Séance du
vendredi 9 juin 1995 à
17h
53e
législature -
2e
année -
8e
session -
28e
séance
PL 7245 et objet(s) lié(s)
(PL 7245)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'instruction publique, du 6 novembre 1940, est modifiée comme suit:
Section 1 (du Chapitre II du Titre V)
Exigences à l'engagement et formation (nouvelle teneur)
Art. 133 (abrogé)
Art. 134 (nouvelle teneur)
Engagement
Peuvent être engagés dans l'enseignement primaire, les personnes titulaires de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», de la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de l'université de Genève ou d'un autre titre jugé équivalent.
Art. 134A (nouveau)
Stages dans l'enseignement primaire
1 L'enseignement primaire met à disposition de la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation les places de stages prévues dans le cursus de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», afin que la formation des étudiants permette une forte articulation entre connaissances théoriques et expériences pratiques. Le nombre de places de stages est fixé par le département pour 4 ans, après consultation de la section des sciences de l'éducation, en fonction de la capacité d'accueil et d'encadrement de l'enseignement primaire. Les stages doivent répondre aux exigences de formation fixées par la section des sciences de l'éducation.
2 Lorsque, malgré une information circonstanciée, le nombre d'étudiants de 1er cycle, désirant suivre le cursus de 2e cycle mention «enseignement», dépasse le nombre de places de stages disponibles, la faculté choisit les candidats qui semblent les plus aptes à suivre le cursus sur la base d'un dossier et, cas échéant, d'épreuves complémentaires et d'entretiens. Les candidats refusés à l'entrée au 2e cycle peuvent se représenter au moins une fois dans le cadre d'une procédure d'admission ultérieure.
(PL 7246)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
Dépenses nouvelles dues à la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement»
1 Le coût de la formation des étudiants en sciences de l'éducation mention «enseignement» est de 6,9 millions de francs pour les 3 ans d'études spécifiques.
2 Ce montant est porté en augmentation du budget annuel de l'université dès 1996 en 3 tranches successives:(3,0 millions en 1996, 2,6 millions en 1997, 1,3 million en 1988).
EXPOSÉ DES MOTIFS
A. Projet de loi modifiant la loi sur l'instruction publique
1. Reconnaissance de la licence universitaire comme condition d'accès au corps enseignant primaire genevois
La pièce maîtresse de ce projet de loi est constituée par la reconnaissance de la licence universitaire en sciences de l'éducation, mention «enseignement», ou de tout titre jugé équivalent, comme condition expresse d'accès au métier d'enseignant primaire. La création d'une filière nouvelle de formation initiale des enseignants primaires, dans le cadre de l'université de Genève, sous forme d'une option spécifique de la licence en sciences de l'éducation, garantit une qualification professionnelle et universitaire élevée et s'inscrit dans le cadre de l'évolution historique de la formation des enseignants à l'université de Genève depuis 1921.
La formation initiale des enseignants primaires est une tâche publique qui était prise en charge jusqu'en 1992 par les «Etudes pédagogiques de l'enseignement primaire» (les derniers diplômés quitteront les «Etudes pédagogiques de l'enseignement primaire» en juin 1995).
Cette nouvelle licence, qui implique un parcours de 4 ans (1 année «tronc commun» + 3 ans de 2e cycle), articulant étroitement théorie et pratique, sera reconnue dans les 3 divisions de l'enseignement primaire public genevois, comme titre académique et professionnel, permettant de tenir une classe et d'exercer d'autres fonctions de même qualification.
2. Avantages d'une formation universitaire
C'est en 1912 qu'Edouard Claparède créait l'institut des sciences de l'éducation qui allait connaître une renommée mondiale sous le nom d'institut Jean-Jacques Rousseau. Dans l'esprit du fondateur, cet institut, privé à l'époque, devait permettre aux éducateurs de bénéficier du progrès des sciences de l'éducation et de la psychologie.
Confier à l'institut des sciences de l'éducation, devenu faculté au sein de l'université depuis 1974, la charge de former les enseignants primaires va dans la droite logique de cette histoire proprement genevoise.
Aujourd'hui, en Europe, il existe une tendance à donner aux enseignants primaires une formation de niveau universitaire. Le département de l'instruction publique a fait sienne cette conception en constatant, comme le disait avec humour Jacques-André Tschoumy, directeur de l'Institut romand de recherche et de documentation pédagogique, que s'il faut être universitaire pour soigner un canari, pourquoi ne le faudrait-il pas pour enseigner à des enfants?
Les avantages d'une formation des enseignants primaires confiée dans sa totalité à l'université, laquelle assume depuis 1993 rappelons-le un tiers de cette formation, sont les suivants:
a) Elévation du niveau de compétences
Le nouveau système de formation s'inscrit dans un courant qui inspire la plupart des réformes engagées dans les pays à statut économique comparable et qui vise à doter tous les enseignants des premiers degrés de la scolarité des compétences théoriques et pratiques que seules des études de niveau tertiaire permettent d'acquérir. Le parcours de formation ainsi que le règlement d'études relatifs à la licence en sciences de l'éducation mention «enseignement» élaborés par la FAPSE offrent à cet égard des garanties certaines.
