Séance du
vendredi 10 novembre 1995 à
17h
53e
législature -
3e
année -
1re
session -
49e
séance
PL 7303
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Crédit d'investissement
1 Un crédit global de 8 500 000 F est ouvert au Conseil d'Etat dans le but de financer la réalisation de l'audit global de l'Etat de Genève, en application de l'article 174 A de la constitution de la République et canton de Genève.
2 Le crédit se décompose comme suit:
5 500 000 F
1 000 000 F
2 000 000 F
pour les honoraires du mandataire;
pour les frais de suivi et de gestion du projet et les frais de communication;
affectés à la réforme de l'informatique de l'Etat de Genève, conformément à l'article 1, alinéa 2, de la loi ouvrant un crédit pour la mise en oeuvre de ladite réforme et des activités administratives associées.
Art. 2
Budget d'investissement
Ce crédit est inscrit au budget d'investissement de l'année 1996 sous la rubrique 10.01.00.538.80.
Art. 3
Financement
Le financement du crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans le cadre des investissements 1996, dont les charges en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.
Art. 4
Amortissement
L'investissement est amorti chaque année d'un montant calculé sur sa valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.
Art. 5
Loi sur la gestion administrative et financière del'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
EXPOSÉ DES MOTIFS
I. Initiative populaire (IN 100)
En date du 25 juin 1995, le corps électoral genevois acceptait, par44 034 voix contre 39 634, l'initiative populaire «Pour réduire les dépenses abusives de l'Etat de Genève» (IN 100), introduisant un article 174 A (nouveau) au Titre XIV - Dispositions diverses de la constitution de la République et canton de Genève.
Cet article est libellé comme suit:
1 L'administration de l'Etat de Genève et des communes doit être fonctionnelle, efficace et structurée de manière à éviter des lenteurs, des travaux faits à double et, d'une manière générale, des dépenses sans relation avec le résultat recherché.
2 A cet effet et chaque fois qu'il l'estime nécessaire, le Conseil d'Etat mandate une fiduciaire pour procéder à un audit général ou sectoriel afin de:
a) vérifier que la structure corresponde aux critères mentionnés à l'alinéa 1;
b) vérifier que les frais d'administration correspondent à l'importance des objectifs;
c) vérifier le statut du personnel et, notamment que les traitements correspondent aux qualifications et aux prestations requises pour chaque poste considéré;
d) déterminer si telle ou telle fonction de l'Etat pourrait être remplie à moindres frais par une entreprise privée.
3 Les fonctionnaires sont libérés du secret de fonction à l'égard de la fiduciaire.
4 A la remise de son rapport l'expert fait publier dans la Feuille d'avis officielle la date du dépôt de son rapport.
5 Un audit général ou partiel peut également être ordonné par le Grand Conseil ou par une initiative populaire selon l'article 65 de la constitution.
Dispositions transitoires
Dans le mois qui suit l'adoption par le peuple de l'arti-cle 174 A, le Conseil d'Etat confie à une importante fiduciaire nationale le contrôle général de tous les services publics dépendant de l'Etat dans le cadre d'un audit global.
II. Le cahier des charges
Les dispositions transitoires ci-dessus exigent un audit global immédiat. Pour ce faire, après avoir adopté le cahier des charges le 26 juillet 1995, le Conseil d'Etat a lancé le 2 août 1995 un appel d'offres public, invitant les entreprises intéressées à retirer le cahier des charges jusqu'au 9 août 1995 et à déposer leur offre jusqu'au 1er septembre 1995 à midi.
Le cahier des charges contient les éléments essentiels suivants :
a) Les objectifs du mandat
1. apprécier les réorganisations déjà réalisées, en cours ou projetées;
2. identifier et évaluer les autres domaines d'activité (matières) où des réformes seraient nécessaires, comme par exemple: renonciation à certaines activités ou développement d'autres, simplification de procé-dures générales, modification de contraintes légales, etc.;
3. évaluation des outils de gestion et des procédures de contrôle;
4. appréciation comparative de données clefs avec d'autres entités publiques de même importance (y compris les rémunérations);
5. propositions assorties d'une appréciation de leur faisabilité et des effets positifs et négatifs attendus;
6. quelles pourraient être les activités de l'Etat redondantes avec celles des communes.
b) Approche et méthode
La formule retenue est celle d'un audit global et non d'une analyse détaillée du fonctionnement de tous les services et établissements publics dépendant de l'Etat.
Il s'agit de privilégier une approche par matière, distinguant :
les activités externes de service à la population de celles internes de fonctionnement;
les activités d'autorité de celles de prestations;
les activités des services de l'administration centrale de celles des établissements et institutions publics.
L'audit devra être réalisé avec la participation du personnel directement intéressé.
c) Le délai de réalisation
Le mandat devra être achevé dans un délai de six à huit mois à compter de son attribution, le délai référendaire demeurant réservé.
III. Examen des offres
L'ouverture des offres a eu lieu le vendredi 1er septembre 1995 à 14 h 15 à l'Hôtel-de-Ville.
Alors que 26 entreprises avaient retiré le cahier des charges, seules 7 offres sont parvenues dans les délais à la chancellerie. Après un premier examen, effectué par un groupe de travail présidé par M. Yves Martin, secrétaire général du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, 5 entreprises ont été entendues par une délégation du Conseil d'Etat formée à cet effet.
Au terme de cette audition, la délégation du Conseil d'Etat a retenu deux entreprises qui ont été entendues :
d'une part, par le collège des secrétaires généraux, élargi au recteur de l'université, au directeur général de l'office du personnel, au chef de l'inspection des finances et à l'un des directeurs généraux des Hôpitaux universitaires de Genève;
d'autre part, par les représentants des 6 syndicats principaux de la fonction publique.
