Séance du jeudi 23 mars 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 5e session - 11e séance

PL 7209
8. a) Projet de loi de MM. Christian Ferrazino, Jean-Pierre Lyon et Pierre Vanek relatif au financement des frais d'infrastructure du service des automobiles et de la navigation. ( )PL7209
PL 7213
b) Projet de loi de Mme et MM. Fabienne Bugnon, Andreas Saurer, Michel Ducret et John Dupraz visant la création d'un établissement public autonome des automobiles et de la navigation. ( )PL7213
M 967
c) Proposition de motion de Mmes Fabienne Blanc-Kühn, Micheline Calmy-Rey et M. Laurent Moutinot sur la revitalisation du service des autos et de la navigation. ( )M967

PL 7209

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Le montant de l'impôt sur les véhicules à moteur et sur leurs remorques fixé à l'article 2 de la loi ouvrant un crédit d'étude pour les avant-projets chiffrés d'une traversée du Petit-Lac et respectivement d'une traversée de la rade est maintenu pour les années 1996 et 1997.

Art. 2

Le produit de la part de l'impôt précité, résultant du relèvement temporaire de 6% des barèmes, est affecté à l'adaptation et à la modernisation des installations techniques du service des automobiles et de la navigation.

Art. 3

Le Conseil d'Etat établit un compte d'exploitation annuel du service des automobiles et de la navigation comportant les recettes et dépenses inhérentes à ce service.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Lors de la récente campagne portant sur le référendum contre la privatisation du service des automobiles et de la navigation (ci-après SAN), le Conseil d'Etat a invoqué les nécessités d'investissement pour l'adaptation et la modernisation des installations techniques du SAN ainsi que le coût de cet investissement.

Bien que ce coût ait certainement été exagéré, cet argument financier n'a manifestement pas eu d'écho, puisque le peuple a rejeté massivement la privatisation du SAN, manifestant ainsi son attachement au maintien de cet important service public.

Il importe que le Conseil d'Etat tire la leçon de ce scrutin et respecte la volonté du peuple en donnant au SAN les moyens d'assurer sa mission au lieu de tenter de rechercher d'autres solutions.

Il s'agit, en particulier, de procéder aux travaux d'adaptation et de modernisation nécessaires du SAN.

Les moyens ne manquent pas, l'Etat engageant 200 à 300 millions de francs par année de travaux.

C'est donc une question de volonté politique.

Afin, toutefois, d'éviter que le Conseil d'Etat ne soit tenté d'invoquer les restrictions budgétaires actuelles, pour ne pas procéder aux travaux de modernisation qui s'imposent, le présent projet de loi propose que l'adaptation de 6% de l'impôt sur les véhicules à moteur, destinée à financer les études portant sur la traversée du lac en vertu de la loi du 15 mai 1992, soit maintenue, pour une durée de deux ans supplémentaires, afin d'assurer le financement des adaptations nécessaires du service.

Cette affectation de l'impôt sur les véhicules à moteur correspondrait, de plus, tout à fait au but d'un tel impôt, à savoir qu'il serve pour les besoins de ceux qui le paient.

Cette solution aurait l'avantage d'assurer un financement de l'infrastructure du SAN par le maintien provisoire d'une taxe que les automobilistes paient déjà et sans augmentation des impôts, ni augmentation des charges de l'Etat, ni par le transfert d'une somme au détriment d'une autre tâche de l'Etat.

Enfin, l'article 3 du projet de loi prévoit que le Conseil d'Etat doit établir une comptabilité annuelle d'entreprise pour le SAN, comme c'est déjà le cas pour l'usine des Cheneviers et la station d'épuration des eaux d'Aïre, afin de connaître les charges et recettes effectives de ce service et ainsi savoir s'il est, oui ou non, déficitaire, offrant une possibilité réelle de vérification de la situation financière de ce service. Il s'agit en effet de pouvoir s'assurer de la vérité des chiffres qui sont avancés au sujet du SAN, chiffres qui n'ont fait que varier au gré des déclarations des uns et des autres.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement le présent projet de loi.

PL 7213

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 106 de la loi fédérale sur la circulation routière, du19 décembre 1958;

vu l'ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière, du 27 octobre 1976,

vu les articles 101, 118, 119 et 122 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847,

Décrète ce qui suit:

CHAPITRE I

Dispositions générales

Article 1

Délégation

1 La gestion et l'exploitation des domaines d'activité du service des automobiles et de la navigation sont confiées à un établissement de droit public appelé «Etablissement public des automobiles et de la navigation».

2 L'établissement est autonome et jouit de la pleine personnalité juridique. Il peut à ce titre, sous réserve des compétences attribuées au Conseil d'Etat et au Grand Conseil par la présente loi, exercer tous les droits et assumer toutes les obligations qu'implique sa mission. La loi sur la responsabilité de l'Etat et des communes, du 24 février 1989, est applicable à l'établissement.

3 L'établissement a la faculté d'emprunter les capitaux nécessaires à son exploitation.

Art. 2

Mission

1 L'établissement a pour mission de gérer et d'exploiter l'ensemble des activités découlant de la législation internationale, fédérale et cantonale et relevant des domaines du service des automobiles et de la navigation.

2 Dans toute son activité, l'établissement veille à offrir des services économiques, rapides et conformes à l'état actuel de la technique.

3 L'établissement garantit l'équilibre financier de son activité.

4 Le Conseil d'Etat est chargé de conclure un contrat de prestations avec l'établissement qui concrétise sa mission.

Art. 3

Siège

L'établissement a son siège à Genève.

Art. 4

Propriété

1 Les immeubles actuellement utilisés par le service des automobiles et de la navigation sont et demeurent, avec leurs accessoires au sens de l'article 644 du code civil suisse, la propriété de l'Etat de Genève. Ils sont mis à disposition de l'établissement en vue de son activité.

2 Les biens mobiliers tels qu'arrêtés au jour de l'entrée en vigueur de la loi sont transférés à l'établissement.

CHAPITRE II

Surveillance

Art. 5

Surveillance et contrôle

1 L'établissement est placé sous la haute surveillance et le contrôle du Conseil d'Etat et, plus spécifiquement, du département que le Conseil en charge.

2 Les comptes de l'établissement sont soumis à l'approbation du Conseil d'Etat.

CHAPITRE III

Gestion

Art. 6

Gestion

Les organes de l'établissement sont:

a) le conseil d'administration;

b) le conseil de direction;

c) le contrôle.

Art. 7

Conseil d'administration

1 L'établissement est géré par un conseil d'admi-nistration composé de 9 personnes, soit:

a) 3 personnes désignées par le Conseil d'Etat en raison de leurs compétences ou de leur expérience dans le domaine de la gestion du contrôle technique des automobiles et de la circulation routière;

b) 3 personnes désignées par le Conseil d'Etat selon les mêmes critères, mais sur proposition du Touring-Club suisse, de l'Association transport et environnement et de l'Automobile club de Suisse;

c) une personne désignée par le Conseil d'Etat selon les mêmes critères, mais sur proposition du World Wildlife Fund de Genève, la Société pour la protection de l'environnement et l'Association genevoise pour la protection de la nature;

d) 2 personnes élues par le personnel.

2 Les administrateurs désignés par le personnel sont élus parmi les employés de l'établissement, ayant accompli leur période d'essai de 3 mois. Sont éligibles les employés de l'établissement y travaillant depuis 3 ans et à raison de 51% au moins. Ils sont élus au bulletin secret, selon le système de la répartition proportionnelle appliqué aux élections fédérales pour le Conseil national, à l'exception de la disposition concernant le cumul.

Art. 8

Durée du mandat

1 Les administrateurs sont nommés ou élus pour une période de 4 ans, commençant le 1er mars de l'année qui suit le renouvellement du Conseil d'Etat. Ils sont rééligibles deux fois de suite.

2 Le membre du conseil d'administration qui n'assiste pas à la moitié des séances de ce conseil au courant d'un exercice est réputé démissionnaire de plein droit, sauf motif valable accepté par le Conseil d'Etat.

3 En cas de décès, de démission ou de perte d'une condition de nomination ou de révocation, il est pourvu au remplacement de l'administrateur pour la fin de la période quadriennale, sauf si la vacance survient moins de 3 mois avant la fin de celle-ci.

Art. 9

Incompatibilité

Les membres du conseil d'administration, quel que soit leur mode de nomination, ne doivent être, ni directement, ni indirectement, fournisseurs de l'établissement ou chargés de travaux pour le compte de celui-ci.

Art. 10

Responsabilité

Les membres du conseil d'administration sont personnellement responsables envers l'établissement des dommages qu'ils causent en manquant, consciemment ou par négligence, aux devoirs de leur fonction.

Art. 11

Révocation

Quel que soit le mode de nomination, le Conseil d'Etat peut en tout temps révoquer un membre du conseil d'administration pour justes motifs. Est notamment considéré comme tel le fait que, pendant la durée de ses fonctions, le membre du conseil d'administration s'est rendu coupable d'un acte grave, a manqué à ses devoirs ou est devenu incapable de bien gérer. Les administrateurs révoqués ne sont pas immédiatement rééligibles.

