Séance du vendredi 23 septembre 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 9e session - 33e séance

PL 7151
8. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant : a) la loi sur l'encouragement aux études (C 1 1,5) b) la loi sur l'université (C 1 27,5)  (Taxes universitaires). ( )PL7151

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi sur l'encouragement aux études, du 4 octobre 1989, est modifiée comme suit:

Art. 11 (nouvelle teneur)

Principe

1 Pour bénéficier de la gratuité au sens de la présente loi, l'étudiant doit suivre sa formation dans un établissement public d'enseignement non universitaire situé en Suisse.

Etablissements non universitaires subventionnés

2 A droit au remboursement des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global de 3 220 F par an, l'étudiant qui suit sa formation dans un établissement non universitaire subventionné par le canton.

Etablissements universitaires suisses

3 Pour les enseignements dispensés par les établissements universitaires en Suisse, seul l'étudiant qui jouit du statut d'allocataire au sens de la présente loi bénéficie de la gratuité des études.

Etablissements à l'étranger ou établissements non officiels dans un canton confédéré

4 A droit au remboursement annuel des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global correspondant à une allocation de base complète, l'étudiant qui suit sa formation dans un établissement d'enseignement à l'étranger, au sens de l'article 6, alinéa 1, lettre c ou d, ou dans un canton confédéré, au sens de l'article 6, alinéa 2, lettre b, pour autant:

a)

qu'il ait le statut d'allocataire au sens de la présente loi;

b)

que, sans être allocataire, le revenu déterminant du groupe familial du répondant ne dépasse pas la limite fixée pour l'octroi d'une allocation complète augmentée de la somme de base prévue à l'article 18, alinéa 1.

Modalité de remboursement

5 Le service des allocations d'études effectue le remboursement des taxes sur présentation des pièces justificatives.

Art. 2

La loi sur l'université, du 26 mai 1973, est modifiée comme suit:

Art. 63, al. 1 (nouvelle teneur)

Taxes

1 Sous réserve des dispositions de la loi sur l'encouragement aux études, les taxes universitaires sont fixées par le département, sur proposition du rectorat. Les taxes sont affectées principalement à l'encadrement des étudiants.

Art. 3

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er septembre 1995.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Objectifs du projet de loi

Ces dernières années, le nombre des étudiants et des tâches de l'université de Genève sont en constante augmentation. En revanche, les moyens mis à sa disposition n'ont pas suivi cette évolution. A l'évidence, cette situation a, aujourd'hui, pour conséquence de mettre en péril l'encadrement des étudiants, qui n'a cessé de se dégrader.

Ainsi, l'université de Genève n'a pas d'autre choix que de renoncer au principe de la gratuité des études et d'augmenter les taxes qu'elle prélève auprès de ses étudiants. Dans ces circonstances, les objectifs de deux modifications législatives qui vous sont soumises sont les suivants:

a) de permettre à l'université de s'assurer de nouvelles ressources par l'augmentation des taxes de cours;

b) d'affecter ces nouvelles ressources à l'encadrement des étudiants;

c) de s'assurer que l'augmentation de ces taxes n'entrave pas l'accès aux études universitaires.

2. Situation actuelle

La loi sur l'université a déjà été modifiée au mois de juin 1990 afin de permettre à l'université de prélever des émoluments dans le cadre de la formation dite continue. L'article 5 et l'article 63, alinéa 2 de la loi sur l'université, ont été modifiés en conséquence. Depuis lors, l'université de Genève prélève des émoluments qui, selon le cursus de formation continue, se situent entre quelques centaines et quelques milliers de francs.

Quant aux taxes prélevées dans le cadre de la formation dite de base, soit celle sanctionnée par une licence, un diplôme d'études supérieures ou un doctorat, l'article 63, alinéa 1 de la loi, permet déjà à l'université de prélever des taxes universitaires, qui sont proposées par le rectorat et ratifiées par le département de l'instruction publique.

Tous les étudiants, quels que soient leur origine et leur domicile, paient une taxe dite fixe d'un montant de 65 F. La perception de cette taxe est destinée aux besoins propres des étudiants et de leurs associations.

En sus de cette taxe, l'université prélève des taxes dites semestrielles mais seulement auprès des étudiants confédérés, qui s'acquittent d'un montant de 300 F par semestre, et auprès des étudiants étrangers, qui versent pour leur part une taxe de 500 F par semestre.

