Séance du
vendredi 1 décembre 1995 à
17h
53e
législature -
3e
année -
2e
session -
53e
séance
M 1029
LE GRAND CONSEIL,
vu la volonté exprimée par la direction des Transports publics genevois (TPG) d'augmenter le prix de ses cartes de libre parcours;
vu l'importance que revêtent ces abonnements quant à l'attractivité des TPG et la politique de l'Etat visant à favoriser l'utilisation des transports publics, telle qu'elle est inscrite à l'article 160 A de la constitution adopté par le Grand Conseil dans sa séance du 8 juin 1995, qui sera prochainement soumis en votation populaire;
vu l'alinéa 1er de cet article constitutionnel qui dispose à cet effet que les TPG ont notamment pour but de mener, avec l'aide de l'Etat, une politique tarifaire incitative,
invite le Conseil d'Etat
à intervenir auprès de la direction des TPG pour qu'elle renonce à l'augmentation envisagée du prix de ses cartes de libre parcours ou
à adapter, si nécessaire, le montant de la subvention annuelle versée aux TPG telle qu'elle figure au projet de budget de l'Etat pour 1996 afin d'éviter une telle hausse.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'introduction en 1986 de la carte de libre parcours des TPG pour 45 F par mois a eu un effet fantastique sur l'augmentation du nombre des passagers des TPG et le développement souhaité des transports publics. Mal-heureusement, l'attractivité des cartes de libre parcours a diminué au fil des années à la suite des augmentations successives du tarif de celles-ci et une nouvelle augmentation (annoncée par la presse), après celle du début de l'année dernière qui a intégré la TVA, risque de rendre ces cartes dissuasives, surtout en raison de l'importance de la hausse envisagée qui ferait passer le prix de la carte orange de 60 F à 70 F par mois (17% de hausse !).
Cette augmentation du prix des cartes de libre parcours est d'autant plus malvenue qu'elle est en contradiction totale avec la politique des transports de l'Etat telle que concrétisée dans le nouvel article constitutionnel voté par le Grand Conseil le 8 juin 1995 à titre de contreprojet à l'initiative 103 «Des transports publics au service de la population», dont l'un des objectifs était précisément de «fixer clairement la volonté d'assurer à la population des offres d'abonnements à des prix favorisant le choix du transport public». La volonté de concrétiser cette initiative populaire a amené le Grand Conseil à compléter l'article 160 A nouveau de la constitution d'une disposition indiquant que les TPG ont notamment pour but de mener, avec l'aide de l'Etat, une politique tarifaire incitative.
L'augmentation du prix des cartes de libre parcours irait directement à l'encontre de cet objectif et de celui, inscrit dans le même article, en vertu duquel la politique de l'Etat doit favoriser l'utilisation des transports publics. C'est la raison pour laquelle la présente motion invite le Conseil d'Etat à faire le nécessaire pour que les tarifs des cartes de libre parcours des TPG ne soient pas majorés.
Pour toutes ces raisons, les motionnaires vous prient, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir accueillir favorablement la présente proposition.
Débat
M. Pierre Vanek (AdG). Vous me voyez emprunté pour défendre une motion qui, d'évidence, parle d'elle-même !
La direction des TPG a proposé de faire passer de 60 à 70 F le prix de la carte orange des TPG, l'abonnement le plus prisé des usagers. Cette hausse de 17%, considérable dans une conjoncture où l'on constate, depuis quelques années, un plafonnement, voire une décroissance légère, de l'utilisation des transports en commun, est de nature à diminuer encore leur fréquentation. Elle va à l'encontre de la volonté collective qui s'est exprimée, à maintes reprises, dans cette enceinte, notamment avec le débat sur l'initiative 103. Nous avions accepté un contreprojet qui demandait aux TPG de pratiquer, avec l'aide de l'Etat, une politique tarifaire incitative.
Cette disposition constitutionnelle sera soumise en votation au début de l'année prochaine, et il y aurait une ironie acerbe à demander à nos citoyens de l'approuver si, dans les faits, la politique tarifaire incitative préconisée se traduisait par : «Débrouillez-vous sans recourir aux transports publics !». Par conséquent, je vous invite à accepter cette proposition de motion.