b) Un nouveau type de professionnalisme
De manière générale, cette formation universitaire répond à un nouveau type de professionnalisme enseignant, lui aussi inscrit dans un courant largement répandu tant en Suisse que dans les pays du monde occidental. Il s'agit de promouvoir une attitude pédagogique nouvelle susceptible de contribuer en permanence à l'innovation. Elle doit permettre à l'enseignant d'assumer des responsabilités individuelles et collectives. Ce type de professionnalisme suppose un ensemble de compétences permettant de prendre, de manière autonome, les décisions favorisant au mieux les apprentissages des élèves, de gérer les problèmes liés aux comportements et aux motivations, de tenir compte de la diversité des situations personnelles des élèves.
c) Revalorisation
Indépendamment du titre universitaire auquel conduit cette formation, titre qui, en soi, garantit une mobilité professionnelle accrue, cette conception nouvelle de la formation est de nature à rendre la profession plus attrayante. Elle prépare à des activités plus diversifiées, des manières d'enseigner plus riches et, en insistant sur les responsabilités, elle mène à une autonomie professionnelle accrue. De plus, elle permet aux enseignants de devenir les principaux acteurs et initiateurs des innovations qui ne manqueront pas de se produire dans les années à venir.
d) Engagement
Comme dans la plupart des professions, la formation devient indépendante du futur employeur, en l'occurrence le département de l'instruction publique. L'une des conséquences de cette option conduit à modifier les conditions d'engagement du personnel enseignant et les mécanismes de sélection des candidats; celle-ci ne se fera plus au début des études sur la base d'une évaluation approximative des besoins mais au terme des études en fonction des postes disponibles.
e) Partenariat
Une autre conséquence tient à la nécessité d'instituer un partenariat durable entre la section des sciences de l'éducation et la direction de l'enseignement primaire. Ce partenariat prévu dans un contrat spécifique permet de réaliser l'articulation théorie-pratique dans les meilleures conditions et d'ajuster la formation à l'évolution des situations d'enseignement dans les écoles publiques genevoises. L'enseignement primaire, tout en respectant les règles de fonctionnement universitaires, est ainsi partie prenante de la formation dans ses aspects essentiels.
f) Mobilité
La formation universitaire telle qu'elle est prévue est conforme aux standards minimums de formation en vigueur dans les cantons suisses et dans les Etats européens; aussi, la libre circulation des enseignants formés à Genève peut-elle être envisagée avec un maximum de garanties, de même que la fréquentation par les étudiants d'autres universités.
Il est vrai que ce principe de la reconnaissance universitaire du métier d'enseignant peut sembler contredit aujourd'hui par certains milieux suisses qui envisagent la création de Hautes écoles pédagogiques. Il s'agit, en particulier, de la thèse n° 1 du 1er octobre 1993 de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique. Dans une lettre adressée le 24 mai 1994 au Secrétaire général de cette Conférence, le département de l'instruction publique a fait connaître sa nette préférence pour une formation du corps enseignant primaire à l'université de Genève et non pas dans les Hautes écoles pédagogiques.
Il faut admettre que la reconnaissance de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», constitue un pas important pour la promotion du métier d'enseignant primaire. Il faut rappeler à ce sujet que les universités suisses, à part l'université de Berne, ne connaissent pas de filière spécifique aussi développée qu'à Genève en sciences de l'éducation. En conséquence, il serait regrettable de ne pas considérer cet acquis genevois en termes de moyen de formation, de ne pas le valoriser dans la future formation initiale des enseignants primaires et de la doubler par une voie parallèle de formation au métier d'enseignant qui coûterait beaucoup plus cher.
3. Liens avec la rénovation de l'enseignement primaire
La nouvelle conception de la formation correspond à une pédagogie qui permet à l'élève, par un enseignement différencié, de se développer dans toutes ses dimensions, de construire lui-même ses connaissances parce que placé dans des situations d'apprentissage actif. Pour cela, l'enseignant doit savoir tenir compte des rythmes, des intérêts, des caractéristiques propres à chaque enfant.
Cette pédagogie, dont les origines sont déjà assez anciennes, se répand progressivement dans les écoles genevoises mais se heurte à des obstacles qui tiennent à une organisation de la scolarité par degrés, aux programmes d'enseignement, à des moyens d'enseignement standardisés ou encore au système d'évaluation.
Le département de l'instruction publique a, par conséquent, souhaité susciter un mouvement dans l'enseignement genevois en s'engageant sur la voie d'une rénovation comportant trois axes décrits dans un texte d'orientation diffusé en août 1994 et qui visent à:
1. individualiser les parcours de formation;
2. apprendre à mieux travailler ensemble;
3. placer les enfants au coeur de l'action pédagogique.
Le but de cette rénovation est de permettre à toutes les écoles du canton de s'associer progressivement à un renouvellement des pratiques pédagogiques et de rechercher en fonction des situations locales des modes de fonctionnement correspondant aux trois axes évoqués.
Le projet de formation universitaire des enseignants est antérieur à celui d'une rénovation de l'enseignement primaire. Cependant, formation et rénovation reposent sur les mêmes bases et orientations pédagogiques. Le département de l'instruction publique estime nécessaire, par souci de cohérence, de lier les deux projets. Il s'agit notamment de rapprocher, par des propositions de formation continue, les démarches pédagogiques des enseignants actuellement en fonction, de celles que développeront les enseignants nouvellement formés.
4. Le plan d'études proposé par l'université
Il est dans les missions de l'université, à l'article 4 de la loi sur l'université, du 26 mai 1973, «de développer les aptitudes nécessaires au transfert et à l'application à la vie professionnelle des connaissances acquises». Ce transfert de connaissances scientifiques dans le champ professionnel ne peut pas être plus marqué que dans le secteur de la formation pédagogique.