Les taxes fixes et les taxes semestrielles prélevées auprès des étudiants confédérés et étrangers s'élevaient dans les comptes 1991 à 2 513 768,50 F (rubr. 35.433) et dans les comptes 1992 à 2 650 298,45 F. Le montant inscrit au projet de budget 1995 est de 4 750 000 F.

C'est le lieu de souligner que l'université de Genève est la seule en Suisse (voir annexe) qui ne perçoit pas de taxes de cours pour les étudiants ressortissants de son canton. En effet, toutes les universités de Suisse perçoivent des taxes de cours qui varient selon les facultés et/ou universités et dont la moyenne suisse se situe aujourd'hui à environ 400 F par semestre.

3. Modifications législatives proposées

L'article 63 de la loi sur l'université qui, comme on vient de le voir, permet déjà à l'institution de prélever des taxes, laisse cependant réservées les dispositions relatives à la loi sur l'encouragement aux études.

Or, la loi sur l'encouragement aux études prévoit actuellement la gratuité de la formation universitaire, à l'exception de la formation continue. Elle empêche donc l'université de percevoir des taxes auprès des étudiants genevois et, en principe, auprès des étudiants domiciliés dans le canton. Il convient de modifier la loi sur l'encouragement aux études afin d'ouvrir la possibilité de prélever des taxes, comme l'université en a d'ores et déjà le droit depuis l'année 1990 en matière de formation continue.

Dès lors, diverses modifications de l'article 11 de la loi sur l'encouragement aux études vous sont proposées, dont le but est de lever le principe de la gratuité des études universitaires pour les étudiants genevois ou domicilés à Genève. Cependant, l'étudiant dont les revenus ou celui de son répondant ne sont pas suffisants bénéficie en règle générale du statut d'allocataire. Il aura ainsi la possibilité de demander le remboursement des taxes. Par ce système, l'accès aux études ne sera pas entravé par des motifs financiers.

4. Ressources supplémentaires

Il convient de modifier l'article 63 de la loi sur l'université afin de garantir que les ressources supplémentaires prélevées auprès des étudiants au moyen des taxes semestrielles seront affectées à leur encadrement et non à d'autres tâches. Il est cependant impossible d'estimer à l'avance le montant global qui sera prélevé par l'université dans la mesure où il dépend de la demande aléatoire d'allocations d'études. Si les 6 474 étudiants genevois immatriculés en 1993 devaient payer une taxe de 1 000 F, la recette nouvelle serait de 6,5 millions de francs.

5. Directives financières

Le rectorat a d'ores et déjà fait connaître au département de l'instruction publique les principes qu'il entendait concrétiser:

a) principe d'une taxe unique de 500 F semestrielle pour tous les étudiants, quel que soit leur domicile ou leur origine. Ce faisant, l'université de Genève s'alignera sur la pratique adoptée par la majorité des universités suisses. Qui plus est, la perception d'une taxe égale pour tous les étudiants, quelle que soit leur origine, est «eurocompatible»;

b) statu quo quant à la perception d'une taxe fixe de 65 F par semestre;

c) exonération des taxes pour les assistants;

d) principe de l'indexation périodique de la taxe.

** *

Commentaires article par article

Loi sur l'encouragement aux études (C 1 1,5)

Article 11 (nouvelle teneur)

Alinéa 1

Le principe de la gratuité des études continue à s'appliquer aux études poursuivies dans les établissements publics d'enseignement non universitaire.

Alinéa 2

Le remboursement des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global de 3 220 F par an continue à s'appliquer à l'étudiant non universitaire qui suit une formation dans un établissement subventionné par le canton (par exemple l'école du Bon Secours).

Alinéa 3

Seul l'étudiant universitaire qui est allocataire bénéficiera dorénavant du remboursement des taxes. Devraient donc payer une taxe semestrielle, les étudiants dont la limite du revenu déterminant, selon l'article 17 de la loi sur l'encouragement aux études, se situe au-dessus des montants suivants:

 Groupe familial Genève Hors Genève

 Parents Enfants

 1 1 73 790 F 78 950 F

 1 2 81 250 F 86 410 F

 1 3 88 710 F 93 870 F

 1 4 96 170 F 101 330 F

 2 1 81 250 F 86 410 F

 2 2 88 710 F 93 870 F

 2 3 96 170 F 101 330 F

 2 4 103 630 F 108 790 F

Alinéa 4

Dans le cas où une formation ne peut être acquise dans un établissement public en Suisse, la loi sur l'encouragement aux études actuelle prévoit un remboursement des taxes pour des formations suivies dans des établissements à l'étranger ou dans des établissements non officiels dans un canton confédéré lorsque le revenu déterminant du groupe familial du répondant ne dépasse pas le double de la limite fixée pour l'octroi d'une allocation complète.

