Séance du jeudi 16 juin 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 8e session - 22e séance

PL 7046-A
6. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bernex et Confignon (création d'une zone agricole et d'une zone de développement 5). ( -) PL7046
Mémorial 1993 : Projet, 7165. Commission, 7170.
Rapport de Mme Martine Roset (DC), commission d'aménagement du canton

La commission de l'aménagement a traité du projet de loi susmentionné sous la présidence de M. Hervé Dessimoz.

Historique

Cette modification de régime de zones a déjà fait l'objet de cinq mises à l'ordre du jour de notre Grand Conseil:

20 décembre 1991 : un projet de loi (PL 6767) sur le même sujet est déposé par cinq députés (mémorial 1991 pages 5967 à 5980); ce projet de loi est renvoyé à la commission de l'aménagement.

25 septembre 1992 : une motion (M 806) invitant : « à engager, dans les meilleurs délais possibles et en concertation avec les autorités communales, une procédure de modification du régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bernex et de Confignon... », est déposée par les mêmes cinq députés. Le but de cette motion était de respecter les recommandations de la commission législative qui recommandait de passer par le biais de cet acte parlementaire invitant le Conseil d'Etat à procéder aux démarches requises. Cette motion est envoyée au Conseil d'Etat.

13 mai 1993 : Le rapport sur le projet de loi 6767 est discuté au Grand Conseil (mémorial 1993 pages 2649 à 2663). La commission de l'aménagement, par la voix de M. Meylan, rapporteur, conclut à la modification du projet de loi, par le biais d'une nouvelle motion (M 859) invitant le Conseil d'Etat « à donner une suite favorable à la motion 806 ». Cette motion est envoyée au Conseil d'Etat.

17 septembre 1993 : Le Conseil d'Etat rend son rapport sur la motion 859 et avise le Grand Conseil que la mise à l'enquête publique de ce projet de modification de zones a été effectuée.

5 novembre 1993 : Le Conseil d'Etat dépose le projet de loi 7046 qui est envoyé à la commission de l'aménagement. C'est sur ce projet de loi que la commission rend rapport.

Quel est ce dossier qui a déjà fait couler autant d'encre ?

En fait, le projet consiste à reclasser en zone agricole une vigne exploitée de 2359 m2, actuellement en zone à bâtir (Bernex) et, en parallèle, à reporter les droits à bâtir sur une parcelle de 2359 m2, qui est aujourd'hui en zone agricole (Confignon). Il faut préciser que cette deuxième parcelle jouxte une zone villa. Voir plan annexé.

Les deux parcelles appartiennent à la même famille, qui travaille un domaine viticole de 397 ares. Le père, par donation de son vivant, a remis à son fils le domaine viticole, une partie des terres et les bâtiments d'exploitation et à ses deux filles la parcelle « Bernex » en zone constructible. Quelques années plus tard, lorsque les filles, désirant revenir habiter sur la commune avec leur famille, envisagèrent de construire sur cette parcelle, se posa alors la question de l'arrachage de la vigne.

En effet, le fils qui possède peu de surface viticole pour une exploitation rationnelle genevoise se voit ainsi privé d'une surface non négligeable et de plus d'excellente qualité (A.O.C.). Il faut préciser que ce vigneron cultive la vigne, vinifie et vend son vin, ce qui signifie qu'il a investi dans les installations nécessaires et qui sont rentables seulement à partir d'un certain litrage de moût à encaver; par ailleurs ce vigneron, déjà actuellement, achète du raisin à des collègues viticulteurs.

De plus, en cas de construction, se pose le problème d'accès à cette parcelle, car la seule possibilité est de passer par la cour de la ferme qui est, en raison des activités vinicoles du frère, fréquemment encombrée de tracteurs, de chars et camion, cela particulièrement pendant la période des vendanges.

