Séance du
jeudi 24 avril 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
5e
session -
15e
séance
PL 7608
LE GRAND CONSEIL,
vu les articles 80 et 82 de la constitution;
vu la loi établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'année 1996, du 15 décembre 1995;
vu le compte d'Etat de la République et canton de Genève et le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 1996,
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le compte administratif de l'Etat pour 1996 est annexé à la présente loi.
2 Il comprend les comptes de fonctionnement, d'investissement, de financement et de variation du découvert au bilan.
Art. 2
1 Les charges de fonctionnement avant imputations internes sont arrêtées au montant de 4 926 168 475,20 F et les revenus au montant de 4 464 796 260,12 F.
2 Les imputations internes totalisent, aux charges comme aux revenus, 190 929 547,59 F.
3 Le déficit s'élève à 461 372 215,08 F.
4 Ce résultat tient compte d'une dérogation aux dispositions des articles 19, 22 et 49, alinéas 3 et 4, de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, dérogation qui permet le report de dépassements de crédits et de crédits non dépensés 1996 sur les mêmes rubriques du compte 1997, selon les dispositions de l'article 6.
Art.3
1 Les dépenses d'investissement sont arrêtées à 354 896 607,08 F et les recettes à 56 398 636,90 F.
2 Les imputations internes totalisent, aux dépenses comme aux recettes, 29 383 661,05 F.
3 Les investissements nets d'infrastructures s'élèvent à 298 497 970,18 F.
4 Les prêts effectués au fonds de compensation de l'assurance-chômage fédérale s'élèvent à 20 033 000,00 F, les remboursements reçus se montent à 12 209 000,00 F (loi fédérale du 25 juin 1982 sur l'assurance-chômage obligatoire).
5 Le montant relatif aux emplois supplémentaires pour chômeurs s'élève à 28 251 883,65 F.
6 Les investissements nets s'élèvent donc à 334 573 853,83 F.
Art. 4
1 Les investissements nets de 334 573 853,83 F sont autofinancés à raison de 199 162 767,15 F, contrepartie des amortissements. Le solde s'élève à 135 411 086,48 F.
2 Ce solde et le déficit du compte de fonctionnement de 461 372 215,08 F sont financés par le recours à l'emprunt pour un total de 596 783 301,76 F.
Art. 5
1 L'augmentation du découvert du bilan 1996 s'élèveà 598 236 098,73 F (insuffisance de financement 596 783 301,76 F, déduction faite du report à l'actif de 1 452 796,97 F). Sont inscrits à l'actif du bilan en augmentation du découvert à amortir, soit amortissement à rattraper 108 612 000,00 F, emplois supplémentaires pour chômeurs 28 251 883,65 F et déficit de fonctionnement 461 372 215,08 F.
Art. 6
1 La procédure des reports de crédits 1996 sur l'exercice 1997 déroge à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, selon la décision du Grand Conseil du 6 décembre 1996.
2 Les montants ainsi reportés serviront au financement de:
- l'indemnité forfaitaire non intégrée dans l'échelle des traitements, ainsi que la prime de fidélité (selon les modalités fixées dans l'accord avec la fonction publique) par une partie des reports de crédits globaux de la nature 31;
- l'indexation des prestations cantonales complémentaires de l'assurance-vieillesse et survivants et de l'assurance-invalidité, le revenu minimum cantonale d'aide sociale garanti aux personnes âgées, aux veuves, aux orphelins et aux invalides et les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit;
- l'effort fourni par le département des travaux publics et de l'énergie dans le cadre de l'élaboration du projet de budget 1997 et financeront, le cas échéant, des dépassements de crédits sur la nature concernée (charges de bâtiments);
- les éventuels dépassements de crédits des dépenses générales des départements en 1997.
Art. 7
La gestion du Conseil d'Etat pour l'année 1996 est approuvée.
Préconsultation
M. Bernard Clerc (AdG). Les comptes 1996 font apparaître un déficit de 461 millions, soit 180 millions de plus que prévu, ce qui augmente le déficit de près de deux tiers. Les charges sont quasiment identiques à celles de 1995, mais inférieures de 47 millions par rapport au budget.
Ces comptes 1996 sont caractérisés par une crise des recettes, notamment sur le plan des personnes physiques : 197 millions manquent au budget, et 37 millions, par rapport aux comptes 1995. Pour les personnes morales, il manque moins de 34 millions au budget, et plus de 20 millions, par rapport aux comptes 1995.
Nous avons déjà eu l'occasion de dire que ce budget, tout comme d'autres, a été établi sur l'hypothèse d'une reprise de la croissance économique, donc sur l'analyse erronée de la crise - à composantes essentiellement structurelles - que nous traversons.
Tous les députés de l'Entente ont insisté sur le redressement des finances publiques lors du débat sur le budget 1996. Laissez-moi, à cet égard, vous rappeler quelques petites phrases, par exemple celle de M. Brunschwig : «Face à une tribu de «Yaka», qui, de toute façon, ne vote pas le budget, nous soutiendrons l'action du gouvernement et voterons ce budget avec confiance. Il va dans le sens du rétablissement des finances publiques...» M. Bernard Lescaze déclarait à son tour : «Certes, le déficit s'élève encore à 281 millions, mais il ne dépasse que d'une dizaine de millions la cible assignée par le plan de redressement des finances publiques au prix, il est vrai, de la suspension de l'adaptation des barèmes fiscaux au renchérissement.» Enfin, M. Vaudroz disait : «Comme l'an passé, le groupe démocrate-chrétien soutiendra à l'unanimité ce projet de budget 1996. Il s'agit également pour nous d'apporter notre soutien à la politique de redressement des finances publiques et à notre gouvernement.»
