Séance du
jeudi 15 septembre 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
9e
session -
29e
séance
PL 7148 et objet(s) lié(s)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Cessation d'exploitation de la clinique
L'exploitation de la clinique genevoise de Montana cesse à la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Art. 2
Gestion des biens résultant de la fermeture de la clinique
1 Les biens propres de la Fondation du sanatorium genevois de Montana confiés dès le 1er janvier 1985 par la loi sur les établissements publics médicaux, du 19 septembre 1980, aux cliniques genevoise de Joli-Mont et de Montana restent acquis à l'établissement de Joli-Mont et font partie de son patrimoine au sens de l'article 12 de cette même loi. Ils restent séparés des biens de l'Etat conformément à l'ar-ticle 173, alinéa 2, de la constitution de la République et canton de Genève.
2 Le Conseil d'Etat, respectivement l'établissement de Joli-Mont, aliènent les biens des immeubles abritant jusqu'à sa fermeture la clinique de Montana en Valais, dont ils sont propriétaires.
3 L'établissement de Joli-Mont continue à être juri-diquement responsable des droits et obligations encourus dans le cadre de l'exploitation de la clinique de Montana.
Art. 3
Modification à une autre loi (K 2 1)
La loi sur les établissements publics médicaux, du19 septembre 1980, est modifiée comme suit:
Art. 1, al. 1, lettre e (nouvelle teneur)
Désignation
Les établissements publics médicaux (ci-après: établissements) sont les suivants:
e) la clinique genevoise de Joli-Mont.
CHAPITRE V (du titre II)
Clinique genevoise de Joli-Mont
(nouvelle teneur)
Art. 33 (nouvelle teneur)
But
La clinique genevoise de Joli-Mont constitue un établissement; elle accueille des malades pour des traitements ou des soins de caractère non intensif pour des hospitalisations intermédiaires ou de longue durée de caractère médico-social ainsi que pour des convalescences.
Art. 34, al. 1, lettre f,
(nouvelle teneur)
al. 4 et 6
Administration
1 L'administration de l'établissement est confiée à une commission administrative, dont les membres sont de nationalité suisse, composée comme suit:
f) un membre désigné par le personnel de la clinique de Joli-Mont.
4 Il est élu au bulletin secret par l'ensemble du personnel de la clinique selon le système majoritaire appliqué à l'élection du Conseil d'Etat.
6 Le délégué du personnel perd sa qualité d'administrateur s'il cesse son activité dans les services de la clinique de Joli-Mont.
Art. 35
(nouvelle teneur)
Direction
1 Le directeur de la clinique est responsable de la bonne marche de l'établissement, à l'exception des questions médicales dont la responsabilité incombe au médecin-chef.
2 Il assiste avec voix consultative aux séances de la commission administrative.
Art. 35 A
(abrogé)
Art. 4
Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur à l'épuisement du délai référendaire.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Introduction
Comme vous le savez, le Conseil d'Etat a annoncé le 15 juillet 1994, dans le cadre de la préparation du projet de budget 1995, la fermeture de la clinique genevoise de Montana pour le 30 novembre 1994, ce qui a suscité une vive émotion.
A l'appui du projet de loi concrétisant juridiquement cette décision, le Conseil d'Etat entend exposer les motifs qui l'ont amené à annoncer la fermeture de la clinique genevoise de Montana tout en inscrivant cette décision dans le cadre plus général du redressement des finances de l'Etat et des priorités de la politique de santé.
A cet effet, le plan de l'exposé des motifs est le suivant:
1. Introduction.
2. La situation financière de l'Etat de Genève.
3. Comment rendre le système de santé moins coûteux?
4. Le projet de budget 1995 et la politique de santé.
5. La fermeture de la clinique genevoise de Montana.
6. Le projet de loi.
7. Conclusion.
2. La situation financière de l'Etat de Genève
2.1 L'évolution de 1990 à 1995
Depuis plusieurs années, le budget de fonctionnement de l'Etat de Genève présente un important déficit.
De 1990 à 1995, la situation a évolué de la manière suivante:
Exercice
Revenus
Charges
Déficit
F
F
F
1990
4 028 120 090
4 221 817 968
193 697 878
1991
4 012 426 649
4 543 767 426
531 340 777
1992
4 438 099 464
4 906 084 566
467 985 102
1993
4 360 997 292
4 851 824 055
490 826 763
1994
4 437 714 390
4 861 005 350
423 290 960
1995
4 618 863 823
4 998 281 823
379 418 000
Pour financer chaque année ces déficits successifs de fonctionnement, l'Etat de Genève a dû recourir de façon importante à l'emprunt, augmentant ainsi sa dette qui a passé de 4 300 000 000 F en 1990 à 8 800 000 000 F en 1995.
En 1995, les intérêts (475 000 000 F) et les amortissements (189 000 000 F) de ces dettes représentent 664 000 000 F.
2.2 Le plan de redressement des finances publiques
En 1995, il faudra donc payer 664 000 000 F d'intérêts et d'amor-tissements aux banques qui ont prêté de l'argent à l'Etat de Genève.
C'est un montant considérable: il est plus élevé que la totalité des prestations financières versées aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux chômeurs (432 000 000 F).
Politiquement cette situation est malsaine: un Etat financièrement faible est un Etat socialement faible.
C'est pourquoi le Conseil d'Etat a élaboré, au cours de la précédente législature, un plan de redressement des finances publiques à moyen terme, visant le retour à l'équilibre budgétaire en 1997 (avant amortissements) et en 2000 (après amortissements).
Ce plan de redressement des finances - largement discuté au sein du Parlement cantonal - a été au centre de la campagne électorale de l'automne 1993, qui a abouti à l'élection du Grand Conseil et du Conseil d'Etat actuels. En outre, la population a confirmé son soutien politique à ce plan de redressement par son vote du 28 février 1994 en choisissant le contreprojet à l'initiative du comité «Halte aux déficits».
Enfin, la population a clairement indiqué qu'elle n'attendait pas que le redressement des finances se fasse par une hausse d'impôts: bien qu'on ne puisse pas dire que les Genevois ont un réflexe anti-impôts - ils ont accepté les hausses d'impôts pour la Confédération (TVA) et pour l'aide à domicile -, ils ont cependant systématiquement refusé depuis 24 mois toute hausse, même minime, des impôts cantonaux ou communaux, montrant par là qu'ils voulaient que l'Etat fasse d'abord des économies.
3. Comment rendre le système de santé moins coûteux?
3.1 La politique de santé
Par rapport aux autres fonctions de l'Etat, le système de santé bénéficie d'une sorte de privilège: il doit recevoir les moyens nécessaires pour que les soins de base soient assurés pour tous.
Une fois les soins de base assurés pour tous, le système de santé doit être traité, dans le cadre général du redressement des finances cantonales, comme tous les autres secteurs, ce d'autant plus que tout le monde se plaint des hausses des coûts de la santé et des cotisations de l'assurance-maladie obligatoire.
Dans cette perspective, ces 5 dernières années, l'action politique s'est, pour l'essentiel, articulée autour de 3 axes:
a) développer la promotion de la santé et la prévention des maladies et des accidents plutôt que continuer à investir dans des équipements coûteux, à l'utilité marginale;
b) développer l'aide et les soins à domicile, moins coûteux que l'hospitalisation;
c) organiser de façon plus rationnelle et plus économique les hôpitaux publics.
3.2 La politique de prévention
A Genève comme en Suisse, plus de 80% des décès des adultes de moins de 65 ans sont causés par:
a) le cancer;
b) les maladies cardio-vasculaires;
c) les maladies pulmonaires;
d) les cirrhoses alcooliques;
e) les accidents de la route et du travail;
f) les suicides.
Ces causes de décès prématurés sont précisément celles pour lesquelles la médecine peut le moins et la prévention peut le plus: en effet le tabac, l'alcool, l'alimentation et la sédentarité jouent un rôle essentiel dans ces décès prématurés.
Considérant qu'il n'est plus acceptable d'engager des moyens de plus en plus coûteux pour soigner les maladies si l'on n'engage pas, en amont, des actions importantes permettant d'éviter d'être malade, le Conseil d'Etat a mis en oeuvre d'importants moyens (10 millions en 5 ans) pour rattraper le retard pris par la prévention et l'amener au même niveau de qualité et d'efficacité que le système de soins en centrant l'action sur:
a) la lutte contre l'alcoolisme (programme: «Bourré de talents, pas d'alcool!»);
b) la lutte contre le tabagisme (programme: «J'embrasse les non-fumeurs!»);
c) la lutte contre le SIDA;
d) la promotion d'une alimentation saine (programme: «Fourchette verte»).
3.3 L'aide à domicile
A la suite du vote populaire du 16 février 1992, une action déterminée a été engagée pour développer l'aide et les soins à domicile - dont le coût moyen par jour se situe à 160 F - plutôt que les soins hospitaliers - dont le coût moyen par jour se situe à 1 417 F (1993).
Financièrement, l'effet de transfert de l'hôpital à l'aide à domicile commence à être visible: 18 mois après l'entrée en vigueur de la loi, les subventions aux hôpitaux sont réduites de 8 300 000 F (objectif: 15 millions en 48 mois).
3.4 La gestion des hôpitaux publics
Afin d'améliorer la gestion des hôpitaux publics, 4 grandes mesures ont été prises:
a) la collaboration Vaud-Genève, qui a pour but d'obtenir une meilleure coordination et complémentarité des activités, des équipements et des enseignements du CHUV et de l'Hôpital cantonal, qui ont passé ainsi d'une mentalité de forteresse à une mentalité de réseau;
b) la fusion des directions et des administrations des institutions universitaires de psychiatrie (Bel-Air) et des institutions universitaires de gériatrie (Mon-Idée), qui a permis de regrouper les services administratifs (finances, personnel, informatique, économat) et les services logistiques (hôtellerie, entretien, technique) des deux institutions;
c) le programme Caducée, qui, géré paritairement, a permis au personnel de formuler 2 500 propositions d'économies, de rationalisation et d'amélioration du fonctionnement de l'Hôpital cantonal. Le rapport final a été adopté par la commission administrative en novembre 1993. Les conclusions sont mises en oeuvre par la nouvelle direction générale. Un comité du suivi, présidé par un membre élu du personnel, a été mis en place;
d) une politique de diminution du nombre de lits, du nombre de journées d'hospitalisation et du nombre de collaborateurs, qui ont évolué de la manière suivante ces 5 dernières années:
- de 2 970 à 2 710 lits, soit une diminution de 260 lits (-8,75%);
- de 922 193 à 861 330 journées d'hospitalisation, soit une diminution de 60 863 journées (-6,59%);
- de 8 400 à 7 985 postes, soit une diminution de 415 postes (-4,94%).
Malgré de vives polémiques et des résistances farouches, cette politique de réduction des coûts a été conduite avec détermination et sans porter atteinte à la qualité des soins: dans le même temps, le ratio postes/lits a passé en effet de 2,82 à 2,94 postes par lit.
4. Le projet de budget 1995 et la politique de la santé
4.1 Le projet de budget 1995
Ces dernières années, des efforts d'économies considérables ont été accomplis par l'Etat et ses collaborateurs:
a) les effectis ont été diminués, chaque année, de 1% à 2%. sans licenciement, par le jeu des départs naturels et des retraites anticipées;
b) les rémunérations des collaborateurs - dont les salaires n'ont plus été indexés complètement au coût de la vie - n'ont plus suivi, systématiquement, chaque année, les mécanismes légaux prévus par la grille des salaires;
c) les dépenses générales de l'Etat ont diminué;
d) de nombreuses mesures de rationalisation et d'économies ont été prises.
Malgré ces efforts, le premier projet de budget 1995 présenté par les différents départements au Conseil d'Etat se soldait par un déficit de750 millions alors que la cible du plan de redressement est, pour 1995, de361 millions.
Le Conseil d'Etat a consacré plusieurs séances d'une journée à l'élaboration du projet de budget 1995. Tout en maintenant ses priorités sociales (prestations financières aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux chômeurs), il a pris de nombreuses mesures d'économies, qui sont présentées dans l'exposé des motifs du projet de budget 1995. Tous les départements sont touchés comme d'ailleurs les grandes régies publiques, les communes ou les institutions privées subventionnées.
C'est ainsi que le Conseil d'Etat a dû aborder, dans le cadre de la préparation du projet de budget 1995, la question de la diminution des prestations, qui s'est traduite concrètement, dans le domaine hospitalier, par la décision de fermeture de la clinique de Montana.
4.2 Les 3 priorités de la politique de la santé
Lorsque le Conseil d'Etat doit ramener le déficit prévu en 1995 de750 millions - montant total annoncé par les divers départements - à361 millions - objectif assigné par le plan de redressement des finances -, il faut être clair sur les tâches prioritaires de l'Etat.
Dans le domaine de la santé, une fois les soins de base assurés pour tous, il y a 3 priorités:
a) maintenir l'effort engagé dans le domaine de la prévention: à long terme, c'est la seule manière de maîtriser durablement les coûts de la santé;
b) développer l'aide à domicile comme l'a voulu la population: dans de nombreux cas, les soins à domicile sont moins coûteux que les soins hospitaliers;
c) maintenir la qualité des soins, de l'enseignement et de la recherche dans les hôpitaux publics: non seulement la population entend être bien soignée, mais la faculté de médecine - dont les professeurs forment l'encadrement de l'Hôpital - dit rester compétitive par rapport aux autres facultés, européennes ou américaines. Pour cela, il faut veiller à ce que l'Hôpital - qui commence à être géré de façon plus dynamique et plus imaginative - ait les dotations nécessaires en personnel et en équipement. Le Grand Conseil l'a bien compris: il a récemment voté 69 millions pour le renouvellement des équipements hospitaliers (1994).
Dans cette perspective, la clinique de Montana n'est malheureusement pas un équipement prioritaire, même si la qualité de sa direction et de son personnel n'est pas en cause.
5. La fermeture de la clinique genevoise de Montana
5.1 Les motifs de la fermeture
Les motifs qui ont conduit le Conseil d'Etat à annoncer la fermeture de la clinique genevoise de Montana sont, pour l'essentiel, au nombre de 10:
a) ouverte en 1903 pour traiter les personnes indigentes atteintes de tuberculose, la clinique n'a plus eu par la suite une vocation et une identité clairement définies: elle accueille actuellement environ 900 pa-tients par an pour des séjours hospitaliers de 24 jours (11 jours à l'Hôpital cantonal) et des convalescents, ce qui provoque périodiquement des discussions avec des caisses-maladie qui considèrent que ces séjours ne sont pas à leur charge.
b) le taux d'occupation moyen est en baisse régulière depuis 10 ans, passant de 79% à 72% en 1993;
c) dans le cadre général de cette baisse régulière, le taux d'occupation de la clinique est variable, passant de 90% en été à 50% en hiver, l'effectif du personnel demeurant le même en raison des exigences du statut de la fonction publique;
d) malgré de nombreuses études et essais, une nouvelle définition de la clinique genevoise de Montana ne s'est pas concrétisée ces 10 dernières années en raison du fait que les prestations nouvelles, envisagées ou offertes, faisaient double emploi avec celles qui existaient à Genève.;
e) selon l'expertise du professeur P. Gilliand sur le système hospitalier genevois, remise au Conseil d'Etat en juin 1994, «la clinique de Montana est un établissement vétuste, à 200 km de Genève. Si l'établissement est maintenu, le nombre de lits doit être diminué et une coopération instaurée avec des établissements voisins. Sa vocation pourrait être alors la convalescence etl la promotion de la santé, dans une perspective de réadaptation et de lutte anti-alcoolique-drogue-dépression».
f) à supposer que cette définition nouvelle de la clinique de Montana ne fasse pas double emploi avec les équipements et les activités existant dans le canton, elle nécessiterait des investissements importants - les cantons de Berne et de Lucerne ont effectué il y a quelques années des investissements de 22 et 27 millions pour leurs cliniques respectives - que l'Etat de Genève n'est pas en mesure d'engager;
g) les équipements existant dans le canton sont largement suffisants: avec 2 500 lits et 8 500 collaborateurs, l'Hôpital cantonal, l'Hôpital de Beau-Séjour, l'Hôpital de gériatrie, le CESCO, l'Hôpital de Loëx, la clinique de Joli-Mont, le Petit Beaulieu et les institutions universitaires de psychiatrie accueillent 50 000 patients par année (environ 900 000 unités). Ils peuvent recevoir sans difficultés les 900 patients de la clinique genevoise de Montana;
h) considérant l'équipement actuel du canton, selon les instances médicales hospitalières consultées, il n'y a pas de nécessités médicales ou soignantes à maintenir une clinique telle que celle de Montana, ce qu'a d'ailleurs confirmé une prise de position ultérieure de l'Association des médecins du canton de Genève;
i) selon la liste établie par le Concordat suisse des caisses-maladie, il existe plus de 100 établissements analogues en Suisse, qui est suréquipée dans ce domaine;
j) enfin, la clinique genevoise de Montana est déjà partiellement désaffectée: l'exploitation d'un bâtiment, le préventorium, a été arrêtée il y a déjà 30 ans, puis reconvertie en «classes de neige» avant d'être définitivement déclarée insalubre par l'Etat du Valais, entraînant sa fermeture définitive en 1989.
5.2 L'annonce de la fermeture
L'annonce de la fermeture de la clinique genevoise de Montana pour le 30 novembre 1994 ne touche pas concrètement les patients qui y séjournent actuellement: la durée est en effet, en moyenne, de 24 jours.
Elle entraîne, par contre, des conséquences professionnelles et personnelles difficiles pour la direction et le personnel qui l'ont fidèlement servie. Sachant par expérience que les décisions de ce type font toujours l'objet de rumeurs et souhaitant éviter que les collaborateurs l'apprennent par des indiscrétions ou par la presse, le Conseil d'Etat a chargé le chef du département de l'action sociale et de la santé de l'annoncer personnellement aux collaborateurs de la clinique genevoise de Montana, ce qui a été fait le15 juillet 1994.
Les autorités valaisannes, cantonales et communales, la commission administrative de Montana, les groupes parlementaires, la commission de la santé, les syndicats et la presse ont été informés le même jour.
5.3 Le plan social
Le plan social présenté par le Conseil d'Etat aux 84 collaborateurs de la clinique genevoise de Montana prévoit les dispositions suivantes:
a) tous les fonctionnaires qui le désirent sont réengagés par les hôpitaux publics genevois (qui engagent chaque année 500 collaborateurs au moins);
b) ceux qui ne souhaitent pas bénéficier de cette possibilité recevront, conformément au statut en vigueur, des indemnités calculées de la manière suivante:
- 6 fois le dernier traitement mensuel;
- 20% du dernier traitement mensuel par année passée au service de l'établissement.
Enfin, les contacts nécessaires ont été pris avec les autorités valaisannes pour que les collaborateurs de la clinique genevoise de Montana bénéficient d'une priorité à l'engagement dans les hôpitaux publics valaisans, qui continuent à recourir actuellement à des collaborateurs étrangers.
6. Le projet de loi
La clinique genevoise de Montana n'a pas de personnalité juridique propre: techniquement, elle est une subdivision de l'établissement médical Joli-Mont/Montana, mis en place par la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (K 2 1).
Le projet de loi soumis au Grand Conseil se présente donc comme une loi:
a) décidant la fermeture de la clinique genevoise de Montana (article 1 du projet).
b) modifiant la loi sur les établissements publics médicaux (article 3 du projet).
A la suite de la fermeture de la clinique genevoise de Montana (article 1 du projet), l'établissement public médical Joli-Mont/Montana est amputé de l'une des deux branches qui le constituent. Il subsiste donc en tant que tel et il est doté de la personnalité jurdique, conformément à l'article 5 de la loi sur les établissements publics médicaux (K 2 1). Dès lors, il continue à être juridiquement responsable des droits et obligations encourus dans le cadre de l'exploitation de la clinique genevoise de Montana jusqu'à sa fermeture (article 2, alinéa 3 du projet).
En ce qui concerne les conséquences patrimoniales de la fermeture de la clinique genevoise de Montana, les actifs de la clinique sont acquis à l'établissement public médical, dont les biens restent séparés de ceux de l'Etat, conformément à l'article 173, aliné 2 de la constitution (article 2, alinéa 1 du projet).
Quant aux terrains et aux bâtiments, ils sont, pour l'essentiel, propriété de l'Etat de genève. L'établissement public médical a toutefois certains droits sur le bâtiment du personnel pour avoir participé financièrement à sa transformation. C'est pourquoi le projet de loi autorise le Conseil d'Etat, respectivement l'établissement public médical Joli-Mont, à aliéner les immeubles dont ils sont propriétaires, en application de l'article 80A de la constitution (article 2, alinéa 2 du projet).
Enfin, le projet de loi soumis au Grand Conseil apporte différentes modifications rédactionnelles à la loi sur les établissements publics médicaux (K 2 1), supprimant les références à la clinique genevoise de Montana (ar-ticle 3 du projet).
7. Conclusion
Le Conseil d'Etat, élu sur la base du programme de redressement des finances du canton, a consacré de nombreuses séances à l'élaboration du projet de budget 1995.
Tout en maintenant ses priorités sociales et en augmentant de façon importante les prestations financières aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux chômeurs, il a dû prendre de nombreuses mesures d'économies, qui sont présentées dans l'exposé des motifs du projet de budget 1995. Tous les départements sont touchés comme d'ailleurs les grandes régies publiques, les communes ou les institutions privées subventionnées.
Dans le domaine de la santé, la politique suivie par le Conseil d'Etat a été constante: une fois les soins de base assurés pour tous, le système de santé doit être traité, dans le cadre général du redressement des finances, comme tous les autres secteurs, ce d'autant plus que tout le monde se plaint des hausses des coûts de la santé et de l'assurance-maladie.
Dans cette perspective, le Conseil d'Etat a développé depuis 5 ans une action politique s'articulant autour de 3 axes:
a) développer la prévention qui est, à long terme, la seule manière de maîtriser durablement les coûts de la santé;
b) développer l'aide à domicile qui est, dans de nombreux cas, moins coûteuse que l'hospitalisation;
c) conduire une politique de diminution du nombre de lits (-8,75% en5 ans), du nombre de journées d'hospitalisation (-6,59% en 5 ans) et du nombre de collaborateurs (-4,94% en 5 ans) sans porter atteinte à la qualité des soins (le ratio postes/lits a passé de 2,85 à 2,94).
Aujourd'hui, cette politique commence à atteindre ses limites. C'est pourquoi le Conseil d'Etat a dû aborder, dans le cadre de la préparation du projet de budget 1995, la question de la diminution des prestations, qui s'est traduite concrètement, dans le domaine hospitalier, par l'annonce de la fermeture de la clinique genevoise de Montana le 30 novembre 1994.
L'annonce de cette fermeture - qui a suscité une vive émotion - s'inscrit dans le cadre plus général de la politique de la santé et du redressement des finances de l'Etat. Si l'on dépasse l'attachement à une institution centenaire et les polémiques partisanes, elle est justifiée par de nombreux motifs, exposés ci-dessus au chiffre 5.1.
C'est pourquoi le Conseil d'Etat vous prie de bien vouloir, Mesdames et Messieurs les députés, accepter ce projet de loi concrétisant juridiquement une décision impopulaire, mais nécessaire.
Déclaration du Conseil d'Etat
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Au cours de cette session, le Grand Conseil débattra du projet de budget 1995 et de plusieurs mesures d'économies qui s'inscrivent dans le cadre du plan de redressement des finances publiques.
Le Conseil d'Etat a consacré de nombreuses séances à l'élaboration du projet de budget 1995. Tout en maintenant ses priorités sociales et en augmentant de façon importante les prestations financières aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux chômeurs, il a dû prendre de nombreuses mesures d'économies. Tous les départements sont touchés, comme d'ailleurs les grandes régies publiques, les communes ou les institutions privées subventionnées.
Dans le domaine de la santé, la politique suivie par le Conseil d'Etat a été constante : une fois les soins de base assurés pour tous, le système de santé doit être traité, dans le cadre général du redressement des finances, comme tous les autres secteurs, ce d'autant plus que tout le monde se plaint des hausses des coûts de la santé et de l'assurance-maladie.
Dans cette perspective, le Conseil d'Etat a développé depuis cinq ans une action politique s'articulant autour de trois axes :
a) développer la prévention qui est, à long terme, la seule manière de maîtriser durablement les coûts de la santé;
b) développer l'aide à domicile qui est, dans de nombreux cas, moins coûteuse que l'hospitalisation;
c) conduire une politique de diminution du nombre de lits (- 8,75 % en cinq ans), du nombre de journées d'hospitalisation (- 6,59 % en cinq ans) et du nombre de collaborateurs (- 4,94 % en cinq ans) sans porter atteinte à la qualité des soins (le ratio postes/lits est même passé de 2,85 à 2,94).
En termes financiers et budgétaires, le Conseil d'Etat a donc fait des choix clairs dans le domaine de la santé et des hôpitaux.
D'abord, il a maintenu l'effort engagé dans le domaine de la prévention.
Ensuite, il a poursuivi le développement de l'aide à domicile, conformément au vote populaire.
Enfin, il a maintenu la qualité des soins, de l'enseignement et de la recherche dans les hôpitaux publics : non seulement la population entend être bien soignée, mais la faculté de médecine - dont les professeurs forment l'encadrement de l'hôpital - dit rester compétitive par rapport aux autres facultés, européennes ou américaines. Pour cela, il faut veiller à ce que l'hôpital - qui est géré de façon plus dynamique et plus imaginative - ait les dotations nécessaires en personnel et en équipement. Le Grand Conseil l'a bien compris : il a récemment voté 69 millions pour le renouvellement des équipements hospitaliers (1994).
Dans cette perspective, considérant l'équipement actuel du canton, la clinique de Montana n'est malheureusement pas un équipement prioritaire, même si la qualité de sa direction et de son personnel n'est pas en cause : selon les instances médicales hospitalières consultées, il n'y a pas, il n'y a plus de nécessités médicales ou soignantes à maintenir une clinique telle que celle de Montana, ce qu'a d'ailleurs confirmé une prise de position des instances dirigeantes de l'Association des médecins du canton de Genève. (Contestation.)
L'annonce de la fermeture de la clinique de Montana ne touche pas concrètement les patients qui y séjournent actuellement : la durée de séjour est, en effet, en moyenne de vingt-quatre jours. (Sifflets à la tribune.)
Elle entraîne, par contre, des conséquences professionnelles et personnelles difficiles pour la direction et le personnel qui l'ont fidèlement servie. Sachant par expérience que les décisions de ce type font toujours l'objet de rumeurs et souhaitant éviter que les collaborateurs l'apprennent par des indiscrétions ou par la presse, le Conseil d'Etat a chargé le chef du département de l'action sociale et de la santé de l'annoncer personnellement aux collaborateurs de la clinique de Montana, ce qui a été fait le 15 juillet 1994.
Les autorités valaisannes, cantonales et communales, la commission administrative de Montana, les groupes parlementaires, la commission de la santé, les syndicats et la presse ont été informés le même jour.
Un plan social, correspondant aux exigences légales et au statut de la fonction publique genevoise, a été présenté aux quatre-vingt-quatre collaborateurs : tous ceux qui le souhaitent seront réengagés dans les hôpitaux genevois.
Enfin, les contacts nécessaires ont été pris avec les autorités valaisannes pour que les collaborateurs de la clinique de Montana bénéficient d'une priorité à l'engagement dans les hôpitaux publics valaisans.
Après avoir pris en compte tous les éléments d'appréciation, le Conseil d'Etat, unanime, s'est déterminé à demander, dans le cadre de la préparation du projet de budget 1995, la fermeture de la clinique de Montana.
L'annonce de cette décision a suscité certaines émotions développées par une large politisation et a provoqué des recours auprès du Tribunal fédéral.
Ce soir, c'est au Grand Conseil d'en débattre. Une décision doit être prise. Elle est difficile, elle est impopulaire dans la mesure où l'on n'en mesure pas toujours la portée limitée, mais elle est nécessaire.
Divers milieux ont annoncé qu'ils lanceront un référendum contre cette décision. Ils ont demandé et obtenu d'ores et déjà l'autorisation de récolter les signatures. Ce référendum aboutira certainement. C'est donc finalement le peuple qui aura le dernier mot, cette année encore, le 4 décembre 1994.
Il y a des choix à faire et des priorités à dégager pour pratiquer une politique cohérente. (Applaudissements de l'Entente.)
Le président. Je prie les interpellateurs de bien vouloir choisir le moment de leur intervention au cours du débat. Je rappelle, pour la sérénité des débats, que les manifestations à la tribune ne sont pas autorisées et qu'elles risquent d'entraîner la fermeture de la tribune.
Nous allons maintenant procéder à l'examen du projet de loi, selon notre nouveau règlement, en procédure de préconsultation, c'est-à-dire avec un intervenant par groupe pour une durée maximale de cinq minutes, le Conseil d'Etat répondant avec un intervenant en dix minutes.
Préconsultation
M. Gilles Godinat (AdG). L'importance de la décision que nous devons prendre sur l'avenir de la clinique de Montana n'échappe à personne. Nous allons engager notre responsabilité et notre crédibilité face à la population genevoise par le sort que nous réservons à ce projet de loi selon la qualité des arguments des uns et des autres sur trois enjeux fondamentaux :
1) L'identité et la spécificité de la clinique de Montana.
2) Les conditions de la mise en place de la planification hospitalière.
3) Le respect des débats et des procédures démocratiques.
S'agissant du premier enjeu, l'identité de Montana est principalement liée à son histoire, d'une part, et au type de prestations offertes aujourd'hui dans le dispositif de soins cantonal, d'autre part. Je serai bref sur son histoire. Trois dates : sa naissance au début du siècle, dans un grand élan de solidarité populaire envers les patients les plus déshérités souffrant à l'époque d'une maladie souvent mortelle, la tuberculose. Trois quarts de siècle de services qui restent gravés dans la mémoire collective de ce canton : le sanatorium genevois.
En 1973, c'est le rattachement à l'hôpital cantonal. La clinique devient alors une unité hospitalière intégrée à la division de médecine interne et devient un centre de traitement polyvalent. Enfin, en 1985, elle est administrativement rattachée à Joli-Mont, maison de convalescence, sous forme juridique d'un seul établissement. Depuis plus de dix ans, la clinique de Montana offre des soins médicaux qui ont évolué : des soins purement pulmonaires à des prestations de traitement postopératoires divers de type chimiothérapeutique, physiothérapeutique, de réadaptation, de réhabilitation, de prévention et d'éducation pour la santé.
Une des caractéristiques de Montana réside dans l'approche également psychosociale des patients dont la plupart vivent dans un environnement sociofamilial fragile. Enfin, le cadre offert par Montana favorise évidemment l'évolution bénéfique des suites de traitement. Tous ces éléments pourront être développés avec des arguments statistiques sur le type de diagnostic, la provenance des patients et leur évolution.
En résumé, l'équipe médicale et soignante possède un niveau de formation reconnu au plan universitaire et offre un service indispensable à une clientèle précise dans la situation actuelle.
Deuxième argument. En matière de planification hospitalière, nous avons besoin - et cela est prévu par le département pour l'année à venir - d'un large débat sur un ensemble de données fiables pour élaborer une politique basée sur des choix cohérents définissant des niveaux de priorité sur le plan hospitalier, ambulatoire et dans le domaine de la prévention. Toute précipitation dans ce domaine ne peut être que préjudiciable pour l'ensemble de la population.
Enfin, le respect des voies démocratiques est une des conditions indispensables pour la mise en place de la politique de la santé dans le canton qui tienne compte des divers arguments et sensibilités sans privilégier la politique du fait accompli.
Or, sur ces trois enjeux essentiels, le coup de force du Conseil d'Etat cet été et le type d'arguments avancés pour la fermeture sont pour nous inacceptables.
D'abord, la liste des motifs en vrac présentés par le Conseil d'Etat le 25 août est contestable point par point. L'identité est mal définie. Il y a évidemment un décalage entre la définition administrative et l'activité médicale réelle sur le terrain. Le problème ne se situe pas au niveau de la clinique, mais au niveau de la loi. Quant au financement par les assurances-maladie, 95% des traitements sont actuellement pris en charge par les caisses maladie, malgré le flou législatif. Depuis plus de dix ans, le créneau proposé par le professeur Gilliand dans le rapport dont nous venons de recevoir un résumé existe dans les faits et est pratiqué dans cette clinique.
Deuxièmement : le faible taux d'occupation. Il faut tenir compte de l'augmentation du nombre de patients qui a doublé de 1980 à 1983. La durée de séjour a diminué de moitié. Le rapport entre le nombre de postes et le nombre de lits est le plus bas des EPM, 0,9 contre 3,55 à l'hôpital cantonal.
