Séance du jeudi 27 février 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 3e session - 10e séance

PL 7568
4. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi ouvrant un crédit au titre de subvention pour la reconstruction et la rénovation du stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert, du 26 avril 1996. ( )PL7568

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi ouvrant un crédit au titre de subvention pour la reconstruction et la rénovation du Stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert, du 26 avril 1996, est modifiée comme suit:

Art. 3 A (nouveau)

Le Conseil d'Etat est également autorisé à affecter le crédit défini par la présente loi, aux mêmes conditions, à l'étude et la construction d'un nouveau stade de football situé sur l'emplacement des anciens abattoirs à La Praille.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Historique

En date du 26 avril 1996 le Grand Conseil votait la loi ouvrant un crédit au titre de subvention cantonale pour la reconstruction et la rénovation du Stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert.

A la suite de ce vote, les partenaires concernés, à savoir l'Etat de Genève, la Ville de Genève, la fondation Hippomène, la SI du Servette FC et le Servette FC se sont réunis pour examiner les modalités de mise en oeuvre de l'opération, selon les conditions fixées par le Grand Conseil.

A cette occasion, le Crédit Suisse, en sa qualité de sponsor principal de l'équipe nationale, a annoncé son intérêt à la construction à Genève d'un stade de 25 000 places assises, répondant aux normes édictées par l'UEFA, situé à l'emplacement qui serait choisi par les partenaires concernés, emplacement sur lequel il n'entendait pas prendre position, et offert une participation financière au projet sous forme d'un prêt de 20 millions de francs remboursable sur 80 ans, sans intérêts, à raison de 250 000 F par an.

1.1. Charmilles-La Praille

La fondation Hippomène estimait qu'il n'était pas possible de construire un stade de 25 000 places assises aux Charmilles et se déclarait prête à céder à la Ville ses terrains des Charmilles si le nouveau stade se construisait sur le site des anciens abattoirs de La Praille, projet qui faisait l'objet d'une demande de renseignements déposée un an plus tôt auprès du département des travaux publics et de l'énergie (DTPE). Dans l'intervalle, M. B. Hentsch se déclarait prêt à faire procéder à ses frais aux travaux de réhabilitation nécessaires aux Charmilles, exigés par l'ASF, pour que les compétitions puissent s'y dérouler.

La Ville, quant à elle, n'entendait pas se défaire de ses terrains de La Praille en échange des Charmilles; de plus, une compensation de 32 millions de francs représentant la perte résultant de l'exploitation des anciens abattoirs devait être trouvée. Elle n'entendait pas, en l'état, que ses terrains soient affectés à la construction d'un stade de football.

De fait, le projet de La Praille ne pouvait entrer en considération.

1..2 Les Charmilles-Blandonnet

Dès lors que la fondation Hippomène doutait fortement qu'il soit possible de construire un nouveau stade moderne aux Charmilles, il fut demandé aux architectes du projet des Charmilles de déposer auprès du DTPE un dossier de demande de renseignements portant sur la construction aux Charmilles d'un stade d'une capacité de 25 000 places assises.

Dans le courant de l'été a surgi un nouveau projet de stade situé à Blandonnet, dans un périmètre où l'Etat de Genève était déjà propriétaire d'une partie des terrains concernés.

Le projet ne manquant pas d'intérêt, vu le refus catégorique opposé par la fondation Hippomène sur l'utilisation du site des Charmilles, une demande de renseignements fut déposée auprès du DTPE à fin juillet 1996.

1.3. Les Charmilles-La Praille-Blandonnet

Dans le courant du mois d'octobre 1996, les promoteurs du projet de La Praille informèrent le chef du DTPE que la Ville de Genève avait quelque peu évolué dans sa position en ce sens qu'elle était disposée à échanger ses terrains de La Praille en contrepartie du Stade des Charmilles et de divers terrains propriété de l'Etat, toutes les surfaces de terrains impliquées étant comptées selon un prix usuellement pratiqué.

Ainsi, à ce jour, trois demandes de renseignements sont toujours à l'examen auprès du DTPE:

· DR 17066 STADE DE FOOTBALL. «La Praille: un site, un projet». déposée le 13 juin 1995.

· DR 17150 STADE DES CHARMILLES. Démolition-reconstruction pour une capacité de 25 000 places, déposée le 3 juillet 1996.

