Séance du
vendredi 21 octobre 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
10e
session -
39e
séance
IU 31 et objet(s) lié(s)
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je me suis déjà exprimé largement au sujet des interpellations de MM. Saurer et Godinat.
Je me permets de répéter certains faits importants. Tout d'abord, je revendique le droit d'informer la population sur les grands projets, comme cela se fait partout dans le monde.
Ensuite, en tant que praticien de l'architecture, je crois que cette information doit se faire au début du processus du projet, c'est-à-dire au stade d'avant-projet - stade auquel nous nous trouvons - qu'il soit public ou privé.
Enfin, la notion d'utilité, la forme et le fond d'une campagne d'information relèvent de la compétence du magistrat, à condition qu'il reste dans le cadre légal. Je vous citerai rapidement deux ou trois arrêtés à ce sujet, plus tard.
Pour ce qui est de l'usage des mass media, je me permets de vous rappeler ce que j'ai déjà dit. Le département de justice et police, à l'article 4 concernant l'information et la participation dans la loi sur l'aménagement du territoire, fait un commentaire intéressant. A la question : «Sous quelle forme et à quelle condition l'autorité doit-elle s'acquitter de sa tâche d'information ?», il répond : «Etant donné le large cercle des titulaires du droit d'être informé, les seuls moyens véritablement efficaces dont dispose l'autorité sont le recours aux mass media ou l'organisation de séances d'information, étant entendu que ces deux mesures ne constituent pas une obligation légale.». Dans le même chapitre, il est également dit : «...que la collectivité publique a le devoir de fournir à la population l'information qui lui est nécessaire pour se former une opinion.». Dans un esprit de respect de l'ensemble des prescriptions légales, il semble naturel que nous nous abstenions de publier toute information gouvernementale trois semaines avant le dépôt et le vote de la loi.
Je ne crois pas qu'il y ait gestion déloyale, puisque, selon les avis donnés par deux ou trois avocats, je ne lèse dans cette publication aucun intérêt public au profit d'un intérêt personnel.
La couverture budgétaire est assurée deux fois : d'une part, dans le projet de 1991 qui prévoyait 650 000 F répartis en trois ou quatre fois sur 22 millions, et, d'autre part, dans le projet de 1992, qui prévoyait et maintenait les mêmes 650 000 F pour un crédit d'étude ramené à 8 millions. Cela signifie que M. Grobet, alors conseiller d'Etat, avait estimé qu'il était judicieux de maintenir la même masse d'argent pour faire ce qui figure dans son deuxième rapport intitulé «visualisation» - ce qui est tout à fait juste, à mon avis. Il faut dire qu'une marge intitulée «réserve» de 180 000 F s'ajoute à ce crédit. Cette somme est à la disposition du crédit général, ce qui permet de la ventiler là où on estime que cela est nécessaire.
L'importance des sommes engagées est toute relative. 600 000 F d'impôts publics par rapport à 400 millions donne un pourcentage de 0,2%, ce qui est dérisoire par rapport à des objets analogues en Suisse et à l'étranger.
On m'a reproché d'avoir publié «Inforade No 2». Le 12 octobre, j'ai reçu la copie de la notification de M. le procureur. Le premier texte a paru le 13 octobre et il n'y avait aucune injonction quelle qu'elle soit, ni aucun souhait, ni aucun désir pour que j'arrête cette publication de façon formelle. J'ai décidé de continuer cette publication tant que l'on ne me l'interdirait pas formellement.
Une des interpellations évoque l'affaire des indemnités. Cela concerne probablement l'affaire Ganter. Les sous-entendus sous-jacents dans cette sous-affaire me laissent pantois, et je ne vois vraiment pas la relation qui existe entre cette problématique et celle qui nous occupe !
Le droit de l'Etat de défendre des dossiers du législatif est une question importante. Je parle du dossier de la rade sur lequel un vote populaire a été exprimé et sur lequel le Grand Conseil a pris des décisions. Nous estimons - des professeurs de droit civil très compétents l'estiment aussi - qu'il faut arrêter de chercher à empêcher les autorités exécutives de défendre des projets hérités du législatif. Nous avons donc le devoir de faire ce travail d'information au mieux de nos capacités.