N'étant pas intervenu sur le rapport de gestion 1994 des TPG, je me permets d'ajouter un commentaire à propos de cette motion. La dernière fois que j'ai parlé tarifs, c'était en relation avec la pétition déposée par le parlement des jeunes pour protester contre l'augmentation de 40% du titre de transport. M. Froidevaux hoche la tête; il se rappelle s'être évertué à m'expliquer la nécessité de la hausse de ce billet à demi-tarif.
Or, en consultant le rapport de gestion 1994 présenté par les TPG, on constate de 1993 à 1994, soit au moment de l'application de cette hausse de 40%, une perte de fréquentation, elle aussi, de 40%. L'effet «voyageurs» sur ce poste comptable correspond à la décroissance générale de 17% et quelque.
Sur le plan de l'équilibre des comptes des TPG, cette opération a donc été totalement négative. Par conséquent, je crains que la hausse du prix de la carte orange ne coïncide, strictement sur le plan financier, avec une baisse des recettes, ce qui serait contraire à l'objectif des TPG.
Aussi je vous propose d'approuver cette motion, totalement cohérente avec ce que nous avons discuté et décidé depuis longtemps, dans ce parlement, en matière de promotion des transports publics.
M. Jean-Claude Genecand (PDC). Messieurs les motionnaires, vous êtes semblables à des propagandistes de sectes qui choisissent dans les Ecritures ce qui les arrange. Quant à vous, vous ne retenez que ce qui vous dérange dans les propositions des TPG.
Vous parlez de l'augmentation du prix de la carte orange, mais vous omettez de préciser que le conseil d'administration des TPG a pris une autre décision qui est d'accorder un rabais «multipack» en faveur des familles. Cette offre va pratiquement annuler l'augmentation de la carte orange pour une famille qui avait l'habitude d'acheter trois abonnements.
En effet, un rabais de cinq francs est accordé sur chaque carte, en fonction des catégories des bénéficiaires, cela sans attestation de revenus ou de tout autre renseignement.
Une augmentation n'est jamais agréable, mais admettez que les TPG n'ont pas pratiqué une politique linéaire en fait de hausses, puisque jeunes et vieux ne les subiront pas.
Vous dénoncez cette augmentation de près de 17%. Là encore, vous oubliez de dire qu'en une décennie les augmentations n'ont pas excédé 5% l'an, et cela en partant d'un prix extrêmement bas.
Bien que M. Spielmann soit absent ce soir, je voudrais lui rappeler un autre point important. Il a négocié le contrat de prestations et l'a défendu avec l'opiniâtreté qui le caractérise. Celui-ci confère aux TPG une autonomie de trois ans pour le premier cycle et de quatre ans ensuite. Le Conseil d'Etat ayant accepté un budget quadriennal, il ne peut le remettre en question en cours d'exercice.
Dès lors, comment pensez-vous que ce Grand Conseil puisse interférer dans le budget des TPG sans déresponsabiliser une direction dont le défi est d'assumer une gestion autonome ?
Comme vous le savez certainement, les TPG nous présenteront un budget déficitaire de 4,3 millions. Les recettes, à fin septembre 1995, sont en décrue de 2,3%, soit l,4 million. Le Conseil d'Etat a bloqué la subvention annuelle à 102 millions pour les trois prochaines années. C'est dire que votre proposition de réduire une recette aggraverait une situation financière déjà déficitaire.
Ma position n'est pas très populaire : soutenir une augmentation d'un service public est mal ressenti par l'opinion. Mais l'augmentation de la carte orange touche des gens actifs, qui peuvent absorber cette hausse.
J'ai toujours défendu le développement des TPG. Or, de lourdes échéances nous attendent. Ces dix prochaines années, l'Etat devra trouver 650 millions pour le développement des TPG. Je m'interdis donc de faire chorus avec ceux qui disent «nia qua». Les moyens de l'Etat étant ce qu'ils sont, on ne peut, à la fois, lui demander de chercher à réduire les déficits et d'augmenter sa subvention aux TPG pour surseoir à la hausse de la carte orange.
Notre groupe ne s'oppose pas au renvoi de cette motion à la commission des transports, mais il le fait sans enthousiasme.
