Séance du
jeudi 9 mai 1996 à
17h
53e
législature -
3e
année -
6e
session -
17e
séance
M 1048
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- que toute la politique genevoise des transports devrait viser à l'évitement du transit des pendulaires au centre-ville, par, entre autres, le rétrécissement des pénétrantes, ou leur non-élargissement;
- que l'intensité de la circulation automobile sur la rue de Genève provoque un dépassement des seuils de tolérance OPair et OPB;
- que le plan «Circulation 2000» propose une nouvelle jonction entre l'avenue de Thônex et l'autoroute Blanche afin que les automobilistes empruntent directement l'autoroute de contournement au lieu de passer par le centre-ville afin de décharger la rue de Genève;
- que le plan «Circulation 2000» prévoit que la priorité dans la route de Genève soit accordée aux transports publics;
- que l'étude Dériaz conclut à l'établissement d'une 2e voie de tram à la hauteur du goulet de Chêne-Bourg, sans pour autant toucher aux bâtiments;
- que l'Etat est propriétaire de la grande majorité des bâtiments du goulet;
- que le patrimoine architectural et historique de Chêne-Bourg doit être conservé;
- que le concours d'architecture lancé par le département des travaux publics et de l'énergie (DTPE) prévoyait une démolition partielle du goulet, sans de véritables alternatives pour son maintien;
- que nous venons de recevoir les résultats de l'étude, demandée par le DTPE et réalisée par les architectes M. Tschumi et Dal Busco, concernant le diagnostic de l'état des immeubles du goulet de Chêne-Bourg;
- que cette étude démontre la solidité des structures des bâtiments et des solutions de réhabilitation par les habitants;
- que l'Association des habitants des Trois-Chêne souhaite la conservation des bâtiments du goulet,
invite le Conseil d'Etat
à réaliser, dans les plus brefs délais, la rénovation des bâtiments du goulet appartenant à l'Etat, avec la participation de ses habitants, ainsi que la création d'une petite place villageoise à l'intérieur des bâtiments du goulet à la place des entrepôts, sis rue Antoine-Floquet, selon une des solutions proposées par l'étude des architectes Dal Busco et Tschumi;
à réaliser une deuxième voie du tram à la hauteur du goulet , à la rue de Genève.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Oser faire confiance aux jeunes, oser innover en matière de logement en leur donnant les moyens de réaliser l'aménagement de leur habitat par eux-mêmes. Ces 70 jeunes ont d'ailleurs démontré leurs capacités en réoccupant et réaménageant des logements et locaux vides depuis vingt ans.
Selon l'étude de M. Tschumi, sur mandat du DTPE, cela est possible.
Il est proposé différentes solutions plus ou moins onéreuses, celle à 500 000 F n'est qu'une mise en conformité sur une courte durée; la préoccupation de cette motion n'est pas de choisir, en séance plénière, la meilleure solution, mais de relancer le débat et de se déterminer en commission pour la proposition la plus adéquate de rénovation.
Plan page 3
Voici un extrait des déclarations de cette étude qui comporte 25 pages:
«3. Examen de l'état des bâtiments
3.1. Considérations relatives aux structures porteuses
Les immeubles du périmètre ont été analysés sous l'angle de la sécurité et du comportement des éléments porteurs (murs, plancher et charpente).
Dans la plupart des constructions, un diagnostic a pu être établi sur la base de considérations visuelles. Dans certains cas, des sondages ont été nécessaires pour faire apparaître les éléments porteurs.
Il convient de préciser à cet égard qu'une analyse visuelle et des sondages ponctuels, s'ils permettent d'établir un diagnostic général assez fiable, ne sont pas à même d'exclure que des faiblesses structurales puissent être présentes à certains endroits. Cette certitude ne pourrait être obtenue qu'en exécutant une campagne de sondage de grande envergure, ce qui n'est guère possible en raison de l'utilisation des locaux.
Le comportement des éléments porteurs, notamment les déformations ou la souplesse des planchers, les fissures dans les murs porteurs, voire des éléments du second oeuvre, est à considérer comme un critère important pour en juger l'état général.
En effet, on peut par exemple considérer que, si un plafond gypsé est exempt de fissures importantes, la structure sur laquelle il est appliqué ne subit que peu de déformations, et que par conséquent elle n'est certainement pas en mauvais état.
Ce raisonnement reste valable dans la perspective d'une rénovation, avec quelques réserves toutefois, car cela implique, d'une part, que l'usage futur reste à peu près le même (pas d'augmentation des charges utiles) et que, d'autre part, la structure porteuse ne soit pas alourdie par des éléments de toutes sortes, destinés à améliorer les performances (confort ou caractéristiques phoniques, par exemple). Surcharge admissible 200 kg/m2.