· DR 17161 CENTRE SPORTIF. Stade de football, route de Pré-Bois, déposée le 30 juillet 1996.

1.4. Avis de la commission d'urbanisme

A la demande du chef du DTPE, la commission d'urbanisme procéda à une évaluation des projets en présence, fondée sur divers critères. Il ressort de cet examen que la commission d'urbanisme estime qu'aucun des sites proposés n'est idéal, mais qu'en tout cas le site des Charmilles est le moins favorable. Entre les sites de La Praille et Blandonnet, ce dernier emplacement peut être considéré comme meilleur.

1.5. Avis de l'UEFA

Le chef du DTPE a, par ailleurs, demandé à l'UEFA son avis sur les trois projets. Lors d'un entretien du 12 novembre 1996, M. E. Walker, président de la commission des stades de l'UEFA, a précisé les points suivants:

· Il faut penser à long terme: un stade est construit pour durer 50 ans au moins.

· L'avenir est aux stades couverts, ou dont la couverture est possible.

· Pour rentabiliser l'équipement, on peut prévoir d'autres manifestations et spectacles: les stades les plus modernes permettent de retirer la pelouse hors du stade pour permettre ces manifestations sans dommages.

· Les stades doivent être le plus près possible des gens, mais ils ont besoin d'espace. Un stade en ville est préférable si un grand espace existe.

· Les matches de football doivent être une fête. Il faut supprimer les barrières. Le stade ne doit pas être un camp retranché. Il doit être un espace convivial et confortable.

· En ce qui concerne la capacité des stades:

- pour obtenir une finale de la coupe d'Europe des champions (Champions' League) il faut un stade de 50 000 places au minimum;

- pour une finale des vainqueurs de coupe un minimum de 30 000 places est requis;

- pour des événements moindres une capacité de 20 000 à 25 000 places est suffisante.

· En ce qui concerne Genève et la Suisse, si l'on ne vise que les compétitions «domestiques», 15 000 à 20 000 places sont suffisantes.

· Il est certainement plus réaliste de viser la construction d'un stade de 18 000 places, mais alors il ne faut pas compter accueillir des manifestations internationales de quelque importance.

· M. Walker n'est pas favorable à la cohabitation du football avec d'autres activités commerciales ou bureaux, un stade de football devant rester un stade de football.

En conclusion de cet entretien, il est apparu qu'un stade de 25 000 places était difficilement envisageable sur l'emplacement actuel du Stade des Charmilles en raison de l'exiguïté du site. Une extension ne peut se faire que latéralement, sur les terrains de Tavaro. Cependant, la présence de l'avenue de Châtelaine constitue un obstacle qui empêche toute extension dans le sens de la longueur et condamne le projet.

Par ailleurs, on pourrait penser que des activités commerciales ou administratives pourraient prendre place dans la construction, dans le but de rentabiliser quelque peu un tel investissement. Selon M. Ernest Walker, président de la commission des stades de l'UEFA, les activités commerciales ne font pas bon ménage avec la pratique du sport et les expériences tentées se sont soldées par des échecs.

Les seules activités autres que sportives possibles dans un stade sont des manifestations occasionnelles, comme des concerts, par exemple.

2. Position des partenaires respectifs

2.1. Etat

Il convient de rappeler que le Grand Conseil, par la loi du 26 avril 1996, a ouvert un crédit de 20 millions de francs au Conseil d'Etat pour couvrir une partie des frais de nouvelles études et de reconstruction et de rénovation du Stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert (art. 1).

Une première tranche de crédit de 2 millions de francs est octroyée à la fondation à créer pour l'étude de la reconstruction et de la rénovation du Stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert et de l'exécution de travaux d'urgence (art. 2).

Par ailleurs, la loi précise que le crédit est annulé si au 31 décembre 1997 la fondation n'est pas créée et si le transfert des biens-fonds à titre non onéreux à la fondation n'est pas intervenu (art. 3).

Ainsi, le crédit accordé par le Grand Conseil est affecté au Stade des Charmilles. Il ne peut être utilisé à la construction d'un stade sur un autre site sans l'accord du Grand Conseil, sous la forme d'une loi, soit nouvelle, soit modifiant la loi du 26 avril 1996 et sujette à référendum facultatif.

La commission des travaux du Grand Conseil, qui a été consultée à cet effet, semble en majorité disposée à examiner favorablement le déplacement du crédit sur un nouveau projet de stade qui serait situé ailleurs qu'aux Charmilles.

