Séance du
vendredi 6 décembre 1996 à
17h
53e
législature -
4e
année -
1re
session -
50e
séance
PL 7517
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 16 juin 1977, est modifiée comme suit:
Art. 3, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Les dispositions du chapitre II sont réservées.
CHAPITRE II
Dispositions particulières(nouvelle teneur comprenant les art. 5 à 12A)
Art. 5 (nouvelle teneur)
1 L'étranger qui a laissé expirer le délai imparti pour son départ ou qui peut être renvoyé ou expulsé immédiatement peut être refoulé (art. 14, al. 1, lettres a et b de la loi fédérale).
2 S'il a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs Etats, il est refoulé dans le pays de son choix (art. 14, al. 2, de la loi fédérale).
3 Exception faite des mesures d'éloignement sans procédure spéciale (art. 12, al. 1, et art. 23, al. 3, de la loi fédérale), le refoulement est ordonné par l'office cantonal de la population.
4 La police est l'autorité compétente pour procéder au refoulement.
Art. 6 (nouvelle teneur)
Mise en détention
1 Afin d'assurer le déroulement d'une procédure de renvoi, l'étranger peut être mis en détention pendant la préparation de la décision sur son droit de séjour, aux conditions prévues à l'article 13a de la loi fédérale.
2 Si une décision de renvoi ou d'expulsion de première instance a été notifiée, l'étranger peut être mis ou maintenu en détention aux fins d'en assurer l'exécution, aux conditions prévues à l'article 13b de la loi fédérale. En cas de maintien en détention, une nouvelle décision doit être prise.
3 L'étranger peut également être contraint à ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'article 13e, alinéa 1, de la loi fédérale.
Art. 7 (nouvelle teneur)
1 L'office cantonal de la population est compétent pour:
a) proposer à l'officier de police d'ordonner la mise en détention en phase préparatoire ou en vue de refoulement (art. 13a et 13b de la loi fédérale);
b) demander au président de la commission visée à l'article 4 de prolonger au-delà de 3 mois la détention en vue de refoulement (art. 13b, al. 2, de la loi fédérale);
c) ordonner l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée (art. 13e de la loi fédérale) pour une durée de 6 mois au maximum;
d) demander au président de la commission de prolonger au-delà de 6 mois l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée;
e) demander au président de la commission d'ordonner la perquisition d'un appartement ou d'autres locaux (art. 14, al. 4, de la loi fédérale);
f) ordonner la mise en liberté d'un étranger détenu en phase préparatoire ou en vue de refoulement.
2 L'officier de police est compétent pour:
a) ordonner la mise en détention en phase préparatoire ou en vue de refoulement (art. 13a et 13b de la loi fédérale);
b) soumettre à la fouille un étranger et ses biens (art. 14, al. 3, de la loi fédérale);
3 Le président de la commission est compétent pour:
a) examiner d'office la légalité et l'adéquation de la détention (art. 13c, al. 2, de la loi fédérale);
b) prolonger la détention en vue de refoulement au-delà de 3 mois (art. 13b, al. 2, de la loi fédérale);
c) statuer sur les demandes de levée de détention déposées par l'étranger dans les délais prévus à l'article 13c, alinéa 4, de la loi fédérale ou lorsque des faits nouveaux sont invoqués;
d) connaître, sur recours, des décisions de l'office cantonal de la population ordonnant l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée (art. 13e, al. 3, de la loi fédérale).
e) prolonger au-delà de 6 mois l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée;
f) statuer sur les demandes de levée d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée déposées par l'étranger;
g) ordonner la perquisition d'un appartement ou d'autres locaux (art. 14, al. 4, de la loi fédérale);
4 Le Tribunal administratif est compétent pour connaître, sur recours, des décisions que le président de la commission prend en vertu de l'alinéa 3.
Art. 8 (nouvelle teneur)
1 Les ordres de mise ou de maintien en détention de l'officier de police sont transmis sans délai au président de la commission pour contrôle de la légalité et de l'adéquation de la détention.
2 S'il entend demander la prolongation de la détention, l'office cantonal de la population doit saisir le président de la commission d'une requête écrite motivée, au plus tard 96 heures avant l'expiration des 3 mois de détention en vue de refoulement.
3 Le recours contre les décisions d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée doit être formé par écrit dans les 10 jours qui suivent leur notification. Il n'a pas d'effet suspensif.
4 S'il entend demander la prolongation de l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée, l'office cantonal de la population doit saisir le président de la commission d'une requête écrite motivée, au plus tard 96 heures avant l'expiration des 6 mois d'interdiction.
5 Les demandes de levée de détention et de levée d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée doivent être adressées par écrit au président de la commission.
Art. 9 (nouvelle teneur)
1 Le président de la commission dispose de 48 heures au plus après la mise en détention pour examiner la légalité et l'adéquation de la détention. Il peut confirmer, réformer ou annuler la décision de l'officier de police; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger.
2 Il statue dans les 96 heures qui suivent sa saisine sur les requêtes de prolongation de détention de l'office cantonal de la population ou sur les demandes de levée de détention faites par l'étranger. Le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger.
3 Le président de la commission statue dans les 10 jours qui suivent le dépôt d'un recours contre une décision d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée.
4 Il statue dans les 96 heures qui suivent sa saisine sur les requêtes de prolongation de l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée de l'office cantonal de la population ou sur les demandes de levée d'interdiction déposées par l'étranger.
5 Il statue au terme d'une procédure orale.
6 Il notifie sa décision motivée à l'étranger, à son mandataire éventuel, ainsi qu'aux autorités concernées.
7 Le président de la commission peut être suppléé par chacun des membres titulaires ou suppléants de la commission.
Art. 10 (nouvelle teneur)
1 Le recours au Tribunal administratif doit être formé par écrit dans les 10 jours qui suivent la notification de la décision attaquée. Il n'a pas d'effet suspensif.
2 Le Tribunal administratif statue dans les 10 jours qui suivent sa saisine. Il est compétent pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant lui.
3 Il peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger. Il notifie sa décision motivée à l'étranger, à son mandataire éventuel, ainsi qu'aux autorités concernées.
4 Le Tribunal administratif peut, par règlement, décider de siéger en section de 3 juges pour statuer sur les recours contre les décisions prises par le président de la commission.
Art. 11 (nouvelle teneur)
1 A chaque phase de la procédure, l'étranger doit être informé, dans une langue qu'il comprend, de ses droits, ainsi que de la portée et de la motivation des décisions prises à son égard.
2 Ses droits et ses devoirs liés aux conditions d'exécution de la détention doivent lui être communiqués de façon adéquate.
Art. 12 (nouvelle teneur)
1 Dès sa mise en détention, l'étranger a le droit d'être assisté ou représenté par un avocat ou un autre mandataire professionnellement qualifié, avec lequel il doit pouvoir prendre contact, s'entretenir et correspondre librement et sans témoin.
2 Un avocat ou un autre mandataire professionnellement qualifié est mis d'office et gratuitement à la disposition de l'étranger pour la procédure orale d'examen de la légalité et de l'adéquation de la détention.
3 La possibilité d'obtenir l'assistance juridique, au sens de l'article 143A de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, demeure réservée.
Art. 12A (nouveau)
Les conditions d'exécution de la détention en phase préparatoire et de la détention en vue de refoulement sont régies par le chapitre troisième du Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996.
