Séance du
jeudi 19 juin 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
7e
session -
32e
séance
PL 7661
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur la police, du 26 octobre 1957, est modifiée comme suit:
Art. 4, al. 1 et 3, et note marginale (nouvelle teneur)
1 Le Conseil d'Etat peut déléguer conventionnellement à la Ville de Genève l'application, par du personnel qualifié, de certains règlements de police, notamment en matière d'édilité ou de salubrité publique.
3 Les communes peuvent avoir, en matière de police rurale, des gardes auxiliaires.
Art. 4a (nouveau)
1 Les communes, à l'exception de la ville de Genève, peuvent avoir:
a) des agents de sécurité municipaux qualifiés et dotés de pouvoirs d'autorité, en matière d'application de prescriptions cantonales de police et de certaines prescriptions fédérales sur la circulation routière;
b) des agents municipaux affectés exclusivement au contrôle des véhicules en stationnement, en application des prescriptions fédérales sur la circulation routière.
2 Les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux ne sont pas armés.
3 Les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux sont engagés par les communes et soumis à l'autorité du maire ou du conseil administratif.
4 Les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux exercent leurs attributions sur l'ensemble du territoire de leur commune. En vertu d'accords inter-communaux, l'exercice des attributions des agents de sécurité municipaux peut être étendu au territoire d'une ou de plusieurs autres communes.
5 Le Conseil d'Etat fixe, d'entente avec les communes, les conditions dans lesquelles les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux peuvent exercer leurs compétences, notamment en ce qui concerne:
a) les relations entre les services de police et les organes communaux;
b) les conditions de sélection et de formation de ces agents;
c) les dispositions relatives à l'habillement et à l'équipement de ces agents;
d) les conditions et modalités d'attribution et de répartition du produit des amendes relatives aux contraventions sanctionnées par ces agents;
e) les dispositions transitoires justifiées par l'abandon du régime conventionnel d'attributions de police conférées aux agents municipaux des communes autres que la ville de Genève.
6 Le Conseil d'Etat fixe, d'entente avec les communes:
a) les prescriptions cantonales de police que les agents de sécurité municipaux sont habilités à faire respecter, notamment en matière de sécurité, tranquillité, salubrité et propreté publiques, de circulation routière, d'affichage public et de réclames, d'exercice de certaines professions, de surveillance des chiens, de lutte contre les épizooties et de police rurale;
b) les prescriptions fédérales sur la circulation routière que les agents de sécurité municipaux sont habilités à faire respecter;
c) les prescriptions fédérales sur la circulation routière régissant les véhicules en stationnement, que les agents municipaux sont habilités à faire respecter.
7 Le Conseil d'Etat fixe, d'entente avec les communes, les modalités d'accomplissement de missions des agents de sécurité municipaux en commun avec la police. Dans ce cas, la compétence territoriale de ces agents s'étend à l'ensemble du territoire cantonal.
8 Les agents de sécurité municipaux sont habilités à exiger de toute personne qu'ils interpellent qu'elle justifie de son identité si ce contrôle se révèle nécessaire à l'exercice des compétences qui leur sont attribuées. Si la personne n'est pas en mesure de justifier de son identité, elle peut être conduite dans un poste ou un bureau de police. Lorsqu'elle s'avère nécessaire pour des raisons de sécurité, une fouille sommaire peut être effectuée; elle doit être adaptée aux circonstances et être aussi prévenante et décente que possible.