Troisièmement : c'est une clinique vétuste partiellement désaffectée. Certains bâtiments ne sont plus exploités depuis la reconversion de Montana en 1973, cela est vrai. On a un centre de traitements et de réadaptation. Mais toutes celles et ceux qui ont bénéficié de soins ces dernières années à Montana et celles et ceux qui ont pu visiter les lieux ont constaté que la clinique a été rénovée, que la toiture est neuve, que les bâtiments sont en bon état, qu'une cuisine ultra-moderne vient d'être inaugurée, que le labo est neuf, ainsi que la radiologie, que deux salons ont entièrement été refaits récemment et que les chambres sont neuves. Je ne veux pas entrer dans les détails. Bref, c'est un établissement en parfait état. Evidemment, ce n'est pas une clinique de luxe, mais elle reste accessible à tous les porte-monnaie, malgré la distance de 200 kilomètres, alors que d'autres établissements plus proches ne le sont pas.
Quatrièmement : poursuite des activités nécessitant 20 millions d'investissement. C'est faux ! Le docteur Frey, président de Quadrimède, représentant les quatre médecins-chefs des cliniques de Montana, conteste la nécessité de tels investissements. Je cite une lettre adressée au Conseil d'Etat et à toute la Suisse, y compris à la VESKA qui regroupe tous les hôpitaux suisses : «Dans l'état actuel des choses, la clinique nous paraît parfaitement exploitable.». Le fait que d'autres cantons suisses aient consenti d'importants investissements pour leur clinique d'altitude était lié à la réfection complète de certains bâtiments. Il a fallu démolir pour reconstruire. Ce n'est pas du tout le cas de la clinique de Montana.
D'autre part, mettre en concurrence à Genève le plan d'investissement de notre canton concernant la maternité, d'une part, la pédiatrie, d'autre part, et les investissements à Montana est un chantage absurde qui ne repose, à ma connaissance, sur aucune étude.
Cinquièmement : il y aurait cent établissements de ce type en Suisse. C'est faux ! Il y a cent maisons de cures et de convalescence en Suisse, c'est vrai, mais elles n'ont qu'une présence médicale occasionnelle, vacataire; elles n'ont pas d'équipe soignante constituée. C'est sans comparaison avec les vingt cliniques d'altitude, en moyenne une par canton, qui existent au niveau suisse et la commission ad hoc de la VESKA définit ces établissements comme suit : commission de cliniques spécialisées pour maladies pulmonaires, allergiques, médecine interne et réadaptation.
Sixièmement : l'argument économique, enfin : replacer les patients de Montana dans les EPM reviendrait beaucoup plus cher. Rappelons que le coût de la journée est le plus bas avec un taux de subventionnement qui est également le plus bas de tous les EPM. Garder un établissement bon marché qui permet de raccourcir les séjours dans les EPM à des coûts de journée deux à quatre fois moins cher est une mesure de bon sens économique.
En conclusion, sans revenir sur la forme de la décision, à notre avis prise à la hâte au début de l'été, sans respecter les voies démocratiques normales, le Conseil d'Etat - à nos yeux, c'est cela le plus grave - nie les atouts réels présentés par Montana. Les prestations de qualité reconnues par tous - la référence au courrier que vous avez reçu en témoigne - un personnel dynamique, motivé, un environnement irremplaçable et des soins bon marché qui répondent à un besoin réel. Ces atouts doivent faire l'objet d'un examen approfondi, sérieux, effectué dans des conditions sereines.
Je vous en prie, Mesdames et Messieurs les députés, ne jetez pas Montana à la poubelle, les yeux fermés, sous le faux prétexte du déficit budgétaire. Acceptez l'examen de cet important dossier sans mettre la charrue avant les boeufs. Ouvrez les yeux sur ce que vous offre aujourd'hui la clinique de Montana et vous aurez alors le sentiment d'avoir rempli votre devoir sans avoir à rougir devant la population genevoise ! (Applaudissements à la tribune et des partis de gauche.)
M. Dominique Hausser (S). Je regretterai longtemps de ne pas avoir vu la tête des fonctionnaires du département de l'action sociale et de la santé lorsque, au lendemain de l'une des «nombreuses» séances du Conseil d'Etat au sujet du budget, M. Guy-Olivier Segond leur a annoncé la fermeture de la clinique genevoise de Montana. Cette décision a été prise par un petit cercle fermé, sans réflexion, sous prétexte de faire des économies.
Permettez-moi, bien qu'«analphabète en matière de santé publique» - c'est M. Guy-Olivier Segond qui l'a déclaré lors de sa conférence de presse, paraît-il explicative sur cette décision - de faire quelques commentaires sur cette décision, ô combien hâtive et non démocratique !
Je ne reviendrai pas sur l'histoire de la clinique de Montana que M. Godinat a si bien rappelée tout à l'heure. En effet, lorsqu'on mène une véritable politique sanitaire, on est évidemment amené à se poser un certain nombre de questions qui ne relèvent pas en premier lieu de considérations «économico-financiéro-comptables». Parmi les nombreuses questions que le groupe socialiste a recensées, je me permettrai de citer uniquement les principales. Bien entendu, je n'y répondrai pas aujourd'hui, car elles nécessitent une réflexion sur la base de données objectives et scientifiques.
Tout d'abord, je voudrais aborder quelques questions en amont du problème qui nous occupe directement ce soir, mais qui sont nécessaires pour prendre une sage décision. Quelles sont les tâches et les activités indispensables pour maintenir ou améliorer la santé des membres d'une collectivité ? Offrir des prestations de qualité ou assurer des soins de base ne sont pas des réponses utilisables pour «opérationnaliser» les prestations.
Deuxième question importante : quels sont les établissements hospitaliers nécessaires pour traiter tel ou tel type de pathologie, tel ou tel problème de type «bio-médico-psychosocial» ?
Troisième grande question : quels sont les types de lits que l'on pourrait avoir ? Sont-ce des lits aigus, chroniques, médicaux, médico-sociaux, psycho, etc., et combien en faudra-t-il ?
J'aborde maintenant le fond du problème de la clinique genevoise de Montana. Quelles sont les alternatives, si elles existent, qui seront offertes aux patients qui bénéficient des prestations de la clinique de Montana ? Il s'agit de s'intéresser à la qualité de ces prestations, aux coûts des autres services et aux modalités de financement d'autres prestations éventuelles.
Jusqu'à maintenant, j'ai seulement évoqué les aspects purement sanitaires. Il reste, bien sûr, tout le débat sur le personnel qui est traité ici comme une machine dont on se débarrasse parce qu'on n'en aurait plus besoin, et je ne parle pas des irrégularités de procédure ! Une personne au chômage coûtera-t-elle vraiment moins cher à la collectivité ? Aura-t-elle toujours tout ce qui contribue à son bien-être dans cette même collectivité ?
En dernier lieu, reste la question du patrimoine immobilier que l'on balance par-dessus la jambe sans autre forme de procès. Une analyse fine sera également nécessaire pour évaluer le coût de l'opération.
Toutes ces questions que je viens d'énumérer, plus celles que je n'ai pas mentionnées ce soir, doivent être attentivement analysées et étudiées avant que nous, groupe socialiste, puissions éventuellement entrer en matière sur une restructuration des établissements hospitaliers genevois
M. Claude Blanc (PDC). L'annonce de la fermeture de Montana a suscité une grande émotion, non seulement dans le canton, mais encore dans la région concernée, ce qui est parfaitement légitime.
Il n'en reste pas moins que le Conseil d'Etat a le devoir - et le peuple le lui a rappelé en acceptant le plan financier quadriennal - d'arriver dans des délais précis à l'équilibre budgétaire. C'est là le fond de la question. Quoi qu'on puisse penser des aspects médico-sociaux soulevés par le problème de Montana - d'autres que moi l'ont déjà fait et pourront le faire mieux que moi parce qu'ils les connaissent mieux - je voudrais mettre particulièrement l'accent sur ce devoir du Conseil d'Etat de faire tout ce qui est en son pouvoir pour arriver au but que nous lui avons tous fixé, que le peuple lui a fixé, de rétablir les finances de l'Etat.
Montana, c'est tout de même une dépense nette de 5 millions par année, c'est, à entendre les spécialistes, un établissement qu'on utilise parce qu'on l'a et qui apporte évidemment beaucoup d'avantages à ceux qui peuvent en bénéficier. Mais il semble que Genève a la capacité d'accueillir les malades que nous envoyons à Montana. Contrairement à ce que disait M. Godinat, je ne crois pas que l'on puisse dire que, le lit d'hôpital coûtant beaucoup plus cher qu'un lit à la clinique de Montana, l'opération se révélera négative. En effet, les lits d'hôpitaux sont chers parce qu'un certain nombre d'entre eux ne sont pas occupés dans les différents établissements de Genève. Il s'agit de regrouper les établissements médicaux dans la mesure où nous disposons de place dans ces derniers.
C'est pourquoi le groupe démocrate-chrétien soutient la courageuse position du Conseil d'Etat, car cette décision est impopulaire. Il est bien possible que le peuple la rejette, mais, si c'est le cas, il prendra ses responsabilités. Le devoir du gouvernement est de maintenir le budget dans les limites prévues. En rajoutant les 5 millions de la clinique de Montana au déficit budgétaire prévu, nous dépasserions ce déficit, ce qui nous obligerait à procéder à d'autres coupes dans le budget.
Je vous rappelle - je vous l'avais déjà dit l'année dernière lors du vote du budget 1994 - que nous avions procédé en commission des finances au rabotage des crédits dans tous les secteurs de l'Etat de manière à diminuer le budget 1994. Dans la plupart des cas, nous étions arrivés à la limite de nos possibilités - j'avais dit d'une manière imagée que nous étions «à l'os» et qu'au prochain voyage il faudrait couper dans la chair. Malheureusement, couper dans la chair, ça fait mal, cela fera mal à beaucoup de gens parce que si nous ne pouvons pas obtenir la fermeture de Montana il faudra faire des coupes ailleurs et d'autres personnes... (L'orateur est interpellé par Mme Calmy-Rey.) C'est possible, mais c'était une image, Madame Calmy-Rey, vous m'avez bien compris ! (Rires.) D'autres personnes souffriront aussi des mesures qu'il faudra prendre, mais il faudra faire des choix.
Le Conseil d'Etat a commencé à en faire et le groupe démocrate-chrétien le soutiendra dans sa démarche.
Le président. I have the pleasure to great in our public stand our pressroom a strong delegation of the international conference of women presiding offices, invited in Geneva by Mme Gret Haller, présidente du Conseil national. (Applaudissements.)
M. Roger Beer (R). Je m'exprimerai en français ! (Rires.)
Le président. Je vous prie de m'excuser, j'essaye de m'exprimer dans la langue parlée par les gens qui écoutent !
Une voix. Merci pour les autres !
M. Roger Beer. C'était très bien !
Nous entamons ce soir un moment crucial de cette nouvelle législature. Effectivement, le président du Conseil d'Etat l'a rappelé, Claude Blanc l'a rappelé également, il ne faut pas oublier dans notre débat le mandat du peuple donné à notre parlement. Il a élu un gouvernement homogène sur la base d'un programme de redressement des finances cantonales. Lors de la dernière législature, nous avions déjà entamé ce processus - Claude Blanc a utilisé une image dont il est responsable - en faisant du toilettage et, finalement, nous nous sommes fait plaisir en prenant des mesures cosmétiques. Nous avons pu constater que cela n'était pas suffisant. Nous nous retrouvons aujourd'hui devant un projet qui va beaucoup plus loin, qui nous touche, qui nous bouleverse, parce qu'il s'agit de supprimer des emplois. Cela correspond au choix du Conseil d'Etat de faire des économies.
Evidemment, la fermeture de la clinique de Montana a suscité beaucoup de passions, un débat médiatique important cet été, et, maintenant, nous devons prendre une décision. Le groupe radical - j'imagine que cela ne vous étonnera pas trop - salue cette proposition et soutiendra ce projet de loi. Malgré les discussions passionnées, parfois douloureuses au sein de notre groupe et même au sein du parti... (La salle compatit avec ironie.) ...malgré les états d'âme d'anciens et de moins anciens collègues, le groupe radical entend soutenir ce projet et demande même, ô surprise, la discussion immédiate. (Un Ouaahh mi-étonné, mi-ironique accueille cette nouvelle.)
La situation financière de l'Etat de Genève dicte cette voie. Le déficit est très grave, le temps presse et nous ne pouvons plus repousser les choix ou les échéances. Mais, bien sûr, comme souvent dans cette enceinte, la raison s'oppose à l'irrationnel, au sentiment, et, malgré cette appréciation, il faut se souvenir du vote de la population contre toute hausse d'impôts. Je tiens à le souligner, le Genevois ne vote pas systématiquement contre les hausses d'impôts. En effet, il a accepté la TVA et les soins à domicile. Donc, par obligation démocratique, il faut qu'il se prononce sur la fermeture de Montana. On respectera ainsi jusqu'au bout la voix du peuple.
Cette discussion immédiate est demandée pour que le débat ait lieu. (Vive protestation.) Si elle est acceptée, ce débat aura lieu. Si le projet de loi est accepté, un référendum sera toujours possible. M. le président du Conseil d'Etat a expliqué que les possibilités existent déjà pour la récolte des signatures et qu'une date a déjà été choisie. Si le référendum aboutit, le peuple se prononcera et le débat aura lieu sur la place publique.
A ce moment-là, la population sera placée devant ses responsabilités en matière de politique hospitalière, en matière de politique de la santé. Alors, il faudra se déterminer pour savoir comment les dépenses de l'Etat devront être réparties. Il faudra choisir des priorités dans le domaine des soins ou de la convalescence, en ce qui concerne la pédiatrie, la maternité ou Montana.
Je le répète, le parti radical soutient ce projet et demande la discussion immédiate.
M. Andreas Saurer (Ve). Au nom du groupe écologiste, j'aimerais aborder deux sujets : le premier est la spécificité de Montana et le deuxième la politique hospitalière.
En ce qui concerne la spécificité de Montana, il est certainement vrai qu'un certain nombre de patients qui séjournent à Montana pourraient très bien être envoyés ailleurs. Mais certains - particulièrement ceux qui sont envoyés par des médecins privés - ne le peuvent pas, comme, par exemple, les toxicomanes et les alcooliques, pour lesquels la séparation d'avec le milieu genevois peut être extrêmement importante et pour lesquels nous n'avons pas d'autre alternative. Deuxième catégorie de personnes : celles qui souffrent de certains troubles psychiatriques et pour lesquelles l'hospitalisation est indispensable mais sans qu'elles aient besoin d'aller à Bel-Air. Comprenez-moi bien, le problème de Montana n'est pas quantitatif, et la solution n'est pas de trouver des lits de remplacement; le problème est qualitatif ! Par rapport à ces critères qualitatifs, Montana n'est pas seulement utile, mais sa spécificité est indiscutable.
En ce qui concerne la politique hospitalière, nous sommes entièrement convaincus que la situation budgétaire oblige probablement à couper dans le vif des prestations. Mais, comme le dit par ailleurs le résumé du rapport Gilliand, la politique hospitalière s'est caractérisée jusqu'à maintenant par des ajouts successifs sans aucune vue globale. Que proposez-vous maintenant ? La même politique, mais à l'envers. Vous supprimez Montana sans avoir une vue d'ensemble.
J'aimerais faire une petite remarque concernant l'intervention de M Blanc. Soyons honnêtes ! Le problème de Montana n'est pas lié au budget, mais à la politique hospitalière. Que le déficit de l'Etat soit de 5 millions en plus ou en moins, cela ne change rien au fond du problème ! Le fond, c'est la politique hospitalière.
La proposition de M. Segond, sous certains aspects, était peut-être excellente et salutaire. La population commence à comprendre que l'on ne peut pas continuer à comprimer les fonctionnaires, mais qu'il faut aussi diminuer les prestations et «attaquer» l'utilisateur pour arriver à un équilibre budgétaire. La gifle donnée par M. Segond a probablement été salutaire, mais pour qu'elle le reste il ne faut pas qu'elle se transforme en un pugilat. C'est là que se situe le problème. Si vous votez maintenant la discussion immédiate, que va-t-il se passer ? Un pugilat !
Il n'y a plus aucune concertation, il n'est pas possible d'avoir un débat serein et c'est pour cette raison que nous vous demandons instamment de bien vouloir renvoyer ce projet de loi en commission pour que nous puissions, sur la base du rapport Gilliand, développer, dans un esprit de concertation, une politique hospitalière globale, quitte à ce qu'il y ait une majorité et une minorité, quitte à ce qu'il faille couper certaines prestations. Dans ce cas-là, nous pourrons avoir un débat serein. Je vous le garantis, si le référendum est lancé, nous voterons en décembre et ce vote sera purement affectif - Montana, je t'aime, ou je ne t'aime pas - et ce ne sera absolument pas un débat serein.
Au nom de la sérénité et au nom de la concertation, je vous demande de bien vouloir renvoyer ce projet de loi en commission. Je le répète, ce problème n'est pas d'ordre financier, c'est un problème de politique hospitalière ! (Applaudissements.)
M. Nicolas Brunschwig (L). Maintenant que la discussion immédiate a été demandée par notre collègue Beer, il me semble important de revenir sur cet aspect et non sur le débat de fond sur lequel nous reviendrons sans doute dans quelques instants.
La démocratie, dans notre société, s'exprime principalement par trois moyens. Tout d'abord le débat public alimenté surtout par la presse. Deuxièmement, le débat parlementaire, soit en commission puis en séance plénière, soit en discussion immédiate, comme cela a été demandé à l'instant. Enfin, le vote populaire, par le biais du référendum.
En l'occurrence, et sur le sujet que nous abordons à l'instant, le débat public est alimenté depuis le début de l'été déjà de façon importante et le référendum a été annoncé. Il aboutira très certainement étant donné l'importance du sujet et la population se prononcera. C'est dire que le processus démocratique sera bien évidemment respecté et que le débat aura bien lieu.
Cela dit, la démocratie doit s'exercer sans pénaliser trop lourdement le bon fonctionnement de nos institutions et, en particulier, la gestion de l'Etat. Or, une décision définitive doit être connue le plus vite possible pour de multiples raisons : des raisons humaines, financières et d'avenir professionnel. De plus, les impératifs financiers - mentionnés par mon collègue Blanc, soit les objectifs du plan financier quadriennal qui ont été décidés par un vote de la population - imposent des choix qui soient connus au moment du vote du budget 1995.
C'est pour cela que le groupe libéral soutient la demande de discussion immédiate, afin que la démocratie fonctionne bien et rapidement... (Vive manifestation.) ...et que la gestion de notre canton se fasse dans les meilleures conditions possibles.
M. Christian Ferrazino (AdG). Je ne pensais pas entendre des propos aussi surréalistes. En effet, évoquer la démocratie pour nous demander de passer en discussion immédiate sur un projet qui n'a pas été abordé en commission, c'est quand même fort ! En tout cas, vous avez le don du paradoxe, Monsieur Brunschwig !
Puisque la discussion immédiate a été demandée, il convient maintenant de fixer les règles du jeu relatives à cette discussion. L'article 130 du règlement prévoit effectivement qu'à l'issue de la préconsultation le projet de loi est renvoyé en commission, à moins que le Grand Conseil ne décide de passer à la discussion immédiate. Demande a été faite et confirmée, donc nous sommes en discussion sur l'opportunité de cette discussion immédiate. C'est sur cette question, Monsieur le président, que je vais m'exprimer.
Monsieur Beer, vous avez déclaré que la raison s'opposait à l'irrationnel. C'est très bien d'avoir des principes, mais il est encore mieux de les appliquer ! Dans un cas comme celui-ci, le plus raisonnable - en fonction de tout ce qui vient d'être dit sur ce dossier de Montana, où l'information qui a été dispensée sur ce dossier, c'est le moins que l'on puisse dire, prête à confusion, voire à contradiction - est de procéder à l'écoute des personnes qui l'ont demandé. Le président a rappelé tout à l'heure les nombreuses demandes d'audition parvenues au bureau du Grand Conseil sur ce dossier : non seulement du personnel de la clinique, mais également des comités de défense et d'un certain nombre de médecins qui pourraient éclairer ce dossier.
C'est assez extraordinaire ! On voudrait que l'on se détermine sur un dossier sans même avoir connaissance de l'important rapport du professeur Gilliand. On a pris soin de le demander au président du département, mais on a voulu nous le cacher. En effet, on a prétexté que l'on ne pouvait pas nous le donner maintenant en raison d'un certain nombre de règles à respecter, ces règles étant que, lorsqu'on donne un rapport aux députés, il faut le donner également aux autres intéressés. On ne voit vraiment pas ce qui vous empêchait de nous le donner maintenant, plutôt qu'après-demain, soit après que nous nous fûmes déterminés sur ce projet de loi.
Pour ceux qui invoquent la raison, pour ceux qui invoquent le souci démocratique, Monsieur Brunschwig, la moindre des choses est d'avoir sous les yeux les éléments qui vous permettent de prendre une décision en connaissance de cause. En ce qui concerne la discussion immédiate, tout le monde sera d'accord pour que, d'une part, on renvoie ce dossier en commission afin de procéder aux auditions qui ont été déjà sollicitées et qui semblent s'imposer vu la nature du dossier et, d'autre part, pour qu'on ait connaissance de ce rapport de trois cents pages du professeur Gilliand. On nous a adressé un simple résumé de vingt pages, il y a à peine trois jours, qui n'explique pas grand-chose. Cela se comprend. Comment résumer trois cents pages en vingt pages ? Et surtout, comme certains députés l'ont dit tout à l'heure, ce dossier nécessite un examen approfondi et sérieux, mais dans le cadre d'une discussion sur la planification et la restructuration de l'ensemble des établissements hospitaliers médicaux. Alors, comment voulez-vous, aujourd'hui - je mets au défi la plupart des députés présents de savoir exactement de quoi il en retourne, et pour cause - que nous nous déterminions !
La moindre des choses, pour ceux qui avancent des arguments de démocratie et de raison, précisément, est de ne pas voter la discussion immédiate et d'appuyer le renvoi en commission où l'on pourra examiner ce dossier dans le cadre de l'ensemble de la restructuration et de la planification des établissements médicaux. (Applaudissements et bravos.)
Le président. Nous allons clore le débat de préconsultation et donner la parole au Conseil d'Etat. Après cela, le Grand Conseil se déterminera sur la discussion immédiate.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Tout à l'heure, le président du Conseil d'Etat vous a exposé, pour l'essentiel, les motifs qui ont conduit le gouvernement à proposer la fermeture de la clinique de Montana, tout en inscrivant cette décision dans le cadre plus général du redressement des finances de l'Etat et des priorités de la politique de santé de notre canton.
Monsieur Hausser, je vous ai traité d'analphabète en matière de santé publique, car j'ai lu, dans les comptes rendus de la conférence de presse à laquelle vous avez participé, une déclaration qui disait qu'il n'y avait pas de politique de santé dans le canton de Genève !
Vous avez de grandes compétences, dans ce domaine en particulier. Si vous avez, dans le débat politique, l'honnêteté scientifique nécessaire à votre activité professionnelle, vous reconnaîtrez que le Conseil d'Etat a suivi, ces cinq dernières années, une politique de santé dont les axes ont été rappelés à de nombreuses reprises et qui consistent, pour l'essentiel, en trois grandes actions que voici :
Tout d'abord, développer la promotion de la santé et la prévention des maladies et des accidents plutôt que continuer à investir dans des équipements coûteux dont l'utilité est marginale.
Ensuite, développer l'aide et les soins à domicile moins coûteux que l'hospitalisation dans de nombreux cas.
Enfin, organiser de façon plus rationnelle et plus économique la gestion des hôpitaux publics.
Plusieurs d'entre vous ont dit qu'il s'agissait d'un problème de planification hospitalière, que nous n'avions pas eu l'occasion d'en discuter : vous avez la mémoire courte ! Il y a trois ans, le Conseil d'Etat a publié et mis en consultation un rapport sur la planification hospitalière, rédigé par M. Louis Emmenegger, secrétaire général du département de la prévoyance et de la santé publique. Ce rapport comportait plus de trois cents pages. Il a été mis en consultation auprès d'une bonne centaine d'acteurs publics et privés du système de santé. Cela avait permis, d'ailleurs, d'inscrire la discussion sur l'aide à domicile dans un cadre plus général.
Sur la base de ce rapport, largement distribué et discuté, le Conseil d'Etat a donné suite par toute une série de mesures. Je ne vais pas en faire le bilan cela vous est rappelé dans l'exposé des motifs.
Pour améliorer la gestion des hôpitaux publics genevois, nous avons pris toute une série de mesures : nous avons lancé la collaboration entre les facultés de médecine de Lausanne et de Genève, entre le CHUV et l'hôpital cantonal. Nous avons fusionné les directions et les administrations des institutions universitaires de psychiatrie et de gériatrie, ce qui a permis de préserver au mieux les services de soins. Nous avons lancé, à l'hôpital cantonal, le programme Caducée qui a permis de recueillir plus de deux mille cinq cents suggestions auprès du personnel qui sont mises en oeuvre par la nouvelle direction et suivies par un comité dit «du suivi» présidé par un membre élu du personnel. Enfin, nous avons conduit une politique visant à diminuer le nombre de lits, le nombre de journées d'hospitalisation et le nombre des collaborateurs.
Dans le cadre du projet de budget 1995, ces choix ont été confirmés par le Conseil d'Etat, comme vous le constaterez tout à l'heure à l'occasion du débat sur le projet de budget 1995. Nous avons maintenu, dans le budget, l'effort engagé dans le domaine de la prévention. Nous avons maintenu le développement de l'aide à domicile, conformément, d'ailleurs, à la volonté populaire. Et nous avons maintenu la qualité de l'enseignement, de la recherche et des soins dans les hôpitaux publics genevois.
Mais, considérant l'équipement actuel du canton et devant faire des choix - parce qu'on ne peut pas avoir dix ou douze priorités - le Conseil d'Etat, sur la base des avis médicaux, a constaté que la clinique de Montana n'était malheureusement pas un équipement prioritaire, même si la qualité de sa direction et de son personnel n'était pas en cause. Comme vous l'a rappelé tout à l'heure le président du Conseil d'Etat, nous avons constaté, sur la base des avis autorisés de responsables médicaux de nos grandes institutions, qu'il n'y avait pas, qu'il n'y avait plus de nécessité médicale ou soignante à maintenir une clinique comme celle de Montana.
Ce sont des décisions difficiles à prendre : elles touchent des gens dans leur vie personnelle et professionnelle. Elles suscitent des discussions, des polémiques, des recours, mais c'est le rôle du gouvernement : dans la situation économique et budgétaire que nous connaissons, nous devons prendre des décisions respectant les lignes directrices de la politique de santé, mais s'inscrivant dans le plan de redressement des finances de notre canton, qui a été au centre des discussions politiques lors des élections de l'automne passé.
Il faut donc prendre cette décision. Vous déciderez tout à l'heure si vous la prenez en discussion immédiate ou si vous la prenez selon la procédure du renvoi en commission. Pour nous, il est nécessaire que le Conseil d'Etat obtienne le plus rapidement possible la décision définitive, d'abord parlementaire, ensuite populaire, puisqu'un référendum a été annoncé.
Dans les circonstances que nous connaissons, nous devons être clairs. Je le dis loyalement et j'espère que cela sera loyalement entendu : dans les choix que nous devons faire, l'hôpital cantonal est une priorité, mais, malheureusement, la clinique de Montana n'en est pas une ! (Vifs applaudissements de l'Entente.)
Le président. Le débat de préconsultation est terminé. A cette phase du débat, normalement, nous devrions appliquer l'article 130 de notre règlement qui dit en son alinéa 2 qu'à l'issue de la préconsultation le projet de loi est renvoyé en commission, à moins que le Grand Conseil ne décide de passer à la discussion immédiate. Selon mon point de vue, nous devrions voter si nous voulons aller en discussion immédiate.
La majorité des chefs de groupe ayant cependant explicitement demandé à pouvoir s'exprimer sur le point de la discussion immédiate, je vais donner la parole à un représentant par groupe sur ce point spécifique.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). La demande de discussion immédiate a donc été formulée et je voudrais maintenant exprimer la position de mon groupe sur ce sujet.
Je vous rappelle que les discussions immédiates sont finalement assez rarement demandées dans ce parlement, et c'est bien ainsi. En général, elles concernent des projets plutôt mineurs qui présentent un certain caractère d'urgence et qui ne suscitent pas trop d'opposition. Or, pour la première fois dans cette législature et depuis que nous discutons de nos difficultés budgétaires, on nous propose aujourd'hui de supprimer une prestation. M. Blanc a parlé de couper dans la chair ou dans l'os. Je crois qu'il s'est un peu «emmêlé les pinceaux». Moi, je dirais que cette fois on coupe dans la chair et qu'on ne coupe plus dans le gras, comme cela était le cas auparavant.
M. Claude Blanc. C'est très bien, merci, Madame !
Mme Claire Torracinta-Pache. C'est donc une décision extrêmement importante, qui pourrait très bien créer un précédent. Voilà que vous nous proposez, Mesdames et Messieurs de l'Entente, une discussion immédiate, c'est-à-dire de prendre une décision à la hussarde, ou en tout cas à la va-vite, en séance plénière, sur un sujet qui a suscité beaucoup de réactions dans l'opinion publique.
Cette position est à la fois dangereuse et aberrante. C'est aberrant, parce que, parallèlement et dans la même séance, nous allons renvoyer en commission des sujets d'importance bien moindre ne provoquant pas d'opposition. C'est dangereux, parce que je sais qu'il y a dans les rangs de la majorité des personnes qui voient des avantages au maintien de cette clinique de Montana. Il y a probablement également dans les rangs de la gauche des gens pour qui elle ne représente pas forcément et jusqu'à la fin des jours la panacée. Nous devons donc pouvoir en discuter plus sereinement en commission de la santé qu'ici en séance plénière, pour évaluer sérieusement les avantages ainsi que les inconvénients et les risques de cette fermeture et, bien entendu, discuter des incidences budgétaires de son éventuel maintien.
Personnellement, ma religion n'est pas faite. Je ne suis pas une spécialiste des problèmes de santé, mais je constate qu'à un argument en faveur de la fermeture de la clinique répond un autre argument pour son maintien, tout aussi convaincant. A cet égard, le document qui nous a été remis par les syndicats du personnel hospitalier est tout à fait exemplaire.
Alors, que faire ? A qui se référer ? Aux médecins ? Eux-mêmes sont partagés. Quant aux patients, ils nous bombardent de lettres de protestations. Et vous voudriez qu'on décide ici, nous seuls, sans entendre les différents milieux concernés et, comme l'a dit M. Ferrazino, sans connaître l'intégralité du fameux rapport Gilliand sur l'ensemble du système de santé du canton de Genève, dont l'extrait qu'on nous a fait parvenir est, finalement, assez peu substantiel et pas si catégorique que cela sur la clinique de Montana.
Quant à la lettre qui accompagne les extraits du rapport que nous avons reçu, j'y vois, Monsieur Segond, une contradiction ! Vous dites vouloir mettre le rapport en consultation dès octobre 1994, et ce jusqu'à février 1995. Or, avant même le début de cette consultation, vous prenez la décision de la fermeture de Montana avec vos collègues du Conseil d'Etat en vous référant justement à ce rapport.
Enfin, en renonçant à cette discussion immédiate, vous rassurerez la population inquiète de constater que l'on peut prendre de telles décisions si rapidement. Une majorité de ce parlement pourrait tenter d'appliquer la même procédure pour des sujets plus importants à l'avenir. C'est pourquoi je vous demande instamment de refuser la discussion immédiate et de renvoyer ce projet à la commission de la santé. (Bravos et applaudissements de la gauche.)
M. Christian Ferrazino (AdG). (Pris à partie par M. Halpérin.) Je ne l'ai pas fait, puisque je parlais, Maître Halpérin, dans le cadre du développement de préconsultation ! (Manifestation.) Je serai très bref. En effet, il ne me faut pas beaucoup de temps, Monsieur Dupraz, pour exprimer les raisons qui devraient vous amener, précisément, à écouter ceux qui plaident en faveur d'un renvoi en commission et, par conséquent, qui refusent une discussion immédiate. Non seulement je ne reviendrai pas sur la tradition consacrée de ce parlement qui a toujours voulu que tous les projets de lois, et a fortiori ceux qui sont importants comme celui-ci, soient renvoyés en commission avant de prendre une décision.
Monsieur Lombard, j'étais avec vous pour traiter du problème des contractuels qui devaient être transférés à la Fondation des parkings.
M. Armand Lombard. Vous êtes trop jeune !
M. Christian Ferrazino. Quelques députés de votre groupe souhaitaient que ce projet soit discuté également en discussion immédiate. Nous nous sommes retrouvés en commission judiciaire, il y a une dizaine de jours, et nous avons vu, après avoir examiné ce dossier que, finalement, ce qu'on avait cru comprendre lorsqu'on s'était vus ici dans cette enceinte n'était pas du tout ce qu'on avait compris. On a réalisé que les documents que M. Ramseyer devait avoir - mais que nous n'avons toujours pas - étaient totalement différents de ceux auxquels nous pensions. En d'autres termes, la commission, à sa grande majorité, n'a pas voulu entrer en matière sur ce projet de loi en commission. En effet, il est difficile d'étudier un projet sans avoir les éléments pour l'apprécier. Mais nous aurions voté en discussion immédiate ce projet de loi si nous n'avions pas été attentifs, précisément, à le renvoyer en commission. Cet exemple suffit à lui seul, pourtant il concernait un projet moins important. Aujourd'hui, il s'agit d'un sujet important qui s'intègre dans la politique générale de la santé, dans la restructuration et la planification des établissements hospitaliers.