CHAPITRE III
Dispositions finales(nouvelle teneur comprenant les art. 13 à 15)
Art. 13A (nouveau)
Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, au Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996, approuvé par le Conseil fédéral le 10 septembre 1996.
Art. 13B (nouveau)
Le département de justice et police et des transports est chargé des relations avec les cantons concordataires.
Art. 2
La présente loi entre en vigueur le 1er février 1997.
Art. 3
1 Jusqu'à l'ouverture du premier établissement géré par la fondation concordataire, la détention en phase préparatoire et la détention en vue de refoulement sont exécutées, dans la règle, à la maison d'arrêt de Favra.
2 Le Tribunal administratif est compétent pour examiner d'office la légalité et l'adéquation de la détention dans les cas où la mise ou le maintien en détention ont été ordonnés dans les 96 heures qui précèdent l'entrée en vigueur de la présente loi. L'examen doit être effectué dans les 96 heures.
Art. 4
Modification
à une autre loi
La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, est modifiée comme suit:
Art. 8, al. 1, 36° bis (nouveau)
36°bis décisions du président de la commission cantonale de recours de police des étrangers (F 2 2, art. 7, al. 4);
EXPOSÉ DES MOTIFS
I. Introduction
Le présent projet de loi vise à introduire dans la législation cantonale les dispositions nécessaires à l'exécution de la loi fédérale sur les mesures de contrainte en matière de droit des étrangers du 18 mars 1994.
Frappée d'un référendum, cette loi, qui permet notamment la détention administrative d'un étranger en phase préparatoire d'une décision sur son droit de séjour ou en vue de son refoulement, a été acceptée par le peuple le 4 décembre 1994 (73%). Elle est entrée en vigueur le 1er février 1995. Si ces nouvelles dispositions du droit des étrangers ont été plébiscitées dans tous les cantons, c'est à Genève que la majorité la plus étroite a été dégagée (53%).
La détention administrative était déjà possible sous l'ancien droit; sa durée était cependant limitée à 30 jours. Or, le nouveau droit permet de détenir une personne pendant une année au maximum, à certaines conditions définies dans la loi. L'autorité cantonale peut également ordonner à un étranger l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée. En revanche, l'internement, qui pouvait avoir une durée maximale de 2 ans, ne peut désormais plus être prononcé.
L'émotion suscitée par cette modification de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers avant et après la votation du 4 décembre 1994 n'a malheureusement pas toujours permis de débattre de son opportunité avec la pondération et l'objectivité souhaitées et l'irrationalité a souvent prévalu dans les diverses prises de position formulées.
Aujourd'hui, alors que le Tribunal fédéral s'est employé à dégager quelques principes clairs dans l'application de la loi et que les cantons ont acquis une expérience de 18 mois dans la pratique du nouveau droit, une certaine sérénité devrait dominer les travaux liés à la conception de la loi d'application cantonale, qui devrait entrer en vigueur au 1er février 1997. Tel est en effet le terme de la période transitoire de 2 ans pendant laquelle les gouvernements cantonaux étaient compétents pour édicter des dispositions d'exécution provisoires.
II. Atteintes à la liberté personnelle et information
La liberté est un des principes fondamentaux consacrés par la Constitution fédérale. Si pas moins de huit de ses articles la garantissent sous des formes diverses, la liberté individuelle en est certainement l'expression la plus sensible par les valeurs universelles qu'elle défend.
Il est admis que toute restriction à sa jouissance est un fait d'une gravité extrême qui doit rester exceptionnel. Le bien-fondé d'une détention doit ainsi faire l'objet d'un contrôle par une autorité judiciaire dans des délais aussi brefs que possibles. Au surplus, l'ordre de mise en détention doit être motivé de façon détaillée, signifié immédiatement à la personne concernée et notifié sans retard à ses éventuels représentants.
Comme la loi fédérale sur les mesures de contrainte s'applique par définition à des étrangers, dont la capacité économique est assez réduite, ses dispositions d'exécution doivent logiquement être accompagnées de mesures garantissant à la fois la compréhension des décisions par leurs destinataires, l'information des familles et la possibilité d'être assisté dans la procédure par un mandataire professionnellement qualifié à moindres frais. Les voies de droit et les conditions d'exécution d'une éventuelle détention administrative doivent être communiquées aux intéressés sous une forme adaptée aux caractéristiques personnelles du récepteur de l'information.
III. Récit d'une période transitoire
1. Engagements pris par le Conseil d'Etat en matière d'applicationde la loi fédérale sur les mesures de contrainte
Par une déclaration solennelle faite le 16 février 1995 devant le Grand Conseil au lendemain de l'adoption d'un règlement d'application transitoire de la loi fédérale (Mémorial 1995, 5/I, pages 575-578), le Conseil d'Etat s'était engagé à ne pas modifier sa politique à l'égard des étrangers dépourvus d'autorisation de séjourner dans le canton, empreinte d'humanité et de rigueur, et par conséquent, à veiller à une utilisation modérée des nouvelles dispositions. Le Conseil d'Etat avait alors insisté sur les directives données aux services concernés de l'administration pour qu'il n'y ait pas de mise en détention de mineurs ou de familles entières. Il avait également annoncé qu'il n'y aurait de mise en détention d'étrangers en situation irrégulière que pour autant qu'ils fassent l'objet d'une décision de renvoi exécutoire.
Ces promesses ont été tenues. Sur les 111 personnes détenues par les autorités cantonales en application de la loi fédérale entre le 18 février 1995 (date d'entrée en vigueur du règlement transitoire du Conseil d'Etat) et le 31 juillet 1996, il n'y a pas eu un seul mineur, ni une seule famille. De plus, aucune détention n'a été ordonnée en phase préparatoire d'une décision sur le droit de séjour.
Si les services compétents ont eu recours à la détention en vue de refoulement, c'est sans acharnement, dans des situations où un élément délictuel la rendait opportune. La situation limitrophe du canton et le statut international de la ville font objectivement de Genève un lieu attractif pour l'étranger clandestin : il n'est pas facile de l'y repérer. Cela explique que les cas d'application de la loi fédérale sur les mesures de contrainte puissent être plus fréquents qu'ailleurs en Suisse romande, le canton du Valais et sa longue frontière avec l'Italie excepté.
A titre de comparaison, il faut savoir que les cantons de Berne et de Bâle-Ville, dont la situation s'apparente plus à celle de Genève, ont procédé, au 31 juillet 1996, à respectivement 885 et 1077 détentions administratives.
2. Règlement transitoire et modification subséquente
L'entrée en vigueur de la loi fédérale au 1er février 1995 ne permettait plus l'usage de la détention administrative à 30 jours prévue par l'ancien droit, faute d'autorités cantonales désignées pour l'application des nouvelles mesures de contrainte introduites dans le droit des étrangers.
Pour éviter de doter le canton d'attraits supplémentaires fondés sur l'inexistence de dispositions d'exécution de la loi fédérale et pour marquer son opposition résolue au tourisme criminel, le Conseil d'Etat se devait d'utiliser la compétence que lui attribuait cette même loi pour une période limitée et d'arrêter rapidement les mesures provisoires permettant d'appliquer le nouveau droit dans les cas où cela se justifiait.
C'est la raison pour laquelle il a adopté, le 15 février 1995, un règlement transitoire au contenu essentiellement technique désignant, d'une part, les autorités cantonales chargées de l'application de la loi fédérale et définissant, d'autre part, les procédures à suivre.
