Séance du vendredi 9 juin 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 8e session - 28e séance

PL 7220-A
16. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mme et M. Elisabeth Häusermann et Roger Beer modifiant la loi instituant des mesures d'encouragement à la retraite anticipée (B 5 16). ( -) PL7220
Mémorial 1995 : Projet, 1604. Commission, 1612.
Rapport de M. Claude Blanc (DC), commission des finances

La commission des finances a étudié le projet de loi 7220 lors de ses séances des 12 et 26 avril 1995, tenues sous la présidence de Mme Claire Torracinta-Pache, en présence de MM. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat, M. Patrick Pettmann, directeur du service finances et assurances à l'office du personnel de l'Etat, et M. Jean-Daniel Rossi, directeur de la division «personnel» du département de l'instruction publique.

Le projet de loi 7220, déposé par Mme Elisabeth Häusermann et M. Roger Beer, vise à modifier la loi instaurant des mesures d'encouragement à la retraite anticipée, en faisant porter le calcul de la rente non sur le dernier traitement mensuel de base comme c'est actuellement le cas, mais en tenant compte du taux moyen d'activité.

Les auteurs du projet de loi se basent essentiellement sur la situation au département de l'instruction publique. En effet, il est, disent-ils, courant dans l'enseignement qu'un titulaire obtienne le changement de son taux d'activité, soit en le diminuant, soit en l'augmentant. D'où deux injustices possibles, soit l'enseignant à temps partiel obtient l'augmentation de son taux d'activité avant de demander le Plend, et sa rente est abusive, soit il obtient la diminution de son activité, et il est injustement pénalisé. M. Rossi a déclaré à la commission que les craintes exprimées quant aux abus étaient purement hypothétiques, aucun cas ne s'était présenté jusqu'ici. D'autre part, il doute qu'un enseignant à temps partiel puisse obtenir de passer au temps complet durant les dernières années de son activité.

Par contre, il est possible que certains collaborateurs, enseignants ou non, demandent à réduire leurs activités à quelques années de la retraite pour des raisons de santé, plutôt que de recourir au détestable artifice du certificat médical. Pour ces personnes, et dans ce cas-là seulement, le Conseil d'Etat a admis qu'il était possible de ne pas les pénaliser et de les laisser partir au Plend sur la base du taux d'activité des dix dernières années précédant celui-ci. Dans ce cas-là également, les craintes des auteurs du projet de loi n'apparaissent donc pas fondées.

M. Vodoz souligne, par ailleurs, que les mesures d'encouragement à la retraite anticipée sont parmi les rares propositions budgétaires ayant obtenu l'accord de tous les partenaires sociaux. Il ne juge donc pas souhaitable de les modifier déjà.

Il est relevé également que la proposition constituerait une exception au principe contenu dans la loi sur les traitements qui veut que toutes les indemnités, qu'elles soient de départ, de décès ou de licenciement, sont calculées sur le dernier salaire de base.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la commission vous recommande, par 9 voix contre 1 (rad) et 1 abstention (rad), de rejeter le projet de loi 7220.

PROJET DE LOI

modifiant la loi instaurant des mesures d'encouragementà la retraite anticipée

(B 5 16)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi instaurant des mesures d'encouragement à la retraite anticipée, du 15 décembre 1994, est modifiée comme suit:

Art. 3, al. 2 (nouveau, l'al. 2 ancien devenant l'al. 3)

2 Cette rente peut être calculée en tenant compte du taux moyen d'activité.

Premier débat

Mme Elisabeth Häusermann (R). Notre amendement à la loi instituant le Plend ajoute, à la seule mesure proposée par celui-ci, une seconde mesure, mais ne substitue pas celle-ci à celle-là, comme le rapporteur de la commission des finances le laisse croire.

Si la rente de départ représente 20% du dernier salaire - comme le prévoit la loi actuelle - et que, par conséquent, elle est supérieure aux 20% du taux moyen d'activité, tant mieux ! Nous proposons qu'en plus cette rente puisse être les 20% du taux moyen d'activité.

Par notre proposition, le nombre de fonctionnaires susceptibles d'être incités à prendre une retraite anticipée se trouve augmenté. Or, inciter au départ anticipé, c'est justement le but du Plend. Nous allons dans son sens en proposant simplement l'ouverture la plus grande.