La deuxième parcelle dont il est question dans ce projet de loi (Confignon) se trouve, comme écrit ci-dessus, en bordure de zone villa. Actuellement cette parcelle n'est pas exploitée, si ce n'est fauchée deux fois par an, sur laquelle végètent quelques arbres fruitiers sénescents. Je précise qu'en raison du cadastre viticole fédéral, il n'est pas possible d'y planter de la vigne. De plus, une si petite surface du point de vue agricole est difficilement cultivable rationnellement.

Les préavis des exécutifs et municipaux des communes de Bernex et de Confignon sont favorables.

Ce projet est soutenu par la Chambre genevoise d'agriculture et le service cantonal de l'agriculture.

Questions

Ce projet n'a pas de buts spéculatifs puisqu'il s'agit d'un transfert de zones à bâtir, mètre carré pour mètre carré. De plus, les filles héritières se sont engagées par écrit à ne pas vendre ce terrain.

Equipement de la parcelle de Confignon ? Cette parcelle n'est pas reliée au réseau des séparatifs de même que deux villas déjà construites situées à quelques mètres de ce terrain. Il apparaît que ces travaux sont à effectuer de toute façon et que, en cas de déclassement, les propriétaires sont d'accord de participer aux frais occasionnés.

Pertes de surfaces pour la zone agricole genevoise ? Non, puisqu'il y a restitution au mètre près.

Création d'une enclave dans la zone agricole ? Il est vrai que la délimitation de la zone villa (qui déjà actuellement n'est pas parfaitement rectiligne, voir plan ) serait agrandie d'une poche, mais est-ce que dans notre canton toutes les bordures de zones sont parfaitement alignées ?

Privilège pour un citoyen ? Il y aurait eu privilège s'il n'y avait pas de restitution à la zone agricole. Ce n'est pas le cas. Il ne faut pas oublier que cette demande a pour but principal de permettre au fils viticulteur de ne pas perdre une vigne et préserver ainsi l'entité économique de son entreprise.

Proposition de l'ancien conseiller d'Etat en charge du DTP, qui préconisait de construire les deux logements dans la cour de la ferme. Une simple visite sur place permet de constater qu'en construisant à cet endroit, on empêche le bon fonctionnement de la cave pénalisant ainsi le fils qui se verrait contraint de ne plus employer de tracteurs, camions pour y accéder. De plus la construction projetée, en bordure de route et dans une courbe, rend dangereux les accès à l'axe routier.

Il a été mentionné en commission que le fils avait acquis en viager la maison de sa tante ainsi que 1'600 m2 de terrain entourant cette propriété. Ce fait est exact, mais il ne faut pas oublier que ce projet de loi traite les affaires du père et non du fils. Quant au viager, je rappelle que le fils ne rentrera en possession de cette propriété qu'au décès de sa tante...

Traitement des oppositions

Lors de la procédure d'opposition au projet de loi, le département a reçu deux oppositions.

- Par lettre du 24 novembre 1993, Mme Christine Wyss a déclaré former opposition au projet de loi. La qualité pour agir de cette personne ne peut être admise qu'à la condition expresse qu'elle soit propriétaire ou locataire d'un bien-fonds immédiatement voisin du périmètre du projet de loi. En l'espèce, l'opposante n'est pas propriétaire d'une parcelle immédiatement contiguë aux deux périmètres qui font l'objet du projet de plan visé à l'article 1 du présent projet de loi. Cette question peut toutefois rester ouverte, compte tenu de la réponse qui sera apportée quant au fond de l'opposition. En substance, l'opposante expose ce qui suit :

la vue sur la zone agricole depuis le chemin de la Lécherette serait pénalisée par la construction de ces villas sur la parcelle de Confignon.

Mme Wyss fait part ici d'un sentiment personnel, mais n'est pas pénalisée directement par la modification du régime des zones querellée, puisqu'elle n'habite pas à proximité immédiate de la parcelle de Confignon. La vue depuis sa maison n'est donc pas modifiée. Pour cette raison, le premier grief de l'opposante est infondé et doit être rejeté.

selon l'opposante, les intéressés posséderaient d'autres parcelles à bâtir.

