Séance du vendredi 24 juin 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 8e session - 28e séance

M 902-A
9. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de MM. Thomas Büchi et Olivier Lorenzini relative à la mise en place de nouvelles structures de formation dans les métiers du bois. ( -) M902
Mémorial 1994 : Développée, 981. Motion, 991.

L'étude de la mise en place d'un tronc commun de 1re année entre les apprentis en entreprise et les élèves à plein temps des écoles techniques et de métiers, dans les professions de menuisier, d'ébéniste et de charpentier, a été conduite sous l'égide du conseil central interprofessionnel (ci-après CCI), du 9 avril au 27 novembre 1992.

En effet, depuis un certain nombre d'années déjà, les milieux économiques et ceux de l'enseignement s'inquiètent de l'extrême spécialisation des filières d'apprentissage et souhaitent, à l'instar de ce qui est de plus en plus pratiqué dans l'enseignement général, l'introduction de troncs communs de formation durant lesquels les apprentis seraient initiés aux matières traitées (pratique et théorique) et aux techniques fondamentales des métiers avant d'entrer dans la phase de spécialisation elle-même.

Dans ce cadre, nous rappellerons le postulat déposé devant les Chambres fédérales le 2 octobre 1991 par M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat et conseiller national, «Pour une formation professionnelle mieux adaptée, intégrant les troncs communs et les modules de formation et de perfectionnement professionnels.»

De son côté, le CCI, dans une étude conduite en 1991, a conclu très favorablement à l'introduction de troncs communs comme mesure propre à revaloriser l'apprentissage.

En ce qui concerne plus particulièrement les professions commerciales, nous soulignerons qu'elles répondent déjà - et beaucoup mieux que celles de l'industrie et de l'artisanat - au concept de tronc commun puisque l'ensemble des apprentis de commerce (anciennes formations de gestion et de secrétariat) ont été récemment regroupés et que les spécialisations professionnelles (une trentaine environ) sont acquises en entreprises et par des cours spéciaux dits «de branches».

Par voie de conséquence, au moment où les effectifs d'apprentis accusaient une diminution certaine dans les professions du bâtiment, notamment dans les métiers du bois, et que les deux systèmes de formation dual et à plein temps coexistaient dans nos écoles, il apparaissait judicieux aux représentants des milieux professionnels auprès du CCI et à ceux de l'école d'étudier une formule propre à améliorer les possibilités de recrutement et de formation des jeunes dans ces métiers, et ce en utilisant de manière optimale les moyens techniques et les disponibilités du corps enseignant.

C'est la raison pour laquelle le CCI prenait, avec l'appui du département de l'instruction publique, le 9 avril 1992, l'initiative de confier à un groupe de travail constitué de représentants des employeurs et des travailleurs des métiers du bois et des écoles concernées (CEPIA et ETM), représentant les directions et le corps enseignant, la mission d'étudier la mise en place d'un tronc commun de 1re année, des trois années subséquentes de spécialisation, d'une phase de raccordement aboutissant à la maturité professionnelle, le tout en recherchant l'utilisation optimale et la plus économique des moyens actuellement disponibles en matière d'équipement et de personnel au CEPIA, aux ETM et dans les entreprises.

Le groupe de travail qui était présidé par le directeur du service de la formation professionnelle, lequel était assisté de deux de ses collaborateurs, devait également analyser l'ensemble des problèmes juridiques, administratifs et financiers découlant des propositions formulées et rédiger la documentation y relative.

Dans le rapport qu'ils remettaient alors à notre conseil, les représentants des partenaires sociaux et des services compétents concluaient favorablement à la création d'un tel tronc commun et l'assortissaient de propositions très détaillées relatives à l'organisation générale de la formation conjointe des apprentis et élèves de 1re année pour les trois métiers.

Aux termes de ce rapport, le tronc commun de 1re année s'articulait de la manière suivante:

a) une formation pratique et théorique regroupée durant le premier semestre;

b) une initiation progressive aux trois spécialisations, également théorique et pratique avec, pour complément, l'organisation de stages en entreprise durant le deuxième semestre;

c) la poursuite normale des deux filières en entreprise et en école, dès la 2e année, en respectant les spécialités des trois professions.

Les objectifs visés par ces regroupements tendaient à améliorer la formation de base, théorique et pratique, des apprentis en entreprise qui bénéficieraient dès lors d'une 1re année complète à plein temps, et à leur permettre, ainsi qu'aux élèves de la filière plein temps, de confirmer leur choix professionnel. Par ailleurs, les collectivités publiques utiliseraient de manière optimale les ressources disponibles, ressources actuellement réparties en deux lieux, le CEPIA et l'ETM.