C'est pourquoi l'université a proposé de créer une nouvelle licence universitaire en sciences de l'éducation, mention «enseignement», et d'exposer à l'intention des députés le contenu du plan d'études qu'elle se proposera d'adopter, conformément à ses lois et statuts.
La nouvelle formation s'inscrira dans une réorganisation complète de la structure et des plans d'études de la section des sciences de l'éducation: le premier cycle sera ramené à une année et constituera un tronc commun suivi par l'ensemble des étudiants en sciences de l'éducation. Il débouchera sur un second cycle de trois ans offrant plusieurs cursus parallèle, menant tous à une licence en sciences de l'éducation, mais avec des mentions différentes.
Le second cycle conduisant à la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», assurera une formation à la fois académique et professionnelle. Il ouvrira à la fois sur un métier et la poursuite d'études de troisième cycle (diplôme d'études supérieures ou doctorat). Cette formation entend former des licenciés qui aient à la fois:
une culture scientifique de base en sciences humaines et sociales dans les domaines touchant à l'éducation;
des compétences orientées vers l'analyse de situations éducatives complexes, l'intervention et la recherche en éducation;
des compétences permettant d'enseigner dans une classe ou d'exercer d'autres fonctions pédagogiques dans l'enseignement primaire.
Parmi ces dernières, mentionnons les principales:
a) maîtriser le métier d'enseignant tel qu'il est défini par la société et les systèmes éducatifs;
b) savoir réfléchir sur sa pratique;
c) maîtriser les disciplines à enseigner et leurs didactiques;
d) s'approprier les sciences humaines et sociales comme base d'analyse des situations éducatives;
e) prendre en compte la dimension éducative du métier;
f) savoir concevoir, construire et gérer des situations d'apprentissage et d'enseignement;
g) savoir prendre en compte la diversité des élèves;
h) se sensibiliser aux dimensions relationnelles du métier;
i) intégrer une composante éthique à la pratique quotidienne;
j) apprendre le travail en équipe et la coopération avec d'autres professionnels;
k) assumer un rapport critique et autonome aux savoirs.
Le cursus envisagé favorisera une forte articulation théorie-pratique, notamment dans le cadre d'unités de formation dites «compactes», qui feront alterner des semaines de formation en faculté (séminaires, travaux dirigés) et des semaines de formation dans les écoles (stages intégrés et accompagnés).
Les étudiants suivront en outre des stages longs en responsabilité, des cours communs à tous les cursus de licence en sciences de l'éducation et une formation à la recherche. Ils compléteront leur formation par un mémoire de fin d'études.
Les principales unités de formation mettront l'accent sur:
les didactiques du français, de l'allemand, des mathématiques, des sciences, de la géographie, de l'histoire, des arts plastiques, de la musique, de l'éducation physique et des sports;
les approches dites transversales (relations intersubjectives et désir d'apprendre; rapport du savoir, métier d'élève, métier d'enseignant; diversité culturelle et gestion de classe; différences individuelles et difficultés d'apprentissage; régulation des processus d'apprentissage et évaluation; enseignement spécialisé et intégration; l'école, les familles, la société);
les outils de travail (outils de recherche d'une part, outils d'enseignement d'autre part, notamment informatique et vidéo);
l'intégration des divers apports contribuant à la construction des compétences professionnelles et scientifiques;
la consolidation différenciée des acquis précédents, au gré des besoins des étudiants.
5. Places de stages
La faculté de psychologie et des sciences de l'éducation ne pratique et ne pratiquera aucune limitation d'accès au 1er cycle, conformément au principe de libre accès à l'université.
Il paraît en revanche indispensable de limiter l'entrée au second cycle pour tenir compte du nombre de places de stages disponibles dans l'enseignement primaire. La nouvelle formation des enseignants suppose une alternance soutenue entre moments de stage et moments de formation à l'université. De ce fait, il est indispensable que les étudiants puissent travailler dans les classes pour au moins un tiers de leur temps, dans de bonnes conditions d'encadrement garantissant une formation de qualité.
Or, les capacités d'accueil de l'enseignement primaire sont limitées. Il est donc légitime de restreindre l'accès au second cycle mention «enseignement». Les autres parcours de second cycle resteront ouverts en principe à tous les étudiants ayant achevé le 1er cycle.
La limitation d'accès au second cycle sera subordonnée aux principes juridiques suivants:
la possibilité de sélectionner les étudiants qui accèdent au 2e cycle de formation doit répondre à un intérêt public prépondérant par rapport à l'intérêt du candidat au livre choix de la profession, compte tenu du fait que cette licence n'aboutit pas forcément à l'enseignement primaire;
la restriction d'accès doit être prévue dans la loi formelle qui définit par ailleurs son objet, son but et ses limites;
en plus, il doit ressortir du texte légal que la restriction d'accès est l'ultime solution (principe de proportionnalité);
un critère non arbitraire déterminant le choix des candidats doit être indiqué dans le texte légal;
il en va de même des autorités, de leurs compétences, ainsi que de la procédure qui doivent être fixées dans les grandes lignes.
6. Commentaire article par article relatif à la modification de la LIP
Modification du libellé de la section 1 du chapitre II au titre IV de la loi sur l'instruction publique: «exigences à l'engagement et formation» remplace «candidats».