M. Pierre Froidevaux (R). Messieurs les motionnaires, votre texte est très agréable à lire. On regarde le titre, le nom des auteurs... et tout est dit, connu, compris !
Beaucoup connaissaient la motion et ses auteurs avant même que vous l'ayez écrite, Messieurs, tant vos réflexes sont pavloviens ! La régie des TPG parle d'une adaptation tarifaire et, immédiatement, vous réagissez, mus par un réflexe spinal, sans passer par le cortex, pour crier au scandale.
Pourtant, Monsieur Spielmann, qui rappelez le prix de votre travail dans cette enceinte et à l'extérieur, ne pensez-vous pas qu'il vous faut aussi du courage pour présenter votre ardoise à vos propres clients et pas seulement à ce parlement ? Depuis le temps que vous nous donnez des leçons d'économie, nous supposions que vous aviez compris que la comptabilité tient à l'équilibre entre deux colonnes, l'une des dépenses et l'autre des recettes. En dehors de cet équilibre, établi par des mathématiques élémentaires, ne dépassant pas les niveaux de l'addition et de la soustraction, je reconnais, Monsieur Vanek, qu'il faut parfois plus de réflexion.
Effectivement, le demi-tarif, passé de 50% à 40%, a réduit la valeur des recettes, mais a augmenté d'autant le nombre de carte orange. Une meilleure fidélisation et un meilleur emploi des TPG s'en sont suivis. Pour équilibrer les comptes, il faut donc considérer l'ensemble du budget. Sans cet équilibre, il n'y aura pas d'avenir pour les employés des TPG que vous croyez soutenir.
Par conséquent, ce débat n'a pas à être poursuivi plus avant en commission, et il est plus judicieux de vous répondre non, tout simplement !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Ce n'est pas nous qui refuserons cette proposition de motion. C'est pourquoi nous demandons son renvoi en commission.
La carte orange, produit fétiche des TPG, est vendue, chaque mois, à environ cinquante mille exemplaires.
Le choix politique avait consisté à fixer un prix unique pour ce type de carte, alors qu'autrefois, Monsieur Genecand, il existait plusieurs prix correspondant à différentes cartes, dont la carte «famille». Nous revenons donc à ce à quoi nous avions renoncé.
M. Jean-Claude Genecand. Non, non !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey. Parfaitement, Monsieur Genecand ! Aujourd'hui, nous nous inquiétons de cette volonté d'augmenter de dix francs ladite carte orange, cela pour deux raisons :
1. Le prix de la carte orange doit rester incitatif, de manière à encourager, autant que faire se peut, l'utilisation des transports en commun. Il en va de la qualité de la vie en ville;
2. Nous risquons de casser le processus du succès en augmentant le prix de la carte orange. N'oubliez pas que les usagers n'acceptent pas d'aller au-delà d'un seuil critique ! Le fait a été constaté lors de l'augmentation des abonnements demi-tarif des CFF. La hausse ayant été trop forte, la chute des abonnements l'a été d'autant. C'est ce que nous risquons avec l'augmentation de cette carte orange.
Nous refusons de prendre le risque d'une Genève «tout-voiture». Nous avons dit et redit ce que nous voulons : ne pas remettre en cause l'encouragement à utiliser des moyens de transport respectueux de l'environnement. C'est pourquoi cette motion doit être discutée en commission, car les enjeux sont importants.
M. Andreas Saurer (Ve). Je reviens sur votre intervention, Monsieur Froidevaux. Certes, l'imprévisibilité et l'originalité ne font guère partie des propos tenus dans cette enceinte. Votre discours résulte plus du réflexe spinal auquel vous faisiez allusion, certainement acquis lors de votre défilé militaire, avec votre ami Duchosal, que d'une saine réflexion basée sur le libre arbitre et la liberté de choix !
Cela dit, je voudrais intervenir sur le fond du problème, à savoir la carte orange et l'augmentation de son prix.