Les propriétaires des parcelles concernées par cette modification de zones, à savoir le père et la mère, ne possèdent pas d'autres parcelles à bâtir. Une vérification a été effectuée, qui confirme ce fait. Ce deuxième grief est infondé, et doit donc être rejeté.

en acceptant cette modification de zones, la porte sera grande ouverte à d'autres demandes du même genre.

Mme Wyss ne démontre pas cette affirmation, qui ne repose que sur une hypothèse erronée quant à l'avenir de l'aménagement de la zone agricole. Il est rappelé que cette modification de zones est un échange mètre pour mètre de zone agricole. Cette dernière n'est donc aucunement restreinte de par l'adoption du présent projet de loi. Le souci de Mme Wyss de voir la zone agricole se restreindre est donc infondé. Il est d'autant moins probable que des échanges de ce type fassent l'objet d'autres demandes, que la justification profonde de ce projet de loi, c'est l'avenir économique d'une entreprise viticole. Pour ces raisons, ce troisième grief est rejeté.

Au vu des explications qui précèdent, l'opposition de Mme Wyss est rejetée.

- Par lettre du 26 novembre 1993, le WWF-Genève a déclaré former opposition au projet de loi. Celui-ci expose les motifs suivants :

cet échange serait néfaste pour l'environnement et créerait un précédent fâcheux.

Concernant le précédent fâcheux, la réponse à cette affirmation est à lire dans l'argumentaire du troisième grief de l'opposition précédente. Quant à dire que cet échange serait néfaste pour l'environnement, il ne s'agit une fois encore que d'une affirmation, dont la véracité n'est pas démontrée à satisfaction. Ce grief est infondé, donc rejeté.

un hypothétique déclassement de la parcelle de Bernex dans quelques années, pour la remettre en zone à bâtir, ne serait pas trop difficile, d'où un actuel déclassement de la zone agricole.

Le but de la modification de zones querellée est justement la sauvegarde de cette parcelle en vigne qui, de par son exposition, sa situation et son encépagement, présente un intérêt évident pour l'entité économique de l'exploitation viticole. De plus, cette parcelle fera partie du domaine repris par le fils à la valeur de rendement. Cette valeur de reprise agricole à des prix nettement plus bas que ceux du marché signifie clairement que le bénéficiaire ne peut vendre ou changer d'affectation les terres et bâtiments compris dans cette valeur de rendement dans les 25 ans qui suivent la reprise. Si cela devait se produire, les cohéritiers peuvent réclamer leur part sur la plus value. Ce garde-fou de la valeur de rendement empêche la spéculation dans l'agriculture. De plus, il existe déjà, dans ce même village de Lully, un cas semblable de parcelle en zone agricole au milieu de la zone construite. Dans ce projet de loi, on ne peut parler d'une emprise sur la zone agricole puisqu'il s'agit d'un échange. Pour toutes ces raisons, ce grief est infondé et doit donc être rejeté.

la parcelle de Confignon abrite actuellement un vieux verger intéressant pour la faune.

Ce verger est constitué de vieux arbres fruitiers qui ne sont pas entretenus. Les espèces fruitières en présence ne présentent pas d'essences rares, donc à conserver. Quand à la faune actuelle, la proximité des habitations existantes constitue déjà une gêne pour leur développement. La fondation opposante ne signale pas qu'une faune digne de protection vivrait dans ce verger en particulier, mais argumente sur les vergers genevois en général. Dans le cas qui nous occupe, rien ne vient prouver que des espèces seraient menacées par la disparition de ce verger. Pour ce motif, ce grief doit être rejeté.

le déclassement provoquerait un précédent grave, avec l'apparition de constructions en pleine zone agricole.