Art. 12

Président,vice-président, rémunération, secrétariat

1 Le président du conseil d'administration est nommé par le Conseil d'Etat, le conseil d'administration élit son vice-président.

2 Ils sont désignés pour une durée de 4 ans et sont rééligibles au maximum 2 fois.

3 Le conseil d'administration nomme son secrétaire, qu'il choisit en dehors de ses membres.

4 La rémunération des membres du conseil d'admi-nistration est déterminée par le Conseil d'Etat.

Art. 13

Attributions

1 Le conseil d'administration est le pouvoir supérieur de l'établissement.

2 Sous réserve de compétences du Grand Conseil et du Conseil d'Etat, le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l'établissement et a notamment les attributions suivantes:

a) il ordonne, par règlement, son mode de fonctionnement et de représentation ainsi que l'exercice de sa surveillance générale sur l'éta-blissement;

b) il fixe les compétences du conseil de direction et, sous réserve du président et du vice-président, désigne son autre membre destiné à en faire partie;

c) il organise les divisions des services généraux, informatique, conducteurs, véhicules et navigation;

d) il nomme et détermine les attributions du directeur général et des cadres principaux;

e) il veille à la tenue régulière de la comptabilité et à son contrôle permanent;

f) il adopte chaque année:

1o le budget d'exploitation et le budget d'in-vestissement;

2o les comptes de clôture, soit bilan et compte de pertes et profits;

3o le rapport de gestion;

g) il se prononce sur le rapport annuel de l'organe de contrôle;

h) il fixe le tarif des prestations;

i) il arrête les programmes de travaux de sa compétence et contrôle l'emploi des sommes prévues pour leur exécution;

j) il décide des opérations d'acquisition et d'aliénation d'actions, parts sociales, participations ou obli-gations;

k) il établit le statut du personnel après consultation des organisations représentatives du personnel et de la commission du personnel et dans le respect de la loi générale sur le personnel;

l) il nomme et révoque les fonctionnaires de l'éta-blissement;

m) il décide du règlement approuvé par la commission du personnel;

n) il décide, dans les limites de ses compétences, de tous les appels de fonds destinés au financement de l'établissement;

o) d'une manière générale, il prend toutes les dispositions pour l'exécution de la mission qui lui est assignée par l'article 2, ordonne toutes études et tous actes qui requièrent la bonne administration de l'établissement et le développement de son activité.

Art. 14

Séances

1 Le conseil d'administration se réunit aussi souvent que l'exige l'intérêt de l'établissement.

2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par le vice-président.

3 Il est aussi convoqué si 2 administrateurs au moins ou le Conseil d'Etat le demandent.

4 La présence de la majorité des administrateurs est nécessaire pour la validité des délibérations. A défaut, une nouvelle séance est convoquée. Le conseil d'administration peut alors délibérer valablement, quel que soit le nombre des administrateurs présents.

5 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents, le président ne prenant pas part au vote. En cas d'égalité, le président départage.

6 Les délibérations du conseil d'administration sont constatées par les procès-verbaux, avec mention des membres présents.

Art. 15

Conseilde direction

1 Le conseil de direction se compose du président, du vice-président et d'un membre désigné par le conseil d'administration. Ses membres sont rééligibles.

2 Les membres du conseil d'administration élus par le personnel de l'établissement ne peuvent faire partie du conseil de direction.

3 Le secrétariat du conseil d'administration est assumé par le secrétaire du conseil d'administration.

Art. 16

Séances

1 Le conseil de direction se réunit aussi souvent qu'il est nécessaire pour la bonne marche de l'établissement et l'exécution des affaires dont il est chargé.

2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par un des vice-présidents.

3 Il est aussi convoqué si 2 membres au moins de ce conseil le demandent.

Art. 17

Attributions

Le conseil de direction a les attributions suivantes.

a) il pourvoit à l'exécution des décisions du conseil d'administration et veille à la bonne marche de l'établissement, dont il suit la gestion courante;

b) il exerce les pouvoirs qui lui sont délégués par le conseil d'administration;

c) il procède aux nominations du personnel que le conseil d'administration place dans sa compétence;

d) il prépare les délibérations du conseil d'admi-nistration, les rapports, propositions et suggestions à lui présenter.

Art. 18

Commission du personnel

1 Une commission du personnel de 5 à 9 membres est élue par les employés de l'établissement pour une période de 4 ans, renouvelable. Tous les membres du personnel sont éligibles.

2 Sont électeurs les employés ayant accompli la période d'essai de 3 mois. Sont éligibles les employés ayant accompli 3 années de service pour l'établissement.

3 La commission se réunit régulièrement et adopte son règlement, sous réserve de l'approbation du conseil d'admi-nistration.

4 La commission est consultée préalablement sur les suppressions de postes, les licenciements collectifs, les transferts d'activités de l'établissement à d'autres structures, l'introduction de nouvelles technologies ou de toute autre décision importante affectant le personnel.

5 La direction informe la commission régulièrement, mais au moins une fois par année, sur la situation éco-nomique et technique de l'établissement.

6 Les membres de la commission disposent d'une décharge pour leur activité.

Art. 19

Contrôle

1 Sous réserve d'approbation par le Conseil d'Etat, le conseil d'administration nomme, après un appel d'offres approprié, un organe de contrôle, choisi parmi les professionnels de la révision. Le mandat de révision est d'une année, renouvelable.

2 Le rapport de révision est transmis au conseil d'administration et porté à la connaissance du contrôle financier cantonal.

Art. 20

Direction

Le directeur général de l'établissement assume la direction de celui-ci selon un cahier des charges adopté par le conseil d'administration. Il exécute les décisions du conseil d'administration et du conseil de direction et assiste à leurs séances avec voix consultative. Il reçoit ses instructions du président du conseil d'administration.

Art. 21

Contrat de prestations et ressources

1 Un contrat de prestations d'une durée initiale de 4 ans, renouvelable, est conclu entre l'établissement et le Conseil d'Etat. Le contrat concrétise la mission de l'établissement, l'éventail de ses prestations et leur couverture financière.

2 Le Grand Conseil délibère, dans le cadre de la loi budgétaire, des éléments du contrat de prestations entraînant des recettes et des charges pour l'Etat.

3 L'établissement assume les dépenses de fonction-nement et les investissements nécessaires. Il perçoit les recettes correspondant à la contrepartie des prestations fournies.

4 Le prix des prestations est fixé par un tarif contenu dans le contrat de prestations en tenant compte notamment du maintien de l'équilibre financier de l'établissement, des capacités de maîtrise des coûts et des possibilités de rationalisation.

5 Le prix maximum au consommateur pour les prestations ne peut toutefois excéder les montants actuels, variations de l'inflation réservées, sauf modification des exigences ou des condtions de délivrance des prestations.

CHAPITRE IV

Exploitation

Art. 22

En général

L'établissement prend, sous réserve des compétences réservées à d'autres autorités, toutes les mesures propres à remplir la mission qui lui est assignée par les articles 1 et 2 et veille au respect de la législation fédérale et cantonale en matière de circulation routière et de navigation.

Art. 23

Décisionset voiesde recours

1 L'établissement exerce les pouvoirs de décision qui sont conférés par la loi, notamment celui de décider du retrait ou du refus d'un permis d'élève conducteur ou de conduire ou de toute autre mesure administrative finale prévue par la loi fédérale sur la circulation routière ou ses ordonnances d'exécution à l'encontre d'un candidat au permis ou d'un élève conducteur.

2 Les décisions prises par l'établissement dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif, sous réserve de celles devant être déférées au département fédéral de justice et police ou à d'autres instances fédérales ou cantonales.

Art. 24

Immeubles et équipements

1 L'établissement assure l'entretien et l'adaptation des biens immobiliers et équipements dont il a lui-même l'usage.

2 Il décide de l'achat et assume le coût des constructions immobilières nouvelles nécessaires à l'exploitation. Le cas échéant, l'Etat accorde un droit de superficie pour ces constructions sur les terrains dont il est propriétaire.

Art. 25

Investissements

1 L'établissement décide des investissements dont il assure lui-même le financement, par ses ressources ou par l'emprumt.

2 L'approbation du Conseil d'Etat est requise:

a) lorsqu'un tel investissement est décidé horsbudget;

b) lorsque l'établissement fait appel à un investisseur public ou privé.

Art. 26

Emprunts

1 L'établissement peut contracter lui-même et à son propre nom les emprunts destinés au financement des investissements de sa compétence.

2 L'approbation du Conseil d'Etat est réservée lorsque leur montant dépasse 5 000 000 F.

CHAPITRE V

Comptabilité et finances

Art. 27

En général

L'établissement tient une comptabilité selon les règles de la comptabilité commerciale, comprenant notamment le compte d'exploitation, le compte de pertes et profits et le bilan annuel.