Art. 2
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Art. 3
1 La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit:
Art. 48, lettre f (nouvelle teneur)
f) d'assermenter les agents de sécurité municipaux, les agents municipaux ainsi que les autres personnes qui sont tenues au secret par une disposition légale expresse;
2 La loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, du 18 décembre 1987, est modifiée comme suit :
CHAPITRE IV
Amendes d'ordre
Art. 12, al. 3 (nouvelle teneur)
3 Sont également compétents pour percevoir des amendes d'ordre:
a) les agents municipaux de la Ville de Genève dans les limites fixées par convention entre le Conseil d'Etat et le Conseil administratif de la Ville de Genève;
b) les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux d'autres communes, dans les limites fixées par le Conseil d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
I. Généralités
La situation actuelle
Outre la Ville de Genève, 16 communes disposent depuis de nombreuses années d'agents municipaux dotés d'attributions de police déléguées en vertu de conventions passées avec le Conseil d'Etat. Ces attributions ont trait à l'application, d'une part, de règlements cantonaux concernant surtout la tranquillité, la sécurité et la salubrité publiques, d'autre part de certaines règles de circulation routières réprimées par une amende d'ordre (princi-palement en matière de stationnement).
Les besoins des communes
Depuis quelques années, les autorités communales manifestent une préoccupation toujours plus vive de renforcement de la sécurité de leurs habitants, souhaitant, à cet effet, recourir plus rationnellement aux prestations de leurs agents municipaux.
Ce légitime intérêt suppose, principalement, un élargissement des attributions de police déléguées et postule une restructuration de la collaboration, déjà amorcée, entre ces agents et la police selon un objectif fondamental de complémentarité.
L'idée de base du nouveau concept
Afin de répondre à cette attente, un groupe de travail restreint formé de représentants du département de justice et police et des transports et de l'Association des communes genevoises a été chargé de proposer un nouveau concept d'attributions de tâches de police aux agents municipaux des communes autres que la Ville de Genève (cette dernière étant en l'état régie par un statut différent), mieux adapté aux exigences actuelles en matière de sécurité (au sens large du terme) que le système conventionnel en vigueur.
Ce dernier est effectivement un outil peu approprié à une extension plus poussée des compétences susceptibles d'être octroyées, tant sur le plan territorial qu'au niveau du catalogue des attributions, et, de surcroît, mal adapté au développement plus ambitieux d'une collaboration renforcée avec la police, souhaitée de part et d'autre.
Cette réflexion devait conduire à tirer le meilleur parti possible du potentiel de connaissances et de savoir-faire des agents municipaux, en structurant mieux la collaboration entre ces agents et la police dans l'intérêt de la population.
C'est ainsi qu'il est rapidement apparu que, pour fonder cette complémentarité de moyens, il convenait d'ancrer cette communauté d'efforts dans la loi sur la police afin d'y consacrer:
- le principe d'une délégation de compétences de police en faveur d'un personnel communal qualifé et doté de pouvoirs d'autorité, mais non armé;
- le principe du maintien du rattachement de cette catégorie de personnel aux communes et de sa soumission à l'autorité du maire ou du conseil administratif;
- une définition précise de la fonction de ces agents par rapport au corps de police, moyennant l'abandon du titre «Police municipale» ou de toute autre référence quelconque à la notion de «policier» au profit de l'appellation nouvelle d'agents de sécurité municipaux (ci-après: ASM).
Constitutionnalité du régime légal d'attributions de police aux ASM
En stipulant que les «attributions de l'administration municipale sont déterminées par la loi», l'article 146, alinéa 2, de la constitution genevoise ne fait nullement obstacle à ce que les communes exercent des compétences de police, pour peu que ces attributions soient déterminées par la loi. Cette norme constitutionnelle de réserve de la loi fournit, par ailleurs, un argument en faveur d'un régime de compétences de police légal plutôt que conventionnel.
Quant à l'article 126, alinéa 1, de la constitution genevoise, il déclare que le Conseil d'Etat dispose de la force armée pour le maintien de l'ordre public et de la sûreté de l'Etat et qu'il ne peut employer à cet effet que des corps organisés par la loi.
Il découle de ce qui précède que la constitution genevoise ne s'oppose pas, sur le plan du principe, à l'attribution de compétences de police aux communes autres que la Ville de Genève, à la condition que l'exercice de ces compétences ne requiert pas l'armement du personnel communal qui en serait chargé.