Nous signalerons, par ailleurs, que deux localisations de tronc commun avaient été analysées:

a) à 100% au CEPIA;

b) à 50% au CEPIA et 50% aux ETM.

Le groupe de travail, après avoir étudié les deux solutions, concluait de la manière suivante:

L'établissement d'un tronc commun en première année d'apprentissage ne constitue pas, comme le relève l'analyse approfondie des coûts, une économie pour l'Etat. L'on constate, au contraire, une augmentation par rapport au système actuel:

 - la mise en place du tronc commun au CEPIA entraînera pour l'ensemble de la formation (3-4 ans) une augmentation de 101 681 F la première année (investissement de départ dû à la création de 12 places supplémentaires). Ces coûts seront ramenés à 32 777 F les années suivantes (coûts de fonctionnement);

 - pour moitié au CEPIA et moitié aux ETM, une augmentation de 115 910 F.

Cette augmentation est notamment due au transfert du coût de la formation pratique en entreprise sur la formation théorique en école. Cependant, il convient de prendre en considération deux sources importantes d'économies futures que le sous-groupe de travail chargé de l'étude de rationalisation des moyens n'a pas pu chiffrer:

a) par la refonte du système dual et du système plein temps, les écoles vont être à même de mettre en place une nouvelle répartition des heures de formation. Cette situation entraînera une sensible augmentation des effectifs par classe qui sont à ce jour nettement en dessous des minima fédéraux. D'où possibilité de subventions supplémentaires;

b) la spécialisation de l'un des deux outils de formation en centre de formation initial (si la solution tronc commun au CEPIA est retenue) devrait alléger les postes «investissement et renouvellement» car ces dépenses spécifiques ne subsisteraient que dans les structures accueillant la formation des 2e, 3e et 4e années des trois métiers.

Ces trois paramètres étant posés, il convient de considérer les avantages d'un projet résolument tourné vers l'avenir:

1. Le tronc commun s'insère dans une politique moderne de formation prônant l'acquisition de bases scolaires et pratiques solides orientées dans un second temps vers la spécialisation, voire le perfectionnement professionnel. L'acquisition d'une culture générale et professionnelle étoffée en première année permet d'envisager sans peine la préparation à une maturité professionnelle effectuée en cours de formation dans la mesure où serait dégagée une demi-journée supplémentaire de cours dès la deuxième année. Les jeunes acquerront dès le départ l'ouverture d'esprit nécessaire aux exigences de polyvalence et de mobilité professionnelle imposées par le monde économique et l'évolution des professions.

2. Le tronc commun respecte les programmes fédéraux... Seules se trouvent modifiées la ventilation des heures et l'organisation de l'enseignement théorique et pratique.

3. Le tronc commun assure une amélioration de l'enseignement: les élèves sont regroupés en classes homogènes; ils suivent un enseignement adapté à leur niveau. La continuité de l'enseignement en groupe, dans un même lieu, les stages dans l'entreprise organisés avec les associations développeront chez eux une culture professionnelle qui leur permettra de mieux s'intégrer dans leur entreprise ou à l'école dès la deuxième année.

4. Le tronc commun conserve à l'apprenti et à l'étudiant leur statut respectif. Dans la mesure où l'engagement par l'entreprise et par l'école a lieu dès la première année, il n'est pas nécessaire de modifier quoi que ce soit aux procédures en cours. Celles-ci demeurent inchangées à l'entrée et à l'issue de la première année.

5. Le tronc commun permet à des jeunes habiles manuellement, mais dont les connaissances scolaires sont insuffisantes, d'envisager leur avenir en formation pratique.

6. Le tronc commun se caractérise par la rationalisation de l'enseignement et des moyens actuels. Il favorise le rapprochement de deux types d'écoles en permettant à des apprentis de poursuivre une formation en école ou à des étudiants d'opter résolument pour l'entreprise. Il est un instrument indéniablement utile dans l'optique d'une orientation bien conçue.

Il faut enfin relever que les membres du groupe de travail - dont ce n'était d'ailleurs pas la mission - n'avaient émis aucune proposition quant aux modalités pratiques de direction administrative et pédagogique d'un tel dispositif, laissant aux départements concernés - à l'époque le département de l'instruction publique et le département de l'économie publique - le soin de prendre toutes les décisions y relatives.

Le 14 juillet 1993, notre conseil, après avoir pris connaissance avec intérêt des propositions du CCI et relevé les incidences pédagogiques et économiques de la solution proposée, invitait le département de l'instruction publique à envisager une direction scolaire unique pour la prise en charge de l'ensemble des filières de formation des métiers du bois.

