Séance du vendredi 24 mai 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 7e session - 20e séance

M 912-A
7. a) Rapport de la commission de l'environnement et de l'agriculture chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Sylvia Leuenberger, Fabienne Bugnon, Chaïm Nissim et René Longet concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques. ( -) M912
Mémorial 1994 : Développée, 1100. Commission, 1110
Rapport de M. Max Schneider (Ve), commission de l'environnement et de l'agriculture
M 1050
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Janine Berberat, Luc Barthassat, Roger Beer, Claire Chalut, Sylvie Châtelain, Yvonne Humbert, Alain-Dominique Mauris, Liliane Maury Pasquier, Geneviève Mottet-Durand, David Revaclier, Martine Roset et Max Schneider concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques. ( )M1050

La commission de l'environnement et de l'agriculture a été saisie par le Grand Conseil pour traiter la motion 912 concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques.

Les travaux ont commencé le 19 mai 1994 sous la présidence de Mme Sylvie Châtelain, puis de M. Luc Barthassat et se sont terminés en juillet 1995 avec une interruption afin que le département puisse nous présenter un premier rapport sur le problème des déchets organiques (voir annexe 1).

Pour la publication de ce rapport nous avons aussi attendu la mise en place de l'espace récupération, ainsi que le rapport de l'audit sur les Cheneviers qui permettra de savoir si l'investissement de 70 millions de francs doit être effectué. Dans la situation actuelle, l'usine d'incinération des Cheneviers ne respecte pas les normes OPair 92 (ordonnance fédérale sur la protection de l'air).

Malgré cette attente, il est évident que de grands changements vont intervenir dans les prochains mois et les prochaines années. Les coûts financiers et environnementaux ne seront pas supportables à terme. Il faudra bien trouver des moyens pour limiter des déchets à la source et limiter les déchets à incinérer. Dans une politique des déchets à long terme il est indispensable de prévoir la réduction du volume incinéré, puis à terme le démantèlement de l'usine.

Tout ce processus passera par un changement radical des comportements de la population incité par une politique volontariste. Dans un premier temps, on fera payer l'incinération dont les coûts seront établis d'une façon transparente et qui incluront:

- les coûts économiques d'incinération;

- les coûts sociaux (tant sur la santé de la population, l'impact écologique...);

- le coût de stockage des mâchefers avec le suivit à terme;

- le coût de stockage des déchets hautement toxiques produits par les filtres de cheminées (actuellement stockés en Allemagne en attendant la mise en service d'un site sous haute surveillance à Oulens, dans le canton de Vaud);

- l'impact sur l'emploi qui tient compte des emplois perdus et des emplois induits;

- et autres facteurs de coûts économiques et sociaux (voir «Le monde poubelle» de Roger Cans).

Les tableaux suivants permettent d'avoir un aperçu des quantités et de l'état des collectes sélectives dans le canton de Genève (source DIER, Inf.-eau-déchets).

Ces tableaux permettent de se faire une image partielle des quantités de déchets traités et de leur évolution, des différences entre les communes pour la production et la récupération, ainsi que des coûts du traitement et de la valorisation des déchets en 1993 et 1994.

A noter que le volume des déchets urbains est inférieur à ce qui avait été évalué (projet de gestion des déchets DTP, 1992, page 11).

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L'intérêt porté par le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIER) pour les différentes techniques utilisées, ainsi que pour la qualité des produits compostés, a été démontré tout au long de nos travaux, notamment par la présence de plusieurs personnalités, M. Haegi, chef du DIER, M. Gérard Meylan, directeur du laboratoire cantonal d'agronomie, et autres collaborateurs.

La commission a aussi apprécié les informations scientifiques données par M. Peter Spoerli, directeur de l'assainissement et des exploitations, malheureusement décédé. La commission tient à rendre hommage à ce scientifique, toujours prêt à coopérer à ses travaux.

M. Jacques Lottaz, chef de la division de la protection des eaux, et M. Jean-Claude Landry, écotoxicologue cantonal, ont suivi la fin de nos travaux.

M. .

- le compostage est un processus d'oxydation biologique contrôlée impliquant matériaux hétérogènes à l'état solide, comprenant une phase thermophile et une genèse temporaire de substances phytotoxiques, aboutissant à la production de gaz carbonique (CO2), d'eau, d'éléments minéraux et de matières organiques stabilisées (compost),

- le compostage est donc une bioxydation (processus biologique en présence d'oxygène);

- par opposition, le processus de méthanisation est un phénomène biologique qui se déroule uniquement en l'absence d'oxygène. On ne peut donc en aucun cas parler de compostage pour ce processus par anaérobie.

Le concept retenu fait état de 3 centres de compostage dans le canton de Genève. Ce chiffre pourra s'élever à 5, à la suite d'une étude du département et à la demande de plusieurs commissionnaires qui souhaitaient une plus grande décentralisation des accès de compostage.

Pour ces cinq sites une possibilité de méthanisation d'une partie des déchets n'est pas à exclure dans le futur.

Le potentiel des matières organiques des déchets ménagers est approximativement de 60 000 tonnes par an. L'objectif est d'en composter au moins la moitié sur ces cinq sites. M. Spoerli fait état des poubelles organiques déjà installées dans 10 000 ménages pour récupérer les déchets de 30 000 personnes. Ce sont 2 000 à 3 000 tonnes de déchets organiques qui ont été traitées au Nant-de-Châtillon.

Remarque:

Une traduction en différentes langues des indications pour le compostage et le recyclage dans les communes augmentera certainement le taux de participation de la population internationale de notre canton (voir annexe: plaquette en 4 langues éditée par la Ville de Munich).

Grâce aux activités à Genève «d'Inf-eau-déchets», nous avons déjà de nombreuses publications et matériel didactique (voir annexe: «Séparer les déchets pour produire du compost»).

Remarque: incident au Nant-de-Châtillon

Cette aire de compostage a été construite sur l'ancienne décharge cantonale sans études préalables du sous-sol.

Conséquences: les installations se sont tassées et il a fallu enfoncer des pieux pour soutenir la dalle.

Durant cet incident relativement grave, le système d'exploitation a dû être modifié. Vu les stocks importants, cela a provoqué des odeurs et des plaintes, notamment de la commune de Bernex. On nous assure que tout est rentré dans l'ordre.

Le coût du compostage était fixé en mai 1994, à 140 F contre 190 F par tonne pour l'incinération.

Pour information il y a en Suisse approximativement 149 installations de compostage traitant plus de 100 tonnes par année, dont 51 installation qui traitent plus de 1 000 tonnes/an.