2.2. Ville de Genève

A la suite du vote du Grand Conseil, le Conseil municipal de la Ville de Genève, le 25 juin 1996, a voté un crédit de 3 millions de francs à titre de subvention municipale, destiné à participer à la rénovation-reconstruction du Stade des Charmilles et du Centre sportif de Balexert.

Les conditions de l'utilisation de ce crédit sont: la création d'une société d'économie mixte, le transfert des biens-fonds à titre non onéreux à cette fondation et la garantie d'un financement complémentaire par les différents partenaires publics et privés.

La position de la Ville de Genève est sensiblement identique à celle de l'Etat. L'affectation du crédit à une autre construction que le Stade des Charmilles et le Centre sportif de Balexert doit faire l'objet d'une décision du Conseil municipal.

2.3 Fondation Hippomène

Par la voix de M. Bénédict Hentsch, président de son conseil de fondation, la fondation Hippomène est résolument opposée à la construction d'un stade de 25 000 places aux Charmilles.

Par contre, si ce stade se construit en un autre emplacement, la fondation serait prête à céder le Stade des Charmilles sans contrepartie financière.

Afin de déterminer si l'opposition marquée par la fondation Hippomène à la réalisation d'un stade moderne de 25 000 places assises sur l'emplacement de stade actuel des Charmilles, propriété de la SI du Servette FC (dont la grande majorité des actions est détenue par la fondation Hippomène) viole les statuts, le département a confié l'examen de cette question à Me Pierre-Louis Manfrini. Celui-ci a conclu qu'il n'est pas juridiquement possible de soutenir que la fondation, en refusant la proposition de l'Etat de construire un stade de 25 000 places aux Charmilles, viole son but statutaire.

3. Construction

La construction du nouveau stade aux Charmilles était prévue se dérouler par étapes, sur quatre années, autorisant la poursuite normale des compétitions par le Servette FC.

Quant à la construction d'un nouveau stade sur un autre site, elle nécessite au moins deux ans et demi de travaux. Dans l'intervalle, le Stade des Charmilles doit faire l'objet de travaux de réhabilitation permettant le déroulement des compétitions.

Dans l'intervalle, une rénovation simple du Stade des Charmilles est possible pour rendre la tribune A conforme aux normes de sécurité. Cela entraînera une diminution de 400 places environ. Des sièges peuvent être ajoutés dans la tribune B. En tout, la capacité de 15 000 places peut être envisagée (6 000 assises et 9 000 debout). Les travaux pourraient commencer pendant la pause d'hiver et se poursuivre en été.

Une telle solution a l'agrément de la fondation Hippomène.

4. Le cas de Balexert-Vessy

La Ville de Genève a accepté le principe d'un échange des terrains dont elle est propriétaire à Balexert contre des terrains à Vessy, à condition qu'elle puisse équiper ces derniers de mâts d'éclairage, afin de permettre le déplacement des utilisateurs actuels des terrains de Balexert autres que le Servette FC.

La requête en autorisation de construire ces mâts d'éclairage a soulevé l'opposition du WWF au motif des effets néfastes que ceux-ci auraient sur la faune.

Une étude d'impact sur ce point (sous forme d'une notice d'impact) a été demandée à la Ville. Les conclusions de cette étude, réalisée par le bureau Ecotec Environnement SA, sont positives.

Pour sa part, la fondation Hippomène a déclaré son accord avec la création à Balexert d'un centre sportif destiné au seul Servette FC pour que celui-ci y établisse son centre de formation et d'entraînement.

5. Conclusion

Face à cette situation bloquée, le Conseil d'Etat, avec les divers partenaires concernés, s'est à nouveau posé la question de la dimension que devrait avoir le nouveau stade. Les hypothèses suivantes ont été envisagées:

5.1. Stade type «Servette»: 18 000 places

Un tel stade semblerait suffisant pour satisfaire les besoins du Servette FC. Il autorise le déroulement des compétitions nationales, voire internationales, auxquelles le club participe.

Il ne faut cependant pas compter sur des manifestations internationales importantes.

5.2. Stade type Suisse: 22 000 personnes

Un tel stade pourrait accueillir des rencontres de l'équipe nationale suisse.