L'équité exige que le régime de la gratuité des formations à l'étranger et des formations suivies dans des établissements non officiels en Suisse subisse également une restriction. Il convient cependant de tenir compte du fait que les taxes perçues dans ces établissements sont généralement bien supérieures aux taxes relativement modestes perçues par les universités suisses. Il est dès lors équitable que la gratuité ou le remboursement jusqu'à concurrence d'une allocation complète soit non seulement accordé aux allocataires mais également aux étudiants dépendant de leurs parents dont le revenu déterminant ne dépasse pas les limites de revenu pour l'octroi d'une allocation complète, augmentée de 37 000 F environ, soit les montants suivants:

 Groupe familial Formations à l'étranger et formations dans des établissements non officiels en Suisse

 Parents Enfants

 1 1 61 950 F + 36 710 F =  98 660 F

 1 2 69 410 F + 36 710 F = 106 120 F

 1 3 76 870 F + 36 710 F = 113 580 F

 1 4 84 330 F + 36 710 F = 121 040 F

 2 1 69 410 F + 36 710 F = 106 120 F

 2 2 76 870 F + 36 710 F = 113 580 F

 2 3 84 330 F + 36 710 F = 121 040 F

 2 4 91 790 F + 36 710 F = 128 500 F

Selon l'article 22 du règlement d'application de la loi sur l'encouragement aux études, un étudiant immatriculé à l'université de Genève qui suit pendant 1 ou 2 semestres des études dans une université en Suissee ou à l'étranger, dans le cadre des conventions sur la mobilité des étudiants, est considéré comme un étudiant inscrit à Genève.

Dans le but de favoriser la mobilité, le règlement du Conseil d'Etat prévoirait que ces étudiants ne soient pas pénalisés en ce qui concerne un éventuel remboursement des taxes.

Alinéa 5

Cet alinéa constitue une reprise de l'alinéa de la loi actuelle.

Loi sur l'université (C 1 27,5)

Article 63 (nouvelle teneur)

Alinéa 1

Les taxes universitaires continuent à être fixées par le département de l'instruction publique, sur proposition du rectorat. Il est précisé dorénavant que ces nouvelles ressources doivent servir principalement à l'encadrement des étudiants.

Pour ces motifs, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le projet de loi qui vous est présenté.

Annexe: taxes semestrielles d'immatriculation dans les universités suisses (état au 1er juin 1994)

Taxes semestrielles d'immatriculation dans les universités suisses

(Etat au 1er juin 1994)

 Université Etudiants Confédérés Etrangers

  domiciliés

  dans le

  canton

 Bâle 500.- 500.- 500.-

 Berne 530.- 530.- 530.-

 Fribourg 350.- 350.- 475.-

 Genève - 300.- 500.-

 Lausanne 450.- 450.- 450.-

 Neuchâtel 375.- 375.- 775.-

 Zurich 600.- 600.- 1 100.-  

 Saint-Gall 460.- 460.- 610.-

 ETHZ 400.- 400.- 500.-

 EPFL 400.- 400.- 500.-

Préconsultation

M. Jacques Boesch (AdG). Je dois vous avouer que, à la lecture de ce projet de loi, j'ai eu quelques doutes.

Je vous rappelle que nous avons débattu de ce problème au cours de ce printemps et qu'un rapport de minorité avait été établi relatant les propos des associations d'étudiants qui voyaient avec une très grande inquiétude l'introduction de taxes plus élevées. Ce rapport était fondé sur les conséquences engendrées par l'introduction de telles taxes à l'université de Zurich à laquelle un grand nombre d'étudiants n'avaient pas pu s'inscrire. Il me semble que nous sommes placés devant une manière subtile d'introduire un numerus clausus.

D'autre part, je vous avoue avoir été un peu surpris que l'on demande, au fond, au Grand Conseil de cautionner une décision qui relevait principalement du rectorat et du Conseil d'Etat, puisque - la loi le précise - c'est par voie réglementaire que l'on décide du montant de ces taxes. Le seul problème qui existe est de savoir s'il faut mettre en place ces taxes ou non. Nous désirons que la législation soit la moins lourde possible, mais, dans le cas particulier, on l'alourdit puisque l'on demande au Grand Conseil de légiférer en la matière. On voudrait que l'université ne fasse l'objet que d'une seule, voire de deux ou trois rubriques dans le budget, et on demande au Grand Conseil d'intervenir sur un point extrêmement particulier. Il y a là, me semble-t-il, un certain nombre de contradictions majeures. J'ai l'impression, à entendre les discours des uns et des autres, que l'on a la volonté de rendre l'université autonome et que, dans le même temps, on exige du Grand Conseil qu'il légifère pour soutenir une hausse des taxes, que les étudiants trouvent tout à fait inadéquate et contraire à la démocratisation des études.