En règle générale, à quelques rares exceptions près, on peut considérer que les structures porteuses des immeubles actuellement habités remplissent leur fonction de manière satisfaisante. Les occupants ont d'ailleurs identifié les zones à problème et procédé à des renforcements, souvent sommaires, mais suffisants.
Les bâtiments en général, et les structures porteuses en bois en particulier, peuvent être rapidement dégradés par des venues d'eau ou de l'humidité. S'agissant des immeubles habités, les fuites de la toiture sont rapidement colmatées, ou à tout le moins captées, par les habitants.
En revanche, on peut constater que pour certains bâtiments restés vides, notamment les nos 15 et 17, rue de Genève, ainsi que certains secteurs des nos 7 et 9, la dégradation est importante et rapide à cause des venues d'eau de la toiture ou de la façade. L'état général des bâtiments, du point de vue de la structure porteuse, est résumé ci-après.
4. Divers niveaux d'intervention
4.1. Il est retenu dans un premier temps six niveaux d'intervention. Les chiffres se rapportent à la part de l'Ilot du goulet appartenant à l'Etat (teinte rouge pleine de l'extrait cadastral joint).
4.1.1. Minimum d'intervention dans l'optique du maintien de l'affectation actuelle pendant 5 ans:
a) travaux de couverture-ferblanterie, sanitaire, électricité, par corps d'état spécialisés;
b) travaux de peinture et divers bricolages par les occupants, fournitures livrées par l'Etat.
Coût: 480 000 F.
4.1.2. Mise en conformité, sauf normes acoustiques et thermiques, avec un minimum décent; maintien de l'affectation actuelle.
Dans cette optique, il n'est plus question du chauffage électrique actuel, donc installation d'un chauffage à gaz par appartement. Par ailleurs, le courant provisoire est remplacé par une installation conforme, c'est-à-dire, à première vue, reprise générale des installations.
Les sanitaires font l'objet d'une installation simple comprenant par appartement: 1 WC, 1 douche, 1 évier, conduites eau chaude et froide et écoulement des eaux usées. (Le no 25 supposé en ordre.)
Chiffrage succinct:
Sanitaire 450 000 F
Electricité 800 000 F
Chauffage 700 000 F
Toiture, ferblanterie, façades y compris échafaudage sur rue de Genève uniquement, renforcement structures, diverses finitions et peinture: 100 F/m3
14 000 x 100 = 1 400 000 F
Honoraires, taxes et divers: 20% 750 000 F
Total solution 4.1.2. 4 100 000 F
4.1.3. Aménagement de locaux sociaux ou libres, réouverture des arcades dans le contexte existant.
Cette solution, pour répondre aux normes phoniques, thermiques, d'hygiène et de sécurité, implique d'importants travaux qui en font une solution apparemment plus coûteuse qu'un immeuble neuf de même standard, soit:
14 000 m3 à 700 F 9 800 000 F
4.1.4. Idem mais avec un passage sous arcades (selon solution OTC) transformation des bâtiments
Surcoût pour passage sous arcades
par rapport à 4.1.3. 300 000 F
Immeubles 9 800 000 F
Total 10 100 000 F
4.1.5. Démolition, reconstruction sauf le bâtiment du 25 (ancienne poste).
L'on suppose une reconstruction générale du quartier, dont la part de l'Etat seule est mise en compte ici. Dans cette optique, on reconstruit le même cube dans des dispositions à déterminer, par simplification pour les comparaisons dans un premier temps.
10 800 m3 à 600 F (sauf no 25) 6 480 000 F
3 200 m3 à 400 F (no 25 ancienne poste) 1 280 000 F
Total solution 4.1.5. 7 760 000 F
Par ailleurs, une construction contemporaine dans le même volume fournira la même surface habitable ou légèrement supérieure (économie sur les épaisseurs de murs) en offrant des plafonds de hauteur convenable. La hauteur actuelle des plafonds varie entre 2,01 et 3,00 m aux étages et sa moyenne se situe vers 2,30 m, ce qui n'est pas agréable s'il s'agit d'un appartement sans double hauteur occasionnelle.
4.1.6. La démolition simple pour arriver à l'alignement prévu au temps de la conception élargie de la rue de Genève n'est pas chiffrée. Cette conception sous-entend des travaux de génie civil pour tram et chaussée où la démolition des bâtiments est englobée et n'entre pas dans le cadre de cette étude.
