Séance du
jeudi 12 décembre 1996 à
17h
53e
législature -
4e
année -
1re
session -
52e
séance
PL 7181-A et objet(s) lié(s)
7. Rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier les objets suivants :
En date du 17 novembre 1994, le Grand Conseil a renvoyé à la commission judiciaire le projet de loi 7181. Cette dernière, présidée par M. Bernard Lescaze, a traité cet objet lors de ses séances des 29 juin 1995, 7, 14 et 21 mars, 18 avril, 6 et 13 juin 1996.
Ont assisté à ces travaux:
- - M. .
- M. Bernard Duport, secrétaire adjoint au DJPT;
- M. le juge Pierre Heyer, président de la Cour de justice.
Préambule
Le but de ce projet est principalement d'améliorer la motivation des décisions des juridictions pénales avec jury. Pour mieux appréhender l'enjeu et les conclusions de la commission judiciaire, il a paru opportun à la rapporteuse de rappeler brièvement l'origine et l'évolution du rôle du jury ainsi que les différentes étapes législatives en la matière.
L'institution du jury, dont le rôle était initialement destiné à établir les faits en matière civile et fiscale, est d'origine carolingienne et a vu sa première application en matière criminelle en 1164 en France. Le jury avait un rôle d'accusation, le jury de jugement est apparu au XIIIe siècle. Il fut introduit dans une dizaine de cantons suisses, à Genève d'abord, qui l'adopta dans sa constitution du 5 février 1794, suivi par le canton de Vaud en 1842 et la Confédération en 1845.
Actuellement, l'institution du jury en matière criminelle est garantie par l'article 137 de la constitution genevoise, sauf en ce qui concerne les tribunaux chargés de connaître des infractions commises par des mineurs.
Le concours du jury est ainsi prévu pour deux juridictions, de manière facultative pour la Cour correctionnelle (6 jurés) et obligatoirement pour la Cour d'assises (12 jurés).
Le jury se prononce seul sur la culpabilité de l'accusé et pour se déterminer répond par oui ou par non à une liste de questions établie résultant de l'ordonnance de renvoi en jugement rendue par la Chambre d'accusation et complétée durant l'audience de jugement le cas échéant.
L'absence de motivation des décisions s'explique par le fait que le jury, à l'origine, était un instrument de preuve et n'avait pas la compétence de rendre un jugement.
Cette caractéristique ainsi que le système des questions posées au jury ont déjà occupé la commission judiciaire en 1992 (voir Mémorial 1992, page 5124 et suivantes), suite au dépôt du projet de loi 6664 qui avait pour objet de donner au jury la possibilité de motiver succinctement sa réponse à chaque question qui en principe ne contient que «oui» ou «non».
Cette première modification législative était fondée sur les articles 4 de la constitution fédérale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme qui garantissent à tout justiciable le droit d'obtenir de l'autorité compétente une décision motivée. En effet, l'institution du jury de type classique était dépassée, à savoir que les jurés sont souverains et n'ont pas à se justifier.
Le texte actuel de l'article 308 CPP a donc été voté par notre Grand Conseil le 25 septembre 1992. Il était toutefois accompagné d'une motion (M 817) signée par 9 députés de la commission judiciaire, invitant le Conseil d'Etat à étudier de quelle manière il serait possible de réformer l'institution du jury de façon à ce que celle-ci puisse être conforme aux exigences de motivation telles qu'elles résultent de l'évolution prévisible de la jurisprudence du Tribunal fédéral.
C'est ainsi que le projet de loi 7181 nous a été proposé par le Conseil d'Etat, lequel s'est inspiré de la procédure d'autres cantons, lesquels ne connaissent toutefois pas l'institution du jury.
Ce projet de loi consiste à supprimer le système des questions et des questions subsidiaires posées au jury pour le remplacer par un vote de la culpabilité et des circonstances s'y rapportant pour chaque fait constitutif de l'infraction, contenu dans l'ordonnance de renvoi ou invoqué en audience.
L'arrêt rédigé et motivé par le président de la Cour constitue la réponse du jury à la thèse de l'accusation contenue dans l'ordonnance de renvoi et aux questions soulevées par les parties dans le cadre des débats.
Ce projet de loi propose, en outre, deux modifications d'ordre pratique, à savoir l'augmentation du nombre des jurés tirés au sort avant l'ouverture d'une session et la longueur du délai pour le dépôt des listes de témoins.
Travaux de la commission
Avant de procéder au vote d'entrée en matière, les commissaires ont auditionné deux membres de l'Ordre des avocats, à savoir Me Pascal Maurer, bâtonnier, et Me Marc Bonnant, avocat, ancien bâtonnier.
