Séance du jeudi 23 mars 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 5e session - 10e séance

IN 104-B
22. Rapport de la commission législative chargée d'étudier la validité de l'initiative populaire dite «La Suisse» pour la pluralité de la presse et le soutien de l'emploi. ( -) IN104
 Mémorial 1995 : Projet, 258. Rapport du Conseil d'Etat, 258.
  Commission de l'économie, 286. Commission législative, 286.
Rapport de M. Laurent Moutinot (S), commission législative

La commission législative s'est réunie le 1er novembre 1994 sous la présidence de Mme Françoise Saudan, présidente, et le 20 février 1995, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président, pour examiner l'initiative populaire dite «La Suisse», pour la pluralité de la presse et le soutien de l'emploi. M. Eric Balland, premier secrétaire adjoint du département de justice et police et des transports a participé à nos travaux et a répondu à bon nombre de questions de la commission.

Conformément au nouveau droit d'initiative cantonal populaire, le présent rapport est déposé suffisamment à l'avance pour que le Grand Conseil puisse prendre, conformément à l'article 120 de la loi portant règlement du Grand Conseil, sa décision sur la validité de l'initiative avant le 19 juillet 1995, soit dans le délai de 9 mois, dès l'arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative publié dans la Feuille d'avis officielle le 19 octobre 1994.

Pour qu'une initiative soit recevable, elle doit remplir 5 conditions, soit:

Du point de vue de la recevabilité formelle:

1. l'unité de la matière;

2. l'unité de la forme;

3. l'unité normative.

Du point de vue de la recevabilité matérielle:

4. la conformité au droit supérieur;

5. l'exécutabilité.

La commission a examiné ces cinq conditions de manière approfondie.

1. Unité de la matière

L'article 66, alinéa 2, de la constitution genevoise exige que l'initiative populaire respecte l'unité de la matière, c'est-à-dire que ne soit posée au corps électoral qu'une question unique à laquelle il puisse être répondu par oui ou non.

Le titre même de l'initiative montre bien qu'elle vise deux buts distincts que sont la pluralité de la presse, d'une part, et le soutien de l'emploi, d'autre part, car même s'il peut arriver, comme dans le cas du journal «La Suisse», que ces deux buts se recouvrent, il s'avère dans la majorité des cas que les entreprises qui méritent un soutien à l'emploi ne sont pas des organes de presse, d'une part, et que la pluralité de la presse, d'autre part, peut nécessiter des mesures qui ne soient pas du domaine de l'emploi.

A cette vision de l'initiative, certains membres de la commission ont relevé que l'unité de la matière s'articule dans l'initiative autour du rôle économique de l'Etat, et en particulier des interventions, souhaitées par les initiants, de la Banque cantonale. Il a notamment été rappelé que le texte même de l'initiative, qui part de l'exemple du journal «La Suisse», veut concrétiser ses objectifs «tout en les étendant, en ce qui concerne plus particulièrement l'emploi, à l'ensemble des secteurs de l'économie».

La commission a voté que l'initiative 104 ne respecte pas l'unité de la matière par 6 voix (2 L, 1 PS, 1 R, 1 PDC, 1 V) contre 2 (AdG).

Dès lors que l'initiative ne respecte pas l'unité de la matière, le Grand Conseil doit, chaque fois que cela est possible, scinder l'initiative ou la déclarer partiellement nulle, selon que ces différentes parties sont en elles-mêmes valides ou non (article 66, alinéa 2, de la constitution genevoise). Dans le cas d'espèce, la commission a considéré que l'initiative devait être scindée, dès lors que chacune des parties de ladite initiative pouvait être valide en elle-même. La discussion s'est engagée sur la manière de scinder l'initiative 104. Certains commissaires souhaitaient scinder l'initiative en deux, soit un volet de défense de pluralité de la presse et un volet de soutien de l'emploi, alors que d'autres commissaires souhaitaient qu'elle soit scindée en trois sujets, à savoir la lutte contre les monopoles de presse, la modification des statuts de la Banque cantonale de Genève, et la politique de l'Etat de lutte contre le chômage. Certains commissaires, enfin, souhaitaient introduire un quatrième volet, soit le rôle des autres banques que la Banque cantonale dans la lutte pour l'emploi.