Ce texte a été modifié sur un point fondamental le 31 mai 1995, suite à l'arrêt Diallo du 28 mars 1985, par lequel le Tribunal fédéral a considéré que le juge d'instruction ne satisfaisait pas aux exigences auxquelles doivent répondre une autorité judiciaire, au sens de l'article 13c, alinéa 2, de la loi fédérale, et un tribunal, au sens de l'article 5, chiffre 4, CEDH (indépendance, compétences juridictionnelles). L'argument de fait fondé sur le risque de mélange apparent des tâches (stigmatisation pénale du juge d'instruction) a également été invoqué. Or, à Genève, c'est le juge d'instruction qui contrôlait le bien-fondé de la détention administrative à 30 jours. Le Tribunal administratif, dans une composition à 3 juges, a ainsi succédé au juge d'instruction, comme juridiction des libertés.
Ce changement d'attribution a eu deux conséquences majeures: le Tribunal administratif ne pouvant pas assurer une permanence pour des raisons d'effectif, le délai maximum pour le contrôle de la détention, qui avait été fixé à 48 heures, a été rallongé et aligné sur le terme prévu par le droit fédéral, soit 96 heures; le Tribunal administratif a planifié deux audiences hebdomadaires publiques à jour fixe et un système de permanence juridique garantissant une représentation de l'étranger par un mandataire professionnellement qualifié lors de la procédure orale devant l'autorité judiciaire a été mis sur pied.
3. Bilan de la procédure en vigueur
Si le règlement transitoire n'avait, par définition, qu'une destinée temporaire, il a toutefois permis d'expérimenter une procédure qui a aujourd'hui fait ses preuves après un inévitable rodage.
L'exercice a effectivement démontré que le Tribunal administratif rendait des décisions extrêmement détaillées qui ne laissaient guère de place à l'interprétation. Après plus d'une année d'activité, seuls trois de ses arrêts ont fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. Comme les recours ont été retirés, déclarés sans objet ou rejetés, aucune décision du Tribunal administratif n'a été infirmée. La sécurité du droit est ainsi garantie. Par ailleurs, la composition à 3 juges est une assurance d'impartialité et la publicité de la procédure orale un gage de transparence.
Les officiers de police rédigent des ordres de mise en détention motivés et, depuis quelques mois, la grande majorité des situations soumises au contrôle judiciaire de légalité et d'adéquation sont confirmées.
4. Analyse des conditions de détention actuelles
Le Tribunal fédéral a relevé, dans un arrêt du 11 décembre 1995 (2A.500/1995, considérant 2, lettre c) que «des quartiers séparés dans un établissement existant peuvent...suffire. C'est en particulier pour une période transitoire que cette solution permettra d'exécuter les mesures de contrainte, la création de nouvelles prisons en vue du refoulement nécessitant du temps» (traduction).
Actuellement, les personnes détenues par les autorités cantonales en application de la loi fédérale sur les mesures de contrainte sont placées à la maison d'arrêt de Favra, à défaut de locaux disponibles qui pourraient être affectés à la seule détention administrative. La capacité réduite de l'établissement (30 places) et le profil des détenus pénaux qui y sont accueillis (degré de dangerosité faible, voire nul) permet d'affirmer que la discipline y est moins stricte qu'ailleurs. Dans son dernier rapport annuel, la Commission officielle des visiteurs du Grand Conseil a d'ailleurs relevé l'ambiance détendue qui règne dans l'établissement (Mémorial 1995, 53/VI, page 6153).
Pour respecter le principe de non-regroupement avec les personnes en détention préventive ou purgeant une peine établi par l'article 13d, alinéa 2, de la loi fédérale, un étage de la maison d'arrêt a été réservé aux détenus administratifs. Des aménagements ont été effectués afin de leur offrir les occupations appropriées prévues par cette même disposition et d'éviter, dans la mesure du possible, un éventuel isolement lorsque l'établissement n'héberge qu'un seul détenu administratif. Mais, le fait demeure que les lieux n'ont pas été conçus pour ce type de détention et que l'espace à disposition des personnes détenues en application de la loi fédérale sur les mesures de contrainte est somme toute assez restreint.
Si une détention de courte durée est acceptable, la prolongation du séjour au-delà de 3 mois n'est guère envisageable dans les conditions actuelles, sauf si un impératif de sécurité l'impose dans le respect du principe de proportionnalité.
Le faible pourcentage de détenus administratifs par rapport à l'ensemble de la population carcérale ne permet pas de démarquer totalement un régime de détention spécifique qui devrait être plus libéral qu'en matière pénale. Dans les faits, l'utilisation par les détenus administratifs des structures communes d'un établissement de caractère mixte ne peut être que réduite, voire marginale.
Si la détention pénale veut que l'enfermement soit la règle et la promenade l'exception, la détention administrative, dont le seul but est d'assurer l'exécution d'un renvoi, doit répondre à une logique inverse.
Au surplus, il paraît difficile de demander au personnel d'un établissement accueillant à la fois des personnes en exécution de peine et des personnes à renvoyer d'adapter son comportement au type de détenu qu'il aborde.
Pressentant les difficultés liées à une cohabitation même limitée de deux catégories de détenus dans un même centre de détention, le Conseil d'Etat a rapidement donné son accord à la démarche concordataire proposée par la Conférence des chefs des départements de justice et police de Suisse romande visant à l'exploitation commune d'un ou de plusieurs établissements affectés à la seule détention administrative.
IV. Institution d'un double niveau de juridiction cantonal
S'agissant des procédures à suivre et des autorités administratives et judiciaires chargées d'appliquer la loi fédérale, le projet de loi diffère du règlement transitoire du 15 février 1995, modifié le 31 mai 1995, sur un seul point, qui est toutefois d'importance: il instaure un double niveau de juridiction cantonal. Le président de la nouvelle commission cantonale de recours de police des étrangers (ci-après: le président de la commission) reçoit les compétences dévolues actuellement au Tribunal administratif par le règlement d'application transitoire, notamment celle de contrôler la légalité et l'adéquation de la détention et le Tribunal administratif devient autorité cantonale de recours.
Cette articulation a le double mérite de permettre de ramener le délai du contrôle judiciaire de 96 à 48 heures et de décharger le Tribunal administratif d'une tâche impliquant actuellement des contraintes organisationnelles pesantes.
C'est à juste titre que la question de l'opportunité d'instituer un double niveau de juridiction cantonal peut être posée eu égard à l'expérience acquise par le Tribunal administratif et à l'autorité qui lui est reconnue en la matière. Convient-il alors de garantir une procédure allégée en ne conservant qu'une instance cantonale ou faut-il donner la priorité à une limitation du délai avant lequel le contrôle de légalité et d'adéquation doit avoir lieu, au risque de provoquer le dépôt de recours téméraires ayant pour seul effet l'engorgement des procédures ? La réponse à cette question n'est pas simple; elle ne peut que faire l'objet de spéculations. La seule certitude réside dans le fait que, quelle que soit la solution retenue, le Tribunal administratif doit être la dernière instance judiciaire cantonale pour des questions liées à la sécurité du droit.
L'on peut toutefois imaginer que les recours seront moins nombreux lorsque l'autorité de première instance aura acquis une certaine pratique et qu'en conséquence l'institution d'un double niveau de juridiction cantonal se justifie.