Je passe maintenant aux arrêts. Vous citez l'arrêt Launey; il concerne une votation populaire, il ne s'agit absolument pas d'un vote sur un objet. Cet arrêt concerne le Palais Wilson et stipule, je cite : «Le droit à la libre formation de l'opinion exclut, en principe, toute influence directe des autorités qui serait de nature à fausser la formation de la volonté des citoyens, lors de la campagne précédant une élection ou une votation.». Cette partie de l'arrêt semble tout à fait clair, mais il faut continuer la lecture : «Il est cependant admis en matière de votation que l'autorité recommande aux citoyens d'accepter un projet et leur adresse un message explicatif, pourvu qu'elle respecte son devoir d'information objective.». Vous citez l'arrêt Handelfingen, mais il s'agit d'une question de propagande électorale et pas du tout d'une question concernant un objet ! Je peux fournir les textes de deux ou trois autres arrêts à celles et ceux d'entre vous que cela intéresse. Je ne reviendrai pas dessus. L'arrêt du Tribunal fédéral, du 4 août 1993, sur la question du droit de l'autorité et même de son obligation à informer sur les projets qu'elle veut soumettre va dans ce sens.
Je ne me prononcerai pas sur l'ordonnance du Procureur général, puisqu'elle va être traitée dans le cadre de la demande de levée de l'immunité qui a été formulée.
M. Christian Ferrazino. Et que vous acceptez ! (Contestation.)
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Pour ce qui est des dépenses réalisées sur les budgets d'étude, mon prédécesseur, tous les conseillers d'Etat de tous les cantons et toutes les institutions pratiquent une information très coûteuse, ce qui est normal. Le budget de TC 2000 a atteint 285 000 F. S'agissant du tram 13, nous avons payé 144 000 F aux TPG pour un poste info. Le coût de l'information délivrée par le département des travaux publics concernant le Seujet a été de 120 000 F. Les bulletins d'information disponibles à ce jour dans certains point de distribution de l'autoroute de contournement sont revenus à 78 000 F et le dernier pavillon d'information a coûté 170 000 F. Le total des coûts des précédents pavillons de l'autoroute de contournement s'est élevé à 248 000 F. L'inauguration a coûté 869 818,60 F...
Une voix. C'était avant les élections !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. ...et aucun bal n'a été organisé pour cette manifestation en raison des divergences entre le conseiller d'Etat responsable des travaux publics et le conseiller d'Etat responsable de la police, qui y était défavorable.
Une voix. Le bal des vampires !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. On m'a demandé quels étaient les coûts exacts de la campagne entreprise actuellement. Ils ne concernent pas seulement «Inforade». Ils se montent, pour 1994, à 238 800 F et, pour 1995, à 223 000 F, soit 461 900 F au total. Les honoraires sur ce total sont de 154 100 F, le reste étant consacré au paiement des annonces et des insertions dans les divers journaux. Aucun journal n'a jamais refusé de publier nos «Inforade». (Eclats de rires de toutes parts.)
Pour terminer, le coût de cet objet se situera entre 500 et 700 millions de francs, y compris la montée jusqu'à Frontenex, qui est un acte urbanistique majeur et d'une très grande importance pour notre collectivité. Les difficultés que nous avons déjà rencontrées prouvent que tout le monde en est conscient. Ce projet va beaucoup plus loin que le seul comptage des voitures et que la seule construction d'une voie supplémentaire : c'est un geste urbanistique. A ce titre, il vaut la peine que les gens soient correctement informés sur une dépense de cette importance.
En conclusion, j'aimerais mieux entrer - et là je prends parti - dans la maison du XXIème siècle en passant par un pont qu'en passant par la cave ! (Applaudissements des démocrates-chrétiens et des radicaux.)
Le président. Nous allons maintenant passer à la réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation de M. Andreas Saurer sur la traversée de la rade.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. J'ai répondu à cette interpellation, puisque j'ai regroupé l'ensemble des thèmes !
Ces interpellations urgentes sont closes.