Le prix de vente du compost de Châtillon varie selon les destinataires:

- 35 F/m3 aux professionnels (d'autres valeurs seront précisées lors de la visite sur site);

- gratuit pour les particuliers;

- prix variables pour mélange sur demande des professionnels.

A souligner qu'actuellement les déchets de restaurants sont incinérés, car ils ne répondent pas aux normes fédérales (trop de métaux lourds). Une équipe genevoise travaille à la mise au point permettant d'éliminer ces déchets de cuisine sur le lieu même de leur production (voir annexe «Méthanisation»).

M. .

- ordures ménagères;

- déchets de jardin;

- branches et ligneux.

De plus, il faut obtenir une température de 608 avec des pointes à 728 pour avoir une bonne fermentation.

Ces critères pour un compostage idéal ne sont pas faciles à réunir de manière homogène pour l'ensemble du canton. Il y a un déséquilibre entre les communes qui ont trop de déchets ligneux et la ville qui en manque.

La ville de Genève, face à ce déficit de ligneux, pourrait éventuellement se diriger vers une solution de méthanisation plutôt que de compostage. A l'exemple de la ville de Zurich avec le système de méthanisation Compogaz ou de la ville de ........ avec le système Valorga.

La création de 4 nouveaux centres de compostage devra impérativement tenir compte de plusieurs impératifs tels que, notamment:

- l'étude d'impact pour toute future station de plus de 300 m2;

- un éventuel bétonnage de la superficie requise;

- réunir l'ensemble des communes et qu'aucune ne soit mise à l'écart,

- et autres exigences.

A noter que les feuilles et papiers ramassés au bord des routes contiennent beaucoup de substances nocives, donc impropres à un compost de qualité.

Pour gérer et contrôler minutieusement la qualité du compost il faut donc des installations d'une certaine taille (à partir de 2 000 tonnes/an).

Audition de M. Armand Cotton et M. Philippe Cotton, du bureau d'étude et réalisation A. Cotton SA

M. Cotton nous montre les divers tests et recherches qui ont été nécessaires depuis 1985 pour arriver à ce bio-réacteur et à la lacéreuse de sacs de déchets.

Aujourd'hui les tests sont terminés.

Deux installations de bio-réacteur aérobiques fonctionnent en Suisse romande, l'une à La Chaux-de-Fonds, l'autre près de Villeneuve.

Selon les informations de M. Cotton, ce système permet aujourd'hui une meilleure rentabilité que l'incinération et autres systèmes.

La qualité du compost à la sortie peut être assurée en fonction des déchets traités et du tri à la source (voir annexe n° 2)

«Suite à différentes analyses effectuées, notamment celles du service de l'hygiène et de l'environnement de la Ville de La Chaux-de-Fonds, il a été possible de diminuer de la moitié la durée de rétention de la matière organique dans les bio-réacteurs (72 heures au lieu d'une semaine).

Nous avons mis sur pied une manutention plus performante pour les déplacements des déchets organiques: au lieu d'utiliser un chargeur mobile, nous avons développé des corbeilles d'un volume de 10 m3 qui sont déplacées par un élévateur.

Cette nouveauté nous permet, d'une part, de ne plus avoir besoin d'isoler les bio-réacteurs par un toit fixe et, d'autre part, de diminuer considérablement la main-d'oeuvre (d'à peu près 35%).

L'exploitation de l'installation de La Chaux-de-Fonds fonctionne à satisfaction depuis bientôt 4 ans.

Toutes ces améliorations nous permettent aujourd'hui de mettre sur le marché un procédé de compostage dont le coût d'exploitation (amortissement et exploitation inclus) se situe entre 100 F et 80 F la tonne (pour des capacités variant entre 3 000 et 12 000 tonnes), sans compter les déductions cantonales et fédérales et le prix de vente du compost.

Tout ceci avec un procédé qui permet de traiter sans odeur les déchets fortement aqueux (refus de maraîchage et déchets de cuisine notamment) et évite les retournements des tas en maturation, retournements nécessitant de grosses machines, ce qui s'avère coûteux en main-d'oeuvre et en énergie.»

Audition de MM. Dumont et Régis Mahrer

L'originalité de ce système est une intégration des procédés de compostage et de méthanisation. M. Dumont a un savoir-faire dans le compostage de déchets ménagers maraîchers depuis plusieurs années.

Dès 1979, MM. Dumont et Régis Mahrer développent un procédé de biométhanisation, en collaboration avec un ingénieur genevois, M. Pfulg.

Aujourd'hui, l'installation de compostage ne traite que 1 000 tonnes/an de déchets en provenance de jardin de cinq communes.

Pour une plus ample description du système intégré méthanisation et compostage (voir annexe 3).

Dans le même temps, le procédé de méthanisation fait ses preuves.

En partenariat avec la Confédération (projet CERS), avec la faculté de biologie de l'université de Genève et du département de microbiologie de Neuchâtel, un projet de recherche et développement devrait permettre la commercialisation et le suivi du premier réacteur de biométhanisation.

La BCG a soutenu ce projet en achetant une machine dont la mise en service est prévue pour le printemps de 1996, dans un centre sportif (voir annexe 4).

A noter un vif intérêt de l'OCEN, mais l'absence de financier pour le capital-risque nécessaire à la commercialisation d'une première série de 10 machines.

Les machines qui se veulent à la pointe de la technologie sont aussi développées en collaboration avec un industriel de la Haute-Savoie.

A noter que, selon leur estimation, ce procédé est rentable à partir de 5 000 tonnes/an. Pour le prix du traitement de la tonne de déchets, M. Mahrer l'estime à 40, voire 50 F la tonne, en fonction du type de compost obtenu.

Visite sur des sites de traitement des déchets

1. Nant-de-Châtillon, sous la conduite de M. Lottazaz et M. Sudan, chef d'exploitation

Nous avons visité les installations techniques, mises en service en mars 1993, leur capacité est de 10 000 tonnes/an.

Actuellement le compost de premier choix obtenu est de 3 000 tonnes/an, vendu 76 F/tonne, le compost de deuxième choix, difficile à vendre, sert de «couverture» dans les vignes, parcs et jardins.

Quinze communes sont actuellement concernées par ce site.

2. Exploitation de M. Dumont et de M. Mahrer, ingénieur

Présentation du projet d'implantation d'une exploitation mixte de bio-méthanisation et compostage apte à traiter 6 000 tonnes/an de déchets végétaux et organiques.