Monsieur Dupraz, vous comprendrez certainement aisément une autre raison toute simple.
M. John Dupraz. Vous devez vous adresser au président, pas à Dupraz !
M. Christian Ferrazino. (L'orateur poursuit son intervention en se tournant vers le président, ce qui déclenche une certaine hilarité.) Ce projet de loi comporte des erreurs. Je prends l'article 2, alinéa 2 et j'apprends avec grand étonnement que le Conseil d'Etat est propriétaire de la clinique de Montana. J'ai toujours cru que c'était l'Etat de Genève qui était propriétaire. Moi, je ne vais pas voter un projet de loi qui comporte une telle erreur.
A la ligne suivante, je lis : «respectivement l'établissement de Joli-Mont» est propriétaire. Et l'établissement de Montana, peut-être ! Il y a aussi une erreur dans le libellé de ce texte.
Une voix. C'est pas très brillant !
M. Christian Ferrazino. Ce n'est pas très brillant de la part de ceux qui sont à l'origine de la rédaction de ce texte. Si vous nous demandez de voter rapidement, au pas de charge, des projets de lois, la moindre des choses serait de nous les présenter convenablement ! (Applaudissements.)
M. Andreas Saurer (Ve). Comme l'ont déjà dit mes préopinants, c'est bien la première fois que le Conseil d'Etat propose la discussion immédiate pour un sujet de cette importance. C'est extrêmement grave. Si vous voulez vous pouvez gouverner comme cela, puisque vous avez la majorité. Chaque fois que vous voulez supprimer une prestation importante, vous proposez la discussion immédiate pour éviter que cela traîne en longueur; je vous propose carrément de supprimer le Grand Conseil !
Une voix. Ouiii !!! (Eclats de rires.)
M. Andreas Saurer. Cette prestation est importante... (Chahut et vacarme sur les bancs libéraux. Le président fait tinter la cloche et M. Saurer attend le calme.) La discussion ne sera certainement pas facile pour les personnes concernées, mais je préfère une discussion sereine à une discussion à la va-vite et complètement passionnée.
Pour ce qui est du débat populaire, ne croyez pas que nous aurons un débat serein. Il sera passionné et passionnel. On ne comprendra rien du tout. En fin de compte, c'est la population qui voudra ou non de Montana, mais vous ne saurez strictement rien de ce que pense la population de la politique hospitalière...
Une voix. On s'en fout complètement !
M. Andreas Saurer. ...de la nécessité de couper les prestations ou non. Mes chers députés de l'Entente, vous le savez pertinemment bien, un certain nombre d'entre vous vont voter la discussion immédiate uniquement pour des raisons politiciennes.
Une voix. C'est tout ! (Commentaires.)
M. Andreas Saurer. Parce que la raison des partis est plus importante que l'intérêt de la chose publique. Nous pouvons fonctionner comme cela, mais c'est extrêmement désagréable et pénible... (M. Saurer a de la peine à se faire entendre et attend tranquillement le retour au calme.) Je fais référence à notre manière de travailler à la commission de la santé dans laquelle le climat est excellent. Nous avançons rapidement et nous avons pu éviter jusqu'à maintenant des clivages trop artificiels. La lutte et les affrontements stériles ne mènent à rien. Continuez comme cela ! Quel que soit le résultat de ces votations, elles ne nous apporteront absolument rien. (Bravos et applaudissements.)
Le président. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur la discussion immédiate. Que celles et ceux qui souhaitent débattre du point 19 de l'ordre du jour... (M. Saurer se relève subitement et demande la parole.) Monsieur Saurer, vous avez déjà parlé une fois !
M. Andreas Saurer (Ve). Je demande le vote nominal. (Appuyé.)
Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder. Celles et ceux qui souhaitent la discussion immédiate répondront oui et celles et ceux qui la refusent répondront non.
La discussion immédiate est adoptée par 49 oui, 43 non et 1 abstention.
Ont voté oui (49) :
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Claude Basset (L)
Roger Beer (R)
Dominique Belli (R)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Anne Chevalley (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Jean-Luc Ducret (DC)
Michel Ducret (R)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Catherine Fatio (L)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Jean-Claude Genecand (DC)
Henri Gougler (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Elisabeth Häusermann (R)
Claude Howald (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Pierre Kunz (R)
Claude Lacour (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Michèle Mascherpa (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean Opériol (DC)
Barbara Polla (L)
David Revaclier (R)
Françoise Saudan (R)
Jean-Philippe de Tolédo (R)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Nicolas Von der Weid (L)
Michèle Wavre (R)
Ont voté non (43) :
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Jacques Boesch (AG)
Anne Briol (E)
Fabienne Bugnon (E)
Micheline Calmy-Rey (S)
Claire Chalut (AG)
Pierre-Alain Champod (S)
Liliane Charrière Urben (S)
Sylvie Châtelain (S)
Bernard Clerc (AG)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
Marlène Dupraz (AG)
Laurette Dupuis (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (E)
Sylvie Hottelier (AG)
Liliane Johner (AG)
Sylvia Leuenberger (E)
René Longet (S)
Jean-Pierre Lyon (AG)
Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)
Liliane Maury Pasquier (S)
Pierre Meyll (AG)
Laurent Moutinot (S)
Chaïm Nissim (E)
Danielle Oppliger (AG)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Maria Roth-Bernasconi (S)
Andreas Saurer (E)
Christine Sayegh (S)
Max Schneider (E)
Jean Spielmann (AG)
Evelyne Strubin (AG)
Claire Torracinta-Pache (S)
Pierre Vanek (AG)
S'est abstenu (1) :
Philippe Schaller (DC)
Etaient excusés à la séance (5) :
Bernard Annen (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean Montessuit (DC)
Jean-Pierre Rigotti (AG)
Micheline Spoerri (L)
Etait absente au moment du vote (1) :
Martine Roset (DC)
Présidence :
M. Hervé Burdet, président.
Premier débat
Mme Evelyne Strubin (AdG). La décision de fermer la clinique de Montana est donc tombée abruptement durant l'été.
Si nous n'avons pas eu la possibilité de nous prononcer sur le fond, avant l'annonce officielle de la clôture, nous désirons au moins que l'on nous laisse l'opportunité de nous exprimer sur la forme.
Pour notre part, nous trouvons le procédé révoltant et inadmissible !
Je suis novice en la matière, mais je pensais que les membres du Conseil d'Etat avaient, eux, tout de même assez d'expérience pour savoir ne pas mélanger leur attributions avec celles du parlement.
Voter les lois est du ressort des députés du Grand Conseil, alors que les faire mettre en vigueur est une tâche de l'exécutif. Vous n'aviez donc, Monsieur Segond, aucune compétence pour prendre une telle décision, de surcroît à la sauvette, durant les vacances parlementaires, en espérant sans doute que cela passe inaperçu. Les députés ont des droits et je ne pensais pas que ce serait avec les membres du Conseil d'Etat qu'il faudrait se battre pour les faire respecter. Notre groupe trouve ces méthodes des plus hypocrites.
Dans ma naïveté je pensais également que les conseillers d'Etat, habitués à jongler avec les subventions, savaient calculer. Or, nous nous sommes tous aperçus que ce n'était pas le cas.
En effet, si vous aviez été réellement prévoyants, si vous aviez observé les comptes en experts, vous n'auriez sans doute pas dépensé des milliers de francs pour rénover les cuisines et créer des chambres pour lesquelles les dirigeants de Montana attendaient encore le concordat des assurances-maladie au sujet du prix lorsque la décision de fermeture est tombée. Lorsque nous sommes montés à la clinique pour juger de la réaction de ses occupants, après votre annonce de clôture, nous avons constaté qu'ils se perdaient en conjectures en tentant de comprendre vos motivations. Motivations encore plus incompréhensibles lorsque, après coup, on peut lire dans les interviews que vous accordez à la presse que la clinique est fermée pour cause de vétusté, entre autres.
Il nous faut donc peut-être comprendre qu'il s'agit là d'un investissement spéculatif destiné à rehausser la valeur marchande de cette maison de santé. Mais là, à nouveau, l'incompréhension s'installe. Aviez-vous pris la peine de prévenir les députés de vos intentions lorsque nous avons voté le budget de ces travaux ? Non ! Alors, je me demande si le Conseil d'Etat se prend pour Dieu le père et s'il nous demande d'accepter sans réagir qu'il joue ainsi, sans nous en informer, avec les finances du canton qui, par ailleurs, ne sortent pas grandies de la première année de cette législature de droite où l'on prend d'un côté pour boucher d'un autre. Il serait peut-être préférable de faire preuve d'idées créatrices et d'innover. En effet, cette technique de renflouement de trous financiers, par l'abandon de prestations sociales, n'est pas nouvelle et n'a jamais été très productive.
Quant à votre pseudo-proposition de réinsertion du personnel dans notre canton, nous nous demandons de qui on se moque. Comment pensez-vous retrouver des emplois pour plus d'une centaine de personnes, quand on vous entend pleurer sur les mauvais chiffres de l'hôpital cantonal et proposer des réductions de postes ? Où allez-vous loger ces employés ? Où voulez-vous les replacer et comment pensez-vous les payer, alors que nous n'avons même plus de quoi offrir des prestations décentes aux élèves infirmiers et infirmières ? Par ailleurs, socialement, comment imaginez-vous que ces employés qui, pour certains, travaillent dans la clinique depuis trente-cinq ans et ont construit leur vie et celle de leur famille dans le Valais, pourront de gaieté de coeur venir tout à coup travailler sur Genève, avec tous les déplacements que cela implique ? Nous pensons plutôt qu'il s'agit là, une fois de plus, de cacher la poussière sous le tapis en paraissant se préoccuper du sort des personnes mises en congé, alors que, si l'on y prête réellement attention, il apparaît évident que plus de la moitié ne sera pas intéressée à se déplacer et devra se débrouiller seule pour retrouver un travail dans le canton où elles se sont installées.
Non, décidément, tout cela est trop irréfléchi et désorganisé, alors qu'il aurait été si facile de procéder plus démocratiquement et cordialement en proposant une réflexion générale sur le sujet durant laquelle nous aurions eu le temps de prévoir toutes les conséquences de ce type de décision, si celle-ci s'était avérée inévitable.
Compte tenu des observations précédentes, nous nous demandons pour quelle raison les travaux en question ont été effectués alors que la situation de la clinique était incertaine et si, suite aux réactions des politiques et de la population, vous pensez retirer les lettres de congé aux employés. (Bravos et applaudissements du public à la tribune.)
Mme Claire Chalut (AdG). (Une grande partie des députés de l'Entente quittent la salle.) Je m'étonne tout à coup du vide des bancs d'en face, eux qui étaient tellement intéressés par la liquidation, à la hussarde, comme l'a dit ma collègue, de cette clinique.
Je vais vous parler de cette clinique de Montana que j'ai visitée le 3 septembre. J'ai des photos ici pour ceux qui voudraient les voir. J'y suis retournée le 8 et, malheureusement, je n'y ai vu que très peu de députés. Il n'y avait même pas notre président. Ils n'étaient que deux ! (Les députés encore dans la salle dialoguent en aparté ne prêtant aucune attention à l'oratrice.)
Il y a une semaine à peine, Genève fêtait la journée du patrimoine. Mais, allez-vous me dire, quelle relation... (L'intervenante est interrompue par Mme Calmy-Rey.)
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Monsieur le président, je propose une motion d'ordre.
C'est inadmissible ! Excusez-moi, mais il me semble, Mesdames et Messieurs de la majorité du parlement, que le sujet est suffisamment important pour que vous écoutiez, surtout après votre demande de discussion immédiate. Vous avez larmoyé sur la démocratie, sur l'importance du sujet, et maintenant vous êtes tous à la buvette. Monsieur le président, je trouve cela scandaleux ! Je vous demande de faire votre travail ! (Vifs applaudissements.)
Des voix. Contre-appel ! Contre-appel !
Le président. Madame Calmy-Rey, j'ai un certain pouvoir dans cette assemblée, mais pas celui de forcer les gens à écouter ! (Commentaires et réflexions.)
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. (Hors micro, haussant les épaules et parlant des députés absents.) Qu'est-ce que ça peut faire ?
(Grand chahut. Les commentaires vont bon train.)
Le président. Que celles et ceux qui désirent une suspension de séance lèvent la main ! (Les députés de la droite arrivent à la hâte. Des députés bloquent la porte de la buvette pour empêcher les députés s'y trouvant d'entrer dans la salle.)
Le président. Le résultat est douteux. (Le ton monte, vent de colère.)
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages. (Sifflets et contestation.)
Le président. La séance est suspendue. Fermez les micros !
La séance est suspendue à 19 h 10.
La séance est reprise à 19 h 15.
Mme Claire Chalut (AdG). A l'intention des députés qui n'étaient pas présents à la journée «portes ouvertes» de la clinique de Montana des 3 et 8 septembre - seuls deux députés ont participé à celle du 8 septembre - je souhaite apporter quelques précisions. Il y a une semaine, Genève fêtait la journée du patrimoine. Quelle relation peut-on établir entre une telle journée et la décision que nous allons prendre ce soir ? Remontons, si vous le voulez bien, le cours des années.
La société bourgeoise genevoise de la fin du XIXème mit un point d'honneur à développer ses activités philanthropiques de type social. Elle avait ses «oeuvres». Ainsi se préoccupa-t-elle, entre autres, de la santé publique et, plus particulièrement, des ravages causés par la tuberculose dans les milieux populaires les plus défavorisés. En effet, entre 1885 et 1894, on a dénombré à Genève plus de quatre mille morts, soit cinq cents par année représentant 19% du total des décès genevois. Toute la société s'en émeut. Le conseiller d'Etat et médecin, Alfred Vincent, présenta un rapport au Conseil d'Etat de l'époque afin de créer un sanatorium. D'autres cantons avaient déjà concrétisé une telle réalisation qui avait fait ses preuves.
Au cours d'une rencontre, le 18 mars 1896, présidée par le docteur Vincent et regroupant médecins, banquiers, notaires, un comité provisoire d'étude de la construction du sanatorium fut constitué. Dès le mois d'avril de la même année, une souscription nationale fut lancée. Environ 350 000 F furent récoltés. Un terrain de 39 037 m2 fut acquis à Montana. Un bâtiment est construit : le sana est né !
Sur la demande du Conseil d'Etat, mais également pour des raisons juridiques, le comité provisoire - qui, ainsi, disparaissait - a constitué une fondation de droit privé. Le 2 novembre 1901, le Grand Conseil approuvait les statuts de la Fondation du sanatorium populaire genevois de Clermont-sur-Sierre. Tel était son nom à l'époque. Parallèlement s'est constituée la Société auxiliaire du sanatorium...
Je conseille aux députés que ce sujet n'intéresse pas de se taire ou de partir. (Chahut.)
Une voix libérale. D'aller à la buvette ?
Mme Claire Chalut (AG). ...cette société jouera un rôle de mécène très important. Elle se composait de tout ce que Genève comptait de «beau monde». Elle se montrait très active dans la récolte de fonds, lançant souscriptions et collectes. Elle avait pour but, d'une part, de favoriser l'accès du sanatorium aux indigents en payant le prix de leur pension, en apportant aide aux familles et, d'autre part, de fournir les ressources nécessaires à l'exploitation du sana. Celui-ci bénéficiait d'un large soutien populaire ainsi que de l'Etat, des milieux économiques et même de la Confédération. Les PTT, par exemple, offrirent la franchise du port.
Le 23 octobre 1903, les deux premiers malades arrivèrent et, le 31 décembre 1904, quarante-deux malades, sur soixante lits disponibles, séjournaient au sana. Malgré les nombreux appels au public, les difficultés de trésorerie obligèrent la fondation à recourir au subventionnement, ce qui se poursuivra les années suivantes.
Les 4, 5 et 6 mai 1904, la Société auxiliaire du sanatorium organisa un grand bazar au Palais électoral qui, pour l'occasion, fut transformé en véritable... bazar. Des centaines de personnes se mobilisèrent pour le sanatorium, des entreprises mirent à disposition du matériel, la presse se fit l'écho de la manifestation, bref, tout le canton est au front. Ce fut un succès, puisque le bazar rapporta la somme de 122 723 F.
Le 30 novembre 1907, la presse publia une enquête réalisée par la fondation auprès d'anciens patients pour évaluer la nécessité du sanatorium. Le temps nous étant compté, je ne préciserai pas certaines données chiffrées. Mais le résultat, après quelques années de fonctionnement, est patent. 37% des cent septante-sept patients interrogés s'estimaient guéris et aptes à travailler. Un deuxième tiers se considérait comme encore malades mais pouvant travailler. La mortalité baissait. Par ailleurs, en 1917, la Société médicale de Genève, également interrogée par la fondation sur la nécessité du sanatorium, donna une réponse très détaillée sur l'état de santé des patients et conclut par le voeu que soient encore étendus les services afin d'assurer le traitement de la tuberculose infantile et chirurgicale.
En 1922, le public se mobilisa à nouveau pour la création d'une école permanente en plein air. Un film de 900 m - selon les rapports - montrant «le cycle de vie d'un enfant dont la santé nécessitait un séjour préventif en altitude» fut montré deux cent trente fois. Une fois de plus, les fêtes, les collectes et le soutien de l'Etat permirent la réalisation, en 1924, de cette école. La Société auxiliaire du sanatorium organisa à nouveau un bazar pour recueillir les fonds nécessaires. Les années suivantes furent ponctuées de travaux importants, tels que la rénovation de la chaufferie et de la salle à manger, la construction du pavillon «jeunesse» en 1928, la transformation du bâtiment et des cuisines, etc.
Dès sa constitution, la clinique de Montana a mobilisé un large public. Au début de mon intervention, j'ai évoqué la journée du patrimoine. La clinique de Montana fait manifestement partie de ce patrimoine et aurait donc mérité mieux que quelques heures de discussions, ne serait-ce qu'en hommage à son passé, à ses pionniers qui l'ont voulue et à ceux qui la veulent encore.
Par ailleurs, j'ai quelques observations à faire au sujet du résumé du rapport que nous avons reçu. Il était adressé, en fait, à la commission de la santé et à celle des affaires sociales. Ce rapport propose effectivement quelques scénarios aussi compliqués que contradictoires. En ce qui concerne Montana, je constate que les six lignes qui lui sont consacrées à la page 13 semblent comme sorties d'un contexte, puis le texte continue. Un tel résumé ne donne pas une vue d'ensemble d'un problème.
D'autre part, il faut évoquer un élément essentiel que les députés en face n'ont pas relevé. La perte de Montana ne représente pas seulement quatre-vingt-quatre personnes à la rue. Une clinique de qualité qui ferme - j'ai des témoignages que vous pourrez consulter - entraîne aussi des coûts sociaux induits, dont on ne parle ni en séance ni dans le projet de loi. Quels sont ces coûts induits ? Des indemnités de chômage, d'éventuelles occupations temporaires, le manque à gagner sur le plan de la fiscalité, certains coûts dans le domaine de la santé - le chômage, comme vous devriez le savoir, crée des problèmes de santé. De plus, sur le plan régional, des entreprises fonctionneront moins bien, notamment les commerces qui travaillent avec la clinique et vont subir un manque à gagner, voire le chômage. Bref, c'est l'effet de dominos. Finalement, tout cela n'apportera guère d'économies.
Il est donc très regrettable que ce projet de loi ne passe pas en commission, car nous aurions pu étudier l'économétrie d'une telle situation, ce qui aurait certainement été très intéressant.
D'autre part, M. Olivier Segond... Guy-Olivier Segond... (L'assemblée chahute.) Oui, j'ai failli dire autre chose. Effectivement, j'ai failli dire GOS, parce que c'est comme cela que l'on vous appelle ! (Rires de toute l'assemblée.) M. Segond propose au personnel, à ceux qui le veulent du moins, de venir à Genève. Mais c'est une plaisanterie, Monsieur Segond ! (M. Dupraz exprime rudement son désaccord.) Ça veut dire quoi ? Qu'est-ce qu'ils feraient à Genève ? Une carrière de chômeur, peut-être ? On est en train de supprimer des postes, de diminuer des prestations, dont les lits d'hôpitaux. Et on leur dit : «Eh bien, ceux qui veulent, vous n'avez qu'à...». On n'agit pas comme cela. Il a y des personnes qui sont installées à Montana depuis de nombreuses années. Elles y ont fait leur vie. C'est vraiment manifester un mépris profond au personnel.
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Il y a cinq ans, un homme est arrivé à la tête de la santé publique en réclamant les moyens de conduire une politique intelligente et à long terme. Il a dénoncé la carence de l'appareil statistique et l'absence élémentaire d'instruments de gestion et de conduite de l'Etat. Nous l'avons suivi jusque-là, bien qu'il ne soit pas issu de nos rangs. Aujourd'hui, la fermeture de Montana est une dérision vis-à-vis de cette volonté affirmée. Et cette dérision, cette transformation, c'est probablement aussi un des «bienfaits» du gouvernement monocolore.
Le communiqué de presse du Conseil d'Etat, publié le 15 juillet, informe de la fermeture de la clinique genevoise de Montana et invoque une seule et unique raison à l'appui de cette fermeture : celle du redressement des finances publiques. Les priorités en matière de santé, le taux d'occupation, le rapport Gilliand ont été évoqués seulement beaucoup plus tard, à la mi-août ou à la fin août.
On a vraiment le sentiment qu'il s'agit là d'un habillage tardif destiné à voiler la brutalité et le peu de crédibilité de l'argument financier. Comment, en effet, l'ampleur du déficit peut-elle être susceptible d'être vraiment diminuée par la suppression de la subvention à la clinique de Montana qui représente le 1% du total des dépenses de l'Etat ? Comment justifier la fermeture d'un établissement de soins dont le prix de la journée est le plus bas de tous les établissements publics médicaux et dont la part du subventionnement de l'Etat est la plus basse de tous les établissements publics médicaux.
Logiquement, Montana devrait, au contraire, intéresser en situation de difficultés budgétaires. Bien sûr, on pourra toujours vendre les bâtiments et les terrains qui sont magnifiquement situés. Je connais quelques gros requins immobiliers du haut plateau qui sont très intéressés par cette opération. Mais la vente ne se ferait vraisemblablement pas à un prix très élevé pour l'Etat de Genève, parce qu'une opération promotionnelle est liée à de gros investissements pour transformer les bâtiments.
Vous n'avez manifestement pas envisagé de rentabiliser la clinique de Montana et d'investir pour cela. Et, lorsqu'on vous le dit, vous avancez un chiffre de 20 millions de francs, grossièrement surévalué, le total des frais engagés sur l'ensemble des bâtiments ne semble, à qui a vu les bâtiments de Montana, pas hors de proportion par rapport à la valeur actuelle.
Ces faits établis, il semble bien que la fermeture de Montana obéit moins à des arguments d'ordre financier et sanitaire qu'à un argument d'ordre purement politique. A l'appui de cette thèse, deux remarques. Nous vivons une période de déficits budgétaires, tout le monde le sait. Ces derniers n'ont jamais été aussi importants que sous la gestion libérale de M. Vodoz. On comprend que cela lui déplaise et qu'il multiplie les mesures restrictives et les pressions sur ses collègues pour tenter de les atténuer. En compensation de l'augmentation de la dotation sur les soins à domicile dans le département de l'action sociale, il fallait donner satisfaction à notre grand argentier. C'est tombé sur Montana, et vous m'excuserez, Mesdames et Messieurs, mais cette manière de faire tient du maquignonnage et pas d'une réflexion. (La droite conteste bruyamment les propos de la députée.)
Deuxième remarque : la façon de faire. Je sais, Monsieur Segond, parce que vous me l'avez dit, que vous êtes partisan d'un pouvoir exécutif fort...
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. C'est n'importe quoi ! C'est primaire !
Mme Micheline Calmy-Rey. ...mais là, vous n'avez vraiment pas fait dans la subtilité. Vous sautez à pieds joints sur les compétences de la commission administrative, vous envoyez une lettre de licenciement aux employés alors que la commission administrative est seule apte à le faire, vous n'informez pas le conseil de la santé, vous n'informez pas non plus le Grand Conseil... puis, subitement, vous décidez de déposer un projet de loi au vu des réactions suscitées et vous nous fixez même la date d'un référendum. En quelque sorte, vous organisez l'affrontement, avec pour conséquence, Monsieur le président, qu'on ne joue pas à qui perd gagne, mais à qui gagne gagne, parce que, si le peuple dit non à la fermeture, vous disposerez d'un levier budgétaire formidable, ce qui n'est pas pour nous déplaire, figurez-vous, mais que, s'il dit oui, vous aurez donné des gages aux libéraux qui ne rêvent que de coupures à la tronçonneuse, en particulier dans les domaines sociaux et de la santé. (Vifs applaudissements.)
Les socialistes sont résolument en faveur de la recherche de l'équilibre budgétaire, faute de quoi l'Etat ne saurait jouer le rôle social qui est le sien. Il faudrait réformer, imaginer de nouvelles structures, repenser les manières de faire, mettre fin à des rigidités budgétaires, investir pour rentabiliser. Vous ne le faites pas ! Vous supprimez, vous privatisez, vous diminuez les effectifs. Paradoxalement, cette politique budgétaire, extrêmement restrictive, freine le rétablissement des finances publiques, en tout cas pour sa part conjoncturelle, parce qu'elle freine l'augmentation des recettes fiscales et restreint le marché du travail, donc augmente les besoins de financement par le chômage.
Pour un gouvernement qui s'est fait élire sur la promesse de créer des emplois, chapeau ! Il faudra bien d'autres Montana pour que vous arriviez à rétablir l'équilibre des finances publiques. Vous comprendrez que nous sommes résolument opposés à cette politique et que c'est en toute lucidité que nous voterons contre le projet de loi. (Applaudissements.)
Mme Danielle Oppliger (AdG). La forte émotion soulevée par la décision de fermeture de la clinique genevoise de Montana, le problème pénible qui en résulte dépassent de beaucoup le cadre des oppositions droite / gauche, des clans, des partis, quels qu'ils soient. C'est le moment de se rassembler pour décider objectivement, après avoir analysé en toute sérénité, comme je l'ai fait, les arguments pour et contre.
Pour ma part, je n'ai découvert aucun argument permettant de suivre le très regrettable projet du Conseil d'Etat. Il existe de nombreuses raisons pour qualifier d'irréfléchi le hâtif projet du Conseil d'Etat, déposé le 24 août dernier, après la non moins hâtive décision du Conseil d'Etat qui nous a surpris le 15 juillet, en pleines vacances parlementaires.
En ma qualité de professionnelle de la santé, je me limiterai aux aspects économico-hospitaliers, hospitaliers et cliniques, aspects que je connais pour m'être rendue plusieurs fois sur le verdoyant plateau de Montana, dans cet accueillant établissement loin d'être vétuste. Je reste perplexe. L'étonnant professeur Gilliand a-t-il vraiment visité le même établissement que moi ? Les investissements de ces quatre dernières années témoignent d'un entretien régulier et soigné. Le luxe d'un établissement comme celui de Maurice Mességué, sur la même commune, bien connu de notre gouvernement, n'est pas nécessaire pour un hôpital public, à moins que ses promoteurs, tentés par les 42 000 m2 du domaine, dont 27 000 m2 dans la zone à bâtir, fournissent des expertises - entre guillemets - aussi indépendantes - entre guillemets aussi - que celle dont a été capable, on s'en souvient tristement, un concurrent direct du quotidien genevois «La Suisse».
Est-ce le jugement de l'incompétence des responsables, chargé de nombreuses études et essais, dont fait état le projet de loi, page 10, lettre d), puisque ceux-ci n'ont pu fournir une nouvelle définition de la clinique genevoise de Montana, laquelle définition ne serait pas concrétisée ces dix dernières années.
Le plus surprenant, c'est que la clinique a elle-même trouvé sa vocation. Elle n'a pas attendu le professeur Gilliand qui croit innover en suggérant - toujours à la page 10, lettre e) - que, si la clinique devait survivre, elle devrait se reconvertir en ce qu'elle est, c'est-à-dire un établissement spécialisé pour la convalescence, la promotion de la santé, la réadaptation, la lutte anti-alcoolique / drogue / dépression, négligeant de citer sa diversité dans les réadaptations post-opératoires : orthopédiques, neurochirurgicales...
Toute aussi grotesque est la crainte que cette soi-disant nouvelle définition pourrait faire double emploi avec les équipements et les activités genevoises. En effet, où trouverait-on ici le climat du Valais et l'altitude du plateau de Montana ? La médecine a trop tendance aujourd'hui à oublier les facteurs naturels pour privilégier les facteurs mécaniques ou chimiques. C'est regrettable, car les maladies provoquées par l'immunodéficience, comme le cancer et le sida, sont très sensibles à l'environnement et au facteur climatique. De nombreuses guérisons en témoignent.
Les économies projetées par le Conseil d'Etat m'inquiètent vraiment. Il est prêt à payer six fois le dernier traitement mensuel ainsi que 20% du dernier salaire par année passée au service de l'établissement, ceci pour ne rien faire !
Et ce n'est pas tout. Le projet entend replacer les neuf cents patients de Montana à Genève. A Montana, le coût journalier est de 373,80 F, alors qu'à l'hôpital cantonal il est de 1 417 F, soit une dépense supplémentaire à Genève, par journée d'hospitalisation, de 1 043,80 F ! Drôle d'économie ! Et ce ne sont pas les soins à domicile qui peuvent remplacer l'hospitalisation lorsque celle-ci s'avère nécessaire.
Le projet qui nous est soumis est remarquable par son absence de proposition de solution de rechange. Le recours à l'impôt, qu'il évoque, n'est pas le seul moyen de couvrir l'hospitalisation à Montana. Le tarif forfaitaire journalier, qui était de 130 F par jour en 1987, a baissé en 1988 à 110 F pour n'atteindre que 141 F en 1993. Une réadaptation raisonnable de ce tarif épongerait aisément le déficit et les compagnies d'assurance s'en trouveraient bien, plutôt que de dépenser le multiple à l'hôpital cantonal ou ailleurs. Les intentions du gouvernement se contredisent dans son projet, puisqu'il considère, à la page 6, dernier alinéa, «qu'il n'est plus acceptable d'engager des moyens de plus en plus coûteux pour soigner les maladies si l'on n'engage pas, en amont, des actions importantes permettant d'éviter d'être malade.». Il cite ensuite ses actions importantes se chiffrant par 10 millions de francs en cinq ans dans, tenez-vous bien, la publicité !
Le Conseil d'Etat mentionne, comme à regret, plusieurs séances d'une journée consacrées à l'élaboration du projet de budget 1995 pour effacer le déficit de toutes les activités de l'Etat, lequel se chiffrait, pour 1993, à plus de 370 millions de francs. Il ne mentionne pas le ridicule de mobiliser cent députés, sept conseillers d'Etat et de nombreux services pendant plusieurs jours... Tout ceci est-il vraiment l'objectif visé ? Faudra-t-il encore gaspiller beaucoup plus de temps et d'argent dans un référendum et des procédures judiciaires ou la sagesse va-t-elle triompher à temps ?
En conclusion, nous vous demandons instamment de renvoyer en commission le projet de loi sur la fermeture de la clinique genevoise de Montana afin que vous puissiez procéder aux auditions usuelles avant de prendre une décision si lourde de conséquences. (Applaudissements.)
Mme Laurette Dupuis (AdG). D'autres intervenants nous ont parlé des points techniques et historiques. Pour ma part, je vais exprimer les sentiments de Monsieur et Madame tout le monde. J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi vous parlez de vétusté dans le cadre de la clinique de Montana que j'ai visitée lors de la journée «portes ouvertes». J'ai effectué quatre séjours dans cette clinique, non pas pour des vacances mais bien pour la continuité de traitements suite à un accident. Pendant mes différents séjours, j'ai assisté à de nombreux changements visant à améliorer la commodité et le confort des patients.
Je souhaiterais que vous compreniez la nécessité de garder cet établissement, car il ne fait pas double emploi avec Genève, où vous ne trouverez ni l'air, ni le climat de Montana. De plus, vous avez la forêt, près de la clinique, ce qui permet aux patients ne pouvant se déplacer d'en profiter grâce à l'aide d'un personnel très attentif.