Il est indéniable que cette formule a l'avantage principal de raccourcir le temps avant lequel une personne détenue doit être présentée au juge et, à terme, l'intérêt incident de décharger le Tribunal administratif d'une de ses nombreuses tâches actuelles. Le problème de la permanence de la juridiction, qui se pose à nouveau, doit être résolu par la possibilité donnée au président de la commission d'être suppléé dans le domaine des mesures de contrainte par chaque membre, titulaire ou remplaçant, de la commission. Les conditions sont alors créées pour l'organisation d'un système de permanence à six juges uniques.
Il faut toutefois être conscient que, pour des raisons liées à la préparation des dossiers, le délai de 48 heures proposé pour le contrôle de la légalité et de l'adéquation de la détention peut contraindre l'office cantonal de la population à assurer une permanence pendant les week-ends et occasionner ainsi des coûts de procédure supplémentaires. Vu sous cet angle, une solution à 72 heures serait plus économique, tout en demeurant plus généreuse que le droit fédéral qui prévoit un délai de 96 heures.
Excepté ce raccourcissement de la période pendant laquelle doit avoir lieu le contrôle judiciaire, le Conseil d'Etat ne voit pas de raisons de modifier la procédure suivie jusque-là. Cette dernière n'a d'ailleurs pas soulevé d'objections majeures dans le cadre de la large consultation qui a précédé le dépôt du présent projet de loi.
La compétence attribuée au président d'une commission qui doit être créée de toute manière pour respecter le droit fédéral (voir exposé des motifs du PL 7418, page 6, chiffre 1) a également le mérite d'éviter la création d'une commission ad hoc et la multiplication des juridictions et de rationaliser quelque peu toute la procédure relative au droit des étrangers.
V. Commentaire article par article
Article 5 - Mesures d'éloignement
Alinéa 1
Cette disposition reprend l'article 6, alinéa 1 actuel de la loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (en abrégé: LALSEE). Elle permet l'usage de la contrainte lorsqu'un étranger ne quitte pas le territoire national de sa propre initiative à l'échéance d'un délai de départ fixé ou lorsque le renvoi ou l'expulsion ne souffre aucun retard. Sa formulation est adaptée aux termes utilisés à l'article 14, alinéa 1, lettres a et b de la loi fédérale. Il ne paraît pas opportun de faire une mention spécifique, dans cet alinéa, de l'hypothèse prévue à la lettre c de ce même article, dès l'instant où la détention en vue de refoulement est définie à l'article suivant du projet de loi (article 6, alinéa 2) et que la privation de liberté dans le but d'assurer l'exécution d'une décision de renvoi implique nécessairement le refoulement, soit l'usage de la contrainte, à son terme.
Alinéa 2
Cet alinéa qui offre le choix du pays de destination à toute personne refoulée qui a la possibilité légale de se rendre dans plus d'un Etat n'existe pas dans la LALSEE actuelle. Il est la reprise fidèle de l'article 14, alinéa 2, de la loi fédérale.
Alinéa 3
Cette disposition qui désigne l'autorité habilitée à ordonner le refoulement reprend la formulation de l'article 6, alinéa 3 actuel de la LALSEE. Toutefois, l'expression «mesures d'éloignement», qui comprend et suggère l'idée de la contrainte, remplace le mot «renvois» qui fait référence à une décision administrative à laquelle il n'est a priori pas exclu que le destinataire obtempère de son propre gré. De même, l'expression «procédure spéciale» est préférée à celle de «procédure particulière» parce qu'elle correspond aux termes utilisés à l'article 17, alinéa 1, phrase 1, du règlement de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 1er mars 1949 (RS 142.201). L'alinéa tient également compte du changement de nom du contrôle de l'habitant devenu, en 1991, office cantonal de la population.
Alinéa 4
Cet alinéa est la reprise de l'article 6, alinéa 3 actuel de la LALSEE.
Article 6 - Mise en détention et assignation à résidence
Alinéa 1
Cette disposition est nouvelle. Elle renvoie à l'article 13a de la loi fédérale, qui introduit dans le droit des étrangers la possibilité de détenir une personne, pour une durée de trois mois au plus, alors qu'aucune décision sur son droit de séjour n'a encore été prise, s'agissant des conditions qui doivent être remplies pour son application.
Alinéa 2
Cet alinéa qui confirme la faculté de détenir un étranger en vue de son refoulement est une nouvelle formulation de l'article 7, alinéa 1 actuel de la LALSEE. Cette adaptation a été rendue nécessaire à la fois par l'apparition de nouvelles conditions à remplir pour l'application de ce type de détention décrites à l'article 13b de la loi fédérale et par la possibilité donnée de mettre quelqu'un en détention dès la notification d'une décision de renvoi ou d'expulsion de première instance, sans attendre qu'elle devienne exécutoire. Par ailleurs, il est fait une mention spécifique de la faculté de maintien en détention prévue à l'article 13b, alinéa 1, lettre a, de la loi fédérale, ainsi que de l'obligation, consacrée par la jurisprudence du Tribunal fédéral (2A.105/1995), de prendre une nouvelle décision lorsqu'une personne passe de la détention en phase préparatoire à la détention en vue de refoulement, sans que la privation de liberté soit interrompue.
Alinéa 3
Cette disposition renvoie à l'article 13e, alinéa 1, de la loi fédérale qui permet à l'autorité cantonale d'interdire à un étranger de quitter le territoire qui lui est assigné ou de pénétrer dans une région déterminée. Cette forme de contrainte, qui porte moins sévèrement atteinte à la liberté personnelle de l'individu que la mise en détention, est nouvelle en droit fédéral des étrangers. Elle implique que la personne dont la liberté de mouvement est restreinte trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics. Ce type de mesure n'a jamais été appliqué à Genève depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale.
Article 7 - Autorités compétentes
Cet article a pour but de désigner de manière claire et systématique les autorités cantonales compétentes et de définir les procédures à suivre dans toutes les situations d'application de la loi fédérale. Il se présente sous une forme énumérative allant logiquement des attributions de l'autorité administrative qui constitue le dossier à celles de la juridiction administrative de seconde instance.
Alinéa 1
L'office cantonal de la population, qui peut prendre toutes les mesures de police des étrangers, à l'exception des décisions d'expulsion et de levée d'expulsion, par délégation de compétence du département de justice et police et des transports (voir article 2 actuel de la LALSEE), est habilité à proposer la mise en détention d'un étranger (lettre a). Cette faculté ne se traduit pas par la prise d'une décision formelle susceptible de recours. Cet office, qui traite de tous les dossiers d'étrangers en matière d'autorisation ou de tolérance de séjour, doit toutefois avoir la possibilité de mettre en oeuvre l'autorité de décision dans les situations justifiant l'application d'une mesure contrainte qu'il est souvent le premier à connaître.
C'est l'office cantonal de la population qui effectue les démarches visant à obtenir les documents permettant le refoulement d'un étranger détenu. C'est donc lui qui doit demander la prolongation de la détention en vue du refoulement s'il estime la mesure opportune et proportionnée aux chances d'obtenir un résultat auprès des chancelleries étrangères contactées (lettre b).