5.3. Stade type UEFA: 25 000 à 30 000 personnes

Un tel stade pourrait recevoir des rencontres importantes de l'équipe de Suisse, ainsi que certaines des manifestations organisées par l'UEFA (des rencontres devant se dérouler sur terrain neutre, par exemple). Il est également susceptible de recevoir une subvention de la part de la Confédération, de l'ordre de 15 à 45% du coût du projet.

En considération de la décision du Grand Conseil, impossible à réaliser sur le site des Charmilles sans l'accord de la fondation Hippomène, de l'offre du Crédit Suisse et de la position de la Ville de Genève, sans oublier la possibilité d'une subvention fédérale, le choix du Conseil d'Etat s'est porté sur la construction d'un stade d'une capacité de 25 000 places assises, répondant aux normes UEFA, dont l'emplacement serait situé sur le lieu des anciens abattoirs de La Praille, actuellement propriété de la Ville de Genève.

La mise en oeuvre de ce projet nécessite l'aval du Grand Conseil sous la forme d'une loi modifiant la loi qui a accordé une subvention affectée au Stade des Charmilles.

Dès lors que le présent projet de loi aura été accepté par le Grand Conseil, un concours d'architectes sera lancé pour la construction d'un stade, l'objectif étant de pouvoir soumettre un projet concret aux instances fédérales avant la fin du mois d'avril 1997, afin de pouvoir bénéficier d'une éventuelle subvention fédérale.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.

Préconsultation

M. Thomas Büchi (R). Le 26 avril 1996, nous avons voté une loi accordant une subvention de 20 millions pour la démolition-reconstruction du stade des Charmilles.

Par son nouveau projet de loi, le Conseil d'Etat propose le transfert de cette somme sur un nouveau site, celui de La Praille. Le groupe radical adhère positivement à cette initiative, mais estime indispensable le renvoi de ce projet de loi en commission des travaux, afin d'éclaircir encore un certain nombre de points et de questions.

Lors des travaux en commission, plusieurs députés se sont montrés réticents à envisager uniquement le site des Charmilles. Avec raison, ils pensaient qu'il ne s'agissait pas de l'endroit approprié et que d'autres lieux pouvaient être envisagés.

A l'issue de nos travaux, nous avions cédé. Or, ce soir, il s'agit de ne pas se précipiter. Depuis plusieurs années, un groupe d'architectes et d'ingénieurs ont élaboré à compte d'auteur un projet d'édification du nouveau stade sur le site de La Praille. Ils sont persuadés que ce lieu est idéal sur le plan urbanistique.

Ils ont même présenté leur projet à notre commission qui, dans son ensemble, a été favorablement impressionnée par la qualité du dossier et l'objectivité des arguments avancés.

Pour les raisons invoquées précédemment, le Grand Conseil n'est pas entré en matière sur ce projet, mais le groupe radical se pose quelques questions.

Par voie de presse, nous avons appris que le DTPE avait lancé une procédure de concours intégral pour la construction du nouveau stade. Personnellement, je comprends parfaitement que l'on organise un concours pour des projets d'une pareille importance, afin d'obtenir un ouvrage d'une qualité maximale.

Mais, dans le cas présent, un aspect me heurte quand même : qu'adviendra-t-il du projet des auteurs ? Ce groupe, qui a réalisé un travail considérable, a proposé en décembre 1992 déjà son concept. Ces jeunes architectes et ingénieurs ne se sont pas contentés de lancer une idée, mais ils ont élaboré leur projet dans un contexte global, incluant les coûts et l'organisation de l'exploitation tout en faisant la promotion - au sens noble du terme - auprès des instances concernées.

Même après le vote du 26 avril 1996, lors duquel le Grand Conseil avait opté pour la reconstruction du stade des Charmilles, ils ont continué inlassablement à défendre leur projet pour nous convaincre de son bien-fondé.

En outre, ils ont proposé le scénario d'échange de terrains dont le principe a été admis par l'Etat et la Ville qui est à l'origine du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui. Le Conseil d'Etat, la plupart des députés et une bonne partie de l'opinion publique se rendent très bien compte qu'ils ont effectué un travail considérable. Il serait injuste qu'il ne soit pas reconnu à sa juste valeur, alors que la collectivité en profiterait pleinement.