Comme toujours, ce sont les plus démunis qui devront faire les frais de cette fermeture. Ce matin, on nous informe que l'AVS ne sera pas indexée, et, en plus, vous privez ces personnes d'une convalescence ou d'une suite de traitement en plein air, ce qui peut être plus profitable qu'un séjour prolongé à l'hôpital avec une liste sans fin de médicaments. J'aimerais que vous compreniez ma démarche, car j'ai constaté qu'un séjour dans ce lieu peut être salutaire moralement et physiquement.
Mais M. Segond, lors d'un prochain séjour chez Mességué, pourrait lui demander de faire des prix AVS ou caisse maladie/chambres communes, car les rhumatisants ont également besoin de soins, Monsieur Segond. Vous voyez de quoi je veux parler ! (Applaudissements.)
Le président. Je rappelle que les manifestations à la tribune ne sont pas autorisées.
M. Christian Ferrazino (AdG). Nous sommes en discussion immédiate. Certains l'ont demandée avec beaucoup d'enthousiasme tout à l'heure, et je pensais que l'on entendrait les motivations qui ont amené ces députés à vouloir, ce soir, discuter rapidement pour nous démontrer les raisons qui seraient à l'origine, non pas de ce que M. Segond appelle très galamment la fermeture de la clinique de Montana, mais de ce que l'on appellera de façon plus claire, le bradage d'un établissement public, car c'est de ça qu'il s'agit.
Un certain nombre d'arguments ont été invoqués tout à l'heure par différents députés, et je pensais, Monsieur Segond, que, lorsque vous auriez pris la parole à la fin de la préconsultation, vous auriez répondu à ces arguments. Je constate que rien n'a été dit. Vous ne contestez rien ! Vous ne répondez à aucun des éléments invoqués pour contester le projet que vous avez dû finalement soumettre au Grand Conseil, parce que vous saviez pertinemment, lorsque vous avez pris cette décision, que vous n'entendiez pas le soumettre à notre parlement.
Vous nous dites, Monsieur Segond, que le taux moyen d'occupation diminue. C'est extraordinairement clair comme formule ! Cela veut simplement dire que le nombre de patients soignés augmente. Et il faut le comprendre ! Lorsque M. Segond parle du taux moyen d'occupation qui diminue, il veut dire que le nombre de patients soignés augmente. Il fallait le souligner ! Lorsque vous parlez, Monsieur Segond, de la vétusté de l'établissement, nous devons comprendre qu'il y a pour 4 millions de rénovations qui viennent d'être effectuées ces dernières années dans l'établissement de Montana. Voilà comment nous devons comprendre les propos de M. Segond.
Lorsqu'il nous soutient qu'il y a une centaine, voire davantage, d'établissements de convalescence qui existent partout en Suisse, on doit comprendre que ces établissements n'ont rien à voir avec Montana, qui est un établissement unique et spécifique en son genre.
Je ne vous cache pas, Monsieur Segond, que parfois votre sens de l'information rejoint un peu celui de votre collègue, M. Philippe Joye, lorsqu'il matraque l'opinion publique avec son info-intox sur la rade. On a quelque peine à déchiffrer ce qui se cache derrière le message.
Alors que vous nous garantissez que vous êtes un homme de concertation - c'est bien ça, Monsieur Segond, comme j'ai cru le comprendre dans quelques messages électoraux que vous dispensiez ? - nous devons comprendre que l'homme de la concertation est celui qui procède aux premiers licenciements collectifs, ici, à Genève, avec des effets à Montana, car c'est de cela dont vous avez la palme aujourd'hui, Monsieur Segond. Vous avez procédé au premier licenciement collectif et, en plus, de manière parfaitement illégale. Vous n'aviez pas le droit de le faire, et cette schizophrénie, à laquelle je faisais allusion tout à l'heure dans le cadre de l'information intox, se retrouve dans la manière de signer vos courriers, Monsieur Segond. Il faut tout de même savoir que vous avez procédé à ce licenciement collectif sur le papier à lettre de la commission administrative de Montana, en signant de votre qualité de conseiller d'Etat.
On a de la peine à s'y retrouver. Il est vrai que, lorsqu'on a beaucoup de casquettes, on ne sait plus laquelle on porte. Mais, en l'occurrence, l'allusion était claire : c'est en tant que magistrat du Conseil d'Etat que vous avez pris la décision - ce que vous n'aviez pas le droit de faire - de licencier quatre-vingt-quatre personnes. Nous avons aujourd'hui quatre-vingt-quatre familles qui peuvent être touchées par le chômage, car n'allez pas nous dire, comme j'ai cru l'entendre - mais je ne crois pas que vous pousserez le cynisme jusque-là - que vous avez licencié quatre-vingt-quatre personnes pour leur intérêt personnel, parce que c'est ce que nous avons cru comprendre au travers des explications bien peu claires que vous avez données. Alors l'intérêt du personnel, Monsieur Segond, c'est de continuer à travailler là où il est. L'intérêt des usagers, c'est de pouvoir continuer à venir se faire soigner à Montana.
Le pire dans cette affaire - cela a été relevé par des intervenants précédemment - est que vous jouez la politique du fait accompli, Monsieur Segond. Votre programme est clair : vous prenez la décision alors que vous n'en avez pas la compétence. On vous force à venir devant le Grand Conseil : pour vous, c'est une petite ballade, parce que votre majorité est acquise, bien entendu. On va demander la discussion immédiate ou plutôt le monologue immédiat. Il faudra peut-être changer le règlement ou prévoir autre chose. (Mme Saudan converse avec M. Segond.) Mme Saudan pourrait compléter cette disposition. Mme Saudan est très attachée au règlement de notre Grand Conseil. C'est pour cela, lorsqu'il y a l'occasion de le compléter, il faut lui en laisser l'opportunité.
En raison de tous ces arguments, Monsieur Segond, vous nous mettez devant le fait accompli en licenciant le personnel, encore une fois, sans avoir le droit de le faire, alors que cette décision, même si ce Grand Conseil devait la valider ce soir en adoptant ce texte de loi - que vos services n'ont pas su rédiger correctement - devra être soumise au peuple. Vous voulez aller au pas de course et, pour vous, le 4 décembre est une date à retenir, ce qui n'est pas du tout sûr, car la chancellerie doit vérifier les signatures et je peux vous dire que, pour ce référendum, il y aura beaucoup de signatures, donc le travail sera important ! (Contestation de M. Kunz.) Monsieur Kunz, nous avons le respect de la décision du peuple, que vous êtes censé représenter. Eh bien, jusqu'à ce que la population se soit prononcée sur ce dossier, il convient de permettre à ce que l'établissement de Montana puisse continuer à être exploité.
Ce qui est extraordinaire, c'est que l'on demande la discussion immédiate, mais que l'on oublie de nous dire ce qui en justifie la nécessité. Puisque vous ne parlez pas, il faut émettre des hypothèses pour comprendre. (M. Dupraz crie : le budget !) Ah le budget ! Voilà, Monsieur Dupraz, le budget ! (Certains députés de la droite hurlent. Grand chahut. M. Lescaze exige que l'on vote.)
M. John Dupraz. Monsieur le président, j'en ai marre d'être interpellé. Monsieur le président, veuillez intervenir ! (L'intervenant vocifère.)
M. Christian Ferrazino. Non, je sais que vous n'avez rien dit ! Alors permettez-moi de vous rappeler, pour ceux qui ne le sauraient pas, que lorsque l'on parlera de budget au mois de décembre, il est tout à fait possible de prendre des mesures budgétaires provisionnelles, et nous pouvons parfaitement les prendre sans avoir une décision du parlement sur l'existence ou non de la clinique de Montana en 1995. Je vous demanderai, Monsieur Segond, de vous déterminer sur ce point, parce que, dans le cadre de l'information, selon la notion qui vous est propre dans ce domaine, vous avez laissé entendre que le budget 1995 nous obligerait à voter au pas de charge ce texte de loi, ce qui serait pur mensonge; c'est d'ailleurs pour cela que vous ne l'avez pas dit. J'aimerais tout de même vous entendre plus clairement, j'insiste, plus clairement, sur cette question.
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Sur la question de la procédure, le parti radical, par la voix de M. Beer, a fait le choix de la discussion immédiate. Tout règlement a le pour et le contre. En acceptant cette discussion immédiate, on accepte un peu le débat de commission. Alors, n'étant ni spécialiste des hôpitaux ni membre de la commission de la santé, j'ai écouté ce qui a trait au rapport Gilliand. Je pense qu'il faut en donner lecture et je demande officiellement la lecture du rapport Gilliand, parce qu'il faut informer (Appuyée par acclamation.)
Les «centres-avant» de la politique genevoise, notamment au parti radical, nous ont montré la voie du débat en commission et du débat public. C'est un acte de démocratie formidable que d'avoir une commission qui ne siège pas à huis clos ! Elle est ouverte au public qui verra enfin comment travaille un parlement en commission.
Je suis également très surpris sur un autre point. On a subi toute une campagne de l'Entente sur le pouvoir de décision : un Conseil d'Etat uni qui décide. Ce soir, les deux intervenants du Conseil d'Etat, soit le président Haegi et le conseiller d'Etat Segond, ont dit : «Vous décidez ce que vous voulez. On sait qu'il y aura référendum.». C'est cela des hommes politiques ? C'est cela que vous proposez au peuple ? Vous n'avez rien proposé au niveau de l'emploi depuis que vous êtes en place. Vous êtes sept conseillers d'Etat, on peut le dire, qui n'avez dit que des mensonges à la population. (Applaudissements de la gauche.)
M. Bernard Clerc (AdG). Je souhaite aborder un point qui me semble essentiel dans ce débat, point déjà soulevé en partie par de précédents orateurs, à savoir le problème de la concertation. M. Segond s'est fait une spécialité, si je puis dire, de prôner depuis un certain temps, et bien avant ses autres collègues, la concertation, notamment avec les organisations syndicales, puisqu'il a, au niveau de son département, réuni les organisations syndicales et les commissions de personnel, dans un esprit de concertation pour éviter des affrontements inutiles et stériles.
Tout à l'heure, M. Segond a parlé de décision loyale. Je me souviens qu'en 1993 M. Segond est arrivé à l'une de ces séances de concertation, rouge de colère, parce que les syndicats du secteur public avaient distribué un tract dans les hôpitaux disant que nous allions vers une diminution des prestations. Il estimait, à cette époque, que c'était une rupture du dialogue. C'était mettre à bas la concertation. Eh bien, je constate que non seulement les syndicats hospitaliers avaient raison - nous en avons aujourd'hui la preuve avec l'exemple de Montana - mais qu'en plus le mythe de la concertation, instauré par M. Segond, est cette fois définitivement tombé, (Grognements de mécontentement sur les bancs de la droite.) parce que, au mois de juillet, M. Segond a déclaré à la presse que les organisations syndicales avaient été informées au mois de juin. C'est un mensonge pur et simple.
D'autre part, dans l'exposé des motifs du projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, on dit que la fermeture a été annoncée. Non, la fermeture n'a pas été annoncée ! Elle a été décidée. Les lettres de licenciement sont parties avant que ce parlement ne puisse se prononcer et, s'il n'y avait pas eu autant de réactions, aucun projet de loi n'aurait été déposé devant ce parlement.
Voilà dans quel contexte se situe cette discussion. Mais cette discussion s'inscrit également dans un contexte plus global : celui de la politique générale de ce gouvernement et de la majorité, non pas homogène, mais monocolore de ce parlement. Vous l'avez démontré tout à l'heure lors du vote sur le renvoi en commission de ce projet de loi. Pour ceux qui en douteraient encore, il n'y a pas d'espace dans la politique cantonale aujourd'hui pour une politique du consensus. Vous en faites la démonstration, et je pense que l'opposition dans ce parlement doit en tirer toutes les conséquences. (Applaudissements chaleureux.)
Mme Barbara Polla (L). Nous aimerions, quant à nous, aborder les choses d'une manière un peu différente. Il ne s'agit pas d'attaquer ou de défendre Montana. Ce n'est pas une histoire comme Montana, je t'aime, Montana, je ne t'aime pas. Il ne s'agit pas d'attaquer ni de défendre M. Guy-Olivier Segond ou le Conseil d'Etat. Il s'agit de faire des choix afin de répondre à la mission que la population nous a confiée, à savoir redresser les finances publiques. A quelles fins voulons-nous redresser les finances publiques ? Pourquoi aimons-nous cette idée de redresser les finances publique ? Eh bien, c'est afin de pouvoir mieux assumer nos responsabilités sociales.
Dans cette enceinte, personne, je crois, ne met en doute ni la qualité du travail qui a été effectué à la clinique de Montana, ni le fait que les patients qui y ont séjourné l'aient appréciée et souhaiteraient y retourner, ni que d'autres désireraient bénéficier des soins qu'offre la clinique. Simplement, nous sommes à l'heure des choix. Nous ne sommes plus dans une situation où nous pouvons choisir, mais dans une situation où nous devons choisir. La clinique de Montana a rempli une mission en offrant à plusieurs centaines de patients ou de convalescents par année ce que son ancien directeur définit comme «un accueil bienveillant et une réponse thérapeutique sérieuse à des situations où la maladie somatique s'inscrit souvent dans un contexte psychologique».
Mais la clinique de Montana nous apparaît aujourd'hui, à l'heure où justement nous devons faire des choix, moins indispensable médicalement et socialement que d'autres institutions genevoises. S'il est toujours dommage de devoir se priver d'une prestation appréciée, et c'est à ce regret que se réfère probablement la presse lorsqu'elle attribue à certains libéraux des réserves refoulées, il est par contre impératif de redresser les finances publiques. S'il est normal et légitime que cette fermeture soulève une certaine émotion, il n'est par contre pas légitime de toujours vouloir économiser ailleurs.
Le Conseil d'Etat, dans son ensemble, nous propose de renoncer à la clinique de Montana. Je pense que c'est préférable à la fermeture de l'hôpital cantonal. (Rires. Quolibets. Remarques ironiques.) Le fait qu'un... (L'oratrice ne parvient plus à s'exprimer tant les manifestations sont bruyantes. Le président fait tinter sa cloche.) ...tel redressement des finances publiques permet avant tout d'assumer des responsabilités sociales indispensables et prioritaires que sont les soins, l'enseignement et le chômage a été clairement démontré et largement reconnu par la présentation du budget par le Conseil d'Etat.
Il ne s'agit nullement d'un démantèlement social, mais, au contraire, d'une restructuration sociale en faveur de ceux qui en ont le plus besoin, à savoir les personnes âgées, les handicapés, les chômeurs, comme le président Haegi l'a mentionné tout à l'heure sur la base des données chiffrées du budget que nous sommes amenés à étudier.
La population, en élisant, sur la base du programme présenté par l'Entente, un gouvernement homogène ou monocolore, comme vous le désirez, nous a confié une mission extrêmement claire, une mission monocolore - dans une attitude qui n'a rien, comme d'aucuns semblent le penser, d'affectif - à savoir la mission de redresser les finances publiques sans augmentation d'impôts. Vous ne me ferez pas croire que la population ne s'attend pas, après avoir clairement manifesté, et ceci à plusieurs reprises, sa ferme volonté de ne pas voir les impôts augmenter, à ce que certaines prestations, qui ne sont pas indispensables au bon fonctionnement social, soient supprimées. Ce serait par trop sous-estimer sa capacité de jugement.
Quant à moi, si je pense qu'il est possible qu'un référendum ait lieu, je suis par contre persuadée, sur la base de toutes les votations précédentes à propos des impôts comme des élections, que le résultat du référendum sera en faveur des finances publiques.
Alors, que vont devenir les patients qui, autrefois, allaient à Montana ? Vont-ils passer trois semaines de plus à l'hôpital pour les 50% d'entre eux qui allaient à Montana après leur séjour à l'hôpital et ainsi coûter, en fin de compte, davantage à la communauté ? Bien entendu que non ! Ces patients bénéficieront de ce dont ils ont besoin de bénéficier, c'est-à-dire d'autres types de prise en charge auxquels le développement des soins à domicile contribuera certainement pour une part importante. Outre les établissements genevois qui existent déjà pour répondre aux besoins qualitatifs dont on parlait tout à l'heure, nous étudions actuellement en commission de la santé la manière dont, à terme, un certain nombre de lits de l'hôpital cantonal consacrés aux soins aigus pourraient être transformés, au sein même du bâtiment, en des lits de soins plus chroniques avec un type de prise en charge plus proche de celle qui est aussi offerte dans d'autres établissements genevois et de celle offerte également par la clinique de Montana, à savoir une prise en charge de type holistique, aussi bien psychosociale que médicale, ceci afin de répondre au mieux aux besoins réels de la population en termes de soins. La fermeture de la clinique de Montana s'insère donc dans une réflexion globale qui est en cours sur les établissements publics médicaux genevois.
Que vont devenir les employés de la clinique de Montana ? Les choses sont présentées de manière très différente par les uns et par les autres. Je retiendrai que le plan social qui leur est préposé prévoit, pour ceux qui le souhaitent, une réintégration dans la fonction publique à Genève ou un engagement prioritaire dans le canton du Valais. Le déplacement semble difficile pour certains, mais ce n'est ni la première, ni la dernière fois que des employés de l'Etat se verront confrontés à ce type de situation. En effet, la rationalisation de la fonction publique à des fins économiques peut mener aussi bien des employés de l'Etat de Genève à se déplacer de Montana à Genève que d'autres employés à se déplacer de Genève à Lausanne, comme c'est le cas, par exemple, pour l'Institut de médecine au travail, et, pour d'autres encore, à faire quotidiennement les trajets entre Genève et Lausanne. Cette nouvelle disponibilité, cette adaptation à une mobilité qui reste encore bien inférieure à celle des travailleurs des pays qui nous entourent est indispensable dans le nouveau contexte du travail, dans le secteur privé d'ailleurs encore bien davantage que dans le secteur public.
J'aimerais revenir sur la question de la discussion immédiate. Pourquoi avons-nous demandé la discussion immédiate ? Mon collègue l'a expliqué. Mais il y a une autre raison. A quoi nous servirait, en l'occurrence, un débat en commission ? Posons-nous la question de savoir à quoi servent habituellement les débats en commission.
M. René Ecuyer. Pendant que vous y êtes, votez le budget en discussion immédiate !
Mme Barbara Polla. Ils servent à moduler des articles de lois, à les améliorer et à obtenir, chaque fois que cela est possible, un consensus sur la meilleure formulation et la meilleure application des lois qui nous régissent.
Le président. Madame la députée, il vous reste une minute.
Mme Barbara Polla. En l'occurrence, que pourrions-nous faire ? Nous pourrions préciser que Montana n'appartient pas au Conseil d'Etat, mais bien à l'Etat de Genève. Mais, en dehors de cela, la question essentielle est de savoir si l'on ferme Montana ou non, ceci pour des motifs qui sont compris de tous dans cette enceinte. Je vous invite donc à témoigner autant de confiance au Conseil d'Etat que l'a fait la population genevoise... (La députée est huée.) ...et à lui permettre, en acceptant ce projet de loi, d'assumer les responsabilités que nous lui avons confiées. (Quelques applaudissements.)
M. Jean Spielmann (AdG). Nous vivons un moment politique important, avec des décisions à prendre. Je ne me souviens pas en avoir eu à prendre d'aussi graves au cours de mes vingt ans de participation au Grand Conseil.
Des éléments politiques conduisent à des prises de position. Ne venez pas nous raconter que des questions financières les motivent. J'ai démontré tout à l'heure, au moyen de quelques arguments qui me semblent pertinents, que cette position n'était pas valable. Il s'agit en fait d'une prolongation directe des décisions politiques que vous aviez prises avant les dernières élections qui vous ont conduits d'abord à rejeter dans l'opposition ceux qui géraient auparavant avec vous les affaires de l'Etat, puis à présenter une liste effectivement homogène, à modifier ainsi les comportements ou pratiques politiques qui étaient en vigueur dans ce pays pour prendre seuls la responsabilité des activités gouvernementales, c'est-à-dire en orientant le débat politique de l'alternance et du débat démocratique direct - tel qu'on le connaissait avant - vers un gouvernement de concordance.
Le seul choix qui reste maintenant est de renverser totalement cette majorité et, par conséquent, cela vous conduit - nous l'avons dit et prédit - à limiter les droits démocratiques et les possibilités de débat à l'intérieur du Grand Conseil. Cela vous conduira à prendre des décisions qui empêcheront le débat, la concertation et les discussions sur des problèmes importants. Vous en faites aujourd'hui la démonstration. En commission, il ne s'agit pas, comme l'a dit la représentante libérale, de traiter seulement les modalités des textes, il s'agit, au contraire, de confronter des idées, d'échanger des arguments, d'entendre les personnes directement concernées - Dieu sait s'il y en a dans le cas particulier - de prendre des décisions qui correspondent aux exigences de la politique mais, surtout, de notre constitution. Vous n'êtes pas sans savoir qu'un des seuls cas où la Constitution fait obligation au canton de couvrir les déficits d'exploitation est celui des établissements publics médicaux. On est donc bien en présence d'une notion complètement différente de tout ce qui est abordé ce soir. L'article 173, alinéa 3, de la constitution précise de manière exemplaire qu'un établissement médical public n'est pas une activité comme une autre. Cet élément a une importance considérable.
Cet élément est d'autant plus important qu'en l'occurrence nous sommes en présence d'un établissement public médical qui appartient au patrimoine public, comme l'a rappelé Mme Chalut qui démontrait à quel point la population s'était investie pour la réalisation de cet établissement, que vous entendez brader aujourd'hui d'un coup de cuillère à pot sans permettre le débat démocratique et le fonctionnement normal des institutions. Un débat en commission permettrait, d'une part, d'examiner cet objet de manière plus pertinente et, d'autre part, aux différents courants politiques de s'exprimer, de préparer un débat en séance plénière - après avoir évacué les aspects techniques - de proposer des rapports de minorité et, si la voie référendaire s'avérait nécessaire, de présenter à la population un dossier où chacun peut s'exprimer. Mais vous refusez le débat. Votre nouvelle orientation vous conduira forcément à limiter les droits démocratiques, à prendre des décisions contraires aux us et coutumes de ce parlement.
En ce qui concerne la situation financière, je reviendrai sur les propos de Mme Polla demandant à ce que le Conseil d'Etat soit suivi. En effet, il y a quelques exemples récents allant dans le sens contraire. Par exemple, certains médecins considèrent qu'un type de malades - notamment les drogués et les personnes dépendantes - doivent être sortis de leur contexte pour être soignés. Dans le cas contraire, ils rechuteraient rapidement. Alors que vous ne voulez pas que les malades puissent aller en altitude ou se déplacer pour se soigner, le Conseil d'Etat, et M. Segond en particulier, continue de voyager avec ses cadres pour faire des séminaires de trois jours en Valais aux frais de la République. M. Joye se rend à Annecy, toujours avec ses cadres. Le Conseil d'Etat réside dans des hôtels de luxe pour disserter sur le budget, alors qu'il pourrait parfaitement le faire ici.
En ce qui concerne les droits démocratiques et l'information, vous refusez le renvoi en commission et, par conséquent, l'audition des personnes intéressées, l'établissement de rapports et, surtout, le débat démocratique. Vous vous engagez dans une nouvelle pratique politique en jetant par la fenêtre des centaines de milliers de francs dans des encarts publicitaires... (Cris et sifflements de la droite.) ...que, bien sûr, certains éditorialistes, dont la confusion et les difficultés économiques justifient peut-être les appréciations. Ces journalistes mélangent les arrêtés publiés par le Conseil d'Etat, lorsqu'il prend des décisions, avec une propagande pour une réalisation future soumise à votation. Bien sûr, nous ne sommes pas dupes de ces confusions. Vous avez les moyens financiers et l'arrogance de faire passer des messages avec les nouveaux moyens de débat politique et c'est pour cela que vous voulez empêcher le débat au sein de ce parlement. Le bradage d'un établissement médical public est exemplaire de vos méthodes. Cet établissement a été construit et financé grâce à l'intervention directe de la population genevoise. Vous bradez un élément du patrimoine public.
Quant au projet de budget, il est faux de soutenir que l'équilibre budgétaire dépend des décisions que vous prenez au sujet de la clinique de Montana. Je rappelle que les députés sur les bancs d'en face, il y a quelques semaines lorsque nous discutions de la situation financière, ont voté la suppression de l'impôt sur la spéculation immobilière et sur la prise de bénéfices de ceux qui revendent leur immeubles. Cette loi existait depuis vingt ans. Elle existe dans tous les cantons, mais, vous, vous l'avez supprimée à Genève en vous moquant totalement des conséquences sur les finances publiques. Ne venez pas aujourd'hui soutenir une position complètement opposée.
C'est dans ce même budget que l'on constate l'orientation politique que prend le Conseil d'Etat au niveau des finances publiques. Ce même Conseil d'Etat propose dans le budget, précisément à l'ordre du jour de ces séance du Grand Conseil, de subventionner l'accession à la propriété pour des personnes très aisées. Vous faites des choix politiques et non financiers. Madame Polla, votre argument est un peu limité. Il est fallacieux. Vous développez une société à deux vitesses. Vous avez choisi une politique d'affrontement social, alors qu'on dénombre une série de dossiers extrêmement importants. Il en va de la responsabilité des partis d'opposition d'informer la population, d'expliquer ce qui se passe et quelles sont vos attitudes politiques dans le domaine social, dans les domaines des transports, de la santé publique - à laquelle vous voulez substituer une assistance toujours plus chiche - de la mettre en garde contre la société à deux vitesses que vous construisez, où le nombre de millionnaires croît presqu'aussi vite que celui des chômeurs. La population doit être consciente de votre politique catastrophique au niveau de l'emploi où le Conseil d'Etat, qui se fait élire pour régler les problèmes d'emploi, est le premier à décider des licenciements collectifs et, en plus, de manière illégale.
Tous ces éléments doivent être dénoncés, et nous le ferons. Nous ne disposons peut-être pas des mêmes moyens financiers que vous, mais nous essayerons de convaincre la population que cette étape d'aujourd'hui est dangereuse pour la démocratie de ce canton et que c'est un premier jalon dans le démantèlement social. Les acquis mis en place au cours de nombreuses années de lutte ne pourront pas être bradés sans que nous passions à l'offensive. Nous tenterons d'expliquer quelle est votre politique et le pourquoi de votre silence d'aujourd'hui lorsque l'on brade un établissement public médical.
Une voix. Bravo, Jean ! (Chaleureux applaudissements.)
Mme Marlène Dupraz (AdG). J'ai constaté avec consternation que vous avez affiché, pendant ces débats, un mépris littéral pour les députés qui sont opposés à ce projet. Vous méprisez complètement le peuple, y compris ceux qui vous ont élus, peut-être par égarement. (Rires de la droite.) Le mépris est d'autant plus grand que, autrefois, vous vous étiez lancé le pari d'accaparer toutes les compétences. Aujourd'hui, vous voulez les déléguer. Quand on parle de privatisation - nous y reviendrons en temps opportun dans le cadre du service des automobiles et de la navigation - vous déléguez vos compétences. A l'heure actuelle, le mépris est d'autant plus grand que, au sujet de la santé, vous parlez d'abord de celle des finances avant celle des patients et des travailleurs.
Comme Mme Polla le soutenait tout à l'heure, nous devons effectivement prendre nos responsabilités en main. Mais nous avons négligé toute une partie qui concerne les professionnels de la santé - je sais qu'actuellement on en parle beaucoup - c'est-à-dire les chances de succès des thérapies que l'on pratique. Ces problèmes ont suscité beaucoup de questions. Ils ont fait leur chemin, ils ont fait école, et je crois que la clinique de Montana démontre, par un travail intense et bien coordonné de pionnier, que des chances de succès des soins peuvent s'obtenir et doivent être conjugués avec d'autres conditions.
Actuellement, on se penche sur les chances de succès d'une thérapie, quelle qu'elle soit. On manque de lieux pour les expérimenter, afin de déterminer si elles sont efficaces ou non. Le rapport Gilliand ne parle pas de cet aspect-là. La médecine alternative n'est aucunement traitée en relation avec la médecine conventionnelle. Cet aspect qui concerne les professionnels de la santé n'a pas été évoqué.
Quant à la santé du budget - c'est une formulation presque magique - je ne connais pas de santé si l'on ampute. Je crois que, en ce domaine, la notion d'investissement prend toute sa force. On préfère amputer la clinique de Montana plutôt que de la restructurer à développer de nouveaux services, les offrir également aux autres cantons. Pour assainir, il ne faut pas toujours amputer. Si vous avez mal à la dent, on vous l'arrache, si vous avez mal à la jambe, on vous la coupe... Je ne crois pas que de tels extrêmes soient une solution ou une thérapie.
Quand il s'agit de relance, on ne s'interroge pas. On a voulu procéder de la même manière en commission, à savoir : on n'a rien à dire, on n'a pas à proposer d'autre alternative, on n'a pas à s'opposer à la majorité... La majorité bourgeoise dispose de toutes les compétences et contrôle toutes les décisions. Elle peut tout se permettre.
M. John Dupraz. C'est de la démocratie !
Mme Marlène Dupraz. Vous parlez de démocratie, Monsieur Dupraz, mais c'est une drôle de démocratie !
La clinique de Montana est un patrimoine public et le Conseil d'Etat s'en accapare la propriété, ainsi que je l'ai entendu ! Lorsque, dans le projet de loi, le Conseil d'Etat s'approprie ce patrimoine, je trouve que c'est grave, parce qu'il s'approprie des compétences pour les donner au privé. Il s'approprie certaines responsabilités pour les liquider. Où va-t-on ainsi ? Le mépris est d'autant plus grand que les conséquences d'un référendum semblent déjà orchestrées. Je suis convaincue que le Conseil d'Etat a aussi orchestré une campagne de désinformation. C'est en raison de tels éléments que je trouve le mépris insidieux et grave.
Il aurait au moins fallu que le Grand Conseil puisse se pencher sur le problème de Montana qui n'est pas un immense problème. En effet, nous en verrons d'autres; celui-ci n'est qu'un échantillon. On peut aussi citer comme exemple la privatisation du domaine public, les parkings, le SAN, etc. Toute une série de projets vont être, comme le propose le Conseil d'Etat, de couper, d'amputer, d'élaguer, alors que ce sont des secteurs du patrimoine que l'on devrait développer.
Je trouve indigne de la part de ce parlement de soutenir qu'un débat en commission ne servirait à rien. Cela veut dire que vous considérez avoir déjà gagné. Vous ne voulez pas observer, étudier ensemble, échanger des idées, trouver des solutions... Loin de vous cette volonté de trouver des solutions. Votre solution est de faire ce qui vous plaît.
M. John Dupraz (R). Il est clair que l'annonce de la fermeture de la clinique de Montana a suscité une légitime émotion dans la population. Il est tout aussi clair que cette annonce devient un cheval de bataille magnifique pour que la gauche continue son obstruction systématique à la politique gouvernementale.
Ce gouvernement a été élu sur un programme clair...
Plusieurs voix à gauche. L'emploi !
M. John Dupraz. ...notamment sur le rééquilibre des finances de l'Etat.
La gauche conteste. Non, non ! Sur l'emploi, sur l'emploi !
M. John Dupraz. Cela exige des... (Les propos de l'orateurs sont remis en cause par la gauche. L'orateur est traité de menteur par plusieurs personnes.) ...mesures, et le projet de loi qui nous est présenté concernant la fermeture de la clinique de Montana s'inscrit dans le cadre budgétaire. Ce qui dérange la gauche, c'est que le budget prévoit le maintien, voire l'augmentation des dépenses et des prestations sociales prioritaires, principalement en faveur des personnes âgées, des chômeurs et des soins à domicile.
Lorsque M. Spielmann nous parlait tout à l'heure de démocratie, alors que lui-même est le dernier tenant... (La gauche anticipe les propos prévisibles de l'orateur et siffle.) ...d'une idéologie politique totalement... (Huées.) ...antidémocratique... Monsieur Spielmann, les leçons de démocratie, ce n'est pas à nous qu'il faut les donner ! Il faut en prendre vous ! Il est normal que, conformément aux engagements pris par le Conseil d'Etat vis-à-vis de la population, il prenne les mesures nécessaires pour équilibrer le budget. Encore une fois, ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de cette politique budgétaire. La discussion immédiate se justifie pleinement, car c'est aujourd'hui qu'il faut prendre la décision afin que, si référendum il y a, le peuple puisse se prononcer en toute connaissance de cause.
La clinique de Montana est à la santé publique à Genève ce qu'est la résidence secondaire à beaucoup d'habitants de ce canton. Quand nous vivons des difficultés économiques, il est clair que l'on doit se concentrer sur l'essentiel et, aujourd'hui, l'essentiel c'est l'hôpital, la recherche, l'enseignement. C'est pourquoi il est légitime que l'on ferme la résidence secondaire de la santé à Montana.
Mme Claire Chalut (AdG). Je serai brève, car je pense que certains ont faim...
M. Claude Blanc. Mais on se nourrit de tes paroles !
Mme Claire Chalut. Au cours du débat, le chiffre de 20 millions pour rénover Montana a été évoqué. Je souhaite que M. Segond nous explique d'où sortent ces 20 millions et quelles études ont été faites pour justifier cette somme. Pour ma part, j'ai d'autres chiffres sous les yeux.
