Séance du vendredi 21 février 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 3e session - 8e séance

M 1106
7. Proposition de motion de Mmes et MM. Pierre Vanek, Luc Gilly, René Ecuyer, Gilles Godinat, Christian Grobet, Bernard Clerc, Liliane Johner, Erica Deuber-Pauli, Jean Spielmann, Evelyne Strubin et Claire Chalut sur les conséquences de la faillite de la société Noga pour l'économie locale, la Banque cantonale et les intérêts publics en cause. ( )M1106

LE GRAND CONSEIL,

- vu la mise en faillite de la Compagnie Noga d'importation et d'exportation SA;

- vu les conséquences de cette faillite sur les autres sociétés dont M. Nessim Gaon est le propriétaire économique;

- vu les implications qui en résultent pour l'économie locale et la Banque cantonale;

- vu les relations de certaines de ces sociétés avec l'Etat de Genève, la Ville de Genève et d'autres collectivités publiques;

- vu les intérêts publics en cause,

invite le Conseil d'Etat

à lui présenter, en fonction du registre des poursuites des offices de poursuites de notre canton, un rapport sur la situation des diverses sociétés propriété de M. Nessim Gaon et plus particulièrement sur celles concernant directement l'Etat et la Ville de Genève, à savoir:

- la SA du Grand Casino, propriétaire de l'hôtel Noga Hilton construit sur un terrain propriété de la Ville de Genève concédé en droit de superficie;

- la société Noga Invest SA, bénéficiaire de subventions de l'Etat de Genève pour ses frais d'architecte et d'un droit de superficie portant sur un terrain propriété de l'Etat dans le périmètre de la zone industrielle de Sécheron,

à lui présenter un rapport sur le montant des arriérés d'impôts de ces diverses sociétés, notamment la société Noga Invest SA;

à lui présenter un rapport sur le montant des hypothèques consenties par la Banque cantonale grevant des biens immobiliers propriété des sociétés de M. Nessim Gaon ou propriété personnelle de ce dernier, ainsi que le montant des arriérés d'intérêts et d'amortissements dus à la Banque et le relevé des poursuites notifiées par cette dernière pour le recouvrement de ces sommes

EXPOSÉ DES MOTIFS

La Cour de justice vient de prononcer la faillite de la société Noga, propriété de M. Nessim Gaon, dont l'état d'insolvabilité est notoire depuis longtemps et qui a bénéficié de la part du Tribunal de première instance d'une bienveillance incroyable dans le cadre de ses demandes successives d'ajournement de faillite motivées par une prétendue créance contre un Etat étranger contestée par ce dernier. On peut craindre que ces refus successifs du Tribunal de prononcer la faillite n'ait fait qu'accroître le découvert de cette société et son surendettement au détriment de ses créanciers.

Cette faillite interpelle les pouvoirs publics en raison de l'ampleur du découvert et des risques de faillites en résultant pour la douzaine d'autres sociétés du groupe Noga, dont certaines sont également fortement endettées, ou pour d'autres sociétés n'en faisant pas partie et des conséquences en découlant pour l'économie locale, la Banque cantonale et certains intérêts publics liés à l'activité de sociétés telles que la SA du Grand Casino ou Noga Invest SA. Le Conseil d'Etat et la Banque cantonale, établissement public garanti par l'Etat, se doivent - à présent plus que jamais - de donner à ce sujet les éclaircissements demandés à réitérées reprises. Le Conseil d'Etat doit notamment s'expliquer sur les diverses faveurs dont Noga Invest SA a bénéficié pour ses projets immobiliers à Sécheron, sur la restitution du terrain concédé à cette société en droit de superficie pour son «projet bidon» d'usine destinée à Sécheron SA, sur les montants qu'elle a versés en contrepartie de ce droit de superficie, sur les subventions qui lui ont été versées pour ses frais d'architecte alors qu'elle est débitrice d'arriérés d'impôts.

La Banque cantonale, qui porte avec le Conseil d'Etat une lourde responsabilité dans la débacle de l'opération spéculative de Sécheron, doit rendre publique l'importance des crédits hypothécaires consentis par la Banque cantonale et le montant des intérêts et amortissements dus sur ces crédits. Elle doit expliquer les motifs pour lesquels il n'y a pas de poursuites enregistrées à l'office des poursuites pour les importants arriérés d'intérêts et d'amortissements dus par Noga Invest SA, alors que des débiteurs ordinaires sont immédiatement mis aux poursuites en cas de retard dans leurs paiements.

Elle doit dire la vérité sur les conditions de rachat de Sécheron SA puis, une année plus tard, de sa holding, indiquer le prix des rachats sous forme d'abandon de créances au profit de Noga Invest SA (bien que la direction de la Banque ait refusé de rendre public le montant de ce rachat, la presse a articulé à l'époque qu'il s'agissait d'une somme de 50 millions de francs !), faire connaître la situation financière réelle de cette entreprise décrite sous un jour particulièrement favorable lors de son rachat, indiquer notamment si elle a fait l'objet d'une expertise avant son rachat, l'importance de sa production à Genève, la nature et la solidité des liens avec les sociétés jointes («joint ventures») formant la holding, l'état des négociations quant à sa revente (qui devait intervenir dans les mois suivant son rachat), le montant des augmentations de capital-actions pris en charges par la BCG ainsi que le montant des prêts qu'elle a éventuellement consentis ou des fonds propres qu'elle a investis dans cette société, notamment sous forme d'augmentations de capital.

Débat

M. Christian Grobet (AdG). Il n'y a pas si longtemps, la presse publiait un article faisant état du fait que la plupart des banques cantonales de Suisse alémanique pratiquaient un taux d'intérêt hypothécaire à 4,5%, alors que celui des banques cantonales romandes était à 5%; ce qui est un écart relativement important.

Voilà quelques jours, on nous a annoncé que la Banque cantonale n'ajusterait pas son taux à celui des banques d'outre-Sarine. Nous ne parlons pas de la banque Migros qui est, sans vouloir faire de la publicité à l'égard de cette grande société coopérative... (M. Maitre sourit.) Oui, on peut toujours sourire, Monsieur Maitre, mais cette banque offre aujourd'hui, en Suisse, le taux d'intérêt hypothécaire le plus bas. D'ailleurs, les analystes financiers expliquent que cette banque a mené une politique raisonnable au niveau des prêts hypothécaires; elle n'a donc pas connu les «bouillons» d'un certain nombre d'autres banques.

Si, aujourd'hui, le taux de l'intérêt est plus élevé à Genève, notamment, qu'en Suisse alémanique, la raison en est que la Banque cantonale doit constituer des provisions pour un certain nombre d'affaires extrêmement malheureuses, ainsi que pour des prêts bancaires consentis, quelques années en arrière, avec énormément de légèreté. C'est le moins que l'on puisse dire !

Au demeurant, nous relevons que des opérations très curieuses continuent à s'effectuer à la Banque cantonale. Récemment, on a pu lire dans la «Feuille d'avis officielle» que des immeubles, propriété de la banque, ont été vendus pour 120 millions à une fondation. Or, quelques jours plus tard, à la suite de certaines interrogations, la Banque cantonale a fait, tout à coup, un communiqué, et on peut se demander pourquoi cette information n'a pas été donnée à l'avance. Il faut dire que, de manière systématique, la Banque cantonale donne soit des informations «à la retirette» ou alors, souvent, des informations erronées. Je ne donnerai qu'un seul exemple :

Lorsque les sociétés du peu intéressant sieur Stäubli commençaient à être mises en faillite dans le canton de Vaud, un porte-parole, bien entendu anonyme de la Banque cantonale - mais cela a été publié dans un grand quotidien au mois de septembre - a déclaré qu'il n'y avait aucun souci à se faire concernant la solidité de la société JS Holding SA. Depuis lors, on sait ce qu'il est advenu de ce holding.