Art. 28

Amortissements

1 En contrepartie de la mise à disposition par l'Etat des biens immobiliers et équipements lui appartenant en vue de l'exploitation de l'établissement, celui-ci assume la charge des frais financiers, soit les intérêts et amortissements encourus par l'Etat à leur sujet.

2 De même, l'établissement assume l'armortissement de ses biens immobiliers et mobiliers propres.

Art. 29

Réserve générale

1 Le 50% au plus du solde échéant disponible, après paiement des charges mentionnées à l'article 28, est attribué à la réserve générale de l'établissement.

2 Le bénéfice de l'établissement après attribution prévue à l'alinéa 1 est distribué selon les modalités prévues par le contrat de prestations.

Art. 30

Compétences du Conseil d'Etat

Les comptes, approuvés par le conseil d'administration, sont transmis au Conseil d'Etat avant le 15 juin suivant l'exercice clôturé. Ces documents sont accompagnés de rapports explicatifs. Le Conseil d'Etat se prononce sur ces documents dans les 2 mois après réception.

CHAPITRE VI

Dissolution

Art. 31

Liquidationdes biens

1 La dissolution, le mode de liquidation de l'éta-blissement et la désignation des liquidateurs ne peuvent être décidés que par le Grand Conseil.

2 Le produit net de la liquidation revient à l'Etat de Genève.

CHAPITRE VII

Dispositions transitoires

Art. 32

Transfert des droits

A l'exception de la qualité de propriétaire immobilier, l'ensemble des droits et obligations de l'Etat de Genève relatifs au service des automobiles et de la navigation tels que notamment contrats, tarifs et taxes à percevoir ou à payer, sont transférés de plein droit à l'établissement au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Art. 33

Transfert du personnel

1 Le personnel travaillant au service des automobiles et de la navigation est transféré de plein droit à l'établissement, avec les droits économiques et les conditions de travail acquis au moment du transfert.

2 Le personnel transféré à l'établissement reste affilié à la caisse de retraite de l'instruction publique et de l'administration cantonale (CIA). Le personnel engagé ultérieurement y est également affilié.

Art. 34

Modificationà une autre loi  (E 3,5 1)

La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mars 1970, est modifiée comme suit:

Art. 8, al. 1, 6o bis (nouveau)

6o bis décisions prises par l'établissement en application de la loi visant la création d'un établissement public autonome des automobiles et de la navi-gation (B 4 0,5, art. 23, al. 2);

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Observations générales

La voix des urnes a parlé. Le projet de privatisation du SAN est mort-né. Les motifs du refus du corps électoral sont divers, mais trois paraissent déterminants:

a) la crainte de transférer des fonctions d'autorité à un organisme privé, susceptible de manquer aux principes de l'égalité de traitement et de la confidentialité;

b) la crainte d'une hausse du tarif des prestations, l'argument des bienfaits de la concurrence se heurtant à l'objection du monopole;

c) la crainte du personnel, et plus largement de la fonction publique, d'une privatisation synonyme de détérioration des conditions de travail.

L'échec est aussi celui d'un débat parlementaire qui a vu une majorité déterminée à s'affirmer face à une opposition qui n'avait pas manqué de souligner les objections qui ont finalement conduit à l'échec. Mais, vue rétrospectivement, l'erreur essentielle de la majorité provient de son refus d'envisager d'autres moyens que la privatisation pour atteindre l'objectif d'une modernisation du SAN. Car, si certains des objectifs du projet de loi initial pouvaient être partagés par l'opposition, il n'en allait pas de même pour le moyen proposé. Ainsi, l'amélioration de la situation économique du SAN, l'amélioration du service à la clientèle, la dotation du SAN en moyens technologiques adéquats, une flexibilité accrue pour répondre à la demande, l'assurance des investissements nécessaires à l'exploitation du service par le marché financier privé, l'allègement des finances publiques de l'excédent de charges d'exploitation découlant de l'activité du SAN méritaient un soutien1. S'opposer à de tels objectifs reviendrait à se voiler la face devant les difficultés contemporaines, notamment financières, de l'Etat social construit après la Seconde Guerre mondiale2.

En réalité, si le débat s'est avéré aussi polarisé, c'est essentiellement en raison du véritable pessimisme, ou atavisme, de la majorité envers l'idée que le service public soit capable de se transformer et faire sa mue. Car il règne actuellement au parlement un véritable dogme, explicite pour certains ou implicite pour d'autres, qui situe l'origine de toutes les difficultés actuelles dans un Etat omniprésent, le marché et l'Etat minimal étant donc les seuls élixirs. Malheureusement pour ce dogme, les choses ne sont pas aussi simples.

Il est certes vrai que l'excès d'Etat a été un facteur de la ruine des anciens pays socialistes. Il est également clair que, dans les pays industrialisés, l'Etat s'est retrouvé engoncé dans les routines financières et administratives nées de trente ans de croissance3, avec une marge de manoeuvre fortement réduite face à la crise des finances publiques, à la globalisation économique et - souvent - à la résistance fiscale des électeurs-trices. Le retour du libéralisme économique se fonde donc sur une logique politique forte4. Mais ce constat

1 Voir Rapport de la Commission ad hoc SAN (PL 7070-A, P 1040-A), page 6.

2 Voir à ce sujet, et pour éviter des répétitions, «Quand l'esprit d'entreprise vient àl'Etat», Domaine public 1994; Rapport du 13 mai 1993 de la commission de l'économiechargée d'étudier le projet de loi 6927 - le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'aéroport in-ternational de Genève et le projet de loi 6929 - le projet de loi de Mmes et MM. FabienneBugnon, Pierre Meyll, André November, Alain Rouiller, Irène Savoy et Jean Spielmanntransformant l'aéroport de Genève en société d'économie mixte.

3 Voir à ce sujet l'ouvrage remarquable de Daniel Cohen: Les infortunes de la pros-périté, Julliard, Paris 1994.

4 Quoiqu'il soit piquant de constater que le rétablissement de la concurrence envers lespratiques cartellaires est souvent combattu par des milieux économiques censémentlibéraux!

ne doit pas occulter les excès ou les défaillances d'un marché désormais nu5 et sans adversaire majeur6. Ces excroissances constituent autant d'appels à une intervention étatique. Intervention qui, pour ne pas répéter les erreurs du passé, doit reposer sur un Etat et une fonction publique rénovés. Cette rénovation passe également par la reprise de méthodes contemporaines de gestion expérimentées par l'économie privée7, mais mise au service d'une action publique rénovée et pluraliste dans ses méthodes, et garante d'égalité, de probité8 et de qualité.

5 Le Mexique contemporain est un bon exemple. Elève modèle du néolibéralisme, ildoit maintenant affronter une guérilla indigéniste née de ses premiers insuccès, ce qui aimpliqué un effort majeur et nouveau de l'Etat national. Ensuite, devant l'accumulation desdifficultés il a dû dévaluer et obtenir en l'espace de quelques jours un puissant soutienfinancier international. Cela grâce à l'aide immédiate de 18 milliards de dollars, versée parles organismes financiers publics supra-étatiques pour pallier la fuite des capitaux étrangerscraignant l'instabilité politique. Si la libéralisation n'est pas en cause, les instances régu-latrices des excès ne pourront manifestement pas être réduites à un niveau minimal.

6 Ainsi Robert Reich: L'économie mondialisée, Dunod, Paris 1993, souligne que dansles pays industrialisés la globalisation économique aboutit à la déqualification et à la chutedu niveau de vie des deux tiers des salariés «routiniers» et «domestiques» qui ne sont pas enmesure de faire face à la concurrence internationale. Par contre, le tiers restant, «tra-vailleurs du savoir», verront leur position s'améliorer avec, à terme, un processus de séces-sion fiscal et territorial de leur part dont la contrepartie sera l'augmentation générale del'insécurité et de la criminalité. L'alternative est la reconstruction d'un «patriotisme local»(dans une économie globalisée) envers la communauté humaine à laquelle on appartientpour favoriser un effort majeur de formation et d'intégration sociale. Sans l'Etat et unefiscalité adéquate, une telle reconstruction apparaît illusoire. Pierre Rosanvallon: Laquestion sociale. Repenser l'Etat-Providence, Seuil, 1995, ne dit pas autre chose lors-qu'il en appelle à la nouvelle citoyenneté sociale dans un Etat civique providence dont les bases doivent être reconstruites. Il est sans doute plus difficile de susciter ce type de ci-visme ou de patriotisme social que de l'imposer à la faveur de la crainte envers le spectrecommuniste ou de la dissolution des distinctions sociales dans les épreuves communesd'une guerre. Mais il faut bien s'y atteler.

7 On oublie souvent dans ces débats les symétries entre les grandes structuresétatiques et les administrations des grandes entreprises privées dans la période passée. Sidonc aujourd'hui il est question d'adapter les méthodes de gestion issues du privé, c'est que leservice public subit aussi la contrainte d'offrir des prestations aux administrés aux meilleurscoût et qualité.

