Séance du jeudi 9 mai 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 6e session - 17e séance

PL 7416
22. Projet de loi de MM. Christian Grobet, Jean Spielmann et Christian Ferrazino sur les soumissions et adjudications publiques de l'Etat et des établissements publics (L 6 4). ( )PL7416

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

But

La présente loi a pour but d'harmoniser les règles cantonales de passation des marchés par l'Etat, les communes et les établissements publics conformément aux principes suivants:

a) assurer la transparence des procédures de passation des marchés publics;

b) garantir l'égalité de traitement à tous les soumissionnaires et assurer l'impartialité des adjudications;

c) favoriser une concurrence correcte entre les soumissionnaires, tout en veillant à ce que ceux-ci soient mis sur un pied d'égalité, notamment par le respect des conditions de travail, ce qui implique en particulier le respect des conventions collectives et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes;

d) favoriser le maintien et la création d'emplois par une rotation équitable entre concurrents, par l'adjudication à des entreprises disposant d'effectifs de main-d'oeuvre suffisants pour accomplir les travaux sans recourir à des heures supplémentaires ou à de la main-d'oeuvre provenant hors du canton;

e) écarter les offres qui ne couvrent manifestement pas les coûts de production et qui relèvent du dumping;

f) permettre une utilisation parcimonieuse des deniers publics, tout en prenant en compte le siège fiscal des soumissionnaires;

g) respecter les dispositions impératives de droit fédéral, lorsque les travaux en cause sont subventionnés par la Confédération, ainsi que l'accord intercantonal sur les marchés publics (ci-après l'accord intercantonal), adopté le 25 novembre 1994 par la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement et par la Conférence des chefs des départements cantonaux de l'économie publique, et approuvé par le Conseil fédéral le (à préciser), dont le texte est annexé à la présente loi.

Art. 2

Champ d'application

1 La présente loi s'applique à la passation des marchés suivants lorsqu'ils sont adjugés par ou pour le compte de l'Etat, des communes, des collectivités publiques cantonales d'établissements de droit public cantonal créés par une loi cantonale ainsi que des fondations, associations, et sociétés contrôlées par l'Etat, des communes ou des collectivités publiques:

a) marchés de construction, c'est-à-dire un contrat entre un adjudicateur et un soumissionnaire concernant la réalisation de travaux de construction de bâtiments ou de génie civil et les fournitures qui s'y rapportent, pour tout corps de métier dont la valeur présumée du travail à accomplir dé-passe la somme de 50 000 F;

b) marchés de fournitures, c'est-à-dire un contrat entre un adjudicateur et un soumissionnaire concernant l'acquisition de biens mobiliers, notamment sous forme d'achat, de crédit-bail (leasing), de bail à loyer, de bail à ferme ou de location vente;

c) marchés de service, c'est-à-dire un contrat entre un adjudicateur et un soumissionnaire concernant la fourniture d'une prestation selon l'appendice 1, annexe 4, de l'accord du GATT.

2 Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux marchés de la construction passés par des maîtres d'ouvrage qui ont été mis au bénéfice d'une aide financière de l'Etat correspondant à 1% au moins du coût de construction.

Art. 3

Conditions pour êtreadmis à soumissionner

1 Sous réserve de l'article 1, lettre g, les soumissionnaires, lorsqu'il s'agit de personnes physiques (raison individuelle, sociétés en nom collectif et en commandite), doivent être établis à Genève depuis 5 ans au moins et justifier que, pendant 3 ans au moins, ils ont exercé, en qualité d'entreprise inscrite au registre du commerce, une activité en rapport, quant à sa nature et à son importance, avec celle dont relèvent les travaux et fournitures susceptibles d'être commandés. Lorsqu'il s'agit de personnes morales, celles-ci doivent avoir exercé cette activité et établi leur siège dans le canton depuis 5 ans au moins.

2 Lorsqu'il s'agit de consortiums, chaque entreprise doit satisfaire aux conditions prévues à l'alinéa 1.

Art. 4

Exceptions

1 Il peut être fait abstraction des dispositions prévues à l'article 3:

a) lorsqu'il s'agit de travaux, fournitures ou services dont la nature, l'ampleur et les conditions d'exécution présentent un caractère exceptionnel, en sorte que les entreprises de la place ne seraient plus à même de remplir les conditions d'une saine concurrence;

b) lorsqu'il s'agit de travaux complémentaires à ceux déjà entrepris par l'Etat, une collectivité publique ou un particulier et que, pour des raisons techniques ou financières, il se justifie d'en confier l'extension à la même entreprise;

c) dans tous les cas où la mise en soumission publique des travaux, fournitures ou services pourrait porter préjudice aux intérêts généraux de l'Etat et lorsque les conditions d'une saine concurrence ne sont pas réunies.

2 En règle générale, l'entreprise doit être assujettie à l'impôt à Genève ainsi qu'à la taxe professionnelle communale.

Art. 5

Soumission restreinte

1 Lorsqu'il ne peut être procédé à une mise en soumission publique, il est demandé des offres à plusieurs entreprises ou fournisseurs admis à soumissionner au sens de l'article 3. Il en est de même lorsqu'une inscription ou une mise en soumission publique n'ont pas donné de résultat suffisant.

2 Sont réservés les cas d'adjudication directe pour les travaux de peu d'importance, urgents ou complémentaires à ceux déjà entrepris.

3 Dans le cas des soumissions restreintes, l'article 7 n'est pas applicable.

Art. 6

Associations professionnelles

Les associations professionnelles intéressées au sens de la présente loi sont les associations d'employeurs signataires de la convention collective de travail du métier.

CHAPITRE II

Dispositions applicables aux soumissions

Art. 7

Inscription et émolument

1 L'avis de l'ouverture d'une inscription pour la mise en soumission de travaux ou de fournitures a lieu par publication dans la Feuille d'avis officielle. L'avis rappelle les conditions générales auxquelles les entreprises peuvent être admises à soumissionner.

