Séance du jeudi 22 juin 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 8e session - 29e séance

PL 7257
14. Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant le Conseil d'Etat à emprunter 28 millions de francs pour financer des achats de terrains. ( )PL7257

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

Patrimoine financier

1 Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter des emprunts, au nom de l'Etat de Genève, pour une somme pouvant atteindre 28 millions de francs au maximum, aux conditions du marché les plus avantageuses.

2 Ces emprunts sont destinés au financement de diverses acquisitions immobilières, à inscrire comme réserve au patrimoine financier.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Conformément à l'article 80 de la constitution, et selon une procédure maintenant bien établie, notre Conseil soumet à votre approbation la présente demande d'autorisation d'emprunt destinée au financement des achats de biens immobiliers par l'Etat.

Rappelons tout d'abord que c'est le 21 octobre 1994 que fut adoptée la dernière loi (n° 7102) autorisant le Conseil d'Etat à procéder à des emprunts destinés au financement des acquisitions de terrains. Les crédits ainsi disponibles furent très rapidement absorbés par le règlement d'un certain nombre d'opérations préalablement négociées et dont la conclusion avait été différée dans l'attente de la décision du Grand Conseil.

Certaines opérations prévues n'ont finalement pas eu lieu parce qu'elles étaient, soit devenues sans objet (en fonction de l'évolution des besoins), soit parce que les vendeurs se sont désistés. Avec l'accord du Conseil d'Etat, et selon le principe admis par la commission des finances, les montants correspondants ont été réaffectés pour un total d'environ 10 millions de francs.

Il s'ensuit que le Conseil d'Etat ne dispose pratiquement d'aucune réserve lui permettant d'envisager de nouvelles acquisitions, alors même que d'intéressantes possibilités s'offrent à lui et que, dans certains cas, l'intérêt supérieur de notre canton commanderait même qu'il puisse conclure sans délai.

Notre canton se doit en effet de mener une politique foncière destinée à lui garantir, le moment venu, la disponibilité des terrains nécessaires à la réalisation des équipements et des infrastructures relevant traditionnellement de sa compétence. Il est indispensable de poursuivre cette politique afin d'assurer l'avenir, en particulier dans des domaines tels que l'action sociale, la santé, l'enseignement (secondaire et universitaire), le logement, les transports (transports publics, aéroport), les zones industrielles, ainsi que l'accueil sur notre territoire de diverses institutions (internationales entre autres).

Cela étant et compte tenu de la situation financière de notre canton, le Conseil d'Etat ne perd pas de vue qu'il est toujours nécessaire de restreindre au strict minimum les dépenses d'acquisitions de terrains.

Après avoir effectué une sélection extrêmement rigoureuse des opérations foncières prioritaires, notre Conseil a décidé de porter son effort sur les projets d'acquisitions suivants, faisant déjà l'objet de négociations, et qui, une fois conclues, figureront au patrimoine financier de l'Etat:

- Acquisition de terrains de réserve à destination d'organisations internationales, dans le cadre des relations FIPOI/Etat, pour un montant total de 3 millions de francs.

- Acquisition de terrains liés à la mise en valeur de zones de développement industriel pour un montant total de 1,5 million de francs.

- Acquisition de terrains liés au développement des transports publics pour un montant total de 1 million de francs.

- Acquisition de terrains se prêtant à la réalisation de logements sociaux pour un montant total de 9,5 millions de francs.

- Acquisition de terrains situés dans les zones de nuisance de l'aéroport (NNIB) pour un montant total de 5 millions de francs.

- Acquisition de terrains liés au développement d'équipements publics pour un montant total de 8 millions de francs.

Pour ce qui est de la plupart de ces achats de terrains, il est prévu de les régler par tranches échelonnées sur plusieurs années.

Ces parcelles seront transférées du patrimoine financier au patrimoine administratif dès que leur affectation deviendra définitive. C'est la raison pour laquelle elles seront inscrites au patrimoine financier de l'Etat jusqu'à plus ample informé.

Comme de coutume, des informations complémentaires détaillées pourront être fournies par notre Conseil dans le cadre des travaux de la commission des finances, laquelle pourra se convaincre que les crédits sollicités se rapportent aux besoins prioritaires de notre canton.

Telles sont les raisons pour lesquelles, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons l'honneur de soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante approbation.