La commission des finances vous propose de rejeter cette ouverture : à croire que la diminution de la charge salariale lui a été indifférente; à croire que nous n'avons pas à lutter contre le chômage, notamment des jeunes; à croire qu'une mesure - celle que nous proposons - qui permet à un fonctionnaire de diminuer son emploi avant de prendre une retraite anticipée, sans aucunement être pénalisé, n'est d'aucun intérêt dans le contexte social actuel; à croire surtout que le département de l'instruction publique n'a pas besoin d'anticiper le renouvellement du corps enseignant, dont il reconnaît pourtant que le vieillissement global est préoccupant. Il y a actuellement six mille quatre cent soixante enseignants à l'école primaire, au cycle d'orientation et dans l'enseignement postobligatoire, sans compter ceux qui travaillent à l'université.

Grâce au Plend actuel, vingt postes seulement ont été libérés par des départs à la retraite anticipée, soit environ 3%. Or, dans cinq ans déjà, les enseignants de l'enseignement postobligatoire qui atteindront l'âge de la retraite se compteront par plus de deux cents par an; dans dix ans, par plus de trois cents par an; et dans quinze ans, par près de cinq cents par an. Nous craignons autant le vieillissement global de ce corps enseignant que la situation inverse qui arrivera sous peu, lorsque ce corps sera composé dans sa grande majorité de personnes en début de carrière.

Le Conseil d'Etat s'est réservé la possibilité de prendre d'autres mesures d'incitation à la préretraite que celle du Plend actuel, si les départs anticipés ne devaient pas atteindre 1% du nombre de fonctionnaires. Or, chez les enseignants, voyez le rapport ! Il est donc évident que le Plend actuel est peu efficace. Que va alors faire le Conseil d'Etat, s'il refuse notre proposition ?

Mesdames et Messieurs les députés, la commission des finances se leurre lorsqu'elle vient vous dire que tout va très bien ainsi. Force sera de le constater ! A moins que ce Grand Conseil, saisissant les enjeux de notre proposition, ne fasse preuve d'indépendance d'esprit, renonce à suivre le préavis de la commission des finances et adopte le projet de loi qui vous est soumis ce soir.

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Mme Häusermann vient à nouveau de plaider pour son projet de loi, en avançant toutes sortes d'arguments très intéressants en eux-mêmes mais qui n'ont rien à voir avec sa proposition, puisqu'il a été démontré en commission des finances qu'actuellement on ne connaît aucun fonctionnaire susceptible d'être concerné par ce projet et qu'on doute qu'il puisse y en avoir dans le futur.

Il est donc tout à fait faux de dire qu'on augmentera ainsi le nombre des fonctionnaires qui pourront profiter du Plend. Quand un fonctionnaire, bientôt susceptible de bénéficier du Plend, a des problèmes de santé, le Conseil d'Etat admet qu'on prenne en compte le taux d'activité sur la base des derrières années. Pour les autres, il n'y a pas de cas connus où cela pourrait apporter quelque chose de plus.

Par contre, cela poserait certains problèmes, du fait notamment que le principe proposé par ce projet de loi est contraire à celui qui est à la base des indemnités de départ de la loi sur les traitements, c'est-à-dire que, chaque fois qu'on doit quitter l'Etat, pour une raison ou pour une autre, en cas de licenciement, de démission, ou, malheureusement, de décès, la loi indique que le dernier salaire est déterminant pour la fixation de l'indemnité de départ. C'est un principe absolu. Si l'on commence, pour un hypothétique avantage, à remettre en cause ce principe, on sombre dans l'anarchie.

C'est la raison pour laquelle la commission des finances, à l'unanimité moins deux voix - parce qu'elles ne pouvaient pas faire autrement - a décidé de vous recommander le rejet de ce projet de loi.

M. Roger Beer (R). Ce sujet me tient particulièrement à coeur, d'autant plus que le Conseil d'Etat et la commission des finances n'en ont cure et estiment qu'il ne faut même pas entrer en matière, étant donné que c'est un sujet mineur.

Le rapport de la commission des finances est, à mon avis, relativement affligeant et les paroles de M. Blanc, rapporteur, me rappellent les propos d'une de ses anciennes collègues de parti, qui s'était également acharnée contre le projet de loi que M. Föllmi, alors président du DIP, avait reconnu, plus tard, comme étant à la base du Plend. Je ne peux pas vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, si nous assistons, ce soir, aux prémices d'un même phénomène, quoique...!