2 L'adjudicateur fixe un délai pour l'inscription des entreprises.

Art. 8

Présentation de la soumission

1 Les documents mis à disposition des soumissionnaires doivent contenir tous les renseignements nécessaires au calcul de l'offre et à la détermination de l'effectif de main-d'oeuvre nécessaire pour accomplir les travaux sans recourir à des heures supplémentaires ou à de la main-d'oeuvre provenant hors du canton. Leur rédaction ne doit pas prêter à des interprétations divergentes et doit indiquer, lorsqu'il s'agit de marchés de fournitures ou de marchés de services, les dispositions de la présente loi qui ne sont pas applicables.

2 Sur demande de l'association professionnelle intéressée, les termes de la soumission peuvent être précisés.

3 Sur une pareille demande, il peut être procédé à une visite des lieux. Seules les entreprises ayant déjà retiré la formule de soumission y sont convoquées.

4 Les délais de soumission doivent être fixés de manière à donner aux soumissionnaires assez de temps pour calculer leurs offres avec soin. Le délai minimum est de 2 semaines.

5 S'il est donné suite à une demande de prolongation de délai ou d'informations complémentaires émanant d'un ou de plusieurs soumissionnaires, ceux-ci doivent tous en bénéficier.

Art. 9

Offres

1 Les offres doivent être établies sur formule officielle et parvenir sous pli fermé à l'adresse et pour la date et l'heure indiquées dans l'avis de soumission.

2 Au cas où les soumissionnaires estiment devoir formuler des réserves sur certains points, ces réserves doivent être présentées séparément, mais en même temps que la soumission et dans l'ordre des divers articles de la formule officielle.

3 La formule officielle est remise en double exemplaire aux soumissionnaires. Elle peut être obtenue gratuitement par les associations professionnelles intéressées.

Art. 10

Attestations

Soumissionnaires ayant adhéré à une convention collective de travail

1 Ne sont prises en considération que les soumissions accompagnées d'une attestation justifiant que les soumissionnaires sont affiliés à l'une des caisses de compensation prévues par la législation en matière d'assurance-vieillesse et survivants et qu'ils sont à jour avec leurs obligations envers elle.

2 Les soumissionnaires ayant adhéré à la convention collective de travail de leur profession principale, et affiliés de ce fait à la caisse de compensation reconnue par les partenaires sociaux signataires de la convention, doivent présenter l'attestation certifiant qu'ils sont à jour avec leurs obligations envers la caisse.

3 Pour être valables, les attestations visées aux alinéas 1 et 2 ne doivent pas être antérieures de plus de 15 jours à la date fixée pour le dépôt de la soumission. Les attestations sous forme de photocopie ne sont pas admises.

Art. 11

Soumissionnaires n'ayant pasadhéré à uneconvention collective de travail

1 Ne sont prises en considération que les soumissions accompagnées d'une attestation justifiant que les soumissionnaires sont affiliés à l'une des caisses de compensation prévues par la législation en matière d'assurance-vieillesse et survivants et qu'ils sont à jour avec leurs obligations envers elle.

2 Les soumissionnaires n'ayant pas adhéré à une convention collective de travail au sens des articles 356 à 362 du code fédéral des obligations doivent joindre à la soumission une attestation de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après: l'office) certifiant qu'ils ont signé un engagement de respecter les usages de leur profession.

3 Pour obtenir l'attestation prévue à l'alinéa 2, ils doivent:

a) prendre connaissance auprès de l'office des usages de leur profession;

b) signer à l'office un engagement officiel de respecter les usages de leur profession;

c) remettre à l'office, lors de la signature dudit engagement, une attestation de caisses de compensation (AVS-AI-APG et allocations familiales) et une attestation d'assurances sociales (notamment assurances frais médicaux et pharmaceutiques, perte de gains, prévoyance professionnelle complémentaire à l'AVS) certifiant qu'ils sont à jour avec leurs obligations envers les travailleurs;

d) respecter les usages de leur profession depuis la date à laquelle l'engagement a été signé.

4 Pour être valables, les attestations visées aux alinéas 1 et 2 ne doivent pas être antérieures de plus de 15 jours à la date fixée pour le dépôt de la soumission. Les attestations sous forme de photocopie ne sont pas admises.

5 L'office contrôle le respect des usages.

6 L'office perçoit un émolument par attestation délivrée.

Art. 12

Entreprises ayant leur siège horsdu canton

1 Ne sont prises en considération que les soumissions accompagnées d'une attestation justifiant que les soumissionnaires sont affiliés à l'une des caisses de compensation prévues par la législation en matière d'assurance-vieillesse et survivants et qu'ils sont à jour avec leurs obligations envers elle.

2 Dans la mesure où elles sont admises à soumissionner, les entreprises ayant leur siège hors du canton doivent joindre à la soumission une attestation de l'office certifiant qu'elles ont signé un engagement de respecter, à l'égard de leur personnel travaillant sur territoire genevois, soit les conditions de la convention collective de travail en vigueur à Genève dans la branche, soit les usages locaux.

3 Pour obtenir l'attestation prévue à l'alinéa 2, elles doivent:

a) prendre connaissance auprès de l'office des usages locaux de leur profession;

b) signer à l'office, au moment de la soumission, un engagement officiel de respecter, à l'égard de leur personnel travaillant sur territoire genevois, soit les conditions de la convention collective de travail en vigueur dans la branche à Genève, soit les usages locaux;

c) remettre à l'office, lors de la signature dudit engagement, une attestation de caisses de compensation (AVS-AI-APG et allocations familiales) et une attestation d'assurances sociales (notamment assurances frais médicaux et pharmaceutiques, perte de gains, prévoyance professionnelle complémentaire à l'AVS) certifiant qu'elles sont à jour avec leurs obligations envers les travailleurs;

d) renouveler à chaque soumission l'engagement défini sous lettre b.

