Séance du
vendredi 3 octobre 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
11e
session -
49e
séance
RD 289
Discours de Mme Christine Sayegh, présidente sortante
Mesdames et Messieurs les députés, la 53e législature de notre Grand Conseil se termine. C'est la dernière de ce siècle, puisque la prochaine passera le cap de l'an 2000. Ce n'est pas pour autant une fin, ni une révolution; c'est le moment où la population genevoise fait le bilan quadriennal du travail du législatif comme de l'exécutif et renouvelle ses représentants au parlement.
L'activité du Grand Conseil a été intense au regard des nombreux projets de lois, propositions de motions et résolutions traités. L'actualité a suscité de nombreuses interpellations urgentes. Enfin, la dynamique de notre parlement est restée soutenue, même si le rythme du traitement en plénière des objets à l'ordre du jour a paru trop lent à l'opinion publique.
Il est vrai qu'à l'époque des outils informatiques et de communication, la notion du temps s'est considérablement modifiée et l'efficacité se conjugue avec rapidité. Parallèlement, les possibilités d'information se sont multipliées, donnant une dimension différente à la réflexion et aux débats.
C'est pourquoi je suis convaincue qu'il faut poursuivre notre chemin vers le progrès technique et actualiser notre mode de fonctionnement. Nous avons déjà fait un premier pas en votant l'autonomisation de notre service du Grand Conseil. Nous en avons encore plusieurs à faire pour atteindre la performance digne d'un parlement qui aspire à jouer son rôle, tant sur le plan législatif que de contrôle parlementaire.
Je souhaite que l'enthousiasme avec lequel les modifications de la loi portant règlement du Grand Conseil ont été traitées en commission, puis débattues en plénière, anime chacune et chacun, des députés bien sûr, mais aussi les membres du service du Grand Conseil et du Mémorial. Bientôt va être introduite, avec la nouvelle législature, l'utilisation d'un ordinateur personnel pour tous les députés, et j'espère que l'effort informatique qui sera demandé aux futurs branchés sur le réseau de l'Etat se fera sans encombre. La présence d'assistants politiques contribuera aussi à l'efficacité de nos travaux.
En effet, il faut non seulement uniformiser les moyens d'accès au service du Grand Conseil mais également permettre un traitement rapide des nombreux textes émanant des députés. La conduite de la réactualisation de notre service, dont le mode de fonctionnement n'avait pas bougé depuis des décennies, a été confiée à notre nouveau sautier, Mme Myriam Boussina, qui avait priorité de démontrer en six mois, période d'essai contractuelle liée à son engagement, les possibilités d'évolution des technologies du service.
Il est vrai qu'avec une baguette magique cette modernisation plutôt brutale se serait faite sans remous, mais nous ne sommes pas au pays des contes de fées et la tâche fut et reste délicate. Il est toujours difficile d'apprécier comment est ressentie la réforme d'un service par les personnes concernées. En effet, on peut envisager trois attitudes : soit l'adhésion, soit le refus, soit l'indifférence. Toutefois, le comportement objectivable est guidé par des facteurs divers, imprévisibles et quelquefois déconcertants. Malgré les tensions, les incompréhensions, les conflits qu'a pu générer cette réforme, je tiens ici à remercier chaleureusement toutes les personnes attachées au service du Grand Conseil qui, même si elles n'ont pas formé une équipe, ont su maîtriser l'ensemble des tâches qui leur incombaient.
Face au volume de travail en constante croissance, il a fallu convoquer plusieurs séances supplémentaires. Nos longs débats ont surchargé le service du Mémorial pour qui un quart d'heure de débat génère entre six et huit heures de travail. Je saisis l'occasion pour féliciter les mémorialistes qui livrent les textes dans des délais très courts et prennent un soin tout particulier à refléter l'exactitude de nos interventions et les réactions qu'elles suscitent.
A ce sujet, les mémorialistes ont su avec humour saisir nos perles et en faire un collier très coloré, que vous recevrez au terme de la seconde séance et qui pourra animer vos discussions, si par impossible cela devait être... Mais ne partez pas à la recherche des perles, elles sont encore sous embargo !
J'ai renoncé à mettre en exergue un projet de loi plutôt qu'un autre, adopté au cours de cette législature, et préféré rappeler une première suisse, à savoir la convention que nous avons signée avec le canton de Vaud, relative à l'approbation du concordat instituant un réseau hospitalo-universitaire lémanique. En effet, cette convention a une portée beaucoup plus grande que le Réseau hospitalo-universitaire lémanique. C'est une procédure qui permet un contrôle inter-parlementaire des concordats que pourraient souhaiter conclure les exécutifs des cantons de Vaud et de Genève. C'est une première en Suisse, et la première application a pu être faite, cette législature encore. Il y a lieu d'apprécier qu'il est possible, tout en préservant les spécificités de fonctionnement de chacun des cantons, de s'accorder entre parlements pour exercer notre rôle de contrôle, notamment du pouvoir exécutif dans les limites de la séparation des pouvoirs. Le contenu du concordat a pu être étudié dans d'excellentes conditions et permettre à chacun d'exprimer son avis, voire ses divergences.