Des travaux ont effectivement été entrepris entre 1983 et 1993, soit sur une durée de dix ans, dont le montant ne s'élève qu'à 7 372 124 F. Je tiens à votre disposition le total de ces dépenses :
1983 création de nouveaux bureaux
pose de faux plafonds
éclairage des chambres 233 000 F
1984 rénovation sanitaire et revêtement des sols 138 500 F
1985 réfection de la charpente, toiture et façade 1 242 000 F
1986 installation frigorifique dans les cuisines 77 000 F
installation du téléphone dans les chambres 165 000 F
1987 installation d'une alarme incendie 118 000 F
1988 changement des portes des chambres des malades 122 000 F
monte-lits dans le bâtiment et
réfection du toit et des façades du pavillon «jeunesse» 1 210 000 F
1989 changement de l'ascenseur central 132 000 F
1990-91 rénovation du bâtiment du personnel 2 550 000 F
1992 aménagement d'une cafétéria 221 000 F
remplacement des installations de radiologie et stérilisation 289 624 F
1993 transformation de la cuisine 585 000 F
rénovation des chambres 300 000 F
_____________
Total : 7 372 124 F
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Je m'interroge sur l'utilisation des 20 millions nécessaires à la réfection de la clinique avant de pouvoir la vendre. Et à qui ?
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. A Mességué !
Une voix. A un copain !
Mme Claire Chalut. Je souhaite qu'on réponde à mes questions ce soir, puisque nous n'avons plus d'autres moyens d'obtenir des explications.
M. Pierre-Alain Champod (S). Je formulerai trois remarques et deux demandes. La première remarque, c'est une comparaison qui reste dans le domaine médical - puisque l'on parle d'un hôpital - entre l'attitude d'un médecin et celle du Conseil d'Etat dans son rôle de médecin des finances publiques. Une médecin, lorsqu'il reçoit un patient, commence par faire des analyses afin de poser un diagnostic, puis prescrit un traitement. Le Conseil d'Etat, lui, pratique de manière différente. Il commence par sortir son bistouri, procède à l'ablation de la clinique de Montana, puis fait les analyses, soit le rapport Gilliand et en discute. En décembre, on établira le diagnostic, c'est-à-dire que l'on définira la politique hospitalière des cinq prochaines années, au terme de la procédure de consultation du rapport Gilliand. J'espère, pour le Conseil d'Etat, que l'on n'arrivera pas, compte tenu du bas prix des lits de la clinique de Montana et des expériences réalisées dans d'autres cantons, à la conclusion que, dans des lieux comme Montana, on peut pratiquer une médecine bon marché et de qualité, auquel cas le Conseil d'Etat devrait rouvrir la clinique de Montana.
Pour répondre à Mme Polla sur le rôle des commissions, je pense qu'un véritable travail de commission aurait permis de faire la synthèse du rapport Gilliand et de définir les grands axes d'une politique de la santé de ces prochaines années avant de prendre des décisions irréversibles.
Ma deuxième remarque s'adresse à M. Blanc. Lors de son intervention, j'ai été surpris, lorsqu'il a parlé du «fond du problème», de ses arguments, très vagues, pour justifier la fermeture de la clinique de Montana : «il semble, certains experts disent...» etc. J'ai trouvé M. Blanc plus convaincant lors d'autres débats. Il n'était visiblement ni convaincu ni convaincant.
La troisième remarque concerne le référendum. Un certain nombre de personnes ont soutenu qu'un débat en commission n'était pas nécessaire, qu'il ne fallait pas suivre la procédure habituelle de ce parlement, car, de toute façon, un débat démocratique aurait lieu, puisque le peuple se prononcerait au moyen d'un référendum. Si on poursuit un tel raisonnement qui, à mon avis, est un dysfonctionnement des institutions et, notamment, du parlement, dans six mois, l'ensemble des citoyens recevra le programme des votations du week-end qui correspondra à l'ordre du jour des séances du Grand Conseil. Je ne suis pas sûr que la démocratie sorte gagnante d'un tel changement !
Je terminerai par deux demandes. Monsieur le président, vous nous avez signalé que vous aviez reçu plusieurs lettres concernant la fermeture de la clinique de Montana. Etant donné que nous n'aurons pas la possibilité de prendre connaissance de ces lettres en commission, je vous prie de bien vouloir faire lire ces lettres maintenant, puisque l'on discute de ce point de l'ordre du jour. Par ailleurs, au cas où les auteurs de certaines de ces lettres demandaient à être entendus, je vous remercie de bien vouloir organiser ces auditions maintenant, en séance plénière, puisque le travail de commission ne peut avoir lieu.
M. Dominique Hausser (S). Deux remarques en préambule avant d'attaquer le plat principal. Je vous rappelle que la députée Polla est également employée d'un établissement public médical genevois et que, effectivement, nous étudions en commission de la santé une certaine évolution des établissements médicaux et la manière dont la politique doit être orientée. Le débat sur la fermeture de la clinique de Montana est un raccourci, la décision prise par le Conseil d'Etat est une véritable obstruction du débat démocratique, n'est-ce pas, Monsieur John Dupraz ? Ce n'est pas nous qui faisons obstruction, c'est effectivement le Conseil d'Etat qui nous empêche de débattre calmement sur un sujet.
La deuxième remarque concerne également la commission de la santé. Lors de sa dernière séance, au mois de juin, il a été décidé de se retrouver le vendredi 2 septembre, à 17 h, afin de discuter du rapport concluant les discussions sur la révision de la loi sur les établissements publics médicaux. Cette rencontre n'était agendée qu'au cas où nous aurions reçu le rapport quinze jours auparavant. Or, quelle ne fut pas ma surprise, le 25 août, de recevoir une convocation de la commission de la santé pour le lundi 29 août à 12 h pour discuter de ce document. On constate là une manoeuvre, de je ne sais qui, tentant de nous «enfiler» une dernière modification de cette loi, portant sur l'article 1 tel qu'il est proposé dans ce projet de loi, ce qui a heureusement échoué puisque la séance a été annulée.
Puisque les auditions ont été demandées, je les soutiens et les appuie, et j'espère que nous pourrons y procéder tout à l'heure.
Je souhaite apporter un certain nombre de commentaires à l'exposé des motifs fourni, puisque c'est en séance plénière qu'il faut le faire. Tout d'abord, je passerai rapidement sur les aspects financiers, mais je relèverai que le plan social, tel qu'il est présenté à la page 11 du rapport, coûtera à l'Etat de Genève 4,5 millions de francs. En additionnant six fois le dernier traitement mensuel et les 20% du dernier traitement mensuel par année passée au service de l'établissement, on doit inscrire au budget 1995 un montant équivalent à celui du fonctionnement de la clinique de Montana.
Sur les aspects de politique de santé, Monsieur Segond, ce n'est pas la première fois que nous échangeons des propos à ce sujet. S'il est vrai que vous avez défini des grandes lignes, comme développer la promotion de la santé, la prévention, l'aide et les soins à domicile, organiser de façon plus rationnelle et plus économique les hôpitaux publics, nous n'avons pas vu, jusqu'à ce jour, beaucoup de concrétisations, à l'exception de l'aide à domicile, puisqu'une loi votée par le peuple vous oblige à développer ces activités.
L'organisation plus rationnelle des hôpitaux, c'est actuellement ce que nous sommes en train de faire en commission avec, pour l'instant, peu de résultats concrets. La réduction des postes, des journées d'hospitalisation et du nombre de lits dans les cinq dernières années ne peuvent que nous amener à la conclusion que nous sommes véritablement en présence d'une réorganisation des établissements hospitaliers. Ce phénomène naturel s'observe partout, indépendamment de toute intervention.
Sur le point de la prévention et la promotion de la santé, vous êtes formidable ! En page 6, vous écrivez : «Le Conseil d'Etat a mis en oeuvre d'importants moyens, soit 10 millions en cinq ans». 10 millions en cinq ans, c'est extraordinaire ! On a «claqué» 5 milliards en cinq ans pour les établissements hospitaliers. On n'a rien développé. Et, en page 9, vous évoquez les trois priorités de la politique de la santé, dont le maintien des efforts engagés dans le domaine de la prévention. Si je vous comprends bien, cela signifie que 2 millions seront consacrés à ce secteur en 1995 et 2 millions en 1996, et nous n'allons donc pas véritablement modifier l'orientation des activités, ni favoriser une réduction des pathologies possibles pour réduire l'utilisation des établissements hospitaliers et d'autres activités thérapeutiques avec un tel rythme de financement. Même si la prévention n'est pas très onéreuse, elle coûte de l'argent et elle exige des moyens et des forces de travail, en particulier des forces humaines. Nous avons là un débat qui n'est en tout cas pas fermé sur tout ce qui concerne l'aspect de la politique de la santé.
Vous énumérez toute une série de motifs de fermeture de la clinique de Montana. Dans cette intervention, je ne vais ni vous lire l'ensemble des dix raisons de ne pas fermer Montana que nous propose le SIT, ni débattre en détail des arguments des uns et des autres. Je le ferai à la prochaine intervention, puisque je constate que j'arrive quasiment au terme de mes dix minutes.
M. Pierre Froidevaux (R). Je m'adresse à vous tous à titre personnel. Je regrette infiniment la tournure des débats qui entraîne le recours au peuple sans que nous, ses représentants, ayons l'occasion de débattre en commission des problèmes de fond. (Applaudissements.)
Pour moi, médecin, la clinique genevoise d'altitude de Montana a un rôle tout aussi essentiel que tous les autres établissements médicaux du canton : il est le lieu privilégié où le patient met en phase les problèmes physiques d'un grave handicap lié à sa maladie avec son contexte psychosocial. Cela s'appelait, il y a cent ans, «de la convalescence», cela s'appelle maintenant de la médecine «psychosomatique» et, en langage politique, cela s'appelle «la prise en charge globale du patient». Lorsqu'en 1991 ce même parlement a voté la loi sur les soins à domicile, l'article 1er faisait référence à ce principe et c'est ce principe qui a donné le succès populaire que l'on sait.
Et ce sera aussi ce principe qui pourrait être la cause du succès du référendum projeté par ma droite et beaucoup moins le problème économique.
Le Dr Yves Beyeler fut un pionnier de cette prise en charge globale et, depuis sa nomination à la tête de l'établissement en 1983, ses succès furent considérables permettant à l'établissement de presque doubler le nombre de prises en charge tout en réduisant admirablement la durée d'hospitalisation, preuve formelle de l'efficacité de son action auprès des malades. Ce succès tourne maintenant au désavantage de cet établissement, puisque, par son efficacité, l'indice socio-médico-mathématique, cher à tout parlement, parle d'un taux d'occupation de 70%, alors que tous les autres établissements dépasseraient les 80%. Cependant, il est aussi connu que cet indice se modifie facilement en réduisant artificiellement le nombre de lits des établissements...
Les 23 000 journées d'hospitalisation qui se font encore chaque année à Montana devraient se faire dorénavant dans les autres établissement publics médicaux, entraînant un report de charges sur les assurances qui débourseront 287 F au lieu de 144 F. Et si ces institutions ne développent pas la même qualité que la clinique de Montana, la durée du séjour va s'allonger augmentant encore le coût global. Le médecin maintenant se tait et le député radical s'exprime.
Chers amis parlementaires de tous bords, il aurait été judicieux que nous fassions ensemble un travail de commission... (Aahh, applaudissements nourris.) ...en explorant les nombreuses pistes que nous propose ce dossier. Vous, sur ma droite, vous avez agi trop brutalement en brandissant l'arme référendaire bloquant ainsi les débats à leur naissance. Je ne puis que souhaiter ardemment qu'une situation identique ne se reproduisent plus à l'avenir et ne puis, à regret, que suivre l'avis de mon groupe.
M. Max Schneider (Ve). Un grand bravo à M. Froidevaux. Je crois qu'il a exprimé là aussi une des pensées des écologistes. Nous souhaitions entendre ces arguments. Il a été question des coûts qui sont moindres à Montana et des possibilités de guérison apparemment plus favorables. Je pense, comme un habitué malheureux de l'hôpital cantonal, qu'il y a peut-être quelque chose à faire et qu'il faudrait discuter plus sereinement.
Mme Polla, au nom de l'Entente, a exprimé des choses intéressantes. Elle a parlé avec son coeur et tout ce qu'elle a raconté mérite d'être vérifié. Voilà pourquoi cette discussion immédiate est absolument stérile et, Monsieur le président, c'est la raison pour laquelle j'ai levé la main au début de ce débat, pour vous annoncer un certain tournant, une étape dans la vie politique genevoise. Je constate que l'on ne recherche plus un consensus mais uniquement une provocation. Dorénavant, tous les thèmes seront bons pour provoquer.
Cette provocation, Monsieur Froidevaux, ce n'est pas la gauche qui l'a lancée. C'est M. Segond, votre chef de département, qui a parlé de référendum, et non la gauche. (Des députés contestent les propos de l'orateur.) Nous sommes face à un problème. Ce refus du débat démocratique, cette entrée en matière immédiate, ce rejet des auditions me rappellent quelque peu la commission de l'économie qui, elle aussi, a une tournure beaucoup plus radicale. On y applique des méthodes libérales et d'ultralibéralisme qui ne prennent pas du tout en compte les conditions sociales des individus. Les calculs ne s'effectuent qu'avec le signe $ devant les yeux.
Le groupe écologiste ne se serait pas opposé à une étude quant à l'avenir de la clinique de Montana. Nous n'étions pas forcément contre la fermeture de la clinique. Mais nous aurions voulu, préalablement, auditionner les personnes qui avaient manifesté un certain intérêt. Nous aurions pu adopter une position beaucoup plus sereine. Mais ce soir, malheureusement, nous sommes obligés de voter en bloc contre cette proposition faite la tête dans le sac. Nous aurons certainement d'autres débats prochainement, et c'est un peu triste de voir ce qu'est devenu ce parlement - j'y ai passé cinq ans - où, auparavant, malgré les affrontements, nous éprouvions du respect les uns pour les autres, nous pouvions dialoguer et même trouver des consensus.
Aujourd'hui, je constate une arrogance incroyable en commission de l'économie de la part des députés de droite et une certaine arrogance, ce soir aussi, car vous ne nous donnez même plus la possibilité de choisir une décision. Vous nous mettez dans un bloc et nous sommes obligés de suivre ces décisions. Je le regrette vivement. Seul M. Froidevaux a émis une position très honnête, même s'il s'est ensuite plié à une discipline de groupe.
C'est précisément ce dont nous avions parlé tout à l'heure, c'est-à-dire l'intérêt de la chose publique face à l'intérêt politicien des partis. Il est grave que nous soyons en train de voter une politique de partis au lieu de voter dans l'intérêt de la chose publique. Face à cela, Monsieur le président, je vous demande formellement de suspendre la séance afin que nous puissions préparer l'audition en direct de tous ceux qui en ont manifesté l'intérêt, notamment les comités de défense de la clinique de Montana, les médecins pour l'environnement, etc. La liste est longue. Ces personnes se sont intéressées à ce problème, et j'aimerais les entendre, ici, dans ce parlement.
Avant de prendre notre décision, j'aimerais aussi disposer d'une étude financière sur les conséquences pour l'Etat de Genève de la fermeture de la clinique de Montana avec, notamment, la suppression d'une centaine d'emplois, ce qui est un bien. J'aimerais savoir quel va être le coût de cette fermeture pour le contribuable et, notamment, pour la Confédération. Il est trop facile aujourd'hui, après s'être fait élire sur l'emploi, de prôner le report de la charge sur la Confédération, car, finalement, c'est le contribuable qui doit payer tout cela. Que l'on paye à Genève ou à la Confédération, la charge reste pour le contribuable. Il est facile d'enlever cent emplois à Genève, mais il faudra bien financer le chômage. On le voit dans différents départements et dans la politique actuelle de l'emploi : on se désengage à Genève pour se décharger de ces frais sur la Confédération.
Si cette analyse est fausse, j'aimerais que l'on m'en apporte les preuves et qu'on me fasse l'analyse des coûts de cette fermeture par rapport au maintien des emplois. Voilà pourquoi je souhaiterais, Monsieur Segond, que vous n'acceptiez pas le troisième débat et qu'on laisse un peu de temps pour procéder à ces auditions et pour avoir un débat un peu plus serein afin de ne pas perdre de temps, car, finalement, un référendum retarderait le débat. Je regrette profondément l'attitude actuelle.
M. Gilles Godinat (AdG). Lors de ma première intervention, où j'ai dû être synthétique, j'ai eu l'occasion d'évoquer quelques arguments. Je fais le constat, après la demande de discussion immédiate, qu'il n'y a pas de discussion immédiate mais une décision immédiate. Depuis deux heures, toutes les interventions tentant d'argumenter viennent de nos rangs. Je n'entends pas d'argument de l'autre côté. Monsieur Segond, j'ai démonté un par un vos arguments. Je n'ai pas entendu de réponses sur nos propositions.
Vous vous réclamez des autorités médicales, mais à qui faites-vous référence ? A l'AMG ? C'est son secrétaire qui n'est pas médecin qui a écrit à toute vitesse un communiqué disant qu'il suivait la politique du Conseil d'Etat.
Une voix. Monsieur Segond, c'est la moindre des choses d'écouter ! Reprends, il n'a rien entendu !
M. Gilles Godinat. Madame Polla, vous défendez l'idée de la priorité et de la non-priorité en affirmant que Montana est non prioritaire. Mais sur quels critères décidez-vous cela ? Des critères médicaux, vous n'en avez pas. Des critères sociaux, vous n'en avez pas non plus. Des critères économiques, vous dites des absurdités. Transférer les patients de Montana en division hospitalière, c'est effectivement la seule possibilité, alors je vais vous citer les taux d'occupation actuels. A Hoger, le taux d'occupation est de 98,4%, au CESCO, 97,6%, à Loëx, 97,9%, ce qui signifie que ces établissements sont complets. A Joli-Mont, le taux est de 92%. Une petite marge est donc disponible, mais cet établissement n'offre pas les prestations de Montana. Le taux d'occupation de l'hôpital cantonal atteint 80%. Le taux moyen d'occupation de Montana est de 75% ces dernières années. Il y a une petite fluctuation de 5% et j'apprécie beaucoup l'intervention de mon collègue Froidevaux, parce que, effectivement, lorsque l'on entre dans la discussion, on peut moduler les appréciations et on peut différer des décisions qui ne sont pas forcément justifiées dans une politique hospitalière cohérente, comme j'ai essayé de la développer.
Monsieur Dupraz, vos observations sur les résidences secondaires, je vous en laisse la responsabilité !
M. John Dupraz. Merci ! De vous, je n'en attendais pas moins !
Une voix. Allez, Dupraz, va boire ton verre, ça ira mieux après ! (Rires ironiques.)
Une autre voix. Va roter ton Chiroubles ! T'es vraiment pitoyable !
Plusieurs voix. A la buvette, Dupraz !
Le président. Monsieur Godinat, moi je vous écoute, continuez ! (Le brouhaha perdure.)
M. Gilles Godinat. Je n'arrive pas à parler, car je ne m'entends plus. Monsieur Froidevaux, j'ai apprécié votre intervention, mais je ne comprends pas pourquoi vous avez voté la discussion immédiate. Vous êtes contradictoire. Dans nos rangs, nous étions favorables à une discussion en commission. Nous vous l'avons dit. Le référendum, c'est le recours si une décision est prise ce soir à la hâte. C'est notre seul moyen d'essayer d'avoir une discussion démocratique.
Le président. Je suis saisi d'une demande de motion d'ordre de Mme Deuber-Pauli disant :
Au vu des demandes d'explication qui sont actuellement formulées, au vu des demandes de lecture, je demande formellement une suspension de séance pour nous permettre de nous restaurer. La séance reprendra pour durer encore longtemps.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est refusée.
M. Jean Spielmann (AdG). Il convient, au moment où l'on débat de la clinique de Montana, de reprendre certains dossiers, au moins tels que nous les connaissons au travers de la commission des finances qui, année après année, recevait des responsables de la clinique de Montana lors de la préparation des comptes et du budget. La commission avait ainsi l'occasion d'examiner et de discuter avec les responsables de la clinique des différentes options prises au niveau médical, au niveau des investissements ou au niveau de la politique hospitalière.
Au niveau de la commission, une série de propositions avait été formulées. Les responsables de la clinique de Montana les ont suivies avec scrupule. Ils tentaient de répondre au mieux aux desiderata, voire aux exigences, de la commission des finances, que ce soit au niveau du plan comptable, de la politique de gestion, des acquisitions, des investissements et même sur certains aspects de la politique hospitalière.
Subitement, alors qu'ils n'ont fait qu'accepter et suivre les décisions que nous leur demandions de prendre, on décide la fermeture, sans autre explication que les aspects financiers. Sur ce problème, on peut soutenir - M. Froidevaux l'a d'ailleurs démontré tout à l'heure - que c'est une absurdité, y compris dans le domaine des finances, puisque la fermeture coûtera plus cher que le maintien de la clinique.
Si on examine le budget, en prenant certains des arguments développés, on constate, année après année, l'explosion des dépenses sociales - ce qui s'explique par le développement démographique - notamment des dépenses d'assistance, l'explosion des charges de subventionnement aux établissements, que ce soit pour les hôpitaux ou pour les personnes âgées. Mais surtout, on constate une augmentation des dépenses dans le cadre de l'aide apportée aux personnes victimes de la société que vous nous construisez avec les problèmes liés aux bas salaires, à la situation économique et à l'abandon d'une politique de prévention sociale. J'ai attiré l'attention de ce parlement à de nombreuses reprises sur le coût de votre politique visant au démantèlement d'une politique sociale et à son remplacement par une politique d'assistance.
Vos seuls arguments pour justifier la fermeture de la clinique de Montana sont d'ordre financier. Nous avons entendu les libéraux dire qu'ils allaient faire de la politique de gestion financière sans états d'âme, c'est-à-dire sans en regarder les conséquences sur les êtres humains, sur la vie des familles, ce qui peut être apprécié différemment, notamment du côté du parti démocrate-chrétien. Ayez au moins l'honnêteté d'examiner le budget et d'essayer de trouver des réponses financières aux problèmes que soulève le développement de notre société ! Vous constaterez que, dans le budget 1995, les investissements, qui sont un des outils à disposition des collectivités publiques pour avoir une activité dans le domaine de l'emploi, prévoient 220 millions de francs pour le chômage. Voilà quels sont les investissements des partis de l'Entente sur l'avenir !
Ne serait-il pas plus intelligent de consacrer une partie de cette somme à promouvoir un développement garantissant le maintien de l'emploi, notamment les emplois socialement utiles, plutôt que de procéder à des licenciements collectifs dans un domaine aussi sensible que la santé publique. Telle est, me semble-t-il, une première réorganisation, tout à fait possible, des finances publiques. Si on compare ces 220 millions de francs destinés à financer le chômage et intégrés aux investissements avec la trentaine ou la quarantaine de millions consacrés au régime des grands travaux, tel qu'il est présenté cette année dans le train des investissements, si on analyse la politique menée dans ce canton au niveau de l'emploi, force est de constater que la politique que vous conduisez au niveau financier, au niveau économique et au niveau politique mènera à une augmentation importante du nombre de chômeurs avec, pour conséquence, de nombreux problèmes au niveau social et médical, notamment pour la jeunesse.
L'occupation de la clinique de Montana par une population victime d'une série de maladies, liées précisément au manque d'espoir et à la perte du sentiment d'être utile à la société, ne pourra que croître. Voilà quelle est la réalité économique et politique. Vous enfoncez le clou dans la mauvaise direction avec votre volonté de redresser les finances publiques, non seulement sans état d'âme, mais sans réfléchir aux conséquences financières de décisions que vous prenez.
Autre exemple dans le domaine de la politique sociale. Année après année, vous constatez - et vous y êtes contraints, puisque c'est le fruit de la politique que vous poursuivez - une explosion des dépenses d'assistance, parce que, précisément, les dépenses de prévoyance sociale et de sécurité sont insuffisantes. Si on examine l'ensemble du volet du développement politique qu'on est en train de conduire, on s'aperçoit que, là aussi, vous faites fausse route et qu'il y aura augmentation du déficit public et non pas résorption. Alors, état d'âme ou pas état d'âme, ce qui compte, en définitive, c'est de prendre les bonnes décisions. Or vous allez à l'envers du bon sens.
Vous avez développé comme argument que la population refusait toute augmentation d'impôts. Bien sûr, c'est complètement erroné. Ceux qui le disent le savent bien. Vous préparez la nouvelle votation en stimulant les gens pour qu'ils refusent une augmentation d'impôts afin de justifier la politique de démantèlement social que vous êtes en train de mettre en place. Je vais d'ailleurs vous citer un exemple. Lorsque l'on a mis en place la politique de soins à domicile, quelle a été la tactique des gens d'en face pour couler ce projet ? Ils n'ont pas argumenté de manière positive sur le problème de la santé, sur le développement de la prévoyance, mais ils ont introduit une contrepartie fiscale avec le secret espoir que la population refuserait la hausse d'impôts, et donc les soins à domicile. Vous avez été battus à plate couture sur cette politique, parce que la population a compris que, si l'on augmentait les impôts, on donnait aussi une prestation intéressante et importante dans le domaine des soins médicaux. Elle était donc prête à faire un effort financier. Voilà un argument totalement contraire à tout ce que vous avez développé jusqu'à présent, et j'espère bien que vous tomberez encore sur le nez pour la prochaine votation. Voilà ce que je souhaitais aborder dans ma deuxième intervention. La suivante aura trait, bien sûr, à la politique financière.
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai été particulièrement surpris par différents éléments du débat de ce soir. On a entendu des affirmations particulièrement saugrenues, notamment sur le référendum. M. Froidevaux, par exemple, a considéré que nous avions eu tort de brandir la menace du référendum. Mais le référendum n'a rien d'une menace que certains brandiraient. C'est un droit populaire inscrit dans la constitution genevoise et dont l'utilisation est tout à fait normale. Il fait partie du processus démocratique et représente, pour le peuple, le moyen de rattraper les «conneries»... (Quelques sifflements. Un député s'indigne du terme employé par l'orateur.) Je rectifierai dans le Mémorial, si ça te gêne ! Mais je n'en pense pas moins ! L'argument consistant à dire que, puisqu'il existe un moyen pour le peuple de repêcher les erreurs du gouvernement, ce dernier doit se précipiter et concrétiser ses erreurs le plus vite possible, est idiot et saugrenu.
Le président du Conseil d'Etat a affirmé que des dispositions avaient été prises pour le référendum et que des stands étaient prévus. Comme s'il s'agissait d'un cadeau alors que ce n'est qu'un droit élémentaire dont il n'est pas nécessaire de faire état ici parce qu'il n'a rien d'exceptionnel.
J'ai fait moi-même la demande d'autorisation de tenir des stands. A l'évidence, si vous renoncez à voter de manière hâtive, eh bien, le référendum n'aura pas lieu ! Il n'y aura pas de récolte de signatures. C'est vous qui précipitez les choses et nous obligez d'employer ce moyen. Nous ne brandissons pas la menace d'un référendum, et votre affirmation est parfaitement absurde, idiote et ne tient pas la route. Réfléchissez, s'il vous plaît, et arrêtez de raconter des «salades» !
Lors du débat initial d'entrée en matière, vous avez pris prétexte de ce référendum pour aller très vite. M. Beer - qui n'est pas là pour l'instant, ou alors il se cache - a soutenu que le peuple devait se prononcer. Fort bien ! Si c'est la position du parti radical, je suis curieux de connaître le nombre de signatures que ce parti récoltera. Quant à notre groupe, il en récoltera un certain nombre de milliers. J'espère que le parti radical sera à la hauteur des déclarations de son porte-parole de ce soir.
Quant aux leçons de démocratie... (A ce mot, certains députés ironisent.) Oh ! Bon, vous voulez encore deux interventions de dix minutes après celle-là ? Vous les aurez ! (L'orateur, face à l'attitude d'une partie de l'assemblée, hausse le ton.)
M. René Koechlin. C'est toi qui te fatigues !
M. Pierre Vanek. Non, je ne me fatigue pas du tout ! Au contraire ! C'est vous qui me fatiguez ! Quant aux leçons de démocratie que M. Dupraz prétendait nous donner tout à l'heure, à Jean Spielmann, par exemple, je le renvoie à une déclaration de M. Brunschwig dans le débat de préconsultation. S'il a le courage de laisser une telle chose, vous aurez l'occasion de la lire dans le Mémorial. Il a dit que la démocratie - j'ai noté très exactement ses propos - ne doit pas pénaliser la gestion de l'Etat. On constate là une certaine conception de la gestion de l'Etat : la démocratie est une chose positive, mais elle ne doit pas pénaliser la gestion de l'Etat. Mais c'est le contraire ! La démocratie doit inspirer et diriger la gestion de l'Etat. A voir comment le conseiller d'Etat en charge de ce dossier a pris en main l'affaire - lui qui est pour une gestion de l'Etat avec le moins de démocratie possible - de la démocratie, nous allons être effectivement obligés de vous en donner ! Comme le soutenait un commentateur avisé qui, je crois, est à la tribune du public, le référendum part victorieux. (Chahut indescriptible. L'orateur est constamment pris à partie.)
Une voix de droite. Ne crie pas, tu te fais mal !
M. John Dupraz. Alors, pourquoi tu te plains ?
M. Pierre Vanek. Je souhaiterais, cher ami, ne pas avoir à consacrer mes week-ends à la récolte de signatures !
Une voix. Vas-y tout de suite !
M. Pierre Vanek. Mais tu devrais venir avec moi, puisque tu penses que le peuple et ses représentants doivent se prononcer ! Mme Polla a posé la question de savoir s'il fallait fermer la clinique de Montana ou l'hôpital cantonal. Si cela est un avant-goût de la démagogie que vous entendez nous servir lors de la campagne référendaire, vous êtes assez mal partis ! A l'évidence, les conditions du débat ne sont pas celles-là. Vous avez voulu faire le forcing sur ce dossier de manière abusive. C'est une habitude que, apparemment, vous prenez. Mme Polla, dans son intervention, a estimé qu'une commission servait à rafistoler un consensus. Non, pas seulement ! Elle sert aussi et surtout à clarifier les positions des uns et des autres, à entendre les personnes concernées.
Nous avons constaté une volonté - nous la constaterons probablement aussi pour le SAN - d'aller au pas de charge, de ne pas entendre les personnes concernées sous prétexte que, de toute façon, il y aura un référendum. C'est une manière de saper le fonctionnement normal. Et un fonctionnement normal entre une majorité et une opposition n'est pas forcément un consensus. Mais les institutions parlementaires telles que le Grand Conseil doivent pouvoir fonctionner, y compris lorsqu'il y a une réelle opposition. (Applaudissements.)
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). En préambule, j'aimerais remercier M. Froidevaux de sa déclaration. Il est vrai que son vote ne correspondait pas à ses propos, et je constate que les «mesures de contrainte» sont déjà en vigueur au sein du parti radical.
Ce soir, nous avons beaucoup parlé de procédure, d'aspects financiers, de la grave question du chômage, et je n'y reviendrai donc pas. Par contre, j'aimerais dire que, dans ce débat, nous avons constaté l'attitude méprisante et méprisable de l'Entente face à des citoyens qui souhaitaient se faire entendre en commission, demande que vous n'avez pas voulu accueillir. Votre attitude a été tout aussi méprisante et méprisable après le vote. Visiblement, vous n'aviez plus rien à entendre, votre décision était prise.
Permettez encore à quelqu'un qui, professionnellement, côtoie des malades, chroniques pour la plupart, d'apporter encore un élément. Il a été dit, par Mme Polla, M. Blanc et M. Dupraz tout particulièrement, que les malades soignés à Montana pouvaient tout aussi bien l'être dans des unités ici à Genève. C'est une attitude tout aussi méprisante et méprisable vis-à-vis de ces patients. Etre soigné, être hospitalisé, pour un malade chronique, à Genève, n'a pas du tout la même valeur que de pouvoir partir à Montana en séjour de soins. Je crois que... (Mme Reusse-Decrey est prise à partie par M. Dupraz.) Non, je ne suis pas médecin ! Mais je passe probablement plus de temps aux côtés des patients qu'un médecin, Monsieur Dupraz. Voilà ce que j'avais à dire sur cet aspect.
En conclusion, je souhaite dire une chose. Visiblement, ce débat est ingérable. Les députés, avant de se prononcer, ont droit à prendre connaissance d'un certain nombre de documents et lettres. La demande de lecture en a été faite et je ne vois pas comment nous allons nous en sortir.
En fonction de l'article 78 qui autorise en tout temps une demande de renvoi en commission, je souhaite déposer une telle demande. En effet, vu ce que je viens d'expliquer sur le déroulement du débat et étant donné qu'un certain nombre de députés de droite sont venus vers nous après le vote pour nous exprimer leur malaise, à l'image de M. Froidevaux, je pense qu'il faut redonner au parlement la possibilité de renvoyer ce projet de loi en commission.