Qu'est-ce alors qu'un ASM?
Evolution et non révolution, l'ASM prend le relais de l'agent municipal d'aujourd'hui, mais avec un champ d'action plus large au bénéfice d'une efficacité accrue et d'une présence plus personnalisée, à savoir:
- compétence territoriale ou à raison du lieu englobant l'ensemble de la commune sans restriction sectorielle;
- extension possible de la compétence à raison du lieu au territoire d'une ou de plusieurs autres communes;
- en cas d'engagements mixtes avec la police, compétence territoriale étendue à l'ensemble du canton;
- attribution générale des amendes d'ordre en matière de stationnement des véhicules;
- enlèvement de véhicules;
- contrôles d'identité dans le cadre de l'exercice des compétences matérielles déléguées;
- concept de collaboration plus développée et structurée avec la police;
- produit des amendes d'ordre infligées par les ASM entièrement acquis aux communes lorsqu'elles en assument le recouvrement et l'encais-sement;
- habillement, équipement et matériel des ASM à charge des communes;
- formation professionnelle et perfectionnement des ASM essentiellement assurés par la police.
L'action sur le terrain ne justifie toutefois pas le statut de policier, avec ses avantages et ses servitudes. La législation genevoise exclut d'ailleurs l'appellation agent de police au niveau communal de même que l'emploi du titre police municipale, puisque la police est exercée dans tout le canton par un seul corps de police, que dirige le chef de la police, et que tous les services de police sont placés sous l'autorité du chef du département de justice et police et des transports (ci-après: département).
Aspect financier du concept ASM 2000
Comme les agents municipaux actuels, les ASM sont engagés et rétribués par les communes et soumis à l'autorité du maire ou du conseil administratif de la commune qui les emploie, leur nomination devant en outre être approuvée par le département.
La contribution de l'Etat dans le concept ASM 2000 consiste à assurer la formation de base et la formation continue des ASM, le cas échéantla formation spécifique des cadres, par le biais du centre de formation de la police, étant précisé que le personnel de la police affecté à cette tâche formative demeure engageable, au besoin, au profit de missions de police. Ces cours seront facturés au prix de revient aux communes concernées.
Quant à l'encaissement par les communes des montants des amendes d'ordre sanctionnant des contraventions aux règles de stationnement, voire de circulation dans certains cas, l'Etat n'aura à déplorer aucun manque à gagner quelconque, étant donné que les nouvelles compétences octroyées aux ASM, respectivement aux agents municipaux nouvelle formule (contrôleurs du stationnement), ne sont en pratique, aujourd'hui, plus guère réprimées par la gendarmerie ou les contrôleurs du stationnement rattachés au département. En effet, ces derniers concentrent leur action avant tout sur le territoire de la ville de Genève, la gendarmerie, pour sa part, s'investissant prioritairement, en fonction des effectifs disponibles, dans la répression des infractions liées aux véhicules en mouvement, subsidiairement aux véhicules en stationnement dans la mesure où il y a mise en danger ou faute grave.
On relèvera enfin que le concepts ASM 2000, comme d'ailleurs le système conventionnel en vigueur, est fondé sur le maintien du principe d'une complémentarité organique - et non d'une substitution - entre les compétences originaires de la gendarmerie et des contrôleurs du stationnement d'une part, et celles déléguées à d'autres entités tels les ASM et les agents municipaux, d'autre part.
II. Commentaire article par article
Article 4, alinéas 1 et 3
L'article 4 de la loi sur la police a la teneur suivante:
1 Le Conseil d'Etat peut déléguer conventionnellement à la Ville de Genève ou à toute autre commune disposant d'un personnel qualifié l'application de certains règlements de police, notamment en matière d'édilité ou de salubrité publique.