8 La corruption est l'un des risques principaux d'une réforme de la fonction publiqueintroduisant des critères de rentabilité. L'éthique du service public à but non lucratif doit donc être réaffirmée.

Le conflit sur le rôle futur de l'Etat a donc été à l'origine de l'âpreté de la divergence entre la majorité parlementaire et l'opposition. La majorité décréta que la rénovation de la fonction publique, dans le cas du SAN, était impossible. Seule une privatisation ferait l'affaire. Pourtant une proposition raisonnable avait été émise par les Verts9 avec l'appui du parti socialiste et de l'Alliance de gauche, soit la transformation du SAN en un établissement public autonome. Mais, selon la majorité, la flexibilité opératoire d'un tel établissement serait «faible», il arriverait «peut-être» à atteindre des standards de qualité, la maîtrise du prix des prestations serait «faible», il y aurait «peut-être» des éléments de motivation du personnel10.

Ces appréciations franchement négatives relevaient largement d'une idéologie qui se résume, en fait, au préjugé classique du «fonctionnaire rond-de-cuir». Curieusement, le manque de sérieux de ces objections est apparu durant la campagne de votations, grâce aux bilans récents dressés des privatisations britanniques, et dont la presse s'est fait un large écho. Ainsi,la plupart des grandes entreprises nationales privatisées sous la férule deMme Thatcher, et notamment le fleuron British Airways, ont connu des gains de productivité largement plus importants avant qu'après leur privatisation! La Royal Post britannique a pu éviter, récemment, une privatisation grâce à lapression populaire, mais aussi en raison du fait qu'elle avait en quelques années réussi sa transformation remarquable en une entreprise publique à la fois plus rentable et plus proche de ses clients. La privatisation d'un service public essentiel n'est pas la voie unique de sa modernisation.

Cela dit, les Verts ne sont pas des opposants dogmatiques à toute privatisation. Ils n'ont pas attendu l'intérêt plus large pour le «New public management» pour réfléchir à la restructuration de l'Etat et faire des propositions. Ainsi, au début de 1994, les Verts ont saisi l'occasion du débat autour du SAN pour préciser qu'une privatisation pouvait entrer en ligne de compte dans le domaine des prestations de service (et non d'autorité) de l'Etat pour autant que quatre critères soient réunis11:

a) l'efficacité, soit l'offre à la population de prestations d'une qualité au moins équivalente de celles fournies jusqu'ici par l'Etat pour un coût globalement inférieur;

9 Rapport de la Commission ad hoc SAN, p. 69-73.

10 Ibid., p. 19-20.

11 A propos du Service des automobiles et de la navigation. Restructuration de l'Etat et privatisations. Document du 16 février 1994 du Parti écologiste genevois.

b) la concurrence entre plusieurs entreprises offrant le même service;

c) la préservation du service public, soit le maintien des prestations de base fournies par l'Etat au service de toutes les catégories de la population, et notamment les fonctions redistributrices;

d) la prévention du dumping social, par une pression à la baisse des conditions de travail pour les salaires les plus bas.

Ces critères n'étaient pas réunis par la privatisation du SAN, essentiellement en raison de ses fonctions d'autorité publique et de sa position monopolistique12. Comme le soulignait l'ancien conseiller d'Etat socialiste Bernard Ziegler: «Privatiser un monopole est extrêmement douteux: soit des économies sont possibles (mais alors elles le sont aussi par une gestion publique efficace), soit c'est la prestation qui est chère (et alorsil faudra bien aussi la payer, même à l'organisme privé qui la produira); privatiser un monopole, c'est aussi s'obliger à mettre en place une structure étatique de contrôle qui a aussi son coût»13.

C'est l'ensemble de ces raisons qui justifient un nouvel examen de la proposition de transformer le SAN en un établissement public autonome (ci-après EP SAN), telle qu'elle est formulée par le présent projet de loi. Ces auteurs espèrent vivement que cette fois-ci le sens du dialogue et la volonté de réussir la modernisation de l'Etat de Genève primeront sur les dogmatismes idéologiques. Le projet de loi, brièvement commenté plus loin, est largement inspiré de la loi sur l'aéroport international de Genève (H 3 9), tout en reprenent les éléments économiques du projet de loi 7070 autorisant la délégation à un organisme privé des tâches du service des automobiles et de la navigation.

2. Les traits essentiels de l'EP SAN

a) Innovation et équilibre budgétaire

Le SAN peut devenir une entreprise publique dynamique, au budget équilibré. Les 59 000 inspections en retard démontrent les possibilités

12 Le Premier ministre français Balladur ne disait pas autre chose récemment quand ilindiqua que les privatisations doivent s'arrêter, à son avis, au seuil des activités publiques àcaractère de monopole (Le Monde, samedi 14 janvier 1995).

13 Tribune de Genève, 27 février 1993.

d'accroître les recettes par un effort de rationalisation et d'augmentation de la productivité. Cela nécessite certains investissements que l'EP SAN pourra financer par un recours au marché des capitaux14. Cela impliquera une phase initiale de lancement, de premier établissement de l'EP SAN, mais l'objectif doit être celui de l'équilibre budgétaire, imputation faite, en tout cas dans un premier temps, des tâches d'autorité (fourrière et mesures administratives) qui incombent à la fiscalité générale.

L'instrument au service de cet objectif, destiné à alléger les finances publiques, est la décentralisation et l'autonomie de gestion, précisée par un contrat de prestations qui fixe les objectifs concrets par périodes quadriennales15. L'EP SAN aura la possibilité d'emprunter des capitaux16. Il pourra introduire une comptabilité analytique.

L'EP SAN veillera à offrir des services économiques, rapides et conformes à l'état actuel de la technique17.

b) Maîtrise des coûts et droits des usagers

Une objection majeure à la privatisation est levée par la création de l'EP SAN. En effet, les tâches d'autorité restent de la compétence d'un organisme étatique.

Afin de garantir toutefois les usagers contre une inflation des coûts, le projet de loi contient une innovation majeure. Il inclut dans le conseil d'administration trois représentants des associations de transports (TCS, ATE et ACS), nommés par le Conseil d'Etat. Ces administrateurs auront certainement à coeur d'améliorer les prestations à leurs membres automobilistes, sans provquer une spirale des taxes. Ce mécanisme d'auto-contrôle est renforcé par l'introduction d'un contrat de prestations et l'obligation légale de l'équilibre budgétaire. Ces deux instruments sont assortis d'une autre obligation reprise du projet de loi défunt, celle de maintenir les tarifs actuels18, sauf modification des exigences ou des conditions de délivrance des prestations.

14 Afin d'éviter de vaines redites, nous nous référons au Rapport de la Commissionad hoc SAN, p. 39-43.

15 Art. 2 et 20.

16 Art. 1, al. 3.

17 Art. 2, al. 2.

18 Art. 21, al. 4.

Dans la mesure où la circulation automobile a un grand impact sur l'environnement, la représentation des associations de protection de l'environnement est prévue, sous la forme d'un administrateur nommé par le Conseil d'Etat.

Enfin, le Conseil d'Etat doit nommer trois administrateurs en raison de leurs compétences ou de leur expérience dans le domaine de la gestion du contrôle technique des automobiles et de la circulation routière19. La professionnalisation des administrateurs est une garantie d'efficacité.

c) Droits des employés

Comme cela n'est malheureusement pas encore une vérité admise sans autre par la majorité, il vaut la peine de répéter qu'il n'y a pas de modernisation du service public sans une participation active des employés. Ceux-ci seront donc représentés par deux administrateurs élus20. De plus, innovation indispensable, une commission du personnel devra être mise sur pied21, cela pour respecter l'esprit de la loi fédérale sur la participation.

Par ailleurs, un statut du personnel sera adopté par le conseil d'administration22, dans le respect de la loi générale sur le personnel(B 5 0,5)23. Enfin, le personnel actuel du SAN est transféré de plein droit à l'établissement, avec les droits économiques et les conditions de travail acquis au moment du transfert24. Le personnel transféré ainsi que le personnel engagé ultérieurement sont affiliés à la CIA25.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver ce projet de loi.

19 Art. 7, al. 1.

20 Art. 7, al. 1

21 Art. 18.

22 Art. 13, al. 2, lettre k.

23 Nous reprenons ici les termes de l'exposé des motifs du projet de loi 6834-6845modifiant la loi sur les établissements médicaux.

24 Art. 33, al. 1.

25 Art. 33, al. 2.

M 967

LE GRAND CONSEIL,

 considérant que le service des automobiles et de la navigation (SAN) souffre de sous-équipement, notamment dans la halle technique;

 constatant que le projet de privatisation du SAN décrivait les investissements nécessaires pour permettre la rentabilisation des activités du service;

 prenant acte du refus du peuple souverain de privatiser le SAN;

 considérant dès lors que les améliorations reconnues nécessaires par tous lors du débat sur la privatisation doivent être effectuées par l'Etat,

invite le Conseil d'Etat

à présenter au Grand Conseil un projet d'investissements et d'amélioration du SAN respectueux de la volonté populaire permettant à terme une gestion non déficitaire dans le cadre de l'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le refus exprimé par le peuple souverain de privatiser le SAN offre l'occasion au Conseil d'Etat de démontrer qu'il est possible, dans le cadre de l'activité étatique, de réduire certains déficits d'exploitation par une politique judicieuse d'investissements et d'embauche.