En vertu de la délégation de compétence mentionnée plus haut, l'office cantonal de la population ordonne l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée prévue à l'article 13e de la loi fédérale (lettre c). La décision d'application de cette forme de contrainte peut faire l'objet d'un recours auprès du président de la commission, comme le prévoit l'alinéa 3 de l'article précité. Toutefois, pour éviter qu'une interdiction ne se prolonge sans contrôle d'une autorité judiciaire, une limite de compétence de 6 mois est fixée à l'office cantonal de la population. Au-delà de cette durée, une demande de prolongation de la mesure doit être adressée au président de la commission (lettre d). Cette procédure qui ne correspond pas à une exigence posée par la loi fédérale doit répondre aux craintes exprimées par les oeuvres d'entraide spécialisées dans le domaine des étrangers devant le risque qu'une mesure restreignant la liberté de mouvement perdure indéfiniment en marge de tout contrôle judiciaire. Elle est de leur inspiration.
Indépendamment d'une décision judiciaire, l'office cantonal de la population est habilité à ordonner lui-même la mise en liberté d'un étranger détenu en application de la loi fédérale. Cette faculté permet d'éviter d'attendre l'expiration d'un délai légal pour procéder à une libération lorsque des indices démontrent que les démarches administratives en vue d'obtenir des documents de voyage n'aboutiront pas avant longtemps (lettre f). En application du règlement transitoire du Conseil d'Etat du 15 février 1995, modifié le 31 mai 1995, qui la prévoyait déjà, cette compétence a été utilisée à quatorze reprises par l'office cantonal de la population au 31 juillet 1996.
Alinéa 2
Dans le souci de limiter les autorités légitimées à priver quelqu'un de sa liberté personnelle, la compétence d'ordonner la mise en détention a été réservée aux seuls officiers de police (lettre a).
Dans la même logique, la fouille doit demeurer de la seule compétence policière (lettre b).
Alinéa 3
En plus de l'examen d'office de la légalité et de l'adéquation de la détention (lettre a), le président de la commission, qui peut être suppléé dans ses fonctions par chacun des membres titulaires ou remplaçants de la commission, reçoit toutes les compétences attribuées à l'autorité judiciaire cantonale par la loi fédérale: il peut ainsi prolonger la détention en vue de refoulement, sur demande de l'office cantonal de la population (lettre b), statuer sur les demandes de levée de détention déposées par l'étranger (lettres c) et ordonner la perquisition d'un appartement ou d'autres locaux (lettre g).
Le président de la commission intervient également comme autorité de recours de première instance contre les décisions d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée prises par l'office cantonal de la population (lettre d).
Finalement, il peut également prolonger au-delà de 6 mois l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée (lettre e) et statuer sur les demandes de levée d'interdiction déposées par l'étranger (lettre f).
Alinéa 4
Le Tribunal administratif devient l'autorité judiciaire cantonale de dernière instance. A ce titre, il connaît sur recours de toutes les décisions prises par le président de la commission.
Article 8 - Saisine du président de la commission
Alinéa 1
Appelé à statuer sur le bien-fondé d'une privation de liberté, le président de la commission doit être en mesure d'examiner la situation et de prendre une décision en opportunité le plus tôt possible après l'ordre de mise ou de maintien en détention. C'est la raison pour laquelle cette disposition prévoit l'immédiateté de transmission du dossier, bien que le respect d'un tel principe ne soit pas imposé par la loi fédérale.
Alinéa 2
Cet alinéa fixe un délai préventif à l'office cantonal de la population, de manière à laisser le temps au président de la commission de statuer en toute connaissance de cause avant l'expiration des 3 mois de détention en vue de refoulement. Il permet également d'éviter une éventuelle prolongation abusive de la détention de quelques heures, voire de quelques jours, dans les situations qui, de l'avis de l'autorité judiciaire, ne la justifieraient pas. Une telle garantie n'est pas spécifiquement prévue par la loi fédérale, mais elle paraît nécessaire pour des raisons pratiques et éthiques.
Alinéa 3
Le délai de 10 jours fixé par cette disposition pour recourir contre les décisions d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée doit permettre à la personne concernée de contester une décision encore plusieurs jours après sa notification et lui laisser le temps de recueillir les éventuelles pièces susceptibles d'étayer son dossier. Un délai de 30 jours tel que le prévoit l'article 63, alinéa 1, lettre a, de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, pour recourir contre les décisions finales ne permettrait pas le respect du principe de célérité qui devrait caractériser toute procédure liée à une restriction de la liberté de mouvement.
La mention du fait que le recours n'a pas d'effet suspensif reprend la dernière phrase de l'article 13e, alinéa 3, de la loi fédérale.
Alinéa 4
Comme l'alinéa 2, cette disposition fixe un délai préventif de 96 heures à l'office cantonal de la population. La motivation est analogue.
Alinéa 5
Cette obligation de respect de la forme écrite permet d'éviter toute contestation toujours possible avec l'emploi d'un mode de transmission immatériel.
Article 9 - Procédure devant le président de la commission
Alinéa 1
Le délai de 48 heures dont dispose le président de la commission pour contrôler la légalité et l'adéquation de la détention est plus court que le délai prévu par le droit fédéral (96 heures). En matière de privation de liberté, il paraît pourtant se justifier pour éviter qu'une éventuelle détention mal fondée puisse se prolonger au-delà de deux jours. L'hypothèse selon laquelle l'autorité judiciaire doit pouvoir réformer une décision doit être prise en compte: la mise en détention éventuelle de membres d'une même famille pourrait être jugée opportune pour un seul d'entre eux ou une décision de mise en détention pourrait être estimée légale et adéquate pour un autre motif que celui retenu par l'officier de police. Si la décision de l'officier de police est annulée, le président de la commission doit pouvoir ordonner lui-même la mise en liberté.
Alinéa 2
Cette disposition fixe un délai raisonnable au-delà duquel le président de la commission doit avoir statué sur les requêtes de prolongation de détention ou sur les demandes de levée de détention. Si la loi fédérale est muette au sujet de la prolongation de détention, elle prévoit que l'autorité judiciaire se prononce dans les huit jours ouvrables qui suivent le dépôt de la demande de levée de détention. Le délai de 96 heures prévu par cet alinéa pour les deux types de situation offre ainsi une garantie supplémentaire de célérité de la procédure.
Alinéa 3
Les 10 jours retenus à cet alinéa correspondent au délai accordé à l'autorité judiciaire pour statuer dans toutes les procédures de recours liées à l'application des mesures de contrainte.
Il ne paraît pas que l'intensité de l'atteinte à la liberté personnelle soit telle qu'il faille prévoir pour les recours contre les décisions d'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée un délai analogue à celui qui est fixé pour le contrôle de légalité et d'adéquation de la détention.
Alinéa 4
Le délai de 96 heures correspond à celui que prévoit l'alinéa 2. La motivation est analogue.
Alinéa 5
L'alinéa rappelle l'obligation d'oralité de la procédure de contrôle de la légalité et de l'adéquation de la détention prévue à l'article 13c, alinéa 2, de la loi fédérale. Le huis clos assurerait une assistance restreinte à l'audience devant le président de la commission et diminuerait d'autant la solennité de l'événement qui peut être impressionnante pour l'étranger et dont les effets sur l'individu sont plus recherchés en matière pénale. La mise à disposition d'office d'un mandataire professionnellement qualifié et sa présence semblent suffisantes pour garantir le bon déroulement de cette phase de la procédure. Néanmoins, la publicité des débats assure une transparence absolue nécessaire dans un domaine particulièrement sensible.