Art. 133: suppression du concours d'entrée aux études pédagogiques primaires
L'ancien article 133 constituait la base légale du concours à l'entrée aux études pédagogiques, organisées sous la responsabilité de l'employeur. Or, la formation sera dorénavant assumée entièrement par l'université, soit, pour elle, la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation.
L'ancien article 133 n'a dès lors plus de raison d'être et il doit être abrogé.
Art. 134: exigences à l'engagement dans l'enseignement primaire
Par rapport à l'article 134 ancien, cet article précise l'exigence de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», de la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de l'université de Genève comme titre de référence à l'engagement dans l'enseignement primaire.
L'Etat, en sa qualité d'employeur, reste néanmoins libre dans le choix des futurs enseignants primaires qui sont au bénéfice du titre exigé. L'obtention de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement», ne constitue donc pas une garantie d'emploi.
Les articles 2, 7 et 8 de l'accord intercantonal sur la reconnaissance des diplômes de fin d'études, du 28 février 1993 (C 1 0,6), nous imposent de laisser ouverte la possibilité d'engager dans l'enseignement primaire les porteurs d'un titre jugé équivalent à la nouvelle licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement». Le règlement de reconnaissance relatif aux diplômes d'enseignants primaires qui sera adopté, le moment venu, par la conférence des directeurs de l'instruction publique, en application de l'accord intercantonal, précisera les conditions d'équivalence. Ce règlement de reconnaissance remplacera les recommandations actuelles de la conférence des directeurs de l'instruction publique relatives à la «Reconnaissance réciproque des diplômes cantonaux des enseignants», du 28 octobre 1990, qui permet aux cantons d'imposer un délai de 2 ans au maximum aux titulaires de diplômes extra-cantonaux pour leur permettre de se mettre au courant des spécificités du canton.
Art. 134A
Alinéa 1: Stages pratiques dans l'enseignement primaire
L'alinéa 1 fait ainsi apparaître l'intérêt public signalé au chiffre 4 ci-dessus qui réside dans la qualité de la formation, de niveau universitaire, avec une forte articulation théorie-pratique grâce aux places de stages qui répondent aux exigences de formation; leur nombre est chaque fois fixé pour 4 ans de façon à ne pas compromettre un minimum de planification universitaire.
Il appartient à la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation d'assumer entièrement l'organisation des études universitaires menant à la licence, mention «enseignement» (voir article 83, alinéa 3, de la loi sur l'université).
En revanche, le département fixe le nombre de places de stages pourvues de formateurs praticiens dans l'enseignement primaire en tenant compte des exigences de formation fixées par la section des sciences de l'éducation. Cette limitation est rendue nécessaire par la capacité d'accueil et d'encadrement des étudiants-stagiaires dans l'enseignement primaire.
Alinéa 2: Possibilités de sélection
L'objet de la restriction d'accès réside dans la possibilité de sélection lorsque le nombre de candidats admissibles au 2e cycle de formation est supérieur au nombre de places de stages adéquates disponibles.
Le but de la restriction est de garantir aux étudiants admis une formation pratique adéquate compte tenu de la capacité d'accueil et d'encadrement limitée.
La sélection à l'entrée au 2e cycle ne peut intervenir que dans le cas où, malgré des informations circonstanciées durant la première année, le nombre d'étudiants dépasse toujours le nombre de places de stages disponibles.
Par ailleurs, l'étudiant refusé à l'entrée au 2e cycle peut se représenter au moins une fois lors d'une nouvelle procédure d'admission, conformément aux exigences imposées par le règlement de l'université et le règlement d'études.
La sélection est opérée sur l'aptitude présumée des étudiants à suivre le cursus de formation sur la base d'un dossier et, le cas échéant, d'épreuves complémentaires et d'entretiens.
B. Projet de loi relatif au financement de la licence en sciences de l'éducation, mention «enseignement»
Le but du projet de loi de financement est de donner une base légale à la dépense nouvelle induite par la nouvelle filière de formation universitaire.
Le développement de la nouvelle filière se répartit sur trois ans, de 1996 à 1998, au gré de l'ouverture successive des années d'étude. Le second cycle mention «enseignement» s'ouvrira le 1er octobre 1996, et accueillera, grâce à des mesures réglementaires transitoires, des étudiants ayant suivi le 1er cycle actuel.
Le Conseil d'Etat a donc accepté d'introduire dans la loi un engagement budgétaire conçu sur une période de trois ans, soit une période de 1996 à 1998. Un tel engagement, en effet, n'est pas contraire à la loi du 7 octobre 1993 sur la gestion administrative et financière de l'Etat, qui prévoit, certes, à l'article 12 que les crédits budgétaires sont alloués de manière annuelle, mais qui prévoit également, à l'article 50, le principe du crédit-cadre dans lequel nous sommes.
Pour revenir à l'explication des dépenses sur les années 1996, 1997 et 1998, il faut prendre en compte, d'une part, que, à roulement normal en 1998, le coût budgétaire total de la nouvelle formation serait de 6 875 000 francs. Cela inclut le total des traitements et charges sociales des membres du corps enseignant universitaire, les indemnisations des formateurs de terrain et les frais de fonctionnement et d'équipement. Cette somme sera portée en augmentation du budget universitaire. Cette garantie part du principe que l'université, en fonction de ses tâches traditionnelles, définit son budget en termes de besoins annuels et rajoute les sommes admises pour les années 1996, 1997 et 1998.