Nous ne pouvons pas croire que l'Etat soit incapable de la moindre performance! Et s'il ne doit pas calquer la conduite de ses affaires sur le privé, en raison de la différence de nature des activités étatiques et privées, il peut néanmoins pratiquer un politique dynamique. chacun s'accorde par exemple à considérer comme nécessaire d'investir dans la halle technique et il ne serait pas admissible que le déficit d'exploitation du SAN ne vienne à s'accroître en raison d'une carence des investissements à ce niveau. La population n'admettrait pas être «punie» de son vote du 4 décembre par une dégradation programmée du SAN.

Il convient par conséquent de trouver une solution respectant la volonté populaire et permettant d'améliorer l'exploitation du SAN pour en réduire, et à terme supprimer, le déficit.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver bon accueil à la présente motion.

Préconsultation

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Le projet de loi que nous vous présentons ce soir n'est pas un compromis. Ce n'est pas non plus un contreprojet à la privatisation proposée par le Conseil d'Etat et refusée par vote populaire. C'est un projet issu de nos propositions de réforme de l'Etat élaborées en 1992 déjà par le groupe «économie» du parti écologiste.

Je vous rappelle à cet égard que, entre 1987 et 1992, grâce à la ténacité de notre ancien collègue Andràs November, ce ne sont pas moins de douze motions que les «verts» ont déposées concernant la restructuration de l'Etat, allant des modalités d'établissement du budget annuel jusqu'à l'assainissement des finances publiques en passant par l'augmentation de certaines recettes fiscales.

Je ne vous ferai pas l'affront de vous rappeler toutes ces motions qui ont, il est vrai, subi un sort différencié. Mais il me semblait important de vous situer le cadre duquel est issu le projet de loi sur le SAN. A l'évidence, il ne sort pas d'un chapeau !

Je dois reconnaître que, lorsque le Conseil d'Etat est arrivé avec sa proposition de privatisation sur le SAN, nous n'avions pas de projet bien élaboré; raison pour laquelle, pour ce service en particulier, nous sommes intervenus par la voie de l'amendement. L'essentiel était de démontrer qu'entre le tout à l'Etat et le tout au privé une voie médiane existait qui valait la peine d'être étudiée. Sans doute n'ai-je pas été assez convaincante en commission, Monsieur Ramseyer, puisque cette piste n'a pas été étudiée. Les jeux étaient faits à l'avance, la majorité étant derrière votre projet. Mais cela est du passé. Le peuple a balayé votre projet avec force.

Dès lors, la question qui se posait était l'interprétation que nous faisions du vote populaire et la suite que nous allions donner à notre proposition.

Notre interprétation du vote du 4 décembre est la suivante - les motifs de refus du corps électoral peuvent être divers, mais trois motifs nous paraissent déterminants :

a) la crainte de transférer des fonctions d'autorité à un organisme privé susceptible de manquer aux principes de l'égalité de traitement et de la confidentialité;

b) la crainte d'une hausse du tarif des prestations, l'argument des bienfaits de la concurrence se heurtant à l'objection du monopole;

c) la crainte du personnel et, plus largement, de la fonction publique d'une privatisation synonyme de péjoration des conditions de travail.

Mais, bien sûr, les motifs du refus du corps électoral sont insondables et nous respectons l'interprétation de chacun.

Voilà le premier constat qui nous a amenés à penser que le corps électoral n'était pas, par ce vote, forcément opposé à une modernisation ou à une restructuration de l'Etat, mais bien qu'il s'opposait au bradage du service public.

D'ailleurs, je vous rappelle en passant que le référendum, dans son argumentaire, soutenait notre proposition. Dès lors, nous avions décidé d'élaborer un projet de loi tenant compte de ces différents aspects et, également, des inquiétudes justifiées du personnel.

Nous avions décidé de soumettre ce projet à une vaste consultation, notamment des milieux qui nous avaient soutenus dans nos propositions, partis de gauche, syndicats et commission du personnel du SAN.

Moins de deux mois après le vote populaire, M. Ramseyer est intervenu avec une nouvelle tentative de privatisation qui a bien heureusement avorté. Néanmoins, cette action a laissé des traces dans la confiance que nous pouvons avoir dans le Conseil d'Etat. Elle a ravivé une polémique, ainsi que les inquiétudes bien compréhensives du personnel du SAN qui se voyait à nouveau sérieusement ébranlé, d'autant plus qu'un certain nombre de licenciements étaient prévus à la clé. La lettre qui est parvenue au Grand Conseil et au Conseil d'Etat, signée par cent six employés sur cent vingt-cinq, traduit bien cette inquiétude.

Voilà les raisons qui ont amené les «verts» à déposer leur projet plus vite que prévu. Nous avons déjà abondamment parlé de ce qu'est un établissement autonome. Il est donc inutile d'y revenir. Le travail se fera en commission.

Notre projet a le mérite de la cohérence. Il s'oppose à la privatisation du SAN comme nous nous y sommes toujours opposés. Il respecte la volonté populaire et modernise le service public dans le sens de l'autonomie. Il respecte les droits et la sécurité des travailleurs.

Nous ne souhaitons pas nous prononcer sur le projet de loi de l'Alliance de gauche ou sur la motion du parti socialiste. A ce stade, la surenchère des propositions ne nous intéresse pas, mais bien plutôt l'aboutissement d'un projet auquel nous croyons. Et, même si nos alliés d'hier ne sont pas les mêmes qu'aujourd'hui, nous ne perdons pas espoir de les convaincre en commission.

Je vous demande donc de bien vouloir accepter le renvoi de notre projet de loi en commission judiciaire. Nous soutiendrons également le renvoi du projet de loi de l'Alliance de gauche et celui de la motion du parti socialiste à la même commission.

La présidente. Nous prions le secrétaire de bien vouloir lire la lettre du SAN.   

M. Pierre Vanek (AdG). Nous avons débattu longuement de la question du SAN dans des conditions plus difficiles que celles de ce soir. Il n'y a pas lieu de revenir sur les débats du parlement à propos du projet de loi rejeté en votation populaire. Toutefois, il faut rappeler les résultats de cette dernière.

Lors de la séance précédente, des propos quelque peu légers ont été tenus sur ceux qui récoltent des signatures devant les locaux de vote. De même sur l'abus d'initiatives ou de référendums, ainsi que sur le fait de faire voter le peuple par oui ou par non sur des textes comportant de nombreuses pages. Je saisis cette occasion pour rendre hommage aux centaines de personnes qui ont récolté plus du double des signatures nécessaires, permettant ainsi au peuple de se prononcer, précisément par oui ou par non, sur un texte de plusieurs pages. Le peuple a dit non et a ainsi «remis l'église au milieu du village», ou, plutôt, le SAN fermement où il doit être, soit au sein du service public. C'est une excellente chose et c'est la base sur laquelle nous devons poursuivre nos travaux à propos du SAN.

Il est bien clair que ce vote ne règle pas la question du SAN. Des mesures d'investissements et des changements de méthode dans la direction doivent être pris pour le rénover. Je rappelle les propos du directeur du SAN concernant l'absence totale de motivation du personnel, la qualité nulle, etc. Nous devons réussir à faire fonctionner le SAN comme un service public conformément à la décision populaire.

Nous venons d'entendre la lecture d'une lettre dans laquelle la grande majorité du SAN exprime son inquiétude par rapport à la proposition de privatisation clandestine qu'a faite le conseiller d'Etat Ramseyer et qui a été rendue publique au mois de janvier.

Je reviendrai à ce document, mais, avant cela, je déclare m'associer, comme représentant de tout mon groupe, à la revendication du personnel du SAN qui est d'être entendu promptement. Cette démarche est indispensable pour mobiliser l'ensemble de ce personnel à qui on a tenu des propos extrêmement désagréables sur la qualité de son travail et sur sa motivation. Il s'agit de l'associer, non pas comme cela a été fait par rapport au projet malheureux de privatisation sous forme d'une commission de suivi où, comme son nom l'indique, il s'agissait de suivre simplement, mais de l'associer au départ et de le rendre partie prenante d'une volonté de rénover le SAN. C'est ainsi que l'on peut rendre les services de l'Etat plus performants, en faisant participer tout le personnel à ce processus.

A ce jour, cette volonté manque du côté du Conseil d'Etat. M. Ramseyer a fait une proposition à ses collègues sans avoir consulté ni le personnel ni les organisations syndicales. C'est une récidive et ce n'était pas très malin !