4 Pour être valables, les attestations visées aux alinéas 1 et 2 ne doivent pas être antérieures de plus de 15 jours à la date fixée pour le dépôt de la soumission. Les attestations sous forme de photocopie ne sont pas admises.

5 L'office contrôle le respect des usages.

Art. 13

Ouverture des offres

1 A l'ouverture des offres, il est dressé un procès-verbal de l'opération et un tableau comparatif des différentes soumissions indiquant le total des prix de chacune de ces dernières.

2 Les intéressés ont la possibilité d'assister à l'ouverture.

Art. 14

Tableau des soumissions

1 Après l'ouverture des soumissions, celles-ci sont vérifiées et rapportées de telle manière que la comparaison soit possible et objective.

2 Lorsqu'un soumissionnaire omet un prix de la série, c'est le plus haut prix fixé par les concurrents qui est appliqué.

3 Après l'adjudication, les soumissionnaires et les associations professionnelles peuvent prendre connaissance, dans un délai de 10 jours, du procès-verbal et du tableau comparatif des soumissions.

Art. 15

Engagement

Sauf stipulation contraire du cahier des charges spécial au travail ou à la fourniture mis en soumission, les soumissionnaires sont liés par leurs offres pendant un délai de 30 jours à compter du jour de dépôt de la soumission.

Art. 16

Adjudications

1 L'adjudicateur choisit entre les soumissionnaires en tenant compte en premier lieu des objectifs fixés à l'article 1 de la présente loi et des éléments d'appréciations suivants:

a) prix permettant à un entrepreneur expérimenté et diligent de fournir un travail irréprochable, tout en assurant à ses travailleurs le salaire et les prestations sociales prévues à la convention collective de la profession ainsi qu'à lui-même le juste bénéfice auquel il peut prétendre, et tout en s'engageant, sauf cas de force majeure, à affecter au chantier un nombre suffisant de travailleurs pour accomplir les travaux sans recourir à des heures supplémentaires ou à de la main-d'oeuvre provenant hors du canton;

b) garantie de bienfacture, de solvabilité et de correction en affaires offerte par l'entrepreneur;

c) satisfaction donnée par celui-ci lors de travaux précédents;

d) rotation équitable entre concurrents;

e) préférence à accorder, toutes conditions équivalentes, aux entrepreneurs du canton. Le cas échéant, lorsque l'offre faite par l'entreprise étrangère au canton ne comporte qu'un avantage important en matière de prix et que cette différence résulte notamment des charges sociales et fiscales particulières supportées par l'entreprise genevoise, la préférence sera accordée à cette dernière.

2 L'adjudication est toujours faite aux prix de la soumission, sous réserve d'un redressement des erreurs de calcul qui peuvent apparaître lors de la vérification. Toutefois, lorsque l'adjudicateur est fondé à croire que les prix qui lui sont proposés par les soumissionnaires sont trop élevés, notamment à la suite d'une entente préjudiciable à ses intérêts, il peut demander des offres et adjuger le travail à des entreprises qui n'ont pas participé à la soumission. Dans ce cas, l'association professionnelle intéressée est informée.

3 L'adjudicateur peut, selon leur importance, subordonner l'adjudication de travaux ou fournitures à une entreprise étrangère au canton à la condition que celle-ci constitue une société anonyme avec siège à Genève ou déclare y constituer à ces fins un établissement stable.

4 L'adjudicateur peut adjuger l'ensemble des travaux en un seul ou plusieurs lots. Si cette dernière possibilité n'a pas été prévue dans l'appel d'offres, le soumissionnaire peut refuser l'adjudication. L'adjudicateur peut renoncer à une adjudication au cas où les offres reçues ne lui conviennent pas, éventualité dont il reste seul juge.

5 Peuvent être prises en considération des offres paraissant anormalement basses, lorsque les soumissionnaires ont pu justifier leurs prix par des circonstances spéciales indépendantes des salaires payés ou des conditions de travail imposées aux ouvriers. Dans ce cas, l'association professionnelle intéressée est informée et il est fait mention dans le contrat du motif de la prise en considération de l'offre.

Art. 17

Sous-traitance et fournitures

1 Les soumissionnaires doivent indiquer à l'adjudicateur, lors du dépôt des soumissions, le type et la part des travaux qui seront sous-traités ainsi que le nom de leurs sous-traitants. Ils doivent également indiquer le nom des fournisseurs importants.

2 L'adjudicateur peut exiger des soumissionnaires qu'ils lui fournissent, pièces justificatives à l'appui, toutes indications utiles quant aux conditions auxquelles ils envisagent de faire appel à des sous-traitants ou fournisseurs.

3 En principe, et sous réserve des dispositions de l'article 16, la préférence est donnée aux entreprises dont les sous-traitants et les fournisseurs répondent aux conditions fixées à l'article 3.

4 Les soumissionnaires doivent, avec leur soumission, fournir au département les attestations prévues aux articles 10, 11 et 12 pour leurs sous-traitants ou fournisseurs éventuels. Dans la mesure où la part revenant à un sous-traitant ou à un fournisseur est inférieure au 30% du montant de la soumission, les attestations peuvent n'être produites qu'une fois connue la décision d'adjudication. Le département décide à cette occasion s'il entend exiger ou non la communication des attestations requises et fixe, le cas échéant, un délai de 10 jours à cet effet à l'intention de l'adjudicataire.

5 Lorsque les circonstances le justifient, l'adjudicateur peut subordonner l'adjudication de travaux ou fournitures à une entreprise de la place à la condition que ses éventuels sous-traitants ou fournisseurs établis en dehors du canton constituent une société anonyme avec siège à Genève ou déclarent y constituer un établissement stable.

Art. 18

Offres à écarter

Sont écartées les offres:

a) qui ne répondent pas aux conditions de mise en soumission;

b) qui ne sont pas accompagnées des attestations prévues aux articles 10, 11, 12 et 17;

c) qui dénotent l'inexpérience ou le défaut de connaissances du soumissionnaire;

d) qui sont remises après le délai de dépôt des offres.