Me Bonnant s'est exprimé sur les trois modifications législatives proposées par ordre d'importance.
La première concernant l'augmentation du nombre des jurés tirés au sort pour les sessions de la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises n'appelle, à son avis, pas de commentaire puisqu'il s'agit d'un problème pratique relatif à l'organisation des audiences.
La deuxième modification relative au délai pour déposer les listes de témoins appelle, quant à elle, quelques réserves car l'article 256 CPP (nouvelle teneur) tel que proposé prévoit le dépôt des listes de témoins dans les 15 jours dès la notification de l'ordonnance de renvoi, alors qu'actuellement ce dépôt peut se faire 3 jours au moins avant l'ouverture de la session. Il peut, en effet, se passer plusieurs mois entre la réception de l'ordonnance de renvoi et l'ouverture de la session, ce qui rend ainsi plus difficile l'établissement de la liste de témoins qui, rappelle-t-il, se fait en fonction de celle du Parquet. C'est pourquoi, Me Bonnant, tout en estimant adéquat d'augmenter le délai à disposition du greffe des juridictions respectives pour procéder aux convocations des témoins, pense qu'il devrait être fixé en fonction de la date du procès.
Quant à la troisième modification, laquelle a trait à la motivation des arrêts de la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises, Me Bonnant estime que ce n'est pas une réforme anodine car elle sonne le glas du jury. Il n'est pas opposé à cette réforme car il n'est pas opposé non plus à la suppression du jury; cette belle institution philosophique a, indiscutablement, des limites quand il s'agit de juger des affaires complexes.
Dans le système proposé par le Conseil d'Etat, le jury décide et le président motive, ce qui, pour Me Bonnant, n'est plus la décision du jury puisqu'elle procède de la réflexion du président. Cette réforme conduit donc à vider le jury de sa substance. Toutefois, Me Bonnant rappelle que les avocats sont attachés à l'institution du jury dont il espère toujours une solution plus clémente que celle des magistrats de carrière. Me Maurer entend encore rappeler que, selon le système actuel, le président motive déjà les décisions du jury alors que, selon lui, le jury devrait être l'auteur tant de la décision que de sa motivation.
Discussion et vote d'entrée en matière
M. le juge Pierre Heyer explique que ce projet de loi a pour but d'encadrer le jury sur le plan juridique pour que cette institution subsiste.
Il faut effectivement savoir, comme le rappelle le professeur Robert Roth, juge à la Cour de cassation entendu à titre d'expert, que le Tribunal fédéral s'est toujours montré sceptique à l'égard du système du jury.
En conséquence et malgré quelques critiques mineures et propositions d'amendements, tant M. Pierre Heyer que M. Robert Roth sont favorables à ce projet de loi.
Les commissaires s'étant ainsi informés de manière approfondie sur la réforme proposée, ils procédèrent, à l'initiative du président de la commission, à une première lecture de la loi avant de se déterminer sur l'entrée en matière. Il en résulta un avis favorable non seulement sur les trois modifications proposées moyennant quelques amendements ainsi que sur le principe de l'enregistrement des débats pour lequel une proposition de disposition législative a été faite.
C'est ainsi que l'entrée en matière a été acceptée par 7 voix ( 2 R, 2 S, 1 Ve, 1 DC, 1 L), une opposition (AG) et 2 abstentions (1 AG et 1 L).
Suite des travaux et nouvelles auditions
La commission procéda alors à différentes auditions et reçut des propositions écrites d'amendements de l'Association des juristes progressistes (AJP), de l'ADG ainsi que des députés Michel Halperin et Bénédict Fontanet.
Audition de Me Dominique Poncet, avocat, professeur honorairede l'université de Genève, et de M. Straüli, professeur ordinaire à l'université de Genève
Me Dominique Poncet, après avoir fait un bref rappel historique, a remis à la commission une copie du rapport du Conseil fédéral à l'assemblée fédérale du 23 mars 1956, relatif à l'initiative du canton de Zurich concernant le maintien des jurys cantonaux. Ce rapport confirme le peu d'enthousiasme du Tribunal fédéral à conserver le système du jury et propose de ne pas donner suite à l'initiative zurichoise.
Me Poncet est favorable au maintien du système des questions posées aux jurés et rappelle que le questionnaire résulte des réquisitions du Parquet. Il est d'avis que la motivation n'est pas incompatible avec le maintien du questionnaire. Le professeur Straüli ne partage par contre pas cet avis et insiste sur le fait que l'exigence du droit fédéral est la motivation. Selon lui, le questionnaire devient en conséquence inutile, voire contraire au droit fédéral, dans la mesure où il en empêche parfois l'application.