L'installation actuelle de compostage travaille de manière artisanale et la biométhanisation est à l'étape du développement précommercial (voir annexes 3 et 4).

3. Laboratoire cantonal d'agronomie

Les membres de la commission font état de deux visite antérieures.

Dans l'ensemble le choix de l'un ou l'autre des procédés semble prématuré.

Reste le débat sur la problématique de fond, à savoir la décentralisation du traitement des déchets organiques.

Certains membres de la commission soulignent l'importance d'une étude globale prenant en compte sites, tonnage, puissance et autres. Exemple: une étude d'impact sur le transport par camion au rythme de 15 à 20 par jour pour le site Demont.

Selon un commissionnaire, le site de Nant-de-Châtillon ne produit que 20% de compost fin et, selon lui, une station plus modeste et moins onéreuse obtient les mêmes performances. Exemple: dans la région de Winterthur, même avec des sites de compostages décentralisés, il est impératif de maintenir une autorité faîtière de contrôle afin d'éviter que les métaux lourds ne soient répandus dans l'environnement, avec les conséquences que nous connaissons.

Les taxes de traitement

La taxe de traitement des résidus est sous-estimée et n'arrive pas à couvrir la totalité des frais d'exploitation des exercices correspondants (voir rapport d'exploitation 1994, page 47). Le montant de cette taxe est fixé par la commission consultative des résidus et l'Association des communes genevoises.

Pour 1995, la taxe de traitement des déchets ménagers avait été fixée à 200 F/tonne, puis 210 F/tonne avec la TVA.

Pour 1996, la taxe de traitement a été fixée à 215 F/tonne, y compris la TVA.

Il faudra couvrir une partie des dépenses par les réserves disponibles sur le compte budgétaire «pièce de rechange» et renouvellement constituées en 1993 et 1994. Un audit en cours aux Cheneviers, dont les résultats sont attendus, nous permettra de mieux comprendre la situation.

Tant que les taxes d'incinération n'exprimeront pas la vérité des coûts de traitement et des frais financiers des exerces correspondants, les autres systèmes décentralisés de traitement de déchets organiques seront pénalisés.

Aujourd'hui, les installations de réutilisation, de recyclage, de compostages aérobiques et anaérobiques ont fait leurs preuves.

L'usine des Cheneviers reste la plus grande source de pollution du canton. Pour être en conformité avec l'ordonnance fédérale des normes OPair 92, il faudrait investir plus de 70 millions de francs uniquement pour de nouveaux filtres.

Les taxes des Cheneviers n'inclue pas le financement de ces filtres obligatoires.

Conclusion

La commission a donc pris ces éléments en considération pour la présente motion.

Les différentes auditions et visites sur les lieux de traitement décentralisés nous ont permis de mesurer l'ampleur de la problématique.

Que ce soit pour la grande unité de compostage du Nant-de-Châtillon ou l'installation de M. Dumont, nous avons aussi apprécié les activités scientifiques sur la méthanisation, le compost et aussi le rôle important du laboratoire cantonale d'agronomie. Notamment en tant qu'autorité faîtière de contrôle, afin d'offrir un suivi d'une rigueur scientifique face aux métaux lourds et autres polluants.

La meilleure solution pour l'élimination des déchets reste celle de ne pas les produire. C'est-à-dire que nos autorités agissent auprès des producteurs et établissement de diffusion.

A la suite des différentes auditions et du rapport du département, la commission de l'environnement et de l'agriculture a modifié les invites et nous propose la motion suivante:

(M 1050)

proposition de motion

concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques

LE GRAND CONSEIL

considérant:

- que la récente «panne» due à un affaissement de terrain de l'unique aire de compostage du canton, sis au Nant-de-Châtillon, oblige d'incinérer actuellement tous les déchets organiques récupérés;

- qu'en matière de compostage, la décentralisation se justifie écolo-giquement et financièrement,

invite le Conseil d'Etat

- à soutenir l'information de la population en matière de tri des déchets, en collaboration avec les communes;

- à veiller à l'obtention d'un compost de qualité répondant aux normes techniques de l'ordonnance fédérale sur les substances toxiques;

- à appuyer techniquement les communes pour mener à bien de nouveaux projets de compostage intercommunaux dans le respect d'un concept cantonal efficace;

- à faire éviter l'incinération des matière organiques compostables de manière à respecter les mesures OPair (ordonnance fédérale sur la protection de l'air);

- à interdire la mise en décharge de ces mêmes matériaux.

Annexes:

N° 1 Rapport DIER M 912

N° 2 Bureau études Cotton

N° 3 Site Demont-Lahrer

N° 4 Digesto-Lahrer

N° 5 Motion 912

ANNEXE 1

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ANNEXE 2

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ANNEXE 3

page 25

ANNEXE 4

(M 912)

proposition de motion

concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques

LE GRAND CONSEIL

considérant:

que la récente «panne» due à un affaissement de terrain de l'unique aire de compostage du canton, sis au Nant-de-Châtillon, oblige d'incinérer actuellement tous les déchets organiques récupérés;

qu'en matière de compostage, la décentralisation se justifie écologiquement et financièrement,

invite le Conseil d'Etat

à encourager toute initiative communale ou intercommunale en matière de compostage par, entre autres, la mise à disposition de terrains nécessaires ou l'autorisation d'exploiter ceux que les communes pourraient déjà posséder;

à considérer également d'autres solutions que la seule méthode de compostage en aérobie (à l'air) pour la récupération de déchets organiques en milieu urbain (systèmes de méthanisation par exemple);

à réserver l'incinération aux résidus justifiant absolument cette filière de destruction;

à améliorer la stricte rentabilité de l'usine des Cheneviers en traitant au juste prix des déchets pour les autres cantons ou régions et pour les industries dépendantes de l'incinération pour leurs déchets toxiques non récupérables.

Débat

M. Max Schneider (Ve), rapporteur. Tout d'abord, j'aimerais rectifier une erreur que j'ai faite à la page 10 de mon rapport. En effet, j'ai annoncé une annexe que je n'ai pu joindre, en raison de son importance. Il s'agissait de la plaquette en quatre langues éditée par la Ville de Munich. Comme Genève compte de nombreuses institutions internationales, il est important d'informer les personnes non francophones sur le mode de traitement des déchets et leurs lieux de dépôt. Or - tous les textes paraissant en français - nous ne pouvons répondre aux demandes de ces institutions.

