Séance du
vendredi 4 novembre 1994 à
17h
53e
législature -
2e
année -
1re
session -
40e
séance
P 1045-A
Déposée sous forme de pétition et munie de 1085 signatures, la lettre ouverte ci-dessous est parvenue au Grand Conseil le 13 septembre 1994.
Lettre ouverte du personnel des EPMau Conseil d'Etat et au Grand Conseil
Monsieur le président,
Madame la conseillère, Messieurs les conseillers,
Mesdames et Messieurs les députés-es,
Les signataires, membres du personnel des établissements publics médicaux genevois, vous demandent par la présente d'annuler la décision de fermeture de la Clinique genevoise de Montana et de retirer le licenciement des 84 collègues.
Nous sommes bien placés pour mesurer les implications sur le plan des prestations à la population, de la décision de fermeture précipitée de la Clinique genevoise de Montana.
La clinique accueille des patients de médecine interne générale et de réadaptation orthopédique, neurologique et cardiaque. Egalement, elle assure la suite des traitements de patients atteints d'affections psycho-somatiques et de maladies de la dépendance. Près de 50% des malades proviennent de l'HCUG, les autres étant référés par les médecins praticiens genevois. De 1980 à 1993 le nombre de patients admis par année a pratiquement doublé (520 à 1000). En revanche, la durée moyenne de séjour est passée de 45 à 24 jours.
La qualité des équipements, la compétence et la disponibilité du personnel, le cadre naturel exceptionnel du site, font de la Clinique genevoise un endroit de choix pour réussir des convalescences souvent difficiles et pour pallier la souffrance liée à des maladies chroniques ou évolutives. La surprise indignée face à la décision de fermeture manifestée par de nombreux patients anciens et actuels, par des médecins et soignants qui y ont exercé des responsabilités et par un grand nombre de simples citoyens, témoigne de l'attachement des Genevois à des prestations de santé irremplaçables et répondant à des besoins réels.
Nous sommes particulièrement indigné-es face à l'usage désinvolte que le Conseil d'Etat fait des notions de déficit et du taux d'occupation des lits, mettant par là en doute les performances de l'établissement.
Il parle de déficit d'exploitation de la clinique alors qu'il faut parler de subvention de fonctionnement respectant les dispositions de la constitution genevoise.
Certains insistent sur le taux d'occupation de la clinique - 72% - mais oublient de dire que le coût moyen de la journée y est le plus bas de tous les EPM (383 F en moyenne 1994 contre environ 1000 F à l'HCUG), que la part de subvention de l'Etat représente seulement le 55% du budget (taux le plus bas de tous les EPM) et ce pour des prestations hautement appréciées des malades et des médecins genevois.
En plus, la décision de fermeture bafoue les principes les plus élémentaires de la concertation avec les syndicats, tant prônée par le président du département de l'action sociale et de la santé. Elle ignore les conclusions des rapports paritaires «Prestations et effectifs» et anticipe les résultats du rapport d'expertise sur le dispositif sanitaire du canton que le chef du DASS a demandé au professeur Gilliand.
Enfin, le licenciement de 84 de nos collègues assorti du leurre d'un hypothétique reclassement dans les EPM genevois (à 200 km de leur lieu de résidence!), constitue une utilisation abusive de l'article 24 de la loi B 5,05; une violation notoire de l'accord passé le 6 avril 1993 entre le Conseil d'Etat et le Cartel intersyndical de la fonction publique ainsi que de la loi sur les établissements publics médicaux (K 2,1), qui établit que seule la commission administrative est compétente pour engager, nommer ou licencier le personnel. En outre, le Conseil d'Etat a empiété sur les prérogatives du Grand Conseil, qui est seul compétent pour modifier les lois et, partant, décider de la fermeture d'un établissement hospitalier.
Pour conclure, nous réaffirmons qu'à nos yeux cette décision est une mesure de démantèlement social, qui semble désormais la principale stratégie du Conseil d'Etat face à la crise des finances publiques.
Ainsi, défendre Montana, ses prestations et son personnel, est pour nous, personnel des EPM, non seulement une action de solidarité indispensable mais aussi un acte de défense de nos propres postes de travail et des prestations nécessaires en matière de santé publique.
Pour toutes ces raisons, les soussigné-es - employés-es des EPM - demandent au Conseil d'Etat et au Grand Conseil d'annuler la décision de fermeture de la Clinique genevoise de Montana et de retirer le licenciement des 84 collègues.
Décision de la commission
La commission a fait les constats suivants:
d'une part, l'objet de cette pétition a été longuement débattu lors de la séance du Grand Conseil du 15 septembre 1994;
d'autre part, le projet de loi 7148 sur la fermeture de la clinique genevoise de Montana a été accepté par le Grand Conseil par un vote de 48 oui, 42 non et 1 abstention;
enfin, le lancement d'un référendum contre cette décision a été annoncé et permettra, s'il aboutit , au peuple de trancher.
En conséquence, la commission, estimant que le sujet est pour l'instant épuisé, vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, par 7 voix pour (2 dc, 2 rad, 3 lib), 2 voix contre (adg) et 2 abstentions (soc), de classer cette pétition.
Mises aux voix, les conclusions de la commission (classement de la pétition) sont adoptées.