Le découpage de l'initiative en trois ou quatre parties correspond à une lecture de détails de l'initiative, puisque, effectivement, les différents volets qui y ont été repérés existent dans le texte même. Toutefois, il faut se rappeler que l'initiative est dite non formulée et qu'elle contient par conséquent des principes qu'il appartiendra au législateur de préciser. Il serait dès lors contraire au respect que le législateur doit avoir à l'égard de l'initiative de la morceler au-delà du strict nécessaire sur le plan constitutionnel.

C'est de la sorte que la commission a tout d'abord repoussé par 6 voix contre 2 la proposition de scinder l'initiative en quatre volets. Elle a de même rejeté l'idée de scinder l'initiative en trois par 5 voix contre 3 et a finalement accepté par 5 voix (1 L, 1 V, 1 R, 1 PS, 1 AdG), contre 1 (PDC) et 2 abstentions (L et AdG) de scinder l'initiative en deux sujets, à savoir:

1. pluralité de la presse;

2. soutien de l'emploi.

Ces deux volets correspondent, pour le surplus, au titre même de l'initiative.

La commission parvient donc à la conclusion que le non-respect de l'unité de la matière peut être sanctionné par la division de l'initiative en deux parties.

Il conviendra, dans l'examen des autres critères de validité de l'initiative, de vérifier chaque fois si l'un et l'autre des volets ainsi dégagés respectent les critères constitutionnels.

2. Unité de la forme

L'initiative 104 est une initiative dite non formulée au sens de l'article 65 de la constitution genevoise, en ce sens qu'elle formule une «proposition conçue en termes généraux».

Chacun des deux volets de l'initiative tels que dégagés plus haut respecte le principe de l'unité de la forme.

La commission est unanime à considérer que l'unité de la forme est respectée.

3. Unité normative

L'unité normative ou unité de genre exige qu'une initiative soit du niveau législatif ou du niveau constitutionnel sans mélange des deux. En l'occurrence, l'initiative 104 entend développer au niveau législatif le principe de la liberté de la presse garantie à l'article 8 de la constitution genevoise, de sorte que, s'agissant du volet lié à la diversité de la presse, l'unité normative est respectée.

S'agissant du volet de soutien de l'emploi, l'initiative demande à l'Etat de prendre diverses mesures qui, selon l'exposé des motifs, sont de niveau législatif, puisque les initiants proposent d'«inscrire dans la loi les moyens d'interventions dont dispose l'Etat en matière économique». L'unité normative est, par conséquent, elle aussi respectée.

4. Conformité au droit supérieur

L'initiative 104 étant de niveau législatif, elle doit respecter l'ensemble du droit qui lui est supérieur, à savoir le droit constitutionnel cantonal, l'ensemble du droit fédéral et, le cas échéant, les traités internationaux d'application directe.

La conformité au droit supérieur sera examinée pour chacun des deux volets de l'initiative.

1. Pluralité de la presse

L'initiative elle-même se présente comme une concrétisation de la garantie de la liberté de la presse prévue à l'article 8 de la constitution genevoise. Elle se place donc dans le cadre du droit constitutionnel cantonal. La liberté de la presse est également garantie à l'article 55 de la constitution fédérale et ces deux garanties ne diffèrent pas, pour l'essentiel, l'une de l'autre. Au sens classique, cette liberté garantit la non-intervention de l'Etat à l'encontre des organes de presse. Son contenu est négatif en ce sens qu'elle oblige l'Etat à une abstention. Pareille conception des libertés prête le flanc, depuis le XIXe siècle déjà, à la critique, d'aucuns souhaitent que les libertés classiques n'aient pas un seul contenu négatif mais également positif en ce sens que l'Etat aurait l'obligation d'agir pour favoriser l'exercice effectif des droits et libertés garantis. En matière de presse, la Confédération intervient depuis fort longtemps de manière positive, en particulier par des tarifs postaux préférentiels. Dans notre canton, l'Etat intervient également en fournissant à la presse des prestations telles que le banc qui lui est réservé à la tribune du Grand Conseil qui, pour inconfortable qu'il soit, distingue néanmoins la presse du reste du public.