Audition des représentants de l'Association des juristes progressistes,Mes Sabine Mascotto avocate, et Maurice Harari, avocat
Me Mascotto explique que l'AJP est opposée sur deux points au présent projet de loi, à savoir sur le caractère différé de la motivation des arrêts de la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises ainsi que sur la suppression des questions au jury.
L'AJP est attaché à l'institution du jury et propose de faire participer le président à la délibération pour obtenir une motivation complète et cohérente.
Me Harari confirme que le système des questions doit être maintenu. Le problème n'est pas tant la motivation mais la qualité des questions. Il est vrai que le système des questions exige un certain effort des substituts mais la tradition pénale veut que l'acte d'accusation permette à l'accusé de savoir de quoi on l'accuse. Me Harari estime que l'argumentation selon laquelle le système actuel viole le droit fédéral n'est pas pertinente. Selon son expérience, les affaires financières et les affaires compliquées nécessitant de longues enquêtes, voire des expertises, font que, devant l'autorité de jugement, l'enjeu concerne plutôt la quotité de la peine que la culpabilité.
Mes Mascotto et Harari ont commenté les amendements que propose l'AJP, commentaires qui seront repris dans la discussion article par article.
Conclusions intermédiaires
L'évaluation des différents arguments invoqués lors des auditions a conduit la plupart des commissaires à une certaine réticence à supprimer le système des questions. Ainsi, avant de poursuivre les travaux, un vote est proposé par le président sur l'abandon du système des questions.
Les commissaires, à l'unanimité moins 3 abstentions (1 S, 1 Ve, 1 R), ont refusé d'abandonner le système des questions.
Poursuite des travaux
La commission, consciente du fait qu'il y a lieu d'améliorer la motivation des arrêts de la Cour correctionnelle avec jury et de la Cour d'assises, s'est alors attelée, avec le précieux concours de M. Pierre Heyer, président de la Cour de justice, ainsi que celui de M. Bernard Duport, secrétaire adjoint au DJPT, à un minutieux travail de législateur, prenant en compte les différents avis invoqués et amendements proposés dans la mesure où ils contribuaient au but poursuivi et plus particulièrement à satisfaire aux exigences du droit fédéral tout en maintenant le système des questions aux jurés.
C'est ainsi que le projet de loi 7181 a été remanié de façon importante puisque la principale modification qu'il proposait a été supprimée.
Commentaires article par article
Article 200, alinéa 2 (nouveau)
Cette disposition fait partie de la section 4 du CPP relatif aux décisions du procureur général à l'issue de la procédure d'intruction préparatoire et a pour but de préciser le contenu des réquisitions.
Le libellé proposé par le Conseil d'Etat a été retenu à l'exception de la lettre b. En effet, par souci de systématique et pour tenir compte des remarques des commissaires ainsi que de l'ADG, «la description des faits constitutifs des infractions reprochées à l'accusé» a été remplacé par les faits retenus contre l'accusé et leur qualification juridique. Ainsi le texte est en harmonie avec les articles 210, alinéa 1, et 219 CCP.»
Cette nouvelle teneur a été acceptée à l'unanimité.
Article 210, alinéa 1 (nouvelle teneur)
Cette nouvelle disposition relative au contenu de l'ordonnance de renvoi a fait l'objet d'une proposition d'amendement de la part du professeur Roth, à savoir que l'ordonnance de renvoi doit indiquer dans son dispositif les faits retenus contre l'accusé, leur qualification juridique, ainsi que les dispositions légales justifiant le renvoi. Il s'agit, en l'espèce, d'une nouvelle formulation du projet de loi en accord avec le libellé de l'article 200, alinéa 2, lettre b, nouveau.
Cette disposition a été acceptée à l'unanimité.
Article 249 (nouvelle teneur)
S'agissant du tirage au sort des jurés, le projet de loi propose de tirer au sort 35 jurés plutôt que 25.
Cette modification d'ordre pratique n'a rencontré aucune opposition et est adoptée à l'unanimité.
Article 254, alinéa 1 (nouvelle teneur)
Il s'agit en l'espèce de la citation de l'accusé par le président. Cette citation se fait actuellement au moins 14 jours avant la session. Toutefois, par esprit de cohérence et vu la modification de l'article 256, celle-ci commande d'augmenter le délai à 21 jours, proposition qui est adoptée à l'unanimité par la commission.