Messieurs Froidevaux et Genecand, vous expliquez que l'on compense cette augmentation et vous parlez de fidélisation. Prenons les chiffres communiqués par la direction commerciale des TPG : quatre cent mille cartes orange passent de soixante à septante francs; cela fait, au total, un surplus de quatre millions; dix mille cartes annuelles passent de six cents à sept cents francs, cela représente un gain supplémentaire d'un million. Par ces mesures, nous totalisons un surplus théorique de cinq millions, mais le surplus réel est seulement de deux millions. Pourquoi ? Les forfaits familiaux viennent en déduction, certes, mais le plus important est que la direction des TPG compte voir diminuer l'utilisation des transports en commun. Et c'est comme cela que nous arrivons non pas à un surplus de cinq millions mais seulement de deux millions.
C'est grave. Cela l'est d'autant plus que j'ai appris, toujours de la part de la direction commerciale des TPG, qu'elle accorde certains rabais, des cadeaux, comme elle dit, notamment à l'Hospice général.
Pour ma part, je trouve louable que les TPG consentent des rabais aux bénéficiaires de l'Hospice général, mais c'est de l'argent qui tourne en rond et reste au niveau de l'Etat. Savoir que les TPG accordent des rabais à l'Hospice général fait une «belle jambe» à l'usager ordinaire ! Cela permet peut-être à l'Hospice général d'équilibrer son budget, mais je préférerais que cette politique sociale se fasse au profit des usagers plutôt qu'au profit de l'Etat.
Enfin, vous dites que l'on déresponsabilise les TPG, Monsieur Genecand... Absolument pas ! Nous souhaitons simplement accorder aux TPG les moyens de mener une politique incitative, ce que vous avez voté vous-même, en commission des transports.
La question est de savoir si nous voulons respecter la législation fédérale. En général, sur les bancs d'en face, vous recommandez régulièrement le respect de la législation fédérale, surtout pour des manifestations comme le défilé militaire qui réveillent immédiatement votre solidarité confédérale.
En revanche, quand il s'agit de protection de l'environnement, votre respect de la législation fédérale devient à géométrie variable et donne l'impression que la Suisse s'arrête à Versoix. Je sais bien, Monsieur Ramseyer, que vous habitez à Versoix, mais regardez un peu ce qui se passe au-delà ! Le gouvernement et vous ne prenez pas les mesures nécessaires pour que la législation fédérale soit appliquée, et je trouve cela extrêmement grave. Avec la hausse du prix de la carte orange, comme je l'ai déjà démontré, on diminue la fréquentation des transports publics et l'on aggrave la pollution.
M. Pierre Vanek (AdG). Oui, Monsieur Froidevaux, nous avons le réflexe de défendre l'accessibilité des transports en commun pour le plus grand nombre. On nous a dit toutes sortes de choses. En parlant d'entrées, de sorties, d'additions, de soustractions, vous accumulez les inepties. Au-delà du réflexe, il faut réfléchir un peu.
J'ai expliqué que la dernière hausse des billets à demi-tarif, à laquelle nous nous étions opposés, avait suscité une baisse de 40% du nombre d'usagers utilisant ce titre de transport. Vous m'aviez alors gentiment fait la leçon, en arguant que cette perte était compensée par la carte azur. Aujourd'hui, je constate que la vente de la carte azur a chuté, en deux ans, de 3,5%.
Par conséquent, votre leçon n'est pas conforme aux faits et au rapport que nous venons d'approuver. Je ne répéterai pas ce qu'ont dit Mme Elisabeth Reusse-Decrey et M. Andreas Saurer. Je partage leur point de vue, mais je reviens brièvement sur l'intervention de M. Jean-Claude Genecand portant sur le contrat de prestations et l'autonomie de l'entreprise.
Certes, Monsieur Genecand, ces éléments existent. Toutefois, j'ai évoqué un argument supérieur en parlant d'un article de la constitution cantonale, qui régit le contrat de prestations. Cet article demande une politique tarifaire incitative. Dès lors, l'augmentation de 17% de la carte orange ne va pas dans ce sens et, ce faisant, on décourage les gens d'utiliser les TPG.
C'est pourquoi nous maintenons notre proposition de motion. Nous accepterons volontiers d'en discuter avec vous à la commission des transports.