En définitive, nous ne pouvons pas, dans l'intérêt de l'économie genevoise, nous désintéresser de la manière dont la Banque cantonale a géré les fonds, a consenti certains prêts, a accumulé les pertes. Nous prenons acte du fait que la banque a constitué des provisions et que, par voie de conséquence, elle devrait être en mesure de faire face aux difficultés rencontrées par certains de ses débiteurs. Il faut noter que certains d'entre eux sont lourdement endettés et, notamment, M. Gaon et ses sociétés. J'y reviendrai tout à l'heure.

Il n'en demeure pas moins que la nécessité de constituer des provisions fait que la banque ne peut pas offrir les taux d'intérêt que l'on pourrait espérer. En effet, pour relancer l'économie, des prêts à des taux aussi bas que possible seraient souhaitables. Malheureusement, la Banque cantonale ne peut pas fournir ces taux qui amélioreraient la vie d'un certain nombre d'entreprises.

Notre motion parle du cas particulier de la société Noga. Pourquoi ? Je vous rappelle que le groupe socialiste avait déposé, il y a un an ou deux, une motion demandant la mise sur pied d'une commission d'enquête pour examiner un certain nombre d'éléments. Cette motion a été renvoyée en commission pour en discuter l'opportunité. La majorité des membres a estimé qu'aucun élément concret ne permettait de justifier la création d'une telle commission.

Néanmoins, nous étions un certain nombre à faire état de nos préoccupations quant à l'importance des dettes de la société Noga et celles de ses filiales. Quelques députés - libéraux, me semble-t-il - imputaient la responsabilité de cette faillite à ses actionnaires. C'est faux, car une faillite peut mettre l'actionnaire dans une situation difficile, bien que certains grands débiteurs de la République semblent se porter relativement bien et avoir des résidences, pas seulement dans la République ! Par exemple, on voit un notaire félon, installé en Bourgogne, et recherché à Neuchâtel pour dettes spéculatives, commises notamment à Genève ! Cela, simplement pour dire que le failli n'est pas toujours celui qui «trinque» !

Par contre, ceux qui «trinquent», à coup sûr, sont effectivement les créanciers du failli, car ils ne sont pas remboursés et font des pertes énormes. Mais nous ne pouvons pas nous désintéresser de faillites importantes qui portent des coups très durs à notre économie, notamment de faillites de sociétés avec lesquelles soit notre Banque cantonale soit l'Etat ont des relations.

Or, on constate que, depuis le débat qui a eu lieu dans ce Grand Conseil au moment du dépôt de la motion socialiste, la situation du groupe Noga s'est sérieusement détériorée. Certains d'entre nous avaient prétendu, à juste titre, que la créance russe avait été invoquée pour «redorer» un bilan en état de surendettement.

Aujourd'hui, la sentence arbitrale est tombée à New York et il s'avère que, d'après les renseignements que nous avons, Noga n'a bénéficié dans cette sentence arbitrale que d'une créance ramenée à 23 millions. Par ailleurs, certaines dettes, qui ont été jugées dans d'autres arbitrages, ont été retirées de l'arbitrage principal. En rapport avec d'autres sentences, la société Noga devra payer plusieurs dizaines de millions.

En définitive, la créance de 300 millions - ne parlons pas de la prétention de Noga à une créance de près de 700 millions de francs qu'elle invoquait à l'encontre de la Russie - s'avère être, comme nous le présentions, une créance fictive. Par voie de conséquence - la faillite étant prononcée contre cette société et suspendue pour le moment - on ne voit pas comment la société Noga réussirait à éviter le dépôt de son bilan.

A partir de là, une douzaine de sociétés sont imbriquées dans le groupe Noga. Il semble déjà que la société Oléagine ait pris le relais de la société Noga, considérant que Noga - tout le monde le sait - est en état de surendettement total, donc d'incapacité de paiement, sans activités lucratives, et qu'elle n'a, du reste, plus d'activités commerciales.

Mais que se passera-t-il lorsqu'un certain nombre de ces sociétés tomberont en faillite, malgré certaines attitudes pour le moins complaisantes, il faut le dire ? On se le demande, en effet - la société Noga Invest étant probablement l'une des plus endettées du groupe - lorsque l'on constate que, tout récemment encore, aucune poursuite n'était inscrite contre elle à l'office des poursuites, alors qu'elle est débitrice de plusieurs centaines de millions et qu'elle ne paie pas ses intérêts depuis des années. Cela a été admis par M. Joye dans un récent débat.

On croit «halluciner» en pensant qu'aucune banque - semble-t-il - ne met aux poursuites Noga Invest, ni n'est intéressée à récupérer sa créance. Par ailleurs, une opération nous avait beaucoup inquiétés - et nous l'avions indiqué au Conseil d'Etat - il s'agissait du rachat partiel de la société Sécheron SA, par la Banque cantonale. A l'époque, vous nous aviez rassurés, Monsieur Maitre, tout en nous indiquant qu'il fallait sortir cette société du groupe Noga, afin qu'elle ne se laisse pas entraîner dans la faillite éventuelle de Noga Invest, ce qui montre que vous aviez fait la même analyse que nous, celle du château de cartes, qui lorsqu'un élément tombe risque d'entraîner la chute des autres. Et vous aviez salué le sauvetage de la société Sécheron SA.

Mais, outre le fait qu'il n'est pas dans la pratique usuelle qu'une banque devienne propriétaire d'une entreprise industrielle - ce n'est pas tout à fait son rayon d'activités - on a pu lire, dans des publications ultérieures, que le capital de Sécheron SA avait augmenté de manière importante - sauf erreur, d'une quinzaine ou d'une vingtaine de millions - qui ont forcément été souscrits par l'actionnaire actuel, soit la Banque cantonale.

Alors, comment se fait-il que, un an à peine après son rachat, il faille injecter 15 à 20 millions de francs dans une société, dont on nous a dit qu'elle était si prospère ! Je crois savoir que la Banque cantonale a procédé à d'autres investissements dans l'entreprise Sécheron SA. En effet, en plus de cette augmentation du capital-action, la Banque cantonale a encore prêté de l'argent à la société Sécheron SA.

La présidente. Je vous remercie de bien vouloir conclure, Monsieur le député !

M. Christian Grobet. J'ai presque terminé, Madame la présidente ! Simplement, nous trouvons certains éléments très préoccupants. Nous sommes persuadés que le groupe Noga ne continuera pas à vivre en état de réanimation artificielle pendant des années encore. A ce sujet, nous devrions, d'ores et déjà, avoir un certain nombre de renseignements.

Je suggère que cette motion soit renvoyée en commission, car il est important que nous puissions entendre les responsables de la Banque. Même si l'Etat a voulu se dégager de sa responsabilité de contrôle en la confiant à la Commission fédérale des banques, il n'en demeure pas moins que la Banque cantonale est un établissement public et que nous avons le droit de connaître son système de gestion. En plus, nous n'acceptons pas le fait que, lorsque l'on demande des explications, la direction de cette banque nous réponde avec une certaine arrogance qu'elle n'a de comptes à rendre à personne et que, de toute façon, elle a provisionné. Cette attitude est inacceptable ! Le fait qu'elle ait constitué des provisions pour des pertes éventuelles n'excuse ni la gravité de certains actes ni les conséquences économiques qu'ils entraînent pour notre canton.