En automne 1993, le département prenait la décision de regrouper l'ensemble des trois formations, système dual et école à plein temps sous la responsabilité du CEPIA, afin de pouvoir introduire le tronc commun dès la rentrée de septembre 1994, et cela conformément aux propositions du CCI.

Cette décision transmise aux écoles concernées par la direction générale de l'enseignement secondaire postobligatoire le 10 novembre 1993 a suscité des réactions très vives de la part de l'Association genevoise des enseignants de l'école d'ingénieurs et des écoles techniques (AGEEIT) qui critiquait plus particulièrement le fait qu'elle n'ait pas été préalablement consultée, évoquait les mesures pesant sur la qualité de la formation professionnelle à plein temps et relevait la mise en cause du salaire des apprentis du système dual.

Afin de recueillir des éléments complémentaires, plus particulièrement en ce qui concernait l'organisation scolaire de l'ensemble du dispositif tronc commun + degrés 2, 3 et 4 - les conclusions du groupe de travail du CCI ne portant effectivement et principalement que sur le tronc commun - le département confiait, le 6 janvier 1994, un nouveau mandat à la direction générale de l'office d'orientation et de formation professionnelle en vue d'étudier de manière détaillée, avec les représentants des directions d'écoles concernées (CEPIA et ETM) et ceux de leurs associations d'enseignants (AMEP et AGEEIT-ETM) la mise en place du dispositif scolaire adéquat.

Les représentants des partenaires sociaux, qui avaient participé de manière très active aux travaux du premier groupe, ont été personnellement informés par la direction générale de l'OOFP de la conduite de cette seconde étude de caractère exclusivement scolaire. Ils n'y ont pas été invités et n'ont manifesté aucun désir d'y participer.

Aux termes de cette étude complémentaire achevée le 18 février 1994 et au cours de laquelle le concept du tronc commun de 1re année, déjà accepté préalablement par les partenaires sociaux, n'a pas été modifié, le département de l'instruction publique a pris et diffusé la décision suivante:

Mise en place scolaire de nouvelles structuresde formation dans les métiers du bois

Considérant:

- la nécessité technique et pédagogique de faire évoluer la formation professionnelle vers des structures plus ouvertes et plus souples;

- l'instauration de la maturité professionnelle;

- la nécessité absolue d'utiliser de manière optimale les ressources budgétaires (investissements et frais de fonctionnement).

Se basant sur:

- les propositions d'un groupe de travail réunissant les milieux professionnels concernés et les représentants de l'Etat (groupe de travail CCI) concluant à la création d'un tronc commun de 1re année pour l'ensemble des métiers du bois (menuisiers, ébénistes, charpentiers) et pour les deux filières de formation (école de métiers à plein temps et apprentissage en entreprise);

- les conclusions d'un groupe de travail interne au département chargé plus particulièrement d'étudier la mise en place dudit tronc commun et des années subséquentes (2e, 3e et 4e) dans les écoles professionnelles, dont les éléments essentiels sont ainsi résumés:

  le regroupement de l'ensemble des élèves et apprentis de 1re année en un même lieu offre un ensemble d'avantages pédagogiques (formation de base, orientation-insertion) et économiques (utilisation rationnelle des équipements des cours pratiques de formation) incontestables à moyen et long termes. Il réalise par ailleurs un alignement total durant une année des deux systèmes de formation;

  afin de répartir judicieusement les moyens techniques et les investissements, le tronc commun de 1re année devra être implanté dans les locaux du CEPIA à Lancy. Quant aux équipements plus sophistiqués, plus particulièrement utiles aux élèves du plein temps, aux apprentis menuisiers et ébénistes de 3e et de 4e année, dans le cadre de leurs cours d'introduction et aux élèves techniciens, ils devront se situer dans les locaux des ETM à la Jonction;

  pour des raisons d'organisation de l'enseignement, et afin de favoriser des regroupements dans certaines disciplines non spécifiques aux deux filières, il apparaît logique de réunir l'ensemble des élèves et apprentis menuisiers et ébénistes de 2e, 3e et 4e années dans les locaux des ETM de la Jonction. A terme, cette pratique de regroupement sur les effectifs non négligeables devrait permettre de dégager des économies.

Le département de l'instruction publique décide

1. Le tronc commun de 1re année regroupant l'ensemble des apprentis et des élèves du plein temps sera implanté dans les locaux du CEPIA.

2. Les élèves menuisiers et ébénistes plein temps de 2e, 3e et 4e années poursuivront l'ensemble de leur formation pratique et théorique dans les locaux de l'ETM à la Jonction.