Je voudrais aussi, Mesdames et Messieurs les députés, saluer votre engagement et votre travail, et faire remettre à tous les députés qui ne sont pas candidats pour une nouvelle législature un stylo-souvenir :
Hervé Burdet
Claire Chalut
Sylvie Châtelain
Anne Chevalley
Jean-Luc Ducret
Laurette Dupuis
Catherine Fatio
Jean-Claude Genecand
Henri Gougler
Claude Howald
Liliane Johner
Claude Lacour
Sylvia Leuenberger
Gabrielle Maulini-Dreyfus
David Revaclier
Jean-Pierre Rigotti
Andreas Saurer
Philippe Schaller
Max Schneider
Jean-Philippe de Tolédo
Claire Torracinta-Pache
(Tous ces députés sont vivement applaudis. Les huissiers leur remettent un stylo-souvenir.)
Mme Marlène Dupraz étant absente, nous lui ferons parvenir le stylo ultérieurement.
J'aimerais également prendre congé, au nom de tous, d'Armand Obrist... (Vifs et longs applaudissements.) ...qui a décidé de prendre sa retraite anticipée à la fin de l'année. Mais en raison de nombreuses heures supplémentaires - je crois plus de deux cents - M. Obrist nous quittera au début du mois de novembre. Il assistera à la première séance de la nouvelle législature, le 6 novembre prochain, avant de passer le relais.
Je souhaite m'adresser également à la presse parlementaire qui a souvent fait preuve de beaucoup de patience au cours de nos longs débats, assise sur des sièges inconfortables, devant des tables de travail trop étroites. Vous aurez constaté, Messieurs les journalistes - je ne vois pas de dames aujourd'hui - que les pouvoirs de la présidente en matière d'intendance sont inexistants, puisque je vous avais promis une amélioration de l'agencement de la galerie de la presse et que cela n'est pas encore fait... Mais ne désespérez pas, le dossier reste ouvert !
Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, je vous réitère mes remerciements pour la confiance que vous m'avez témoignée en me confiant la présidence de notre parlement. Ce fut une expérience très instructive, très enrichissante et, j'espère, constructive pour notre institution. Je l'ai pleinement vécue grâce au soutien dynamique de mon entourage, tant professionnel que familial.
Je n'ai pas le plaisir de céder ma place au prochain président, vu les circonstances, mais je tiens à remercier tout spécialement le premier vice-président, le second vice-président, les deux secrétaires, l'ensemble du Bureau et des huissiers pour leur très agréable collaboration.
Je ne concevais pas cette fin de législature sans une verrée nous réunissant tous à l'issue de la deuxième séance, à laquelle vous êtes tous conviés, Mesdames et Messieurs les députés, Madame, Messieurs les conseillers d'Etat, Mesdames et Messieurs les journalistes, ainsi que toute personne se trouvant dans cette enceinte à l'heure dite. (Applaudissements.)
M. Hervé Burdet (L). Madame et Messieurs les membres du gouvernement, Madame et Messieurs les collaborateurs du service du Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les représentants de la presse, chers collègues, c'est donc pour plusieurs d'entre nous la fin de la vie parlementaire. A regret pour les uns, dans la sérénité pour d'autres, nous allons rejoindre les rangs des simples citoyens, accompagnés du sentiment du devoir accompli pour le bien public et celui de la République en particulier.
C'est en leur nom que je prends probablement pour la dernière fois la parole pour remercier Mme la présidente du Grand Conseil de son allocution de fin de législature et de ses cadeaux d'adieu; pour dire à tous ceux qui nous ont aidés dans nos travaux notre satisfaction et notre reconnaissance au terme de ces années durant lesquelles «la patrie nous a confié ses destinées». (Rires.)
Je n'abuserai pas de votre patience - notre ordre du jour est chargé - pour évoquer, selon la coutume, des souvenirs personnels. Je me bornerai donc à vous dire que je suis entré dans cette enceinte, il y a seize ans, très convaincu qu'il y a, comme l'enseigne l'Eglise : «grand mérite à détester l'erreur». J'en sors aujourd'hui sachant mieux qu'il n'y a cependant pas de honte à accueillir le compromis, s'il est fondé sur l'intelligence du coeur.
Bons voeux et bons succès à tous ceux qui reviendront dans un mois, comme à ceux qui s'en vont.
Au-delà du débat, la recherche du bien commun nous a rassemblés dans cette salle. Ce seront - et c'est là pour moi l'espoir - la foi en l'avenir, le respect mutuel et l'amitié qui continueront à l'habiter. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. Dominique Hausser (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, le travail de la présidente ou du président d'un parlement de milice est parfois ingrat, tout particulièrement lorsque les séances plénières sont infernales et que les flots de paroles ne sont souvent destinés qu'à la galerie, en général vide - contrairement à ce soir - et aux journalistes qui disposent, hélas, d'à peine trente à quarante lignes pour rapporter nos débats. Cette dernière année de législature fut particulièrement éprouvante.