M. Jean-Claude Genecand (PDC). Il a fallu du temps à la commission et au Conseil d'Etat pour produire un rapport dont les conclusions sont bien minces et révèlent des lacunes dans l'analyse et la perspective. L'objectivité exigerait, par exemple, un bilan sans concession au sujet du Nant-de-Châtillon. Cependant, Monsieur Haegi, votre rapport sur le traitement des déchets organiques à Genève aborde très peu les problèmes relatifs à cette aire de compostage. Pas un mot, non plus, sur les odeurs persistantes ou l'affaissement du terrain ainsi que sur les coûts. Silence également sur les 500 tonnes de compost impropre à l'utilisation et qu'il a fallu incinérer. Nous ne disposons d'aucune information sur le coût de fonctionnement ni sur le prix de revient par tonne ni sur les quantités vendues. Ce rapport - décevant - ne comporte pas de bilan objectif tenant compte des défaillances du système et proposant des remèdes.

Pour en savoir davantage, il faut se référer à l'article d'une journaliste qui a interrogé M. Jean-Claude Landry, directeur de l'assainissement du DIER. Dans un numéro de haute voltige, ce dernier fustige le compostage artisanal soumis - d'après lui - aux exigences d'une étude d'impact selon les normes légales. Et pour démontrer l'importance de ses affirmations, il évoque l'exemple de la commune de Meyrin, contrainte de changer de lieu de compostage, suite aux plaintes de l'hôpital de la Tour, tout proche, au sujet d'émissions pathogènes d'un champignon.

Pour défendre le Nant-de-Châtillon, M. Landry a recours à de nombreuses excuses : l'excessive salinité du compost, qu'on a dû détruire, proviendrait du manque de ligneux. Mais il oublie de mentionner que le défibreur hache de trop gros morceaux, éliminés lors du criblage nécessaire à l'extraction du plastique. Le bois, adoucisseur par excellence, est malheureusement éliminé avec le plastique et incinéré; cette perte importante déséquilibre la qualité du compost.

Par ailleurs, le compost produit au Nant-de-Châtillon en quantité dérisoire n'intéresse pas les paysans qui le trouvent trop fin et responsable de la trop forte compacité de la terre. Il n'est plus question de tergiverser, et on est en droit de se demander si l'analyse de ce système ne devrait pas être confiée à un organe neutre qui déterminerait s'il est fiable ou non et, le cas échéant, indiquerait comment l'améliorer.

L'audit doit également examiner ce problème avec toute l'attention voulue, et j'attends la réponse du Conseil d'Etat à ce propos. Dans d'autres cantons et en Suisse allemande en particulier, les responsables ont compris que les gros systèmes ne sont pas la panacée. C'est pourquoi ils encouragent de plus en plus les petites unités qui présentent l'avantage d'un coût compétitif tout en produisant un compost de qualité et en réduisant à la portion congrue les matières à incinérer.

L'Etat doit évidemment garder le contrôle de toutes les aires de compostage en interdisant de faire n'importe quoi n'importe où. En délivrant les autorisations d'aménagement en collaboration avec les communes, le DTPE maîtrise ce contrôle. Tenant compte de tous ces arguments, notre groupe soutient la motion 1050 qui préconise le développement du compostage communal. Compte tenu des dossiers qui traînent depuis quelques années, il serait judicieux que la politique gouvernementale soit plus encourageante et donne le coup de pouce approprié. Aussi notre groupe vous suggère-t-il une invite supplémentaire qui vous a été distribuée et qui s'énonce comme suit :

«- à aider les communes dans leurs recherches d'une aire de compostage et à conduire l'étude d'impact.»

Cette invite ainsi que celles déjà contenues dans le texte de la motion précisent le rôle de l'Etat : ce n'est pas celui de spectateur mais de collaborateur actif aux côtés des communes. Cette collaboration répond à la volonté qui nous anime de bien gérer à la fois les deniers publics et l'environnement, et vise la réalisation rapide de souhaits maintes fois exprimés. Je vous remercie de faire bon accueil à cette proposition de motion.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). La version originelle de la motion visait essentiellement la décentralisation et la diversification des méthodes de compostage dans le canton de Genève.

Je ne suis pas aussi sévère que M. Genecand, car je trouve que les premières invites répondent quand même à notre motion. Cependant, elles n'encouragent pas suffisamment la diversité. Aussi j'accepte l'amendement de mon préopinant en le complétant de la manière suivante :

«- à favoriser la diversité des méthodes de compostage.»

L'essentiel est de faire prendre conscience aux gens que le compostage est un moyen simple, efficace et écologique pour récupérer les déchets végétaux, afin de les transformer en matière noble : la terre. C'est l'intérêt principal du bon rapport de M. Schneider qui préconise de faciliter le travail des communes pour trouver les solutions adéquates. Il faut essayer de taxer plus fortement le prix de l'incinération, mode d'élimination des déchets plus polluant, afin d'inciter les gens à recycler, récupérer et composter. C'est un des aspects concrets du développement durable qui - en tenant compte des implications générales à long terme - ne choisit pas toujours la solution la plus avantageuse.

Mon invite reprend celle de M. Genecand tout en la complétant et se lit ainsi :

«- à aider les communes dans leurs recherches d'une aire de compostage et à conduire l'étude d'impact;»

et

«- à favoriser la diversité des méthodes de compostage.»

M. Christian Grobet (AdG). Au moment où s'est posé le problème du traitement des déchets, dans les années 60, le canton a opté pour l'incinération, et la crédibilité de ce concept s'est imposée jusqu'au début des années 80. Lorsque le Conseil d'Etat a proposé la troisième étape de l'usine des Cheneviers, ce Grand Conseil a demandé à l'Etat d'encourager tous les processus de recyclage et de récupération. Pour les déchets organiques, les résultats peuvent être importants grâce au compostage.

Mme Leuenberger souligne avec raison les diverses méthodes pour composter et les solutions valables pour les communes campagnardes. Mais le problème réel reste le compostage des déchets organiques de la Ville de Genève et des communes suburbaines où il n'est pas possible d'établir des petits sites de compostage, en particulier à cause des odeurs. Si l'on veut atteindre l'objectif fixé voici dix ans qui incluait l'ensemble des déchets cantonaux, un certain nombre de centres relativement importants doivent être réalisés. L'Etat et l'Association des communes avaient mis au point un programme pour la réalisation de trois à cinq centres, sans exclure les réalisations locales communales. A ce jour, seul le Nant-de-Châtillon a été réalisé, il donne entière satisfaction, et le rapport en souligne les qualités. Mais il faut envisager la construction des autres centres prévus, pour lesquels des terrains ont été acquis voici trois ans environ. C'est pourquoi la proposition de motion doit être complétée, car, s'il est judicieux d'encourager les communes, les centres prévus doivent être réalisés.