Art. 19

Collaboration avec les associations professionnelles

1 Au moment de la mise en soumission, l'adjudicateur remet sur demande particulière, aux associations professionnelles intéressées, un dossier de la soumission.

2 Sur demande de l'adjudicateur, les associations professionnelles intéressées peuvent être appelées à déposer une offre de base en même temps que les autres soumissionnaires.

3 De leur côté, les associations professionnelles intéressées peuvent présenter spontanément une offre normale de base.

CHAPITRE III

Dispositions finales

Art. 20

Adhésion à l'accord intercantonal

Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, à l'accord intercantonal.

Art. 21

Exécution

Le département des travaux publics et de l'énergie (ci-après le département) est chargé de l'exécution de la présente loi et du règlement d'exécution adopté par le Conseil d'Etat. Les collectivités publiques ou les établissements de droit public et autres maîtres d'ouvrages visés à l'article 2 mettent au point avec le département l'organisation de leurs soumissions pour assurer le respect des prescriptions de la présente loi. Il est tenu compte de la spécificité de chaque adjudicateur.

Art. 22

Conditions générales du contrat d'apprentisage

Les travaux adjugés en vertu de la présente loi sont, sauf exception admise par le département, soumis aux conditions générales du contrat d'entreprise édité par ce dernier.

Art. 23

Commission consultative

1 Il est institué une commission consultative présidée par le chef du département (ou son représentant) et composée de 3 membres et de 3 suppléants représentant les salariés et de 3 membres et 3 suppléants représentant les employeurs. Ils sont désignés par le chef du département sur proposition des organisations professionnelles intéressées. Des experts, choisis par chacune des deux organisations, peuvent participer aux réunions de la commission.

2 La commission est chargée d'examiner avec le département les questions de principe que pose l'application de la présente loi et de l'accord intercantonal. Elle peut être consultée sur la qualité des entreprises inscrites (art. 7) et peut également formuler à l'intention du département des observations sur les entreprises soumissionnaires après chaque ouverture de soumission publique.

3 La commission fixe elle-même ses règles d'organisation et de fonctionnement. Elle siège au moins quatre fois par an.

Art. 24

Contestations

1 A défaut d'entente avec le maître de l'ouvrage, les organisations professionnelles intéressées ou tout autre intéressé peuvent soumettre à l'appréciation du Conseil d'Etat les contestations résultant de l'application de la présente loi.

2 Les décisions du Conseil d'Etat peuvent être déférées devant le Tribunal administratif.

Art. 25

Dispositions pénales

1 Celui qui contrevient aux dispositions de la présente loi, notamment soit par des fausses déclarations, soit dans le but de provoquer des ententes et de fausser la concurrence, est passible des peines de police, sous réserve des peines plus élevées prévues par le code pénal.

2 Lorsqu'une infraction a été commise dans la gestion d'une personne morale, d'une société de personnes dépourvue de la personnalité juridique ou d'une maison à raison individuelle, les sanctions sont applicables aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir en son nom.

3 La personne morale, la société ou le propriétaire de l'entreprise individuelle répondent solidairement de l'amende et des frais.

Art. 26

Clause abrogatoire

La loi sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat, du 2 novembre 1892, est abrogée.

Art. 27

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur dès le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation, sous réserve de l'accord intercantonal, lequel entre en vigueur lors de la publication de la déclaration d'adhésion de la République et canton de Genève dans le Recueil officiel des lois fédérales.

Art. 2

Modifications à d'autres lois

  (E 3,5 1)

1 La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, est modifiée comme suit:

Art. 8, al.1, ch. 110° bis (nouveau)

  (D 1 9)

110° bis décisions du Conseil d'Etat prises en vertu de la loi sur les soumissions et adjudications publiques de l'Etat et des établissements publics.

** *

2 La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993, est modifiée comme suit:

Art. 52, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Un crédit d'investissement est autorisé sous forme de crédit d'ouvrage ou d'acquisition ou de crédit complémentaire pour des engagements entraînant des paiements au-delà de l'exercice budgétaire ou lorsque le montant des travaux dépasse 1 000 000 F.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La mise en soumission et l'adjudication de travaux par l'Etat et les corporations et établissements publics cantonaux s'effectue jusqu'à présent conformément au règlement édicté par le Conseil d'Etat le 9 janvier 1985 sur la base de la loi du 2 novembre 1892 sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat. Ce règlement consacre des dispositions mi-ses au point par les partenaires sociaux et le Conseil d'Etat, dont l'applica-tion a donné entière satisfaction et a permis de garantir une mise en concur-rence correcte des entreprises genevoises en les mettant sur un pied d'égalité, tout en assurant le respect des conventions collectives

Par son projet de loi 7293, le Conseil d'Etat demande au Grand Conseil de donner son accord à l'adhésion de notre canton à l'accord intercantonal sur les marchés publics, accord qui a pour but d'ouvrir les marchés publics aux entreprises d'autres cantons et de l'étranger, afin que nos pratiques soient en conformité avec l'Accord sur les marchés publics du GATT, auquel la Suisse a adhéré, ce qui a amené les Chambres fédérales à adopter le 16 décembre 1994 la loi fédérale sur les marchés publics qui a fixé un certain nombre de règles applicables aux marchés publics des cantons et des collectivités publiques.

Le système genevois en matière d'adjudications de travaux a donné largement satisfaction, tout en permettant une concurrence dans le cadre de règles mettant les entreprises sur un pied d'égalité et en ouvrant dans cer-taines circonstances les marchés à des entreprises hors du canton, précisé-ment lorsque la mise en concurrence l'exigeait.