Je ne sais pas s'il faut enterrer d'emblée ce projet, s'il doit être simplement examiné dans le cadre de la commission des finances qui pourrait faire des recommandations concernant le budget général de l'université, ou s'il faut le renvoyer purement et simplement en commission. Dans ce cas, je vous le dis tout de suite, nous demanderons un certain nombre d'auditions et nous l'examinerons très sérieusement, parce qu'il me semble que nous mettons la main dans un engrenage contraire à la démocratisation des études.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Notre groupe est prêt à entrer en matière sur le projet de loi concernant les taxes universitaires.

Ce n'est évidemment pas de gaieté de coeur que l'on abandonne le principe de la gratuité des études, mais il ne faut pas oublier que ce principe ne s'appliquait qu'aux Genevois, et pas aux Confédérés ni aux étrangers qui fréquentent notre alma mater. Il y a là une inégalité de traitement qui ne se justifie plus.

Nous sommes donc prêts à discuter sur la manière d'assurer un meilleur encadrement des étudiants, car une démocratisation des études passe, en plus de conditions financières d'entrée acceptables, par l'amélioration des conditions d'enseignement. Fréquentant l'université depuis maintenant trois ans, j'ai pu constater de mes propres yeux ce que signifie des séances de travail à cent étudiants, voire plus, de faire la queue pendant des heures et des heures pour voir l'assistant ou l'assistante et de courir tôt le matin pour avoir une place assise dans un auditoire. Il est difficile de stimuler la réflexion de plus de cent étudiants en même temps et encore moins de répondre à des questions éventuelles. Les personnes qui s'en sortent le mieux sont celles qui peuvent poser des questions à la maison, chez papa-maman ou, pour les plus âgés, auprès de leurs amis ayant fait des études auparavant. Encore faut-il avoir de tels amis !

L'amélioration de l'encadrement est donc, pour le groupe socialiste, la condition sine qua non pour que nous entrions en matière sur ce projet de loi.

Par ailleurs, il nous semble très important qu'une réflexion profonde soit menée concernant les conditions d'accès aux allocations d'études et l'exonération des taxes. Je connais personnellement plusieurs cas d'étudiantes vivant seules, un peu plus âgées que la moyenne, qui n'ont pas eu droit aux allocations d'études, car leurs parents gagnaient trop. Or, ces étudiantes vivent depuis longtemps de manière indépendante et ont gagné leur vie pendant de nombreuses années. Elles ont repris des études soit parce qu'un changement est intervenu dans leur vie, soit parce qu'elles se sont retrouvées au chômage. Quelle n'a pas été leur surprise quand on leur a demandé les fiches d'impôts de leurs parents, alors qu'elles ont trente ans, voire plus. Si ma mémoire est bonne, l'obligation d'entretien des parents vis-à-vis de leurs enfants ne dure pas toute la vie !

Il ne faut également pas oublier les étudiants qui vivent avec très peu de moyens et ne demandent pas d'allocation d'études. Ils choisissent de travailler à côté, voire d'emprunter une somme d'argent qu'ils devront rembourser plus tard. Ils doivent aussi pouvoir obtenir une exonération des taxes universitaires. Il faut faire très attention pour que cette taxe ne soit pas la goutte d'eau qui fait déborder le vase pour les personnes qui se trouvent à la limite d'être allocataires et qui doivent renoncer aux études pour cette raison. Il serait intéressant d'avoir des renseignements sur la situation sociale et économique des étudiants à Genève.

Il faudrait examiner si le fait d'assurer des études gratuites a, effectivement, amené plus de personnes à entreprendre des études, si certaines y renoncent pour des raisons purement financières, s'il s'avère que la majorité des étudiants est issue de milieux aisés et que ce n'est pas la question financière qui empêche les jeunes et les moins jeunes de faire des études. Il me semble possible d'adapter nos taxes universitaires à celles des autres cantons suisses. Dans ce cas, la démocratisation des études doit être réexaminée en amont du cursus scolaire pour y découvrir les failles qui ne permettent qu'à une certaine catégorie de personnes de s'épanouir dans des études universitaires. En effet, des coupes dans le budget de l'école primaire et secondaire ont probablement des incidences beaucoup plus graves sur la démocratisation des études que le fait de supprimer des taxes aux étudiants qui ont les moyens de les payer.