En conséquence, je dépose avec René Longet une troisième invite à cette motion pour que ces trois à cinq centres soient achevés. Elle s'énonce ainsi :

«- à achever le concept des trois ou cinq centres de compostage (dont celui déjà réalisé du Nant-de-Châtillon) mis au point en 1992 d'entente entre l'Etat et l'Association des communes genevoises et pour lequel des terrains ont été acquis à cette fin.»

M. René Longet (S). Il ne s'agit pas de débattre du soutien à la promotion d'un compostage accru des matières organiques, cette idée ayant fait son chemin. Effectivement, la récupération, le compostage, le recyclage et la prévention interviennent aujourd'hui de façon plus importante que les installations d'élimination ou de transformation.

La motion doit être exhaustive et n'omettre aucune stratégie efficace. Si la plate-forme proposée par la commission est bien conçue, certains compléments restent nécessaires : M. Genecand insiste sur le soutien aux communes et Mme Leuenberger, sur la diversité des méthodes. Pour M. Grobet et moi-même, il s'agit d'assurer la continuité dans l'action cantonale. L'ensemble des acteurs doit rester actif pour la réalisation des sites cantonaux et communaux. Nous vous proposons - tout en soutenant ces divers compléments - d'ajouter ce dernier point à la motion pour éviter de donner une indication tronquée au Conseil d'Etat, par omission d'un élément important de la stratégie d'action commune.

M. Max Schneider (Ve), rapporteur. Après les propos de M. Grobet, il faut préciser qu'on parle seulement de 60 000 tonnes de déchets organiques qui peuvent être traités soit par du compostage soit par du biogaz, et que notre objectif est d'en traiter au moins 30 000. Au sein des communes représentées à la commission, on a constaté évidemment quelques blocages. M. Grobet, ancien conseiller d'Etat, est bien placé pour nous renseigner sur les terrains acquis et les accords conclus entre l'Etat et l'Association des communes. Quant à la commission, elle n'a reçu aucune information sur l'emplacement de ces terrains ou ces fameux accords.

Nous devons traiter avec prudence le problème des odeurs provoquées par le compostage dont parlait M. Genecand. Il est vrai que des incidents se sont produits au Nant-de-Châtillon et que l'institut d'écotoxicologie a dû intervenir sur des emplacements de compostage près de Bernex, suite à certains dysfonctionnements. Mais toute innovation technologique implique le droit à l'erreur, et il incombe à la collectivité d'en assumer la responsabilité. Il serait trop facile de critiquer le compostage à cause de ces erreurs; d'ailleurs, les méthodes vont s'améliorer.

A la page 11, j'ai essayé de fixer les critères pour un compostage idéal, mais ils ne sont pas faciles à réunir. Il existe un déséquilibre entre les communes gérant trop de déchets ligneux et la Ville qui en manque. Sur ce point, je rejoins M. Genecand. En effet, les méthodes de compostage, aérobiques ou anaérobiques, présentées par M. Armand Cotton ou appliquées au Nant-de-Châtillon, doivent être complétées par le système du biogaz anaérobique pour l'obtention de la méthanisation comblant le déficit ligneux. Cette technologie doit être développée avec l'appui nécessaire des pouvoirs publics; l'OCEN fait un effort en ce sens, je crois. Cela figure aussi au calendrier des actions de Rio, aux points 21 à 26 notamment, où il est question du développement des technologies dans les pays du Nord, avant leur transfert au Sud.

Un des points essentiels du débat de la commission révèle qu'en partant du concept du «tout à l'incinérateur» nous avons abouti à la sélection des déchets et au recyclage maximal, grâce au compostage, entre autres. Les Cheneviers ont toujours fonctionné avec un certain «déficit», comme cela figure dans le rapport du DTPE de 1994. Pour combler le déficit du fonctionnement des Cheneviers, on a puisé dans le budget des pièces de rechange. Lors de l'examen de ce problème, on a établi les coûts - peu de personnes en sont informées - d'incinération, les coûts sociaux, liés à la santé de la population et à l'impact écologique, les coûts de stockage du mâchefer avec le suivi à terme et des déchets hautement toxiques de nos filtres expédiés dans des mines de sel en Allemagne, où ils vont rester plusieurs centaines d'années tout en nous coûtant plusieurs millions annuellement; un prochain stockage est prévu dans le canton de Vaud. Le «tout à l'incinérateur» a un impact sur l'emploi, mais, dans notre canton, le développement de cette filière du recyclage, de la récupération et du compostage en crée également, parce qu'induisant des technologies nouvelles. Cela mérite un encouragement.

Je terminerai avec un effet pervers mis en lumière dans un livre : «Le monde-poubelle» de Roger Cans, qui démontre qu'à force de récupérer on peut lancer des industries de récupération qui exigent toujours plus de déchets pour leur survie. Ce n'est évidemment pas notre but ! Il s'agit, au contraire, de diminuer les déchets à la source et d'évaluer les pouvoirs du Conseil d'Etat pour restreindre la production et la consommation de déchets.

M. Bernard Annen (L). Durant deux législatures, et alors que M. Grobet était conseiller d'Etat, j'ai collaboré à la commission des travaux. Aujourd'hui, pour reprendre son expression favorite, les bras m'en tombent devant autant d'hypocrisie ! A l'époque, vos thèses étaient bien différentes ! (Brouhaha.) Vous ne juriez que par les fours, et la majorité vous a suivi lors de l'installation du deuxième, comme M. Nissim l'a rappelé. En tenant ces propos, je prends à témoin certains qui sont encore là : MM. Revaclier, Burdet, etc. Que celui qui réfute mes propos se lève et s'exprime ! (Brouhaha.) Ah, oui ! M. Meyll prétendra sûrement le contraire, vous comprendrez aisément pourquoi ! Seule la centralisation au Nant-de-Châtillon était prise en considération, et aucune commune n'a reçu d'autorisation lorsqu'elle présentait un projet. Si je me réjouis de la nouvelle position de M. Grobet, qu'il ne s'arroge cependant pas la paternité de ce concept qu'il a combattu pendant huit ans !

Cette motion est le résultat d'un consensus unique qu'il faut sauvegarder. En effet, l'ensemble des groupes - y compris l'Alliance de gauche - a signé cette motion. Votons-la sans soutenir aucun autre amendement, y compris celui de M. Grobet qui essaie de se faire pardonner en tentant de récupérer une idée qui lui aurait échappé à l'époque ! (Applaudissements.)

