Séance du jeudi 18 mai 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 7e session - 23e séance

I 1926
12. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation de Mme Elisabeth Reusse-Decrey : Amnesty International : bourreau ou victime ? ( ) I1926
Mémorial 1995 : Développée, 1146.

M. Gérard Ramseyer. Je réponds aux remarques de Mme Reusse-Decrey.

Le courage d'Amnesty International est mondialement reconnu. Mais il ne faut pas confondre courage et rigueur.

Or, en ce qui concerne le cas de Genève, le rapport d'Amnesty International est basé sur des allégations, dont aucune n'a été contrôlée, ni même examinée de près.

C'est cette situation, et seulement cette situation, que j'ai critiquée. Je maintiens mes critiques à ce sujet.

Madame la députée, vous faites allusion à une enquête. Il n'y en a jamais eu. Il y a eu simplement enregistrement d'allégations.

Je ne peux pas accepter non plus votre reproche concernant la non-audition d'Amnesty International. Nous avons proposé cette audition, elle a été refusée par Amnesty, puis par la commission judiciaire du Grand Conseil.

Enfin, vous me demandez comment nous avons renseigné Amnesty. Le document genevois a été transmis à Berne, au Département fédéral des affaires étrangères. Il est daté du 2 novembre, il a été transmis le 18 novembre, et c'est à ce Département fédéral qu'il incombait, selon nous, de choisir quels devaient être les destinataires de ce rapport.

Je ne reviendrai pas, Madame, sur les remarques relatives à la police genevoise. Amnesty International a produit un rapport de 53 pages de faits allégués. Avec un juge neutre, nous avons disséqué soixante cas allégués et nous ne pouvons faire plus.

De toute façon, faire plus, Madame la députée, ne servirait pas à grand-chose, tant il est vrai que la subjectivité n'a pas de limite particulière.

J'ai proposé à Amnesty de les rencontrer. Je n'ai toujours pas de réponse à cette proposition.

Je termine en vous rappelant que si je ne vous ai pas répondu plus vite, Madame la députée, c'est qu'Amnesty International m'a adressé, le 21 mars dernier, une nouvelle missive de 13 pages. Je cite les passages les plus intéressants de ce courrier. Amnesty indique : «certains malentendus ont occasionnellement été engendrés par des comptes rendus de presse quelque peu erronés.». Elle se défend ensuite d'avoir évoqué des cas de torture et déclare, je cite : «les mauvais traitements constituent une pratique systématique, nous ne l'avons jamais dit - écrit Amnesty - et surtout pas pour Genève.». Enfin, Amnesty, je cite, écrit : «aucun des cas répertoriés n'était présenté comme un cas de mauvais traitement policier, dûment prouvé et établi.».

A partir de là, je considère, Madame la députée, que vous vous livrez, avec votre interpellation, à un combat d'arrière-garde. La réaction genevoise est probante. Elle est considérée comme telle par la justice de ce canton et le Département fédéral de tutelle.

Dans ce contexte, vous ne pouvez pas nous faire croire qu'Amnesty International est victime. Ou alors, elle l'est de ses propres approximations et des excès de celles et ceux qui ne s'embarrassent guère de scrupules pour soutenir sa cause, maladroitement peut-être.

Je rappelle une dernière fois que j'éprouve du respect pour la croisade d'Amnesty International. Nous sommes, en tant que justice et en tant que police genevoise, ouverts au dialogue. Nous nous refusons simplement à accepter, comme argent comptant, de telles méthodes.

J'ajoute, pour terminer, que rien des nouvelles allégations d'Amnesty International, au sujet de Genève, n'est venu nous rassurer quant à la rigueur de son travail. Quelque part, Madame la députée, c'est vraiment dommage !

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). La réponse de M. Ramseyer ne me satisfait pas pleinement. J'étais intervenue plus sur la forme que sur le fond, et vous me répondez plutôt sur le fond.

Mais vu l'heure tardive, je renonce à répliquer plus longuement.

Cette interpellation est close.