La libéralisation des marchés préconisée par l'Accord du GATT vise à favoriser la concurrence et risque, même si cet accord ne s'applique qu'aux marchés d'une valeur supérieure à 10 000 000 F, de susciter une compétition exacerbée, surtout en période de crise, en provoquant des prix de dumping de la part de certaines grandes entreprises qui cherchent à s'approprier les marchés. Les vertus du libéralisme en matière économique avec une concurrence effrénée ont démontré leurs limites avec la disparition de multiples entreprises et les nombreuses suppressions d'emplois qui en ont résulté.

C'est la raison pour laquelle le maintien du système actuel d'adjudi-cations s'impose pour les marchés non soumis à l'Accord du GATT, qui sont la grande majorité d'entre eux. Il est dès lors incompréhensible que le Con-seil d'Etat, au moment où il soumet à l'approbation du Grand Conseil l'accord intercantonal sur les marchés publics, propose simultanément l'abrogation de la loi centenaire sur les soumissions et adjudications publi-ques qui vise à mettre les entreprises sur un pied d'égalité et garantir le res-pect des conventions collectives. L'abrogation de cette loi entraînera, en effet, l'abrogation du règlement sur les soumissions et les adjudications publiques, qui n'aura plus de base légale.

Le présent projet de loi a pour but de transformer le règlement précité en une loi, tout en prévoyant l'adhésion du canton de Genève à l'accord intercantonal sur les marchés publics. A cet égard, le projet de loi prévoit que les dispositions retenues pour les soumissions seront applicables aussi bien aux marchés publics soumis à cet accord qu'à ceux qui ne lui seront pas soumis, les dispositions prévues étant compatibles avec l'article 11 dudit accord, lequel prévoit que lors de la passation de marchés, le respect des dispositions relatives à la protection des travailleurs et aux conditions de travail doit être garanti.

La loi s'appliquera par ailleurs à l'ensemble des collectivités publiques cantonales, afin d'une part de réaliser déjà sur le plan cantonal l'uniformité souhaitée sur le plan national, et d'autre part de garantir dans certains secteurs la mise en concurrence souhaitée, qui fait effectivement défaut, ce qui a provoqué certains abus mal perçus par la population.

Les articles 3 à 24 du projet de loi reprennent sans changement les articles 3 à 25 du règlement du Conseil d'Etat du 9 janvier 1985, sous ré-serve de 2 modestes compléments (engagement des adjudicataires de ne pas effectuer, sauf urgence, des heures supplémentaires et institution d'une voie de recours auprès du Tribunal administratif).

Quant aux articles 1 et 2, ils reprennent, en ce qui concerne le champ d'application de la loi, la notion de marchés telle que définie à l'article 6 de l'accord intercantonal et, en ce qui concerne les objectifs de la loi, ceux qui existent déjà dans le règlement du Conseil d'Etat complétés par ceux de l'accord intercantonal, notamment en ce qui concerne l'égalité de traitement entre hommes et femmes. Un objectif supplémentaire a été ajouté, celui selon lequel les adjudications de travaux doivent favoriser le maintien et la création d'emplois, notamment en procédant à l'adjudication de travaux à des entreprises disposant d'effectifs de main-d'oeuvre suffisants pour accomplir les travaux, sans recourir à des heures supplémentaires ou à de la main-d'oeuvre provenant hors du canton.

Il n'est pas inutile de relever, au moment où les pouvoirs publics consacrent des sommes importantes à la relance, en donnant notamment la priorité aux investissements dans le domaine de la construction, que ces in-vestissements doivent être le plus productif possible. Or, on constate cette absurdité que nombre d'entreprises, au lieu d'engager du personnel ou de partager le travail avec d'autres entreprises dans le cadre de chantiers dépas-sant leurs possibilités, recourent à des heures supplémentaires de la part de leur personnel, ce qui va à l'encontre d'une politique de création d'emplois.

L'Etat est non seulement en mesure de promouvoir une autre politique, mais se doit de le faire en période de crise s'il veut que ses crédits affectés à la relance rapportent tous les résultats escomptés. C'est la raison pour laquelle le présent projet de loi confirme que les travaux subventionnés par l'Etat sont soumis aux mêmes règles, y compris dans le domaine du logement, tout en fixant un seuil minimum de 10% de la valeur des travaux en ce qui concerne le montant de la subvention provoquant l'assujettissement d'un marché à la présente loi.

Nous espérons que ce projet de loi recevra, Mesdames et Messieurs les députés, un accueil favorable de votre part.

Préconsultation

M. Christian Grobet (AdG). Notre groupe avait fait part de ses préoccupations au moment où notre Grand Conseil a été saisi du projet de loi portant sur l'approbation d'un concordat intercantonal concernant les problèmes de soumissions et d'adjudications.

En effet, ce projet de concordat vise à donner suite à l'accord du GATT devenu l'OMC, Organisation mondiale du commerce, qui a été signé par la Suisse, et porte, notamment, sur les marchés publics. Il est vrai que la législation suisse doit être adaptée à cet accord.

Compte tenu du fait que les marchés publics en matière de construction sont le fait des cantons, on ne peut pas se contenter d'une adaptation de la législation fédérale, mais il convient d'adapter la législation cantonale. Dans ce cas, il est probablement judicieux de trouver un texte commun à cet égard pour l'ensemble des vingt-cinq cantons suisses.

Mais je désire rappeler que l'accord sur l'OMC ne s'applique qu'aux marchés d'une valeur dépassant une somme de l'ordre de 10 millions de francs suisses, et que, par voie de conséquence, les cantons restent souverains pour les marchés publics d'une valeur inférieure à 10 millions.

Le projet de loi saisissant le Grand Conseil du projet d'accord intercantonal prévoit l'abrogation de l'ancienne loi du 2 novembre 1892 relative aux soumissions et adjudications publiques. Certes, cette loi de 1892 ne comporte qu'un article relativement bref, mais il faut savoir qu'un important règlement a été adopté sur la base de cette loi qui sert à régler le problème des soumissions et des adjudications.