En date du 13 février, l'Union du personnel du corps de police, UPCP, le Cartel intersyndical de la fonction publique, la Fédération des travailleurs du service public, FTSP, ont demandé à être entendus et à participer à une discussion avec les responsables sur les mesures que ceux-ci entendaient prendre pour le respect de cette votation populaire du 4 décembre et pour assurer le bon fonctionnement de ce service public. Ils ont reçu une fin de non-recevoir, ou du moins une réaction dilatoire, de la part de M. Ramseyer disant qu'ils seraient reçus et entendus en temps «opportun».

Or, les temps sont éminemment opportuns. Je ne vois pas comment ils pourraient l'être plus. Nous avons eu un prononcé clair du peuple sur cet objet. Les données du dossier sont largement connues et il faut en débattre aujourd'hui, non seulement dans cette enceinte mais surtout avec le personnel concerné.

Je veux bien admettre que la proposition du 10 janvier de M. Gérard Ramseyer à ses collègues ait été un dérapage malheureux. Je le voyais hocher la tête, tout à l'heure, lors de la lecture de la lettre du personnel du SAN. Je trouve le procédé assez grave et qu'il mérite d'être stigmatisé ici.

D'après M. Ramseyer, il s'agissait de privatiser les halles techniques et l'inspection des véhicules, de les confier, sous forme de sous-traitance, à un privé, et, pour ce faire, de procéder à un certain nombre de licenciements en proposant d'ailleurs un marchandage douteux où les indemnités de licenciements seraient payées par le repreneur de ce service. En date du 10 janvier, donc environ un mois après le résultat de la votation, M. Ramseyer prétendait agir pour contourner la volonté populaire. Il avait trouvé une combine juridique, ou ce qu'il pensait en être une, pour permettre, je cite sa lettre : «...au gouvernement de prendre lui-même la décision.».

Cette espèce de dérive est détestable. Ce n'est pas au gouvernement de prendre lui-même une décision sur de tels objets, mais d'abord au parlement, puis au peuple. Tout à l'heure, on a entendu M. Haegi dire que l'on avait voté une motion dans ce parlement et qu'il n'en tiendrait pas compte. Cette remarque était grave, mais ici, c'est pire, car le peuple a voté et M. Ramseyer proposait de contourner cette décision.

Ces propositions n'auront évidemment aucune suite. On pourrait en dire plus et être beaucoup plus méchant, mais je serai réservé, car il faut faire avancer ce débat.

Je désire encore revenir sur les propos de Mme Bugnon concernant le projet des «verts». Je ne pense pas que nous nous opposerons au renvoi de ce projet en commission. Toutefois, Mme Bugnon s'est un peu hâtivement annexée le soutien des partis de la gauche.

En effet, on peut relire le rapport de minorité que j'ai défendu dans cette enceinte à propos du SAN. Notre soutien aux amendements des «verts» partait de la volonté existante de la droite de faire sortir le SAN du giron de l'Etat et du service public. Nous avons dit qu'il fallait au moins étudier un certain nombre de propositions, comme celles formulées par le parti écologiste. Aujourd'hui, je ne crois pas que nous puissions nous associer à ce projet.

Par contre, vous avez reçu la proposition de projet de loi que nous avons déposée. Elle est simple et ne constitue pas une surenchère, comme le disait Mme Bugnon. C'est une proposition très modeste. La lettre de M. Ramseyer a tout de même un aspect positif. On lit, dans un des derniers paragraphes, que l'investissement pour la rénovation concernant la halle technique et son informatisation demanderait 5 à 7 millions de francs. Je rappelle que c'est dans ce secteur que les repreneurs potentiels avaient décelé les «gisements de productivité» à exploiter. Il faut donc que l'Etat investisse là aujourd'hui. Dans notre projet de loi simple et évident, qui comporte trois articles, nous proposons de proroger l'augmentation de l'impôt sur les véhicules à moteur et sur leurs remorques. Elle avait été lancée à l'époque pour...

La présidente. Monsieur Vanek, je vais devoir vous interrompre. Je suis navrée !

M. Pierre Vanek. Alors, je prends encore trente secondes ! Elle visait donc à financer les crédits d'études pour les avant-projets de la traversée de la rade. Nous avons une proposition qui permettrait de ramener quelque 5 ou 6 millions - il faudrait voir les chiffres précis - pour financer la rénovation de la halle technique, et cela quels que soient les débats généraux que l'on pourrait encore avoir sur le SAN.

Je vous engage à accepter cette proposition qui ne constitue en aucune manière une augmentation d'impôt, puisqu'il s'agit simplement de le maintenir pour une période limitée à un niveau fixé par ce Grand Conseil pour un autre objet qui est, en principe, accompli.

M. Michel Ducret (R). Tout d'abord, rassurons M. Vanek ! Personne ici n'imagine pouvoir un jour améliorer le SAN sans consulter son personnel. Quant au gouvernement, il a tout de même le droit de faire des propositions, et s'il ne suit pas toujours à la lettre les indications du législatif, ce qu'il reproche ce soir à M. Haegi, j'aimerais lui signaler qu'il siège à côté d'un ex-magistrat qui a bien souvent suivi ce genre de voie.

Enfin, passons au sujet qui nous occupe vraiment ce soir. Au nom des deux cosignataires radicaux de ce projet de loi, j'aimerais souligner que nous ne pouvons adhérer à l'ensemble des considérants de l'exposé des motifs rédigé par nos collègues du groupe «vert». Il est vrai que ces derniers rongeaient leur frein à ce propos depuis le début de l'étude du projet de délégation, ceci leur donne certains droits, c'est le fruit de leur travail. Mais notre signature s'inscrit dans un souci de cohérence de notre propre ligne politique et d'adéquation avec nos déclarations.

En effet, si nous avions soutenu le projet de délégation, qui nous a paru être le meilleur moyen d'améliorer la gestion de ce service sans qu'il coûte trop cher à la collectivité publique, nous avions toutefois regretté que cette variante d'établissement public autonome ne soit pas directement mise au concours avec le projet de délégation qui était notre premier choix, celui du Conseil d'Etat de la présente législation, comme de la précédente, d'ailleurs.

Le peuple a refusé notre premier choix. Or, le problème du SAN subsistant, nous nous sommes rabattus sur le deuxième choix, étant entendu qu'il n'est pas forcément de moindre qualité, au contraire, mais qu'il risque d'être plus coûteux pour le citoyen de ce canton.

Quant au projet de loi 7209 et à la motion 967, nous acceptons leur renvoi en commission tout en les retenant comme un troisième choix possible. La sagesse demande de trouver une solution. C'est le sens de la présente proposition. Le groupe radical vous prie de lui réserver un accueil favorable, afin que nous avancions vers une meilleure gestion de l'Etat et de ses services, cela dans l'intérêt de tous, usagers, employés de la fonction publique, mais, surtout, tous contribuables.

M. Bénédict Fontanet. Notre groupe ne s'opposera pas au renvoi en commission de ces trois projets. Nous n'entendons pas polémiquer à ce propos. Le peuple a voté, il s'est exprimé, dont acte, et loin de nous l'idée de vouloir remettre en cause la manière très claire dont ce dernier s'est exprimé sur ce sujet.

Toutefois, ces projets appellent un certain nombre de commentaires. Celui qui consiste à financer les infrastructures du SAN au moyen d'une hausse de l'imposition sur les autos ne m'apparaît pas être une bonne solution. Notre groupe a toujours soutenu qu'une éventuelle hausse de l'impôt/autos devait être consacrée à la traversée de la rade et à son financement. Nous sommes d'avis que, en tout cas jusqu'à ce que le peuple décide de cette traversée, courir plusieurs lièvres à la fois concernant ce même sujet n'est pas une bonne chose.

Il est vrai que le projet d'établissement public autonome avait déjà été évoqué dans le cadre de la commission ad hoc qui avait traité du projet de privatisation proposé par le Conseil d'Etat. Mais il me semble que, lorsque le peuple s'est exprimé, il a très clairement dit non à une autonomisation et à une privatisation, fut-elle publique, du SAN, si j'ose m'exprimer ainsi.

Enfin, on avait déjà vu, et on en redébattra en commission, que l'autonomisation sous forme d'un établissement public ne résout pas, à mon sens, les problèmes de financement auxquels serait confronté un tel établissement qui n'est absolument pas dans la même situation, par exemple, que l'Aéroport de Genève.

Celle de ces trois propositions qui nous paraît être la plus judicieuse est la motion socialiste disant que, puisque le peuple s'est prononcé contre l'autonomisation et qu'il y a lieu de rénover les installations du service des autos, il faut y consacrer les moyens nécessaires. Toutefois, il nous faudra examiner si, parmi les priorités de ce canton, l'une des premières doit être de contribuer à la rénovation des installations du SAN. A priori, il nous apparaît que, notamment dans le domaine social, d'autres investissements priment sur celui-là. Cela étant, c'est bien volontiers que notre groupe examinera ces trois propositions en commission.