M. Pierre Kunz (R). Comme certains s'en souviennent peut-être, je n'ai jamais été favorable à la création de la BCG, telle qu'elle existe aujourd'hui, c'est-à-dire majoritairement en main de l'Etat. En effet, j'ai toujours pensé qu'un tel statut ne pouvait être que très inconfortable pour la BCG, aussi bien commercialement que politiquement. Je me sens donc particulièrement à l'aise pour dire ce soir l'indignation, Monsieur Grobet, qu'inspire cette motion aux radicaux, autant d'ailleurs que le projet de loi 7554 qui figure au point 98 de notre ordre du jour.

J'ai toujours craint les pressions dangereuses que pourraient exercer sur un établissement public certains milieux peu scrupuleux, dans le but unique d'en tirer un profit politique. Malheureusement, depuis la fondation de la BCG, les faits ne m'ont que trop donné raison.

La gauche, au cours de ces dernières années, n'a cessé d'intriguer en vue de tirer le parti maximum de cette faiblesse structurelle. Cette banque est dangereusement exposée aux assauts de ceux qui, sans aucune préoccupation pour l'intérêt général, ni celui, en particulier, des petits épargnants et des petits clients de la banque, ne visent qu'à l'affaiblir et à la déstabiliser et, au-delà, bien entendu, la majorité politique de ce canton.

Pourtant, la BCG n'est ni meilleure ni pire que les autres banques, même les plus grandes. Comme ces dernières, la BCG souffre de plusieurs boulets : ceux que feu la Banque hypothécaire et feu la Caisse d'épargne ont apporté au bilan de la nouvelle Banque cantonale. Comme les autres banques, la BCG doit gérer certains dossiers pour le moins délicats en parant au plus pressé, parfois en renonçant à tout ou partie de l'intérêt pour espérer sauver le capital. Comme les autres banques, la BCG doit et devra peut-être encore... - mais oui, Monsieur Grobet ! - ...comptabiliser des provisions pour débiteurs insolvables ou en tout cas douteux.

Pourtant, toutes ces mesures ne sont pas prises dans l'incohérence, dans le désordre ou dans le cadre, comme vous le laissez supposer, de «combines» ! Elles sont prises sous la surveillance de la très sévère et sérieuse Commission fédérale des banques qui est chargée de sauvegarder, contrairement à l'Alliance de gauche, les intérêts des déposants et des créanciers de la BCG.

Evidemment, par rapport aux autres banques, la BCG souffre d'un lourd handicap. Elle est confrontée aux attaques incessantes, malhonnêtes et malveillantes de politiciens aussi incompétents que peu scrupuleux et prêts à toutes les infamies pour assurer leur avenir politique.

Ces politiciens cultivent la rumeur, prétextant, successivement : Gaon, Noga SA, Stäubli, JS Holding SA, Sécheron et d'autres encore. Ils flattent bassement la mauvaise humeur compréhensible des petits patrons, cherchent à allumer le doute, puis la peur - mais oui la peur - même chez les petites gens ! Ces politiciens ne poursuivent que des objectifs purement électoralistes et démagogiques. Il sont indignes de nos institutions. D'ailleurs, ils ne sont absolument plus crédibles, et c'est bien pour cela que les radicaux condamnent vigoureusement et sans appel leurs agissements. Ils demandent à cette assemblée que cette motion soit rejetée en discussion immédiate. (Applaudissements.)

Mme Micheline Spoerri (L). Il est probablement vain de s'interroger sur les motivations des motionnaires qui, depuis le début de la législature, s'en sont pris, plusieurs fois par an, par voie de motion, de résolution et même par la proposition de constitution d'une commission d'enquête, aux affaires de M. Nessim Gaon.

Certains des motionnaires agissent, sans doute, pour des motifs idéologiques. Par ce biais, je ne puis m'empêcher de penser que d'autres poursuivent des contentieux personnels. Une chose est certaine, les affaires de M. Gaon auront constitué, tout au long de ces trois années, le principal tremplin politique d'une formation en panne de sujets plus consistants.

Après avoir apporté - avec un certain succès, il faut le dire - toutes les entraves possibles à la réalisation de la Maison de l'Europe et calomnieusement prétendu que M. Gaon ou ses sociétés ont bénéficié d'avantages indus, les signataires nous proposent aujourd'hui une motion sur les conséquences de la faillite de la société Noga.

Contrairement au premier des considérants, la compagnie d'importation et d'exportation Noga SA n'est pas en faillite. Le jugement prononcé en ce sens par la Cour de justice a été suspendu par le Tribunal fédéral; la décision de notre autorité suprême n'est donc pas rendue et pourrait ne pas l'être avant plusieurs semaines.

Il est donc inexact, et en tout cas prématuré, de parler de la faillite de cette société. Par conséquent, il est trop tôt pour parler des conséquences, telles qu'elles sont évoquées dans le deuxième considérant. Personne n'ignore - et M. Grobet en a parlé tout à l'heure - que le devenir du groupe est étroitement lié au résultat d'un arbitrage qui oppose cette société au gouvernement de Russie. Depuis le dépôt de la motion - nos sources ne convergent pas forcément, Monsieur Grobet - une première sentence arbitrale a été rendue en faveur du groupe de M. Gaon pour des montants qui, selon la presse, sont de l'ordre de 100 millions de dollars, sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient être, en outre, octroyés à l'occasion d'une sentence complémentaire. Le spectre de la faillite semble donc s'éloigner.

Nous savons, Mesdames et Messieurs les députés, qu'une faillite entraîne toujours des implications pour l'économie locale. Il serait certainement dommageable pour Genève que la société de M. Gaon doive être liquidée. Des dizaines, peut-être des centaines d'emplois seraient perdus, ce dont Genève n'a pas particulièrement besoin en ce moment.

A propos du troisième considérant, j'observe que, dans les centaines ou même dans les milliers d'entreprises ayant connu des difficultés ces dernières années à Genève, aucune n'a suscité autant d'intérêt de la part des motionnaires que celle dont il est question ce soir, sauf lorsqu'il s'est agi du journal «La Suisse», où, alors même que la conduite de l'entreprise était sujette à caution, chacun dans les rangs d'en face réclamait que tout soit mis en oeuvre pour sauver ce qui pouvait l'être, en particulier, les emplois.

Cela voudrait-il dire qu'il y a deux catégories d'employés : ceux du journal «La Suisse», qui méritent d'être défendus, et ceux de M. Gaon qui ne seraient pas dignes d'intérêt. En effet, on se le demande lorsque l'on voit avec quelle impatience - c'est le moins que l'on puisse dire - les motionnaires attendent de voir se vérifier leurs mauvais augures.

Pardonnez-moi de vous rappeler, Monsieur Grobet, que ceux qui «trinquent» sont d'abord les employés ! Quant aux invites adressées au Conseil d'Etat, elles ne semblent pas plus crédibles. Le Conseil d'Etat est invité à compiler le registre des poursuites et à faire rapport au Grand Conseil. Faut-il vous rappeler - ce qui m'étonnerait - que ce registre est accessible à tous ceux qui ont un intérêt légitime à sa consultation ?

M. Christian Grobet. C'est-à-dire ?

Mme Micheline Spoerri. A vous de voir, Monsieur ! Selon les motionnaires, des détails particuliers devraient être communiqués au sujet de la SA du Grand Casino qui, de l'avis général, est une entreprise saine. C'est d'ailleurs si vrai que la Ville de Genève, que l'on ne peut tout de même pas suspecter de sympathie vis-à-vis de M. Gaon, continue à traiter avec lui pour l'organisation du Casino, qu'elle lui a d'ailleurs confisqué après l'avoir, à une certaine époque, supplié de le créer. C'est ainsi !