A lire le rapporteur, on voit qu'il pourrait exister des cas d'application, mais qu'on ne veut pas adapter la loi déjà aujourd'hui, même par un simple article. Si jamais une demande émanait d'un instituteur, d'un professeur ou d'un quelconque fonctionnaire, il serait toujours assez tôt pour réagir et s'adapter... Je ne peux pas admettre ce genre de propos ! Ce n'est pas parce qu'une personne ou un département nous dit que, le cas échéant, l'on réagira convenablement, que cet article de loi ne doit pas être adopté.

Il me paraît tellement évident, après avoir travaillé vingt ans à plein temps, puis deux à mi-temps, que le Plend soit calculé sur l'ensemble du travail, que j'ai effectivement beaucoup de peine à admettre que l'on essaie de me faire la démonstration contraire. Mesdames et Messieurs les députés, je pense que, dans quelques années, notre projet de loi deviendra une proposition du Conseil d'Etat.

Par ailleurs, je perçois le simple fait de le rejeter - et j'imagine qu'un certain nombre d'enseignants et de collaborateurs de l'instruction publique, ou même de la fonction publique, pourrait faire la même analyse - comme un cinglant désaveu de l'ensemble de ces personnes arrivant en fin de carrière, qui souhaiteraient bénéficier d'une retraite anticipée justifiée. Pour cette raison, Madame la présidente, je demande l'appel nominal concernant le vote d'entrée en matière de ce projet de loi. (Appuyé.)

La présidente. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.

Celles et ceux qui acceptent d'entrer en matière sur ce projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

Mise aux voix, l'entrée en matière sur ce projet est rejetée par 70 non contre 13 oui.

Ce projet est rejeté en premier débat.

Ont voté non (70):

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Claude Basset (L)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Jacques Boesch (AG)

Anne Briol (E)

Nicolas Brunschwig (L)

Fabienne Bugnon (E)

Hervé Burdet (L)

Matthias Butikofer (AG)

Micheline Calmy-Rey (S)

Claire Chalut (AG)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Urben (S)

Sylvie Châtelain (S)

Anne Chevalley (L)

Bernard Clerc (AG)

Jean-François Courvoisier (S)

Anita Cuénod (AG)

Jean-Claude Dessuet (L)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Pierre Ducrest (L)

Jean-Luc Ducret (DC)

Laurette Dupuis (AG)

Henri Duvillard (DC)

Catherine Fatio (L)

Christian Ferrazino (AG)

Bénédict Fontanet (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Jean-Claude Genecand (DC)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Henri Gougler (L)

Christian Grobet (AG)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Dominique Hausser (S)

Claude Howald (L)

Yvonne Humbert (L)

Liliane Johner (AG)

René Koechlin (L)

Claude Lacour (L)

René Longet (S)

Olivier Lorenzini (DC)

Michèle Mascherpa (L)

Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)

Liliane Maury Pasquier (S)

Pierre Meyll (AG)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Laurent Moutinot (S)

Vérène Nicollier (L)

Chaïm Nissim (E)

Jean Opériol (DC)

Danielle Oppliger (AG)

Barbara Polla (L)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Martine Roset (DC)

Maria Roth-Bernasconi (S)

Christine Sayegh (S)

Max Schneider (E)

Jean Spielmann (AG)

Micheline Spoerri (L)

Evelyne Strubin (AG)

Pierre Vanek (AG)

Yves Zehfus (AG)

Ont voté oui (13):

Roger Beer (R)

Thomas Büchi (R)

Hervé Dessimoz (R)

Daniel Ducommun (R)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Elisabeth Häusermann (R)

Pierre Kunz (R)

David Revaclier (R)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Jean-Philippe de Tolédo (R)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Michèle Wavre (R)

Etaient excusés à la séance (6):

René Ecuyer (AG)

Nelly Guichard (DC)

David Hiler (E)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Philippe Schaller (DC)

Etaient absents au moment du vote (10):

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Marlène Dupraz (AG)

Bernard Lescaze (R)

Sylvia Leuenberger (E)

Armand Lombard (L)

Jean-Pierre Rigotti (AG)

Andreas Saurer (E)

Claire Torracinta-Pache (S)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Présidence:

Mme Françoise Saudan, présidente.