Alinéa 6
La notification de la décision prise, avec indication des voies de recours, doit être faite à l'étranger et à son mandataire éventuel, mais également, pour exécution, à toutes les autorités administratives concernées.
Alinéa 7
Cette disposition autorise la suppléance du président de la commission par les cinq autres membres de la commission. Cette faculté de substitution permet notamment l'organisation d'une permanence de juridiction.
Article 10 - Recours au Tribunal administratif
Sous sa forme actuelle, la LALSEE nomme la Chambre d'accusation comme autorité de recours contre les décisions du juge d'instruction. Dès lors que le Tribunal fédéral a jugé, dans l'arrêt Diallo précité, que le contrôle de l'application des mesures de contrainte prévues par le droit fédéral des étrangers ne devait pas être confié à des autorités pénales, l'autorité de recours cantonale ne peut être qu'une autorité judiciaire administrative. L'expérience accumulée depuis plus d'une année par le Tribunal administratif impose d'autant plus naturellement sa désignation que son autorité en la matière n'est pas contestée.
Alinéas 1 et 2
L'exigence de la forme écrite pour le recours est une application de l'article 64 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985. Donner au recours un effet suspensif, qui équivaudrait à envisager une mise en liberté provisoire, pourrait avoir des conséquences totalement contraires au but de la détention administrative.
Le délai relativement court de 10 jours fixé tant pour le dépôt du recours que pour son traitement par l'autorité judiciaire a notamment pour but le respect du principe de célérité des procédures liées au contrôle de l'application des mesures de contrainte. Il a également pour fin d'éviter le dépôt d'une première demande de levée de détention, possible un mois après le contrôle de légalité et d'adéquation, avant que le Tribunal administratif n'ait statué.
La compétence donnée au Tribunal administratif de revoir toutes les décisions de première instance en opportunité procède du souci de garantir la sécurité du droit, dès l'instant où la première décision judiciaire est prise par un juge unique, dans des délais parfois extrêmement brefs, alors que tous les éléments du dossier ne sont pas encore forcément connus.
Alinéa 3
Le Tribunal administratif doit pouvoir ordonner lui-même la mise en liberté de l'étranger. La notification de la décision prise par le Tribunal administratif, avec indication des voies de recours au Tribunal fédéral, doit être faite à l'étranger, à son mandataire éventuel et au président de la commission, mais également, pour exécution, à toutes les autorités administratives concernées.
Alinéa 4
Cette disposition se réfère à la possibilité donnée au Tribunal administratif par l'article 9, alinéa 2, de la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, de décider, par règlement, de siéger en section de 3 juges.
Article 11 - Information
Alinéa 1
Par définition, les mesures de contrainte administratives prévues par le droit fédéral s'appliquent à des ressortissants étrangers. Pour que la portée et la motivation des décisions prises à leur égard soient bien comprises, une information, à tout le moins résumée, dispensée en plusieurs langues doit être prévue. Elle doit être accessible dès le moment de l'interrogatoire par la police. Une orientation sur le déroulement de la procédure doit également être prévue dans l'établissement de détention.
Alinéa 2
Dans l'établissement où il est placé, l'étranger doit également être informé des conditions pratiques d'exécution de la détention et des droits et devoirs qui y sont liés. Le support écrit ou le moyen oral utilisé pour communiquer ces informations doit être adapté au niveau d'instruction et à l'origine culturelle du destinataire.
Article 12 - Assistance et représentation
Alinéa 1
Pour des motifs liés à la présomption de méconnaissance des procédures en vigueur à Genève, l'étranger mis en détention administrative doit avoir le droit de se faire assister ou représenter, dès le début de la procédure, par un avocat ou un mandataire professionnellement qualifié. Aussi doit-il pouvoir avoir accès à une liste ou à un tableau idoine. La possibilité de communiquer avec un mandataire constitué est déjà prévue à l'article 11 actuel de la LALSEE. La nouvelle formulation permet également à un étranger qui n'en aurait pas au moment de sa mise en détention de prendre contact avec un mandataire.
La référence à l'article 9, alinéa 1, de la loi sur la procédure administrative faite à l'article 11 actuel de la LALSEE n'est pas reprise pour deux raisons: principalement, pour éviter qu'un membre de la famille du détenu ne s'en prévale pour contourner une éventuelle interdiction d'entrée en Suisse qui aurait été prononcée contre lui; accessoirement, parce qu'elle permettrait la représentation par le conjoint, un ascendant ou un descendant tout en excluant la représentation par un collatéral et qu'une telle différence ne se justifierait pas en l'espèce. Cette disposition déroge ainsi à la loi sur la procédure administrative, qui n'apparaît d'ailleurs pas très satisfaisante sur ce point.
Les contacts avec la famille sont prévus dans le cadre des dispositions sur le régime d'exécution de la détention, objet du chapitre troisième du Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996 auquel le projet de loi renvoie.
Alinéa 2
Cette disposition a pour but de garantir à l'étranger, pour autant qu'il la souhaite, une assistance professionnelle sans frais, au moment clé de la procédure orale dont l'issue va déterminer la confirmation ou non de la détention. L'octroi d'une telle facilité dans l'exercice du droit d'être entendu implique la mise sur pied d'une permanence d'avocats ou de mandataires professionnellement qualifiés, dont la composition pourrait même avoir un caractère mixte.
Alinéa 3
L'alinéa reprend l'article 12 actuel de la LALSEE, sous une nouvelle formulation. Il permet d'accorder l'assistance juridique aux conditions prévues par l'article 143A de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, à tous les stades de la procédure, excepté celui de la procédure orale d'examen de la légalité et de l'adéquation de la détention où la gratuité est automatique. Il permet également d'en bénéficier aux mêmes conditions dans toutes les autres procédures liées à l'application de la loi fédérale.
Article 12A - Exécution de la détention
Cet article renvoie au chapitre troisième du Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996, consacré plus particulièrement au régime d'exécution de la détention. La norme d'adhésion à cet accord intercantonal figure à l'article 15 du projet de loi, dont la motivation suit. Les dispositions du concordat feront partie intégrante du droit cantonal dès leur propre entrée en vigueur aux conditions prévues à son article 46.
La définition du régime d'exécution de la détention administrative telle qu'elle apparaît à la lecture des articles du concordat y relatifs a pour ambition de le démarquer totalement des régimes d'exécution existant en matière pénale. L'obligation de placement dans un établissement fermé paraît à elle seule suffisante pour permettre d'atteindre l'unique but de la détention administrative, soit le refoulement.
Le principe reconnu par la jurisprudence et la doctrine, selon lequel l'exercice des droits des détenus administratifs ne peut être restreint que dans la mesure requise par la privation de liberté, par les exigences de la vie collective ou par le fonctionnement normal de l'établissement, est consacré. Aussi la liberté de mouvement est-elle assurée dans le centre de détention, dans les limites évoquées.
Dans l'attribution des lieux de vie, il est tenu compte des liens familiaux. Le détenu dispose de toutes ses affaires personnelles, excepté les objets de nature à perturber l'ordre intérieur de l'établissement, dont l'argent, placé en dépôt. Il a droit à des occupations rémunérées et peut accéder librement à un espace en plein air pendant la journée. Le détenu peut correspondre, téléphoner, télécopier et recevoir des visites librement. Des restrictions dans la fréquence et la durée des visites peuvent être apportées, mais elles doivent être justifiées par des raisons organisationnelles. L'accès aux médias est garanti. Si le détenu peut faire l'objet de sanctions disciplinaires, il a également un droit d'entretien avec la direction de l'établissement et un droit de plainte auprès de toute autorité cantonale ou concordataire.