M. Andreas Saurer (Ve). Monsieur le président, ne devons-nous pas voter maintenant la demande de renvoi en commission ? (De nombreux députés soutiennent la demande de M. Saurer.)
Le président. Je comptais laisser parler les personnes inscrites. Si vous voulez le vote de renvoi en commission tout de suite, vous pouvez l'avoir !
M. Andreas Saurer. Je pense qu'il faut d'abord voter. (Brouhaha indescriptible.)
Le président. Sur le renvoi en commission, vous avez la parole, Monsieur Grobet.
M. Christian Grobet (AdG). Je souhaite appuyer la demande de Mme Reusse-Decrey de renvoi en commission qui, du reste, avait déjà été formulée tout à l'heure, je tiens à vous le rappeler, par une députée de notre groupe, Mme Danielle Oppliger. A mon avis, ce renvoi se justifie pleinement en raison des arguments même qui ont été développés par le Conseil d'Etat pour justifier ce projet de loi. En effet, nous avons entendu, en guise de préambule, une déclaration de M. Haegi qui, contrairement à Mme Polla, ne disait pas que le Conseil d'Etat n'avait pas d'état d'âme. Vous avez effectivement émis quelques sentiments, semble-t-il, au sujet de la fermeture de cette clinique que vous avez justifiée, essentiellement et quasiment uniquement, pour une seule raison, à savoir l'état des finances cantonales.
Du reste, dans les interventions de la majorité qui vous soutient inconditionnellement, c'est le seul argument consistant que nous avons entendu, puisque Mme Polla a été jusqu'à dire qu'il ne fallait pas avoir d'état d'âme en matière de fermeture d'hôpitaux parce que, en fait, le seul problème, c'est de sauver les finances publiques. Je ne reviendrai pas sur les arguments que M. Segond a développés. Le seul consistait à dire que la diminution du taux d'occupation de la clinique de Montana - je relève que, dans ses dix raisons, il s'est bien gardé de parler du taux d'occupation de l'hôpital cantonal parce qu'il est aussi en diminution, bien que le nombre de patients...
Le président. Monsieur le député, je vous rappelle que l'on parle du renvoi en commission !
M. Christian Grobet. J'y arrive, précisément. Donc, par voie de conséquence, il faudrait peut-être aussi fermer l'hôpital cantonal si on suivait son raisonnement. En fait, Monsieur Segond, le véritable motif que vous visez ( Mme Calmy-Rey l'a dit tout à l'heure ) est le démantèlement des institutions. Mais pour cela, vous invoquez des raisons budgétaires. Or, il y a une contradiction flagrante à vouloir voter ce soir une mesure qui s'inscrit dans votre politique budgétaire en la dissociant du vote du budget.
Je le dis d'autant plus volontiers que vous avez tout de même omis de préciser une chose dans votre déclaration, Monsieur Haegi. Mais j'avoue que c'était un peu gênant pour vous de rappeler une telle chose en séance plénière. En effet, dans le cadre de la procédure devant le Tribunal fédéral, je vous rappelle, tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs les députés, que le Conseil d'Etat a été jusqu'à affirmer au Tribunal fédéral - alors que le 15 juillet le Conseil d'Etat avait envoyé un communiqué à la presse pour faire part de sa décision de fermer la clinique genevoise de Montana - qu'il n'avait pris aucune décision, que c'était uniquement - M. Segond ne me contredira pas, il écoute avec beaucoup d'attention - un acte préparatoire du budget que vous aviez fait ce 15 juillet. Vous l'avez répété dix fois dans votre mémoire au Tribunal fédéral. C'est uniquement un acte préparatoire du budget !
Donc, vous écrivez au Tribunal fédéral que votre désir de fermer la clinique de Montana est un acte préparatoire du budget et, aujourd'hui, vous voulez dissocier cette décision du budget. Il y a une totale contradiction et je pense que c'est grave, parce que, tout à l'heure, quelqu'un a signalé que dans le budget vous avez estimé que les dépenses pour les chômeurs seraient de 220 millions l'année prochaine.
Mais qui nous dit qu'elles ne seront pas que de 215 millions ? Qui nous dit qu'à la fin de l'examen du projet de budget que nous allons débattre demain on ne va pas trouver 5 millions d'économies ? M. Blanc prétend que ce n'est plus possible. Mais qui nous le dit ? Qui nous dit qu'on ne trouvera pas des économies, par exemple sur les subventions que M. Haegi propose effectivement en matière d'acquisition d'appartement par la classe aisée de la population ? (Applaudissements d'une part, huées de l'autre.) Sachant du reste l'attention extrêmement attentive que votre majorité porte toujours à l'examen du budget pour trouver des économies, j'ai peine à croire que vous ne trouverez pas une économie d'un millième sur ce budget de l'Etat. Or, si cette économie de 5 millions était trouvée, la fermeture de la clinique de Montana ne se justifierait plus. Votre argumentation ne tient donc pas.
Par voie de conséquence, la seule décision cohérente est de renvoyer ce projet de loi à la commission des finances pour qu'il soit traité dans le cadre du budget, selon la thèse que vous-même défendez devant le Tribunal fédéral. Alors, soyez conséquents avec vos propres propos. (Vifs applaudissements.)
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. M. Grobet met en cause l'argumentation du Conseil d'Etat dans les mémoires au Tribunal fédéral : premièrement, je confirme que la décision du 15 juillet, prise par le Conseil d'Etat, s'inscrit dans la préparation du budget. C'est un acte préparatoire du budget, elle consiste, au moment où nous adoptons le projet de budget, à supprimer la subvention de Montana.
Deuxièmement, vous le savez très bien, Monsieur Grobet, nous ne pouvons pas saisir le Grand Conseil d'un projet de loi avant qu'il ne se réunisse, raison pour laquelle vous êtes saisis aujourd'hui de ce projet de loi, ce qui est parfaitement normal et correct.
Troisièmement, lorsque vous avez entendu l'annonce du dépôt de ce projet de loi, différents milieux politiques et syndicaux ont dit : «Nous lancerons un référendum contre cette loi.». Et c'est précisément à la suite de cette annonce de référendum que, tout à l'heure, il a été demandé la discussion immédiate, de telle façon que, si référendum il doit y avoir, il ait lieu avant le vote du budget. Si le vote populaire confirme la fermeture de la clinique de Montana, le budget ne changera pas. Si le vote populaire indique la volonté de garder la clinique de Montana, le Grand Conseil portera le 16 décembre la somme nécessaire au projet de budget 1995. (Applaudissements.)
M. Andreas Saurer (Ve). Je souhaite développer quatre arguments expliquant pourquoi le renvoi en commission me semble être une mesure judicieuse. Tout d'abord, Monsieur Segond, vous dites que vous avez une politique de la santé. C'est vrai, vous commencez à avoir un embryon de politique de la santé. En revanche, ici, nous sommes en présence de problèmes hospitaliers. C'est vous-même qui affirmez que nous n'avons pas actuellement les moyens de mener une politique hospitalière. C'est par ailleurs pour cette raison que vous avez présenté un projet de loi pour la restructuration des EPM. Pour le moment, nous n'avons pas de politique hospitalière.
Deuxième argument : l'utilité de Montana. Vous-même, dans vos exposés, ainsi que tout à l'heure Mme Polla, parliez d'une appréciation de la clinique de Montana sous l'angle des médecins hospitaliers. Dans un communiqué de presse, l'AMG «regrette de ne pas pouvoir, dans l'immédiat, avoir une vue d'ensemble de toutes les mesures d'économies qui seront prises». J'attire également votre attention sur le fait que ce n'est certainement pas un hasard que ce soient les médecins privés, y compris ceux des partis de l'Entente, qui ont exprimé des doutes extrêmement sérieux concernant la fermeture de la clinique de Montana.
Troisième point : l'histoire de la vétusté. J'attire votre attention sur l'appréciation des quatre médecins-chefs des cliniques d'altitude de Montana qui écrivent «qu'ils n'avaient pas eu l'impression d'un état de délabrement ou de vétusté nécessitant des travaux imminents. Dans son état actuel, la clinique nous paraît parfaitement exploitable.». Donc, brandir la nécessité d'investir 20 ou 30 millions dans la clinique de Montana n'est pas un argument aux yeux des personnes concernées.
J'en arrive à l'inexistence d'une politique hospitalière. Nous avons eu des débuts de débats à la commission de la santé, mais nous n'avons pris aucune décision concernant la politique hospitalière, car nous ne sommes pas en possession du rapport Gilliand qui constitue, évidemment, une base essentielle. Par rapport à la priorité hospitalière, Madame Polla, êtes-vous vraiment convaincue que les divisions spécialisées, comme la division d'allergologie, sont indiscutablement plus vitales que la clinique de Montana ? Monsieur Segond, croyez-vous vraiment que l'exploitation de la Zone sud est très clairement prioritaire ? Je vous rappelle que le budget total de l'ensemble des EPM s'élève à un milliard. Et vous croyez que les 5 millions que nous devons trouver dans ces dépenses doivent être précisément ceux consacrés à Montana ? Je défie quiconque, dans cette salle, même vous, Monsieur Segond, de nous expliquer clairement pourquoi ces 5 millions doivent être trouvés à Montana. Vous n'avez pas la possibilité de nous l'expliquer. C'est totalement impossible. Donc, face à cette impossibilité, je ne peux qu'appuyer le renvoi en commission pour que nous puissions débattre de la politique hospitalière.
M. Pierre Meyll (AdG). Je n'avais pas l'intention de m'exprimer dans ce débat - il y a des spécialistes pour le faire - mais, malgré tout, j'aimerais préciser un élément. J'ai entendu Mme Hagmann, députée libérale, s'exprimer à la radio sur l'état du bâtiment de la clinique de Montana. Elle le trouvait fort beau. Elle a également mentionné le laboratoire inauguré au mois de juin dernier et réalisé pour une somme de, me semble-t-il, 300 000 F. Elle a également précisé qu'elle ne changerait pas d'avis.
J'ai écouté avec intérêt la profession de foi du docteur Froidevaux, et je dois dire que cette déclaration apporte la preuve... (Des députés éclatent de rire) ... il y a des rires «boeufs» qui remplacent le veau ! (Applaudissements et sifflets.) Cette déclaration apporte la preuve publique qu'il y a une mise sous boisseau des pensées de certains, et je trouve que c'est dommage. C'est pour cela que je m'adresse à ceux qui, à droite, ne pensent pas que l'esprit d'Esculape doit passer en Segond... (Rires et vifs applaudissements.) J'espère que ceux-ci auront la force de caractère de refuser un vote grégaire, et qu'il accepteront de voter le renvoi en commission, ce qui est un minimum de l'expression démocratique. Et ce n'est pas le Bon Génie qui me dira le contraire !
M. René Longet (S). Je souhaite appuyer la demande de renvoi en commission. M. Segond nous a fait un argumentaire tout à fait curieux. Monsieur Segond, vous nous dites que, du moment que l'on parle de référendum, le débat au Grand Conseil ne se justifie plus et l'on peut agir comme aujourd'hui. Et que le peuple se débrouille ! Je crois que ce n'est pas si simple, et vous le savez très bien. Il suffirait qu'on évoque le lancement d'un référendum, et le Grand Conseil serait déchargé de ses torts ! C'est réellement aberrant.
Ce soir, ce débat est l'illustration même que la décision de tout à l'heure, qui était la prolongation d'un esprit cherchant le coup de force de discussion immédiate, était une décision erronée et ingérable, et devient franchement une décision irresponsable. Car en cas de référendum, avec ce qui s'est dit ce soir, que saura le peuple sur les vraies motivations du Conseil d'Etat ? Je ne vais pas revenir sur ce que les spécialistes en la matière, notamment les docteurs Hausser et Godinat, ont excellemment dit.
En prenant les pages 10 et 11 de l'exposé des motifs, on se pose des questions à chaque point. On a envie d'en savoir davantage. Mesdames et Messieurs des partis de l'Entente, si vous êtes objectifs et mettez de côté la politique politicienne, vous serez d'accord qu'à chaque ligne il y a matière à question. Sur la position de l'AMG, par exemple, on a tout entendu ! C'est le secrétaire, ce n'est pas le secrétaire. On n'en sait rien ! La moindre des choses, si vous voulez en découdre devant le peuple, c'est de pouvoir vous justifier de ce qui a été réellement dit. Personne ne sait ici ce que pense l'AMG, et pour cause, nous ne l'avons pas entendue ! C'est le même problème pour d'autres personnes concernées. Personne ne sait ce que pense le professeur Gilliand, parce que personne n'a lu le rapport. Personne ne sait, en termes de rapport coûts/économies, qu'elle est la situation. C'est de l'irresponsabilité !
Non seulement nous bradons Montana, mais nous bradons nos responsabilités. C'est pour cela que je vous invite à mettre entre parenthèses le mauvais esprit qui vous a saisis tout à l'heure et à penser à ce que nous aurons à dire aux électeurs. Nous, nous savons ce que nous allons leur dire, mais vous, je souhaite que vous sachiez ce que vous aurez à leur dire. Vous aurez à vous justifier de votre légèreté. Je pense que la démonstration est faite que nous ne pouvons pas continuer ainsi. Nous avons besoin de savoir au moins trois choses.
Premièrement, comment la clinique de Montana s'insère-t-elle dans la politique hospitalière ? Maintien ou suppression ? Deuxièmement, que pense l'expert ? Nous avons le droit de lire les trois cents pages, si nous le voulons, pas seulement les vingt du résumé. Nous avons le droit et le devoir d'entendre les personnes concernées, et pas en plénière, mais, comme habituellement, en commission. Nous avons également le droit de regarder d'un peu plus près ce qu'il en est de l'article 80 A de la constitution, cité à la page 12 de l'exposé des motifs, puisqu'il y a en même temps vente du patrimoine de l'Etat. Qui d'entre nous sait quelles sont les conditions de la vente immobilière ? Qu'allez-vous dire au peuple à ce sujet ? Je vous rappelle les propos de Mme Calmy-Rey. Ils vont hautement intéresser de nombreuses personnes. Où est l'intérêt public ? Je ne crois pas, et vous le savez très bien, que l'on défende ainsi l'intérêt public.
Je vous demande de saisir l'occasion qui est offerte, après votre piteuse démonstration, de renvoyer en commission ce projet de loi et, ainsi, de finir dignement ce débat, dans le sens prôné par M. Vanek, à savoir que ce soit une franche opposition ou un consensus, il faut que le débat se fasse dans la clarté.
M. Christian Ferrazino (AdG). Quelques observations sur le renvoi en commission suite aux propos de M. Segond. Monsieur Segond, en vous écoutant, on constate que vous préjugez totalement du résultat de l'examen du budget qui aura lieu en décembre.
Comment pouvez-vous affirmer ce soir que nous ne trouverons pas 5 millions d'économies dans l'examen du budget ? Pouvez-vous l'affirmer ? Vous ne pouvez pas l'affirmer. Donc, si nous les trouvons, le projet de loi n'aura plus besoin d'être voté, puisque la seule raison invoquée à l'appui de la suppression de cet établissement hospitalier est une raison financière. Vous l'avez dit vous-même tout à l'heure. Par ailleurs, vous l'avez écrit dans votre réponse au Tribunal fédéral.
C'est votre seule explication. Cette décision s'inscrit dans votre politique budgétaire. Vous venez de reconnaître qu'il n'est pas impossible qu'en décembre dans cette enceinte nous trouvions 5 millions d'économies. Dans cette hypothèse, nous ne voterions pas cette loi.
Monsieur Haegi, Monsieur Maitre, ne soyez pas impatients ! Je vous pose simplement une question. M. Segond y a répondu. Il n'est pas irréaliste de penser que 5 millions puissent être trouvés. Dans cette hypothèse, vous mettez le parlement et la population que nous représentons devant le fait accompli.
Trois autres observations, Monsieur Segond. Tout d'abord, vous oubliez que nous avons voté le budget jusqu'au 31 décembre 1994. Par conséquent, pourquoi fermer la clinique le 30 novembre ? Il n'y a aucune raison de fermer cet établissement trente et un jours avant la fin de l'exercice qui a été budgété par la décision prise l'année passée.
Deuxième observation. Dans votre réplique au Tribunal fédéral, vous dites : «J'ai dû donner les congés rapidement parce que, dans les établissements hospitaliers, les réengagements doivent se faire au mois d'octobre.». Vous l'avez dit, oui ou non ? (M. Segond sourit, mais ne donne pas de réponse.)
Des voix. On l'a lu !
M. Christian Ferrazino. Je dis devant le Grand Conseil ce que M. Segond refuse de dire publiquement, mais il l'écrit dans le cadre des procédures judiciaires. Il prend ainsi moins de risques. Dire que les congés ont été donnés pour que les employés puissent trouver un autre emploi au mois d'octobre signifie que M. Segond pense que la clinique va fermer au mois d'octobre, car la clinique ne peut pas fonctionner sans employés. Voilà ce que vous cherchez, Monsieur Segond. Vous voulez nous mettre devant le fait accompli. Vous donnez congé parce qu'en octobre les gens peuvent retrouver un emploi dans d'autres établissements. Si tout le monde retrouvait un emploi, quelle que soit l'issue du référendum dont vous parlez, la clinique ne serait plus exploitée, parce que les employés ayant reçu le congé donné par M. Segond auront, le cas échéant, retrouvé un emploi dans un autre établissement hospitalier. Voilà la politique du fait accompli qui rendra vaine la décision du peuple. Il fallait le dire, Monsieur Segond. Il y a beaucoup de choses que vous taisez dans ce dossier.
J'entends insister sur un troisième élément qui justifie aussi le renvoi en commission, puisque c'est sur ce sujet que je m'exprime, Monsieur le président. Il est tout à fait possible de voter, et vous le savez, un budget provisionnel. Et si d'aventure le peuple devait vous suivre, Monsieur Segond, ou si, dans le cadre de l'examen du budget en décembre, nous devions trouver cette économie de 5 millions et constater ainsi qu'il n'est plus nécessaire de procéder à l'adoption de ce projet de loi, nous pourrions voter un budget provisionnel. Nous pourrions prendre toutes les décisions en décembre et reporter les effets de votre décision anticipée en février ou en mars. Faites le calcul, cela représente 800 000 F, donc moins d'un million. Ne venez pas nous dire aujourd'hui qu'il faut adopter ce projet de loi au pas de charge, éviter tant la discussion que le renvoi en commission, et donc l'audition des personnes qui l'ont demandé, puisque la démonstration est faite qu'il n'y a aucune nécessité, en tout cas pas budgétaire, de nous imposer aujourd'hui cette votation à ce rythme.
M. Chaïm Nissim (Ve). J'ai une petite suggestion à faire à notre président, Guy-Olivier Segond. Monsieur Segond, il y a une année, je me souviens bien, c'était la catastrophe dans les milieux de la gauche. Comment se fait-il que l'on ait un gouvernement monocolore ? C'est de notre faute, c'est pas de notre faute ? Qu'est-ce qu'on a fait ?
Je me souviens d'avoir inséré un petit article dans le Bulletin vert dans lequel j'avais écrit qu'il y avait tout de même des «écolos» au Conseil d'Etat : Guy-Olivier Segond et, peut-être, Philippe Joye. Je justifiais cela en disant : «Guy-Olivier Segond, regardez ce qu'il fait. Ne regardez pas de quel parti il est. Il a développé une politique de concertation à l'hôpital. Il a développé le projet Caducée où il décentralise les responsabilités, où il demande à chaque service de s'occuper au mieux de ses propres affaires. Et c'est de l'écologie, même si Guy-Olivier Segond appartient au parti radical.».
Monsieur Segond, pour moi, vous étiez un des espoirs que j'avais dans ce Conseil d'Etat. Vous l'êtes toujours ! (Aahh de l'assemblée. Sourires.) Et je suis sûr qu'au fond de vous-même vous êtes un homme de coeur. J'en viens maintenant à une des hypothèses qui a été abordée dans ce débat, notamment par Barbara Polla, mais aussi par vous, Monsieur Segond. Vous avez parlé des lits vides de l'hôpital et de la possibilité de centraliser sur l'hôpital toutes les personnes actuellement à Montana.
Je viens sur le renvoi en commission. L'OMS a publié plusieurs rapports pour s'interroger sur la taille optimale d'un hôpital. Ils mentionnent toujours 600 à 800 lits. Il s'agit donc toujours d'hôpitaux plus petits que notre hôpital cantonal. Pour l'OMS, il n'est donc pas logique de centraliser tous les lits. Au contraire, l'OMS préconise une décentralisation afin que les patients soient plus près des soignants pour créer ainsi de bonnes relations.
Monsieur Segond, pour me faire plaisir, retirez ce projet de loi ! Retirez-le dans l'honneur ! Vous pourriez le retirer sans perdre la face. (Rires et applaudissements.) Il est encore temps de le retirer. Vous pouvez dire : «Bon, j'ai fait une erreur, je m'en rends compte.». (L'assemblée s'écroule de rire.) Tout le monde peut faire des erreurs. Vous retirez ce projet de loi maintenant et vous gardez mon estime. En plus, le référendum - des experts comme M. Magnin le savent bien - sera en faveur de Montana, car les gens ne veulent pas payer plus d'impôts, mais ils ne veulent pas non plus moins de prestations. (Rires.) Sachant cela, retirez ce projet de loi maintenant. Réfléchissons à une politique hospitalière, comme le proposait mon camarade Saurer. (Un député tique en entendant le terme «camarade».) Oui, enfin, mon ami, mon collègue, mon chef de groupe... On arrivera peut-être à faire ailleurs ces 5 millions d'économies. Mais, pour l'instant, vous êtes mal embrayé. Je vous assure, faites ce que je vous conseille ! (Hilarité de l'assemblée.)
M. Claude Blanc (PDC). Pour appuyer le renvoi en commission, M. Ferrazino utilise une curieuse méthode. Il affirme qu'il suffit de trouver 5 millions ailleurs et qu'ainsi l'affaire est bouclée. Je me permettrai de vous rappeler que le budget prévisionnel pour 1995 accuse un déficit - n'est-ce pas, Monsieur Vodoz ? - de 370 millions, soit quelque 15 millions de plus que la cible fixée par le plan financier quadriennal. Il ne suffit donc pas de dire que, si l'on trouve 5 millions, la cible est atteinte. Ce sont 15 millions qu'il faudrait trouver pour atteindre la cible. On sait bien que l'on n'y arrivera pas. Mais il faut du moins ne pas renoncer à ces 5 millions. Je trouve donc votre justification un peu légère, Monsieur Ferrazino.
Mise aux voix, la proposition de renvoi en commission est rejetée.
M. Max Schneider (Ve). Je demande une suspension de séance. (Protestations.) Je demande que l'on interrompe ce point jusqu'à ce que nous ayons obtenu le rapport Gilliand pour que l'on puisse l'étudier, que l'on ait la possibilité de lire toutes les lettres que les chefs de groupe ont reçues et que nous puissions éventuellement prévoir des auditions. Cela prend du temps et ce n'est pas ce soir que l'on pourra le faire. Je propose donc un temps de réflexion et un temps pour demander ces auditions.
Cela dit, il y a un autre point - j'en avais déjà parlé tout à l'heure et je vois que l'on ne me répond pas - concernant les études financières du coût de cet hôpital et quels sont les scenarii qui ont été étudiés pour motiver cela sur le plan financier. Il y a trois ou quatre ans, lorsque l'on parlait de l'hôpital cantonal, on disait qu'il était - comme l'a dit mon collègue Nissim - trop grand, qu'il consommait énormément d'énergie, et il en consommait même tellement que durant l'été on devait extraire des mégawattheures de chaleur pour faire tourner la turbine. Aujourd'hui, ces mégawattheures que l'on dissipait dans la nature auprès de la centrale de chauffe de l'hôpital sont transformés pour refroidir la Zone sud, zone qui, d'ailleurs, est un gouffre financier.
Pourquoi ne s'attaquerait-on pas à ce gouffre financier, devenu gouffre social et psychologiquement mauvais, de cet énorme hôpital où le patient n'a plus de contact avec le médecin mais seulement avec les infirmières. Le médecin est souvent assisté par son professeur, ou les professeurs avec des assistants. Bref, pour avoir passé quelques séjours dans cet hôpital, je dirai que celui-ci est inhumain pour bien des gens. Voilà pourquoi je vous propose, comme mon collègue Nissim, de diminuer les coûts de l'hôpital cantonal et donc de ne pas forcément couper la subvention de la clinique de Montana.
Pour ne pas faire durer indéfiniment cette séance et arriver à une conclusion négative, je vous propose de suspendre ce point. Un grand nombre de personnes ont formulé des affirmations, notamment Mme Polla, et j'aimerais savoir si celles-ci sont vraies, raison pour laquelle je demande ces documents et éventuellement une part des auditions pour que ce débat puisse se poursuivre en connaissance de cause. Je fais donc cette demande formelle, Monsieur le président, soit d'interrompre l'examen de ce point ou de suspendre la séance.
Le président. Le Grand Conseil est parfaitement maître de son ordre du jour.
Mise aux voix, la proposition de suspendre la séance est rejetée.
M. Pierre-Alain Champod (S). Tout à l'heure, j'ai demandé que l'on donne lecture des lettres qui ont été reçues. Je réitère ma demande.
Le président. Je prie la secrétaire de bien vouloir donner lecture de ces courriers.
Christine Boccard-Budry
24, av. de Crozet
1219 Châtelaine Genève, le 9 août 1994
Concerne: Lettre ouverte
Monsieur,
Par la présente, je vous adresse ci-joint une lettre ouverte que j'aimerais voir paraître dans votre journal. (Il faut absolument continuer pour se défendre.)
Un grand merci d'avance.
Une copie de cette lettre sera envoyée:
à divers journaux, à G.-O. Segond, au Conseil d'Etat de Genève, au Grand Conseil genevois, à la FOBB et à la clinique genevoise de Montana.
Encore merci et recevez, Monsieur, mes meilleures salutations.
Christine Boccard-Budry
1219 Châtelaine
Concerne: Le futur décès brutal de notre clinique genevoise à Montana.
Quatre semaines après l'annonce de la fermeture de la clinique genevoise de Montana, je me décide à écrire, car cette triste nouvelle m'a beaucoup peinée. Je suis écoeurée que G.-O. Segond ait pu prendre une telle décision et décide du sort d'une centaine de médecins et d'aides-soignantes.
J'espère de tout mon coeur que toutes personnes habitant Genève et ailleurs continuent de bouger et de se manifester pour que notre clinique genevoise reste encore une éternité.
Pourquoi avoir effectué tous ces travaux: rénovation de la cuisine, création de chambres privées, etc.?
Où va-t-on pouvoir aller:
- pour se remettre des méfaits de la pollution,
- pour l'air vivifiant, l'eau pure du robinet,
- pour le repos idéal,
- pour les animaux familiers (oiseaux, écureuils),
- pour la qualité des soins, le confort,
- pour la disponibilité de tout le personnel?
J'ai été moi-même en cure 3 semaines en avril dernier; pendant mon séjour j'ai pu découvrir le dévouement des infirmières, docteur, doctoresse, sans oublier les physiothérapeutes, la diététicienne et l'assistante sociale qui se dévoue pour les réunions diverses: alcoolisme, drogués, activités créatricse, etc.
Toutes ces personnes y travaillant ont toujours le sourire, une réponse à toute question, surtout de la patience et il faut beaucoup en avoir.
On a fêté les 42 ans de Gogo, avec l'aide-infirmière et nous, patients: c'était merveilleux. J'ai pu le suivre juste après mon séjour, car il avait un cancer de la gorge, j'ai vu la différence pour cette personne, 2 petits jours passés à l'Hôpital cantonal de Genève, je ne vous raconte pas, c'était très dur, il ne demandait qu'à remonter à Montana le plus vite possible; à Montana, je l'ai suivi jusqu'à sa mort, eh bien, je remercie beaucoup pour l'aide des infirmières, médecins, etc., car ils m'ont énormément aidée pour le suivre dans ses dernières souffrances.
Pour moi, c'est la première fois que j'accompagne une personne et ça m'a beaucoup appris.
Je partage la tristesse de tous ces employés et patients qu'afflige cette fermeture de notre clinique.
Pour l'armée, l'armement, le sport, on trouve toujours de l'argent. J'espère que les autorités vont réfléchir à tout cela et que notre clinique continuera à recevoir des patients.
Que nos responsables prennent exemple sur d'autres pays voisins: sanatorium transformé en maison de repos, reconverti à nouveau en sana vu la remontée de la tuberculose.
Qu'ils réfléchissent au pourquoi de leur décision: Argent Roi?
Le président. Là où nous en sommes de notre emploi du temps, je vous propose une modification de notre ordre du jour consistant à renvoyer le point 77 traitant du service des automobiles et de la navigation à demain, 17 h.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
M. Andreas Saurer (Ve). J'aimerais juste poser une toute petite question à M. Segond dont la pensée est souvent très complexe, particulièrement pour moi qui suis, apparemment, un analphabète en politique de santé...
Une voix. Analphabète tout court !
M. Andreas Saurer. ...c'est certainement juste ! J'aimerais savoir quel est votre souhait profond en présentant ce projet de loi demandant la fermeture de la clinique de Montana. J'ai un peu l'impression que vous ne voulez pas supprimer Montana; en effet, n'espérez-vous pas, au fond de vous-même, le maintien de Montana pour que vous puissiez augmenter les impôts ?
M. Dominique Hausser (S). Je vous ai dit que je reviendrai sur les dix raisons pour ne pas fermer Montana, raisons qui ont été rédigées par les syndicats SIT et SSP/VPOD. Je crois que c'est important que vous entendiez à nouveau ces arguments, puisque je suis persuadé que certains ne les ont pas lus et cela mérite une petite analyse avant de prendre une décision définitive sur ce projet de loi.
La première concerne évidemment le premier argument du Conseil d'Etat. Si vous n'avez pas l'argumentaire du SIT, vous retrouvez les arguments du Conseil d'Etat en page 9 et suivantes dans l'exposé des motifs de ce projet de loi. Montana a été ouverte en 1903 pour traiter les personnes indigentes atteintes de tuberculose. La clinique n'a plus eu, par la suite, une vocation et une identité clairement définies, nous dit le Conseil d'Etat. Or, dans la loi sur les établissements publics médicaux, et en particulier à l'article 33 qui traite des cliniques genevoises de Joli-Mont et de Montana, il est dit que ces cliniques accueillent des malades pour des traitements ou des soins non intensifs, pour des hospitalisations intermédiaires ou de longue durée à caractère médico-social, ainsi que pour des convalescences.
Il est quand même extraordinaire de voir que, depuis bientôt cinq heures que nous discutons, on essaye de prétendre que cet argument, tel qu'il est avancé par le Conseil d'Etat, tient la route. C'est la loi qui doit être appliquée qui est contredite par le Conseil d'Etat lui-même. Sur ce point-là, je ne comprends déjà pas comment on peut le suivre.
Sur le deuxième point. Le taux d'occupation moyen est en baisse régulière depuis dix ans, passant de 79% à 72%. Il y a eu plusieurs arguments tout à l'heure disant que l'on pouvait calculer cela de manière extrêmement différenciée. Il est vrai que l'hôpital cantonal universitaire de Genève a, en moyenne, un taux annuel d'occupation de 80%. Il est clair que ce taux annuel doit être modulé en fonction de la saison, et c'est vrai non seulement pour Montana, mais aussi pour l'hôpital cantonal universitaire de Genève. Il est clair également que pour un établissement de 1 400 ou 1 500 lits, il y a évidemment plusieurs services et les taux d'occupation sont variables dans ces différents services et qu'on ne peut pas, simplement avec un chiffre moyen, tirer des conclusions hâtives. Par ailleurs, la discussion est de savoir quel est le taux optimal d'occupation d'un établissement, ce qui n'est en aucune manière évoqué dans ce document. C'est une chose qui devrait pourtant être discutée avant de décider si oui ou non un chiffre unique est un critère qui doit être retenu comme ayant une valeur quelconque.
Au point d), il est dit :
«malgré de nombreuses études et essais, une nouvelle définition de la clinique genevoise de Montana ne s'est pas concrétisée ces dernières années en raison du fait que les prestations nouvelles, envisagées ou offertes, faisaient double emploi avec celles qui existaient à Genève.».
Personnellement, j'aimerais, avant de prendre une décision, prendre connaissance de ces nombreuses études et connaître les résultats de ces nombreux essais qui viennent évidemment s'ajouter à l'important rapport du professeur Gilliand, de même que les lettres que nous avons reçues et autres documents.
Le point e), nous venons d'en discuter et nous attendons la lecture de ce rapport afin d'en tirer les conclusions...
