Séance du
jeudi 26 juin 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
8e
session -
33e
séance
PL 7676
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur la police, du 26 octobre 1957, est modifiée comme suit:
CHAPITRE V
Art. 25 A (nouveau)
1 Lorsqu'un étranger arrivant de l'extérieur demande l'asile, sous quelque forme que ce soit, à la frontière de l'aéroport de Genève, son cas est immédiatement signalé à l'office fédéral des réfugiés. L'aide d'un traducteur est requise si nécessaire. S'il n'est pas autorisé à entrer en Suisse, il est alors retenu dans la zone de transit de l'aéroport.
2 Dès la décision de rétention, l'étranger et ses biens peuvent faire l'objet de mesures de fouille aux conditions prévues à l'article 12 b, alinéa 5, de la loi sur l'asile.
3 L'étranger est informé qu'il a le droit de faire appel à un mandataire. Dans ce but, la police de l'aéroport met à sa disposition une liste de mandataires ou avocats, un appareil téléphonique et un fax, et en cas de besoin un traducteur.
4 Le mandataire pressenti ou confirmé doit pouvoir s'entretenir librement et sans délai avec son mandant, le cas échéant avec l'aide d'un traducteur.
5 Aucun renvoi ne peut intervenir sans une décision écrite exécutoire de l'office fédéral des réfugiés ou de la commission de recours en matière d'asile. Cette décision doit être remise à l'intéressé et à son mandataire.
6 Le renvoi ne peut être exécuté que vers le pays désigné dans la décision de renvoi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le canton de Genève vient de se doter, par obligation fédérale, d'une loi d'application de la loi dite des «mesures de contrainte».
Les députés qui ont travaillé à sa rédaction, ainsi que le Grand Conseil dans son ensemble, ont tenu à préserver dans la loi un certain nombre de droits en faveur des personnes soumises à ces mesures.
Lors des travaux de commission qui ont précédé les votes, il est apparu aux députés que ces mêmes droits élémentaires n'étaient pas garantis pour les requérants d'asile retenus à l'aéroport. Soucieux de cohérence entre nos diverses lois et attachés au respect de ces droits fondamentaux, plusieurs députés de la commission judiciaire ont alors décidé de déposer le projet de loi qui vous est soumis.
Il est à noter aussi qu'à de nombreuses reprises des «dysfonctionnements» ont été dénoncés par les oeuvres d'entraide sur les procédés utilisés à l'aéroport, et qu'une pétition a même été déposée dans ce sens:
- impossibilité pour la personne retenue de contacter un mandataire;
- impossibilité pour le mandataire de se faire accompagner d'un traducteur;
- impossibilité d'avertir un ou une proche,
sont les problèmes les plus souvent relevés. Autant d'atteintes aux droits de la personne que Genève ne saurait cautionner plus longtemps.
En janvier 1997, le département de justice et police et des transports a édicté des directives pour les procédures d'asile à l'aéroport.
Cependant, les députés signataires estiment que le principe de respect et d'application des droits fondamentaux doit être inscrit dans une loi, à l'instar de ce que recommande le conseil de l'Europe:
«Des lignes directrices, fondées sur les principes fondamentaux dans le domaine des droits de l'homme devraient inspirer la pratique des Etats membres à l'égard de la protection des demandeurs d'asile dans les aéroports et contribuer à développer une législation dans les nouveaux pays d'accueil.»
C'est pour cette raison que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement ce projet de loi.
Argumentaire
S'il ne s'avère pas nécessaire d'expliciter certains alinéas qui répondent à une logique et sont suffisamment clairs, les alinéas 2 et 6 nous semblent mériter quelque explication.
Alinéa 2
Dès lors que les requérants d'asile sont retenus par la police, il importe de bien différencier la fouille simple, qui se justifie dans l'optique de la procédure d'asile (par exemple pour mettre en sûreté des documents de voyage), de la fouille corporelle approfondie qui est parfois nécessaire en matière criminelle. La police de l'aéroport, il est vrai, est aussi confrontée à des problèmes de trafic de drogue. Il en est résulté dans le passé des confusions regrettables, lors desquelles des requérants d'asile ont été traités de manière humiliante et déplacée à l'égard de personnes qui viennent demander protection dans notre pays. On peut difficilement imaginer qu'un requérant qui s'annonce à la police pour demander l'asile puisse être confondu avec un trafiquant qui cherche, au contraire, à passer inaperçu. La fouille des candidats à l'asile doit donc en rester à la fouille simple.
Alinéa 6
Dans les cas de refus de demandes d'asile, les autorités fédérales compétentes examinent dans quel pays le renvoi peut être exigible.
Il est cependant déjà survenu que la police de l'aéroport exécute le renvoi dans un autre pays, en fonction d'autres possibilités. En effet, les accords IATA permettent d'exiger de la compagnie aérienne qui a transporté la personne jusqu'à Genève qu'elle se charge elle-même de son départ, ce qui simplifie les formalités. Cette clause de reprise peut cependant conduire à un renvoi vers un pays dont la destination n'a pas été examinée par les autorités compétentes en matière d'asile. Il est donc impératif que le renvoi soit exécuté vers le pays en fonction duquel la décision a été prise, à l'exclusion de toute autre possibilité.
Au bénéfice des explications ci-dessus, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver ce projet de loi.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire sans débat de préconsultation.