Mesdames et Messieurs les députés, c'est avec détermination - avec une réelle détermination, je dirai même «un véritable professionnalisme» - que vous avez, Madame la présidente, effectué les tâches liées à votre fonction. Vous avez dirigé d'une main de maître - de «votre» main de maître - cette assemblée, parfois peu disciplinée...
Permettez-moi, dès lors, en mon propre nom, au nom des socialistes et, probablement, au nom de toute cette assemblée, de vous remercier et de vous remettre quelques roses jaunes et rouges, signes de sérénité et d'espoir pour un avenir qui lui sera - et je l'espère, pour vous, Madame la présidente - rose ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci infiniment ! Aux couleurs genevoises et fidèles à notre République ! Il y en a encore ! Merci, Madame le sautier. Superbe arrangement, également rouge et jaune. Nous allons, aux couleurs de notre République, poursuivre nos travaux.
Mme Claire Chalut (AdG). Je dirai deux mots plus modestement, avant de partir de cette enceinte, où j'ai appris beaucoup de choses, en tout cas à mieux connaître nos institutions.
Pour ma part, je tiens à dire un très grand merci aux huissiers, pour leur gentillesse, leur disponibilité et leur compétence à satisfaire nos besoins... J'aurais voulu utiliser un autre terme... (Rires.) J'ai eu le plaisir de les apprécier, et j'en garderai certainement un très bon souvenir; je leur souhaite de pouvoir continuer à travailler longtemps dans cette maison. Merci encore à eux et peut-être à bientôt... La République est petite, après tout ! (Applaudissements.)
M. Jean-Pierre Rigotti (AdG). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, permettez-moi, après tant d'années et avant de prendre congé, de vous raconter très succinctement une petite anecdote et de vous exprimer une réflexion personnelle.
L'anecdote est la suivante :
Lorsque je suis entré au Grand Conseil, les séances avaient lieu le vendredi soir, et, parfois, l'ordre du jour n'étant pas terminé, le samedi matin. La première année où j'ai siégé - je suis devenu député en 1969, ce n'est donc pas d'aujourd'hui... - le Mémorial faisait à peu près une quarantaine de centimètres... C'est-à-dire qu'un rayon de la bibliothèque de la salle Nicolas-Bogueret suffisait pour trois à quatre années de discussions dans ce parlement... Maintenant, deux à trois rayons ne suffisent pas pour une année ! Alors, cela ne signifie pas que le travail est beaucoup plus sérieux aujourd'hui qu'auparavant - il était peut-être différent - mais les discours sont très clairs et très précis; ils contiennent surtout beaucoup de promesses.
Cela m'amène à vous livrer ma réflexion, Mesdames et Messieurs les députés. Malgré tout le travail effectué pendant les vingt-huit années que j'ai passées ici, malgré les améliorations apportées au bien de tous, beaucoup de choses ne se sont pas très bien passées. Jamais, Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons compté autant de chômeurs... Jamais, Mesdames et Messieurs les députés, autant de familles, autant de personnes seules, autant de retraités dans le besoin... Jamais les associations, les institutions n'ont été autant mises à contribution !
Nous pouvons par conséquent nous demander ce qu'il se passe dans cette République, pourtant riche - dans le pays le plus riche du monde... Comment peut-on laisser à l'écart autant de personnes démunies ? Pourtant les retraités ont travaillé toute leur vie, pour l'immense majorité sans revendiquer quoi que ce soit, pour le bien de cette République et du pays, pour sa prospérité. Et, en retour, ils ne reçoivent pas beaucoup... Ils attendent encore. Nous pouvons comprendre que ces gens soient un peu déçus et qu'ils n'aillent pas voter pour les élections. Effectivement, les promesses préélectorales ne sont pas toujours suivies d'effets concrets.
Mesdames et Messieurs les députés, jamais la République n'a compté autant de démunis, mais jamais, de l'autre côté du fossé, elle n'a compté autant de milliardaires et de millionnaires... Jamais les sociétés financières et de gestion n'ont engendré autant de bénéfices !
Je vous livre cette réflexion, Mesdames et Messieurs les députés. Je ne serai plus là à la prochaine séance, mais je souhaite que la prochaine majorité de ce Grand Conseil - je ne vous dirai pas où vont mes sympathies... (Rires.) ...et j'ai beaucoup d'espoir - pensera aux plus démunis et à la nécessaire solidarité.
Je vais vous donner un argument qui n'est pas d'aujourd'hui - il date du siècle dernier : il faut prendre l'argent où il se trouve ! (Rires.) Le slogan de l'époque était : «Prenez l'argent aux riches !». Il faut peut-être le dire différemment, Mesdames et Messieurs les députés, mais, vu le nombre très important de millionnaires et les bénéfices engendrés, par rapport à il y a trente ans, il me semble que vous pourrez faire quelque chose, lors de la prochaine législature, dans le domaine de la fiscalité et dans celui de la solidarité. (Applaudissements.)
La présidente. Nous reprenons donc nos travaux au point 13 de notre ordre du jour, que nous avions décidé, hier, de reporter à aujourd'hui.