Article 256 (nouvelle teneur)
Il s'agit d'une modification d'ordre technique des délais pour déposer les listes de témoins. L'alinéa 1 tel qu'amendé par la commission émane d'une proposition des députés prévoyant que les parties doivent communiquer par écrit au président de la Cour de justice le nombre approximatif des témoins qu'elles désirent faire entendre dans les 10 jours dès la notification de l'ordonnance de renvoi.
L'alinéa 2 précise que la liste des témoins doit être déposée au greffe de la Cour 10 jours au moins avant l'ouverture de la session.
L'alinéa 3 reprend la teneur de l'alinéa 2 actuel.
Cet article ainsi remanié a été accepté à l'unanimité.
Article 258 (nouvelle teneur)
La modification consiste en l'espèce au nombre de jurés tirés au sort, il est de 50 jurés actuellement et il est porté à 70.
Cet article est accepté à l'unanimité.
Article 286, alinéa 4 (nouveau)
Cet alinéa, sur proposition de l'AJP, permet aux parties, à l'issue de la lecture de l'ordonnance de renvoi, de présenter brièvement leur position.
Ce système donne l'occasion notamment à l'accusé, le cas échéant, de préciser les faits qu'il admet. Cela permet d'être plus rationnel dans la suite de la procédure.
Cet article est accepté à l'unanimité.
Article 299 (nouvelle teneur)
Il s'agit tout d'abord de modifier la note marginale et de remplacer «questions subsidiaires» par «questions complémentaires».
La même modification est faite dans le texte de la disposition.
Cet article a été accepté à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 300 (nouvelle teneur)
Cette modification résulte de celle de l'article 299 où le terme subsidiaire a été remplacé par complémentaire.
Cette proposition a été acceptée à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 304, alinéa 3 (nouveau)
Il s'agit de l'entrée en délibération du jury suite à une proposition de l'ADG et de l'AJP. La commission a accepté à l'unanimité le principe que le greffier assiste à la délibération pour dresser le procès-verbal des décisions prises et de leur motivation.
Cela tient également compte des remarques des différentes personnes auditionnées dont il résulte que la motivation doit également émaner du jury.
Cet alinéa a été accepté par 10 voix (2 AG, 2 S, 1 Ve, 1 DC, 2 R, 2 L) et deux oppositions (1 L, 1 DC).
Article 305 (nouvelle teneur)
La Commission judiciaire proposant le maintien du système des questions, elle a repris le texte actuel relatif au mode de délibération et vote des jurés et l'a remanié, à la forme, par une conjonction des alinéas 1 et 5 actuels, au fond, en précisant que chacun des jurés donne son opinion au cours de la délibération et il est ensuite procédé au vote à main levée.
Ce texte a été adopté à l'unanimité moins une abstention (R).
L'alinéa 2 reprend textuellement la disposition de l'article 309 actuel.
Ce texte est adopté à l'unanimité.
Article 306 (nouvelle teneur)
Ensuite de plusieurs propositions des députés, il a été décidé d'étayer l'article 306 et de ne plus le limiter à la constatation des réponses mais également à celle des motivations.
C'est ainsi que la note marginale devient «constatation des réponses et motivations» et que les 4 alinéas déterminent la mission du greffier (alinéa 1), la forme des réponses, l'alinéa 2 reprenant le texte de l'article 308, alinéa 2 actuel, l'alinéa 3 reprend le texte de l'article 307 actuel, l'alinéa 4 donne la possibilité au jury de faire noter toute indication qu'il estime utile pour motiver le verdict.
Cette disposition a été adoptée à l'unanimité.
Article 307 (nouvelle teneur)
Le texte actuel de cette disposition ayant été déplacé à l'article 306, alinéa 3, la commission propose d'introduire la notion de procès-verbal du verdict du jury, qui doit être signé par le président de la Cour, le chef du jury et le greffier. Il y a lieu, en effet, que toutes les parties présentes signent ce document qui va servir de référence pour la rédaction de l'arrêt dont le contenu est précisé ci-après à l'article 327 (nouvelle teneur).
Ce texte a été adopté à l'unanimité.
Article 308 (nouvelle teneur)
Cette disposition résulte d'une discussion de la commission qui, dans le but d'améliorer la motivation des décisions du jury, a estimé utile de permettre aux jurés d'interrompre leurs délibérations pour poser des questions complémentaires le cas échéant.
Cette disposition a été acceptée ainsi que le libellé de la note marginale à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 309 (abrogé)
En effet, la teneur de cette disposition est reprise dans l'article 305, alinéa 2.