 Les apprentis menuisiers et ébénistes de 2e, 3e et 4e années, recevront l'enseignement professionnel et suivront les cours pratiques de formation également dans les locaux de l'ETM à la Jonction.

 Les apprentis charpentiers de 2e et 3e années recevront l'enseignement professionnel et suivront les cours pratiques de formation au CEPIA.

3. La direction administrative et pédagogique de l'ensemble des métiers du bois (tronc commun, 2e, 3e et 4e années) sera confiée à M. Jean-François Dell'acqua, directeur adjoint au CEPIA.

4. Afin toutefois de ne pas attribuer définitivement le regroupement ainsi réalisé à l'une ou à l'autre école (CEPIA ou ETM), le responsable de ce dispositif bénéficiera des moyens adéquats pour le conduire et dépendra hiérarchiquement directement de la direction générale de l'enseignement secondaire postobligatoire.

5. Cette disposition transitoire devra permettre au département de l'instruction publique de poursuivre avec les milieux professionnels concernés l'étude des regroupements entre les professions qui bénéficient actuellement des types de formations (plein temps et apprentissage) et de décider ultérieurement d'une équitable répartition des métiers et des moyens entre les écoles professionnelles du domaine de l'industrie et de l'artisanat.

6. Les conclusions de cette étude devront permettre au département d'élaborer la répartition pour l'ensemble des professions et, par voie de conséquence, d'affecter les métiers du bois à l'une des deux écoles à la rentrée de 1995.

7. Par ailleurs, la mise en place du tronc commun des métiers du bois bénéficiera de l'appui d'un groupe d'accompagnement de caractère consultatif constitué de représentants des milieux professionnels concernés (employeurs et travailleurs) et de représentants des milieux scolaires (directions et associations d'enseignants).

8. Constitué par voie d'arrêté, ce groupe d'accompagnement sera réuni dès avril prochain et présidé par le directeur général de l'office d'orientation et de formation professionnelle.

Le Conseil d'Etat, après avoir appuyé les démarches déjà entreprises avec les partenaires sociaux en vue d'améliorer les filières de formation en général et dans les métiers du bois en particulier, tout en veillant à la meilleure utilisation économique et pédagogique des moyens disponibles (équipements et personnel enseignant), est en mesure de répondre à la motion précitée de la manière suivante:

1. Problème de manque d'expérience

1.1 Le tronc commun de 1re année offre effectivement à l'ensemble des apprentis et élèves une formation théorique et pratique en école. Ses contenus regroupent ainsi les programmes actuels de l'enseignement professionnel, ceux des cours pratiques de formation et, pour les apprentis, un ensemble de notions auparavant acquises en entreprise. Par voie de conséquence, le tronc commun propose à ces derniers un programme plus complet et un encadrement pédagogique mieux adapté à leurs besoins futurs, puisqu'ils vont bénéficier dans la pratique d'une demi-journée de cours théoriques supplémentaires.

 Leur intégration dans l'entreprise sera préparée par un stage de 3 à 9 semaines, organisé durant le 2e semestre du tronc commun.

 Enfin, la suppression des cours d'introduction en 2e année, dont les contenus ont été reportés sur le tronc commun, permettra à l'apprenti d'être normalement présent auprès de son maître d'apprentissage dès le début de la 2e année.

1.2 L'initiation aux trois métiers, qui s'effectue en début du 2e semestre, constitue un des éléments-clés du tronc commun.

 Proposée par les initiateurs mêmes de l'expérience, elle vise à inculquer aux jeunes, et cela dès leur entrée dans le métier, un concept de polyvalence et de mobilité indispensable au déroulement de leur future carrière.

1.3 La mise en place du tronc commun de 1re année au CEPIA répond à un certain nombre d'impératifs pédagogiques et économiques précis, à savoir:

 - unité de conception pédagogique et administrative de l'ensemble des élèves et apprentis de 1re année, pour les 3 métiers et les deux filières;

 - utilisation optimale d'équipements collectifs de base déjà existants au CEPIA et affectés à l'organisation de cours d'introduction de longue durée, offerts actuellement aux apprentis de 1re année;

 - amélioration de la capacité d'accueil de jeunes dans un domaine déjà fortement affecté par la crise économique de ces trois dernières années.

 Le regroupement des métiers du bois en 1re année au CEPIA nécessitera un investissement supplémentaire de 124 000 F réparti de la manière suivante:

 a) outillage et équipement individuel 69 000 F

 b) acquisition de 20 places supplémentaires 55 000 F

  Total 124 000 F

 Une partie de cette charge sera portée au budget du FFPP.