Enfin, voilà une nouvelle proposition à caractère nettement diffamatoire. Le Conseil d'Etat est invité à proposer un rapport sur la situation fiscale des sociétés de M. Gaon. Outre que cela constituerait une violation du secret fiscal, la formulation de l'invite laisse penser, contrairement aux affirmations répétées du Conseil d'Etat, que ces sociétés seraient au bénéfice d'un traitement privilégié. Et c'est de la même manière que vous nous proposez, tout simplement, de violer le secret bancaire en obtenant des renseignements sur l'état des engagements de M. Gaon ou de ses sociétés auprès de la Banque cantonale; et vous prétendez encore que la Banque cantonale a une attitude arrogante...

Mesdames et Messieurs les députés, la malignité - je ne vois pas d'autre mot - des propositions qui nous sont soumises est insupportable. Elle ne trompe plus personne et démontre surtout que les motionnaires n'ont, dans leur démarche, aucun égard pour le véritable intérêt public.

Dans la meilleure des hypothèses, ils se livrent à un exercice d'acrobatie politicienne, dont ils ont le triste record et auquel s'est livré, une fois de plus, M. Grobet et, dans la pire des hypothèses, à une manifestation d'antisémitisme... (Remarques sur les bancs de la gauche.) - il faut croire que cela touche - ...qu'avait déjà relevée, à juste titre, il y a quelques mois dans cette enceinte, M. Claude Blanc.

Les libéraux ne sont disposés à entrer ni dans l'une ni dans l'autre de ces vues, aussi rejetteront-ils cette proposition de motion qu'il est préférable de ne pas qualifier. Cependant, permettez-moi, à titre personnel, de regretter l'acharnement manifesté contre la personnalité de M. Nessim Gaon. Acharnement qui finit par entraîner une atteinte à sa dignité.

En conclusion, je soumets à la réflexion des motionnaires, du moins à ceux d'entre eux qui se complaisent à ce jeu indigne, les propos d'une grande dame de la résistance française, Mme Lucie Aubrac, qui déclarait, récemment, lors de l'émission télévisée «La marche du siècle» : «Il ne faut jamais accepter quelque chose qui porte atteinte à la dignité humaine, sinon un jour, on ne peut plus se regarder en face.»

Mme Micheline Calmy-Rey (S). J'ai été tentée de ne pas répondre directement à Mme Spoerri et M. Kunz, tant leurs propos sont déplacés. Comme ils sont excessifs, ils se discréditeront d'eux-mêmes, me suis-je dit. Mais je ne souhaite tout de même pas laisser passer le reproche d'antisémitisme. Madame Spoerri, l'antisémitisme a conduit des millions de gens dans des fours crématoires. Je trouve choquant d'utiliser ce mot dans un débat politique sur une motion.

Mesdames et Messieurs, en automne 1995, ce Grand Conseil refusait une proposition du groupe socialiste de créer une commission d'enquête parlementaire qui avait pour but de connaître la situation du groupe Gaon et de déterminer les mesures à prendre pour garantir les intérêts publics au vu des difficultés connues de ce groupe. Aucune réponse n'a été donnée à cette demande. Par conséquent, la motion de nos collègues s'adressant au Conseil d'Etat nous apparaît opportune, et nous la soutenons.

Il n'est pas toujours facile de donner l'information et de susciter le débat public lorsque l'on risque de porter atteinte à des intérêts économiques. Mais la démocratie ne peut pas fonctionner sans une certaine morale de comportement, sans un surcroît de responsabilités et de conscience de la part de ceux qui en sont les agents. Jusqu'à ce jour, le Conseil d'Etat et la majorité de ce Grand Conseil ont surtout fait montre de leur volonté de ne pas savoir, de ne pas donner d'information et de ne pas prendre de mesures.

A entendre vos discours, ce ne sont pas les demandes réitérées de la gauche, d'obtenir une certaine information et une certaine transparence sur cette affaire qui vous surprennent, mais bien votre volonté de ne pas savoir et quand vous détenez l'information de ne pas la dire.

Vous me permettrez une dernière remarque touchant à la Banque cantonale, à son rôle et au contrôle financier de l'Etat sur les comptes et la gestion de la Banque cantonale tels qu'ils apparaissent dans la motion proposée par nos collègues.

La Banque cantonale n'est pas une banque privée n'ayant à se soucier que très vaguement de l'intérêt public. Il s'agit d'un établissement financier aux mains des collectivités publiques. Il est donc légitime que son rôle dans certaines affaires qui ont défrayé la chronique soit connu.

Sans conteste, l'héritage des années folles pèse sur l'activité de la Banque cantonale. Ces années ont coïncidé avec le changement de stratégie de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire qui, d'un statut d'instituts prioritairement hypothécaires, sont devenus une banque universelle : la Banque cantonale.

A l'époque, il n'y avait pas que de bonnes affaires sur les marchés, et la Banque cantonale a dû, malheureusement, faire un milliard de réserve pour couvrir des crédits délicats.

Mais, en même temps, la mutation en banque universelle place la Banque cantonale en concurrence avec les grandes banques, comme la SBS, l'UBS, sur une place financière très bancarisée, et son statut de Banque cantonale lui confère en outre un rôle d'utilité publique, comme celui d'aider les PME, de soutenir l'emploi, de maintenir des taux hypothécaires bas et des taux d'épargne élevés. A l'évidence, nous demandons beaucoup à la Banque cantonale, et ces exigences ne lui permettent pas d'afficher une rentabilité comparable à celle des autres banques. Elle doit répondre à la concurrence, bien qu'elle ne soit pas, comme d'autres entreprises publiques autonomes, au bénéfice d'un monopole.

Par conséquent, juger publiquement, comme le propose la motion, de la gestion de cette dernière, n'est pas opportun à nos yeux. Les socialistes n'entendent pas porter un jugement sur les risques pris par la Banque cantonale dans cette affaire, ni dans aucune autre. Pour ce faire, il existe des statuts et des organes désignés par la loi. Je vous remercie.

M. David Hiler (Ve). A mon avis, il y a une nuance à faire entre ce débat et le texte de cette motion. En effet, si l'on renonce à prendre en compte le contentieux latent qui existe entre certaines forces politiques de ce parlement, on parvient à des conclusions fort différentes.

Aujourd'hui, chacun sait dans l'opinion publique que la société Gaon a des problèmes et que les différentes sociétés de ce groupe ont des relations «privilégiées», que n'ont pas la majorité des entreprises, avec la Ville ou l'Etat en vertu de certains accords contractuels. Madame Spoerri, je vous rassure tout de suite, ce ne sont pas des magouilles ou autres manoeuvres, mais des accords.

A l'évidence, il existe des enjeux publics et si le château de cartes devait tomber - ce que je ne souhaite pas, et j'espère que vous me croyez - ce serait fort ennuyeux.

Par ailleurs, vous n'ignorez pas que notre population suit l'ensemble de cette affaire à la télévision française. Il me paraît donc préférable que le Conseil d'Etat donne une information objective, une fois pour toutes, sur les éléments qui peuvent être révélés à savoir les premières invites, sans entrer en matière sur ce qui relève du secret bancaire. En effet, la Banque cantonale doit avoir les mêmes chances que les autres banques, et il convient d'être circonspect en cette occasion. Que l'information soit donnée à ce parlement et à la presse sur l'ensemble de la société Gaon le plus rapidement possible, afin de servir, en quelque sorte, d'état des lieux. Je ne vois pas que le problème soit autre qu'historique, en référence à tout ce qui s'est dit sur cette affaire avant ce jour.

Les Verts vous invitent à faire la lumière sur cette affaire, par souci de transparence. L'opinion publique est une constellation d'opinions, et vous savez bien que - et pas seulement dans les milieux politiques où chacun a la sienne - ces magouilles, ces faillites sont perçues de curieuse manière, car elles sont le reflet de situations peu claires, surtout si, comme c'est le cas, une affaire pénale en France opacifie encore la situation.