Il est donc indispensable que nous trouvions une solution équitable pour ne pas évincer ces personnes qui se sont tellement engagées et ont fait preuve de beaucoup d'initiative. A cette condition seulement, il serait alors possible d'utiliser le fruit de leur travail pour engager des procédures de déclassement et de demande de subventions fédérales sans se heurter au droit de propriété intellectuelle, auquel peuvent légitimement prétendre les inventeurs du stade de La Praille.

Mesdames et Messieurs les députés, vous comprenez l'importance du renvoi en commission des travaux de ce projet de loi. Tous les aspects devront être exposés avec beaucoup d'objectivité, afin de sauvegarder les intérêts de tous.

M. Chaïm Nissim (Ve). Le parti des Verts a pris position dès le début des débats en faveur d'un espace vert aux Charmilles pour des questions d'urbanisme faciles à comprendre : ce quartier est déjà surchargé. Allant dans ce sens, ce projet de loi est, a priori, le bienvenu.

Nous étions seuls, mon collègue Meyll et moi-même, à vous dire, lors du premier débat en avril 96, qu'un stade de vingt-cinq mille places était très difficile à construire aux Charmilles, voire impossible. Je vous disais même qu'il faudrait un chausse-pied pour inclure un stade à cet emplacement ! Le Conseil d'Etat nous donne aujourd'hui raison, cela nous fait plaisir !

Je me sentais tout à fait seul, lors de notre premier débat en avril, à dénoncer l'alliance hypocrite et politicienne entre le parti socialiste et les trois autres partis de l'Entente. Ces gens ne parlaient pas du même stade, mais faisaient semblant d'être d'accord.

Les socialistes voulaient un petit stade de quinze mille places sans le dire à haute voix, tout en sachant que leur petit stade pourrait trouver sa place aux Charmilles.

Les trois autres partis voulaient un grand stade et faisaient semblant de ne pas vouloir comprendre que leur projet prenait l'eau de toutes parts, notamment à cause du manque de place et du refus d'Hippomène.

Il reste encore quatre points que je développerai en commission. Le premier, évoqué par M. Büchi, concerne le concours d'architecture que je considère mal ficelé.

Le deuxième point a trait à la loi d'avril 96. Nous apprenons en effet par la presse qu'environ un million a été utilisé pour rénover le stade actuel. Nous sommes d'accord au sujet de la nécessité de la rénovation, mais la loi prévoyait qu'une fondation, que nous appelions tous de nos voeux, devait être le maître d'oeuvre du stade actuel et que l'argent ne pouvait être débloqué qu'en sa faveur. (Brouhaha.) Or cette fondation n'existe pas, et j'ai l'impression - il se pourrait que je me trompe, Monsieur Joye - que la loi d'avril 96 n'a pas été respectée. En ces temps de rigueur de gestion, cette procédure me semble un tantinet cavalière, et nous examinerons les détails en commission.

En troisième lieu, il me semble qu'il manque encore de l'argent, environ une quinzaine de millions.

Sur le quatrième point, je m'engage à titre personnel. Il me semble que notre collègue Grobet avait raison de se demander si deux stades de vingt-cinq mille places distants de 60 kilomètres étaient vraiment nécessaires.

M. Dominique Hausser (S). Je répète avec plaisir ce que nous avons dit lors du dernier débat sur un stade de football à propos d'une motion de l'Alliance de gauche : les socialistes refusent de signer un chèque en blanc au Conseil d'Etat qui démontre de manière réitérée, dans ce dossier, son incompétence. (Brouhaha.)

La présidente. Le coin de la classe, au fond à droite, est indiscipliné.

M. Dominique Hausser. Comme M. Büchi l'a dit, l'article 2 de la loi votée en avril 96 prévoit la participation à un financement d'étude de rénovation ou de démolition-reconstruction du stade des Charmilles. (Brouhaha.)

Permettez-moi d'énumérer quelques éléments pour le moins surprenants relevés dans l'exposé des motifs qui accompagne ce projet de loi.

Un stade de vingt-cinq mille places serait difficilement réalisable aux Charmilles. Nissim applaudit des deux mains : c'est effectivement ce qu'il avait dit. Moi, je suis surpris, car le préprojet se présentait différemment. Apparemment, il n'y a pas eu d'autres études, et je ne comprends pas sur quelle base on avance ces arguments. (Brouhaha.)