Mme Anne Briol (Ve). Ce projet de loi soulève plusieurs problèmes dont l'harmonisation des taxes, leur affectation et, indirectement, celui de l'augmentation de la taxe.

En ce qui concerne l'harmonisation des taxes, il va de soi que nous soutenons l'introduction d'une taxe non différenciée pour les Genevois, Confédérés et étrangers. Cependant, l'introduction d'une taxe annuelle, qui atteindrait 1 000 F et dont l'affectation n'est pas clairement définie, est contraire à la démocratisation des études et n'assure pas une amélioration de l'encadrement des étudiants. A ce propos, nous aimerions savoir ce que vous entendez par, je cite : «Les taxes sont affectées principalement à l'encadrement des étudiants.».

De plus, en période de conjoncture difficile, ceux qui ont bénéficié de privilèges durant les années d'abondance devraient comprendre qu'il faut donner la priorité au maintien des prestations offertes aux étudiants et ne pas porter atteinte à la démocratisation des études.

M. Armand Lombard (L). Ce projet s'inscrit bien dans la ligne de la réorganisation et du réaménagement d'un certain nombre d'éléments du service public aux fins de rendre l'université plus autonome, plus efficace et plus responsable financièrement. L'admission des modifications, dans la loi de l'université, des articles 5 et 63, alinéa 2, pour faire en sorte que les gens de la Cité utilisant les services de l'université payent ces services, avait été examinée. Maintenant, nous abordons un deuxième volet concernant les étudiants qui peuvent participer au développement de la Cité et de leur université.

Bien entendu, face au principe de la démocratisation des études auquel nous croyons tous - et qui a eu des effets remarquables au cours des dernières années - il y a le principe de l'utilisateur payeur. Dans ce projet de loi, on touche peu à l'un et l'autre de ces principes, puisqu'une taxe de 1 000 F par année correspond à un coût qui peut varier de 25 000 F à 120 000 F par an par étudiant. Ne parlons pas de problème financier global ou de brèche à la démocratisation des études; il n'en est pas question pour notre groupe.

Il faut également distinguer l'enseignement obligatoire - tâche de formation du gouvernement et de la société - financé par l'Etat et le post-obligatoire qui relève du choix de l'étudiant.

Enfin, il a été longuement discuté de ce problème lorsque la commission de l'université a traité la pétition 1004. Les auditions ont été multiples et je sens bien que nous allons recommencer cette procédure. Ma foi, il faudra en passer par là ! Même si le sujet avait déjà été bien décanté, je pense qu'il sera bon d'en rediscuter en commission.

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical accueille ce projet favorablement et propose son renvoi à la commission de l'université, dans la mesure où il ne porte en réalité absolument pas atteinte au principe fondamental de la démocratisation des études, ou plus exactement de la démocratisation de l'accès aux études.

Comme vient de le souligner le préopinant, la taxe dont le montant reste à fixer - celui qui est proposé est de 1 000 F par an - ne remet pas du tout en question ce principe, dans la mesure où les prêts réels qui incombent à la collectivité sont vingt à cent fois plus élevés que ce montant. Il restera à déterminer soigneusement en commission les modalités de l'encadrement accru des étudiants que tout le monde réclame - et surtout eux-mêmes - à vérifier également dans quelle mesure la convention de 1905, qui réglementait les rapports entre la bibliothèque publique et universitaire et l'université et qui affectait à cette dernière la moitié des taxes fixes, resterait ou non en vigueur ou devrait être modifiée, puisque cela signifierait que 500 F devraient être versés à cette institution - je tiens à le rappeler au passage.

Plus important : je tiens d'ores et déjà à souligner devant ce Grand Conseil que l'augmentation des taxes universitaires à Zurich a fait baisser le nombre des étudiants inscrits de près de deux mille, sans que cela entraîne la moindre évolution sur le nombre des diplômes délivrés par cette université. Cela signifie qu'il y avait à Zurich et qu'il y a certainement à Genève un certain nombre de personnes qui ne s'inscrivent à l'université que pour bénéficier des avantages annexes du statut d'étudiant et qui ne suivent aucun cours et aucun séminaire. De ce point de vue, l'annonce de ce projet de loi est une bonne nouvelle, car cela permettra de clarifier la situation.