Il est donc admissible pour un canton d'intervenir en matière de presse. Toutefois, cette intervention ne saurait en aucun cas viser un seul média, dès lors que l'intervention étatique doit respecter strictement le principe de l'égalité de traitement et de la neutralité de la part de l'Etat dans ses intervention dans le secteur privé.

En résumé, si les normes constitutionnelles genevoises et fédérales ne confèrent pas à la prese un droit à l'intervention de la collectivité publique en leur faveur, elles n'interdisent pas non plus aux collectivités publiques d'interventions positives en faveur de la presse à condition, bien sûr, que cette intervention ne soit pas discriminatoire, c'est-à-dire qu'aucun média ne soit favorisé par rapport à un autre.

2. Le soutien de l'emploi

La politique cantonale de l'emploi doit respecter l'article 31 de la constitution fédérale, soit la liberté du commerce et de l'industrie.

Dans le domaine qui nous intéresse, il est à noter que l'article 31 de la constitution fédérale n'interdit pas aux cantons toute intervention dans le domaine économique, cela à la condition que l'intervention étatique ne vienne pas fausser la libre concurrence. C'est ainsi qu'une intervention de politique sociale ou une intervention de promotion économique sont admissibles, en principe, dès lors que ce type d'intervention est justifié par un intérêt public pertinent et respecte le principe de la proportionnalité. En effet, une restriction à l'exercice d'un droit constitutionnel doit toujours cumulativement remplir trois conditions, soit de reposer sur une base légale en l'espèce les mesures à prendre telles que le souhaite l'initiative , être justifiée par un intérêt public pertinent et respecter le principe de la proportionnalité.

Il appert dès lors que le volet de l'initiative 104 de soutien de l'emploi ne heurte en aucune façon le droit fédéral. Ce sera toutefois au niveau de la concrétisation de l'initiative que pourront se poser différents problèmes, car selon la nature ou l'ampleur des mesures choisies, il se pourrait que lesdites mesures heurtent l'article 31 de la constitution fédérale ou, s'agissant de la Banque cantonale, la législation fédérale en matière bancaire.

La commission s'est par conséquent interrogée sur la question de savoir si elle devait examiner par avance les limites de conformité au droit supérieur, non pas de l'initiative en tant que telle, mais des mesures légales qui pourraient en découler. Elle a considéré qu'il s'agissait là d'un travail titanesque et, de surcroît, probablement inutile, dès lors que la palette d'interventions étatiques est considérable et que la commission législative ne saurait présumer des mesures que pourrait choisir la commission de l'économie et en définitive le Grand Conseil. La commission législative est, en revanche, prête à réexaminer la conformité au droit supérieur des mesures que pourrait prendre le Grand Conseil pour concrétiser l'initiative 104, si celui-ci le souhaitait ou si une autre commission du Grand Conseil le souhaitait en cours d'examen du fond de l'initiative.

La commission législative tient toutefois à fournir dans le présent rapport quelques précisions sur les limites possibles d'une intervention de l'Etat à l'égard de la Banque cantonale.

La Banque cantonale a été créée par l'article 177 de la constitution genevoise sous forme d'une société anonyme de droit public, ce qui signifie, conformément à l'article 763 du code des obligations, que la banque est soumise à la loi sur la Banque cantonale de Genève du 24 juin 1993 en premier lieu, et, pour le surplus, aux dispositions sur les sociétés anonymes (art. 620 à 763 du code des obligations). Ce statut a pour conséquence que la mission d'intérêt public dévolue à la Banque cantonale de Genève par la loi qui l'a créée empêche la banque de se prévaloir de la liberté du commerce et de l'industrie au sens de l'article 31 de la constitution fédérale, comme pourrait le faire n'importe quelle autre banque, et cela dans la mesure où les lois qui la contraindrait à suivre une politique déterminée n'iraient pas à l'encontre de sa mission fondamentale. En d'autres termes, la Banque cantonale de Genève peut se prévaloir de la liberté du commerce et de l'industrie si le législateur cantonal vient à restreindre sa liberté et notamment sa capacité concurentielle, à moins que les restrictions qui lui sont imposées ne ressortissent à l'exercice même de sa mission telle que définie à l'article 2, alinéa 1, de la loi sur la Banque cantonale assignant à cet établissement comme «but principal de contribuer au développement économique du canton et de la région».

