Séance du
vendredi 3 octobre 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
11e
session -
49e
séance
PL 7669-B
Genèse du projet de loi
La motion 1115, concernant une politique dérogatoire du département des travaux publics et de l'énergie déposée le 4 février 1997, posait implicitement la question au Conseil d'Etat de savoir si un conseiller d'Etat avait ou non exercé une activité incompatible avec sa charge et sous-entendait que le Conseil d'Etat n'avait pas pris les mesures applicables en une telle occurrence (Mémorial 1997, pages 1373, 1420, 1427 et 1974).
Dans son rapport de réponse, le Conseil d'Etat relevait que la loi était muette sur la façon de régler la situation en cas d'activité incompatible durable et qu'il ne disposait d'aucun instrument juridique pour y remédier par une décision exécutoire (Mémorial 1997, pages 5868 et 5074).
Il arrivait à la conclusion qu'il fallait compléter la loi, de sorte que ce rapport était suivi d'un projet de loi, objet du présent rapport (Mémorial, page 5076).
Au cours des débats de préconsultation, la grande majorité des intervenants conclurent à ce que le Grand Conseil légifère rapidement, si possible avant la rentrée parlementaire.
Un député a mis en question l'opportunité de légiférer en la matière, considérant notamment que c'était aux citoyens de sanctionner un comportement incompatible et non pas au Conseil d'Etat de faire la police à l'intérieur de ses murs. Il a même envisagé la situation qui pourrait se présenter au cas où un magistrat révoqué par ses pairs viendrait à être réélu par le peuple...
Le Conseil d'Etat avait répondu admettre ce raisonnement sur le principe, mais avait relevé qu'en fait, dans des situations analogues (députés, magistrats), une procédure avait été promulguée afin de pouvoir sanctionner immédiatement, sans attendre de lointaines élections. L'égalité de traitement commandait donc de combler cette lacune.
Audition de M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat.
M. Maitre indique que c'est la première fois que le Conseil d'Etat est confronté à une situation semblable. Pour la crédibilité des institutions, il faut légiférer. Après avoir résumé le système actuel, M. Maitre relève qu'il n'existe aucune sanction juridique en cas de violation persistante. Il commente ensuite la solution choisie, inspirée de ce qui existe au parlement.
Il explique que, techniquement, une fois le projet adopté, si le Conseil d'Etat prend une des décisions entrant ainsi dans sa compétence, celle-ci pourra faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.
Le principe de l'indépendance de l'élu justifie la restriction à la liberté personnelle qu'implique cette loi.
Débats en commission
L'entrée en matière est acceptée à l'unanimité.
On peut retenir comme éléments principaux de la discussion:
Le fait qu'il devrait aller de soi, pour une personne de la qualité de conseiller d'Etat, que cette fonction implique les incompatibilités retenues par la loi actuelle et qu'en cas de violation constatée et perdurant, l'intéressé devrait en tirer lui-même la conséquence inéluctable: la renonciation à son mandat.
C'est donc à regret que la commission doit bien admettre qu'il faut revoir la loi. Cela étant, elle estime qu'il faut le faire d'une manière aussi claire et complète que possible, même si les textes proposés ne flattent guère l'idée que l'on peut se faire des élus.
Cependant, elle estime qu'il ne faut pas aller trop loin et qu'en ce sens, il n'est pas opportun de prévoir des règles de procédure définissant par qui et comment l'éventuelle incompatibilité doit être dénoncée puis établie, ni de prévoir la situation qui découlerait de l'éventuel non-respect des obligations nouvelles données au Conseil d'Etat.
Il est relevé que le candidat au Conseil d'Etat n'est pas soumis à la nouvelle loi sur les liens d'intérêts. Il n'est pas possible de donner une solution à ce problème dans le cadre de ce projet de loi, mais certains commissaires se proposent d'examiner cette question ultérieurement.
Analyse du texte et votes
Article 8, alinéa 1
Estimant qu'il ne faut laisser aucune ambiguïté sur les tâches du Conseil d'Etat, le mot «invite» est remplacé par «doit inviter» (voté à l'unanimité).