(Adopté à l'unanimité)
Article 310, alinéa 1 (nouvelle teneur)
Les membres du jury ne pouvant sortir de la chambre de délibération qu'après avoir formulé leur verdict, une réserve devait être émise en fonction des possibilités offertes par l'article 308 tel que proposé.
Article adopté à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 313 (nouvelle teneur)
S'agissant du verdict, il y a lieu de modifier la teneur actuelle en fonction des propositions d'amendements faites aux articles 299, 300 et 308.
Par ailleurs, la commission a retenu la proposition du Conseil d'Etat, à savoir que c'est le président qui communique aux parties le verdict du jury alors que, selon la solution actuelle, c'est le chef du jury qui lit le verdict.
Cette nouvelle formule a été adoptée à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 318, alinéas 1 et 4 (nouvelle teneur)
Cette disposition a trait à la délibération sur l'application de la peine et sur l'octroi du sursis. Seuls les alinéas 1 et 4 ont été modifiés.
Le texte de l'alinéa 1 a été quelque peu épuré pour éviter des redites et il a été précisé que le greffier assiste à cette délibération.
Quant à l'alinéa 4, la proposition du Conseil d'Etat a été retenue sans modification.
La nouvelle teneur de cette disposition a été adoptée à l'unanimité moins une abstention (DC).
Articles 319 à 323 (abrogés)
Il s'agit du projet de loi qui a été accepté sans amendement.
En effet, les articles 319 à 323 sont relatifs à la responsabilité restreinte, l'imputation de la détention préventive, la restitution des objets saisis ainsi que les dommages-intérêts réclamés par la partie civile. Cette abrogation découle, en ce qui concerne l'article 319, de la modification apportée à l'article 318, alinéa 4, supprimant désormais les mesures ordonnées par la Cour seule, sans le jury, alors que pour les articles 320 à 323, leur contenu est repris par l'article 327, alinéas 2 à 6.
L'abrogation de ces dispositions est acceptée à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 325 (abrogé)
La teneur de cette disposition est reprise à l'article 327, alinéa 6.
Cette modification est adoptée à l'unanimité.
Article 326 (nouvelle teneur)
Cette nouvelle disposition relative au prononcé de l'arrêt a fait l'objet d'un amendement dans la mesure où un alinéa 4 a été ajouté à la proposition initiale, lequel précise que le président informe les parties des voies de droit.
En effet, cela s'imposait puisque l'arrêt n'est notifié qu'après l'audience et au plus tard dans un délai de 15 jours, conformément à la proposition de l'article 327, alinéa 8.
Les quatre alinéas de l'article 326 sont adoptés à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 327 (nouvelle teneur)
Il s'agit en l'espèce de définir la forme et le contenu de l'arrêt. La proposition telle que figurant dans le projet de loi est d'importance puisque le contenu actuel des arrêts de la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises font l'objet de critiques de la part du Tribunal fédéral.
C'est pourquoi, tout en s'inspirant de la version proposée par le Conseil d'Etat, la commission a dû apporter quelques amendements et remaniements en fonction des autres dispositions.
L'alinéa 1 précise que la forme est écrite et décrit le contenu de l'arrêt.
Les voies de recours étant indiquées aux parties lors de la lecture du verdict, elles ne sont pas reprises dans le contenu de l'arrêt afin de ne pas faire renaître des délais de recours. Le cas de l'opposition à défaut est traité à l'alinéa 8 du même article.
Les alinéas 2 à 5 sont repris tels quels du projet de loi.
L'alinéa 6 reprend le texte de l'article 325, tout en supprimant la notion de dévolution des biens saisis à l'Etat, pour tenir compte de la modification du droit fédéral (articles 58 et 59 CP).
L'alinéa 7 est le résultat de plusieurs propositions et tend à ce que le président, le chef du jury ou son suppléant et le greffier signent la minute de l'arrêt afin que la motivation soit conforme à la volonté du jury.
L'alinéa 8 concerne le délai de notification de l'arrêt et indique les voies de droit spécifiques en cas de jugement par défaut.
Cet article a été voté à l'unanimité moins une abstention (DC).
Article 328 (nouvelle teneur)
S'agissant de l'enregistrement des débats, il ressort des procès-verbaux que le président a soumis ce principe au vote de la commission lors de la première lecture de la loi et que cette dernière s'est prononcée à l'unanimité en faveur de ce principe. Toutefois, il y a lieu de préciser que l'enregistrement des débats n'est accessible qu'aux parties en cas de recours exclusivement et qu'une défaillance technique n'affecte pas la validité des débats.
Ainsi, avec cette portée très limitée, l'article 328 a été accepté par 7 voix (1 Ve, 1 S, 2 R, 3 L) contre 3 (1 DC, 2 AG).