Il faut préciser que les constructions projetées ne se feraient pas en pleine zone agricole, mais au contraire en bordure de zone villa. Un chemin séparerait les maisons futures de celles déjà construites. Cet argument est donc déplacé du contexte du présent projet de loi. Ce grief est donc infondé et doit être rejeté.

la proximité de l'Aire.

La rivière « l'Aire » se situe à un peu plus de 100 mètres du bas de la parcelle (voir plan). A cet endroit, l'Aire est canalisée. La notion de proximité dans le cas d'éventuelles perturbations pour cette rivière est exagérée. Cela d'autant plus qu'une bonne partie du village de Lully est construit à moins de 50 mètres de L'Aire. Cet argument des opposants est donc infondé et doit être rejeté.

dans une période difficile pour les viticulteurs, la perte d'une partie de cette surface (Bernex) aurait nettement moins d'impact que la disparition de la zone agricole de la Lécherette.

Il est à relever dans cette phrase un non-sens évident. En effet, du point de vue professionnel, une surface viticole est mieux valorisée qu'une surface agricole. Cet argument est donc faux et doit être rejeté.

Au bénéfice des explications qui précèdent, l'opposition du WWF-Genève est rejetée.

Discussion de la commission

Un commissaire relève que ce qui le guide dans sa décision, ce sont les préavis communaux favorables. Du point de vue aménagement du territoire, cela ne perturbera pas l'aménagement du secteur.

Un autre commissaire pense que ce n'est pas le rôle de la commission de régler un problème de succession familiale.

Un amendement est présenté demandant de ne pas remettre en zone agricole la parcelle à usage viticole située sur la commune de Bernex. Cet amendement est rejeté.

Un commissaire demande que figure dans le présent rapport que les frais d'équipement sont à la charge du propriétaire. A la page 3 de ce rapport figure le fait que le propriétaire est d'accord de participer aux frais occasionnés.

Il est relevé que ce projet a déjà fait l'objet de nombreux débats au Grand Conseil et en commission, qui ont abouti de par la volonté des députés à l'étude de ce projet de loi.

Vote : 6 oui (lib, rad, PDC), 5 non (lib, PEG, ADG, soc), 2 abst. (rad, soc).

Par conséquent, la majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce projet de loi.

Premier débat

Mme Martine Roset (PDC), rapporteuse. Je voudrais simplement signaler que le plan annexé à mon rapport était celui repris de l'ancien rapport de M. Meylan sur le même sujet. Le numéro de ce plan ne correspond pas à celui évoqué dans le projet de loi. Le plan décrit dans le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui se trouve au fond de la salle pour ceux qui veulent le consulter.

M. Chaïm Nissim (Ve). J'avais annoncé un rapport de minorité sur ce projet, mais, pour finir, j'ai renoncé à le déposer. En effet, il s'agit d'un échange entre deux petites parcelles et le problème est extrêmement complexe.

Je tiens, malgré tout, à expliquer pourquoi plusieurs d'entre nous avons voté non en commission. Cela est évoqué par la rapporteuse, mais pas de façon aussi explicite que je l'aurais voulu. Nous avons hésité principalement car nous ne pouvons pas procéder à un tel échange pour le bon plaisir de certains, sans considération pour l'aménagement du territoire; certains ont même parlé de «déménagement» de territoire. Prendre un bout de zone agricole dans un endroit, prendre un bout de terrain à construire ailleurs, les échanger, construire là où il ne faut pas et inversement : c'est du patchwork !

Ce n'est pas une question vitale, mais c'est la raison pour laquelle nous avons voté non. Je voulais que cela soit écrit dans le Mémorial !

Mme Sylvie Châtelain (S). Que veut-on nous faire décider par le biais de ce projet de loi ? En fait, on veut nous faire régler un simple problème de succession !