De ce point de vue, une information stricte doit être donnée par le Conseil d'Etat, ce qui devrait vous assurer, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, d'un certain nombre de garanties sur les critères définis dans la première partie de cette motion. Je ne vois pas que l'on puisse s'y opposer.

Nous aurons l'occasion de parler encore de la Banque cantonale, lors de l'étude d'un prochain projet de loi. Comme je souhaite que la Banque cantonale réussisse, je me sens mal à l'aise en pensant à la durée de la «digestion» des pertes de cette dernière par rapport aux années 80.

D'une manière ou d'une autre, vous n'échapperez pas au fait qu'il faudra trouver une solution, afin qu'un certain nombre de responsabilités puissent être établies, un diagnostic posé et que l'on puisse enfin parler d'autre chose, car je ressens une certaine peine à voir systématiquement apparaître le nom de la Banque cantonale lié à des «casseroles», pas seulement dans ce parlement mais dans les médias.

En ce qui concerne le développement de l'économie locale, je me fie plus à la Banque cantonale qu'aux grandes banques suisses, et je souhaite que ce jeu s'arrête. Nous devrions en parler dans un plus petit cénacle, afin de «vider l'abcès», de sorte que l'on puisse repartir sur des bases saines qui n'altèrent pas la santé de la Banque cantonale et ne laissent aucun flou sur son passé.

Voilà la position des Verts concernant cette motion. Il nous paraît difficile de faire ce travail dans ce parlement, et, pour les raisons énoncées, nous vous prions de renvoyer cette motion en commission.

M. Claude Blanc (PDC). Là où est le cadavre, là s'assemblent les vautours ! (Exclamations.) J'ai déjà eu l'occasion d'utiliser un terme voisin, sinon plus vigoureux pour qualifier ceux qui au moment de l'affaire de «La Suisse» avaient cru bon de profiter des malheurs des uns pour leur prospérité politique.

Or, ce travail de sape continue avec la plus parfaite mauvaise foi. Tout à l'heure, M. Grobet, pour introduire benoîtement son intervention, a commencé par citer les différences de taux d'intérêt entre les banques cantonales alémaniques et les banques cantonales romandes, omettant de rassembler les banques cantonales romandes sous la même bannière, puisqu'elles pratiquent, à peu près, la même politique.

Il a également oublié de dire que si, jusqu'à présent, en Suisse romande, en tout cas à Genève, la Banque cantonale a toujours été en mesure de faire face à ses obligations, certaines banques cantonales alémaniques, que vous citez, sont passées par des moments très difficiles. Je ne parle pas de la Banque cantonale de Berne, ni de celle de Soleure et de quelques autres.

Vous vous acharnez à maintenir «la tête sous l'eau» à une institution qui doit pourtant jouer un rôle positif dans notre République. Il y a quelques années, lorsque les socialistes avaient présenté un projet de motion demandant la constitution d'une commission d'enquête - contrairement à ce que vient de dire Mme Calmy-Rey - ce n'était pas pour connaître les mesures à prendre pour sauver les entreprises qui auraient pu pâtir de la déconfiture du groupe Gaon, mais pour établir les responsabilités des hommes et des femmes politiques de la Ville et du canton de Genève et savoir, dans quelle mesure, ils auraient eu des complaisances pour les sociétés du groupe Gaon. C'était exactement les termes de votre motion. La commission ad hoc n'a jamais pu vérifier le moindre indice à ce sujet, et c'est pour cette raison que le Grand Conseil a refusé la motion, car elle visait à vilipender des personnes qui ont vécu des événements malheureux.

Chaque fois qu'un problème se pose, vous cherchez d'abord à savoir le profit que vous pourrez en tirer. Vous vous acharnez sur la Banque cantonale. Or, il est vrai que cette banque, comme toutes les autres, a eu des problèmes. En effet, dans les années 80, les deux banques qui, par la suite, ont constitué la Banque cantonale, ont établi des créances, aujourd'hui difficiles à gérer. Vous le savez, mais vous ne pardonnez pas la manière dont elle est gérée, car vous ne pouvez ni l'avoir sous votre tutelle ni la maîtriser.

Et ne pouvant faire ni l'un ni l'autre, vous essayez, purement et simplement, de l'abattre. Vous tentez de faire passer un message négatif dans le public en la vilipendant pour que les clients de la Banque cantonale lui retirent leur confiance et qu'elle n'ait plus de capitaux. Voilà votre objectif qui est ignoble !

Vous savez aussi bien que moi, Monsieur Grobet.. Vous êtes en train de souffler ce qu'il doit dire à M. Spielmann qui prend des notes. Mais je suppose qu'il n'a pas besoin de votre aide... Alors, écoutez-moi !

Par toutes sortes d'autres motions, vous tentez de faire entrer la Banque cantonale dans le circuit économique, afin qu'elle aide les sociétés en difficulté. Mais vous savez très bien aussi que, actuellement, la Banque cantonale est le seul établissement qui fait vraiment un effort pour aller à la rencontre des entreprises en formation ou en difficulté et essaie de leur venir en aide.

Vous utilisez même l'argument Sécheron SA pour la vilipender. Dieu sait si la Banque cantonale, en sortant Sécheron SA du groupe Gaon, a fait oeuvre utile. Nous sommes tous convaincus que, par cette action, la Banque cantonale a sauvé tous les emplois de Sécheron SA, sauf vous, qui vous en souciez comme d'une guigne; là ne réside pas votre intérêt, mais bien plutôt dans le profit que vous pourrez tirer de la chute de Sécheron SA et éventuellement de la chute de la Banque cantonale.

Vous êtes comme ces animaux - que je citais il y a quelques mois - qui sont attirés par l'odeur du sang. Chaque fois qu'il y a moyen de faire plus de mal, vous êtes là, et on peut compter sur vous !

M. Jean Spielmann (AdG). Quand on est à court d'arguments dans les débats, on utilise les insultes. D'après vous, notre but est ignoble, et vous nous accusez de vouloir abattre la Banque cantonale, entre autres.

Je répondrai, point par point, à la maigre argumentation que vous avez développée. Mais, surtout, je refuse que vous m'insultiez, alors que les problèmes dont nous traitons sont graves et relèvent de faits et d'éléments sur lesquels nous entendons avoir des réponses un peu plus crédibles que les insanités et les insultes, dont vous nous avez gratifiés tout à l'heure.

Le problème posé n'est ni celui de la société Gaon, ni celui posé par les difficultés économiques que rencontrent certaines entreprises, ni même celui des spéculateurs de ce canton qui se trouvent dans des situations difficiles, provoquées, à mon avis, par une fuite en avant dans des domaines que l'on aurait intérêt à débattre. Nous ne débattons pas du rôle de la Banque cantonale.

Depuis les années 30 et, plus tard, dans les années 50, 60 et 70, la gauche, à l'aide de multiples projets de lois, a demandé la création d'une Banque cantonale. La création de cette banque, son activité et sa présence sont utiles au niveau économique pour faire un contrepoids à l'action des grandes banques qui étranglent les PME et posent des conditions inacceptables à la création d'entreprises.

La Banque cantonale joue donc un rôle éminemment positif dans l'activité économique, et c'est bien parce que nous souhaitons qu'elle continue à travailler de cette manière que nous désirons faire la lumière sur un certain nombre de points.

Tout à l'heure, vous avez demandé des preuves des faveurs accordées à M. Gaon. Pour la troisième fois, les tribunaux ont considéré que des faveurs inacceptables avaient été accordées à M. Gaon pour ses constructions et que la loi a été violée par le Conseil d'Etat qui lui avait donné des autorisations de construire dépassant le cadre de cette dernière.