Contrairement à ce qui est dit en page 5 du rapport de l'exposé des motifs, la commission des travaux, pas particulièrement enthousiasmée par la procédure proposée par le Conseil d'Etat, voulait la poursuite du projet de loi voté. (Brouhaha.) Madame la présidente, je suis désolé...

La présidente. Moi aussi, Monsieur le député, j'essaie d'obtenir le silence; je sonne la cloche, mais ils n'entendent rien. Silence ! (Applaudissements.)

M. Dominique Hausser. Il semblerait d'après l'exposé des motifs que la fondation soit opposée à la rénovation des Charmilles, et, selon M. Manfrini, M. Hentsch peut tenir ce discours. Or un autre avis de droit demandé par le Servette FC disait exactement le contraire. Un troisième avis sera nécessaire pour trancher, à moins que cela ne donne un quatrième avis... (Brouhaha.)

Rien n'a été fait. Un stade à La Praille coûtera apparemment beaucoup plus cher que la version retenue pour les Charmilles. Mais aucune étude n'a été formellement présentée pour l'instant, et le Conseil d'Etat voudrait que l'on bafoue la loi sur la gestion financière et administrative de l'Etat en votant une subvention de construction pour un objet dont l'étude n'est même pas réalisée, et donc pas entérinée par ce Grand Conseil ! (Brouhaha.)

Quant au dernier point que M. Nissim, apparemment choqué, a soulevé... (Des députés s'interpellent. La présidente sonne la cloche.) Je sais que le football n'intéresse pas tout le monde... Je suis content de savoir que l'Etat a pris une part majoritaire dans la Fondation de droit public d'économie mixte Zschokke, afin de respecter la loi que nous avions votée, et versé 1,2 million pour les travaux de remise en état des Charmilles.

Ce projet de loi doit être encore longuement débattu, et notre tâche sera grande à la commission des travaux.

M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais apporter une précision suite à une déclaration du président de la nouvelle filiale de la multinationale «Canal +», à Genève. Excellent collègue au demeurant, il a déclaré à la presse que nous allions lancer un référendum, alors que nous n'en avons pas l'intention dans l'état actuel des choses.

Par contre, nous avons dit que la façon dont le Conseil d'Etat traite ce dossier est pour le moins légère et montre un certain degré d'incompétence qui devient gênant.

Nous voudrions rappeler, Monsieur Nissim, que vous n'étiez pas seul avec votre groupe dans l'opposition. Notre groupe était également opposé à la loi votée au pas de charge en avril 96. M. Büchi a eu un curieux lapsus à ce sujet en disant qu'il s'agissait d'un crédit pour la «démolition-reconstruction» du stade des Charmilles. Mais je le remercie de dire, au fond, la vérité. Il s'agissait effectivement de démolir le stade des Charmilles, c'était bien notre avis. Le titre de cette loi qui avait pour libellé la reconstruction-rénovation de ce stade était effectivement une tromperie.

Le Conseil d'Etat reconnaît qu'effectivement ce projet n'existait pas, mais la majorité du Grand Conseil l'a néanmoins accepté en libérant un crédit de 20 millions. Il est irréalisable à cet emplacement malgré tout ce que l'on a pu raconter pendant plusieurs années, propos rapportés avec beaucoup de complaisance par la presse.

Nous disons qu'il n'est pas possible qu'aujourd'hui ce Grand Conseil se déjuge au point de revoter une loi, comme celle du mois d'avril, sans qu'aucun projet n'ait été étudié. Ce n'est pas par goût du plaisir que certains d'entre nous rappelaient au mois d'avril 96 que la procédure exige que l'on vote d'abord un crédit d'étude et que l'on présente ensuite son résultat au Grand Conseil avant le vote du crédit de construction.

S'agissant d'une subvention, il faudrait pour le moins que l'auteur du projet ait fait une étude et qu'elle nous soit présentée. Pour l'Arena, par exemple, un crédit d'étude fut voté par ce Grand Conseil.

Mesdames et Messieurs les députés, on nous demande de nouveau de libérer 20 millions sans véritable projet, ni devis estimatif, ni plan de financement. On ne sait même pas si le Crédit Suisse confirme l'offre intéressante qu'il aurait faite, quel sera le budget de fonctionnement et qui paiera quoi dans cette affaire.