D'autre part, la Banque cantonale de Genève doit, dans son activité, respecter les règles contenues dans la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne. La loi cantonale ne pourra dès lors en aucune manière imposer à la Banque cantonale des exigences contraires à celles de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne. En particulier, les différents ratios entre les postes du bilan, tels qu'ils sont définis dans la législation fédérale sur les banques, ne pourront être modifiés.

Dans la mesure où il subsiste une possibilité d'interpréter l'initiative dans un sens conforme au droit supérieur, la commission est d'avis que le volet de l'initiative 104 sur le soutien de l'emploi est conforme au droit supérieur.

5. Exécutabilité

L'exécutabilité du volet sur la pluralité de la presse ne prête pas particulièrement à discussion et elle est considérée comme acquise par la commission législative. S'agissant de l'exécutabilité du volet sur le soutien de l'emploi, la commission considère ledit volet comme exécutable, tout en relevant que la marge d'intervention du législateur cantonal, notamment à l'égard de la politique menée par la Banque cantonale, est extrêmement réduite, dès lors qu'une intervention massive de l'Etat à ce niveau risque fort de heurter les règles fédérales en matière de banques ou en matière de sociétés anonymes, s'agissant en particulier des droits des actionnaires minoritaires. Il est à craindre que l'initiative ne soit exécutable que par des mesures de faible intensité, compte tenu de la marge limitée laissée par le droit fédéral aux cantons en la matière.

En conséquence, la commission législative vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de scinder l'initiative populaire 104, dite «La Suisse», pour la pluralité de la presse et le soutien de l'emploi en deux volets consacrés, d'une part, à la pluralité de la presse et, d'autre part, au soutien de l'emploi, et de déclarer ainsi chacun des deux volets recevable.

Annexe: texte de l'initiative 104.

ANNEXE

IN 104

INITIATIVE POPULAIRE

dite «La Suisse»,

pour la pluralité de la presse et le soutien de l'emploi

Les soussignés, électrices et électeurs dans le canton de Genève, en application des articles 64 et 65A de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 93 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, appuient la présente initiative non formulée, qui a pour but de légiférer dans le sens ci-après:

En application de l'article 8 de la constitution genevoise consacrant la liberté de la presse, les autorités doivent prendre des mesures garantissant la diversité de la presse et veiller, conformément au droit fédéral, à ce que des situations de monopole ne se créent pas dans le secteur de la presse. A cette fin, elles doivent notamment intervenir concrètement pour contribuer au maintien de journaux existants et des emplois qui leur sont rattachés. Afin de contribuer aux objectifs énoncés ci-dessus tout en les étendant, en ce qui concerne plus particulièrement l'emploi, à l'ensemble des secteurs de l'économie, l'Etat doit, de manière générale, prendre notamment les mesures suivantes:

a) octroyer, à travers la Banque cantonale, un appui financier à des entreprises nouvelles, telles que la société coopérative créée pour sauver «La Suisse», ou à des entreprises assainies sur le plan financier, qui permettent le maintien ou la création d'emplois;

b) garantir dans tels cas les prêts consentis par la Banque cantonale ou d'autres banques ou institutions, lorsque des secteurs importants de l'économie locale sont en jeu;

c) verser, en s'inspirant à cette fin de la législation tessinoise en la matière, des subsides aux:

- entreprises engageant des chômeurs ou des jeunes qui viennent de terminer leur formation,

- ou à des secteurs d'activités menacés de fort chômage.