Que s'est-il passé ? Un père a donné tous les terrains qu'il possédait en zone agricole à son fils parce qu'il reprenait l'exploitation familiale. Il s'est tout à coup retrouvé démuni pour assurer sa succession par rapport à ses deux filles qui auraient voulu construire une villa et il n'avait plus de terrain en zone à bâtir.

On nous a expliqué en commission qu'il existe d'autres solutions que l'échange qui nous est proposé. D'une part, le père possède une parcelle en zone à bâtir, laquelle pourrait accueillir, le cas échéant, l'une ou l'autre des deux maisons et, d'autre part - chose que ni le père ni le fils n'avaient souligné lors de la demande d'un plan comprenant tous les terrains dont ils disposaient - le fils a acquis une parcelle en viager dont la maison est encore occupée, mais dont le terrain est disponible et qui pourrait faire l'objet d'un échange avec les filles. Ces parcelles présentent l'avantage d'être équipées et d'être donc immédiatement constructibles, ce qui n'est pas le cas de la parcelle en zone agricole qu'on nous demande de déclasser en échange d'une autre parcelle.

La restitution en zone à bâtir d'une petite partie en zone agricole pour la vigne ferait une enclave qui, immanquablement, au bout de quelques années, se retrouverait en zone à bâtir. La parcelle qui doit être déclassée en zone agricole constitue une véritable verrue dans cette zone à proximité de l'Aire.

Je vous rappelle que, malgré le préavis favorable des communes de Bernex et de Confignon, la commission des monuments, de la nature et des sites et la commission d'urbanisme du canton ont donné un préavis négatif. En regardant le plan qui se trouve au fond de cette salle, on remarque que la zone agricole est séparée très logiquement de la zone à bâtir par un chemin. Intégrer une zone à bâtir créerait un précédent assez fâcheux et des déclassements ne manqueraient pas de suivre dans ce secteur.

En page 3 du rapport, on peut lire la question suivante : «Dans notre canton, toutes les bordures de zone sont-elles parfaitement alignées ?». Moi, je réponds par une autre question : «Est-ce bien notre rôle, à nous députés, de renforcer cette situation ?». Il s'agit là d'un aménagement à la petite semaine auquel le groupe socialiste ne peut pas adhérer !

M. Daniel Ducommun (R). Si vous le voulez bien, revenons sur terre et considérons ce projet de loi comme un acte mineur au regard des problèmes angoissants qui nous assaillent quotidiennement, qu'ils soient d'ordre économique ou social.

Comment voulons-nous prétendre améliorer le sort de quatre cent mille de nos concitoyens si nous n'arrivons pas à satisfaire une seule demande ? Les réserves de M. Nissim et de nos collègues écologistes suscitent tout de même une certaine surprise quand on pense que M. Robert Cramer est un des promoteurs de cette opération, qu'il est cosignataire des motions initiales et que M. Yves Meylan a été l'un des rapporteurs les plus actifs dans cette affaire, lors de la précédente législature. M. Saurer, en parlant de la Maison Europa, a insisté à quatre reprises sur l'importance de l'autonomie communale. Voilà un exemple d'autonomie communale qui devrait être garanti dans ce cas. Cela prouve l'incohérence de certains !

Je signale aux préopinants qu'il n'y a pas lieu de discuter sur l'anarchie de l'aménagement du territoire et de ses enclaves. Pour ceux qui connaissent la région, j'aimerais dire que la ligne de zone de construction à Lully est déjà brisée, puisqu'il y a le retour à la zone viticole d'une parcelle à construire qui se trouve quasiment à côté de celle-ci.

Nous parlons de 2 000 m2 de terrain; nous évitons la destruction d'une parcelle viticole de haute qualité; nous ne supprimons aucun centimètre de la zone agricole; nous avons le soutien des autorités communales de Bernex et de Confignon; nous avons l'appui inconditionnel des milieux compétents de l'agriculture, dont la Chambre genevoise. Que voulons-nous de plus pour régler ce problème ? (Rires.) (M. Grobet interpelle M. Ducommun.) Monsieur Grobet, vous pouvez ricaner; vous vivez un dogmatisme dans cette affaire, car, depuis le départ, vous avez dit que vous combattriez ce dossier !