Par ces motifs, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à adopter ces deux projets de loi.
Préconsultation
M. Pierre Vanek (AdG). Nous sommes ici en préconsultation et je suis tenu d'être bref, alors qu'il y aurait beaucoup de choses à dire. Je ferai donc brièvement quelques observations sur ces deux projets de lois et sur l'ensemble du projet de rénovation de la formation des enseignants.
La première chose, qui me semble un tant soit peu inquiétante et que j'ai relevée en prenant connaissance de l'exposé des motifs du projet de loi, est que la première volée formée par cette nouvelle filière commencera ses études en 1996 et ne sortira avec le diplôme ad hoc lui permettant d'enseigner au niveau primaire qu'en 1999, ce qui signifie qu'on se trouve dans la situation suivante : pendant quatre ans, ce canton n'aura pas formé d'enseignants primaires. Il y aura un trou noir dans la formation, à un moment où il y aurait un besoin accru de sang neuf. Cela se traduira par une économie non négligeable pour le budget de l'Etat, mais cette situation est douloureuse et regrettable. Il est incroyable qu'on n'ait pas pu - ou pas voulu ! - garantir une rénovation de la formation de l'enseignement primaire qui assure la continuité de cette formation. Cette volonté d'économie est douteuse, et il aurait au moins fallu avoir le courage de l'avouer.
La deuxième chose concerne le tableau, figurant en annexe à ces deux projets de lois, à propos des coûts, en les comparant avec ceux de 1992. Le coût de la formation était de l'ordre de 9,5 millions. Or, on apprend que la nouvelle formation coûtera 6,8 millions. L'économie supplémentaire envisagée est donc de l'ordre de 3 millions, économie faite sur le dos de la formation des enseignants primaires. On peut aussi, bien sûr, discuter sur la manière d'investir, mais il faut reconnaître qu'on investit moins. Cette économie est sans doute une des motivations de ce projet, bien que cela ne soit, comme par hasard, mentionné nulle part. On peut faire des économies, on peut vouloir les faire, mais il faut avoir le courage de les défendre en tant que telles. Vous ne me ferez pas croire que c'est tout à fait innocent et que cette formation coûte beaucoup moins cher, sans que cela ne soit intentionnel.
En observant ces tableaux, on voit qu'une ligne concernant les indemnités des candidats est vierge : évidemment puisqu'il n'y a plus de candidats mais des étudiants à l'université ! Nous avons déjà débattu de la question de l'indemnisation d'un certain nombre de personnes en cours de formation professionnelle, à propos notamment des indemnités des élèves infirmières. Je déplore, une nouvelle fois, la suppression de cette indemnisation, car on n'aura plus la possibilité d'engager des gens ayant vécu une expérience professionnelle dans un milieu extra-scolaire, qui n'aient pas forcément vingt ou vingt-deux ans, pour un métier qui la requerrait précisément. Comme on l'a évoqué pour les infirmières, cette possibilité était précieuse pour des enseignants en contact avec des gens de toutes sortes de milieux professionnels, avec des parents d'élèves. Certes, on les payait et ils coûtaient quelque chose, mais il faut relever aussi que ces candidats à la formation primaire fournissaient un effort, un travail non négligeable, en contrepartie.
Cela me permet de faire le lien, avec quelques réserves que j'ai à formuler, sur le fait que l'on considère que la formation au métier d'enseignant primaire doive être forcément améliorée par le passage à l'université. Cette espèce de valorisation abstraite par la formation universitaire correspond à une dévalorisation de la formation professionnelle existante. Elle tend à considérer le métier d'enseignant moins comme un métier pratique qu'un métier se fondant essentiellement sur des considérations théoriques. Or, pour moi, à l'évidence, ce n'est pas à la sortie de la formation qu'un enseignant est capable d'assumer, d'emblée, l'ensemble des facettes de son métier. L'essentiel, c'est l'engagement dans la pratique concrète du métier et dans une réflexion en cours d'exercice ! A mon avis, cette proposition et tout ce discours sur le fait qu'on revalorise, qu'on reprofessionnalise la formation, correspondent à quelque chose de négatif, par rapport à la situation actuelle des enseignants en cours d'emploi et cela me pose quelques problèmes.
Je n'interviendrai pas sur le lien avec la rénovation de l'enseignement primaire parce qu'en cinq minutes on ne peut pas faire le tour de deux projets de lois et de ce projet de rénovation. Ce lien me semble un tant soit peu abusif, tel qu'il est présenté. Je relève simplement qu'on évoque dans ce rapport...
La présidente. Non, Monsieur Vanek, je suis navrée de vous interrompre, mais je vous ai déjà accordé une minute de plus !
M. Pierre Vanek. Juste quinze secondes, Madame la présidente ! Un mot sur l'harmonisation fédérale ! On apprend que Genève entend agir seule et on laisse entendre que c'est bien d'être à l'avant-garde et qu'il n'y a pas de problème à ne pas tenir compte des propositions des directeurs cantonaux de l'instruction publique. C'est surprenant alors que, dans d'autres domaines, comme les demi-tarifs de bus par exemple, on m'a dit qu'il fallait faire comme Zurich. Je trouve ce double discours un peu surprenant. Je m'arrête là ! A l'évidence, je n'ai pas pu dire le tiers du quart de ce qu'il y avait à dire, mais nous en débattrons en commission. Merci, Mesdames et Messieurs, pour votre patience et merci, Madame la présidente, pour le supplément de temps que vous m'avez accordé.
