Séance du vendredi 21 octobre 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 10e session - 39e séance

P 1008-A
13. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant le congé donné aux locataires du 46, rue des Maraîchers. ( -)P1008
Rapport de Mme Martine Roset (DC), commission des pétitions

La commission des pétitions, sous les présidences de Mme Bugnon et de M. Lescaze a examiné la pétition suivante :

PÉTITION

contre un congé collectif donnéaux locataires de l'immeuble 46, rue des Maraîchers à Genève

Monsieur le Président,Mesdames et

Messieurs les députés,

Nous avons l'honneur de vous informer que nous sommes chargés de la défense des intérêts des personnes suivantes, locataires dans l'immeuble cité en marge :

 M. et Mme Gérardo Scalea ;

 M. Alain Jacquemoud ;

 M. Pierre Moessinger ;

 M. Michel Peccoud ;

 M. Ettore Mosca ;

 M. et Mme Joseph Righetti ;

 Mme Valérie Bouvier ;

 M. Jean-Marie Borgeaud.

La bailleresse est la S.I., rue des Maraîchers 46, représentée par Me Eric C. Stampfli, 17, avenue Pictet-de-Rochemont, 1207 Genève.

Par lettre du 14 janvier 1985 de la régie A. L'Huillier, tous les locataires ont reçu la résiliation de leur bail pour le 31 décembre 1986, au motif que des travaux de transformation et de rénovation de l'immeuble étaient projetés.

Les locataires, par l'intermédiaire de l'ASLOCA, ont sollicité des prolongations de leur bail au 31 décembre 1990.

Il convient de préciser que le département des travaux publics, n'ayant reçu aucune demande d'autorisation de construire, était intervenu auprès de la société propriétaire pour lui indiquer que des travaux de transformation ne nécessitaient nullement le départ des locataires et sollicitait l'annulation des congés notifiés à ces derniers.

La bailleresse, par requête du 13 mars 1991, sollicita à nouveau l'évacuation des locataires encore présents dans l'immeuble auprès du Tribunal des baux et loyers.

Lors de l'audience du 21 octobre 1992, M. Simonin, administrateur de la S.I., rue des Maraîchers 46, fit la déclaration suivante :

«Nous persistons dans nos requêtes en évacuation des différents locataires. Il y a des projets de transformation, toutefois nous attendons que l'immeuble soit évacué avant de déposer les autorisations.»

En effet, aucune demande d'autorisation de construire n'a été à ce jour déposée au département des travaux publics.

Cette attitude témoigne d'un mépris certain pour les conséquences humaines de la décision de résilier les baux de l'immeuble 46, rue des Maraîchers.

Par conséquent, nous demandons à votre Grand Conseil de bien vouloir :

 condamner le congé collectif donné aux locataires de l'immeuble 46, rue des Maraîchers ;

 inviter la S.I., rue des Maraîchers 46, à retirer les congés donnés aux locataires ;

 inviter le Conseil d'Etat et le département des travaux publics à n'autoriser aucune rénovation-démolition de l'immeuble tant qu'une solution n'aura pas été trouvée pour les locataires congédiés, soit par leur maintien dans l'immeuble, soit par leur relogement à des conditions sociales et financières acceptables.

Nos sociétaires se tiennent à votre entière disposition pour tous renseignements que vous pourriez souhaiter.

Ils répondront à toute convocation que vous pourriez leur adresser.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, nos salutations distinguées.

N.B. : ASLOCA-RIVE

Me F. ZUTTER

27, boulevard Helvétique1207 Genève

Audition des pétitionnaires (ASLOCA et locataires)

En complément du texte de la pétition, les pétitionnaires nous relatent le déroulement chronologique de cette affaire :

janvier 1985, tous les locataires reçoivent une lettre de congé non motivé. La régie laisse entendre qu'un arrangement est possible en rénovant l'immeuble appartement par appartement.

février 1986, changement de propriétaire et de régie. Le nouveau propriétaire, n'est plus intéressé à rénover l'immeuble, mais maintient les congés.

juin 1987, la régie propose une prolongation de bail jusqu'à fin décembre 1990. Cette offre est acceptée par les locataires.

mars 1991, des requêtes en évacuation sont déposées au Tribunal des baux et loyers.

février 1993, le jugement d'évacuation est prononcé par le Tribunal susmentionné.

juillet 1993, cette pétition est adressée au Grand Conseil.

décembre 1993, le Procureur général décide de ne pas exécuter l'évacuation.

début 1994, le Tribunal fédéral est saisi d'un recours de la part du propriétaire contre l'ordonnance du Procureur.

juin 1994, le Tribunal fédéral annule la décision du Procureur général.

Discussion de la commission

Renseignements pris, il n'y a toujours pas de demande auprès du DTPE pour rénover ou démolir cet immeuble.

Il faut relever qu'en 1985, la loi en vigueur permettait aux propriétaires de donner congé sans motifs aux locataires.

La commission déplore la situation délicate des locataires qui n'ont pas encore déménagé, cela d'autant plus que la nouvelle loi interdirait de pouvoir évacuer des logements sans qu'une demande de rénovation ait été formulée au DTPE. Il n'y a pas d'effet rétroactif.

Cela fait 9 ans que cette affaire a débuté, on peut relever que ce délai important aurait pu permettre aux locataires de trouver un autre logement, cela d'autant plus qu'en 1987 ils avaient accepté une prolongation de bail jusqu'à fin 1990.

Le Tribunal fédéral a renoncé à ordonner lui-même l'évacuation dès lors qu'il a estimé que le Procureur général devait encore examiner s'il était possible, pour certains locataires, d'ajourner brièvement l'évacuation.

Au vu de ce qui précède et en vertu de la séparation des pouvoirs, la commission, par 11 oui et 2 abstentions, vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

Mises aux voix, les conclusions de la commission (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.