 Nous relèveront enfin que la mise en place du tronc commun n'entraînera, hormis cet investissement, aucune acquisition d'équipement de caractère collectif, ni aucune charge supplémentaire d'enseignement, cette dernière étant intégrée au chèque global d'enseignement déjà attribué actuellement aux trois professions.

1.4 Le regroupement des enseignements de l'ensemble du dispositif en 2e, 3e et 4e années, dans les locaux de la Jonction et la subordination à la même direction que celle à laquelle sera confié le tronc commun permettra de réaliser un certain nombre d'économies dont les montants réels sont difficiles à chiffrer actuellement, mais qui découleront des conséquences suivantes:

 a) les équipements installés à la Jonction, déjà plus sophistiqués que ceux du CEPIA, conviendront aux élèves et apprentis de 3e et 4e années. Il ne sera, par conséquent, pas nécessaire d'acquérir ou de renouveler des équipements identiques au CEPIA;

 b) il sera possible d'utiliser de manière optimale et plus cohérente la totalité des postes d'enseignants affectés aux métiers du bois dans les deux lieux de formation, grâce aux regroupement par discipline, des élèves et apprentis.

1.5 Nous relèverons enfin que les élèves des écoles techniques et de métiers, qui n'ont aucune expérience de l'entreprise, pourront également bénéficier d'un certain nombre de stages, non seulement en 1re année, mais aussi ultérieurement, stages propres à faciliter leur insertion dans la vie professionnelle et dans les entreprises.

2. Problèmes d'orientation

2.1 Il est important de souligner que la mise en place du tronc commun n'est pas une opération d'orientation professionnelle puisque les jeunes doivent au préalable déjà choisir un des trois métiers. Il est toutefois apparu important de permettre aux apprentis de 1re année, comme nous l'avons développé plus haut, de recevoir une brève initiation aux deux autres métiers.

2.2 En ce qui concerne plus particulièrement la mission de l'office d'orientation et de formation professionnelle, clairement déterminée aux termes de l'article 133 de la loi cantonale sur l'orientation, la formation professionnelle et le travail des jeunes gens (C 2 1), il appartient à son service d'orientation d'informer préalablement les jeunes sur les filières professionnelles qu'ils choisiront, quelles qu'elles soient.

2.3 A toutes fins utiles, nous rappellerons que le service de la formation professionnelle est, pour sa part, responsable de la surveillance de l'apprentissage dans plus de 170 métiers réglementés à l'échelon fédéral et cantonal, dont les trois métiers du bois.

2.4 La subordination, au sein de cet office, du service d'orientation et du service de la formation professionnelle, permet de développer les voies et moyens susceptibles de venir en aide aux jeunes qui rencontrent des difficultés pour choisir un métier et trouver un maître d'apprentissage. Ainsi, la «bourse des places d'apprentissage» fait partie intégrante des actions conduites par le département de l'instruction publique en vue de faciliter l'insertion professionnelle des jeunes dans la vie active.

2.5 En ce qui concerne plus particulièrement la situation juridique des apprentis appelés à fréquenter le tronc commun à plein temps durant leur première année de formation, il est important de préciser qu'un certain nombre de dispositions ont été arrêtées par le service de la formation professionnelle, et en accord avec les représentants des partenaires sociaux concernés. Ces dispositions sont les suivantes:

 1. Signature des contrats d'apprentissage

 a) les contrats d'apprentissage des apprentis en entreprise seront signés par le maître d'apprentissage avant le début de la formation;

 b) les contrats d'apprentissage des élèves désireux de suivre le plein-temps seront signés par la direction de l'école;

 c) les normes d'admission à l'école demeurent inchangées.

 Des réorientations à la fin du tronc commun seront possibles; les contrats pourront à nouveau être conclus, en tenant compte des aspirations des élèves ou des apprentis.

 Il n'y a dans cette procédure aucune modification par rapport à la pratique actuelle.

 2. Conformité juridique des contrats

 La durée de la formation totale, ou encore à faire, est portée à l'article 1 du contrat. Comme cela est pratiqué dans l'ensemble des métiers où les cours d'introduction se situent en début d'apprentissage, la date initiale du temps d'essai correspond au premier jour d'entrée effectif dans l'entreprise. Par voie de conséquence, le temps d'essai des apprentis en entreprise se situera en début de 2e année;

 - les obligations des parties contractantes qui courent effectivement dès le début du contrat seront assorties de dispositions particulières relatives à la durée du tronc commun;

 - en ce qui concerne plus particulièrement le salaire, il a été admis qu'aucun salaire ne serait versé en premier année - l'apprenti étant considéré comme un élève à plein temps - mais que la clé de répartition de montants attribués durant les années suivantes serait revue en conséquence par les partenaires sociaux dans le cadre de la convention collective;

 - il va de soi que les ayants droit pourront bénéficier du régime des allocations d'apprentissage ou d'études suivant la nature du contrat.