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Ce projet de loi vise à revaloriser la formation des professionnels de la pédagogie de l'école primaire. C'est LE point positif du projet de loi et c'est le seul.
Pour le surplus, notre groupe a quelques remarques à faire. Le fait qu'une revalorisation doive forcément passer par l'université ne devrait plus avoir cours, alors même que nous adhérons à des propositions de formation professionnelle supérieure, de maturité professionnelle, de hautes écoles. L'université non seulement n'est plus le seul lieu de valorisation des formations, mais elle est particulièrement un lieu assez inadéquat en ce qui concerne les formations professionnelles.
Si les formations professionnelles doivent, comme vous l'avez bien relevé dans votre projet de loi, comporter une forte articulation théorie-pratique, le projet l'expose de manière pertinente. Il est à l'évidence hors de la mission de l'université, par exemple : «d'apprendre le travail en équipe et la collaboration avec d'autres professionnels». L'université est bien incapable de remplir une mission pareille. Si jamais on devait lui donner une telle mission, alors la formation des enseignants primaires à l'université serait un précédent.
En suivant l'organigramme du système d'enseignement publique genevois, qui se trouve dans le mémento à notre disposition, on remarque en page 1 quelque chose de remarquable : pour la première fois visible de cette manière, à mon avis, on voit une division entre scolarité obligatoire, post-obligatoire et tertiaire. Dans le tertiaire, nous trouvons l'université et l'ensemble des écoles professionnelles supérieures. C'était une immense joie de le constater, car c'est là qu'est l'intérêt !
Cela signifie que ces formations - et les études pédagogiques en font partie jusqu'ici - sont des études tertiaires et doivent être retenues comme telles. Si jamais les études pédagogiques devaient passer par l'université, cela créerait alors un précédent et toutes les autres écoles devraient passer aussi par l'université, puisqu'elles sont au même niveau. L'université aurait tout à y perdre, parce que sa mission est bien de transmettre des connaissances, de faire de la recherche, mais sûrement pas d'assurer des formations professionnelles.
Concernant la mobilité professionnelle, il est vrai qu'en élevant le niveau de la formation on améliore le niveau de mobilité intercantonale ou internationale, mais on n'améliore en rien la mobilité entre les ordres d'enseignement ou entre les différentes approches professionnelles. Finalement, il faut encore poser la question : que deviendra le salaire de ces nouveaux enseignants ? Il y a deux façons de valoriser une profession : par la formation et par la reconnaissance salariale. Quelle sera la reconnaissance salariale de cette nouvelle formation ?
Pour finir, je remarque que le prix de ce projet de formation est fort peu détaillé. En général, il est difficile de se prononcer sur un budget portant sur des millions, quand celui-ci est aussi peu détaillé, mais nous verrons cela en commission.
Mme Liliane Charrière Urben (S). Le groupe socialiste accueille favorablement ces deux projets de lois et se réjouit de la mise en place d'une meilleure formation des maîtres de l'enseignement primaire. Nous souhaitons vivement toutes améliorations dans ce sens qui ne peuvent qu'être bénéfiques à l'école et surtout aux enfants qu'elle a charge de former et de préparer dans le sens des objectifs de la loi. Pourtant quelques observations s'imposent. Quelques-unes ont déjà été faites, j'essaierai de ne pas les répéter.
Tout d'abord, on pourrait regretter que ces deux projets de lois ignorent ou négligent les vues formées par la motion 379, dite motion Sauvin, concernant la réorganisation des études pédagogiques primaires et secondaires, adressée au Conseil d'Etat et adoptée par le Grand Conseil en avril 1986. Elle est brève. Permettez-moi de vous la rappeler :
«Considérant :
- que deux structures de formation régissent actuellement la formation pédagogique des enseignants, l'une conduisant au métier d'instituteur, l'autre à celui de maître secondaire;
- que cette double voie renforce la coupure entre l'enseignement primaire et secondaire, alors que personne ne nie aujourd'hui qu'il y a lieu de considérer la scolarité comme un tout;
- que le développement de l'enfant et de l'adolescent doit être envisagé davantage dans sa continuité que dans ses moments successifs;
- que dans une société qui évolue rapidement la polyvalence doit être considérée comme une richesse, non seulement pour les élèves mais pour les maîtres eux-mêmes, ainsi que pour les responsables administratifs et pédagogiques;
invite le Conseil d'Etat
à rapprocher ces deux structures, notamment à créer un tronc commun à ces deux systèmes».
Le conseiller d'Etat de l'époque avait reçu très favorablement cette motion votée à la quasi-unanimité, si j'ai bien lu le Mémorial, et il avait ajouté :
«J'accepte volontiers au nom du Conseil d'Etat votre motion, et je vous propose de l'adresser directement au Conseil d'Etat. Je la prends en charge au niveau de mes services et espère y répondre d'ici trois à quatre mois».
Les trois ou quatre mois sont passés, après eux, près de neuf ans, sans que la motion ne reçoive une quelconque réponse, puisqu'elle figure encore dans la dernière liste des objets en suspens. Pour la forme au moins, on aurait pu y faire allusion, sinon y répondre véritablement. Bien entendu, le Grand Conseil, dans l'intervalle de ces neuf ans, a débattu de la refonte des études pédagogiques, il y a quelque trois ans. Discussions animées, avis pour le moins partagés, c'est du moins l'impression qui prévaut quand on voit le score très serré des votes : égalité. C'est la présidente du Grand Conseil de l'époque qui avait tranché en faveur d'un soutien orienté dans le sens des projets de lois qui nous sont soumis ce jour.