C'est la troisième fois que la justice doit rectifier des erreurs commises à ce niveau-là. Comment voulez-vous que nous restions indifférents, lorsque ce genre d'avantages sont multipliés et que l'on prend des décisions contraires aux intérêts de l'ensemble de la collectivité et de la Banque cantonale. Nous posons des questions, afin de ne pas continuer dans une voie dangereuse pour cette banque. Nous ne la mettons pas en danger avec les questions que nous posons, bien au contraire. Par contre, je n'en dirai pas autant de votre politique et de votre manière de gérer la Banque cantonale, et nous entendons bien que l'on réponde à nos questions.

Comment voulez-vous que la population reste muette, alors qu'elle lit dans la presse que M. Stäubli a obtenu 80 millions et, aux dernières informations, 150 millions à un taux d'intérêt de 0,5% ? Ne doit-on pas se poser des questions face à de telles informations ? Trouvez-vous que la gestion soit si bonne qu'elle ne souffre aucune interrogation ? Pensez-vous que les gens ayant des difficultés financières dans ce canton ou les entrepreneurs qui doivent faire face à des crédits importants et rencontrent de gros problèmes financiers ne se posent pas de questions quand ils voient leur propre banque offrir des taux d'intérêt aussi bas à des spéculateurs, dont on sait depuis longtemps le rôle qu'ils jouent, qu'ils ont joué et qu'ils continuent à jouer dans cette République, et que ce sont eux qui en font les frais ?

Si on continue à gérer la Banque cantonale de cette manière, il est clair qu'elle aura des difficultés, et ce ne sera pas de notre faute ! Ce ne sera pas faute d'avoir voulu faire la transparence et d'avoir exigé des réponses claires à nos questions dans le but de la rendre plus crédible.

On pourrait reprendre le Mémorial sur les multiples interventions que nous avons faites et l'orientation que nous avons donnée, aussi bien au moment de la constitution de la Banque cantonale, de la mise en place de ses statuts que de ses objectifs et de la manière avec laquelle nous voulons la voir fonctionner. Ce n'est, en tout cas, pas celle de la politique des petits copains, telle que vous êtes en train de la mettre en place !

Il est vrai que M. Gaon a été souvent généreux avec votre parti. Il l'a dit publiquement ! Mais ce n'est pas une raison pour lui renvoyer l'ascenseur à chaque fois. Agir de telle sorte est contraire aux intérêts de la Banque cantonale et à ceux des citoyens de ce canton ayant besoin d'une institution dont la gestion est crédible. Donc, si vous ne souhaitez pas faire la transparence et ne voulez pas répondre à ces questions, la population continuera à s'en poser. Vous causez ainsi un grand préjudice à la Banque cantonale, institution dont nous avons besoin, aujourd'hui plus que jamais.

Je vous renvoie donc vos insultes, et j'attends de voir si vous êtes prêts à faire la transparence ou si, derrière les insultes dont vous nous avez gratifiés, ne se cachent pas de mauvais arguments politiques. Peut-être n'avez-vous, tout simplement, pas de réponse aux questions que nous vous posons ! Nous tirerons les conclusions qui s'imposent, lors du vote de cette motion.

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. La motion part d'un événement, soit le jugement du Tribunal de première instance qui prononce la faillite de la compagnie Noga d'importation et d'exportation. On voit que les termes ont leur signification et les raisons sociales aussi. Ce jugement, comme vous le savez, n'est pas définitif et fait l'objet d'un certain nombre de procédures qui sont au demeurant complexes et liées à des arbitrages sur le plan international.

Dans la motion, la question fondamentale est celle du jugement qui pourrait avoir des conséquences sur d'autres sociétés du groupe et, de surcroît, elle demande un rapport sur les relations financières, en particulier hypothécaires, entre la Banque cantonale de Genève et les sociétés du groupe Gaon.

Il faut se dire une fois pour toutes que les questions posées - sauf à propos de la société compagnie Noga d'importation et d'exportation SA qui est un élément nouveau, mais dont on verra qu'il est sans lien avec les autres sociétés du groupe - sur les relations financières entre la Banque cantonale de Genève et le groupe Gaon ont déjà été évoquées à réitérées reprises dans des interpellations et par la résolution, au travers de laquelle vous avez demandé la création d'une commission d'enquête parlementaire. De ce point de vue, il n'y a rien de nouveau.

Chaque fois, il a été répondu à toutes ces demandes de manière complète, tant par mon collègue Olivier Vodoz que par moi-même. A ce stade, sauf en ce qui concerne la compagnie Noga d'importation et d'exportation, il n'y a pas de fait nouveau dans les relations entre la Banque cantonale et le groupe Gaon.

La Banque cantonale, s'agissant du groupe Gaon et, en particulier, de Noga Invest, est l'un des quatre créanciers hypothécaires. C'est curieux parce qu'il y en a quatre, mais on ne tire que sur la Banque cantonale... Enfin bref !

En ce qui concerne la compagnie d'importation et d'exportation SA, elle n'est absolument pas concernée par ce financement et ce type de relations bancaires et hypothécaires. La créance de la Banque cantonale, qui n'est qu'une partie du financement total, puisque le reste a été accordé par d'autres établissements bancaires, a fait, comme pour ces autres établissements bancaires, l'objet de provisions, qui ont été jugées parfaitement suffisantes et qui, à ce titre, ont l'aval de la Commission fédérale des banques.

Tout cela a été constaté avant la fusion entre la Banque hypothécaire et la Caisse d'épargne par la Commission fédérale des banques. Cela a été constaté par les organes de révision bancaires et, de ce fait, constaté et avalisé par le gouvernement, le parlement et le peuple.

A cet égard, tous les faits évoqués dans les relations financières entre la Banque cantonale et le groupe Gaon - je ne parle pas du rachat du capital-action Sécheron SA, on y reviendra dans un instant - sont antérieurs à la fusion qui a été voulue par le gouvernement, le parlement et le peuple. Nous sommes donc tous «cosolidaires» des faits anciens. Mais - je vous en prie - ne ressassez pas continuellement les faits anciens ! Ils sont antérieurs à la fusion. Depuis cette dernière, il n'y a pas eu de fait nouveau à ce sujet. Il ne faut pas confondre ce qui doit relever du comportement politique et ce qui confine, en définitive, à la monomanie.

Sur la base des renseignements que nous avons obtenus sur cette affaire - assez particulière et, à vrai dire, dont l'Etat n'est pas concerné - la compagnie Noga d'importation et d'exportation SA ne détient pas de créance sur les autres sociétés du groupe qui serait de nature à les mettre en difficulté, au cas où la faillite serait prononcée. Pourquoi ? Parce que nous avons obtenu la confirmation qu'aucune société du groupe n'est une filiale de cette compagnie, dans une structure qui est très complexe. Le groupe Gaon, compte tenu de la multiplicité de ses activités et de l'enchevêtrement de ses structures juridiques, est extrêmement complexe.

Sur le plan financier, les renseignements que nous avons obtenus font qu'aucune société du groupe n'est une filiale de la compagnie Noga d'importation et d'exportation et, en particulier, pas celle qui est en relation bancaire et hypothécaire avec la Banque cantonale de Genève.

Du point de vue des emplois - cette question est pertinente et dites-vous bien que nous nous la sommes posée avant le dépôt de votre motion - la quasi-totalité des emplois du groupe Gaon, c'est-à-dire plus de 80%, sont en réalité des emplois que l'on retrouve dans la SA du Grand Casino. A cet égard, vous êtes presque mieux informés que nous, car la Ville de Genève a des relations très étroites avec cette société.

En ce qui concerne la créance fiscale, vous avez raison de vous poser des questions à ce sujet. Vous savez que, en raison du secret fiscal, il n'est pas possible de donner des renseignements précis, chiffrés, mais il est néanmoins possible de donner un certain nombre d'indications. Je vais vous en donner deux, avec l'accord exprès du chef du département des finances et contributions.