Article 8, alinéa 2
Il est constaté que l'élection populaire implique que le nouveau magistrat élu peut ne pas appartenir au même parti que l'ancien. Cette conséquence politique paraît ne pas pouvoir être évitée. Elle est la même en cas de décès en fonction.
Le texte proposé prévoit que, lorsque le magistrat ne répond pas dans le délai à l'invite du Conseil d'Etat, il est «censé renoncer à sa charge».
Si l'on peut comprendre que l'on ait voulu adoucir la forme, la commission désire pour sa part un texte clair, cette loi étant, on l'a déjà dit, peu flatteuse pour la fonction qu'elle régit. Dès lors le texte «déclaré avoir renoncé à sa charge» est préféré à «considéré comme démissionnaire», également proposé.
La commission constate que le texte ne dit pas clairement ce qui se passerait au cas où le conseiller d'Etat, après avoir opté pour sa fonction au sens de l'alinéa 1, continuerait de fait, ne serait-ce que par négligence ou incompréhension, son activité partielle professionnelle incompatible.
Certains pensent qu'une telle occurrence est à ce point improbable qu'il n'y a pas lieu de s'y arrêter.
D'autres estiment qu'il irait alors de soi que le Conseil d'Etat aurait pour devoir implicite de constater ce manquement et le droit tout aussi implicite de prononcer la révocation.
Après discussion, la commission décide de compléter le texte pour dire clairement ce qui paraît évident à d'autres. Elle ne crée pas un alinéa supplémentaire pour régler ce cas, mais simplement décide que l'alinéa 2 comportera une phrase complémentaire clarifiant la situation, à savoir: «Il en va de même si, passé le délai fixé à l'alinéa 1, le Conseil d'Etat constate qu'il continue son activité incompatible».
Cet alinéa est adopté par 8 voix moins 1 abstention.
Au vote d'ensemble, le texte retenu par la commission, et figurant ci-après, est adopté à l'unanimité.
La commission vous invite en conséquence à adopter rapidement cette loi pour qu'elle puisse entrer en vigueur avant que les nouveaux conseillers d'Etat prennent leur fonction.
PROJET DE LOI
modifiant la loi sur l'incompatibilité de fonctions des conseillers d'Etat
(B 1 12)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'incompatibilité de fonctions des conseillers d'Etat, du 12 janvier 1963, est modifiée comme suit:
Art. 8 (nouvelle teneur)
1 Lorsqu'une incompatibilité prévue par la présente loi persiste ou prend naissance au-delà de l'échéance prescrite à l'article 7, le Conseil d'Etat doit inviter par écrit le magistrat concerné à opter dans un délai de 8 jours entre l'activité ou la fonction en cause et la charge de conseiller d'Etat.
2 A défaut, ce magistrat est déclaré avoir renoncé à sa charge de conseiller d'Etat et une nouvelle élection est organisée conformément à l'article 109, alinéas 2 et 3, de la constitution. Il en va de même si, passé le délai fixé à l'alinéa 1, le Conseil d'Etat constate qu'il continue son activité incompatible.
Suite du premier débat
M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Dans le cadre de la séance d'hier soir, nous avons examiné un certain nombre de propositions et, notamment, une proposition rédigée par le Conseil d'Etat; elle fait la synthèse des discussions qui ont eu lieu... Vous l'avez maintenant sous les yeux, sous forme d'amendement. (Brouhaha.)
Cette proposition a d'ailleurs l'assentiment de l'ensemble des groupes, de sorte qu'il devrait être possible de mettre cette loi sous toit, pour qu'elle puisse entrer en vigueur au début de la prochaine législature. (La présidente agite la cloche.)
M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais remercier le Conseil d'Etat, et plus particulièrement son président, M. Maitre, d'avoir pris en considération les remarques que nous avions formulées sur la base du rapport revenu de commission, et dont M. Lacour est le rapporteur. Elles concernaient des dispositions, que nous pensions lacunaires et qui devaient être complètes, d'une règle prévoyant qu'un magistrat, une fois élu, donne des indications précises quant aux activités qu'il déploie qui pourraient tomber sous le coup des incompatibilités.