Il était possible d'imaginer, sinon des voies totalement différentes, du moins des variantes, à l'image par exemple des IUFM - Instituts universitaires de formation des maîtres français - qui, sans être parfaits - qui peut prétendre l'être ! - prennent en compte la formation de tous les maîtres, de la maternelle au lycée, avec des choix de spécialisation vers l'un ou l'autre secteur, au fur et à mesure de l'avancement des études.
Autre élément qui mériterait davantage de clarté pour ne pas dire de franchise : la mobilité. Mme Maulini-Dreyfus y a fait allusion. J'ajouterai simplement qu'à l'heure actuelle la formation des maîtres primaires permet à tout enseignant des cantons romands de venir enseigner dans l'un ou l'autre de ces cantons. Il n'y a, à ce niveau de mobilité, pas grand-chose de nouveau. Bien sûr, il y a l'eurocompatibilité ! Elle se limite, compte tenu de la langue, vous le savez bien, à la France et à la partie francophone de la Belgique. Cela ne peut être utile que dans quelques cas ! Le statut, les conditions de travail et surtout d'engagement dans ces deux pays amis ne sont pas, pour le moment du moins, si attractifs qu'ils puissent susciter une vague d'émigration d'instituteurs genevois.
Donc, en réalité et à première analyse, la mobilité évoquée ne dépassera guère les possibilités actuelles, c'est-à-dire obtenir un poste dans l'enseignement primaire au sens large, que l'on soit maîtresse primaire enfantine, instituteur, formateur, et, qui sait ? - une chance sur soixante environ - inspecteur, encore qu'avec l'ancienne formule, le poste était garanti, ce qui maintenant ne sera plus le cas ! Dans les faits, celui ou celle qui souhaiterait faire autre chose, par exemple enseigner dans le secondaire, devra reprendre des études, préparer une licence spécifique d'enseignement, requise pour ce secteur, c'est-à-dire s'astreindre à trois ou quatre ans d'études supplémentaires. A mon avis, il n'y a rien de changé sous le soleil à ce point de vue.
Enfin, comme le fait remarquer l'exposé des motifs sous lettre c), concernant la revalorisation, il est un aspect qu'il faudra bien considérer et mettre à jour, celui de l'adaptation du statut des nouveaux instituteurs. Dans la fonction publique, les postes sont classés selon une échelle de salaires qui tient compte de cinq critères, dont celui des titres exigés pour chacun d'eux. Jusqu'ici la fonction d'instituteur ne comportait pas l'exigence d'une licence. Au plan salarial, c'est le seul point qui différencie actuellement enseignants du primaire et du secondaire. L'écart, disparaissant au plan des titres, subsisterait-il au plan de la rémunération ? On le conçoit mal, et nous espérons que le Conseil d'Etat, conscient de ne pas introduire d'inégalité de traitement dans ce secteur sensible, saura adapter ses budgets à venir en conséquence. A première vue, mais je me trompe peut-être, le plan financier qui nous est soumis n'en tient pas encore compte.
Je terminerai là, encore qu'il y aurait bien d'autres points à aborder, mais nous aurons l'occasion de le faire en commission. Nous nous réjouissons donc de traiter ces deux projets de lois, lors des travaux de la commission de l'enseignement, à laquelle nous demandons leur renvoi.
M. Roger Beer (R). Le groupe radical accueille ces deux projets également très favorablement, peut-être avec moins de réserves que celles émises précédemment par des professionnels ou des personnes issues du giron de l'enseignement.
Ce qui nous frappe, dans toute cette discussion, c'est que le changement proposé est combattu dès le départ - alors que nous ne savons même pas encore exactement comment il sera perçu par l'intérieur - sur des éléments très subjectifs, tels que salaire et statut. Ceci est dommageable quand, en préconsultation, on les avance comme seuls éléments, positifs ou négatifs, de ces projets de lois. Aujourd'hui, c'est consciemment que le Conseil d'Etat poursuit ce qui avait été entamé lors de la précédente législature, c'est-à-dire la refonte et la reconsidération totale de la formation des enseignants, par rapport à ce qui nous attend à l'horizon intercantonal, voire européen.
La grande difficulté pour Genève, c'est d'avoir une formation d'enseignants très élevée, qui puisse résister à l'ouverture des frontières. Les exigences, même de base, par rapport aux cantons voisins, sont très différentes et - je l'ai déjà dit en commission, mais je peux aussi le dire en plénum - je suis tout à fait heureux que mes enfants fréquentent l'école genevoise et non pas une école d'un autre canton.
Malgré tout, on doit s'adapter à cette ouverture, ce qui risque de demander un certain nombre de sacrifices. Lors de l'étude approfondie de ces projets de lois, la commission de l'enseignement devra en tenir compte, mais il faudra aussi comprendre et examiner les possibilités d'une formation plus large, permettant d'autres débouchés que le métier d'instituteur. A mon sens, le grand avantage de cet essai de formation différenciée, de revalorisation de la filière, est que, à l'instar d'autres étudiants dans d'autres formations, des gens se retrouveront sur le marché du travail et devront chercher un poste. Finalement, le poste de travail ne sera pas acquis avant la formation, privilège qui - à titre personnel, en tant qu'étudiant d'une autre filière - suscitait en moi quelques avis mitigés sur le sujet.