EXPOSÉ DES MOTIFS

RÉAGISSEZ CONTRE LA «CASSE» DE «LA SUISSE»

En date du 14 mars, «La Suisse» a cessé de paraître suscitant une très vive émotion dans la population de notre canton. Le personnel du journal décida alors de créer une coopérative pour reprendre sa parution, ce qui a entraîné un énorme élan de solidarité à Genève. Cet espoir a été trahi par ceux qui ne voulaient plus de «La Suisse», par les pressions de certains milieux économiques et surtout par l'inaction du Conseil d'Etat (pourtant élu sur le slogan «un emploi pour chacun»!), alors que ce dernier disposait des moyens d'agir et aurait dû intervenir, comme l'Etat l'a fait avec succès en d'autres occasions.

Face à ce désastre, il importe de réagir et d'en tirer les enseignements, en prévoyant d'inscrire dans la loi les moyens d'intervention dont dispose l'Etat et dont il pourrait disposer pour agir dans de tels cas. C'est le but de la présente initiative que vous êtes invités à signer, car il n'est pas possible devant la grave crise économique que nous traversons, que l'Etat continue à mener une politique de «laisser faire et laisser aller» avec pour conséquence que des pans entiers de notre économie risquent de s'effondrer avec les pertes d'emplois inacceptables qui en résultent. Les autorités doivent, de ce fait, mener une politique active de sauvegarde des activités économiques existantes et des emplois qui leur sont rattachés, ce qui amène cette initiative à proposer des mesures de portée générale étendues à l'ensemble de l'économie ou à certains secteurs de celle-ci, destinés à préserver les activités vitales pour la survie de notre économie locale, ce qui est à la fois moins coûteux et surtout plus efficace pour l'avenir que de verser de simples indemnités de chômage, de surcroît, limitées dans le temps.

Débat

M. Laurent Moutinot (S), rapporteur. Au moment où le Conseil des Etats adopte une vision extrêmement restrictive des droits populaires, notamment en matière d'initiative, la commission législative du Grand Conseil, quant à elle, s'en tient à une conception plus large qui est celle d'ailleurs toujours admise et toujours préconisée par le Tribunal fédéral. C'est donc dans le respect de ces principes que la commission législative propose de scinder en deux l'initiative dite «La Suisse», afin qu'elle puisse être soumise au peuple.

M. Christian Grobet (AdG). Il est exact que la constitution prévoit la possibilité pour le Grand Conseil de scinder en deux une initiative si le Grand Conseil estime que l'unité de la matière n'est pas respectée. Une telle décision doit toutefois rester exceptionnelle, et il faut que les objectifs de l'initiative soient clairement différents.

Pour le cas qui nous intéresse, l'exposé des motifs de cette initiative a très bien expliqué le lien entre ces différentes questions, et, à notre sens, il n'y a pas de motif justifiant la scission de cette initiative en deux. Nous pensons que le Grand Conseil est en train de s'engager sur une voie qui nous paraît fausse et qui risque de créer un mauvais précédent. Du reste, nous voyons déjà en lisant le rapport du Conseil d'Etat sur l'initiative pour l'emploi, qui a été déposée également par les représentants syndicaux, que le Conseil d'Etat a l'air de considérer que cette initiative ne respecterait pas l'unité de la matière. C'est tout juste s'il n'aurait pas fallu traiter cette initiative par quinze initiatives distinctes !

Cette prise de position du Conseil d'Etat nous amène à considérer qu'il faut être extrêmement restrictifs avant de scinder des initiatives, car le but n'est pas de saucissonner des initiatives, mais de faciliter le fonctionnement de la démocratie.

Je rappelle à ce sujet que, lors de l'examen d'une initiative par notre Grand Conseil, il y a une quinzaine d'années, qui se rapportait au problème des transports publics, un avis de droit avait été sollicité à l'époque auprès du constitutionnaliste Aubert, qui, précisément, avait considéré qu'il fallait être tolérant à l'égard des initiatives de manière générale et ne pas se montrer trop formaliste et trop juridique. Je constate, malheureusement, que la position inverse est en train d'être adoptée. Nous le regrettons et notre groupe votera contre le rapport de majorité, car nous estimons qu'il n'est pas nécessaire de scinder cette initiative.

Mise aux voix, cette initiative scindée en deux volets est déclarée valide.