Par contre, on nous refait le coup de la traversée de la rade en nous annonçant une subvention de 15 à 45% de la Confédération. D'emblée, je tiens à dire que moyennant une forte subvention de la Confédération, de généreux donateurs et une modeste participation de l'Etat, ce projet pourrait être intéressant; même si cela paraît un peu absurde d'avoir deux stades à 60 kilomètres de distance pour un ou deux matches internationaux par année.

En ce qui concerne la subvention de la Confédération, j'ai un rapport en main relatif à la conception d'installations sportives d'importance nationale, adopté par le Conseil fédéral. Ce dernier a chargé une commission de déterminer si les cantons étaient intéressés par une subvention de la Confédération destinée à de telles installations et, surtout, si ces cantons avaient des projets. Je vous invite à lire ce document passionnant qui publie les réponses des vingt-six cantons.

Pour notre canton, la page est totalement blanche. Genève - comme trois autres cantons - n'a tout simplement pas répondu au questionnaire. Je précise qu'il s'agit d'une éventuelle subvention fédérale, absolument pas garantie au-delà de l'an 2000, et sans effet rétroactif. Parmi les projets retenus, trois stades pourraient en bénéficier : le Wankdorf, le Letzigrund et La Pontaise. On se demande s'il est encore possible de faire acte de candidature en ce qui concerne Genève, mais on peut toujours rêver ! Le stade romand, polyvalent, doit de plus inclure une piste d'athlétisme.

On continue à nous faire miroiter des subventions fédérales qui sont peut-être inexistantes. Qu'on nous présente - c'est indispensable - un crédit d'étude avec des renseignements sérieux, nous indiquant clairement quel sera le financement envisageable, le coût de cette opération, des terrains et du fonctionnement, et s'il est judicieux de créer un deuxième stade national à 60 kilomètres de celui qui sera certainement agréé par la Confédération ! Qu'on ne nous mette pas devant des faits accomplis ! (Exclamations.) Certains ont évoqué un concours...

La présidente. Nous sommes en préconsultation, Monsieur le député, aussi je vous remercie de conclure.

M. Christian Grobet. ...une mise en soumission pour préqualification d'entreprises faisant appel à des entreprises générales, ce qui m'apparaît néfaste au stade actuel des choses.

La présidente. Je rappelle qu'en préconsultation une seule personne par groupe s'exprime.

M. Olivier Lorenzini (PDC). Contrairement à ce que dit M. Grobet, ce n'est pas l'incompétence du Conseil d'Etat qui empêche ce projet d'avancer, mais celle du Conseil administratif de la Ville de Genève qui n'a jamais pris de décision au sujet du terrain de La Praille. Pour cette raison, le Grand Conseil a dû voter, en avril 96, le projet de rénovation-reconstruction du stade des Charmilles. (Exclamations.)

Mais seuls les idiots ne changent pas d'avis. La Ville de Genève a trouvé que ce site était le meilleur endroit, compte tenu que le propriétaire n'était pas disposé à céder son terrain pour la réalisation d'un stade de football. C'est pourquoi le Conseil d'Etat propose ce projet de loi qui modifie la loi que nous avons votée.

Le groupe démocrate-chrétien soutient le renvoi à la commission des travaux. Il faudra tout de même amender les délais que nous avions fixés, au mois de juin, concernant la réalisation et la concrétisation des études. On se réjouit du retour de cette loi au Grand Conseil.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. A la place de M. Grobet, je serais plutôt gêné au sujet de la page blanche relative à la demande de crédit formulée en 1991. C'est lui qui était à la tête de...

M. Christian Grobet. En 94, cher Monsieur, 94, pas 91 ! (Rires.) On dirait que vous ne connaissez pas vos dossiers ! (Brouhaha.)

La présidente. Qui a demandé la parole en préconsultation, alors qu'il l'avait déjà prise au nom de son groupe ?

Une voix. Ça suffit ce cirque ! Arrêtez, Madame ! (Brouhaha. On entend une radio.)

La présidente. D'où vient ce bruit ? (Exclamations.) Silence !

Une voix. Il y a une radio, il faut l'enlever ! Vous ne voyez pas, Madame ?

La présidente. Non, je ne vois pas, Monsieur le député ! Pour la voir, il faudrait qu'elle soit apparente...

Une voix. Alors, adressez-vous à votre collègue Hausser (Bruit.) C'est un scandale, Madame la présidente ! Il faudrait évacuer ! Entre la gauche et les radicaux...