M. John Dupraz. J'sais pas si tu sais, mais on l'a reçu ton papier du SIT !
M. Dominique Hausser. Mais c'est important d'en discuter aujourd'hui, car j'en aurais parlé en commission. Etant donné que nous sommes encore en discussion immédiate, je persiste sur ce sujet. Les conclusions que nous avons lues dans le résumé du rapport sont effectivement limitées à six lignes. Elles sont reprises dans l'exposé des motifs du Conseil d'Etat. Il est regrettable de ne pouvoir juger quelles sont les raisons qui ont poussé M. Gilliand à conclure de cette manière, d'une part sur Montana et, d'autre part, sur l'ensemble des remarques faites dans ce papier que j'ai beaucoup de difficulté à comprendre sans avoir effectivement les tableaux des chiffres qui sont certainement très intéressants à analyser.
Passons maintenant au point f), où il est dit :
«à supposer que cette définition nouvelle de la clinique de Montana ne fasse pas double emploi avec les équipements et les activités existant dans le canton, elle nécessiterait des investissements importants...»
L'argument fondamental avancé par le Conseil d'Etat, c'est de dire : «Vous voyez, les Bernois et les Lucernois ont investi il y a quelques années 22 et 27 millions dans leur clinique respective.». Voilà d'où sort le magnifique chiffre de 20 millions que l'on a évoqué à plusieurs reprises alors que l'on sait que, dans les dix dernières années, il y a eu pour moins de 10 millions d'investissements pour améliorer un établissement qui a une allure tout à fait acceptable pour un centre hospitalier public, même s'il appartient au canton de Genève, canton riche, comme tout le monde le sait.
Il est dit dans le point suivant que les équipements existant dans le canton sont largement suffisants. C'est vous qui le dites, Madame et Messieurs du Conseil d'Etat. A l'heure actuelle, nous sommes en pleine étude de la structure hospitalière en commission de la santé et nous n'avons pas encore pris de décision définitive, à savoir si oui ou non nous avons suffisamment d'équipements. Alors je ne comprends pas pourquoi l'on accepte un tel argument.
Enfin, si je ne m'abuse, nous arrivons au dernier argument. Je reviens sur la lettre de l'Association des médecins du canton de Genève, nous en avons largement discuté, M. Saurer vous en a lu quelques extraits et l'on se rend compte que, même si c'est le secrétaire qui l'a écrite, elle ne reflète pas exactement ce que l'on veut nous laisser entendre dans le rapport du Conseil d'Etat. Bien sûr que la clinique genevoise de Montana a été partiellement désaffectée, c'est une décision prise il y a un certain nombre d'années, puisque la structure préventorium-sanatorium était relativement inutilisée il y a déjà trente ans. Reconvertie en résidence pour classes de neige - d'ailleurs c'était formidable et beaucoup d'élèves dans ce canton en ont profité, je crois bien même en avoir fait partie à l'époque - j'ai beaucoup apprécié d'avoir passé quelques mois à faire du patin à glace. C'était une saison sans neige et plutôt que de souffrir dans un quartier couvert par le brouillard, il valait mieux être en altitude.
Si le canton du Valais a déclaré ces locaux insalubres, entraînant leur fermeture définitive en 1989, je ne vois pas le rapport qu'il peut y avoir avec la décision de fermer l'autre bâtiment de la clinique qui offre une série de prestations - on vous l'a répété à plusieurs reprises - extrêmement utiles dans le cadre de notre politique de soins. Je m'arrête ici et je reprendrai mon intervention tout à l'heure, si besoin est.
Le président. Monsieur Hausser, vous n'êtes pas à vos dix minutes, mais vous êtes à votre troisième intervention. A mon point de vue, vous avez donc fini.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. J'aimerais tout d'abord, à l'intention de M. Ferrazino, dire que nous avons aujourd'hui deux procédures en cours. La première est une procédure normale, régulière : le Conseil d'Etat présente au Grand Conseil, qui en débat longuement en discussion immédiate, un projet de loi. Et puis, nous avons une pluie de recours au Tribunal fédéral... Les deux instances vont se prononcer : le Grand Conseil, tout à l'heure, et le Tribunal fédéral un peu plus tard ! L'un va se prononcer sur des critères politiques, c'est le Grand Conseil. L'autre va se prononcer sur des critères juridiques, c'est le Tribunal fédéral. Nous attendons sa décision avec confiance : le Tribunal fédéral ne fait pas de politique, il fait du droit...
Des voix de gauche. Aaah !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. ...et vous, vous ne faites pas du droit, mais vous faites ici de la politique. Vous connaissez les recours, vous connaissez nos réponses. On ne va pas en débattre ici, nous n'avons qu'à attendre la décision du Tribunal fédéral.
Sur la discussion politique, qui a lieu dans cette enceinte, au fond, il y a, pour l'essentiel, cinq ou six points qui ont été évoqués. Je vais les prendre en répondant aux questions relatives aux travaux, au personnel, aux patients, à la politique hospitalière et, enfin, aux soins à domicile avant de terminer par les aspects financiers.
En ce qui concerne les questions relatives aux transformations, il est vrai que ces dix dernières années les autorités ont régulièrement effectué des travaux d'entretien. La valeur d'assurance des bâtiments est fixée à 40 millions. Le montant total des travaux effectués s'élève, pour les dix dernières années, à 4 millions de francs, pris sur les rubriques d'investissement, soit 1% par année de la valeur du bâtiment, ce qui est un taux d'entretien tout à fait normal. De ce fait, nous avons aujourd'hui un bâtiment en bon état, qui n'est pas moderne, mais qui trouvera certainement acquéreur à un bon prix.
Et les travaux à effectuer ? Si nous voulons tous garder Montana, nous ne pouvons pas conserver Montana en l'état, avec son identité mal définie : malgré les travaux qui ont été faits ces dix dernières années, aucune nouvelle définition d'activités médicales ou soignantes n'a rencontré le succès. Ces dernières années, il a été tenté de la transformer en centre de réhabilitation cardiaque ! Il y a eu un seul patient pour réhabilitation cardiaque ! Pourquoi ? Parce que ces nouvelles définitions faisaient double emploi avec les prestations existantes, généralement offertes dans les établissements publics médicaux genevois.
Si nous voulons trouver une nouvelle définition pour Montana, il faudra procéder à des transferts d'activités qui ont aujourd'hui lieu, ici à Genève, et qui devraient être déplacées à Montana. Les frais en investissements, en travaux, en équipements en matériel médical, diagnostique, n'ont pas fait l'objet d'une étude détaillée, mais si l'on se réfère à la moyenne des travaux effectués dans les différentes cliniques d'altitude, nous arrivons à 20 millions environ.
Deuxièmement, les questions relatives au personnel : vous avez dit, Madame Chalut, que proposer au personnel le réengagement dans les hôpitaux publics genevois était une plaisanterie. Ce n'est pas une plaisanterie, Madame : c'est la loi ! C'est l'article 24 de la loi sur le statut du personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, qui traite précisément du sujet qui nous occupe, la suppression d'activité. Il n'y a pas de faute professionnelle de la part des collaborateurs, il n'y a pas de faute disciplinaire : il y a une décision de supprimer un service, de supprimer une activité, de supprimer une fonction. Dans ce cas, l'article 24 dit que l'autorité a l'obligation de présenter aux collaborateurs des emplois de caractère équivalent dans la fonction publique cantonale.
C'est ce que nous avons fait. C'est la raison pour laquelle nous l'avons fait d'ailleurs dans le courant de l'été : les hôpitaux publics genevois sont, pour l'essentiel, des hôpitaux universitaires. Ils travaillent au rythme universitaire qui, comme vous le savez, commence l'année en automne. Les 400 à 500 engagements que nous faisons par année se font dans cette période. Si nous voulons offrir sérieusement cette possibilité, il faut le faire à un moment où les hôpitaux publics ont réellement la possibilité d'y donner une suite.
En ce qui concerne les licenciements, vous avez évoqué, Monsieur Ferrazino, la nullité de ces licenciements. Il y a une procédure en cours. Le Tribunal fédéral se prononcera.
En ce qui concerne les patients et en particulier le taux d'occupation, comment pouvez-vous dire que le taux d'occupation est en baisse, alors que le nombre de patients est en hausse ? Vous connaissez mal la manière dont les statistiques hospitalières sont tenues. Elles sont tenues sur la base du nombre de patients et sur la base de la durée moyenne de séjour exprimée par le nombre de journées d'hospitalisation. Vous pouvez très bien avoir plus de patients tout en étant moins longtemps à Montana, ce qui fait que le taux d'occupation a été en diminution continuelle à Montana ces dix dernières années.
Les prestations accordées à Montana sont juridiquement définies par la loi de la même manière que les prestations offertes par la clinique de Joli-Mont, mais, bizarrement, les médecins-conseils des caisses maladie contestent fréquemment les séjours à Montana mais n'ont pratiquement jamais contesté devant les instances arbitrales des séjours effectués à Joli-Mont. Cela est dû au fait que Montana n'a jamais eu, ces dernières années, une identité clairement définie, que souvent c'était de la convalescence, des séjours peut-être utiles d'un point de vue social mais qui ne sont pas pris en charge par l'assurance-maladie. D'ailleurs c'est si vrai que les instances hospitalières, médicales et soignantes, consultées nous ont indiqué qu'il n'y avait pas de nécessité médicale ou soignante à maintenir en activité une clinique comme celle de Montana.
Concernant la suppression des prestations : vous avez dit, Monsieur Clerc, que lors d'une rencontre mensuelle avec les syndicats à laquelle, d'ailleurs, vous participiez, je m'étais fâché tout rouge à propos d'un tract indiquant qu'il y avait des réductions de prestations dans les hôpitaux publics. C'est vrai, mais je ne me suis pas fâché tout rouge parce que les syndicats disaient cela - c'est votre droit, et je vous ai toujours laissé, c'est bien normal, distribuer tous les tracts que vous voulez dans tous les établissements médicaux - mais ce que j'ai trouvé particulièrement inadmissible, c'est que ces tracts étaient distribués aux patients psychiatriques. Et j'ai dit que cela était scandaleux de la part des syndicats...
Une voix libérale. Ouh ! C'est pas beau !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. ...qui, d'ailleurs, en ont convenu et se sont excusés de l'avoir fait. Que les syndicats distribuent des tracts au personnel, à des patients hospitalisés à l'hôpital cantonal, ce n'est pas mes affaires, je n'ai pas à l'empêcher et je n'aurais pas cette imprudence politique, mais qu'ils les distribuent à des patients qui n'ont pas toute leur capacité de discernement et sont hospitalisés dans des hôpitaux psychiatriques, je vous ai dit, à l'époque, que je considérais cela scandaleux et je vous le redis aujourd'hui. (Applaudissements de l'Entente.)
On peut dire qu'il y a, dans une certaine mesure, une suppression des prestations. Celles-ci, en effet, ne seront plus offertes à Montana. Mais, pour la population, il n'y aura pas une véritable suppression de prestations : ces mêmes prestations peuvent être données dans tous les hôpitaux publics genevois. La population n'aura pas une réduction de prestations hospitalières : elle continuera à être soignée, mais elle sera simplement soignée plus près de son lieu de domicile, à Genève et non pas à 200 km des familles.
Vous m'avez dit, Madame Reusse-Decrey, que les malades chroniques ont besoin d'un environnement qui soit harmonieux, paisible, naturel. Je ne sais pas si vous vous êtes jamais rendue à l'Hôpital de Loëx, qui est l'hôpital réservé aux maladies chroniques. Cet hôpital est situé dans l'endroit le plus paisible de Genève, dans une campagne parfaitement harmonieuse qui n'est pas, c'est vrai, à l'altitude de Montana, mais qui est dans un environnement nettement moins urbain que Montana.
M. Christian Grobet. Il y a une liste d'attente !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Il n'y a pas de liste d'attente à Loëx. Il n'y a aucune liste d'attente dans aucun des hôpitaux. Je vous mets au défi, Maître Grobet, de le démontrer. (Chahut sur les bancs de la gauche, M. Grobet se fâche.) Il n'y a aucune liste d'attente à l'Hôpital de Loëx !
M. Christian Grobet. Je connais quelqu'un qui a dû attendre dix jours !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. C'est qu'il n'y avait pas de nécessité médicale.
M. Christian Grobet. Je vous le présenterai !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Vous me le présenterez, je ferai sa connaissance ! (Rires épars.)
En ce qui concerne la politique hospitalière et ses aspects financiers : vous avez dit, les uns et les autres, que c'était un gage donné au rééquilibrage des finances que de supprimer Montana, mais que l'on pourrait faire des économies dans les autres hôpitaux et en particulier à l'hôpital cantonal. Mesdames et Messieurs, vous n'avez pas lu le projet de budget 1995 : dans ce projet de budget, il y a une diminution de 16 millions de subventions aux établissements publics médicaux qui, d'ailleurs, l'ont acceptée.
Si j'ai bien compris Mme Calmy-Rey, nous n'avons pas une attitude claire et cohérente pous les soins à domicile...
Mme Micheline Calmy-Rey. J'ai pas dit ça du tout !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. C'est le sens que j'ai retenu de votre intervention.
Le peuple a voté un centime additionnel pour avoir un développement de l'aide et des soins à domicile. Si le système d'aide et de soins à domicile fonctionne, on va constater une baisse de lits, une baisse des journées d'hospitalisation et du nombre de patients dans les hôpitaux universitaires. Sinon, à quoi servirait l'opération ? L'opération avait précisément pour but d'éviter des hospitalisations et de pouvoir soigner, à des coûts moindres, un certain nombre de cas à domicile. C'est d'ailleurs ce que M. Maitre avait appelé «la preuve par l'acte». Après quatre ans de développement de l'aide à domicile, on devrait voir une diminution des budgets hospitaliers correspondant, peut-être pas franc pour franc, mais en tout cas million pour million, à l'augmentation du budget de l'aide à domicile. Vous aurez les détails : la rubrique figure à la page 265 de l'exposé des motifs, au chapitre 14.4 du département de l'action sociale et de la santé.
Vous avez dit, Monsieur Spielmann, que nous procédions au démantèlement de l'Etat social, que nous avions une politique de démantèlement des acquis sociaux. Monsieur Spielmann, ce n'est vrai ! Car si vous connaissiez le budget, vous verriez que, de 1994 à 1995, les prestations sociales aux personnes âgées, aux personnes handicapées, aux chômeurs et aux locataires sont en augmentation de 15% d'un exercice sur l'autre et que la dépense...
M. Jean Spielmann. C'est justement ce que j'ai dénoncé !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Vous dénoncez l'augmentation des prestations aux personnes âgées ?
M. Jean Spielmann. Oui !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Les prestations aux personnes âgées, Monsieur Spielmann ? (Rires et chahut sur les bancs de l'Entente. Huées, sifflets. Protestation de M. Spielmann.)
M. Jean Spielmann. Ce n'est pas de l'assistance.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Les prestations aux personnes âgées, ce n'est pas de l'assistance, c'est un droit ! (Opposition de M. Spielmann.) L'augmentation des prestations sociales, des prestations financières versées à des personnes physiques, que ce soient des personnes âgées, handicapées, que ce soient des locataires ou des chômeurs s'élève à 150 millions supplémentaires entre 1994 et 1995. Ce n'est pas un démantèlement, c'est une progression ! (Vifs applaudissements de l'Entente.)
Enfin, un dernier point à Mme Dupuis - que j'aime bien - qui a parlé de rhumatisme : je ne sais pas, Madame, qui vous a dit que j'avais suivi une cure Mességué à Crans. De ma vie, je n'ai jamais suivi de cure Mességué, ni à Crans, ni ailleurs ! Cette information qui vous a été donnée est tout à fait inexacte.
Pour le reste, et plus sérieusement, j'aimerais vous inviter, au nom du Conseil d'Etat, à voter le projet de loi qui vous a été soumis, avec une correction de l'erreur de plume qui a échappé au moment de l'impression. Le texte correct est dans l'exposé des motifs. Le Conseil d'Etat dépose, auprès du président du Grand Conseil, un amendement. C'est naturellement «l'Etat de Genève» qui est propriétaire. (Longs et vifs applaudissements de l'Entente.)
M. Gilles Godinat (AdG). Je serai très bref, mais je suis profondément insatisfait des réponses de M. Segond sur tous les points. (Manifestations de ras-le-bol sur les bancs de l'Entente.) Quand vous parlez des investissements de ces dernières années, annoncez des chiffres exacts, pas n'importe quoi ! 4 millions ! Mais de 1990 à 1994, c'est plus de 7 millions !
La définition nouvelle. Vous savez très bien le travail que le Dr Beyeler a fait ces dernières années. Laissez-le parler librement, il en témoignera. Le Dr Favre, que vous avez nommé tout récemment, a voulu effectivement développer le créneau de la rééducation cardiologique. Mais parmi toutes les autres prestations, ce n'était pas le créneau de Montana, ne faites pas de la désinformation. (Ton énervé de l'orateur.) Les comparaisons avec les autres cliniques, je vous lis intégralement le texte qui vous a été communiqué et qui est une lettre ouverte. Je suis scandalisé par vos propos, Monsieur Segond. Je m'excuse, mais je suis énervé quand on dit des contrevérités !
Une voix. On se calme !
M. Gilles Godinat. Je me calme, je me calme ! Je vous lis un passage de la lettre du Dr Frey, que vous connaissez par ailleurs bien. Je cite :
«Nous nous sommes demandé également si l'Etat de Genève ne se coupait pas la possibilité, dans le futur, d'avoir un établissement qui pourrait faire face à des problèmes de maladies infectieuses. En effet, comme vous le savez, il existe un accroissement mondial de la tuberculose avec apparition de germes résistant à de nombreux antibiotiques, particulièrement dans les pays de l'Est et aux USA. En plus, l'épidémie du sida se poursuit.
»On sait également que les germes résistants se trouvent surtout dans les hôpitaux et que les problèmes n'existent pratiquement pas dans les cliniques d'altitude. Nous remarquons finalement que de nombreux cantons ont récemment fait des investissements dans des cliniques d'altitude (...).
»De plus, le canton de Vaud a créé à Rolle une unité de réadaptation pulmonaire moyennant un investissement minimal.
»La réadaptation a pris de plus en plus d'importance ces dernières années et cette réadaptation pourrait parfaitement se faire dans les locaux actuels de la clinique genevoise d'altitude, que ce soit la réadaptation orthopédique, rhumatologique, ou psychiatrique, et j'ajoute, sans investissement supplémentaire.».
Pour le replacement, vous savez très bien que ce n'est pas une réalité. Sur le plan juridique, bien sûr, mais proposer à des gens qui vivent en Valais depuis vingt ans, qui ont leur maison, leur famille, des enfants qui vont à l'école, de se déplacer à Genève, s'est absurde ! En plus, vous dégraissez à Genève. Le taux de personnel hospitalier a diminué, vous faites des plans de PLEND pour que les travailleurs hospitaliers quittent les institutions et vous voulez nous faire croire que vous avez toute la place pour les engager à Genève. Vous vous moquez de nous !
Les diminutions du taux d'occupation, c'est faux. Il y a une stabilisation, ça fluctue, ce n'est pas du tout linéaire.
Enfin, la confusion d'identité. Je vous ai dit, c'est vrai, qu'au niveau de la loi il y a une confusion, parce que, en 1985, lorsque l'on a fait la fusion administrative de Joli-Mont et de Montana, on a mis un fourre-tout dans la loi : convalescence, maison de soins, etc., et c'est vrai qu'il n'y a pas d'identité à ce niveau-là. Mais sur le terrain, ce que je vous dis et que j'ai tenté de vous démontrer, c'est que, dans l'activité quotidienne de la clinique, il y a une spécificité. Le Dr Beyeler a essayé de vous convaincre. Si vous n'êtes pas convaincu... Bon !
L'information aux patients psychiatriques. Je suis désolé, mais moi je trouve légitime que l'on informe des patients même s'ils sont en état de troubles psychiques, parce que cela fait partie... (Vives protestations de l'Entente.) Je suis désolé ! Nous avons le devoir d'informer les patients, nous psychiatres, quand nous les internons et que nous estimons même que leur capacité de discernement n'est pas adaptée. J'estime que donner une information qui les concerne est une responsabilité. (Chahut.) Enfin, je suis désolé, mais je continue de prétendre que les prestations de Montana ne peuvent pas être offertes dans tous les établissements hospitaliers genevois. (Applaudissements.)
M. Jean Spielmann (AdG). Je comprends que M. Segond, avec le dossier qu'il doit présenter, soit obligé de faire ce qu'il n'avait jusqu'à présent pas eu l'habitude de faire, c'est-à-dire falsifier les interventions des uns et des autres. (Protestations.) Il est obligé de cacher les rapports et les documents juridiques, de proférer des contrevérités sur les différents éléments, que ce soit sur le dossier médical ou sur le dossier financier, parce qu'en définitive tout cela résulte d'une politique que j'ai évoquée au début de ma première intervention. J'ai dit tout à l'heure que nous étions à un moment charnière, à une étape extraordinairement importante de la vie politique genevoise, et j'essaierai d'en énumérer un peu les conséquences.
J'aimerais, tout d'abord, répondre à ce que M. Segond a dit. Il est certes facile de faire de la démagogie, et vous allez expliquer aux gens ce que vous venez de dire tout à l'heure. Quant à moi, j'ai dénoncé au cours de ce débat de voir au budget des investissements de 220 millions de F pour le chômage. Je ne suis pas sûr qu'il soit social et intelligent que notre collectivité investisse sur l'avenir en mettant 220 millions de F pour payer des chômeurs alors qu'elle réduit pratiquement de moitié ses budgets d'investissements et les travaux.
Et à vous autres, là-bas, qui parlez et qui êtes venus manifester avec des calicots. Ce n'était pas dans vos habitudes, mais vous avez demandé une augmentation des investissements et une politique de l'emploi. Que direz-vous lorsque l'on réduira de moitié les investissements et que le seul investissement important sur l'avenir sera le chômage ? C'est ça votre politique ? J'ai dit qu'il valait mieux dépenser notre argent pour donner du travail socialement utile et voilà que le conseiller d'Etat en charge de la politique sociale est le premier à faire des licenciements collectifs de manière illégale.
Je reviens sur le fond du problème, à savoir le démantèlement de la politique sociale, les manquements graves à la couverture sociale, à la politique de prévoyance. La politique d'assistance, je ne veux pas la diminuer, c'est une conséquence de votre mauvaise politique. Mais c'est de la mauvaise gestion et si l'on avait une politique de prévoyance sociale plus élaborée, si vous n'étiez pas en train de mettre en place une dixième révision de l'AVS, dont on attend les réponses, si vous n'aviez pas refusé l'initiative populaire pour que les personnes âgées puissent, au cours de leur vie active, se prémunir socialement pour la fin de leurs jours, si vous n'aviez pas suivi les voies tracées par la huitième et la neuvième révisions de l'AVS qui ont à elles seules provoqué une diminution de plus de 60 000 personnes assistées par les prestations complémentaires, nous n'en serions pas là.
La diminution des prestations sociales et la diminution de la politique de protection sociale conduisent à une explosion des coûts d'assistance dans les budgets des collectivités publiques, et sur le plan financier c'est une absurdité. C'est encore beaucoup plus grave sur le plan humain, et c'est pour cela que je ne suis pas satisfait de voir l'explosion des prestations d'assistance. Oui, je les dénonce, je trouve cela scandaleux, pas normal et c'est une faute politique pour des gens qui ont la gestion de la collectivité publique. Vous êtes satisfaits de dire ici que vous augmentez de manière extraordinaire les prestations aux chômeurs, aux invalides et aux assistés ? Ça vous fait plaisir de voir une société se développer comme ça ? Vous êtes responsables du développement et de la gestion de notre société et je considère qu'au niveau des propositions que vous faites, au niveau de votre politique et du budget, une politique de plein-emploi, de protection sociale, aurait d'autres effets que celle que vous proposez aujourd'hui. C'est ce que j'essaie de démontrer à chaque reprise. Alors, bien sûr, vous pouvez continuer à faire des interventions du style de celles que vous avez faites tout à l'heure, mais, parallèlement, les dépenses continueront aussi à augmenter.
Puisque j'en suis à ce problème essentiel - parce que, sur le fond, nous n'avons pas entendu grand-chose, si ce n'est la répétition des contrevérités énumérées tout au long de la campagne et qui le seront encore - il y a quand même un certain nombre de réalités et j'en viens au tournant politique auquel nous assistons aujourd'hui. C'est bien clair que vous aurez réussi trois opérations principales. La première, et je la trouve intéressante et porteuse d'avenir, vous avez ressoudé la cohésion de ceux qui vont se battre contre le démantèlement social. Vous avez, par votre attitude de refus de la discussion, par votre attitude de blocage, votre attitude sectaire qui fait que des députés du parti radical sont obligés de voter le contraire de ce qu'ils pensent... (Contestations sur les bancs du parti radical.) ...Et c'est ça la liberté ? Monsieur Dupraz, quand on est obligé de voter le contraire de ce que l'on pense, je trouve cela grave.
Première opération, vous avez ressoudé la cohésion de tous ceux qui s'opposeront à votre politique de démantèlement. Deuxième orientation, la politique financière. Il est quand même extraordinaire de voir que les partis qui nous font face, qui ont mis en place la politique fiscale et financière, qui ont refusé toutes les propositions permettant d'assainir la situation financière de l'Etat, ont, dans le cadre de la politique de révision des barèmes fiscaux, conduit une politique aberrante de gestion financière en multipliant les propositions qui vont encore augmenter les difficultés. Je pense à la suppression de l'impôt fédéral direct. Je souligne en passant les différentes mesures de transfert politique que vous avez approuvées, les décisions que vous avez prises pour supprimer l'imposition sur la spéculation. Le seul argument que vous avez pour fermer la clinique de Montana est un argument financier et je vous fais la démonstration que, sur ce point, vous vous trompez. Si vous en avez d'autres, Monsieur Beer, j'aimerais bien les entendre, car pour l'instant vous êtes plutôt resté muet.
Financièrement, les difficultés vont augmenter parce que vous prenez des mesures pour démanteler l'Etat social qui conduiront l'Etat à réduire ses activités. On arrive à un moment charnière, puisqu'on verra dans les mois qui vont suivre l'augmentation de l'âge de la retraite, la diminution des rentes AVS, l'augmentation de l'assistance, l'explosion des budgets d'assistance et le manque de prévoyance sociale conduisant à agrandir l'impasse financière. Ce n'est pas difficile de faire cette prévision, puisque les pays menant la politique que vous êtes en train d'appliquer, soit l'Angleterre et les Etats-Unis, se trouvent dans une situation totalement inverse avec une aggravation de la situation budgétaire et une nécessité de remettre en place la situation économique et politique.
Troisième observation de fond. Quand on vient ici avec une argumentation aussi faible que celle qu'a eue le Conseil d'Etat dans cette affaire, on comprend sa volonté de faire cela en cachette durant l'été, pour essayer d'éviter le débat, de faire aligner l'ensemble des députés qui, bien sûr, sont au garde-à-vous devant les décisions du gouvernement, sans même se donner la peine de réfléchir, et ceux qui se donnent la peine de le faire votent contre leurs idées. De plus, vous avez une presse à vos bottes qui sort la brosse à reluire à chaque occasion. Nous, nous avons la responsabilité aujourd'hui d'aller devant la population pour dénoncer votre politique et tenter le plus rapidement possible d'y mettre un terme.
M. Bernard Clerc (AdG). Comme j'ai été personnellement mis en cause par M. Segond, je tiens à préciser un certain nombre de choses. Tout d'abord, permettez-moi de faire une remarque générale. Depuis dix mois, dans ce parlement, j'ai découvert - je dois dire peut-être avec naïveté, mais aussi avec une certaine surprise - que l'on pouvait mentir en regardant l'adversaire droit dans les yeux, en sachant pertinemment que les faits que l'on avance sont faux. Je trouve cela particulièrement étonnant, j'en prends acte, ce n'est pas la première fois que je le constate. Personnellement, je maintiens que je resterai, à ce niveau-là, un naïf, et je refuserai toujours d'affirmer des choses et des faits qui ne sont pas exacts.
Cela étant, Monsieur Segond, vous savez très bien que je ne travaille pas dans le secteur hospitalier. Comment pouvez-vous dire que j'ai distribué des tracts à des malades psychiatriques alors qu'indépendamment de cela le Dr Godinat vous a dit en quoi une distribution de ce type-là n'était pas forcément en contradiction avec la déontologie de soignant ?
Je vous rappelle que, lors de cette séance, comme vous vous énerviez passablement, le ton était monté et je m'étais également énervé. Au bout d'un moment, vous m'avez dit - rappelez-vous - : «Ceci ne vous concerne pas, Monsieur Clerc, je m'adresse aux syndicats hospitaliers.». Et aujourd'hui, vous osez m'accuser d'un acte que je n'ai pas commis. Je trouve cela tout simplement scandaleux. Mais j'en reviens, pour revenir sur le fond, à l'exemple que j'avais donné. Monsieur Segond, que vous le vouliez ou non - et d'ailleurs, l'intervention mesquine que vous avez faite tout à l'heure, intervention de politique de bas étage, je ne trouve pas d'autres mots, montre et confirme ce que j'ai dit précédemment - vous avez cassé l'esprit de concertation avec les organisations syndicales. Nous en prenons acte et vous en subirez un jour ou l'autre les conséquences.
M. Christian Grobet (AdG). Je veux intervenir sur un seul point qui me paraît important. M. Guy-Olivier Segond justifiait les licenciements du personnel - ce n'est pas une satisfaction pour moi - sur la base d'une décision que vous avez prise de fermer l'établissement hospitalier. Je constate donc, une nouvelle fois, ce double langage que tient le Conseil d'Etat. Vous avez dit, devant le Tribunal fédéral, que vous n'aviez pas pris de décision, que c'était un acte préparatoire du budget. Dans votre intervention de ce soir, vous avez parlé à plusieurs reprises de décision. J'en prends acte, certainement que le Mémorial sera transmis au Tribunal fédéral pour que l'on sache bien de quoi l'on parle devant cette juridiction.
Mais j'en arrive au point essentiel qui me paraît particulièrement grave et significatif. Vous avez fait tout à l'heure allusion à l'Hôpital de Loëx qui est, effectivement, un hôpital bénéficiant d'un cadre exceptionnel, que je connais bien pour habiter à proximité. Cet été, j'ai connu quelqu'un qui souffrait d'une infection importante, qui, au demeurant, aurait souhaité aller à Montana. Mais comme ça touchait le coeur - c'est peut-être pour cela que si peu de cardiaques vont à Montana - l'altitude ne lui convenait forcément pas et il a, précisément, voulu aller à Loëx, en raison du cadre exceptionnel de cet établissement. Je tiens à préciser qu'il était hospitalisé dans un établissement privé, forcément coûteux.
Eh bien, il a fallu attendre dix jours pour qu'il trouve enfin une place à Loëx, et je peux vous dire qu'il l'a trouvée parce qu'il connaît des personnes travaillant à Loëx. On lui a fait savoir que l'attente risquait d'être longue, alors, quand vous dites qu'il n'y a pas de liste d'attente, c'est d'autant plus grave parce que cela signifie qu'effectivement les admissions se font peut-être sur des coups de piston. (Protestations.) Mais ce qui est certain en tout cas, et si vous en doutez, Monsieur Segond, je vous donnerai le nom de la personne, celle-ci a dû attendre dix jours avant de pouvoir quitter l'établissement privé où elle se trouvait en l'absence précisément d'un encadrement hospitalier pour aller à Loëx et trouver cet encadrement.
Lorsque vous prétendez que les gens hospitalisés à Montana pourront trouver des établissements publics de remplacement à Genève, à part, peut-être, des établissements privés, c'est faux et vous le savez. Du reste, la solution, Mme Polla l'a dit tout à l'heure, c'est l'hospitalisation à l'hôpital cantonal avec un coût journalier du double, voire même du triple, de celui de Montana. Voilà les économies que vous nous proposez. Bravo ! (Applaudissements à la tribune.)
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Je ne vais pas intervenir sur le fond du problème, à savoir si oui ou non la clinique de Montana doit être maintenue dans le cadre d'une politique hospitalière. J'aimerais néanmoins revenir un peu sur la procédure. Je m'étonne que l'on ait discuté durant plus de deux ans au sein de la commission de la santé de la loi K 2 1 ainsi que de la motion Giromini, où l'on a essayé de définir la politique de la santé à Genève sans qu'il n'ait jamais été question de la clinique de Montana. Je me pose la question de savoir, Monsieur Segond, pourquoi cette décision a dû être prise si rapidement. J'imagine que si vous y aviez pensé avant, vous nous auriez informés, comme il se doit dans une démocratie avec un parlement.