M. John Dupraz (R). Si notre président souhaite que nos séances durent moins longtemps, n'adoptons pas la méthode de M. Annen !

Le président. Je le souhaite, Monsieur le député !

M. John Dupraz. Comme autogoal, on ne fait pas mieux ! Un proverbe dit : «Ne réveillez pas le chat qui dort !» (Rires.) A l'époque, la seule alternative au deuxième four était la décharge publique. Qui aurait pu prévoir la crise économique actuelle ? Nous soutiendrons cette motion, car - sans faire preuve d'un centralisme à tout crin - il ne s'agissait pas, à l'époque, de céder à toutes les modes en délivrant sans discernement des autorisations aux communes. On aurait multiplié ainsi les sources d'erreurs et les difficultés.

L'amendement proposé par M. Grobet va beaucoup trop loin, nous ne le voterons donc pas. En revanche, celui de M. Genecand et le sous-amendement de Mme Leuenberger s'inscrivent de façon appropriée dans la ligne de cette motion, et nous les voterons dans un esprit de compromis.

M. Christian Grobet (AdG). M. Annen est souvent frappé d'une amnésie proche de la mauvaise foi ! (Rires.) Lors de la réalisation de la troisième étape des Cheneviers, il fallait décider de l'opportunité de construire un ou deux fours. Je me suis battu pour la première solution, mais ce sont vos milieux et les communes qui ont voulu deux fours. Ultérieurement, nous sommes revenus avec une demande de crédit pour ce deuxième four que j'ai loyalement défendue au nom du Conseil d'Etat, à la demande expresse des communes genevoises souhaitant à tout prix cette solution qui leur semblait optimale. Mais, comme M. Dupraz l'a dit, il est difficile de déterminer les dimensions d'une installation de ce type. En voyant trop petit, un quatrième projet se serait révélé inévitable dix ans plus tard, et vous auriez été les premiers à protester. Votre parti et l'Entente voulaient ce deuxième four.

En réalité, il ne s'agit pas du problème des fours mais bien de celui des déchets, Monsieur Annen ! (Brouhaha.) Rigolez autant que vous voulez, mais relisez les débats ! Un crédit supplémentaire était nécessaire pour le vote du deuxième four réclamé par l'Association des communes. Je comprends votre embarras, Madame Mottet-Durand, car cela coûte cher aux communes et vous ne voulez pas assumer vos responsabilités. Parallèlement à l'extension des Cheneviers, le département des travaux publics a mis au point un programme très diversifié de recyclage des déchets. Vous ne pouvez pas prétendre que nous n'avons pas mené cette politique activement. Vous savez fort bien qu'une politique exemplaire dans de nombreux domaines a été menée à Genève, nous avons même été des précurseurs dans le domaine du compostage.

Un seul centre a été réalisé, c'est vrai, mais j'aimerais vous rafraîchir la mémoire, Monsieur Schneider ! Je vous ai pourtant donné des précisions en dehors de la séance ! Vous posez cependant des question comme si vous n'étiez pas au courant, mais vous n'avez pas saisi l'occasion, en commission, d'en poser ! (Brouhaha.) Référez-vous donc aux différents rapports du Conseil d'Etat qui se trouvent dans le Mémorial du Grand Conseil ! (Brouhaha.)

Le président. Monsieur le député Lombard, s'il vous plaît !

M. Christian Grobet. M. Lombard a retrouvé le niveau infantile qu'on lui connaissait, il y a quelques mois ! (Intervention de M. Armand Lombard.)

Le président. Silence, s'il vous plaît !

M. Christian Grobet. Je croyais, Monsieur Lombard, que vous aviez dépassé ce stade !

Monsieur Schneider, vous trouverez dans le Mémorial de novembre 1992 le septième rapport du Conseil d'Etat sur les problèmes de recyclage, notamment de compostage. Comme je vous l'ai dit en dehors de la séance, des discussions ont eu lieu entre le département des travaux publics et l'Association des communes genevoises. A l'époque, l'accord avait porté sur un concept visant au compostage de tous les déchets organiques du canton par des unités aptes à en traiter 10 000 tonnes par an. En tenant compte de la problématique des distances et des transports, le département des travaux publics avait proposé cinq centres de compostage et l'Association des communes genevoises avait jugé préférable de n'en réaliser que trois.

Ce concept a été adopté par le comité de l'Association des communes genevoises. Les documents en font foi et je les mettrai à votre disposition, si vous le souhaitez.

La difficulté, Monsieur Schneider, est de trouver des terrains, aucune commune ne voulant d'une station sur son territoire pour composter les déchets des autres communes. Chacune veut avoir son petit centre pour traiter ses propres déchets, mais aucune n'est d'accord d'accueillir tous les déchets de la Ville de Genève, de Carouge, de Lancy et de Vernier. Le problème est là, et vous le savez ! Tout le reste n'est et ne sera que discours si l'on ne passe pas à la réalisation de centres de compostage permettant de traiter le gros des déchets organiques du canton, dont 80% proviennent de la zone urbaine où il est exclu d'en construire, à moins, Monsieur Schneider, que vous n'acceptiez leur implantation sur la plaine de Plainpalais ou au parc de La Grange !

Des terrains ont été achetés, et vous savez où ils se trouvent. Je vous ai informé de l'étude faite pour construire un centre de compostage à proximité de la station d'épuration des eaux, à la route de Colovrex, étude pour laquelle un architecte a été mandaté. Je vous ai également informé de la réservation d'un site dans la zone d'activité de Mouille-Galland. Ce sont là deux projets concrets pour la rive droite.

M. Jean-Claude Genecand (PDC). Je pense, Monsieur Grobet, que vous ne voulez pas vous déjuger, vous qui avez réalisé le Nant-de-Châtillon. Vous faites fi de la réalité quand vous dites qu'il est sans défaut. Sinon pourquoi aurions-nous été obligés d'incinérer 500 tonnes pour cause de trop forte salinité ?

Les problèmes existent. Il y a des odeurs désagréables, des affaissements de terrain. Par conséquent, le Nant-de-Châtillon n'est pas la panacée, et il ne faut pas dire qu'il fonctionne parfaitement !

Je demandais au gouvernement s'il entendait procéder à un audit portant sur la fiabilité du système, afin de la garantir, sinon l'améliorer le cas échéant. Je demandais aussi que l'agence Arthur Andersen fasse un audit, lequel est vraiment indispensable !

