Séance du vendredi 28 avril 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 6e session - 19e séance

PL 7226
6. Projet de loi de MM. Thomas Büchi, Olivier Lorenzini et René Koechlin modifiant la loi générale sur les zones de développement (L 1 11). ( )PL7226

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957, est modifiée comme suit:

Art. 2 B (nouveau)

Demande de plan localisé de quartier

1 Le propriétaire d'une parcelle en zone de développement ne faisant pas encore l'objet d'un plan localisé de quartier peut demander au Conseil d'Etat l'adoption d'un tel plan portant sur un périmètre comprenant sa parcelle. Un projet de plan localisé de quartier est joint à la demande.

2 Le Conseil d'Etat dispose de 12 mois dès le dépôt de la demande pour soumettre un projet de plan localisé de quartier comprenant la parcelle du requérant à l'enquête publique régie par l'article 6.

3 A défaut de soumettre un projet de plan localisé de quartier comprenant la parcelle du requérant à l'enquête publique dans le délai prévu à l'alinéa précédent, le Conseil d'Etat est tenu, dans un nouveau délai de 6 mois, de soumettre à l'enquête publique le projet de plan localisé de quartier joint à la demande du requérant.

EXPOSÉ DES MOTIFS

En vertu de l'article 2 de la loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957 (ci-après, LGZD), la délivrance d'une autorisation de construire selon les normes d'une zone de développement est subordonnée à l'approbation préalable, par le Conseil d'Etat, d'un plan localisé de quartier (ci-après, PLQ).

Or, le propriétaire d'une parcelle sise en zone de développement n'a aucun moyen légal de provoquer l'établissement d'un tel plan. En l'absence d'un PLQ applicable au périmètre dans lequel se trouve son terrain, deux possibilités lui sont offertes.

Il peut, d'une part, déposer une requête d'autorisation de construire conforme à la zone ordinaire (par hypothèse, la zone villas). En application de l'article 2 A LGZD, le département des travaux publics et de l'énergie (ci-après, le département) peut refuser la délivrance de l'autorisation «lorsque la réalisation du projet serait de nature à compromettre les objectifs de la zone de développement». Le Conseil d'Etat dispose alors d'un délai de trois ans pour adopter un PLQ. A l'échéance de ce délai, si le PLQ n'a pas été adopté, le propriétaire peut, dans notre exemple, construire en application des normes de la zone villas.

Le propriétaire peut, d'autre part, déposer une demande d'autorisation de construire conforme aux normes de la zone de développement. Or, rien n'oblige le département à élaborer le PLQ nécessaire à l'octroi de l'autorisation de construire. Le projet de construction peut ainsi rester bloqué indéfiniment.

Il va sans dire que cette situation n'est pas satisfaisante. La législation actuelle a pour effet de prolonger la procédure d'autorisation de construire et de renchérir le coût de la construction. L'administration détient le pouvoir excessif d'interdire purement et simplement toute construction conforme aux normes de la zone de développement. Dans un tel cas, la seule solution du propriétaire est d'emprunter la voie décrite ci-dessus, consistant à construire selon les normes de la zone ordinaire. S'agissant essentiellement de la construction de logements sociaux, la nécessité de remédier à cette situation apparaît clairement.

La modification légale proposée consiste à introduire une procédure permettant au requérant de provoquer l'élaboration d'un PLQ comprenant sa parcelle.

A compter du dépôt d'une demande à laquelle serait joint un projet de PLQ, le Conseil d'Etat disposerait d'un délai de douze mois pour élaborer un PLQ comprenant la parcelle du requérant et le soumettre à l'enquête publique. Le PLQ ne devrait pas nécessairement être conforme au projet ayant provoqué son élaboration.

Si le délai de douze mois susmentionné n'était pas mis à profit par le Conseil d'Etat pour déposer un projet de PLQ à l'enquête publique, le Conseil d'Etat serait alors contraint de soumettre à l'enquête publique le projet de PLQ ayant été joint à la demande du requérant.

Cette proposition permet aux propriétaires de terrains en zone de développement d'être assurés de disposer d'un PLQ dans un délai raisonnable, à moins qu'à l'issue de l'enquête publique, le Conseil d'Etat ne soit pas en mesure de l'adopter.

En outre, cette procédure est plus simple et moins onéreuse que celle, évoquée au début du présent exposé des motifs, consistant à déposer une demande d'autorisation de construire conforme aux normes de la zone de développement. Ainsi, si le PLQ finalement adopté ne correspond pas au PLQ joint à la demande ayant déclenché la procédure, les frais engagés auront été limités au minimum.

Ce projet de loi ne porte pas atteinte aux prérogatives de l'Etat et des communes en matière d'aménagement du territoire (voir notamment l'art. 5 A LGZD adopté le 29 avril 1993 par le Grand Conseil), puisque l'autorité dispose de douze mois pour établir librement le PLQ. En outre, ce projet de loi ne modifie en rien la compétence exclusive du Conseil d'Etat d'adopter le PLQ. Il n'est en effet pas question ici de donner plus de droits aux particuliers qu'aux communes en matière d'aménagement du territoire. Il s'agit de donner un droit d'initiative aux propriétaires de terrains en zone de développement et non de leur permettre de contraindre le Conseil d'Etat à adopter un PLQ contre sa volonté.