A partir du moment où la loi de 1892 est abrogée, le règlement disparaît ipso facto. Il est vrai que le Conseil d'Etat pourrait adopter un nouveau règlement sur la base d'un accord intercantonal lorsque celui-ci aura été approuvé. Mais il nous paraît plus logique d'introduire ce règlement dans la loi, ce qui aurait déjà dû être fait. En effet, sur le plan juridique, il n'est pas normal qu'une loi ne comporte qu'un seul article et qu'un règlement d'une vingtaine d'articles soit adopté sur cette base.

A travers notre projet de loi, nous proposons de reprendre les dispositions du règlement actuel adopté sur la base d'un texte mis au point d'un commun accord entre l'Etat, les syndicats patronaux et les syndicats ouvriers, et qui avait fait l'objet d'un consensus avec les partenaires sociaux. Nous proposons qu'il soit repris sous forme de projet de loi et complété par une ou deux autres dispositions.

Il est difficile de traiter ici des questions techniques. Nous demandons que ce projet de loi soit renvoyé à la même commission qui s'occupe déjà du projet d'accord intercantonal.

M. Olivier Vaucher (L). Le projet de loi qui vous est proposé est inutile, et nous soupçonnons même ses auteurs de faire de la démagogie !

Les accord du GATT portant sur l'ouverture des marchés publics de la construction, de fournitures et des services, sont entrés en vigueur le 1er janvier 1996. Leur intégration dans l'ordre juridique suisse est complexe. Toutes les commandes publiques de la Confédération et de ses régies font l'objet d'une loi fédérale et d'une ordonnance entrée en vigueur le 1er janvier 1996. L'ouverture des marchés publics cantonaux est réglée par un concordat intercantonal ouvert depuis quelques mois à la procédure d'adhésion. En vertu du principe de la réciprocité, cet accord entrera en vigueur seulement entre les cantons qui l'auront formellement ratifié. Il le sera probablement par tous les cantons suisses d'ici la fin de l'année.

Le Conseil d'Etat a déposé le projet de loi 7293 autorisant le canton à adhérer précisément à l'accord intercantonal sur les marchés publics. Notre Conseil a renvoyé cet objet à la commission des travaux, lors de sa séance des 9 et 10 novembre 1995. Il l'a examiné en détail et a procédé notamment à l'audition des partenaires sociaux de l'industrie et de la construction.

Parallèlement aux travaux de notre commission parlementaire, le département des travaux publics et de l'énergie prépare un règlement d'application détaillé avec les partenaires sociaux. La Confédération et les cantons sont tenus d'appliquer les principes de l'accord du GATT en dessus d'un certain seuil, soit environ 10 millions pour la construction. Je vous rappelle que cette ouverture repose sur plusieurs conditions impératives, telles que :

Premièrement, la réciprocité.

Deuxièmement, l'application des conditions de travail, conditions sociales, d'hygiène et de sécurité sur le lieu de la prestation, c'est-à-dire le chantier.

Troisièmement, l'interdiction des «rondes» de prix après ouverture publique, afin d'éviter les pratiques mafieuses.

Le principe de l'adjudication des travaux à l'entreprise présentant l'offre économiquement la plus avantageuse, et non pas aux moins-disantes, il va de soi que les Etats signataires des accords du GATT doivent l'appliquer en dessus des seuils. En revanche, les maîtres d'ouvrage public ont la possibilité de pratiquer une politique de soumissions et d'adjudications relativement indépendante en dessous de ce seuil.

Contrairement aux obligations de la loi fédérale sur le marché intérieur, LMI, le projet de loi du Conseil d'Etat prévoit, d'ailleurs, la possibilité de réglementer la passation des marchés publics non soumis à l'accord intercantonal.

C'est la raison pour laquelle le règlement d'application, actuellement en chantier, permettra de distinguer la politique de soumissions et d'adjudications en dessus et en dessous des seuils du GATT. Patronat et syndicat de la construction n'ont aucune envie de brader les entreprises et les emplois, surtout dans la conjoncture actuelle. Ils n'ont pas du tout l'intention de se poser en victime expiatoire d'un libéralisme économique pur, dur et débridé.

Pour eux, les principes de la réciprocité, de l'application des conditions de travail, de salaire, d'hygiène sur le chantier, sont absolus. Les travaux non soumis aux accords du GATT doivent être, en priorité, adjugés dans le cadre d'une concurrence saine aux entreprises locales qui paient leurs impôts sur place et sont actives dans la formation professionnelle.

En ce sens, le projet de loi de nos collègues de l'Alliance de gauche ne correspond pas, sur tous les points, aux exigences des accords du GATT. Il est inutile, puisque tant le projet de loi du Conseil d'Etat que le règlement d'application donneront toutes les garanties pour sauvegarder l'outil de travail et les emplois offerts par les entreprises locales.

Durant plus de dix ans, à la présidence du DTP, le député Christian Grobet s'est contenté d'un règlement de soumissions et d'adjudications. Pourquoi diable veut-il soudain transformer une loi qui ne tient même pas compte des accords internationaux ? Pourquoi cette défiance à l'égard des syndicats et des partenaires sociaux qui sont mieux placés pour savoir ce qui est bon pour eux ? En voulant s'ériger en champion de la défense des entreprises du bâtiment et des travailleurs de la construction, l'Alliance de gauche s'est trompée d'objectif. A l'exception d'une intention démagogique, nous ne comprenons pas les raisons qui ont motivé le dépôt de ce projet de loi qui, selon le parti libéral, devrait purement et simplement être rejeté, car il n'apporte aucun élément nouveau ni digne d'intérêt à la commission des travaux.

Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Contrairement à M. Vaucher, je ne pense pas que l'Alliance de gauche se soit trompée d'objectif en déposant ce projet de loi. Les avis sur la pertinence et les conséquences possibles des accords du GATT concernant Genève ont déjà été largement exprimés ici en novembre dernier, lors de l'examen du projet de loi du Conseil d'Etat l'autorisant à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics.