C'est le 27 juillet 1987 que l'intéressé est venu au département pour faire une demande de renseignement. Cela fait sept ans ! Pour avoir instruit ce dossier lors de ma fonction de maire de la commune de Bernex, je peux affirmer que nous ne prenons aucun risque dans cette opération, que nous avons affaire à une famille intègre et honnête et que toute suspicion de spéculation - puisque c'est à la mode ce soir - est à bannir ! (Remarques et quolibets vont bon train.)

Pour le surplus, le rapport de Martine Roset est de qualité et précise parfaitement l'historique de ce dossier, aujourd'hui vieux de sept ans.

Notre groupe votera ce projet de loi. Je vous remercie de nous accompagner.

M. Alain-Dominique Mauris (L). Parlons de l'enclave, si vous le voulez bien.

Le dogme des bordures de zones alignées nous ferait-il retomber au temps des partages coloniaux où l'on prenait la règle pour tirer un trait sur une carte afin d'en définir la frontière sans se préoccuper des avis locaux ? Ici, ils sont unanimement favorables. Nous ne sommes pas sur le continent africain, mais à Genève sur le coteau de Lully en 1994 ! Bernex et Confignon ne sont pas des colonies éloignées de la métropole, mais des communes qui, comme toutes celles de notre République, aspirent à plus d'autonomie en matière d'aménagement du territoire, car elles sont directement au fait des sensibilités locales, des valeurs à préserver et de l'intérêt public. Ne donnons pas à ce débat, qui dure déjà depuis plus de sept ans, comme l'a rappelé M. Ducommun, une fausse interprétation. Ramenons les faits à leur juste valeur - en effet, il s'agit d'un échange mètre pour mètre - sans agiter l'épouvantail de la spéculation ou de l'atteinte à la nature qui ne sont pas d'à-propos !

Les préavis des exécutifs de Bernex et de Confignon sont favorables. Est-il utile de le rappeler ? Ces avis ont été pris par des communiers responsables et soucieux de leur commune. Dans ce parlement, certains ont tendance à rappeler l'autonomie communale lorsqu'elle sert leur cause et à l'oublier aussi vite ensuite. Il suffit de se souvenir des interventions au point 24. Ici, cette fois, il ne s'agit pas d'un point de dimension internationale, mais d'un point purement communal au sujet duquel toutes les parties concernées sont d'accord.

Messieurs les députés écologistes, je vous rappellerai vos interventions ! Soyez rassurés pour les petits oiseaux du verger qui doit être détruit, car la commune de Bernex va installer un arboretum et planter plus de soixante fruitiers dans quelques jours. Ce sera une compensation.

Accepter ce projet de loi revient donc à reconnaître aux communes le bien-fondé de leur avis favorable tout en préservant l'intérêt général et à accorder à une entreprise, certes petite, la possibilité d'améliorer un outil de travail dont elle a grand besoin.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je vais évoquer très rapidement six points.

1) Dans le cas présent de cet échange de terrain, mètre pour mètre, la zone agricole n'est pas prétéritée.

2) Il s'agit d'un remaniement de très petite importance.

3) Dans le cadre des aménagements de hameaux, nous avons souvent quelques excroissances de ce genre qui correspondent ici à la solution d'un problème familial, et Mme Châtelain a raison d'évoquer l'existence de ce problème.

4) La viabilité de l'entreprise joue un très grand rôle par rapport au déplacement de cette maison qui était destinée aux filles du propriétaire.

5) Ce n'est pas une règle générale que nous aimerions imposer partout, mais, de temps en temps, il faut savoir faire une exception...

6) ...surtout que ce déplacement n'engendre aucun inconvénient pour la collectivité !