2 La surveillance des halles et des parcs de la ville de Genève est de la compétence du Conseil administratif.
3 Indépendamment du régime conventionnel prévu à l'alinéa 1, les communes peuvent avoir, en matière de police rurale, des gardes auxiliaires.
4 Les agents municipaux et gardes auxiliaires sont aux frais des communes. Leur nomination doit être approuvée par le département. Ils prêtent serment devant le Conseil administratif ou devant le maire.
La nouvelle teneur proposée pour l'alinéa 1 porte simplement sur la suppression du régime de délégation conventionnelle d'attributions de police en faveur des communes, ne conservant que la partie traitant du cas spécifique de la Ville de Genève, laquelle demeure, en l'état, régie en la matière par une convention.
Quant à la nouvelle teneur de l'alinéa 3, il s'agit d'une adaptation purement rédactionnelle résultant de ce qui précède, étant entendu que les communes qui le désirent pourront toujours avoir à leur service des gardes auxiliaires chargés de faire respecter le règlement sur la police rurale.
Article 4A
Ce nouvel article constitue le point central du projet de loi. Il consacre tout d'abord l'ancrage de la fonction d'ASM, dotés de pouvoirs d'autorité, dans la loi sur la police, substituant ainsi le régime légal d'attributions de police au régime conventionnel que l'on connaît. Parallèlement, il institue une catégorie particulière de personnel communal assimilable à des contrôleurs du stationnement sous la désignation d'agents municipaux nouvelle formule.
Par ailleurs, cet article pose les principes fondamentaux et les conditions de base régissant les rapports entre l'Etat et les communes selon le concept ASM 2000. Il s'agit notamment de la définition du cadre légal des compétences territoriale et matérielle dévolues à ces deux catégories d'agents et de leur formation, de la collaboration des ASM avec les services de police, en particulier les engagements mixtes, ainsi que des contrôles d'identité susceptibles d'être opérés par les ASM dans l'exercice de leur sphère de compétences.
Modifications apportées à la loi d'application de la législation fédéralesur la circulation routière, du 18 décembre 1987
L'article 12, alinéa 3, de la loi susmentionnée a la teneur suivante:
3 Les agents municipaux sont compétents pour percevoir des amendes d'ordre fixées par convention entre le Conseil d'Etat, d'une part, le Conseil administratif de la Ville de Genève, le maire ou le conseil administratrif d'une autre commune, d'autre part.
Le texte proposé tient compte du maintien, en l'état, des compétences dévolues en la matière aux agents municipaux de la Ville de Genève, en vertu de la convention liant cette dernière au Conseil d'Etat, et consacre la nouvelle situation découlant du concept ASM 2000.
III. Conclusion
Tels sont les grands axes de ce projet de loi formalisant le concept ASM à l'horizon 2000, approuvé par les magistrats communaux lors de l'assemblée générale extraordinaire de l'Association des communes genevoises tenue le 14 février 1996, et appelé à se mettre en place progressivement d'ici à cette échéance pour permettre:
- aux autorités communales de procéder sans heurts aux adaptations nécessaires;
- au personnel communal concerné de mettre à profit cette période transitoire pour parfaire sa formation en fonction des nouvelles tâches attribuées.
Cette nouvelle approche s'inscrit par ailleurs étroitement dans la problématique plus générale de nouvelle répartition des tâches entre l'Etat et les communes.
Dotés de pouvoirs d'autorité reconnus par la loi, les ASM seront des hommes et des femmes de la région: assistance et prévention, contrôle et répression lorsque la sécurité publique le nécessite.
Police et ASM: un partenariat cohérent et efficace, intégré dans une organisation souple et évolutive.
Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à adopter le présent projet de loi.
Préconsultation
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Nous débattons du projet de loi 7661. Mais MM. Grobet, Spielmann et Vanek ont déposé pour la prochaine session le projet de loi 7675 qui traite de la même problématique.
En accord avec M. Grobet, j'aurais souhaité que ce projet de loi soit renvoyé en commission sans autre débat.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.