Préconsultation

M. Daniel Ducommun (R). Nous n'avons pas à cacher que ce projet de loi interpelle notre groupe. Il fut un temps où les moyens financiers de l'Etat permettaient, chaque année, d'appliquer une politique généreuse d'opportunités ou d'avances de fonds, soit la mise à disposition de quelques millions au Conseil d'Etat pour prévoir le développement de nouvelles infrastructures publiques, locales ou internationales.

Aujourd'hui, nous sommes beaucoup plus critiques et passons volontiers d'une politique d'opportunisme à une politique économique ou de redressement des finances publiques. Lorsqu'on n'a pas un sou en caisse et que l'on doit emprunter, chaque année, près d'un milliard auprès des bailleurs de fonds, est-il raisonnable de libérer allègrement 28 millions ? Nous répondons oui, mais à deux conditions :

1) Inviter le Conseil d'Etat à présenter simultanément une proposition de désengagement d'immeubles ou de terrains, dont le besoin n'est pas reconnu, à concurrence, si possible, du montant sollicité, soit 28 millions. Nous rappelons, à cet effet, que notre République est une propriétaire foncière redoutable, avec une réserve de patrimoine immobilier de plus de 500 000 m2, comprenant environ 500 bâtiments dont un grand nombre de villas.

2) Si les ventes s'avéraient difficiles en fonction du marché, la seconde condition - pouvant se substituer à la première - consisterait à prier le Conseil d'Etat de ne pas demander une avance de fonds mais de présenter une loi ad hoc pour chaque projet d'intérêt public.

Notre Grand Conseil siège tous les mois et l'expérience nous démontre que les affaires les plus pertinentes ne se décident pas en dix minutes sur un coin de table.

Voilà, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, les quelques propositions que les radicaux feront en commission des finances lors de l'étude de ce projet.

M. Bernard Clerc (AdG). Nous accueillons favorablement ce projet de loi et soutenons son renvoi en commission, moyennant deux remarques :

1) Nous demanderons lors de la discussion de ce projet en commission d'avoir la liste des précédentes acquisitions du dernier crédit de 30 millions - nous avons reçu la liste des projets, mais nous aimerions celle des achats définitifs.

2) Nous pensons que ce crédit ne doit pas servir à sauver des opérations hasardeuses ou spéculatives de certains promoteurs. Nous sommes favorables à des acquisitions portant sur des opportunités en matière de prix des terrains, compte tenu de l'état actuel du marché immobilier. Ces acquisitions doivent, en plus, répondre aux besoins, plus particulièrement en matière de logements et d'infrastructures.

M. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat. Comme vous aurez pu le constater, au fil des dernières années, les montants des demandes de crédit d'emprunt pour acquérir des terrains immobiliers ont considérablement fléchi : on a passé de 50 millions environ, par année, à 35; on en est à 28.

Cependant, c'est un problème difficile parce qu'en réalité, comme vous pouvez le lire dans l'exposé des motifs préparé par le département des travaux publics, aujourd'hui les axes principaux du projet de demande ont trait aux terrains FIPOI, au développement des logements sociaux - pour 9,5 millions - à la mise en valeur de zones de développement industriel - pour 1,5 million - et aux extensions de zones d'équipements publics - pour 8 millions.

Bien entendu - nous en avons toujours convenu ainsi - nous présenterons à la commission des finances la liste des acquisitions réalisées avec le dernier crédit. Cette liste est prête. Nous ne voulons pas la publier telle quelle, pour les raisons que vous connaissez, mais elle sera fournie à la commission des finances où vous pourrez examiner non seulement les acquisitions mais également ce qui a été fait, après qu'on eut acheté les terrains. Par conséquent, tout sera parfaitement transparent.

Cela étant, nous sommes conscients que, dans la situation budgétaire difficile où nous nous trouvons, nous devons limiter ce type de crédits. Néanmoins, il y a une volonté bien claire du Conseil d'Etat et, j'ose l'espérer, de ce parlement de permettre la continuation d'une certaine politique qui doit assurer le développement et l'avenir de Genève. C'est dans cet esprit que nous vous présentons ce projet de loi. Bien entendu, il vous appartient de décider de son futur.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

La présidente. Le point 12 sera traité demain matin à 8 h.