Article 329, alinéa 1 (nouvelle teneur)
La commission a limité la modification de cette disposition à l'alinéa 1 pour qu'il soit cohérent avec les propositions déjà votées.
Cet amendement est accepté par 7 voix ( 2 AG, 1 Ve, 2 L, 2 R) et 3 abstentions (1 L, 1 DC, 1 S).
Article 337, alinéa 1 (nouvelle teneur)
La modification consiste à supprimer la référence à l'article 308 vu la modification de son contenu.
Cette proposition a été adoptée à l'unanimité.
Conclusions
Suite à un travail laborieux et tout intérêt bien pesé, la commission judiciaire n'a pas voulu courir le risque de mettre en péril l'institution du jury en supprimant purement et simplement le système des questions auxquelles les jurés doivent répondre.
S'il est vrai que la question de la motivation des réponses peut poser problème, les amendements proposés y remédient en donnant la possibilité aux jurés non seulement de faire noter leurs observations par un greffier, mais encore d'interrompre la délibération pour poser des questions complémentaires si nécessaire.
Enfin, l'arrêt rédigé par le président de la Cour doit être signé par le chef du jury qui approuve les motivations écrites avant notification de la décision, ce qui garantit la participation active du jury tout au long du processus de décision.
Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, la commission judiciaire vous propose à l'unanimité de voter ce projet de loi tel qu'amendé au cours de ses travaux, lequel répond également à la motion 817.
(M 817)
Proposition de motion
concernant l'institution du jury
LE GRAND CONSEIL,
- vu le projet de loi 6664;
- vu l'évolution récente de la jurisprudence du Tribunal fédéral, et notamment l'arrêt S. du 10 avril récemment publié;
- attendu que les exigences de motivation, telles qu'elles résultent des décisions du Tribunal fédéral, vont en se renforçant;
- que le système qui prévaut à Genève en matière criminelle ne semble plus trouver grâce auprès du Tribunal fédéral;
- que le projet de loi 6664 risque de n'apporter qu'une réponse partielle et temporaire aux exigences du Tribunal fédéral;
- qu'une saine administration de la justice et le bon fonctionnement de l'Etat exigent que les décisions rendues par les juridictions connaissant des crimes les plus graves ne soient pas systématiquement cassées;
- qu'il y a par conséquent lieu de ne pas prendre de risques et d'envisager d'adapter l'institution du jury ainsi que le mode de fonctionnement et de décision de la Cour d'assises et de la Cour correctionnelle siégeant avec le concours du jury;
- que la population genevoise demeure attachée à l'institution du jury, garantie par la constitution cantonale,
invite le Conseil d'Etat
1. à étudier de quelle manière il serait possible de réformer l'institution du jury de façon à ce que celle-ci puisse être conforme aux exigences de motivation telles qu'elles résultent de l'évolution prévisible de la jurisprudence du Tribunal fédéral;
2. à faire à bref délai un rapport à cet égard au Grand Conseil;
3. à présenter le cas échéant un projet de loi au Grand Conseil.
Premier débat
M. Laurent Moutinot (S), rapporteur ad interim. N'ayant pas participé aux travaux de la commission judiciaire et n'étant pas l'auteur du rapport, je peux, sans tomber dans l'autosatisfaction, féliciter les députés de la commission d'avoir résolu, en quelque sorte, la quadrature du cercle, à savoir le maintien du jury populaire - et de son rôle éminent - ainsi que l'exigence, inhérente à un Etat de droit, de motiver correctement les décisions de justice.
De multiples solutions, plus ou moins satisfaisantes, s'offraient à la commission. Elle a choisi la meilleure, celle qui préservait deux impératifs qui auraient pu être contradictoires.
Par conséquent, je demande au Grand Conseil d'approuver le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission judiciaire.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je m'associe aux louanges de M. le député Moutinot. Je félicite particulièrement le président Bernard Lescaze de la manière dont ce dossier a été conduit. Il a débouché sur le vote unanime de la commission judiciaire.
Je tenais à dire ma satisfaction.
PL 7181-A
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
(PL 7181)
loi
modifiant le code de procédure pénale
(motivation des arrêts de la Cour d'Assises et de la Cour correctionnelle)
(E 3 5)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
Le code de procédure pénale, du 29 septembre 1977, est modifié comme suit:
Art. 200, al. 2 (nouveau)
2 Les réquisitions du procureur général contiennent:
a) l'identité de l'accusé;
b) les faits retenus contre l'accusé et leur qualification juridique;
c) les dispositions légales réprimant ces faits.