M. Michel Balestra (L). Contrairement à ce que dit M. Vanek, la politique tarifaire incitative a été retirée du contreprojet présenté à l'initiative. Par contre, elle a été intégrée dans un projet de loi sur les TPG qui limite la sous-traitance à 10% et demande au Conseil d'Etat d'appliquer une politique tarifaire incitative.
Dès lors, il est étonnant de vouloir une fois encore, par le biais d'une motion, renforcer une loi votée par ce Grand Conseil. Le Conseil d'Etat doit mettre en place une politique incitative de par la loi, mais cette motion, qui s'oppose à un axe précis d'augmentation, ne renforce pas la politique incitative générale. Cela d'autant plus que le contreprojet à l'initiative que nous avons voté demande autre chose, à savoir la mise sur pied d'un contrat de prestations, permettant d'accorder une plus grande autonomie aux TPG pour atteindre des objectifs ambitieux de qualité de transport. Cette autonomie élargie doit aussi être une économie commerciale. C'est aux TPG d'étudier leur marché, de définir leur marketing, de cibler le type de produits à diminuer pour orienter leurs ventes vers la clientèle qu'ils désirent attirer. Ce n'est pas à ce Grand Conseil de dicter les méthodes que doivent employer les services marketing de la régie autonome des TPG.
Il n'y a que deux moyens pour équilibrer un budget : soit diminuer les charges, soit augmenter les tarifs. Il se trouve que les TPG essaient de faire les deux. Ils abaissent les charges et augmentent les tarifs de façon sectorielle pour obtenir les meilleurs résultats possible. Ceux-ci, en constante progression ces dernières années, prouvent l'excellence de la politique de qualité menée, par les TPG, sur le plan général du marketing.
Il faut laisser les TPG fixer eux-mêmes leur stratégie marketing, faute de quoi nous risquons d'être dans la situation de cet entrepreneur qui disait : «Effectivement, mon cher confrère, je perds cinquante centimes par pièce, mais je me rattrape sur la quantité.»
M. Pierre Meyll (AdG). J'ignore si mon cortex fonctionne correctement, le docteur Froidevaux en jugera peut-être... Me fiant à ma mémoire, je crois avoir entendu le même discours en 1981. C'était une époque encore bénie, puisque le billet des TPG avait passé d'un franc à un franc vingt centimes. J'avais alors fait observer que cette augmentation impliquerait la transformation des automates et qu'elle ne rapporterait donc pas grand-chose, même si elle représentait une hausse de 20%. Il me semblait déjà que le coût social des transports publics s'en trouvait aggravé, parce que l'on devait sans cesse procéder à des aménagements routiers pour contenir le flot des automobiles. M. Fontanet, alors responsable des TPG, m'avait dit : Que lorsque la ville serait «cancellée», on établirait la gratuité des transports à l'intérieur de la cité.
Ne croyez-vous pas que la situation actuelle est suffisamment «cancellée», c'est-à-dire bloquée, pour que l'on envisage des mesures positives, plutôt que d'augmenter les tarifs, ce qui n'incite guère à emprunter les transports publics ?
Monsieur Balestra, vous dites que le Grand Conseil n'a pas à se mêler de la gestion et du marketing des TPG. Alors à quoi sert-il ? Ne peut-il proposer quelques pistes intéressantes si les TPG n'en trouvent pas eux-mêmes ?
M. Michel Balestra. Nous avons voté la loi !
M. Pierre Meyll. Vous savez que les lois sont comme les belles filles, C'est parfois fait pour être violé ! (Protestations.)
Des voix. Harcèlement, harcèlement !
M. Pierre Meyll. Pourquoi harcèlement ? J'ai tout de suite remarqué que M. Balestra s'en allait...
Quand M. Froidevaux nous parle de deux colonnes, nous pourrions, tant qu'à faire, mettre dans celle des recettes tous les aménagements routiers réalisés pour faciliter la circulation des voitures. Personnellement, je suis persuadé que la voiture sera beaucoup moins utilisée quand les TPG fourniront un service à la hauteur de la demande, avec un parcours rapide en ville. Simultanément, comme l'a relevé M. Saurer, on diminuera la pollution pour revenir aux normes OPB qui doivent absolument être respectées en ville.