5. Tableau récapitulatif des niveaux d'intervention
(pour l'ensemble des bâtiments appartenant à l'Etat de Genève)
Solution Durée d'usage Coût
5.1. Intervention minimum (4.1.1.) 5 ans 500 000 F
5.2. Mise en conformité (4.1.2.) 10 à 15 ans 4 000 000 F
5.3. Aménagement dans l'existant
pour logements de standard
usuel (4.1.3.) 40-50ans < 10 000 000 F
5.4. Idem mais avec passage
sous arcades (4.1.4.) 40-50 ans > 10 000 000 F
5.5. Démolition - reconstruction
sur le site (4.1.5) 40-50 ans 8 000 000 F
5.6. Alignement rue de Genève
(4.1.6.) pour mémoire
Un prix à la pièce pourra être défini dans un second temps en fonction des paramètres à définir.
Nota: Les solutions 5.1. et 5.2. sont envisagées dans le cas du maintien de l'utilisation actuelle.
6. Conclusion
Après ce bref examen d'entrée en matière et sans relevés des bâtiments (hormis le no 25), il nous semble judicieux, sans présumer de la solution qui sera choisie, de faire exécuter dans le meilleur délai la version no 1 «mise en sécurité des personnes» (point 4.1.1. du présent rapport), étant donné qu'il semble exclu de désaffecter le goulet à court terme.
Serge Dal Busco Jean-Jacques Tschumi
Dal Busco - Yokoyama SA architecte FAS
ing. civils EPF-SIA-AGI
Genève, le 13 mai 1994»
Avec 500 000 F, on peut réaliser des réparations minimalistes pour assurer la sécurité des habitants et leur offrir des logements à aménager selon leur désir.
Ensuite, des travaux plus importants pourraient être envisagés pour renforcer ces premières mesures, soit par des investissements de l'Etat, de la commune ou du secteur privé, mais cela dans 5 ans seulement.
Avec 4 000 000 F, on peut réaliser une mise en conformité qui peut durer 10 à 15 ans.
Donc, il est tout à fait possible de s'attaquer enfin à la restauration de ces immeubles et de créer de nouveaux logements à bon marché tout en conservant le caractère architectural d'origine et le rétrécissement de la rue de Genève si nécessaire à la non-augmentation du trafic routier.
Lors du concours d'architecture qui a eu lieu, l'alternative qui consistait à conserver le goulet n'a pas été respectée. Pourquoi ?
Car il était demandé de prévoir 2 voies de tram plus 2 voies pour le trafic automobile, ce qui rendait impossible le maintien du goulet. D'ailleurs, le même processus se reproduit actuellement pour Chêne-Bougeries.
«Si le rétrécissement de Chêne-Bourg n'existait pas, il faudrait l'inventer pour limiter la vitesse», disait un professeur d'architecture.
L'autoroute de contournement a été réalisée, la route Blanche permet l'évitement de Chêne-Bourg. Démolir le goulet n'a plus aucun sens. L'étude de l'architecte démontre qu'une réhabilitation des maisons par les jeunes est possible avec leur participation.
Bref, toutes les conditions sont réunies pour, enfin, aller de l'avant: pour rénover ce goulet, dont les valeurs historiques et architecturales ne sont plus à démontrer, pour faire plaisir à la population, souverain suprême ne l'oublions pas, et cela sans puiser trop lourdement dans les caisses de l'Etat.
Pour toutes ces bonnes raisons, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de faire un bon accueil à notre motion.
Annexe 1 plan
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Débat
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Si nous en sommes au point 79, j'aimerais mentionner - étant donné notre opposition à la démolition du goulet de Chêne-Bourg - qu'un référendum, lancé par les jeunes de la commune pour manifester leur désir de conserver ces bâtiments en les rénovant de façon douce pour conserver l'atmosphère, a abouti. Il y aura donc un vote communal à ce sujet en septembre. Par conséquent, nous retirons momentanément cette motion, mais nous la déposerons à nouveau en temps voulu, selon le résultat du vote.
Le président. Nous enregistrons le retrait de cette motion. Compte tenu du débat sur la traversée de la rade, je vous propose de lever la séance définitivement. En effet, beaucoup d'entre vous aimeraient le suivre, et certains députés y participent comme intervenants. D'autre part, plusieurs conseillers d'Etat sont absents ce soir, et Mme Brunschwig Graf ne pourra pas répondre aux points de son ordre du jour. Comme promis, je vous attribue les deux indemnités demandées !
Le Grand Conseil prend acte du retrait de cette proposition de motion.
La séance est levée à 19 h 45.