M. Christian Ferrazino (AdG). Dans ce parlement, on constate que les radicaux soutiennent le projet des «verts», les démocrates-chrétiens la motion socialiste et, comme je n'ai pas encore entendu les libéraux soutenir le projet de l'Alliance de gauche, vous me permettrez de le faire à leur place.

Vous, les libéraux, qui avez lu attentivement ce projet, vous aurez vu que la véritable question posée par tout ce débat est celle de savoir si oui ou non nous sommes capables de maintenir un service public digne de ce nom. M. Ramseyer ne semble pas en être convaincu, d'où, d'ailleurs, son échec qui a pris la forme d'un projet de privatisation sévèrement sanctionné par la population le 4 décembre dernier.

Tous partis confondus, la nécessité de procéder à des investissements pour remettre en état le SAN a été reconnue. Le personnel est prêt à formuler des propositions en ce sens. On ne peut donc que regretter, comme l'a fait mon collègue Vanek, que l'on n'ait pas associé - Monsieur Ramseyer, c'est à vous que je m'adresse - le personnel du SAN dans ce processus de consultation.

La lettre, dont le Bureau nous a donné lecture, est assez édifiante. Les cent six membres du personnel qui l'ont signée nous disent que le 19 janvier, lorsqu'ils ont appris, non pas par vous, Monsieur Ramseyer, mais par la presse, qu'un nouveau projet de privatisation se préparait, projet de privatisation partiel, cette fois-ci, ajoute ladite lettre, ils ont eu l'impression, véritablement fondée, que ce projet se fomentait, pour reprendre les termes de cette lettre, à leur insu.

Nous savons qu'un certain nombre de propositions doivent être faites par les membres du personnel. Il est temps que le Conseil d'Etat établisse une véritable concertation, car, s'il est un domaine où elle doit avoir lieu, c'est bien celui des services publics. Nous espérons que le Conseil d'Etat changera d'attitude en la matière et acceptera enfin d'ouvrir une véritable concertation.

Je reviens sur le problème des investissements qu'il convient d'effectuer, puisque, comme je l'ai rappelé, tout le monde s'accorde à reconnaître la nécessité d'y procéder. Quels en seront les coûts ? Si vous reprenez les débats que nous avons eus, nous constaterons que ces chiffres varient au gré des interventions des uns et des autres, et tout particulièrement du Conseil d'Etat. On avait parlé alors d'investir 18, 20 ou 22 millions. On a tout entendu en matière de chiffres pour la remise en état du SAN.

A l'époque, Monsieur Ramseyer, vous aviez indiqué que la privatisation s'imposait, parce qu'il n'y avait pas d'argent. Votre argument était faux mais, Monsieur Ramseyer, et vous devez en être content, nous vous offrons ce soir, sur un plateau, la solution de trouver un moyen concret de financement. Comme on l'a relevé tout à l'heure, il ne s'agit pas d'un nouvel impôt mais simplement de maintenir une augmentation préexistante de l'impôt. Nous sommes persuadés que les automobilistes comprendront cette manière de procéder et ne verront pas d'objection à maintenir un impôt qui existe déjà. Il est bien entendu que l'examen de ce projet de loi se fera en commission. Il nous appartiendra de déterminer la nature réelle des travaux qu'il conviendra d'effectuer et le coût de ces derniers.

J'ouvre une parenthèse à propos du projet des «verts» et des radicaux. Il convient de rappeler que, même en créant une régie autonome, il faudra de toute façon trouver les moyens financiers pour procéder à la remise en état du SAN. En d'autres termes, ce n'est pas en créant une régie autonome que nous trouverons les moyens nécessaires à la réalisation du but poursuivi.

Par conséquent, le problème du financement demeure. L'avantage du projet de loi que nous proposons est de donner une solution simple pour trouver les fonds nécessaires pour remettre en état ce service. Je rappelle que, grosso modo, l'impôt des véhicules ascende à 45 millions par année et l'augmentation de 6% que nous proposons revient à peu près à une somme de 2,7 millions par année, de sorte que, en reportant de deux ans supplémentaires cet impôt, on arrivera à «engranger» une somme d'environ 5,4 millions, voire près de 7 à 8 millions, si, d'aventure le coût devait être plus élevé que celui prévu.

Nous pensons, et sommes convaincus, que le SAN doit être développé. Par ce projet de loi nous faisons la démonstration que, contrairement à ce que le Conseil d'Etat indiquait, la possibilité de procéder aux investissements nécessaires peut être faite par les pouvoirs publics. Par conséquent, ce que nous avons toujours dit était juste et s'avère d'autant plus juste ce soir, car il s'agit d'un choix et d'une volonté politique. Nous avons la possibilité de le faire si nous le souhaitons.

Pour conclure, je dirai qu'il y a ceux qui, d'une part, souhaitent une amélioration du secteur public, et nous en faisons partie, et, d'autre part, ceux qui prônent la démission du secteur public. A ceux-là, le peuple a répondu à sa manière le 4 décembre dernier.

Mme Micheline Calmy-Rey (S). Je suis convaincue que nous sommes un certain nombre dans cette enceinte à être d'accord sur le fait que la pire des solutions pour le SAN est l'inertie. Le service technique souffre d'un problème chronique de sous-utilisation de la capacité à disposition.

Le nombre d'inspecteurs est insuffisant pour rentabiliser l'équipement existant, et celui-ci doit être modernisé, car il y a retards, et retards cumulés d'environ 60 000 inspections. L'étude «Horizon 2000», effectuée il y a quelques années, prévoit l'agrandissement de la halle technique, l'équipement automatique d'une ligne d'inspection supplémentaire et l'automatisation de deux lignes existantes, ainsi que l'engagement de six à huit inspecteurs supplémentaires. Le Conseil d'Etat semble être d'avis que l'Etat ne peut pas faire ça, et, à l'appui de sa démarche, il avance la nécessité de réduire ses charges financières.

Madame et Messieurs les conseillers d'Etat, c'est un argument que vous avez déjà avancé, mais les électeurs du canton de Genève ne vous ont pas crus, et ils ont eu raison. D'ailleurs, comment pourrait-on croire que vous ne pouvez pas investir 5 à 7 millions dans la modernisation du service des automobiles et de la navigation, ce qui représente moins d'un million par an de charges financières, alors que vous parlez de construire une traversée de la rade qui coûterait plusieurs centaines de millions, et donc plusieurs dizaines de millions de charges financières par année.

Ce débat dépasse le cadre précis du SAN, ce qui explique la force de notre réaction. En effet, le Conseil d'Etat n'envisage pas autre chose pour rééquilibrer les finances de l'Etat que des baisses d'effectif et des coupures budgétaires. L'objectif recherché est, en définitive, celui de la droite classique, soit le démantèlement des services publics.

Dans la pratique, on laisse aller les choses jusqu'au moment où aucune solution n'est plus praticable et que la chose la plus simple à faire est la délégation de tâches ou la privatisation. Le peuple a dit clairement non à ce type de privatisation. Il n'est donc pas question d'y revenir et il n'est pas question non plus de se contenter de la situation actuelle.

L'exemple du SAN est riche d'enseignement. C'est en étudiant la possibilité d'une privatisation que le département a découvert l'état déficitaire de ce service. L'entreprise privée qui a fait l'étude a néanmoins trouvé ce service rentable, puisqu'elle s'est portée candidate à sa reprise. La question reste toujours la même. Pourquoi une entreprise publique ne serait-elle pas en mesure de faire ce qu'une entreprise privée est à même de faire ? Pourquoi l'Etat devrait-il renoncer à des bénéfices potentiels ? Pourquoi ne peut-il pas réorganiser son administration, changer ses techniques budgétaires, généraliser les imputations internes, donner une responsabilité de gestion et assigner des objectifs à ses services ?

Le sens de notre motion est ici, son but étant d'aboutir à la présentation devant le Grand Conseil d'un projet de loi ouvrant un crédit de 7 millions de francs pour la modernisation de la halle technique et l'engagement d'inspecteurs supplémentaires. C'est d'autant plus faisable que l'Alliance de gauche, M. Ferrazino en l'occurrence, vient de vous présenter un projet de loi qui propose une source financière couvrant largement les besoins dus aux charges financières des investissements que nous voulons.

La bataille qui nous oppose, Mesdames et Messieurs les députés, est celle de la rénovation de l'Etat. La démarche qui est la vôtre est pour nous totalement rédhibitoire de ce point de vue. La privatisation est dangereuse lorsqu'elle vient de ceux qui prétendent qu'elle résout tous les problèmes.

Dans le cas du SAN, vous voulez en effet privatiser contre l'évidence. La privatisation ne diminue pas les coûts et n'est pas synonyme de modernisation et de rénovation de l'Etat de façon automatique. Le but d'une privatisation réside dans l'établissement d'une concurrence qui permette de réaliser des gains d'efficacité et de faire baisser les prix, ou tout au moins de créer une pression. Elle se révèle inopérante quant à l'efficacité et la diminution des coûts si elle ne se traduit que par le transfert d'un monopole public à un monopole privé.