M. Christian Grobet (AdG). Selon votre habitude, Monsieur Balestra, vous êtes intervenu habilement en évoquant deux des paramètres en cause, les dépenses et les recettes. Bien entendu, vous avez omis le troisième, à savoir le montant de la subvention. M. Genecand a déclaré que le Conseil d'Etat, dans le cadre du projet du contrat de prestations - peut-être signé à l'heure qu'il est - a plafonné la subvention à cent deux millions de francs. C'est le noyau dur qui, évidemment, conditionne tout le reste. Les transports publics ont été conçus comme un service public bénéficiant d'une aide de l'Etat, afin de pouvoir baisser leurs tarifs et réaliser cette politique tarifaire incitative reprise, par le Grand Conseil, dans le projet de concrétisation de l'initiative du personnel des TPG.
Cette motion n'est pas en contradiction avec l'article constitutionnel qui sera soumis à la votation populaire, mais elle vise à concrétiser la volonté exprimée par le Grand Conseil. Si les TPG sont contraints, aujourd'hui, de trouver des recettes supplémentaires et le font par le biais d'une augmentation des tarifs des abonnements, c'est à cause - et vous le savez, Monsieur Genecand - du plafonnement de la subvention. De même, vous n'ignorez pas que le conseil d'administration des TPG aurait souhaité une subvention plus élevée.
Cette subvention a d'ailleurs été réduite, lors du budget de l'année dernière, malgré les amendements que nous avions proposés, en pure perte, devant ce Grand Conseil. Nous persistons à affirmer que non seulement cette subvention est insuffisante, en regard de la politique des transports publics que nous voulons privilégier pour les raisons rappelées, ce soir, par certains députés, dont M. Saurer, mais que les TPG vont se trouver dans une situation encore plus difficile à cause du plafonnement de cette subvention.
Peut-être aurait-il fallu l'expliquer plus clairement, mais il est simplement dit, à travers cette motion, qu'il y a des priorités à établir au niveau du budget de l'Etat. Les transports publics, à l'instar de la santé publique et l'enseignement, constituent, pour nous, l'une des premières priorités des services publics. Par voie de conséquence, il convient de donner aux transports publics les moyens de mener une politique tarifaire incitative. Et c'est le problème, posé par la subvention, qui est en cause.
Quand on constate certaines dépenses récentes, dont celle, importante, consentie pour la construction d'une pseudo-cathédrale en dessus des bâtiments de l'administration publique... (Protestation de M. Fontanet.) Ah, vous pouvez lever les bras au ciel, Monsieur Fontanet ! J'ose imaginer ce que vous auriez dit si ces travaux avaient été conduits du temps où j'étais le chef du département. Je reprends le fil de mon intervention pour dire que des dépenses considérables ont été faites, auxquelles le Conseil d'Etat semble vouloir mettre bon ordre, sous la pression, sans doute, des référendums récemment lancés. Au vu de telles dépenses, j'affirme que l'on peut aussi mettre de l'argent là où il le faut.
M. Claude Blanc (PDC). Je m'amuse en entendant les représentants de l'Alliance de gauche nous dire, aujourd'hui, la nécessité d'une politique tarifaire incitative et l'obligation des pouvoirs publics de suppléer au manque à gagner que cette politique pourrait entraîner.
En réalité, Madame et Messieurs, vous cherchez, une fois de plus, à bluffer le public, parce que la deuxième invite de la motion demande au Conseil d'Etat d'adapter, si nécessaire, le montant de la subvention annuelle telle qu'elle figure au budget de l'Etat pour 1996.
La commission des finances a planché, pendant deux mois, sur le budget de l'Etat. J'ai participé à toutes les séances et je n'ai entendu aucun représentant de l'Alliance de gauche faire une proposition. En commission, où l'on peut travailler sérieusement, on n'avance pas de propositions, mais ici, où l'on peut se faire valoir, on en présente ! Et comme de toute manière on ne vote pas le budget...
Vous jouez un double jeu et vous vous faites mousser avec des histoires auxquelles nous ne croyons plus !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je trouve ce débat quelque peu malvenu. On agite des pourcentages pour ne pas avoir à parler de francs. L'augmentation, proposée par le conseil d'administration des TPG le 18 septembre, porte sur une somme de 8,30 F. Cela représente les trois quarts d'une place de cinéma. Ce sont 8 francs et 30 centimes par mois, pour qui prend cette carte à l'année.