Art. 210, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'ordonnance de renvoi doit indiquer dans son dispositif les faits retenus contre l'accusé, leur qualification juridique, ainsi que les dispositions légales justifiant le renvoi.
Art. 249 (nouvelle teneur)
1 Au moins 21 jours avant l'ouverture d'une session, le président tire au sort, en audience publique, les noms de 35 jurés pris sur la liste des jurés choisis par le Grand Conseil.
2 Il communique au procureur général les noms des jurés désignés par le tirage au sort.
Art. 254, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Au moins 21 jours avant la session, le président fait citer l'accusé pour le jour et l'heure fixés. Son conseil en est informé par écrit. Avec le consentement de l'accusé, ce délai peut être réduit à 3 jours. La citation indique en outre le jour et l'heure auxquels il sera procédé à la formation du jury et la dernière date utile pour le dépôt des listes de témoins au greffe de la cour.
Art. 256 (nouvelle teneur)
1 Sauf dans le cas de l'article 335, dans les 10 jours dès la notification de l'ordonnance de renvoi par la Chambre d'accusation, les parties communiquent par écrit au président de la Cour le nombre approximatif des témoins qu'elles désirent faire entendre.
2 Les listes des témoins que les parties désirent faire entendre doivent être déposées au greffe de la Cour 10 jours au moins avant l'ouverture de la session, en autant d'exemplaires qu'il y a de parties. Ce délai est abrégé en cas de réduction du délai de citation conformément à l'article 254, alinéa 1.
3 Le président cite les témoins par huissier, par un agent de l'ordre publique ou par voie postale.
Art. 258 (nouvelle teneur)
1 Au moins 21 jours avant l'ouverture d'une session, le président tire au sort, en audience publique, les noms de 70 jurés pris sur la liste des jurés choisis par le Grand Conseil.
2 Pour l'élaboration de la liste des jurés appelés à siéger, il procède selon les règles des articles 249, alinéa 2, à 253.
Art. 286, al. 4 (nouveau)
4 Les parties sont autorisées à présenter brièvement leur position.
Art. 299 (nouvelle teneur)
D'office ou à la requête du procureur général ou de la défense, la Cour peut en outre poser au jury toute question complémentaire découlant des débats, notamment si:
a) il résulte de l'ensemble de la situation qu'il peut exister une cause d'atténuation libre de la peine;
b) il apparaît qu'un accusé, poursuivi comme auteur principal, n'a été que complice de l'infraction ou que, poursuivi pour avoir commis l'infraction, il a seulement tenté de la commettre.
Art. 300 (nouvelle teneur)
Il ne peut être posé de questions complémentaires relatives:
a) à un chef d'accusation lorsque le fait comporte une qualification autre que celle donnée par l'ordonnance de renvoi;
b) aux circonstances aggravantes d'un chef d'accusation qui n'ont pas été mentionnées dans l'ordonnance de renvoi;
c) à l'irresponsabilité de l'accusé au sens de l'article 10 du code pénal,
que si les débats ont porté sur ces points et pour autant que les conditions prévues à l'article 283 aient été observées.
Art. 304, al. 3 (nouveau)
3 Le greffier assiste également à la délibération pour dresser le procès-verbal des décisions prises et de leur motivation.
Art. 305 (nouvelle teneur)
1 Le chef du jury lit successivement toutes les questions. Chacune d'elles fait l'objet d'une délibération spéciale au cours de laquelle les jurés donnent leur opinion. Au terme de la délibération, le chef du jury met au vote à main levée la réponse des jurés. Nul ne peut s'abstenir.
2 Toute décision est prise à la majorité des membres du jury. Toutefois, en cas d'égalité des voix, l'avis favorable à l'accusé prévaut.
Art. 306 (nouvelle teneur)
1 Le greffier prend note de chaque décision du jury et de sa motivation.
2 Si le jury décide de résoudre une partie de la question affirmativement et l'autre négativement, la réponse à chaque question partielle obéit aux mêmes règles.
3 Si le jury répond négativement à une question principale touchant l'un des chefs d'accusation, il n'a pas à s'occuper des questions accessoires relatives à ce fait.
4 Le jury est libre de demander au greffier de noter toutes indications qu'il estime utiles pour motiver son verdict.
Art. 307 (nouvelle teneur)
Le procès-verbal du verdict du jury comportant ses réponses ainsi que sa motivation est signé par le président, le chef du jury et le greffier.
Art. 308 (nouvelle teneur)
Si le jury veut poser une question complémentaire en cours de délibération, les débats sont repris. La Cour soumet la nouvelle question au procureur général et à la défense qui s'expriment exclusivement sur ce sujet. L'article 283 est applicable. Puis, la délibération du jury reprend.
