Séance du
vendredi 22 septembre 1995 à
17h
53e
législature -
2e
année -
9e
session -
40e
séance
I 1942
1) M. Ramseyer va-t-il encore confondre longtemps une manifestation où le citoyen est libre d'y participer et un défilé militaire imposé par le colonel J. F. Duchosal où le citoyen soldat se trouve contraint d'y aller sous peine de sanction ?
2) Si l'autorisation pour ce défilé est accordée, quels sont les objectifs visés ?
3) Le Conseil d'Etat assume-t-il pleinement la responsabilité de heurter de front le sentiment de la population genevoise qui est plus que critique à l'égard de l'armée ?
4) Le Conseil d'Etat presque in corpore fête le 50e officiel de l'ONU à Genève le 5 juillet. Comment peut-il après ces discours de paix autoriser dans cette même ville ce défilé militaire ? Le sang coule partout sur cette planète surarmée (par qui ?). Les essais nucléaires nous sont imposés ! La «Res Militaris» doit-elle être exhibée dans les rues genevoises ?
5) Dans quelle mesure des fonds publics seraient ou sont octroyés ou gaspillés pour cette opération de propagande de l'armée ?
6) Quels sont à ce jour les projets autorisés et retenus pour ces futures réjouissances genevoises du 22 novembre ?
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Vous avez pris connaissance de l'interpellation de M. Gilly, dans la mesure où l'essentiel de ses questions figurait à l'ordre du jour de cette séance. Je rappelle donc de quoi il s'agit :
Le régiment d'infanterie 3, fort de deux mille six cent nonante-six hommes, est un régiment genevois. La totalité de ses missions et objectifs sont situés à Genève, essentiellement à l'aéroport pour le bataillon d'aéroport 1, les bâtiments de l'ONU et les organisations internationales pour le bataillon de fusiliers 10.
Une partie de ce régiment est une formation d'alarme qui permet à l'autorité, en particulier fédérale, de demander la mobilisation très rapide des troupes, lors de la tenue de conférences importantes. Jusqu'à maintenant, les missions exécutées ont toutes été de sécurité : la conférence sur la Palestine en 1983; la rencontre Reagan-Gorbatchev, en 1985; la visite de M. Arafat et son discours devant l'assemblée de l'ONU, en 1988; la visite de M. Clinton à M. Assad, en 1994.
Je précise enfin, le fait n'étant pas connu, qu'en 1988 le bataillon d'aéroport 1 a été chargé les avions en partance pour l'Arménie, suite à un tremblement de terre. Ce travail a été fait par les soldats que j'avais l'honneur de commander à l'époque.
J'affirme qu'il est légitime que ce régiment genevois défile et se présente aux Genevois, dans une composition nouvelle, issue d' «Armée 95». Je dis aussi que personne n'est obligé d'assister à cette manifestation. Maintenant, je réponds brièvement aux questions qui m'ont été posées.
A l'intention de M. Courvoisier, qui s'est adressé à moi de manière pathétique, je précise que si, d'ordinaire, mon département décide il a été, en l'occurrence, organe de préavis, le défilé ayant été autorisé par décision du Conseil d'Etat in corpore. Mon département, évidemment, s'est chargé des détails.
L'interpellant, lui, évoque des notions qui ressortent du domaine de l'autorité militaire. Il n'appartient pas à l'autorité civile de se prononcer à ce sujet. Vous avez également fait allusion, Monsieur le député, à la paix, et Dieu sait si je partage vos soucis en la matière ! Mais quand on veut préparer la paix, on organise généralement des conférences, et toutes les missions de ce régiment sont en relation avec des conférences sur la paix ou sur l'entente des différentes communautés internationales.
Vous m'avez demandé combien coûtera ce défilé. Il ne coûtera rien au canton, sinon le vin de la verrée d'honneur qui aura lieu dans un restaurant de la place, selon la tradition. Les autres frais seront inhérents à la police, mais ils le sont pour toutes les manifestations. Je rappelle que j'en autorise de septante à quatre-vingts par an, dont beaucoup émanent de vos milieux.
Pour démontrer, si besoin était, la loyauté du département à l'égard des idées que vous défendez, je vous rappelle, Monsieur le député, que, le 14 de ce mois, vous m'avez adressé, par fax, une demande d'autorisation de manifestation. Cette demande est incomplète, irrecevable et hors délai. Cependant, également par fax, vous avez obtenu votre autorisation ! La semaine suivante, vous avez présenté une deuxième demande d'autorisation de manifestation : elle vous a été délivrée, sans autre forme de procès.
En résumé, la décision d'autoriser ce défilé a été prise par le Conseil d'Etat et ses modalités ont été réglées sur la base du strict respect du concept de police. Aussi, je forme le même souhait, en ce qui me concerne, que M. le député Courvoisier qui, à la dernière séance, s'exclamait : «Le Groupement pour une Suisse sans armée fera tout ce qu'il sera possible de faire, dans le strict respect de la légalité». J'espère, Monsieur le député, que vous ne serez pas déçu !
La présidente. Monsieur le député, désirez-vous répliquer ?
M. Luc Gilly (AdG). Je répliquerai à M. Ramseyer, lors de la prochaine séance du Grand Conseil.
La réplique de M. Gilly figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.