Je note, avec une certaine surprise, qu'on admet sans autre, sur les bancs de gauche, que la notion de «multipack» puisse être retirée. Les familles apprécieront. Je note, avec une surprise encore plus grande, que l'on nous fait grief d'avoir favorisé l'Hospice général. Les plus démunis apprécieront également.
Le contrat de prestations a été signé, mais doit encore être ratifié. Aussi je relève, comme l'ont fait nombre de députés, la démagogie qui préside à ce débat. Au moment où le syndicat des TPG réclame une diminution du temps de travail, on intervient pour priver l'entreprise de deux millions de recettes supplémentaires.
Monsieur Grobet, vous avez parlé de l'augmentation du réseau, de l'augmentation de la subvention, en fait de toutes les augmentations possibles et imaginables. Mais vous n'avez jamais dit où trouver les ressources. On ne peut pas se contenter de déclarer : «il n'y a qu'à augmenter, il n'y a qu'à faire une politique incitative, etc.» ! Dites-nous où vous prenez l'argent : vous n'en avez pas le premier centime !
Je considère donc ce débat malvenu. Vous en discuterez en commission, mais j'ai pris note que les notions «multipack» et «Hospice général» étaient citées, par vous, comme étant superflues. C'est déjà un drôle de début !
Le président. La parole n'étant plus demandée, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission des transports.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission des transports est rejetée.
M. Daniel Ducommun (R). Je demande l'appel nominal (Appuyé.)
Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent la proposition de motion répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.
La proposition de motion est rejetée par 45 non contre 31 oui et 1 abstention.
Ont voté non (45) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Claude Basset (L)
Roger Beer (R)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Hervé Burdet (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Henri Duvillard (DC)
Catherine Fatio (L)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Jean-Claude Genecand (DC)
Henri Gougler (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Elisabeth Häusermann (R)
Claude Howald (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Pierre Kunz (R)
Claude Lacour (L)
Gérard Laederach (R)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Michèle Mascherpa (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Vérène Nicollier (L)
Jean Opériol (DC)
David Revaclier (R)
Martine Roset (DC)
Micheline Spoerri (L)
Jean-Philippe de Tolédo (R)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Michèle Wavre (R)
Ont voté oui (31) :
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Jacques Boesch (AG)
Fabienne Bugnon (Ve)
Matthias Butikofer (AG)
Pierre-Alain Champod (S)
Liliane Charrière Urben (S)
Bernard Clerc (AG)
Marlène Dupraz (AG)
Laurette Dupuis (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
Liliane Johner (AG)
Sylvia Leuenberger (Ve)
Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve)
Pierre Meyll (AG)
Laurent Moutinot (S)
Chaïm Nissim (Ve)
Vesca Olsommer (Ve)
Danielle Oppliger (AG)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Andreas Saurer (Ve)
Christine Sayegh (S)
Evelyne Strubin (AG)
Claire Torracinta-Pache (S)
Pierre Vanek (AG)
Yves Zehfus (AG)
S'est abstenu (1) :
Michel Ducret (R)
Etaient excusés à la séance (18) :
Claire Chalut (AG)
Sylvie Châtelain (S)
Anne Chevalley (L)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Hervé Dessimoz (R)
Erica Deuber-Pauli (AG)
John Dupraz (R)
Luc Gilly (AG)
Michel Halpérin (L)
David Hiler (Ve)
Bernard Lescaze (R)
René Longet (S)
Olivier Lorenzini (DC)
Barbara Polla (L)
Jean-Pierre Rigotti (AG)
Max Schneider (Ve)
Jean Spielmann (AG)
Etaient absents au moment du vote (4) :
Thomas Büchi (R)
Micheline Calmy-Rey (S)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Philippe Schaller (DC)
Présidence :
M. Jean-Luc Ducret, président.
18. a) Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Pierre Meyll et Chaïm Nissim concernant la troisième voie CFF Coppet-Genève. ( -)
b) Proposition de résolution de la commission des transports publics concernant la troisième voie CFF. ( )
La motion 959 concernant la troisième voie CFF Coppet-Genève a été renvoyée à la commission des transports lors de la séance du Grand Conseil du 20 janvier 1995.