IV. Evaluation des offres
Pour l'évaluation des dossiers présentés, le groupe de travail a pris en considération treize critères, contenant chacun plusieurs éléments d'appré-ciation.
Ces critères sont les suivants:
la recevabilité de l'offre, soit sa conformité à la disposition constitutionnelle;
la présentation de l'offre (écrite et orale);
le champ d'analyse;
les objectifs et les résultats;
l'approche;
la méthode;
le programme de travail;
les forces mises en oeuvre par le mandataire et celles requises de l'Etat;
l'organisation du travail;
la communication;
le calendrier;
le coût;
les références du mandataire.
V. Désignation de la société responsable de l'audit
Dans sa séance du 11 octobre 1995, le Conseil d'Etat a désigné la société Arthur Andersen SA, dont le siège est à Genève, comme responsable de l'audit global de l'Etat.
Le montant des honoraires et des frais du mandataire a été arrêté à 5 500 000 F, TVA comprise.
Le choix de ladite société se justifie par :
une conformité incontestable aux dispositions constitutionnelles;
une approche claire et une démarche concrète;
un équilibre réaliste entre les résultats attendus et les moyens à mettre en oeuvre;
une organisation de projet cohérente et structurée;
la capacité de la société de mettre à disposition un nombre important de personnes qualifiées et expérimentées.
Compte tenu de ce qui précède, l'offre de la société Arthur Andersen SA a été retenue comme présentant les meilleures garanties pour un déroulement de l'audit répondant pleinement aux exigences de la disposition consti-tutionnelle.
VI. Exécution du mandat
Dès que le Grand Conseil se sera prononcé sur ce projet de loi et que le délai référendaire aura été épuisé, la société Arthur Andersen SA com-mencera, dans les 4 semaines, l'exécution de son mandat qui s'étendra sur 26 semaines.
Afin que cet audit global, voulu par le peuple, se déroule dans les meilleures conditions, le Conseil d'Etat a pris les disposition suivantes :
1. La société mandataire travaillera en toute indépendance. Les fonc-tionnaires seront libérés du secret de fonction à son égard.
2. Un groupe de hauts fonctionnaires et de représentants du personnel, présidé par M. Yves Martin - qui aura quitté, le 1er janvier 1996, sa fonction de secrétaire général du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales - facilitera la mission de la société mandataire pour toute question générale relative au fonc-tionnement de l'Etat et de ses départements, et assurera le suivi du déroulement du projet.
3. L'audit global de l'Etat et la réforme informatique de l'administration cantonale se dérouleront simultanément. Les domaines d'intervention et les compétences respectives seront définies, de façon exacte et complète, par les deux mandataires, sous l'autorité du Conseil d'Etat.
4. En liaison avec les syndicats de la fonction publique, représentés au sein du groupe de travail, le Conseil d'Etat veillera à ce que l'audit se déroule avec la participation active du personnel.
5. Enfin, une attention particulière sera apportée à la communication, interne et externe, afin que l'audit se déroule dans la transparence et que le Grand Conseil, la presse et la population soient exactement et complètement informés à intervalles réguliers.
VII. Montant global du crédit
Le montant total du crédit sollicité s'élève à 8 500 000 F; il comprend:
les honoraires du mandataire pour 5 500 000 F;
les frais de suivi et de gestion du projet ainsi que les frais de communication pour 1 000 000 F;
un montant de 2 000 000 F à affecter à la réalisation de la réforme informatique de l'Etat, conformément à l'article 1, alinéa 2, du projet de loi ouvrant un crédit pour la mise en oeuvre de la réforme de l'informatique de l'Etat de Genève et des activités administratives associées (PL 7297).
Exécutant fidèlement la volonté populaire, le Conseil d'Etat a pris les mesures nécessaires dans les meilleurs délais. Il souhaite que l'audit global, voulu par une majorité de la population, se déroule dans de bonnes conditions et, à terme, contribue à la modernisation du service public.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.
Préconsultation
Mme Claire Chalut (AdG). Non, ne me charriez pas ! Je ne suis jamais longue ! (Rires.) Ceux qui sont longs feraient mieux de se taire !
L'Alliance de gauche prend connaissance de ce projet de loi et constate qu'on nous dit qu'il faut réaliser des économies, mais ce n'est pas le sentiment ressenti à la lecture de ce projet de loi !
En effet, dans certains départements, on en est réduit à compter les crayons, tant les économies imposées sont drastiques, tandis que dans d'autres, notamment les plus rentables, le travail s'accumule. En effet on y a procédé à des suppressions de postes, là où précisément il aurait fallu les maintenir, voire les développer, et on consacre plus de 5 millions à un mandat qui, selon l'exposé des motifs, «devra être achevé dans un délai de six à huit mois». Le financement de ce projet de loi ne semble pas, dans le cas présent, poser un gros problème.
Nous estimons ce montant largement abusif. Peut-être bien que 2 millions auraient suffi ! Et encore, nous estimons que c'est encore trop !
Notre groupe vous demande évidemment de renvoyer ce projet de loi 7303 en commission.
M. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat. L'intervention de Mme la députée Chalut m'oblige à dire ce qui suit.
Dans l'ensemble de ce parlement, aucun des partis n'a soutenu l'initiative du comité «Halte aux déficits». Nous avons été contraints par une majorité populaire de procéder, à teneur des dispositions transitoires de cette initiative, à un audit général de l'Etat.
C'est bien malgré nous que nous avons dû le faire, mais nous entendons respecter la volonté populaire. Il y a eu un appel d'offres et l'ensemble des documents sont à votre disposition. Voilà pourquoi ce projet de loi vous est présenté.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.