Tout d'abord, toutes les sociétés du groupe Gaon - appelons-les ainsi par raccourci de langage - ont été traitées comme tout contribuable de ce canton. Il n'y a eu aucun passe-droit, aucune complaisance, a fortiori, aucun délai non justifié par les circonstances qui aurait été accordé à l'une de ces sociétés.

En d'autres termes, des poursuites ont été engagées, comme pour tout contribuable. Et, contrairement à ce que vous avez dit en ce qui concerne Noga Invest, il y a aussi des poursuites. Vous avez prétendu qu'il n'y avait aucune poursuite contre Noga Invest. Ce n'est pas vrai !

Une voix. Les banques !

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. On parle de l'Etat ! Votre motion demande quelles sont les créances de l'Etat et si l'Etat a été, en quelque sorte - et c'est ce que vous voulez suggérer, même si vous êtes suffisamment prudents pour ne pas le dire expressément - complaisant à l'égard des société du groupe. La réponse est non, et nous vous en apportons la démonstration.

En définitive, dans ces débats à répétition et en rafales morbides, quelque chose est profondément gênant. On tire sur la Banque cantonale, alors que les faits allégués sont systématiquement antérieurs à la fusion. En effet, les faits que vous citez concernent la Banque hypothécaire et la Caisse d'épargne où tous les partis étaient également représentés, encore que cette dernière ait eu très peu de relations d'affaire avec les sociétés du groupe Gaon. C'était donc, essentiellement, la Banque hypothécaire qui avait fait les financements auprès de Noga Invest, en particulier.

L'aspect gênant de votre intervention est que vous demandez - cela ne figure pas dans le dispositif de votre motion, mais dans l'exposé des motifs - que l'on donne toutes sortes de détails, en d'autres termes que l'on jette en pâture les conditions, les tenants et aboutissants du rachat du capital-action de l'entreprise Sécheron SA par la Banque cantonale. Alors, Monsieur Grobet, j'attire votre attention sur le fait qu'il convient d'avoir un minimum de prudence, de sens civique, du point de vue de l'emploi.

Quel est l'enjeu ? D'abord, la Banque cantonale - et le gouvernement, qui n'y est pas pour rien - a sécurisé le capital-action de Sécheron SA qui était détenu par une des sociétés du groupe Gaon pouvant être dans la tourmente. Mais en ce qui concerne les emplois et la capacité technologique de Sécheron SA, entreprise performante et saine, il était nécessaire d'éviter que le capital-action de Sécheron SA soit un jour l'objet de discussions dans le cadre d'une hypothétique masse en faillite ou à propos d'un concordat. Vous savez très bien que, lorsque vos actions sont ainsi bloquées, vous ne pouvez pas progresser.

C'est précisément parce que la Banque cantonale a pu sécuriser le capital-action qu'elle a pu, par la suite, procéder à des augmentations de capital. L'augmentation de capital, à laquelle vous faites allusion, est intervenue de la manière la plus classique. Sécheron SA a pu, par cette augmentation de capital, acquérir une filiale qui lui a permis de progresser et de conquérir de nouveaux marchés. Ce processus est classique et parfaitement sain sur le plan industriel. Il ne s'est pas agi de renflouer Sécheron SA, comme vous l'avez laissé entendre.

Que se passe-t-il ? Comme vous l'avez suggéré - de ce point de vue, votre intervention était correcte - la Banque cantonale n'a pas vocation d'être propriétaire ad vitam aeternam d'une société industrielle. En d'autres termes, en sécurisant le capital-action de Sécheron SA, la Banque cantonale a fait du portage. En d'autres termes encore, la Banque cantonale négocie des conditions de rachat du capital de Sécheron SA ou, en tout cas, d'une partie substantielle de ce capital, mais dans un contexte bien précis; soit en sauvegardant l'identité genevoise de Sécheron SA, la pérennité de ses emplois et sa capacité concurrentielle.

Pensez-vous, un seul instant, que vous aidez la Banque cantonale dans cette négociation difficile et longue, par définition, en demandant au gouvernement ou à la Banque cantonale de jeter en pâture les conditions d'acquisition du capital-action ? Tout cela est proprement insensé ! Je sais que vous avez négocié des affaires, et, par conséquent, vous savez très bien qu'on ne peut pas procéder de la sorte, sauf si vous ne poursuivez pas la défense de l'intérêt de Sécheron SA. Et je ne doute pas que vous souhaitiez la défense de l'intérêt de Sécheron SA, de ses emplois et de sa capacité technologique...

En d'autres termes, je vous demande, tout simplement, d'être raisonnables. Dans ce débat, il faut redevenir raisonnables et arrêter, une fois pour toutes, de ressasser des données que nous avons avalisées dans ce parlement, car elles sont antérieures à la fusion. Il faut aussi cesser de jeter le discrédit sur un établissement, dont, par ailleurs, chacun appelle de ses voeux le renforcement et l'immersion toujours plus profonde dans l'économie de ce canton. A un moment donné, il convient de choisir un discours. Soit vous faites un discours de politique politicienne - c'est votre droit, mais il est contraire aux intérêts de la Banque cantonale, à ceux de l'entreprise et à ceux de l'économie de ce canton - soit vous pratiquez celui d'une politique économique responsable. (Applaudissements.)

M. Christian Grobet (AdG). Je vous fais remarquer que le débat aurait peut-être été moins long si vous aviez accepté de renvoyer cette motion en commission, comme le bon sens le commandait.

Monsieur Maitre, j'ai du mal à accepter que vous interprétiez notre demande d'explications par la volonté de jeter en pâture la société Sécheron SA. Depuis deux ans, nous avons fait preuve de beaucoup de retenue dans cette affaire et nous n'avons pas voulu déposer notre motion et notre projet de loi plus tôt devant ce Grand Conseil.

En effet, figurez-vous que nous sommes parfaitement conscients - et lorsque vous m'avez dit, tout à l'heure, que vous ne doutiez pas de notre bonne foi au sujet de Sécheron SA, vous étiez certainement sincère - qu'il convient d'être circonspect lorsqu'on parle des conditions de gestion d'une banque et de son avenir. Cette question est très délicate et, comme l'a rappelé M. Spielmann, nous avons ardemment souhaité la création de la Banque cantonale, nous y sommes très attachés et ne voulons surtout pas créer un climat alarmiste.

Par exemple, nous n'avons pas demandé certaines mesures, comme cela s'est fait au Valais, où un collègue de parti de M. Kunz - M. Ribordy - a demandé la création d'une commission d'enquête, idée qui a semblé toute naturelle aux Valaisans, pour demander la tête de tel ou tel. Nous ne désirons pas ce genre de démarche.

Nous demandons simplement des explications au sujet de certaines opérations de la Banque cantonale, car, avant que nous en discutions ce soir, Monsieur Maitre, la presse en a abondamment parlé, et nous ne sommes pas responsables de l'apparition de ces articles dans la presse, car vous savez fort bien que nous n'entretenons aucune relation étroite avec les journaux d'information de la place. (Rires.) Vous pouvez rigoler ! Mais je vous rappelle qu'il y a trois ans, les grands journaux de la place avaient recommandé de voter pour votre gouvernement monocolore. Par conséquent, je ne pense pas que ces journaux-là soient les amis de la gauche.

Vous avez cru bon de traiter par l'insulte nos demandes d'explications. Mais je suis frappé de constater - ceci pour abandonner l'affaire spécifique de cette motion - le nombre croissant de citoyens qui, depuis six mois, m'interpellent, disons-le franchement, sur l'affaire Stäubli. A ce sujet, vous pouvez retrouver l'article de presse concernant la Banque cantonale, datant du mois de septembre, et disant qu'elle n'a aucune inquiétude au sujet de la société Stäubli Holding SA. On ne peut pas dire que les propos tenus dans cet article se soient vérifiés, quand on constate la situation catastrophique dans laquelle se trouve cette société.