Par ailleurs, j'aimerais aussi parler du problème du transfert de personnel à Genève. Je viens d'apprendre que le salaire serait inchangé, par contre le statut du personnel le sera. Le ou la fonctionnaire transféré sera engagé comme employé, il ou elle sera soumis à un temps probatoire de trois mois, etc. Ces personnes pourront donc être licenciées sur-le-champ s'il le faut. On peut, dès lors, effectivement parler d'un licenciement collectif. On ne peut pas résoudre ce genre de problèmes de cette manière. Il faudrait une concertation avec les syndicats. On se demande aussi pourquoi le personnel n'était pas informé avant. Pensez à ces gens qui travaillent à Montana. La plupart du temps, ils ont une famille, un conjoint. Je me demande, si un des conjoints travaille en Valais et l'autre à Genève, comment ils doivent s'organiser pour avoir une vie de famille décente.
M. John Dupraz. Faut aller au PDC !
Mme Maria Roth-Bernasconi. Oui, tout à fait ! On fera peut-être moins d'enfants ! (Rires.)
Vous avez dit que vous appliquiez la loi, mais il y a aussi un autre principe en droit administratif, c'est le principe de la bonne foi. Et je me demande si ce devoir d'information de ne pas mettre les gens devant le fait accompli ne fait pas aussi partie du principe de bonne foi. J'aimerais bien que vous répondiez à mes questions.
M. Dominique Hausser (S). (Manifestations de lassitude de la part des députés de l'Entente.) Effectivement, c'est la troisième intervention que je fais en premier débat, mais je vous rappelle qu'il y a encore le deuxième et le troisième débat !
Monsieur Segond, cela fait un certain nombre d'années que l'on se fréquente dans les milieux politico-sanitaires, et cela fait un certain nombre d'années que chaque fois que vous vous adressez à moi, vous commencez par une petite phrase entre dénigrante et impertinente, ça dépend probablement un peu de votre humeur ou de la durée et de la longueur de la discussion. C'est vrai que j'attends chaque fois avec impatience de savoir si oui ou non vous allez la sortir ! (Eclats de rires de toutes parts.) Jusqu'à maintenant, vous la sortez à tous les coups, ce qui fait que... (L'assemblée pouffe de plus belle.) Attendez, attendez ! ...je perds systématiquement mon pari et je dois chaque fois offrir une bière à ma conjointe ! J'espère un jour gagner pour que je puisse, moi, me la faire offrir !
Revenons un peu sur le vif du sujet. Vous avez cité dans votre argumentaire toute une série d'experts, de gens que vous avez rencontrés, d'informations sérieuses, de chiffres, mais sachez que nous n'avons jamais vu la couleur de ces documents. Alors comment voulez-vous qu'on vous croie, que l'on puisse faire notre propre interprétation de ces documents, de ces informations certainement fondamentales et fort intéressantes ? On a parlé, à plusieurs reprises, de cet admirable rapport Gilliand. Moi, tant que je ne l'ai pas lu, je ne peux pas porter un jugement sur cette affaire et savoir si oui ou non les décisions que vous prendrez dans le futur seront cohérentes. Ce rapport, vous l'avez reçu le lendemain de l'annonce publique, alors, que vous ayez discuté avec M. Gilliand précédemment, je veux bien, mais vous n'aviez pas ce rapport !
Troisièmement, vous m'accusez de ne pas lire le budget. A part les membres de la commission des finances, nous n'avons pas encore reçu le projet de budget 1995. Bien sûr que je sais que vous faites des réductions de dépenses dans l'ensemble des établissements subventionnés. Ce n'est pas du tout ça dont je parlais tout à l'heure, mais la manière dont on organise l'ensemble de la politique de santé qui comprend les volets de promotion de santé et de prestations de soins. Et dans les prestations de soins, il y a, bien sûr, l'hôpital, mais il y a l'ambulatoire, le public, le privé; l'ensemble de ces dimensions doit être intégré dans la discussion. On ne peut pas simplement décider de faire une croix là-dessus. Sur ce plan, je ne peux pas vous suivre.
Vous dites que, dans le même temps, il y a une augmentation des soins ambulatoires et qu'il doit y avoir au budget une diminution identique des soins hospitaliers. Vous croyez vraiment que les prestations de soins hospitaliers sont forcément les mêmes que les prestations de soins ambulatoires ? Vous croyez vraiment que l'on peut faire une relation aussi simpliste en francs entre le soin ambulatoire et le soin hospitalier ? Je suis d'accord que des activités peuvent être transférées, mais toutes ne le sont pas et ce n'est pas forcément un équilibrage au million. Vous négligez le fait qu'un des éléments importants de la réduction des coûts d'hospitalisation c'est aussi les activités de prévention, de dépistage précoce, d'activités ambulatoires, et pas uniquement l'activité de soins à domicile en tant que telle.
Mme Barbara Polla (L). L'Entente est dans une situation de majorité par la volonté du peuple. Nous assumons cette situation avec toute la responsabilité qu'elle confère. Je regrette profondément que l'amertume étreignant M. Spielmann devant cette situation l'amène à être d'une malhonnêteté, par rapport au Conseil d'Etat, n'étant pas sans précédent. C'est amusant de voir qu'il aime à répéter les mêmes phrases. Il a parlé de «brosse à reluire», il parlait, lors de la première séance de cette législature, de «cirer les bottes au Conseil d'Etat». Je pense que le respect de l'autre dans le discours parlementaire est nécessaire, comme il l'est dans la démocratie.
Par ailleurs, j'aimerais revenir sur un certain nombre de points me concernant, d'une part, et qui, d'autre part, concernent l'ensemble. M. Grobet a déclaré que j'avais dit - il pourra relire, à cet effet, pour réaliser vraiment ce que j'avais dit, le Mémorial - que les patients qui n'iraient plus à la clinique de Montana retourneraient à l'hôpital cantonal pour des frais supérieurs. J'ai dit que la question se posait et que la réponse était bien évidemment non. Dans la mesure où d'autres institutions du canton offrent des avantages similaires, il n'y a aucune raison pour que, dans la situation actuelle des lits hospitaliers, les patients devant bénéficier du type de traitement de la clinique de Montana retournent à l'hôpital. Dans un temps ultérieur, quand une partie des lits de l'hôpital cantonal auront été convertis en des lits de soins plus chroniques, des lits d'approche du type de ceux qui se font à Montana, à ce moment-là, ce serait une solution, oui, mais dans l'immédiat, non.
On reproche au Conseil d'Etat de décider. Quel est le rôle d'un exécutif si ce n'est la décision ? (Commentaires sur les bancs de la gauche.) Mais il va aussi exécuter la décision, ça ne fait aucun doute. On nous dit que l'annonce de la fermeture de la clinique de Montana s'est faite en cachette, alors qu'elle s'est faite officiellement le même jour, auprès de toutes les instances. Monsieur Spielmann, je reviendrai sur le terme de «démantèlement social». Je crois qu'à ce stade aussi on peut se dire que ce n'est pas la peine d'argumenter. Quand un budget montre clairement une augmentation extrêmement importante dans le soutien aux priorités sociales comme, par exemple, aux personnes âgées et que, par dépit, parce que cette augmentation du budget dans l'investissement social a été réalisée par un gouvernement d'entente, on dise que c'est une assistance et que ce n'est pas un réel soutien aux personnes en ayant vraiment besoin, cela reflète une malhonnêteté foncière.
J'aimerais terminer par un point soulevé à plusieurs reprises et qui concerne l'Association des médecins du canton de Genève. Plusieurs personnes ici on dit que la prise de position de l'AMG est, en fait, le reflet de son secrétaire général. Cette prise de position est celle de son président, même si le courrier adressé à la presse est signé du secrétaire général.
En ce qui concerne le problème de l'identité de Montana - c'est un point sur lequel, au départ, je ne voulais pas intervenir - dans la décision consistant à dire que, par rapport à d'autres établissements qui ont une identité bien précise, la clinique de Montana a, elle, une identité plus incertaine. En 1973 déjà, au moment où la clinique de Montana a été rattachée à l'hôpital cantonal, la commission administrative de l'hôpital s'est penchée sur le problème de la vente de Montana. Elle a approché à ce moment-là les militaires en souhaitant en faire une clinique militaire, ce que les militaires ont refusé. Un élément d'histoire qui n'avait pas été évoqué.
Un dernier point, Monsieur Spielmann. Vous parlez du parti radical et des difficultés que les députés ont à y exprimer leur position. Je pense que M. Froidevaux a exprimé sa position avec une entière clarté et le fait qu'il ait dit qu'il se conforme à la décision de son groupe lui appartient entièrement. Je pense qu'il y a d'autres groupes dans cette enceinte où certaines positions de certaines personnes souhaitant poser leur candidature à certains postes, par exemple, n'ont pas été entendues de la même manière.
M. Jean Spielmann (AdG). Je voudrais répondre à Mme Polla qui a remis en cause mon honnêteté en qualifiant mes arguments de malhonnêteté foncière en ce qui concerne la politique sociale.
Argumentation extrêmement importante des priorités sociales, dites-vous ? En fait, ces hausses résultent des conséquences catastrophiques de votre politique de démantèlement social. J'ai, à plusieurs reprises, dit dans cette salle que la réduction de la protection et de la prévoyance sociale dans le domaine des assurances-maladie, du chômage et de la retraite a pour conséquence directe une explosion des dépenses d'assistance dont vous vantez les mérites. Des dépenses d'assistance dont le coût est en définitive beaucoup plus cher qu'une bonne politique de prévoyance y compris pour les budgets des collectivités publiques. Je sais qu'il est difficile pour vous de dire ici, brutalement, que nous n'avons pas d'états d'âme lorsque l'on parle finance et qu'on ne s'occupe pas des personnes et des êtres humains. Je comprends mieux qu'avec de tels arguments vous puissiez défendre votre politique dans une ville parmi les plus riches du monde où les banquiers font des bénéfices comme jamais, ...
L'Entente. Aaah !
M. Jean Spielmann. ...où les boutiques de luxe se multiplient. Vous représentez les milieux financiers et vous faites voter des lois pour préserver les spéculateurs, démanteler le tissu social - je l'ai démontré - et vous venez dire à la population que vous augmentez les budgets sociaux. Madame, votre charité de nantis, de gens qui défendez une politique basée sur les intérêts financiers au détriment de la personne humaine et de l'économie à tous crins ne se préoccupant pas des conséquences sociales, une politique budgétaire conduisant à l'impasse financière, nous n'en voulons pas ! Nous nous battons pour la justice, et elle a une autre signification que votre politique de charité !
Mme Marlène Dupraz (AdG). Ce que je viens d'entendre ne peut pas me laisser indifférente.
Madame Barbara Polla, je vous cite, car vos propos sont terriblement blessants. Quand vous évoquez la majorité, Madame, ce n'est pas un devoir que de décider en majorité. Le devoir, c'est vraiment la concertation, la consultation des partis politiques dans le cadre des commissions. Ce n'est pas décider en toute impunité et en absolu tout ce que l'on a envie de faire. Parce que, premièrement, la concertation c'est une preuve de l'acte intelligent. La consultation des partis, c'est le respect des droits et des règles démocratiques.
L'examen des dossiers ! C'est vraiment le mépris pour l'examen que l'on pourrait leur apporter. D'ailleurs, dans votre majorité, il a été évoqué qu'il y a quand même défaillance de ce côté-là. Défaillance évoquée par M. Froidevaux, notamment, lorsque l'on parle de ce dossier médical. Vous qui êtes médecin, je m'étonne aussi d'entendre des propos pareils, de dire que les malades pourraient retourner à l'hôpital cantonal, c'est vraiment mépriser le plaidoyer des autres médecins lorsqu'ils ont parlé de convalescence, des chances de guérir, d'un cadre, d'une équipe, d'une constance et une collaboration. Franchement, ça me navre, parce que partout ailleurs où l'on essaie de promouvoir l'esprit des chances de guérir, comme je l'avais dit tout à l'heure, ça constitue vraiment, à notre époque, une science liée à la médecine psychosomatique avec la médecine d'intervention traditionnelle et d'autres médecines alternatives. Je m'étonne qu'une femme médecin puisse tenir des propos semblables.
Une dernière chose. Je constate ce mépris qui dépasse vraiment toutes les bornes. Vous dites qu'il n'y a pas besoin de discuter, de consulter les partis politiques, ni de débats; c'est vraiment mépriser ce que les autres peuvent vous proposer. Le peuple ne reçoit pas de considération de votre part et c'est avec regret que je constate que l'on puisse faire de la politique et représenter le peuple par une diatribe pareille.
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Je serai extrêmement brève au terme de ce débat. Ce que je souhaiterais dire et que ce débat en discussion immédiate a démontré : être pour ou contre la fermeture de la clinique de Montana est devenu un acte de foi et non plus un débat parlementaire. Je comprends, Mesdames et Messieurs de l'Entente, que vous fassiez confiance à vos conseillers d'Etat, mais tout de même, nous sommes des parlementaires, nous avons notre travail à faire, notre esprit critique à exercer et je ne comprends pas que vous puissiez marcher là-dessus tout à fait allègrement.
Le fait que vous soyez majoritaires vous donne un certain nombre de responsabilités envers la minorité de ce parlement et envers le fonctionnement des institutions. Vous avez démontré ce soir que vous êtes incapables et de l'une et de l'autre. (Applaudissements.)
M. René Ecuyer (AdG). J'ai quand même une observation à faire. J'ai écouté attentivement tout ce qui a été dit, notamment lorsque M. Segond ou Mme Polla se félicitent de l'augmentation formidable des dépenses sociales pour les personnes âgées. Je crois qu'il faut dire une chose, c'est qu'il n'y a pas d'augmentation à la personne. C'est une augmentation de cas. Beaucoup plus de personnes doivent faire appel à des prestations complémentaires, ne serait-ce que pour survivre. Vous présentez cela comme quelque chose de merveilleux dans notre République, alors que c'est un constat d'échec de notre société, car un nombre considérable de gens ne peuvent plus s'en sortir avec leurs revenus.
J'ai été un client de Montana. J'avais subi une grave opération et je dois dire que c'est vraiment un cadre merveilleux pour la réadaptation.
Dès lors, le fait d'avoir, dans cette affaire, empêché la discussion, l'investigation, vous empêchez les députés de faire leur travail. C'est tout à fait scandaleux et antidémocratique.
Mis aux voix, le projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1 (souligné).
M. Jean Spielmann (AdG). Vous avez accepté l'entrée en matière, vous avez voté un projet de loi sur lequel vous n'avez, pour beaucoup d'entre vous, pas eu l'occasion de débattre sur le fond. Je suis intervenu tout à l'heure pour discuter et pour débattre de l'ensemble du problème. Vous avez refusé de renvoyer ce projet en commission et de laisser se dérouler normalement les différentes étapes parlementaires pour prendre une décision aussi importante que celle que nous prenons aujourd'hui qui est le bradage d'un établissement public médical financé en grande partie par l'intervention et l'investissement de la population. Celle-ci, au travers des différentes étapes de la réalisation de Montana, a fait acte de sa volonté de se battre et de mettre en place un dispositif et des instruments permettant de subvenir aux difficultés.
Si, au cours des années, il est vrai, les problèmes ont changé et que c'était un sanatorium qui, aujourd'hui, a d'autres vocations, personne d'entre vous n'a contesté l'utilité d'un tel établissement. Vos arguments sont financiers et liés à une politique de courte vue basée uniquement sur le rééquilibrage des finances publiques, sans réfléchir aux conséquences des réductions que vous entreprenez. Vous allez fermer un établissement qui est, au niveau du prix de la journée, parmi les moins chers, qui remplit un rôle tout à fait important, sans évaluer les conséquences sur l'avenir. C'est un acte particulièrement grave.
Je me permets de répéter à Mme Polla que ce n'est pas un acte politiquement réfléchi, mais un acte de soumission, consistant simplement à mettre en avant les intérêts politiques de partis et à participer à un démantèlement social important qui, lui-même, peut, dans une certaine mesure justifier les orientations politiques prises par le Conseil d'Etat par la mise en place d'un Conseil économique et social qui aurait un rôle de paratonnerre à jouer. On comprend mieux la mise en place de ces différents dispositifs lorsque l'on connaît l'orientation de votre politique, et surtout la manière avec laquelle vous entendez l'appliquer.
Il y a, bien sûr, d'autres possibilités, d'autres perspectives et nous les avons tracées au cours des différents débats sur le budget, et des lois afférentes aux investissements et à la politique sociale. Je répète encore une fois que nous sommes à un moment charnière, qu'aussi bien nos lois sociales, que ce soit celle de l'assurance-maladie ou celle de l'assurance-chômage se trouvent dans un moment décisif, et l'on verra si notre société est capable de développer une politique de prévoyance ou si l'on va continuer votre politique à courte vue qui ne fera qu'augmenter le nombre des assistés et les difficultés sociales d'une partie croissante de la population. Sans parler des enjeux plus décisifs qui devraient, pour le moins, mobiliser vos esprits et essayer de vous faire réfléchir un petit peu sans suivre aveuglément les décisions prises à haut niveau et jouer notre rôle d'élus du peuple en tentant d'examiner de manière critique les propositions faites. Je veux parler, bien sûr, de l'ensemble de la politique économique et sociale, liée à la préoccupation principale de la population que sont le chômage, les investissements et le travail socialement utile.
Aujourd'hui, vous licenciez, vous faites de l'exclusion sociale envers des personnes qui oeuvraient de manière utile à la vie sociale de notre pays. Ce sont des chômeurs et, probablement pour certains d'entre eux, des chômeurs de longue durée. Par conséquent, vous contribuez à augmenter les difficultés financières et le déficit du budget. C'est une politique erronée, nous en payerons tous l'addition et nous refusons de participer à cette politique-là. Nous entendons nous battre contre l'étroitesse d'esprit dont vous avez fait preuve ce soir pour examiner ce dossier. (Applaudissements à la tribune.)
Art. 2 (souligné)
Le président. Nous sommes en présence de deux amendements. L'un de Mme Christine Sayegh, qui consisterait à abroger l'alinéa 2 de l'article 2 (souligné). C'est le plus éloigné du texte original.
Mme Christine Sayegh (S). Je rappellerai que la clinique de Montana a été acquise en 1903, grâce à une souscription publique, aux deniers des Genevois. L'alinéa 2 de cet article 2 est un blanc-seing au Conseil d'Etat, sans connaître les conditions de vente, élément essentiel d'un contrat de vente pour aliéner le patrimoine immobilier genevois. Le propriétaire, l'Etat, est en droit de connaître le contrat avant de décider de l'aliéner.
A la lecture de l'article 80 A, alinéa 1 de la constitution, il est précisé que l'aliénation des immeubles propriétés privées de l'Etat doit être soumise à l'approbation du Grand Conseil. Ainsi, c'est l'aliénation, donc la vente, qui doit être soumise au Grand Conseil et non une demande de pouvoir aliéner. Si le Conseil d'Etat a déjà un acquéreur, qu'il le dise, et à quel prix ? Si oui, il y aurait alors lieu de faire un projet de loi distinct. Ainsi, il est manifeste que cet alinéa n'a pas sa place dans ce projet de loi.
M. Christian Ferrazino (AdG). Un mot pour soutenir l'amendement déposé par notre collègue Sayegh. Monsieur Segond, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat, non seulement ces projets de lois sont faits à la va-vite, et on l'a vu et vous l'avez reconnu, ils sont mal libellés, mais en plus, et c'est plus grave, Christine Sayegh vient de l'indiquer, cet alinéa 2 est tout simplement anticonstitutionnel. Il va à l'encontre de l'article 80, lettre A de la constitution adopté en 1985. Pourquoi ? Parce que, précédemment, la compétence pour aliéner des immeubles propriété de l'Etat appartenait au gouvernement. Le législatif a précisément voulu que cette compétence soit transférée de l'exécutif au législatif.
Mais, Monsieur Vodoz, quelle est la compétence que vous nous donnez, si c'est de vous dire, allez-y, vous avez un chèque en blanc, vous cherchez l'acquéreur que vous voulez, au prix que vous voulez ? L'aliénation présuppose les conditions de l'aliénation. Je sais, pour vous et pour certains députés d'en face, que le Grand Conseil est une chambre d'enregistrement. On lève la main quand on nous demande de le faire, apparemment ça n'a pas trop mal marché jusqu'à maintenant, mais nous, nous avons une autre idée de notre rôle de député, et la loi que la constitution garantit permet et donne la compétence à ce Grand Conseil de se déterminer sur toute aliénation d'immeuble appartenant à l'Etat. Et l'article 80, lettre A, ne nous donne pas la compétence de vous dire : «Allez-y, faites ce que vous voulez et bradez les monuments appartenant à l'Etat !», mais le Grand Conseil a la compétence de dire si oui ou non il entend aliéner tel bâtiment de l'Etat et à quel prix.
Mais - Me Fontanet semble être hésitant - quel est l'élément le plus important d'un contrat de vente ? C'est son prix. Et vous voulez aujourd'hui dire : «Ben oui, on donne la possibilité au Conseil d'Etat de vendre des immeubles», sans savoir à quel prix vous voulez le faire ! Eh bien, c'est un triste rôle que vous avez et bien bas pour un député. Je le répète, et c'est pour cela que nous soutenons l'amendement du groupe socialiste, ce projet de loi, dans son alinéa 2, est tout simplement anticonstitutionnel.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat a été extrêmement attentif à la rédaction de cet article et de cet alinéa sachant bien quelles étaient les difficultés qui naissent chaque fois à propos d'acquisition ou d'aliénation d'immeubles en mains publiques. Ce texte a été élaboré par un éminent professeur de notre université. Le Conseil d'Etat a procédé à toutes les vérifications nécessaires du point de vue constitutionnel, légal, et de la jurisprudence. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à voter l'article 2, et en particulier l'alinéa 2, avec l'amendement, Monsieur le président, que je vous ai donné tout à l'heure.
Mis aux voix, l'amendement de Mme Sayegh est rejeté.
Le président. Nous sommes en présence d'un amendement du Conseil d'Etat dont le texte est le suivant :
«L'Etat de Genève, respectivement l'établissement de Joli-Mont, aliène les biens des immeubles abritant jusqu'à sa fermeture la clinique de Montana en Valais dont il est propriétaire.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné), ainsi amendé, est adopté de même que les articles 3 et 4 (soulignés).
Troisième débat
M. Jean Spielmann (AdG). Je demande l'appel nominal. (Appuyé.)
Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent le projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Le projet est adopté en troisième débat, par 48 oui contre 42 non et 1 abstention.
Ont voté oui (48) :
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Claude Basset (L)
Roger Beer (R)
Dominique Belli (R)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Anne Chevalley (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Jean-Luc Ducret (DC)
Michel Ducret (R)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Jean-Claude Genecand (DC)
Henri Gougler (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Elisabeth Häusermann (R)
Claude Howald (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Pierre Kunz (R)
Claude Lacour (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Michèle Mascherpa (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean Opériol (DC)
Barbara Polla (L)
David Revaclier (R)
Martine Roset (DC)
Françoise Saudan (R)
Jean-Philippe de Tolédo (R)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Nicolas Von der Weid (L)
Michèle Wavre (R)
Ont voté non (42) :
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Jacques Boesch (AG)
Anne Briol (E)
Fabienne Bugnon (E)
Micheline Calmy-Rey (S)
Claire Chalut (AG)
Pierre-Alain Champod (S)
Liliane Charrière Urben (S)
Sylvie Châtelain (S)
Bernard Clerc (AG)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
Marlène Dupraz (AG)
Laurette Dupuis (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
Sylvie Hottelier (AG)
Liliane Johner (AG)
Sylvia Leuenberger (E)
René Longet (S)
Jean-Pierre Lyon (AG)
Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)
Liliane Maury Pasquier (S)
Pierre Meyll (AG)
Laurent Moutinot (S)
Chaïm Nissim (E)
Danielle Oppliger (AG)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Maria Roth-Bernasconi (S)
Andreas Saurer (E)
Christine Sayegh (S)
Max Schneider (E)
Jean Spielmann (AG)
Evelyne Strubin (AG)
Claire Torracinta-Pache (S)
Pierre Vanek (AG)
S'est abstenu (1) :
Philippe Schaller (DC)
Etaient excusés à la séance (5) :
Bernard Annen (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean Montessuit (DC)
Jean-Pierre Rigotti (AG)
Micheline Spoerri (L)
Etaient absents au moment du vote (3) :
Catherine Fatio (L)
Michel Halpérin (L)
David Hiler (E)
Présidence :
M. Hervé Burdet, président.
La loi est ainsi conçue :
LOI
sur la fermeture de la clinique genevoise de Montana
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Cessation d'exploitation de la clinique
L'exploitation de la clinique genevoise de Montana cesse à la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Art. 2
Gestion des biens résultant de la fermeture de la clinique
1 Les biens propres de la Fondation du sanatorium genevois de Montana confiés dès le 1er janvier 1985 par la loi sur les établissements publics médicaux, du 19 septembre 1980, aux cliniques genevoise de Joli-Mont et de Montana restent acquis à l'établissement de Joli-Mont et font partie de son patrimoine au sens de l'article 12 de cette même loi. Ils restent séparés des biens de l'Etat conformément à l'ar-ticle 173, alinéa 2, de la constitution de la République et canton de Genève.
2 L'Etat de Genève, respectivement l'établissement de Joli-Mont, aliène les biens des immeubles abritant jusqu'à sa fermeture la clinique de Montana en Valais, dont ils sont propriétaires.
3 L'établissement de Joli-Mont continue à être juri-diquement responsable des droits et obligations encourus dans le cadre de l'exploitation de la clinique de Montana.
Art. 3
Modification à une autre loi (K 2 1)
La loi sur les établissements publics médicaux, du19 septembre 1980, est modifiée comme suit:
Art. 1, al. 1, lettre e (nouvelle teneur)
Désignation
Les établissements publics médicaux (ci-après: établissements) sont les suivants:
e) la clinique genevoise de Joli-Mont.
CHAPITRE V (du titre II)
Clinique genevoise de Joli-Mont
(nouvelle teneur)
Art. 33 (nouvelle teneur)
But
La clinique genevoise de Joli-Mont constitue un établissement; elle accueille des malades pour des traitements ou des soins de caractère non intensif pour des hospitalisations intermédiaires ou de longue durée de caractère médico-social ainsi que pour des convalescences.
Art. 34, al. 1, lettre f,
(nouvelle teneur)
al. 4 et 6
Administration
1 L'administration de l'établissement est confiée à une commission administrative, dont les membres sont de nationalité suisse, composée comme suit:
f) un membre désigné par le personnel de la clinique de Joli-Mont.
4 Il est élu au bulletin secret par l'ensemble du personnel de la clinique selon le système majoritaire appliqué à l'élection du Conseil d'Etat.
6 Le délégué du personnel perd sa qualité d'administrateur s'il cesse son activité dans les services de la clinique de Joli-Mont.
Art. 35
(nouvelle teneur)
Direction
1 Le directeur de la clinique est responsable de la bonne marche de l'établissement, à l'exception des questions médicales dont la responsabilité incombe au médecin-chef.
2 Il assiste avec voix consultative aux séances de la commission administrative.
Art. 35 A
(abrogé)
Art. 4
Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur à l'épuisement du délai référendaire.
I 1904 - 1905
Ces interpellations sont closes.
Le président. Je vous propose d'en terminer avec le département de l'action sociale et de la santé en prenant encore les points 20 et 22. (Vives protestations sur les bancs de la gauche.) (Malgré le brouhaha, le président donne lecture du point suivant de l'ordre du jour, à savoir la motion 937.)
M. Pierre Vanek(AdG). Il y a évidemment une motion d'ordre qui s'impose pour arrêter les travaux à l'instant. (Contestations sur les bancs de l'Entente, grand chahut.) Nous siégeons sans discontinuer depuis 17 h. Il est maintenant passé 23 h... (M. Vanek est interrompu. Vacarme du diable. L'orateur hausse le ton.) Je sais que certains députés, sur les bancs de la droite, sont en faveur des nocturnes systématiques, exagérées et déraisonnables, mais ce n'est pas sérieux ! Il faut arrêter. (Cacophonie générale.) Votons la motion d'ordre !
Une voix de l'Alliance de gauche. C'est scandaleux !
Le président. Je suis saisi d'une demande de motion d'ordre de M. Vanek, dans la mesure où je la comprends, qui consiste à interrompre les débats.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée.
Le président. Les débats continuent. (Confusion générale. Personne ne demandant la parole sur la motion 937, le président renvoie la motion à la commission de la santé.)
M. Jean Spielmann (AG). (Brouhaha.) Je vous prie, Monsieur le président, de bien vouloir faire de l'ordre dans la salle pour me permettre d'intervenir en toute sérénité comme l'exigent nos débats. Je me permets au passage de trouver pour le mieux curieux votre façon de présider cette séance et la manière avec laquelle le Bureau a organisé les débats sur un problème aussi important.
Nous avons commencé ce débat à 17 h passées, vous saviez très bien qu'il durerait et c'est donc en toute conscience que le Bureau a organisé la soirée que nous avons vécue et qui est indigne d'un parlement... (Contestations, huées. Les insultes fusent de toutes parts.) ...indigne d'un président et indigne du Bureau. Je crois qu'il est de mon devoir de vous le rappeler.
En ce qui concerne la poursuite des débats, je crois, Monsieur le président, qu'il n'est pas normal que vous fassiez volontairement, pour punir ceux ayant envie de débattre des problèmes, siéger sans discontinuer pendant plus de sept heures en plénière. Vous pouvez tout faire ! J'ai déjà dit ce que je pensais de votre attitude, je ne pense pas nécessaire de le redire. Je voudrais dire que nous avons parfaitement le droit de débattre, que vous avez refusé le débat en commission, que vous tentez, au pas de charge, de faire passer des objets aussi importants que le bradage du patrimoine public, et je trouve curieux que vous ayez engagé ce débat à cette heure-là et surtout que vous n'ayez pas juger utile de l'interrompre. D'autant plus que la plupart d'entre nous avons une journée de travail derrière nous. C'est votre responsabilité, et je peux vous dire que je suis parfaitement à même de poursuivre de telles discussions. Mais je trouve cela anormal, et c'est votre rôle que d'organiser différemment les débats.
Sur l'objet qui nous concerne maintenant, je pense qu'il n'est pas raisonnable, à 23 h 30, d'entamer de nouveaux points de l'ordre du jour et de commencer à débattre de motions que vous allez voter au pas de charge et sans discussion. Il y a vraiment, de la part de la majorité de ce Grand Conseil, une attitude antidémocratique... (Eclats de rires sur les bancs de l'Entente.) ...une attitude de député... (M. Spielmann est interrompu, le président intervient. Tintamarre sur tous les bancs.) ...qui a montré que l'exhortation que certains députés prononcent au début de la séance n'est pas suivie de faits et que vous ne défendez pas la cause du peuple, mais ne faites que suivre les ordres qui vous sont donnés, sans réfléchir. Encore une fois, le peu d'entre vous qui réfléchissez sont obligés d'avoir des positions contraires à leurs pensées.
M. Christian Ferrazino (AG). Monsieur le président, ces débats ont commencé il y a six heures trente. Les chefs de groupe ont commencé il y a sept heures, car ils se sont réunis précisément avec vous pour fixer la manière de gérer cette audience... (Rires et quolibets fusent.) Il a fallu discuter une demi-heure avec vous, Monsieur le président, alors que tous les chefs de groupe étaient d'accord entre eux sur la manière de procéder au niveau de la discussion, du renvoi en commission et d'une éventuelle demande de discussion immédiate. Il nous a fallu discuter trente minutes avec vous alors que, je le précise, nous étions, tous chefs de groupe confondus, d'accord sur la manière de procéder. Premier constat.
Deuxième constat, Monsieur le président. (L'orateur hausse le ton.) Durant ces six heures et demie de débats, vous n'avez pas eu l'idée, une seule seconde et pour leur sérénité, de suspendre cette séance comme n'importe qui aurait eu l'idée de le faire pour permettre - et ça vous fait rire - aux députés, ne serait-ce qu'une demi-heure ou trois quarts d'heure, de pouvoir manger et continuer à discuter dans des conditions normales. Voilà la manière avec laquelle vous présidez ce Grand Conseil. (Protestations de l'Entente, l'orateur hausse encore d'un cran le ton.)
Je vous le dis, comme chef de groupe de l'Alliance de gauche, que je ne saurais accepter cette manière de présider ces débats. Il n'est pas normal qu'après six heures et demie de débats vous nous demandiez de continuer encore à traiter de façon sereine des questions qui, pour nous, ont de l'importance. Alors moi, je ne suis pas d'accord de traiter à la va-vite, en cinq minutes, la motion concernant les prestations aux infirmiers. Je vous annonce, pour que vous sachiez ce qui se passe, que si vous voulez véritablement poursuivre l'ordre du jour, Monsieur le président, la plupart des députés de mon groupe demanderont la parole et s'exprimeront sur cette motion qui a une importance pour nous et mérite d'être traitée autrement que de cette manière cavalière, comme vous nous le proposez ce soir !
Le président. Je vous fais observer, Monsieur Ferrazino, que toutes les décisions prises phase par phase dans le déroulement de l'ordre du jour de ce soir ont été cautionnées par une majorité parlementaire. C'est la décision que je vais prendre maintenant qui n'est pas une décision majoritaire. La séance est levée.