Séance du
vendredi 21 février 1997 à
17h
53e
législature -
4e
année -
3e
session -
8e
séance
M 1113
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le statut de la presse et le fonctionnement de la démocratie sont étroitement liés, nous le savons. Certaines évolutions au sein de la presse rendent plus difficile le débat d'idées et la transparence nécessaire à la compréhension des enjeux. Parmi ces évolutions nous trouvons le mouvement de concentration de la presse, qui n'est pas contrebalancé par une obligation de pluralisme interne, comme c'est le cas pour les monopoles reconnus comme tels que sont la radio et la TV.
Le quotidien «La Suisse» a disparu en mars 1994, «Le Courrier» et le «Journal de Genève», deux quotidiens suivant une éthique élevée et défendant des opinions, se battent pour leur survie. Les pouvoirs publics, notamment la Ville de Genève, mais aussi le Grand Conseil, en votant la motion 908 se sont émus de cette situation.
Le vote populaire du 1er décembre 1996 a écarté toute possibilité d'aide directe à la presse. Cependant, le débat a toujours été clair au sujet de l'aide indirecte. Personne ne s'oppose à ce que la presse soit soutenue, par le biais d'annonces mieux réparties, et plus abondantes, ou par le biais de souscriptions plus systématiques d'abonnements, dans les salles d'attente de bureaux officiels ou par les services par exemple.
Le Grand Conseil pourrait publier ses ordres du jour pas seulement dans la «Feuille d'avis officielle», et certains départements diversifier également leurs publications obligatoires. Afin de clarifier les possibilités d'action, il serait judicieux de faire l'inventaire des mesures de soutien indirect, et de proposer de mettre en oeuvre celles qui présentent le meilleur rapport coût-bénéfice sous l'angle du maintien de la pluralité de la presse.
En fonction de ces explications, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter la présente proposition de motion.
Débat
M. René Longet (S). Depuis la disparition de «La Suisse», voilà un peu moins de trois ans, le Grand Conseil... (Brouhaha.)
La présidente. J'aimerais que M. le député puisse poursuivre, afin de terminer le département de l'économie publique ce soir. Allons, un peu de courage et d'efficacité !
M. René Longet. J'espère que ce Grand Conseil a été sensibilisé par la situation et qu'il est conscient de l'importance de la diversité de la presse dans notre canton. C'est l'une des interfaces majeures entre les citoyens et les institutions, entre les élus et les électeurs.
La presse pose tous les problèmes liés à l'information, à sa circulation, à la formation de l'opinion. C'est un agent de la démocratie, et l'état de santé de celle-ci est directement lié à celui de la presse.
Voilà presque trois ans, nous avons voté un certain nombre de résolutions, notamment une motion proposée par le groupe socialiste ayant pour objet d'intervenir au niveau fédéral, afin de maintenir la diversité de la presse ainsi qu'un statut lui permettant de jouer son rôle dans la démocratie.
Ensuite a eu lieu le débat sur l'initiative que vous connaissez. Depuis son rejet, il y a quelques mois, l'aide directe à la presse n'est plus à l'ordre du jour.
Il reste encore d'autres moyens de lui venir en aide. Il s'agit de l'aide indirecte, dont nous aimerions parler ce soir. Quelques pistes figurent dans l'exposé des motifs : davantage d'annonces et d'abonnements, par exemple. Mais nous ne voulons pas dresser de listes limitatives. Nous souhaitons, au contraire, grâce à cette motion signée par tous les groupes sauf un, que le Conseil d'Etat fasse l'inventaire de ce qu'il est possible de faire et propose des mesures qui seraient de notre compétence.
Cela signifie également que le Grand Conseil exprime cette volonté politique. Or, il y a peu de temps, la commission des finances avait proposé de réduire le nombre d'abonnements des services de l'Etat.
En votant cette motion, nous confirmons cette volonté du Grand Conseil, même si elle était différente il y a quelques mois ou quelques années.
M. John Dupraz (R). Depuis la disparition de «La Suisse», il reste encore quatre quotidiens dans ce canton, dont deux ont des difficultés. Ainsi, nous pourrions nous retrouver avec deux quotidiens du même groupe, et j'aimerais dire à nos partenaires de gauche que ce serait regrettable pour Genève.
Si l'Etat ne peut pas intervenir directement pour soutenir la presse, il faut songer aux nombreuses publications internes. Même si certaines servent plus à mettre en valeur le chef du département qu'à apporter une véritable information, on pourrait peut-être utiliser la presse quotidienne et louer des pages pour diffuser des informations destinées à toute la population, plutôt que d'éditer un fascicule spécifique au département. (Remarque de M. Maitre.) Mais, Monsieur Maitre, vous ne serez bientôt plus au Conseil d'Etat, ce sera pour votre successeur !
Voilà donc un moyen de venir en aide à la presse, tout en donnant une plus large information à la population. C'est la raison pour laquelle nous avons cosigné cette motion, en espérant que le Conseil d'Etat lui réservera un bon accueil.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
concernant les aides indirectes à la presse
LE GRAND CONSEIL,
- considérant la motion 908 votée par le Grand Conseil le 29 avril 1994 (p. 1510);
- considérant la votation populaire du 1er décembre 1996 sur l'initiative «La Suisse», excluant une aide directe du canton à la presse;
- vu les déclarations de toutes les forces politiques réclamant d'épuiser les possibilités d'aide indirecte à la presse,
invite le Conseil d'Etat à
- faire l'inventaire de l'ensemble des mesures d'aide indirecte à la presse à la disposition du canton;
- lui faire rapport sur ses intentions en la matière.