Vous ne me ferez pas croire que les citoyens ne vous interpellent pas sur cette affaire. Ce n'est pas vrai ! Il ne s'agit pas de créer un climat de panique, mais il est pire de pratiquer la politique de l'autruche et de ne pas vouloir s'expliquer sur des affaires comme celle-ci. C'est la pire des attitudes politiques.

Monsieur Maitre, notre but n'est pas de ressasser de vieilles rengaines. Nous savons que les crédits ont été accordés par les deux banques que vous avez citées, principalement par la Banque hypothécaire, mal inspirée, d'ailleurs, par un directeur qui a lui occasionné pas mal de soucis en lui faisant faire de mauvaises affaires et dont on se demande pourquoi il a encore son bureau à la Banque cantonale. Cela soit dit en passant !

Depuis ce temps, d'autres événements ont eu lieu, à part celui dont M. Joye nous a parlé. D'après lui, la créance de la Banque cantonale envers Noga Invest représentait 49% des crédits accordés par quatre banques. Les autres faits concernent la dégradation de la Société Noga. Je connais bien la thèse défendue par M. Herzog disant qu'il n'y a rien à craindre, toutes ces sociétés étant juridiquement indépendantes les unes des autres. Vous avez raison, Monsieur Maitre, de dire que la situation est très complexe. Elle l'est délibérément !

En effet, vous savez que des gens sont passés maîtres dans l'art de créer des situations complexes qui réservent, après coup, des lendemains douloureux. Dans ce cas, des sociétés - qui soi-disant ne sont pas des filiales - ont été créées de manière fictive, alors qu'il s'agit indiscutablement d'un groupe. D'ailleurs, à juste titre, vous avez parlé du «groupe Noga». Dans un tel cas de figure, un bilan consolidé devrait exister. Or - vous le savez comme moi - celui-ci n'existe pas.

Monsieur Maitre, soyez prudent ! J'espère que les choses s'arrangeront. J'ai toujours été convaincu que la faillite était la pire des choses, mais maintenir des sociétés artificiellement en vie est souvent pire encore. A ce propos, vous vous souvenez certainement des leçons que donnait le juge Greber concernant ceux qui font de la «cavalerie» ! Si on maintient une société artificiellement en vie, tout en sachant qu'elle n'a plus d'activités et qu'elle est surendettée, sa situation empire.

Comme fait nouveau, on sait aujourd'hui qu'une réquisition de vente a été posée pour le bâtiment Noga Hilton qui appartient à la société du Grand Casino SA. L'affaire évolue en raison de l'état de surendettement du groupe Noga. Nous avons posé la question au sujet de la fiscalité, car nous avons été frappés de constater que des poursuites avaient été inscrites à l'office des poursuites contre certaines sociétés, dont la société Noga. Je tiens à remercier M. Vodoz - c'est tout à son honneur - car parmi les nombreux créanciers de la société Noga à l'office des poursuites on trouve l'Etat de Genève. Merci, Monsieur Vodoz, d'avoir fait votre travail en ce qui concerne cette société !

Monsieur Maitre, j'ai été étonné de voir que les poursuites, déposées l'an dernier à l'office des poursuites par certaines banques, avaient disparu du registre de l'office des poursuites. Vous savez, tout comme moi, que si une poursuite n'est pas renouvelée au bout d'un an, elle est périmée. Cela signifie que les banques sont très peu intéressées à connaître l'état de leurs créances à l'égard de cette société.

Il m'arrive d'être interpellé par des citoyens ou des citoyennes qui m'informent que leur banque - y compris la Banque cantonale - leur demande de quitter leur maison ou leur logement, parce qu'ils ne parviennent plus à payer les intérêts hypothécaires. Donc, face à certains petits propriétaires, la Banque cantonale - et je la comprends - n'hésite pas à agir pour se faire rembourser. Par contre, je ne comprends pas que dans le cas de Noga Invest aucune poursuite ne soit inscrite à l'office des poursuites. Vous trouvez qu'il n'y a pas de quoi se poser des questions et surtout pas de réponses à donner ? Pour ma part, je trouve cela extraordinaire. (M. Vaucher interpelle l'orateur.) Je ne serai pas long, Monsieur Vaucher. Je ne lis pas des textes préparés à l'avance.

L'affaire Sécheron SA, Monsieur Maitre, n'est pas ancienne. En effet, il y a environ deux ans, sauf erreur, que la Banque cantonale a racheté une partie de cette entreprise. Donc, on ne ressasse pas de vieilles histoires, et, en plus, on a attendu deux ans pour en parler !

Si on reprend le Mémorial, Monsieur Maitre, vous aviez dit que ce rachat était temporaire et que l'entreprise serait revendue rapidement. Aujourd'hui, deux ans plus tard, Sécheron SA n'a pas été revendue et on peut tout de même s'interroger à ce sujet. Il y a un moment donné où - et M. Hiler l'a fort justement dit - il faudrait que l'on nous donne des explications. La sagesse eût voulu, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion soit renvoyée en commission. En effet, rejeter, sans autre, une demande d'explications qui rejoint les préoccupations de nombreux citoyens n'est pas la bonne manière d'agir.

La présidente. Vous parlez depuis dix minutes, Monsieur Grobet !

M. Christian Grobet. Le meilleur lieu pour discuter sans passion et essayer de comprendre une situation est bien en commission. En refusant d'obtenir ces explications, Mesdames et Messieurs, vous ne faites qu'apporter une contribution supplémentaire aux craintes de la population sur la situation de la Banque cantonale. J'ose espérer que les craintes de certains à ce sujet ne sont pas fondées. Nous souhaitons que la Banque cantonale remplisse sa mission. Mais on ne peut pas le faire en refusant de donner les informations élémentaires.

M. David Hiler (Ve). La majorité de ce Grand Conseil refusera cette motion. En somme, il s'agit toujours du même schéma : les informations demandées dans les motions sont généralement fournies, oralement, pour une bonne part, par M. Maitre, et, ensuite, la motion est rejetée.

A un certain moment, il devrait être possible de casser ce processus. Ces questions sont délicates, mais les remarques de M. Grobet sur la réaction des gens sont fondées. Ces derniers se demandent si d'autres ont la possibilité de ne pas payer d'intérêts, alors qu'eux-mêmes en paient et qu'ils n'ont pas de passe-droits. A partir d'une demande fondée - comme celle dont M. Grobet fait état dans l'intérêt de la Banque cantonale - serait-il possible de demander au Conseil d'Etat, lorsque nous constatons qu'une affaire en cours est traitée dans la presse - c'est là que j'apprends les nouvelles, et je n'ai pas d'espion dans ces milieux - d'avoir la courtoisie de faire une déclaration d'information à ce sujet, de sorte que nous puissions avoir un véritable débat.

Personnellement, je n'ai pas suivi ce dossier depuis le début, car je suis parmi vous depuis relativement peu de temps. Mais, d'une manière ou d'une autre, Mesdames et Messieurs les députés, nous devons faire la lumière sur cette affaire, soit par un texte qui mette en forme les renseignements chiffrés que M. Maitre a donnés ou, en tout cas, par une information régulière. Cela améliorera l'atmosphère générale. Cette proposition n'émane pas de mon groupe - je n'en ai pas discuté avec lui - mais je souhaite que l'on fasse un effort pour sortir de cette impasse.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion en commission est rejetée.

Mise aux voix, cette proposition de motion est rejetée.