L'harmonisation des régimes d'exécution de la détention administrative en Suisse romande était un des objectifs poursuivis par la création d'un concordat.
Article 13A - Adhésion au concordat
L'adhésion au Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996, aurait pu faire l'objet d'un projet de loi ad hoc. Toutefois, l'unité de la matière et le fait que le projet de loi modifiant la LALSEE se réfère directement à un chapitre du concordat plaidait pour insérer dans son texte la norme d'adhésion à cet accord intercantonal.
Les deux projets n'auraient de toute manière pas pu faire l'objet d'examens totalement indépendants l'un de l'autre. La formule retenue paraît ainsi plus rationnelle.
L'article 99 de la Constitution genevoise prévoit que le Grand Conseil accepte ou rejette les concordats et les traités dans les limites tracées par la Constitution fédérale. Il n'y a donc pas de possibilité d'amender le texte du concordat.
But du concordat
Rédigé sous l'égide de la Conférence des chefs des départements de justice et police de Suisse romande, le Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996 a pour objectif de contribuer à harmoniser les législations cantonales de Suisse romande dans le domaine et de doter les cantons romands d'un ou de plusieurs centres de détention adaptés aux exigences de qualité de la détention administrative d'étrangers.
Articulation et contenu du concordat
Le concordat contient des règles d'organisation calquées sur celles du Concordat sur l'exécution des peines et mesures concernant les adultes et les jeunes adultes dans les cantons romands et du Tessin, approuvé par le Conseil fédéral le 3 juin 1985. Le fonctionnement de cet instrument intercantonal est éprouvé depuis une trentaine année dans le cadre de la Conférence des chefs des départements de justice et police de Suisse romande. D'un point de vue structurel, le régime concordataire bénéficiera ainsi d'une longue expérience.
L'organe supérieur du concordat est la Conférence romande des chefs des départements compétents en matière de police des étrangers (ci-après : la Conférence). C'est le chef du département de justice et police et des transports qui est le membre genevois de la Conférence. Celle-ci dispose d'un secrétariat et est assistée dans l'exercice de ses fonctions par une commission concordataire.
Cet organe technique de réflexion et de coordination est composé de personnes chargées de l'application des mesures de contrainte dans les cantons concordataires et de la direction des établissements concordataires. La commission concordataire a pour tâches principales d'étudier les questions que lui soumet la Conférence et de lui faire toute suggestion utile à l'application du concordat.
Une des originalités du concordat réside dans l'institution d'une commission consultative qui a pour attribution de procéder aux études demandées par la Conférence et de lui soumettre toutes les propositions qu'elle juge opportunes.
Cette création vise à associer les oeuvres d'entraide au concordat. Comme elles ont déjà un accès direct à l'autorité politique dans les cantons, il se justifie de transposer cette immédiateté au plan concordataire.
La commission consultative est composée d'un représentant par canton, désigné au sein des oeuvres d'entraide actives dans l'accueil ou l'assistance des étrangers.
Par ailleurs, le concordat contient les dispositions relatives au régime d'exécution de la détention présentées plus haut et des règles liées aux établissements concordataires et à leur exploitation. Si les cantons concordataires disposent du ou des établissements gérés par une fondation de droit public créée par la Conférence, pour le placement de leurs détenus, des centres de détention cantonaux pourront faire l'objet d'une reconnaissance concordataire par la Conférence qui se veut la garante d'un seuil minimal de qualité.
Le concordat institue également un Comité des visiteurs chargé de la surveillance des conditions de détention. Caractérisé par sa compétence professionnelle et son impartialité, le comité sera pluridisciplinaire et non pas seulement juridique. Il doit pouvoir prévenir ou corriger dans le concret les difficultés de nature judiciaire ou politique qui peuvent se présenter. Ses trois à neuf membres, choisis notamment en fonction de leur neutralité politique, sont nommés pour quatre ans par la Conférence. Le Comité des visiteurs peut s'adjoindre des experts à titre spécial ou temporaire.
Finalement, le concordat consacre le principe de non-limitation d'accès aux établissements concordataires pour les autorités et fonctionnaires désignés par les cantons concordataires et réserve la possibilité d'adhésion ultérieure.
Article 13B - Relations avec les cantons concordataires
En sa qualité d'autorité cantonale de police des étrangers consacrée par l'article 1 de la LALSEE, le département de justice et police et des transports est naturellement chargé des relations avec les autres cantons dans le cadre du concordat.
Article 2 - Entrée en vigueur
L'article premier, alinéa 2 des dispositions finales de la loi fédérale sur les mesures de contrainte autorise les gouvernements cantonaux à édicter les dispositions d'introduction nécessaires à son exécution pendant 2 ans au maximum.
Ainsi, dès le 1er février 1997, les dispositions du règlement transitoire du 15 février 1995, modifié le 31 mai 1995, adopté en usage de cette compétence provisoire ne seront plus applicables. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat propose que la présente loi entre en vigueur le 1er février 1997.
Article 3 - Dispositions transitoires
Alinéa 1
L'exploitation du premier établissement géré par la fondation concordataire ne pourra vraisemblablement pas débuter le 1er février 1997. Pendant une période transitoire de quelques mois, les personnes détenues en application de la loi fédérale continueront à être placées à la maison d'arrêt de Favra, dont un étage leur est réservé, comme cela se fait actuellement.
La référence à une règle doit permettre l'exception que constitue le placement d'un étranger dans un établissement adéquat, au sens de l'article 13d, alinéa 2, de la loi fédérale et de la jurisprudence y relative, situé dans un autre canton, pour des motifs liés exclusivement aux risques de déprédation et à la sécurité des occupants de la maison d'arrêt de Favra.
Alinéa 2
Jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi, le président de la commission ne dispose d'aucune compétence dans le domaine des mesures de contrainte. Le règlement transitoire du 15 février 1995, modifié le 31 mai 1995, réserve l'examen d'office de la légalité et de l'adéquation de la détention administrative au Tribunal administratif.
Le Tribunal administratif garde provisoirement cette compétence pour les détentions ordonnées dans les 96 heures qui précèdent l'entrée en vigueur de la loi, plus particulièrement pour garantir le contrôle du bien-fondé des décisions prises par l'officier de police jusqu'à 48 heures avant ladite échéance, dans le délai prévu par le droit fédéral.
Pour des questions d'organisation, le délai de 96 heures prévu par le règlement transitoire pour le contrôle de légalité et d'adéquation de la mesure est alors maintenu.
Article 4 - Modification à une autre loi (E 3,5 1)
Dès l'instant où la LALSEE modifiée donne une nouvelle compétence au Tribunal administratif, la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mia 1970, doit en faire une mention expresse à l'article qui liste les attributions de la juridiction en matière de recours.
VI. Perspectives dans le domaine de l'exécution de la détention administrative
Le 4 juillet 1996, les gouvernements des cantons de Neuchâtel, Vaud et Genève signaient le Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers. En sus des objectifs d'harmonisation précités, ils souhaitaient rationaliser les coûts de la détention administrative en permettant la gestion concordataire d'un ou de plusieurs centres de détention communs par une fondation de droit public.