Art. 309 (abrogé)
Art. 310, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les membres du jury ne doivent sortir de leur chambre qu'après avoir formulé leur verdict, sous réserve de l'arti-cle 308.
Art. 313 (nouvelle teneur)
Le président communique aux parties en séance publique le verdict du jury sur les faits indiqués dans l'ordonnance de renvoi ou ceux ayant fait l'objet de questions complémentaires selon les articles 299, 300 et 308. Il expose les considérants essentiels.
Art. 318, al. 1 et 4 (nouvelle teneur)
1 La Cour et le jury se retirent pour délibérer. Le greffier assiste à cette délibération.
4 La Cour et le jury statuent sur les peines accessoires, mesures de sûreté et autres mesures.
Art. 319 à 323 (abrogés)
Art. 325 (abrogé)
Art. 326 (nouvelle teneur)
1 En présence de l'accusé, le président, en se référant aux articles de loi sur lesquels l'arrêt est fondé, prononce celui-ci en audience publique.
2 Il expose sommairement les circonstances qui ont déterminé la quotité de la peine, le prononcé de toute mesure, l'octroi ou le refus du sursis.
3 Si le condamné est mis au bénéfice du sursis, le président l'avertit des conséquences qu'entraînerait pour lui une nouvelle condamnation ou l'inobservation des conditions mises à l'octoi du sursis.
4 Le président avertit les parties qu'elles peuvent se pourvoir en cassation par simple déclaration écrite déposée auprès du greffe de la Cour, dans le délai de 5 jours. Le président avertit en outre le condamné qu'il peut en tout temps recourir en grâce auprès du Grand Conseil. Le procès-verbal en fait mention.
Art. 327 (nouvelle teneur)
1 L'arrêt est rendu en la forme écrite. Il contient:
a) l'ordonnance de renvoi et, le cas échéant, les questions complémentaires;
b) les faits retenus;
c) les motifs quant aux principaux moyens de preuve retenus et écartés;
d) les motifs en droit du verdict du jury et de la décision de la Cour et du jury relative à la peine ou au prononcé d'une mesure.
2 Dans les limites de l'article 69 du code pénal, la Cour et le jury déduisent la détention préventive de la peine prononcée et déterminent la durée de la peine qui reste à subir.
3 La Cour ordonne que les biens enlevés ou saisis soient restitués à leur propriétaire lorsque l'arrêt est devenu définitif.
4 Lorsque des actes authentiques ont été déclarés faux, en tout ou en partie, la Cour ordonne qu'ils soient rétablis, rayés ou réformés. Elle ordonne également que les pièces de comparaison soient sur-le-champ renvoyées d'où elles ont été tirées ou qu'elles soient remises aux personnes qui en ont fait la communication.
5 La Cour statue sur les dommages-intérêts réclamés par la partie civile, s'il y a condamnation ou constatation de l'irresponsabilité, après que les parties ont fait valoir leurs moyens et que le procureur général a été entendu. La Cour peut, si elle le juge convenable, renvoyer l'examen de la demande à une audience ultérieure pour prendre connaissance des pièces, recevoir les observations des parties et entendre le procureur général. Il est procédé alors conformément aux règles de la procédure civile.
6 La Cour, dans son arrêt, statue sur les frais et les dépens, ainsi que sur le sort des biens saisis en garantie du paiement des frais qui ne sont pas confisqués par l'Etat. La saisie peut être levée nonobstant condamnation, si l'équité l'exige, notamment pour tenir compte de la situation des personnes lésées.
7 Le président, le chef du jury ou son suppléant et le greffier signent la minute de l'arrêt.
8 L'arrêt est notifié aux parties par le greffier au plus tard 15 jours après l'audience. En cas de jugement par défaut, l'avis de jugement mentionne le délai de l'opposition, la forme et la juridiction compétente.
Art. 328 (nouvelle teneur)
1 Les débats sont enregistrés.
2 L'enregistrement est versé à la procédure et accessible aux parties en cas de recours.
3 Il n'est pas accessible au jury pendant les délibérations.
4 Un enregistrement défaillant pour des raisons techniques n'affecte pas la validité des débats.
Art. 329, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Le greffier rédige le procès-verbal de l'audience, qui mentionne les diverses opérations de la procédure.
Art. 337, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les dispositions des sections 1, 4, 7 et 8 du présent chapitre, à l'exception de celles qui concernent le jury, sont applicables devant la Cour correctionnelle sans jury.
M 817-B
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.