 3. Choix de la filière

 Le tronc commun n'est pas conçu comme une phase exclusive d'orientation; c'est la raison pour laquelle une décision quant au métier et à la filière est exigée de l'intéressé en début de la 1re année.

 Il sera toutefois important que l'apprenti ou l'élève hésitant puisse confirmer son choix en cours de 1re année. A cet effet, une mention particulière signalant l'existence du tronc commun sera inscrite à l'article 8 du contrat d'apprentissage.

3. Formation des charpentiers

3.1 Le fait que les charpentiers bénéficient d'une formation de trois ans et que la durée de l'apprentissage d'ébéniste et de menuisier porte sur quatre ans a posé un problème non seulement à l'organisation du tronc commun lui-même, mais aussi dans l'articulation conjointe des degrés 2, 3 et 4.

 C'est la raison pour laquelle les charpentiers de 2e et 3e années ont été maintenus au CEPIA alors que des regroupements d'enseignement ont été envisagés à la Jonction pour les élèves et apprentis de 2e, 3e et 4e années (ébénistes et menuisiers).

3.2 Notre conseil sait que les organisations professionnelles concernées ont répondu favorablement, en 1990, à une proposition de l'OFIAMT de prolonger la formation des charpentiers de 3 à 4 ans. Cette proposition, qui n'a été suivie pour le moment d'aucun effet à l'échelon fédéral, mériterait d'être reprise à l'échelon cantonal. En effet, et pour répondre à leur souhait, l'autorité cantonale va solliciter de la part de l'OFIAMT l'autorisation de prolonger la durée de la formation et cela dans le cadre plus précis de la présente expérience.

3.3 Si elle était acceptée, cette proposition mettrait les apprentis charpentiers dans une situation identique à celle des deux autres métiers et leur permettrait de maîtriser d'une manière satisfaisante les sommes de connaissances exigées dans leur profession.

4. Tronc commun pour les branches techniques

4.1 Les possibilités de regroupements d'enseignement en 2e, 3e et 4e années ont été étudiées de manière détaillée. Il a été convenu de les envisager de cas en cas, année par année et métier par métier, en analysant les contenus de l'enseignement à prodiguer. Effectivement, s'il est aisé de réunir les apprentis pour les branches générales et certaines branches professionnelles, il est apparu plus délicat de le faire pour les branches techniques, voire impossible pour celles qui sont spécifiques de l'une ou de l'autre des formations. C'est la raison pour laquelle les apprentis des deux filières ont été réunis à la Jonction, sous l'autorité d'un seul responsable qui veillera à opérer les regroupements possibles en vue de dégager des économies, de favoriser les échanges entre maîtres, élèves et apprentis, tout en préservant les spécificités des deux filières.

4.2 Dès lors que le département étudie l'introduction de la maturité professionnelle dans les professions de l'industrie et de l'artisanat, les responsables de l'expérience de regroupement des métiers du bois analyseront la possibilité d'introduire, comme cela sera effectué dans les autres formations, le plan d'étude et les programmes inscrits dans cette composante théorique complémentaire.

4.3 Le département de l'instruction publique tient à rappeler que l'unité pédagogique et administrative de l'ensemble des métiers du bois, tronc commun et degrés subséquents, bénéficiera de l'appui d'un groupe d'accompagnement.

 Présidé par le directeur général de l'OOFP, ce groupe d'accompagnement, composé des responsables de l'expérience, de représentants des directions d'écoles concernées (CEPIA et ETM), de représentants des associations d'enseignants intéressés (AMEP et AGEEIT) et de représentants des milieux professionnels concernés, employeurs et travailleurs, veillera à son bon déroulement durant une période d'au moins quatre ans.

 Dès le printemps 1994, il s'assurera que le cadre général administratif et pédagogique en vue de la rentrée soit mis en place conformément à la décision prise par le département. Il règlera ou fera régler par ses représentants les éventuels problèmes juridiques, administratifs ou pédagogiques qui pourraient apparaître au début, en cours ou à l'issue des phases de formation, tronc commun et années subséquentes.

 Son président tiendra le département et le CCI régulièrement au courant du déroulement de l'expérience, des problèmes rencontrés et des décisions prises ou à prendre.