La présidente. On se tait, ou bien... Ça commence à être un peu agaçant ! (Exclamations.) Taisez-vous, Monsieur Kunz, vous n'avez pas demandé la parole ! C'est inadmissible, également, de prolonger le débat de cette manière.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Les membres de la CISIN nous ont déclaré que ces demandes auraient dû être formulées en 91-92. Dans sa lettre du 17 février, Mme le chef du Département fédéral de l'intérieur déclare : «Comme vous le savez aussi, le stade projeté n'a pas figuré jusqu'à présent dans la conception des installations sportives d'importance nationale. En dépit de ce fait, qui ne laisse pas augurer de grands espoirs, l'EFSM attend avec intérêt votre dossier accompagné des documents nécessaires.»

Ce projet a des chances d'être accepté, car il est l'un des rares à présenter un financement potentiel et sérieux : aux 20 millions votés par votre Conseil s'ajoutent les 20 millions du Crédit Suisse qui, dans son communiqué du 4 février 1997, a confirmé la décision de la direction générale d'accorder un prêt sans intérêt, remboursable en huitante ans. Si l'on ajoute les 3 millions de la Ville, nous disposons de 43 millions. Grâce à cette somme, nous pourrons éventuellement obtenir un subside - non pas de 15 à 45%, comme le dit M. Grobet - mais de 10 à 13 millions.

Une subvention fédérale sera accordée au stade de La Pontaise en raison d'une piste cendrée destinée aux concours européens d'athlétisme en 2001. Ce n'est pas le cas pour Genève, car une éventuelle subvention serait destinée à un stade avec des sièges proches de la ligne de touche.

Comme vous le savez, un concours a été lancé en vue de la construction d'un nouveau stade. Nous sommes actuellement dans une phase de préqualification des concurrents. Certains s'interrogent sur les raisons de ce concours, alors qu'un projet de stade sur ce même emplacement existe déjà. Mais imaginez quelle aurait été leur réaction si le Conseil d'Etat avait simplement acheté le projet dont M. Büchi a parlé !

Si le mérite des architectes n'est pas mis en doute, ils exagèrent tout de même en parlant de droits d'auteurs au sujet d'un stade directement inspiré de celui de Gênes. Mais rassurez-vous ! Le but du concours n'est pas d'utiliser ce projet, et le concours leur reste ouvert.

Il s'agit d'assurer une certaine égalité de traitement. Si l'Etat se mettait à payer des droits à un architecte qui s'approprie un terrain en imposant son projet, les cent cinquante emplacements clés de Genève seraient immédiatement «squattés» par les autres architectes !

Ce projet est important. C'est en 1952 que le dernier stade a été construit en Suisse. L'Etat est impliqué non seulement par sa participation financière mais également par sa présence que le Grand Conseil a voulue majoritaire dans la fondation en voie de constitution, Monsieur Nissim, et qui sera le maître de l'ouvrage. Pour un projet de cette importance, le concours est la seule façon d'obtenir un projet de qualité tout en respectant la réglementation établie par les accords OMC.

On a fait appel à des groupements capables de concevoir l'architecture et les études d'ingénieurs figurant dans le dossier d'autorisation de construire et capables, également, d'établir une offre d'entreprise générale à un prix plafond garanti. Nous aurons ainsi moins de dépassements que dans certains bouclements de crédit que nous connaissons maintenant.

Le groupement sera engagé, et les besoins de financement seront définitivement cernés pour l'ensemble de la réalisation. Les conditions du complément de financement restent cependant encore à définir ainsi que l'exploitation commerciale du stade pour couvrir les charges d'exploitation et financières.

Dans le délai imparti par l'avis de préqualification, quatorze groupements constitués d'architectes, d'ingénieurs, d'entreprises générales, de sociétés de conseils financiers et d'exploitants ont fait acte de candidature. Le jury se prononcera le 3 mars.

Si la volonté exprimée par le Grand Conseil le 26 avril de doter notre canton d'un stade moderne reste la même, il convient alors de modifier la loi dans le sens qui vous est proposé. Cela nous permettra d'avancer dans la voie que nous avons choisie pour mener à bien ce projet. J'espère qu'il ne se trouvera pas trop d'esprits chagrins pour le ralentir ou le bloquer, comme c'est le cas dans la plupart des projets importants où des abus de droit manifestes sont commis pour empêcher de faire avancer la République.

Ce projet est renvoyé à la commission des travaux.