Je suis étonné de vous entendre dire que le Nant-de-Châtillon ne suffit pas pour les régions urbaine et suburbaine, alors que vous savez qu'il fonctionne en dessous de sa capacité. Aussi faudrait-il l'utiliser à bon escient avant de projeter de nouvelles aires cantonales !

La meilleure solution est celle de la diversité découlant du concours de plusieurs communes. Celles de Plan-les-Ouates, de Troinex et de Perly se sont associées, et c'est Yersin qui s'est chargé de leur compostage. De son côté, la commune de Meyrin a fait une très bonne expérience.

A mon avis, il ne faut pas multiplier les aires cantonales de compostage, sinon nous aurons le même problème qu'aux Cheneviers : celui-ci est doté d'un troisième four inutile; de même nous aurons des aires de compostage inutilisées.

La proposition qui nous est faite, aujourd'hui, de profiter du potentiel communal est une bonne proposition.

M. Pierre Meyll (AdG). Je parlerai de ce que je connais, quoi qu'en pense M. Annen !

Chaque fois que nous avons dû, en commission des travaux, discuter de ces problèmes lors des précédentes législatures, nous avons apporté des solutions, sous forme d'essais. Ceux-ci, bien entendu, n'ont pas tous été concluants.

Le compostage sur sol communal pose certains problèmes, les communes rurales ne disposant pas assez de déchets de cuisine pour fabriquer un compost de qualité. C'est un peu comme la fondue : il faut un tiers de déchets de cuisine, un tiers de ligneux et un tiers d'herbe.

A Versoix, nous récupérons le ligneux et l'herbe, mais nous n'avons pas la possibilité de collecter les déchets de cuisine. Nous récupérons le ligneux et la tonte de l'herbe pour un précompostage que nous livrons gratuitement aux paysans qui l'étendent sur leurs champs, au moment des labours. Ce manque de finition est dû aux accords non aboutis avec les communes voisines, certains administrés ayant l'odorat sensible. Ces nuisances existent, mais elles sont rares. La preuve c'est qu'à Lausanne on parvient à faire des petits composts de cuisine sans que les voisins se plaignent d'odeurs désagréables, malgré la densité des logements.

J'estime que si nous réalisons les trois ou cinq aires de compostage prévues, les gens - notamment ceux résidant dans les villas des zones suburbaines - prendraient conscience - en recevant, en retour, le compost de leurs déchets - qu'ils participent à la sauvegarde de la terre, notre bien le plus précieux. C'est une éducation à faire, et elle sera difficile.

Le problème posé par le Nant-de-Châtillon existait bien avant l'arrivée de Grobet, puisque, en 1980, des fuites ayant eu lieu, des rapports ont été émis et les discussions ont porté sur le risque de fuites futures. Je souhaite donc que l'on revoie tous ces problèmes d'une manière plus concrète.

M. Max Schneider (Ve), rapporteur. Je remercie M. Grobet de m'avoir donné les noms des sites qu'il a apparemment négociés. Je serais heureux d'entendre M. Haegi à ce sujet, puisqu'en commission ces sites n'ont pas été désignés explicitement.

Après avoir écouté les leçons de M. Grobet, je suis malheureusement obligé de me rallier à l'avis des gens d'en face.

Monsieur Grobet, quand vous étiez conseiller d'Etat, votre discours était : «Tout à l'incinérateur; tout à Châtillon !» Depuis, vous avez évolué, et c'est très bien ! Mais abstenez-vous de me faire la leçon, puisqu'ici même M. Nissim et moi-même avons été traités de martiens pour avoir proposé des solutions alternatives.

Monsieur Grobet, tout en vous remerciant de vos informations, je vous enjoins de remettre les choses à leur place, sinon ça va se gâter !

Genève est à la pointe des cantons romands, en matière de traitement de déchets, pas à cause du Nant-de-Châtillon mais du fait de deux ingénieurs, M. Mahrer, ex-député, et M. Dumont, qui ont développé des technologies de biogaz. Les déchets des restaurants, actuellement envoyés aux Cheneviers, pourraient être traités par ces technologies in situ et bien plus écologiquement.

Je cite aussi une expérience réussie à La Chaux-de-Fonds, reprise par le bureau Cotton à Mon-Idée. C'est une piste à exploiter pour concevoir des capacités annuelles de 3 000 et non de 10 000 tonnes et éviter, par souci d'écologie, d'implanter d'immenses aires de compostage, avec des déséquilibres de ligneux et autres. Cette piste est propice à la création d'emplois et de transfert de technologies en direction d'autres pays. En effet, l'Asie du Sud-Est, la Chine, la Corée, la Malaisie, l'Indonésie et la Thaïlande constituent un potentiel très intéressant pour les systèmes genevois.

Malheureusement, ces systèmes sont appliqués dans d'autres cantons, alors qu'ils sont encore à l'étude à Genève. Aussi je formule une invite au Conseil d'Etat en lui demandant de soutenir ceux qui innovent à Genève, même s'ils commettent quelques petites erreurs au départ.

Nous disposons d'un excellent laboratoire, à Lullier, qui peut contrôler la qualité des composts. Le souhait de la commission était d'ailleurs d'envoyer les divers composts à un laboratoire pour que leur teneur en métaux lourds soit contrôlée.

La commission n'a, hélas, pas accepté de reprendre l'invite de l'ancienne motion : «à réserver l'incinération aux résidus justifiant absolument cette filière de destruction;». Il faudra donc y revenir, à l'aide d'un projet de loi, pour limiter l'usage de l'incinération. Actuellement, celui-ci est scandaleusement abusif, comme le démontre le tableau figurant à la page 5 de mon rapport. Il est impératif d'opter pour une politique de changement. Nous ne pouvons pas continuer à incinérer de tels volumes de déchets.

Ce problème n'est pas uniquement genevois. Il concerne toute la Suisse et la majorité des pays industrialisés. C'est pourquoi j'ai demandé, tout à l'heure, qu'une information sur le mode de traitement des déchets dans notre canton soit diffusée, en plusieurs langues, auprès des organisations internationales siégeant à Genève.

Je terminerai par une question de Green Peace : «Les produits doivent-ils être produits pour faire tourner les industries ou parce que les gens en ont besoin ?». De prime abord, cette question semble stupide, et pourtant... Industriels, politiciens et consommateurs continuent à penser que le bonheur de l'humanité passe obligatoirement par l'augmentation constante de la production et de la consommation. D'où le problème des déchets et la nécessité d'encourager des changements fondamentaux.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous signale que nous avons déjà traité treize des soixante-six points de la session. C'est un exploit ! Je vous invite à vous exprimer brièvement et vous en remercie d'avance.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Je n'ajouterai rien à votre historique. Je me bornerai à faire quelques brèves remarques sur la situation actuelle.