Mme Nelly Guichard (PDC). Comme le souligne l'exposé des motifs, les difficultés financières que nous traversons ne nous permettent plus d'accorder la gratuité aux étudiants genevois. Et comme tous les autres, nous serons obligés de percevoir une taxe dont la moyenne se situe aux environs de 500 F par semestre.

Notre groupe n'est pas opposé à cette mesure pour autant que la somme encaissée permette de pallier au manque d'encadrement des étudiants toujours plus nombreux dans notre université. Un montant annuel de 1 000 F ne semble pas excessif, puisque les étudiants que cela mettrait en difficulté et qui satisfont aux normes énoncées en page 5 du projet de loi peuvent demander une exonération s'ils sont au bénéfice d'une allocation d'études. Et ceci pour autant que le système tienne compte de la situation des étudiants plus âgés.

Notre groupe soutiendra donc le renvoi de cette motion à la commission de l'université.

Mme Marlène Dupraz (AdG). C'est un par parti, je crois ! Je ne sais pas si quelqu'un s'est déjà exprimé... (Commentaires de l'assemblée.)

Le président. On attend plus que vous, Madame !

Mme Marlène Dupraz. Excusez-moi, je me suis trompée !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je tiens à rassurer tout le monde, ce projet de loi est tout à fait nécessaire. Nous serions, Monsieur Boesch, dans l'illégalité si nous ne modifions pas la perception des taxes...

M. John Dupraz. Ce ne serait pas la première fois !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. C'est votre choix, Monsieur Dupraz, d'estimer qu'il est normal d'être dans l'illégalité ! Pour ma part, ce n'est pas ma conception ! (Commentaires et réflexions fusent.)

M. Claude Blanc. Tu te fais moucher, Dupraz !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. En l'occurrence, sauf le respect que je porte à M. Dupraz, je signale à M. Boesch qu'il n'est pas question de contester la première partie du projet de loi, parce que nous ne pouvons pas percevoir des taxes si nous ne modifions pas cet article. Et puis, il serait faux de ne pas modifier l'article 63, alinéa 1, parce qu'il répond très justement au désir exprimé dans cette enceinte, à savoir que les taxes soient affectées principalement à l'encadrement des étudiants. Il me paraît donc tout à fait justifié de présenter ces deux projets de lois, et je me réjouis déjà des débats que vous aurez en commission.

Deuxième problème, Monsieur Boesch, comme l'a dit très justement M. Lescaze, ce qui s'est passé à Zurich nous montre qu'il n'y a pas de numerus clausus, parce que les étudiants en première année sont toujours aussi nombreux. En revanche, ceux qui s'égrenaient au fil des ans et à des âges que nous ne qualifierons pas tout à fait de canoniques ont bel et bien disparu. Ces informations viennent très directement de l'université de Zurich.

Enfin, vous aurez tout loisir, en commission, de prendre connaissance de l'application de la loi sur l'encouragement aux études et vous verrez que les mesures prises pour soutenir les étudiants, indépendamment des problèmes soulevés par Mme Roth-Bernasconi, sont suffisantes et forment un dispositif pratiquement unique en Suisse.

Mais Genève n'est pas unique sur ce seul point. C'est le dernier canton universitaire à pratiquer une discrimination entre ses propres ressortissants et les Confédérés. Nous avons été priés plusieurs fois par les cantons confédérés de bien vouloir nous aligner, non pas sur le montant des taxes, mais pour supprimer cette discrimination. Je vois mal, à l'heure de l'Europe - soutenue ici par tous les partis - comment nous pourrions continuer à maintenir cette discrimination.

Je me réjouis à l'avance des débats en commission à ce sujet. Je souhaite véritablement que nous approuvions ce projet de loi pour renforcer l'encadrement des étudiants.

Le président. Je mets aux voix la proposition de renvoi de ce projet à la commission des finances. Celles et ceux qui souhaitent ce renvoi répondront oui et celles et ceux qui le refusent répondront non.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

(Contestation sur les bancs radicaux et démocrates-chrétiens.)

Une voix. Non, président, à la commission de l'université !

M. John Dupraz. Faut vous réveiller, Monsieur le président !

Une voix. Sois poli avec le président !

Le président. Le Bureau et les chefs de groupe avaient pensé à la commission des finances, si vous êtes d'un avis différent, c'est autre chose ! Alors, que celles et ceux qui souhaitent renvoyer ce projet à la commission de l'université lèvent la main.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de ce projet à la commission de l'université est adoptée.