Comme dans le cadre d'autres débats où une loi fédérale s'impose, la loi sur le chômage ou sur le travail par exemple, les cantons n'ont plus que leurs yeux pour pleurer. Le projet de loi de l'Alliance de gauche tente de limiter les dégâts et les dérapages possibles, lors de l'ouverture des marchés publics. Si l'accord intercantonal est accepté, la loi de 1892 sur les soumissions sera abrogée. Dommage, car voilà une loi intéressante et telle que les syndicats les aiment ! Elle ne comporte qu'un article essentiel : «Les soumissions desdits travaux doivent porter acceptation des tarifs de salaire adoptés contradictoirement par les associations des patrons et des ouvriers pour les professions dans lesquelles les tarifs existent.» L'abrogation de cette loi entraînera la suppression du règlement L 6 2, lequel semblait satisfaire tant l'Etat que les partenaires sociaux.

Le groupe socialiste ne refuse pas d'inscrire l'actuel règlement dans le texte de loi, du moment que le principe de la commission consultative est gardé. De plus, les dispositions réglementaires permettant l'application des usages professionnels ou des conventions collectives de travail sont reprises dans le projet de loi 7416, ainsi que les critères permettant d'évaluer la fiabilité ou la viabilité de l'entreprise soumissionnaire.

Le garde-fou concernant les heures supplémentaires, et figurant à l'article 16 de ce projet de loi, est louable, bien que ce problème se pose plutôt lors d'adjudications privées. Les quelques cas d'heures supplémentaires effectuées lors de travaux publics ont été souvent le fait d'une lenteur excessive des politiques tardant à prendre des décisions; les chantiers devaient ensuite compenser le temps perdu.

La grande innovation apportée par ce projet de loi est la mise sous tutelle que le département pourrait opérer vis-à-vis des communes, même pour des travaux relativement mineurs. En effet, actuellement, les communes élaborent leurs propres règles d'adjudication. Certaines jouent le jeu; d'autres favorisent la politique des «petits copains». Les mesures de contrôle proposées dans ce projet de loi soumettent toute règle d'adjudication à l'approbation du Conseil d'Etat, et ce point mérite à notre avis une attention particulière des commissaires.

De même, tout marché de construction, dont la valeur présumée dépasse le montant de 50 000 F et bénéficiant ainsi d'une aide financière de l'Etat de 1%, soit 500 F au minimum, serait soumis aux dispositions de ce projet de loi. La commission consultative prévue sera obligée de siéger - je le crains - tous les jours; et l'office cantonal de l'inspection des relations du travail devra au moins doubler son effectif ! Je tiens tout de même à signaler que les membres de la commission tripartite L 6 2 travaillent depuis plusieurs mois sur l'adaptation de ce règlement et sur l'accord intercantonal concernant les marchés publics. Etant donné qu'ils n'ont pas été consultés sur l'élaboration de ce projet de loi, il serait bienvenu de les auditionner, lors des travaux en commission. Le groupe socialiste soutiendra le renvoi en commission de ce projet de loi.

M. Chaïm Nissim (Ve). A l'instar du groupe socialiste, le mien soutiendra le renvoi en commission de ce projet de loi. Vous me faites rire, Monsieur Vaucher, car après l'avoir déclaré inutile, vous en reprenez - pour l'essentiel - les mêmes idées ! Votre proposition d'attribuer les marchés de moins de 10 millions en priorité à des entreprises locales correspond exactement au projet de loi de l'Alliance de gauche; vous êtes donc totalement d'accord avec eux ! Le seul petit problème vient du fait que ce sont eux qui ont déposé ce projet de loi, et pas vous !

Mais le groupe écologiste, lui, a d'autres problèmes que M. Vaucher et les auteurs de ce projet de loi. Il faut, en effet, remettre en question - les intervenants précédents ne l'ont pas fait - le protectionnisme qui a coûté très cher aux contribuables genevois, et souligner également que cette manière de procéder ne favorise peut-être pas le progrès technique; nous étudierons cette question en commission.

D'autre part, les auteurs de ce projet de loi ont été contraints d'attendre quatre mois en piaffant d'impatience à cause du fonctionnement de ce Grand Conseil; c'est regrettable ! La commission des travaux aurait dû procéder plus intelligemment en étudiant simultanément les deux projets concernant les travaux supérieurs et inférieurs à 10 millions.

M. Pierre Meyll (AdG). Nous sommes, il est vrai, en préconsultation, mais j'aimerais m'exprimer au nom de la minorité...

Le président. Je vous en prie, Monsieur Meyll !

M. Pierre Meyll. Non, c'est la minorité !

Le président. Non, Monsieur le député Meyll !

M. Pierre Meyll. Non, c'est la minorité de la commission des travaux, et je lui avais demandé d'attendre que ce projet de loi puisse être traité en parallèle...

Le président. Monsieur Meyll, nous sommes effectivement en procédure de préconsultation, et un seul député par groupe politique s'exprime...

M. Pierre Meyll. J'aimerais mentionner quelque chose d'inacceptable qui s'est passé lors de la commission des travaux...

Le président. Monsieur le député, vous vous exprimerez lorsque...

M. Pierre Meyll. Non, je continuerai même sans micro, s'il le faut, mais je dirai ce qui se passe à la commission des travaux !

Le président. Monsieur le député, je vous demande de respecter le règlement !

M. Pierre Meyll. Non, considérant que c'est inacceptable, en l'occurrence je ne respecterai pas le règlement ! (Brouhaha.) Je le répéterai sans cesse !

Le président. Monsieur le député, je resterai ferme, et je vous demande de respecter le règlement comme nous l'avons toujours fait !

M. Pierre Meyll. Je respecte le règlement, mais je voudrais contester ce qu'a fait le député Vaucher !

Le président. Monsieur le député, je vous demande de vous asseoir !

M. Pierre Meyll. Je regrette, je ne m'assiérai pas avant que vous ne me laissiez exprimer la vérité au sujet de la commission des travaux !

Le président. Monsieur le député, je vous demande de vous asseoir une dernière fois !