La solution proposée par le Conseil d'Etat est celle que nous avions proposée, à savoir que cette déclaration se fasse après l'élection, au moment de la déclaration d'acceptation de la candidature. M. Maitre a repris très exactement la liste des incompatibilités. En conséquence, nous sommes satisfaits de cette proposition, et, dans la mesure où elle est acceptée, nous retirerons le projet de loi que j'avais évoqué, hier soir, dans le premier débat sur ce projet de loi.
M. Claude Blanc. C'est provisoire !
M. Claude Lacour (L), rapporteur. Je confirme que ce texte a été examiné par les membres de la commission, qui l'ont agréé.
La présidente. Nous allons voter ce projet en premier débat. Celles et ceux qui acceptent la prise en considération de ce projet de loi... (La présidente est interpellée.) Non, nous l'avons reporté... Nous n'avons pas fini le premier débat.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article unique (souligné)
La présidente. Je mets aux voix l'amendement proposé par le Conseil d'Etat - introduction d'un article 1 bis (nouveau) - dont la teneur est la suivante :
«Article 1 bis (nouveau)
. .
a) la liste exhaustive des conseils d'admi-nistration, conseils de fondation ou autres organes de personnes morales auxquels il appartient ou dont il est le contrôleur;
b) la liste des entreprises dont il est le propriétaire ou dans lesquelles il exerce, soit directement, soit par personne interposée, une influence prépondérante.»
Mis aux voix, cet amendement (introduction de l'article 1 bis nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'article 8 (nouvelle teneur) est adopté.
Mis aux voix, l'article unique (souligné) ainsi amendé est adopté.
M. Claude Lacour (L), rapporteur. Je ferai encore une remarque. Vous avez certainement constaté que le numéro de référence de cette loi était (B 1 12) et qu'il est redevenu : (B 1 1,5). Je voulais simplement qu'il n'y ait pas de doute à ce sujet.
La présidente. La référence est donc bien (B 1 1,5). Nous en prenons note pour apporter la correction.
M. Claude Blanc (PDC). Je voudrais poser une question de pure forme... Je ne vois pas très bien où on est allé cherché cet article 1 bis, car nous sommes en présence d'un article unique qui modifie la loi : il s'agit de l'article 8 (nouvelle teneur).
La présidente. C'est l'article 1 bis de la loi... Nous avons l'article unique, puis, ensuite, l'article 1 bis et l'article 8 !
M. Claude Blanc. Ah bon ! D'accord ! Merci ! (Exclamations.)
La présidente. Alors, pour la systématique et grâce à votre intervention, Monsieur le député Blanc, ce sera l'article 1 A - et non 1 bis - de la loi sur l'incompatibilité de fonctions des conseillers d'Etat.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant la loi sur l'incompatibilité de fonctions des conseillers d'Etat
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'incompatibilité de fonctions des conseillers d'Etat, du 12 janvier 1963, est modifiée comme suit:
Article 1 A (nouveau)
. .
a) la liste exhaustive des conseils d'administration, conseils de fondation ou autres organes de personnes morales auxquels il appartient ou dont il est le contrôleur;
b) la liste des entreprises dont il est le propriétaire ou dans lesquelles il exerce, soit directement, soit par personne interposée, une influence prépondérante.
Art. 8 (nouvelle teneur)
1 Lorsqu'une incompatibilité prévue par la présente loi persiste ou prend naissance au-delà de l'échéance prescrite à l'article 7, le Conseil d'Etat doit inviter par écrit le magistrat concerné à opter dans un délai de 8 jours entre l'activité ou la fonction en cause et la charge de conseiller d'Etat.
2 A défaut, ce magistrat est déclaré avoir renoncé à sa charge de conseiller d'Etat et une nouvelle élection est organisée conformément à l'article 109, alinéas 2 et 3, de la constitution. Il en va de même si, passé le délai fixé à l'alinéa 1, le Conseil d'Etat constate qu'il continue son activité incompatible.
M. Christian Grobet (AdG). Je vous signale donc le retrait du projet de loi des députés de l'Alliance de gauche, dont je n'ai malheureusement plus le numéro en tête... Mais je ne doute pas que Mme la sautière le retrouvera dans les affaires en suspens !
La présidente. Nous l'avons gardé précieusement, Monsieur le député ! Il s'agit du projet de loi suivant :