Au mois de mars, j'ai réuni l'ensemble des communes genevoises intéressées aux problèmes de compostage. Une bonne moitié d'entre elles désiraient faire le point de la situation au cours de cette réunion pour débattre de leurs problèmes, particulièrement face à l'Etat qui n'aurait pas apporté la contribution qu'elles attendaient. Le département des travaux publics participait à cette séance.

En ce qui concerne la rive droite, le maire de Collex-Bossy déclarait être toujours à la recherche d'un terrain en vue de faire une aire de compostage pour un projet rassemblant six communes. Il défend l'idée d'y ajouter des déchets de cuisine pour les raisons que certains d'entre vous connaissent.

Le GICAL est un groupement intercommunal réunissant Cologny et d'autres communes. Ce dernier a un projet avec l'entreprise Demont qui pourrait lui offrir une solution nouvelle grâce à la méthanisation. Cette méthode n'est pas inintéressante pour une exploitation spécifique, soit le chauffage de serres exploitées dans la région.

Depuis, une autre proposition a été faite dans ce domaine. M. Genecand a parlé des communes de Troinex, Bardonnex, Plan-les-Ouates, disant que l'expérience de M. Yersin avait abouti. Monsieur Genecand, allez vérifier sur place, car le projet lancé par M. Yersin en est toujours au stade expérimental !

Les communes en question, comme d'autres, nous ont demandé des garanties concernant les études d'impact. A cet égard, nous avons pris les devants. Vous ne le savez pas, puisque vous ne vous êtes pas renseigné. A la suite de cette séance, nous nous sommes mis à la disposition des communes, non pas pour payer l'étude d'impact - que ce soit clair et, d'ailleurs, ce n'est pas ce que vous demandez si je lis bien votre texte - mais pour les aider à la réaliser. Nous avons confié cette réalisation à des tiers. Toutefois, les communes désirent avoir quelques garanties, d'une part, sur le cahier des charges en ce qui concerne l'étude d'impact, et, d'autre part, sur l'usage qui en sera fait ensuite, afin que l'argent soit bien investi.

A l'occasion de cette réunion, la commune de Meyrin nous a signalé que son projet avec la commune de Vernier n'était plus réalisable, cette dernière l'ayant abandonné.

La commune de Versoix ne traite que les déchets verts sur une place agréée par notre département, de même la commune de Collonges-Bellerive qui composte en bordure d'un champ. Cela pourra changer si ce dont nous parlons se réalise.

Comment les choses peuvent-elles évoluer ? Lors des réunions avec les communes, j'ai dit et répété que je ne m'opposais pas au fait qu'il y ait quatre ou cinq centres de compostage, mais je leur ai signalé les inconvénients de la non-conformité. Ce n'est pas l'avis de M. Genecand qui considère que l'on peut procéder à un compostage par commune. Quoi qu'il en soit, les communes peuvent choisir la solution qui leur paraît la plus avantageuse, car nous sommes à leur totale disposition pour les informer à ce sujet.

Je vous livre une information qui va dans le sens d'une des invites concernant la diversification. Monsieur Schneider, nous avons fait un avant-projet d'installation, avec la méthode de méthanisation, pour le site du Nant-de-Châtillon. Ce projet permettrait de traiter 10 000 tonnes de déchets ménagers organiques et compostables. Les déchets produits par cette installation seraient repris par la méthode de compostage aérobie qui fonctionne actuellement à satisfaction. Ce projet n'est pas mineur. Il représente des investissements substantiels de l'ordre de 10 à 12 millions. Sur le plan de l'énergie, cette méthode produirait environ un Giga/Watt qui pourrait être revendu aux Services industriels au prix d'environ 20 centimes/kWh.

Nous pratiquons déjà la politique que vous nous suggérez avec vos amendements. Vous pouvez les accepter sans autre, sauf celui de M. Grobet - cela allait de soi, Monsieur Genecand, c'est pourquoi je ne l'ai pas dit. J'y lis un encouragement du but que nous poursuivons, et même M. Grotte comprend bien que les limites de cette diversification ne sont pas franchissables. Vous ne faisiez qu'une simple suggestion à vos collègues, Monsieur Grobet, c'est pourquoi je propose que l'on ne suive pas votre amendement.

Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Genecand qui consiste à ajouter une nouvelle invite à la motion 1050 et dont la teneur est la suivante :

«- à aider les communes dans leurs recherches d'une aire de compostage et à conduire l'étude d'impact;»

Cet amendement est adopté.

Le président. Je mets aux voix l'amendement de Mme Leuenberger qui consiste à ajouter une nouvelle invite, dont la teneur est la suivante :

«- à favoriser la diversité des méthodes de compostage.»

Cet amendement est adopté.

Le président. Nous allons voter les amendements de MM. Grobet et Longet qui consistent à ajouter une nouvelle invite dont la teneur est la suivante :

«- à achever le concept des trois ou cinq centres de compostage (dont celui déjà réalisé du Nant-de-Châtillon) mis au point en 1992 d'entente entre l'Etat et l'Association des communes genevoises et pour lequel des terrains ont été acquis à cette fin.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

(M 1050)

MoTION

concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques

LE GRAND CONSEIL

considérant:

- que la récente «panne» due à un affaissement de terrain de l'unique aire de compostage du canton, sis au Nant-de-Châtillon, oblige d'incinérer actuellement tous les déchets organiques récupérés;

- qu'en matière de compostage, la décentralisation se justifie écolo-giquement et financièrement,

invite le Conseil d'Etat

- à soutenir l'information de la population en matière de tri des déchets, en collaboration avec les communes;

- à veiller à l'obtention d'un compost de qualité répondant aux normes techniques de l'ordonnance fédérale sur les substances toxiques;

- à appuyer techniquement les communes pour mener à bien de nouveaux projets de compostage intercommunaux dans le respect d'un concept cantonal efficace;

- à faire éviter l'incinération des matière organiques compostables de manière à respecter les mesures OPair (ordonnance fédérale sur la protection de l'air);

- à interdire la mise en décharge de ces mêmes matériaux;

- à aider les communes dans leurs recherches d'une aire de compostage et à conduire l'étude d'impact;

- à favoriser la diversité des méthodes de compostage.

M 912-A

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je désire rappeler que la motion 912-A est retirée.

Le Grand Conseil prend acte du retrait de cette proposition de motion.