M. Pierre Meyll. Il est exclu que je m'asseye !

Le président. La séance est suspendue, nous reprendrons les débats à 17 h 15 !

M.  Pierre Meyll. Mais ça ne fait rien ! Il n'y a pas de raison ! Pourquoi certains disent-ils n'importe quoi sans que nous puissions répondre !

La séance est suspendue à 16 h 55.

La séance est reprise à 17 h 15.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. (Brouhaha.) J'aimerais vous demander de prêter toute votre attention à ce dossier très important. Le projet de loi de MM. Grobet, Spielmann et Ferrazino... (Brouhaha.) ...reprend mot à mot les dispositions du règlement L 6 2 pour les incorporer dans une loi, tout en prévoyant l'adhésion du canton de Genève à l'accord intercantonal sur les marchés publics. Or la législation genevoise actuelle est incompatible avec les principes de l'AINP, et il est illusoire... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur le conseiller d'Etat, exprimez-vous; nous passerons la parole tout à l'heure à Mme Maulini-Dreyfus !

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Il est tout à fait illusoire de vouloir la maintenir tout en adhérant à ce concordat. Ce projet de loi est donc non conforme à l'accord intercantonal : il ignore totalement les directives d'exécution transmises aux cantons par la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics et la Conférence des chefs des départements cantonaux de l'économie publique, auteurs du concordat. Seul le respect de ces directives permettrait une mise en application de l'accord intercantonal, déjà voté par six cantons, et reposant sur le principe de la réciprocité des pratiques cantonales.

Au surplus, ce projet de loi n'est pas compatible avec les dispositions fédérales sur le marché intérieur, et cette loi entre en vigueur le 1er juillet 1996. La souveraineté cantonale existe effectivement - M. Grobet a tout à fait raison - pour les marchés inférieurs à 10 millions qui ne concernent pas la Confédération. Il faudra donc intégrer cet important aspect juridique dans le dispositif général réglant les adjudications et les soumissions concernant le canton de Genève, que le montant soit supérieur ou inférieur à 10 millions. Notre proposition est donc de revenir devant le Grand Conseil avec l'ensemble du dispositif juridique, une fois le puzzle assemblé. Je vous rappelle que les cantons en train de voter l'accord intercantonal ont des seuils souvent très différents. A Saint-Gall, par exemple, selon la proposition du Conseil d'Etat, ce seuil était de 1,2 million, mais, après trois heures de débat, il a été fixé à 1,5 million. Cela vous donne une idée de l'appréciation des différents parlements et exécutifs cantonaux sur l'évolution du marché de la construction.

Certains cantons sont disposés à s'ouvrir - sans la garantie de la réciprocité - selon les seuils en vigueur dans d'autres cantons; comme ils peuvent être extrêmement bas, cela laisse songeur ! Il ne s'agit pas pour le gouvernement de l'Etat de Genève de proposer un seuil inférieur aux seuils officiels, dont on a abondamment discuté avec la commission L 6 2 et les différents organes compétents. Mais, malgré tout, on constate qu'il faut absolument aller du général au particulier et régler d'abord la question des accords intercantonaux pour adapter le reste ensuite.

J'aimerais rappeler que le canton de Genève est le seul en Suisse à disposer d'un système de contrôle du dispositif d'adjudications et de soumissions sur la base d'une commission tripartite et que ce système fonctionne parfaitement. Il permet de régler les litiges de façon «sainement conflictuelle». Malheureusement, ce projet de loi, intéressant en soi, est inopportun, compte tenu du projet de loi 7293 et des travaux en cours au sein de la commission L 6 2. Il est non conforme à l'accord intercantonal, non conforme à ses directives d'exécution et non conforme à la loi fédérale sur le marché intérieur.

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Monsieur le président, je souhaite parler des contacts que vous entretenez avec ce parlement. Nous avons beaucoup de retard dans l'ordre du jour, mais vous refusez systématiquement de fixer une séance supplémentaire. Lorsque cinquante députés signent une demande de séance, vous la fixez à une heure impossible pour la plupart des gens en leur compliquant la vie. En séance, vous nous infligez une petite punition supplémentaire en n'envisageant qu'une seule et unique séance, avec des suspensions de séance. Vous supprimez les séances levées, les nouvelles séances, les nouvelles signatures... A quoi jouez-vous avec les députés ? (Applaudissements.)

M. John Dupraz (R). Voilà déjà un moment que j'use mes fonds de pantalon sur ces bancs du Grand Conseil, mais je n'ai jamais vu - malgré l'amitié que j'ai pour vous, Monsieur le président - un président agir de façon aussi autoritaire ! C'est la coutume, lors de la pause, de signer une deuxième fois. Vous vous moquez du monde ! Vous n'avez pas à agir comme le président d'une «république bananière». Respectez le travail de vos collègues ! Je demande une deuxième signature !

Le président. Il s'agit d'une motion d'ordre, elle doit être appuyée par les deux tiers des députés présents. Nous allons voter.

La motion d'ordre est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Les deux tiers requis n'étant pas atteints (35 oui contre 30 non), la motion d'ordre est rejetée.

Le président. Je tiens à vous dire que le Bureau a décidé - compte tenu de l'ordre du jour - d'attribuer une indemnité conformément à l'article 47 de l'ordre du jour si nos travaux se poursuivent au-delà de 19 h.

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). J'ai interrogé des membres de votre Bureau pendant la pause; ils sont perplexes. (Brouhaha.)

Le président. Bien, nous poursuivons nos travaux.

M. Michel Balestra (L). Je suis désolé, Messieurs, de votre attitude face à un problème aussi dérisoire. (Brouhaha.) Pour 150 F, vous vous montrez indisciplinés... (Brouhaha.) ...et face aux problèmes auxquels Genève est confrontée actuellement, je trouve votre réaction lamentable ! (Brouhaha. Applaudissements.)

Ce projet est renvoyé à la commission des travaux.