5. Mise en place du tronc commun - Maintien des deux systèmes de formation

5.1 Le canton de Genève offre depuis de nombreuses années les deux filières de formation parallèles, apprentissage en entreprise et apprentissage à plein temps, dans une quinzaine de métiers. Ces deux filières, qui répondent à un certain nombre de besoins pédagogiques et économiques, méritent sans aucun doute d'être maintenues. Il apparaît toutefois absolument indispensable à notre conseil, au moment où l'évolution des techniques et des coûts de formation est de plus en plus rapide, de veiller à utiliser de manière optimale les moyens disponibles.

5.2 Dans la lettre qu'il adressait au CCI le 14 juillet 1993, notre conseil invitait déjà le département de l'instruction publique à envisager une direction unique pour la prise en charge de l'ensemble des filières de formation des métiers du bois. En précisant que la coexistence des systèmes dual et scolaire à plein temps pourrait en effet s'insérer dans une politique moderne et efficace de l'enseignement, il estimait indispensable de reconsidérer le problème global de la formation professionnelle dans une optique pédagogique ouverte, souple et dynamique.

 Il est persuadé que le rapprochement des deux filières devra permettre des échanges d'expériences intéressants, cela tant au niveau des élèves et du corps enseignant qu'à celui des milieux professionnels, et que les besoins accrus des qualifications ne pourront en aucun cas entraîner la formation vers un nivellement par le bas.

 Les efforts consentis au niveau du tronc commun, le souci d'utiliser de manière optimale les équipements et d'engager le corps enseignant vers des expériences pédagogiques propres à actualiser leur enseignement et à introduire, au côté de formations déjà existantes, une maturité professionnelle, reflètent la volonté de notre conseil de promouvoir une formation professionnelle de qualité et vont à l'encontre d'un nivellement par le bas.

 Après avoir ainsi répondu favorablement aux représentants des milieux professionnels réunis au sein du CCI qui lui demandaient, le 25 mai 1993, de donner suite à leurs propositions d'introduire un tel tronc commun dans les métiers du bois et de veiller à une meilleure utilisation des moyens dont disposent le CEPIA et l'ETM, notre conseil, en ayant pris la décision d'introduire une telle expérience dès la rentrée 1994, est persuadé que les milieux économiques concernés et l'ensemble de leurs représentants auront à coeur de les soutenir dans la démarche qu'ils ont eux-mêmes souhaitée.

 Notre conseil a d'ores et déjà décidé d'appuyer le département de l'instruction publique dans sa décision d'étudier les regroupements possibles dans les autres filières de formation concernées par le dual et le plein temps en vue de réalisations envisageables pour la rentrée 1995.

Débat

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). J'aimerais en préambule remercier le Conseil d'Etat d'avoir répondu si rapidement à cette motion. C'était une des inquiétudes que nous avions exprimées lors du dépôt de cette motion au Grand Conseil. Permettez-moi cependant de faire quelques remarques.

A travers ce qui nous est dit, on peut constater qu'il y aura un transfert des coûts sur la collectivité. La première année des apprentis se fera sous forme d'enseignement à plein-temps. Quant aux patrons, ils n'auront donc plus aucun salaire à verser. On nous dit bien qu'il y aura une clé de répartition pour les années suivantes, mais je doute que cette clé de répartition tienne compte de la totalité des salaires qui auraient dû être versés en première année aux apprentis. La deuxième chose que nous aimerions dire, c'est que la voie de la formation en apprentissage est une réponse essentielle aux adolescents saturés de l'enseignement exclusivement scolaire et qu'il est dommage de renoncer à ce type de formation.

Il est aussi précisé dans ce rapport que les contrats seront signés en début de première année pour les apprentissages. Il ne semble pas qu'il y ait d'obligation sur ce point et nous sommes inquiets de penser que, peut-être, des patrons attendent - c'est que je ferais d'ailleurs à leur place - la fin de la première année pour voir le niveau des élèves. Il est dommage de laisser cette porte ouverte qui, de nouveau, aura un effet de sélection risquant d'être extrêmement grave pour des jeunes. Nous aurions aussi aimé savoir si les allocations d'études au cours de la première année pouvaient atteindre l'équivalent de leur salaire dans la filière actuelle d'apprentissage. C'est une réalité financière importante pour certains jeunes ou leurs familles.

