé que vous écoutiez dès le début la vieille personne que je suis ! Qui, du niveau de son brin d'herbe, vous disait qu'on aurait pu être plus efficace...

Des voix. Bravo !

PL 7467-A

Le président. Nous procédons au vote d'entrée en matière sur le projet de loi 7467-A.

Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.

PL 7122-A

Mis aux voix, ce projet est renvoyé à la commission ad hoc des jeux.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Après les excellents propos de M. Blanc, je ne sais pas s'il est bien le porte-parole de son groupe et si le projet de loi 6916 sera retiré. Dans le cas contraire, je vous recommanderai d'en voter le rejet.

Je rappelle que ce projet de loi a pour objet, en fait, d'étendre les possibilités de mise en place des bandits-manchots - pour reprendre votre terme - dans tous les dancings et lieux de loisirs... (Exclamations.) Mais oui ! C'est ça ! Le projet 6916 vise à pouvoir placer les appareils à sous dans les dancings ! Dans des lieux fréquentés par excellence par des jeunes. J'ose espérer qu'au nom de la famille, Monsieur Fontanet, vous annoncerez la bonne nouvelle que vous retirerez ce projet. Sinon, je propose qu'il soit mis aux voix et rejeté !

M. Bénédict Fontanet (PDC). Ce soir, tout le monde a décidé d'être agréable à M. Grobet ! Je ne ferai pas exception à la règle, il a l'air tellement triomphant et souriant !

Etant le seul survivant des trois députés qui ont déposé ce projet traînant dans les tiroirs depuis six ou sept ans - M. Charles Poncet était encore député à l'époque - et compte tenu du sort qui risque de lui être réservé, pour ne pas nous voir infliger un camouflet de plus, je vais le retirer dans la joie, la bonne humeur et la componction !

PL 6916-A

Le Grand Conseil prend acte du retrait de ce projet de loi.