Sous la présidence de M. René Longet, député, cette commission s'est réunie pour traiter cet objet à trois reprises, les 14 février, 14 mars et 28 mars 1995.
MM. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat chargé du département de justice et police et des transports, ainsi que MM. Wittwer et Manzoni ont assisté à nos séances afin de répondre aux questions des députés. Leur aimable collaboration ainsi que leur disponibilité ont été vivement appréciées.
Objet
Le texte des motionnaires soulève les interrogations des habitants de la région de Versoix concernant les nuisances dues aux travaux et à la fréquence du trafic liées à la construction de la troisième voie CFF Coppet-Genève.
Auditions
Afin de se faire une idée plus complète de la question, les commissaires ont procédé à plusieurs auditions.
14 février: audition des MM. Massy, Boget et Ribi
Le 14 février, la commission recevait MM. François Massy, directeur d'exploitation des CFF, Ernest Boget, directeur de la division des travaux du 1er arrondissement des CFF, et Roland Ribi, ingénieur mandataire. Lors de cette séance, il nous est affirmé qu'il est indispensable pour satisfaire les besoins en trains rapides Intercity, les trafics régional et marchandises de réaliser cette troisième voie. Les installations actuelles, qui voient circuler plus de 200 convois par jour, sont à la limite de la saturation. La nouvelle voie sera construite côté Jura, sauf le long du Jardin botanique, pour ne pas avoir à toucher le mur antibruit.
La troisième voie utilisera le couloir existant, ce qui restreindra les impacts sur l'environnement. Aucune habitation ne sera touchée et des mesures de compensation adéquates seront prises pour les milieux naturels touchés par les nouvelles infrastructures. Ces travaux sont estimés à 325 millions de francs, et doivent faire l'objet d'une étude d'impact.
Cette étude concerne les atteintes éventuelles à l'environnement pendant la construction au niveau de l'air, de l'eau, du sol, etc. Ces travaux seront étalés sur 7 ans.
A l'heure actuelle, il est difficile de prévoir ce qui sera fait dans 10 ans, mais la troisième voie permettra une cadence d'à peu près un train régional toutes les demi-heures (voir annexes II à VII).
14 mars: audition des MM. Borel, Mermoud et De Cerjat
Lors de cette séance, MM. Borel, De Cerjat, représentants de l'association de défense des intérêts des habitants de Chambésy, et Mermoud, maire de la commune, nous font part de leurs inquiétudes par rapport aux nuisances de cette troisième voie. Ils ont constitué un groupement de défense, car leur souci au sujet de ce projet est double: d'une part, les CFF n'ont donné aucun renseignement précis en regard des nuisances, et d'autre part, aucune garantie n'est donnée concernant l'offre de transports intéressant les communes touchées par la troisième voie.
Discussion de la commission
La commission est consciente des nuisances apportées par la construction de la troisième voie, d'autant qu'aucune garantie n'est apportée par les CFF qu'au terme des 7 ans de travaux la cadence sera vraiment améliorée sans la participation financière du canton. Toutefois, cette troisième voie permet d'éviter la construction d'une boucle de rebroussement depuis Cointrin, qui aurait soulevé de grosses difficultés.
Conclusion
Au terme de la discussion, la commission, à l'unanimité, propose de transformer cette motion en la résolution suivante:
proposition de rÉsolution
concernant la troisième voie CFF
LE GRAND CONSEIL,
invite le Conseil d'Etat
- à veiller à ce que l'offre soit maintenue durant les travaux de la troisième voie;
- à veiller à ce que l'offre soit augmentée, dès l'achèvement des travaux;
- à veiller à ce que l'impact environnemental, tant durant les travaux qu'en cours d'exploitation, soit le plus réduit possible.
ANNEXE 1
ANNEXE 2
ANNEXE 3
ANNEXE 4
ANNEXE 5
ANNEXE 6
ANNEXE 7
ANNEXE 8
Débat