Enfin, sans vouloir m'avancer davantage, je me réjouis que l'on étudie ces projets en commission et que l'on entende les représentants des instituteurs, des directions, de l'université, du budget pour voir quelle dépense cela représente. J'espère aussi que la retraite des instituteurs - vous savez que c'est un de mes dadas - sera prise en considération dès la formation. Cette question a déjà fait l'objet de grands débats - on risque d'aborder ce sujet tout à l'heure plus longuement - en rapport avec le recyclage et la formation continue.
Il ne faut effectivement pas oublier qu'il existe une fatigue plus marquée chez des gens confrontés à des enfants et à des adolescents que chez des gens confrontés à d'autres problèmes. Cet aspect sera également abordé en commission.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Qu'il est difficile de vouloir bien faire ! Qu'il est difficile tout court de vouloir faire ! A écouter M. Vanek, il vaudrait mieux ne rien changer. A écouter Mme Maulini-Dreyfus, il vaudrait mieux s'orienter vers les hautes écoles pédagogiques, dans l'idée d'une formation tertiaire supérieure ! A écouter Mme Charrière-Urben, il faudrait suivre la piste proposée par M. Sauvin, dont je relisais, hier encore, et la motion et les commentaires, consistant à rapprocher les deux formations primaire et secondaire. Ceci implique de facto, étant donné que la formation secondaire exige au minimum une licence, un rapprochement vers l'université, comme vous pouvez bien l'imaginer.
Nous voilà face à trois visions, trois raisons de critiquer, et trois propositions de solutions totalement différentes. Or, ce projet de formation, élaboré par des enseignants et des représentants de l'université, qui y ont travaillé pendant deux ans, a été communiqué à la Société pédagogique genevoise laquelle, dans ses instances supérieures en tout cas, nous a toujours signalé et son intérêt et son soutien. Ce projet vise effectivement à faire en sorte que la formation des enseignants primaires, pour les prochaines années, soit adaptée à un monde en changement.
Il y a bien, Monsieur Vanek, un lien avec la rénovation, dans la mesure où l'on intègre dans la formation les principes mêmes de la rénovation.
Mme Maulini-Dreyfus, il existe une formation professionnelle à l'université : celle des médecins, qui a comme caractéristiques un haut niveau universitaire et une démarche professionnelle, avec des stages cliniques, non pas des stages pratiques. S'il fallait comparer les démarches, on trouverait des analogies avec notre projet. Nous sommes probablement le seul canton à oublier trop souvent que nous avons une faculté des sciences de l'éducation connue, que l'on sait fort bien honorer une fois l'an, à l'occasion du Dies academicus. Ce jour-là, nous nous félicitons, décernons des diplômes à ceux qui nous reviennent après avoir fait «fortune ailleurs». Le reste du temps, nous voilà en train d'imaginer d'autres institutions pour donner une formation à celles et ceux qui ont pour tâche de former des gens.
La démarche de ce projet de loi est d'utiliser aussi «la matière grise» que nous avons, qui est respectée au-delà de nos frontières et qui prétend, en matière de sciences de l'éducation, avoir quelque chose à dire. C'est bien la raison pour laquelle ont travaillé, main dans la main, des enseignants et des universitaires. C'est avec l'accord de la faculté et de l'université que cette nouvelle formation est mise en place. Vous devrez les auditionner en commission, je n'entre donc pas dans les détails.
Mme Maulini-Dreyfus, lorsque vous approuvez les budgets, vous n'avez pas, et de loin, les éléments dont vous disposez, ici, dans ce projet de loi. Vous vous plaignez d'informations lacunaires concernant les millions dépensés, mais vous n'en avez jamais plus d'habitude, lorsque vous approuvez les budgets au Grand Conseil; au contraire, vous avez même davantage de précisions, ici.
Bien sûr, on pourra toujours être pour ou contre ce projet, mais il faut définir ce que doit être la formation des enseignants. Doit-elle être produite uniquement à l'intérieur de l'institution DIP ou doit-on faire appel à des compétences extérieures ? Doit-on admettre que puisse venir de l'université une partie de la science transmise à nos enseignants ? Nous pensons que oui et que ce projet longuement mûri, encore une fois en collaboration avec d'autres, est bon.
Ce n'est pas, Monsieur Vanek, parce qu'il coûte moins cher qu'il est nécessairement moins bon. Ce projet a été évalué par ceux qui l'ont mis au point. Nous avons accepté leurs propositions, et ce sont ces propositions que nous vous présentons aujourd'hui. Leur mission était bien de ne pas construire un cadre mirifique que nous n'aurions pas pu assumer. Or, je tiens à dire ici, de façon claire, que celles et ceux qui l'ont soutenu et élaboré estiment que ce projet est faisable, avec les moyens demandés.
Pour le reste, je vous engage les uns et les autres à aborder ce projet, bien qu'il ne vienne pas de tous les bancs de ce Grand Conseil, avec un regard ouvert qui permette véritablement de cerner l'objectif, sans camper sur vos positions politiques de départ. Je souhaite bon vent aux travaux de la commission de l'enseignement.
C es projets sont renvoyés à la commission de l'enseignement et de l'éducation.