Séance du
vendredi 21 juin 1996 à
17h
53e
législature -
3e
année -
8e
session -
26e
séance
P 1101-A
Le 20 novembre 1995, M. Patrick Bindschedler, - par la plume de son conseil, Me Luc Payot, avocat - déposait une pétition portant sur le différend qui l'oppose au Conseil d'Etat respectivement l'administration cantonale. Cet écrit est fort de 11 pages et accompagné de nombreuses annexes qu'il n'est pas possible de reproduire ici. Tous ces documents sont déposés au service du Grand Conseil où ils peuvent être consultés.
Résumé
Le pétitionnaire conteste une décision de licenciement prise par le Conseil d'Etat le 3 novembre 1993, annulée et remplacée par une mise à la retraite anticipée le 9 novembre 1994. Cette décision est la conséquence d'une alerte téléphonique à la bombe dans un service de l'aéroport survenue le 11 novembre 1992. Lancé dans la matinée par une voix féminine, cet appel fut réitéré en fin d'après-midi par une voix masculine. La police a établi que ces deux communications provenaient du raccordement téléphonique de la famille Bindschedler, à Versoix. M. Bindschedler conteste la version de la police qui attribue ces appels pour le premier à sa mère, Mme Pia Bindschedler, pour le second à lui-même. Il s'insurge contre la manière rude et dénuée de toute aménité avec laquelle il a été traité en ces circonstances: arrestation à domicile avec importantes forces de police, menottes, sa mère traitée à la même enseigne et transférée 24 heures à Champ Dollon, etc. Il demande réparation, notamment à propos de sa situation d'ex-fonctionnaire.
Sous la présidence de Mme Janine Hagmann, la commission a traité de la pétition 1101 dans ses séances des 4 mars, 11 mars et 6 mai 1996.
Audition du pétitionnaire, M. Patrick Bindschedler
Tout en accueillant le pétitionnaire le 4 mars 1996, la présidente de la commission des pétitions rappelle que ladite commission n'a pas pour but de contrôler les décisions du pouvoir judiciaire.
M. Bindschedler se présente accompagné de son Conseil, Me Luc Payot. En préambule il se dit très affecté, moralement et physiquement (atteintes cardiaques entre autres) depuis ce 11 novembre 1992 qui a vu sa vie basculer dans le cauchemar. Il explique longuement les circonstances de sa mise à pied: les deux alertes à la bombe auraient été effectuées pour lui nuire professionnellement. Il demande à la commission des pétitions de dire si la justice a été bien ou mal rendue, tout en affirmant sa conviction que l'enquête a été menée à la hâte, sans contre-expertise, avec pour aboutissement une mise à la retraite anticipée, dont il n'accepte pas le motifs, notamment ceux ayant trait à son état psychique.
Pour la CIA, caisse de pension des fonctionnaires, il est considéré invalide à 100% et touche de ce fait une pension. De son côté l'assurance-invalidité fédérale ne lui a reconnu qu'un taux d'incapacité de travail de 50%.
Audition de représentants de l'Office du personnel, M. Michel Dokic, directeur des ressources humaines, Mme Giger, juriste
Tous deux relèvent qu'il s'agit d'une affaire complexe. Plusieurs procédures ont été engagées par M. Bindschedler auprès du Tribunal administratif et du Tribunal fédéral. Trois recours ont été rejetés, déclarés irrecevables ou rayés du rôle. Mme Giger et M. Dokic confirment que l'appel du 11 novembre 1992 au No 117 a été localisé sans contestation possible comme provenant de l'installation téléphonique de la famille Bindschedler. Le 18 novembre 1992 le Conseil d'Etat a prononcé un renvoi immédiat avec suspension de traitement, renvoi qui est devenu par la suite mise à la retraite anticipée. Tant Mme Giger que M. Dokic n'accordent aucun crédit à la thèse de la jalousie qui aurait incité quelqu'un à chercher à nuire à M. Bindschedler.
Du côté CIA, il est rappelé que la décision de mise à l'invalidité n'est pas prise à la légère. Le cas fait l'objet d'un examen sérieux, trois médecins sont consultés, dont le médecin traitant. C'est ensuite seulement qu'intervient la décision. Sans enfreindre le secret médical, les deux représentants du département des finances, notamment M. Dokic, psychologue de formation, estiment que la décision de la CIA est justifiée.
Discussion
Tout d'abord les commissaires ont le sentiment que le rôle de la commission des pétitions est en ce cas - mais ce n'est pas la première fois - mal compris. En effet si le droit de pétition est largement reconnu, il n'entraîne pas, à leur sens, le principe que le parlement, soit la commission des pétitions, soit une ultime autorité de recours en matière judiciaire, par exemple lorsque toutes les autres voies ont été épuisées. La commission ne se voit pas juge des juges et en l'occurrence estime que la chose a été jugée.
A noter encore - et ce n'est là pas non plus la première fois - qu'il est assez désagréable pour la présidence de la commission de se voir constamment relancée par un pétitionnaire pour connaître l'état d'avancement des travaux de la commission. Ne pourrait-on rappeler cette recommandation élémentaire aux pétitionnaires, au moment du dépôt par exemple?
Pour ce qui est de la pétition 1101 en particulier, certains députés relèvent que la police n'a probablement pas agi avec beaucoup de doigté, bien qu'une alerte à la bombe doive être considérée avec sérieux cela va sans dire. Cependant au moment de l'arrestation à domicile, tout danger était de longtemps écarté et l'on savait déjà que l'alerte était sans objet. Une démonstration de forces était-elle bien nécessaire?
Quant à la mise à la retraite anticipée, il est avéré que les liens de confiance entre l'employeur et le fonctionnaire ont été fortement mis à mal. De plus M. Bindschedler admet lui-même être atteint dans sa santé. Dans ces conditions, la commission a le sentiment que la solution de mise à la retraite anticipée, pour déplaisante qu'elle puisse apparaître au pétitionnaire, est probablement la moins mauvaise, ou la meilleure comme on voudra.
Conclusion
C'est pourquoi la commission des pétitions vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité moins une abstention, de déposer le présent rapport sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.