Dans cette perspective, un projet prévoyant l'adaptation à la détention administrative d'un établissement existant situé sur territoire genevois est actuellement en phase de concrétisation. D'une capacité de quelque 20 places et offrant des lieux de vie communautaires intérieurs et extérieurs, il devrait être géré par la fondation précitée, disposant de son propre personnel et alimentée financièrement par les cantons signataires. L'établissement devrait pouvoir accueillir des détenus administratifs provenant de différents cantons, même extra-concordataires, si les disponibilités de places l'autorisent.
L'exploitation de ce premier établissement concordataire qui permettrait l'application d'un régime d'exécution conforme aux exigences du concordat devrait pouvoir commencer en 1997.
Ne disposant pas, sur son territoire, d'établissement disponible convenant à l'hébergement exclusif de détenus administratifs, notre canton, qui persiste à se refuser de construire une nouvelle prison, aurait immanquablement dû affecter un établissement à la seule détention administrative pour ses propres besoins, notamment pour satisfaire à la jurisprudence du Tribunal fédéral, dont les considérants tendent de plus en plus vers l'exigence d'une séparation totale et permanente entre personnes condamnées et détenus administratifs.
D'un point de vue strictement économique, le fait de partager les frais d'exploitation avec d'autres cantons ne peut que diminuer la prise en charge genevoise qui aurait été totale dans un scénario purement cantonal.
VII. Incidence financière
Il serait surréaliste de croire que la détention ne coûte rien. Que la privation de liberté ait un caractère pénal ou administratif ne change rien à l'affaire. Il est cependant difficile de déterminer avec précision le prix d'une journée de détention, car il dépend de facteurs extrêmements variables (prise en charge ou non des bâtiments par l'Etat, familles professionnelles rétribuées par des départements distincts, taux d'occupation de référence). En matière pénale, il peut toutefois être estimé à un montant situé entre 250 F et 280 F. Le coût de la détention administrative, qui requiert un effectif en personnel comparable et la mise à disposition de surfaces analogues, n'est pas très différent. Il faut néanmoins relever ici que des possibilités d'occupation doivent être prévues pour les personnes à renvoyer, mais pas pour les personnes en détention préventive.
1. Coût de l'autorité judiciaire de contrôle
Sur la base des constatations faites à ce jour, l'on peut estimer à une centaine le nombre d'ordres de mise en détention prononcés annuellement à Genève par l'officier de police. Si l'on considère que l'examen de la légalité et de l'adéquation de la détention requiert une moyenne de 3 heures, rédaction et notification de la décision comprises, il faut envisager que le président de la commission et les membres de la commission qui le suppléent soient occupés à cette tâche à raison d'un total de quelque 300 heures par an.
Considérant le tarif horaire fixé par le Conseil d'Etat pour la rémunération des membres des commissions judiciaires, l'autorité judiciaire de contrôle aurait un coût total annuel d'environ 30 000 F.
D'un point de vue économique, il convient de relever que la formule proposée qui attribue une compétence spéciale à une autorité qui doit impérativement être instituée pour respecter le droit fédéral permet d'éviter la création d'une juridiction ad hoc et les frais afférents à son fonctionnement.
2. Financement des travaux d'adaptation de l'établissement
La loi fédérale prévoit, à son article 14e, alinéa 1, que la Confédération peut financer en tout ou en partie la construction et l'installation d'établissements cantonaux affectés exclusivement à l'exécution de la détention administrative. A ce sujet, le chef du département fédéral de justice et police, le Conseiller fédéral Koller, a déjà fait savoir que le subventionnement de structures intercantonales serait privilégié.
Il ressort des premiers contacts avec l'office fédéral de la justice et l'office des constructions fédérales, dont les représentants se sont rendus sur place à plusieurs reprises, que les travaux de transformation nécessaires à la nouvelle affectation intercantonale du bâtiment existant seront pris en charge par la Confédération à hauteur de 80 à 90%. Le paiement du solde devrait revenir à la fondation concordataire. Le devis estimatif des travaux n'a pas encore été accepté par l'autorité fédérale. Il devrait finalement se monter à quelque 1,5 million de francs.
3. Capital de dotation de la fondation et budget d'exploitationde l'établissement
Le concordat prévoit que les cantons concordataires libèrent le capital de dotation de la fondation concordataire à raison de 100 000 F chacun.
Les frais provoqués par l'ouverture de l'établissement peuvent être estimés à environ 300 000 F. Ceux-ci sont essentiellement liés à l'engagement et à la formation du personnel, avant même l'exploitation de l'établissement.
Dans le cadre des travaux qui ont précédé la signature du concordat, un budget de fonctionnement a été établi pour un établissement concordataire d'une vingtaine de places: il se monte à quelque 1,4 million de francs. Les recettes sont fondées sur un taux d'occupation de 80%, un prix de pension de 240 F par jour et une participation du canton-siège (environ 100 000 F) en contrepartie des avantages économiques liés à la situation de l'établissement sur son sol.
Un éventuel déficit serait réparti entre les cantons concordataires en proportion de leur population de résidence. Si les trois cantons signataires (Neuchâtel, Vaud et Genève) adhéraient au Concordat, Genève supporterait 34% du déficit de l'institution, augmentés de sa participation de canton-siège. On peut considérer que sa prise en charge des frais d'exploitation de l'établissement s'élèverait au maximum à quelque 500 000 F, pour le cas où ce dernier ne serait pas du tout utilisé.
A son article 14e, alinéa 2, la loi fédérale prévoit une participation de la Confédération aux frais d'exploitation des cantons pour l'exécution de la détention administrative, sous forme d'un forfait journalier. Pendant la période transitoire, les autorités cantonales de placement recevaient un montant forfaitaire de 100 F par journée de détention d'étrangers dépendant de l'office fédéral des réfugiés.
Pour être complet, il faut encore rappeler que l'existence d'un délai de contrôle de la légalité et de l'adéquation de la détention échéant 48 heures après la mise en détention peut entraîner des coûts de procédure supplémentaires, difficiles à chiffrer en l'état, dès l'instant où l'office cantonal de la population pourrait être amené à assurer une permanence de week-end.
VIII. Conclusion
C'est avec un souci de continuité dans les procédures établies que le Conseil d'Etat dépose aujourd'hui son projet de loi. Ce texte reprend les grandes orientations du règlement transitoire pour y adjoindre des garanties en matière de représentation et d'information, dont certaines existaient déjà dans la loi cantonale, sous une formulation plus générale, ou dans la pratique. Le projet est agrémenté d'une disposition qui renvoie au Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers, du 4 juillet 1996. Ce texte intercantonal est une création majeure dans la mesure où il définit notamment un régime ad hoc d'exécution de la détention administrative, fruit d'une réflexion menée conjointement par les administrations des cantons signataires et par des spécialistes reconnus du droit constitutionnel et alimentée par les observations pertinentes des organismes d'entraide consultés. Il prévoit également l'utilisation concordataire de centres de détention respectant les conditions matérielles et les exigences qualitatives applicables à la détention administrative.
Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet.
Préconsultation
M. Michel Halpérin (L). Je demande que le projet de loi 7517, inscrit au point 19 de notre ordre du jour, soit renvoyé à la commission judiciaire.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.