Enfin, des courriers circulent, invitant les directions à pondérer les admissions en fonction des besoins des entreprises. C'est en contradiction avec un des considérants de la motion de MM. Büchi et Lorenzini qui disait : «le droit des jeunes à une formation professionnelle d'avenir indépendamment de l'implantation et des besoins conjoncturels des entreprises.». Nous sommes donc un peu inquiets de voir que l'on demande maintenant de pondérer les admissions en fonction des débouchés.

En conclusion, nous aimerions demander ici expressément un second rapport dans une année, afin de dresser un bilan de cette nouvelle manière de faire. Contrairement à ce qui est dit en conclusion du rapport, à savoir que, dès 1995, il y aurait éventuellement d'autres filières de formation concernées. Nous jugeons essentiel de faire ce bilan avant de mettre en place d'autres systèmes identiques.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'aimerais rappeler que cette conception de la formation telle qu'elle a été préparée, négociée, amendée, rediscutée est le fruit d'une volonté des partenaires sociaux et notamment de ceux se souciant particulièrement de l'apprentissage en entreprise. Il ne s'agit donc pas d'une construction artificielle, mais d'une demande correspondant à des réalités, et je vous rappelle qu'une des réalités est la volonté d'avoir un tronc commun pour l'acquisition de connaissances de base permettant ensuite à l'élève de s'adapter plus rapidement à d'autres types de formation.

Je vous rappelle également ce qui a été négocié. Vous faites un procès d'intention en disant que les entreprises font des économies sur la première année et que, par la suite, elles ne seront pas répercutées sur les années suivantes. J'ai confiance en les négociations entre partenaires sociaux, très présents dans ce type d'études, pour mettre en place un système acceptable pour les deux parties et dans l'intérêt des étudiants.

En ce qui concerne les allocations d'études d'apprentissage, elles s'appliquent, vous le savez, en fonction des allocations d'entretien et non en fonction d'un salaire quelconque. Les jeunes en apprentissage en école seront dans les mêmes conditions que ceux qui seront en apprentissage dual en première année. Par conséquent, si les allocations d'études sont justifiées, elles seront calculées en fonction des barèmes prévus à l'heure actuelle. Il ne s'agit pas, dans l'esprit de la loi en tant que telle, de verser la compensation salariale, mais de tenir compte des nécessités d'entretien.

S'agissant des contrats. Les contrats ont plusieurs formes d'intérêts. Ils peuvent être signés au début de la première année, ils peuvent aussi l'être après, et pas nécessairement dans le désintérêt du jeune étant donné que la première année permet aussi d'ajuster des choix. Je ne peux vous donner aujourd'hui le total des signatures des contrats, pour la bonne et simple raison que c'est en général fin juin, début juillet, voire même début septembre que l'on est au fait des contrats signés. Si j'avais eu cette donnée, j'aurais eu le plaisir de vous la communiquer. En effet, je suis persuadée que, dans la réalité, il est aussi dans l'intérêt des entreprises de s'assurer des apprentis, particulièrement dans ce type de métiers.

Je ne crois pas qu'il faille considérer que cette démarche se fait contre la volonté des entreprises et qu'ils y vont contraints ou forcés ou qu'ils y voient un seul intérêt financier en première année. Je dirais que ce type de démarches est la rencontre d'intérêts bien compris de part et d'autre, qui permettront à ces formations d'être beaucoup plus adaptées aux exigences du marché pour les années à venir, et cela dans l'intérêt de nos élèves à former.

Vous aurez, Madame, le rapport que vous souhaitez, mais je vous signale qu'un groupe de travail doit se mettre prochainement à l'ouvrage sur la base d'un mandat en train d'être revu pour la mise en place de regroupements d'autres types de métiers. Cela est une volonté qui a été affirmée et définie comme telle. Vous aurez à les connaître, à les examiner à la commission de l'enseignement, si vous le souhaitez, mais il faut savoir qu'un groupe d'accompagnement pour les métiers du bois est d'ores et déjà en place et qu'il a justement pour mission, non pas de prendre en compte le fait que tout a été décidé et que tout roule, mais justement de veiller au déroulement de l'opération. C'est un groupement où sont représentés les partenaires sociaux et les représentants des enseignants. En plus de cela, ce groupe nous permettra ensuite de tirer des conclusions intéressantes par rapport à ce qui est bon, ce qui pourrait être amélioré, ce à quoi il faut prendre garde dans la mise en place de nouvelles filières à tronc commun.

Voilà, Madame, les rapports vous les aurez. La commission de l'enseignement pourra en tout temps les recevoir si elle le désire mais, en attendant, souhaitons bonne chance à cette filière nouvelle qui, je l'espère, sera pour les élèves une bonne façon de s'adapter aux temps nouveaux et aux exigences de ce type de professions.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.