Dans la mesure où ce projet de loi a pour but de dynamiser l'exploitation des zones de développement, il concourt à favoriser la construction de logements sociaux, soit, par la même occasion, à donner une impulsion à l'industrie du bâtiment et au marché de l'emploi.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous réserverez un accueil favorable au présent projet.

Préconsultation

M. Thomas Büchi (R). L'exposé des motifs de ce projet vous présente les raisons pour lesquelles nous avons estimé nécessaire de proposer une modification de la loi générale sur les zones de développement. Je n'y reviendrai pas en détail.

Avant de vous proposer de renvoyer ce projet de loi en commission, je souhaite faire quelques remarques :

Il s'agit, pour le propriétaire d'une parcelle en zone de développement, d'y construire, en conformité des normes de ladite zone, sans devoir attendre des années durant qu'un plan localisé de quartier soit éventuellement adopté.

Il faut savoir que le détenteur d'un terrain, en zone de développement, ne dispose d'aucun moyen pour provoquer l'adoption d'un plan localisé de quartier. Il peut donc s'écouler de nombreuses années avant qu'un immeuble puisse être construit.

J'insiste sur le facteur «temps». Dans la construction, le temps est un facteur de renchérissement très important. Or, c'est en zone de développement que sont construits des logements sociaux, dont les loyers doivent répondre aux critères de l'utilité publique.

Nous sommes tous conscients qu'il convient de faire un effort pour limiter les coûts de la construction, notamment en accélérant les procédures.

Cet objectif sera plus vite atteint si le temps séparant l'acquisition du terrain, sis en zone de développement, et la mise en exploitation de l'immeuble est réduit au minimum.

Une autre de nos préoccupations est bien évidemment l'emploi. Il va sans dire que la relance de l'industrie de la construction est de nature à créer des emplois. Et c'est aussi l'un des objectifs que ce projet de loi veut atteindre.

Dans notre conception de l'aménagement du territoire - qui rejoint celle retenue par le Grand Conseil, quand il a donné, il y a deux ans, le droit d'initiative aux communes en la matière - le dernier mot appartient à l'Etat.

Notre projet de loi ne remet pas cela en cause, bien au contraire :

1. Le Conseil d'Etat disposera, dans un premier temps, de douze mois pour soumettre le plan localisé de quartier de son choix et, je précise les termes, à l'enquête publique. L'autorité n'est donc en rien liée par le projet de plan localisé de quartier présenté par le requérant.

2. Une fois le plan localisé de quartier élaboré, le processus habituel de la mise à l'enquête publique devra être suivi. Cela signifie qu'il appartiendra au département de traiter les observations, puis au Conseil d'Etat de se prononcer sur les oppositions et d'adopter le plan localisé de quartier.

La faculté, que nous entendons conférer au propriétaire, se limite, en somme, à la possibilité de provoquer, dans un certain délai, la mise à l'enquête publique d'un plan localisé de quartier. Il s'agit là d'une très importante lacune à combler.

Sur le plan formel, nous proposons de créer un nouveau de type de requête intitulé : «Demande de plan localisé de quartier». En effet, nous nous sommes aperçus que les procédures existantes n'étaient pas adaptées, et qu'il était nécessaire de créer une procédure ad hoc.

Ce projet de loi mérite d'être examiné, surtout son troisième alinéa qui appelle de nombreuses remarques. Un renvoi en commission de l'aménagement est donc nécessaire.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. En préalable, je voudrais dire que le Conseil d'Etat entre en matière sur ce projet de loi, tout en y apportant quelques compléments et précisions.

En effet, Monsieur Büchi, il ne serait pas souhaitable que l'incitation, induite par cette loi, se traduise par une pléthore de projets irréalisables qui iraient à l'encontre de l'objectif recherché. D'autre part, je vous rappelle que la notion du régime de zones de développement permet de régler le problème de l'équipement : lesdites zones sont ouvertes, une fois l'équipement prêt.

Il faudrait, à la réception du projet, décider de sa recevabilité ou de son refus, comme on le fait pour les autorisations de construire. Un refus devrait être motivé par des arguments techniques et non par des arguments subjectifs.

Ces demandes de plans localisés de quartier posent un autre problème : celui de l'accord des propriétaires voisins, qui sont partie prenante d'un tel projet. En effet, j'imagine que ce dernier n'intéresse pas qu'une seule personne, mais plusieurs, en raison de la faisabilité et de la taille du plan à mettre en oeuvre. Pour ce faire, il faudrait un secteur d'une surface d'environ 7 000 m2, au minimum, comme cela est le cas dans d'autres cantons, pour permettre un aménagement harmonieux et de qualité.

Je suis tout à fait favorable au renvoi de ce projet en commission à qui je suggère l'audition de la Ville de Genève et de l'Association des communes genevoises.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.