Avec une année de recul, il est toujours intéressant de vérifier ce qui a été dit et ce qui a été fait. En ce qui nous concerne, et bien que nous soyons en désaccord avec les objectifs défendus par M. Vaudroz pour réduire ce déficit des finances publiques, nous pensons qu'il a réellement mené une action pour parvenir à cette fin.
Ce n'est pas le cas des partis de l'Entente, force est de le constater aujourd'hui. Voici douze jours, en commission fiscale, ils sont unanimement entrés en matière sur le projet de loi libéral prévoyant une réduction d'impôts de 15%.
Le déficit constaté aujourd'hui ne vous suffit pas. Il vous faut l'aggraver de l'ordre de 300 millions. Dès lors, une conclusion s'impose : votre objectif n'est pas le rétablissement des finances publiques; vous visez celui de justifier, grâce à l'aggravation du déficit, un amoindrissement supplémentaire du rôle de l'Etat.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Depuis que nous connaissons les résultats des comptes, les heures et les moments sont difficiles. Nous devons analyser sérieusement les circonstances qui ont induit un déficit 1996 de l'Etat de Genève supérieur de 180 millions à ce qui avait été budgétisé en 1995.
En 1991, 1992 et 1993, les déficits de notre canton provenaient de l'accroissement des dépenses et étaient largement supérieurs à celui que nous enregistrons pour 1996.
En tenant compte des reports de crédits qui correspondent à des économies concrètes, c'est un montant de 71 millions qui a été économisé durant l'exercice 1996 par rapport au budget. Le volume des investissements consentis par tous pour que l'Etat joue son rôle dans le domaine de la relance est extrêmement important : 392 millions d'investissements d'infrastructures bruts, inclus le bonus à la rénovation que vous avez voté en cours d'exercice et les 30 millions de l'aéroport.
La grande différence - elle n'excuse rien ! - avec les années précitées provient de la stagnation des recettes que je vous avais annoncée en décembre 1996. Au niveau des personnes physiques notamment, nous avons enregistré un moins de 180 millions sur 2,25 milliards par rapport à ce que nous avions budgétisé. Les recettes stagnent en regard des années 1994 - moins 4 millions - et 1995 - moins 38 millions.
Je rappelle que le budget est établi sur les comptes d'une année précédente. Celui de 1996 l'a été sur les comptes 1994 et sur des estimations faites en juin 1995 pour 1996, d'où un hiatus réel d'estimation entre l'année budgétaire «1er janvier/31 décembre» et l'année des estimations «juin 1995/juin 1996».
Dans ce domaine, les estimations sont difficiles, particulièrement en cette période de crise où les prévisions économiques ont été régulièrement modifiées après l'arrêt de nos paramètres.
Je m'adresse maintenant à celles et ceux qui ont entendu M. Villiger à l'université de Genève, au début de cette semaine. Si les problèmes rencontrés par la Confédération sont, proportionnellement, tout aussi importants, voire davantage, que ceux des cantons, la Confédération voyant aussi son déficit se creuser du fait de recettes non atteintes, je suis, pour ma part, moins optimiste que notre ministre fédéral. En effet, je considère avec d'autres - et les paramètres que j'ai donnés pour le projet de budget en 1998 en tiennent largement compte - que la crise se poursuit. Bien qu'ayant eu la critique facile, certains le constatent a posteriori. Après l'embellie de 1993 et 1994, le PNB n'a pas progressé en 1995 et en 1996. Il n'augmentera probablement pas en 1997.
Nous sommes à un tournant, avec une équation encore plus difficile à résoudre au regard des besoins de la population et du rôle que vous voulez voir jouer par l'Etat dans notre économie en cette période de crise et de stagnation des recettes fiscales. Les travaux de commission seront intéressants sur ce plan-là, et je me réjouis déjà de nos discussions et de vos analyses.
Par rapport aux critiques de nos estimations fiscales, dont le modèle économétrique est utilisé depuis plus de dix ans, j'aimerais dire que j'ai mandaté, voici un mois, le professeur Carlevaro de l'université de Genève, bien connu des membres de la commission fiscale, pour qu'il analyse l'ensemble de l'évolution des recettes de l'Etat de ces trois dernières années, le modèle économétrique de prévision et le différentiel entre les revenus bruts et les revenus nets imposables.
La crise conduit, d'une part, à des augmentations, à commencer par celles des primes d'assurance, et accroît, d'autre part, les déductions possibles. Vous savez pourquoi je me suis toujours opposé à des projets visant à diminuer les recettes fiscales. Je considère qu'il faut les conserver, vu notre état d'endettement, et poursuivre inlassablement nos efforts, dans la mesure du possible et en dépit des difficultés actuelles, pour réduire notre déficit.
C'est dans ce sens que le gouvernement continuera à oeuvrer tout au long de l'exercice 1997 et lors de la préparation du budget 1998.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.