Nous serions de mauvaise foi si nous ne reconnaissions pas les avantages de l'entreprise publique et si nous avions la prétention de nier ses faiblesses lorsque des bureaucraties trop lourdes, trop hiérarchisées, trop rigides engloutissent de l'argent. Dès lors, le meilleur argument contre la privatisation est fourni par le bon fonctionnement des entreprises publiques. Cela implique des objectifs définis démocratiquement, une gestion des administrations analogue au système des centres de profit et des instruments de contrôle.

Je crains que votre attitude et votre démarche, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat, de vouloir à tout prix privatiser et vous débarrasser du SAN, plus qu'une renonciation à un bénéfice potentiel, ne soient une renonciation à une réorganisation générale de l'administration. C'est la raison pour laquelle nous nous sentons obligés d'intervenir ce soir pour vous forcer la main et c'est pourquoi le groupe socialiste acceptera le renvoi en commission des deux projets de lois et de la motion qui ont été déposés à ce sujet.

M. John Dupraz (R). Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat. Toutefois, les gentillesses de Mme Calmy-Rey m'obligent à préciser certaines choses.

Tout d'abord, je suis convaincu que si le Conseil d'Etat et les députés de l'Entente, lorsque ce projet est allé en commission, avaient eu la patience de prendre un peu plus de temps, de négocier la proposition des écologistes et d'accepter une régie autonome, nous ne reparlerions pas du SAN ce soir et nous aurions pu faire un accord politique avec, d'une part, une régie autonome pour le SAN et, d'autre part, la fermeture de Montana. Nous avons agi avec précipitation et les députés en sont responsables, celui qui vous parle comme les autres.

Mais ne restons pas sur un échec. Essayons plutôt de rechercher des solutions. Le projet proposé englobe la responsabilisation de ceux qui auront la charge de ce SAN sans le privatiser, contrairement à ce que vous dites. Lorsque vous dites que l'on privatise par une mesure para-étatique un monopole public ou semi-privé, chère Madame, que dire des Services industriels, qui fonctionnent parfaitement bien ! Je vous rappelle que les SI sont une régie autonome. Ils ont construit des bâtiments pour 200 millions et ils n'ont pratiquement pas eu de dépassement dans le coût de construction. C'est la preuve que cela peut fonctionner et que cela doit fonctionner. C'est dans cette idée que le groupe radical a appuyé et cosigné cette proposition réaliste, moderne, et c'est une solution pour l'avenir de l'Etat.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat enregistre avec intérêt ces trois interventions parlementaires. Avant le renvoi de ces projets en commission, je désire vous informer et formuler les remarques suivantes.

Le fait de s'incliner devant le verdict populaire n'a pas pour autant supprimé le déficit structurel du SAN. C'est ce que relèvent le projet de loi 7209 et la motion 967. Nous nous réjouissons de ce réalisme, même s'il est un peu tardif.

Le Conseil d'Etat a d'emblée exploré plusieurs pistes, dont celle, à la fin 1996, de la centralisation des contrôles aujourd'hui déjà sous-traités par des garages privés, ceci dans le cadre d'une nouvelle structure interne. Je ne peux pas laisser répéter, comme d'aucuns prennent plaisir à le faire, qu'il s'agissait de conduire une mini-privatisation.

Je répète qu'actuellement onze mille contrôles sont sous-traités et qu'ils devront être rapatriés à la fin 1996. Dans la lettre dont vous faites état, je demandais au Conseil d'Etat d'explorer aussi cette piste. Le Conseil d'Etat ne m'a pas suivi. Il a dit non, nous préférons in fine reprendre l'étude globalement, charger un groupe de travail du département de justice et police et du département des finances de reprendre le dossier, de faire l'état de ce qui avait été étudié et des nouvelles propositions parlementaires qui sont faites. Ce travail est interne à l'administration et c'est la raison pour laquelle, à ce stade, nous n'avons pas jugé utile d'intéresser le personnel sinon que par l'information. A ce sujet je précise, pour calmer les inquiétudes, que j'ai accepté de rencontrer le personnel du SAN, en principe le 13 avril prochain à 16 h 30.

L'étude conduite par le groupe de travail interdépartemental vous sera remise en commission. C'est en somme l'état des lieux de ce qui a été fait et de ce qui peut être fait.

J'aimerais dire un mot sur les différentes interventions parlementaires figurant à l'ordre du jour. Dans la motion 967, je lis qu'il convient de trouver une solution. Cette formulation devrait faire l'unanimité et c'est bien ce que nous faisons. Le projet de loi 7209 traite en fait d'une affectation de l'impôt autos et cette ressource provient d'une augmentation de l'impôt de 6%, augmentation présentée comme temporaire.

Or je rappelle que le déficit du SAN est structurel. Par conséquent, ce temporaire risque de durer. Il faut retenir que l'on propose une augmentation de la taxe automobile, Mesdames et Messieurs des bancs qui sont sur ma gauche. Vous prétendez : «qu'il est possible que, et qu'il n'y a qu'à...». Je vous rappelle simplement que le projet concernant le SAN, intitulé «Horizon 2000» n'a, en dix ans, jamais trouvé grâce aux yeux de ce parlement. Il y avait toujours d'autres priorités. Là, un groupe scolaire, là un établissement médical, là des prestations sociales. Je trouve tout à fait normal que l'on préfère ce genre d'investissements à celui du SAN. Mais enfin, c'est la réalité.

Je m'attarde quelque peu sur le projet de loi 7213. Il s'agit d'un établissement public et quelqu'un a dit que l'établissement public était à l'entreprise privée ce que le Canada dry est à l'alcool. Toutefois, nous devrons peut-être nous en satisfaire. Ce projet présente quelques lacunes, en particulier dans le domaine du financement ou dans la lourdeur de son fonctionnement, mais nous l'étudierons avec intérêt en commission.

Le personnel du SAN peut avoir l'impression que nous laissons aller les choses, mais ce n'est pas vrai. Ce matin encore, j'étais avec un conseiller d'Etat «vert» du canton voisin. Nous avons évoqué la possibilité d'une décentralisation du SAN vaudois. Nos amis vaudois se demandent si, dans la recherche d'une rationalisation intercantonale, il ne serait pas possible de créer un établissement public autonome, mais qui soit intercantonal pour une partie du canton de Genève, la rive droite en particulier.

Nous n'avons pas pu privatiser le SAN. L'histoire ne se refait pas. Il s'agit de tirer les enseignements et de trouver des solutions de substitution. Personnellement, je m'engage sur ce dossier et je ne renonce pas à remettre le SAN sur les rails qu'il n'aurait jamais dû quitter au cours des années. C'est dans cet esprit que je souhaite bon vent à ces trois interventions parlementaires en commission. J'aimerais vous assurer très sincèrement de l'engagement de mon département à vos côtés.

M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Je voulais intervenir sur le renvoi en commission, mais, suite aux déclarations du conseiller d'Etat Ramseyer, je lui demande si l'on devra se rendre à la Blécherette pour passer une visite et s'il faudra la vignette pour circuler sur l'autoroute. Nous aimerions être renseignés à ce sujet.

J'ai été surpris en suivant à la commission du SAN tout le débat sur cette affaire. L'été dernier, je discutais avec un député démocrate-chrétien du Grand Conseil valaisan - vous savez qu'il n'y a pas de députés de l'Alliance de gauche en Valais...

Une voix. Heureusement !

M. Jean-Pierre Lyon. ...Il me disait avoir suivi l'affaire du SAN dans les journaux. «C'est curieux - me disait-il - vous gérez bizarrement à Genève, parce qu'en Valais on a 17 millions de bénéfice au bureau des automobiles.». Il me demanda si les prix à Genève étaient établis en fonction de la prestation. Il trouvait très étrange qu'à Genève 5 millions de déficit soient déclarés par les partis de l'Entente.

Je voulais intervenir sur le renvoi en commission. La commission qui s'est occupée de toute l'affaire du SAN connaît très bien cette affaire. Elle a très bien géré tous ces débats. Le président Fontanet a su diriger cette commission de main de maître. Je propose donc de remettre en route cette commission ad hoc afin qu'elle gère cette question du SAN, car il est important qu'une telle commission puisse reprendre le travail.

M. John Dupraz (R). Nous ne sommes pas d'accord avec la proposition de M. Lyon et demandons que ces projets aillent à la commission judiciaire, car nous ne sommes pas des forçats de la politique pour participer à des commissions qui siègent entre midi et deux heures.

La présidente. Bien, Monsieur Dupraz, mais je soumets tout de même au vote la proposition de notre collègue Jean-Pierre Lyon, à savoir la réactivation de la commission ad hoc qui s'était occupée du premier projet du SAN.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ces projets en commission ad hoc est rejetée.

PL 7209 - PL 7213

Ces projets sont renvoyés à la commission judiciaire. 

M 967

Cette motion est renvoyée à la commission judiciaire.