Je vous propose donc de voter ce projet.

M. Pierre Meyll (AdG). Merci, enfin, Monsieur le président ! Contrairement à ce que j'avais dit dans mon discours de doyen, il semble bien que l'oeil gauche commence à baisser sérieusement ! (Manifestation.) Je vous excuse, puisque j'ai quand même la parole !

Le président. J'ai deux yeux à ma gauche !

M. Pierre Meyll. Oui, ça fait deux ! Ça fait même six qui n'arrivent pas à voir ! A croire que vous le faites exprès !

J'aimerais d'abord rectifier ce qui est écrit dans le rapport de Mme Roset, par ailleurs fort bien documenté. En page 7, il est dit : «Un commissaire demande que figure dans le présent rapport que les frais d'équipement sont à la charge du propriétaire.». Ce n'est pas dans le rapport que je voulais que ça figure, Madame, mais dans le projet de loi ! Cela a évidemment été refusé en commission. Ce n'est donc pas la même chose. D'autre part, pourquoi les frais d'équipement ? Il serait quand même plus normal que ce soit inscrit. Puisque vous dites que c'est quelque chose d'acquis, autant que ce soit stipulé.

On a parlé de l'autonomie communale. Peut-être la droite nous ferait-elle le plaisir de revenir en arrière : on échange la Maison Europa contre la parcelle de Confignon ? Ce marché vous va-t-il ? (Manifestation.) Cela ne semble pas le cas. (M. Joye interpelle l'orateur.) Il paraît que M. Joye est d'accord, donc vous voyez, c'est déjà quelque chose de positif !

Vous parlez des votes dans les communes. Monsieur, en face, dont je ne me rappelle plus le nom - excusez le doyen - a parlé de l'exécutif des communes. Je suis d'accord : le législatif a voté, mais à une infime majorité, semble-t-il, et on pourrait même dire, d'après les échos que j'ai entendus, que si on avait voté à bulletin secret le résultat aurait été légèrement différent. (Manifestation de réprobation.) Alors, vrai ou pas, je vous donne ma version, celle que j'ai recueillie parmi vos communiers; elle me semble aussi valable que la vôtre !

M. Koechlin avait fort judicieusement déclaré, au début et à la présentation de ce projet de loi, que nous n'étions pas là pour régler les problèmes de famille. Je regrette son absence; il aurait pu me venir en aide, car avec sa façon très amphigourique de présenter les problèmes, il aurait probablement «enlevé le morceau» !

Toujours est-il que je considère, que nous trouvons - c'est la raison pour laquelle nous n'accepterons pas ce projet de loi - anormal de procéder à un échange de parcelle. En effet, même si le rapport actuel de cette vigne est excellent et qu'il faut la maintenir - n'étant pas amateur de vin, je ne suis pas apte à en juger - il est fort possible que cette parcelle revienne dans une zone à bâtir dans le futur. Il faut donc cesser de faire du patchwork avec ces terrains échangés !

Mis aux voix, le projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 et 2.

Art. 3

M. Pierre Meyll (AdG). Je propose à l'article 3, l'amendement que j'avais déjà présenté en commission, à savoir :

«Art. 3 (nouveau) : les frais d'équipements liés à la mise en valeur de la parcelle déclassée sont entièrement à la charge des propriétaires.».

Ensuite, l'article 3 devient le 4 et le 4 devient le 5. C'est tout simple !

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, les articles 3 et 4 sont adoptés.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bernex et de Confignon (création d'une zone agricole et d'une zone de développement 5)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28579-507-516, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 11 mars 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bernex et de Confignon (création d'une zone agricole à la route de Soral et d'une zone de développement 5 au chemin de la Lécherette), est approuvé.

2 Le terrain correspondant à la zone agricole créée en vertu de l'alinéa 1 ne peut être bâti.

3 La zone de développement 5 est destinée à la construction de deux villas.

4 Les plans des zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité II aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 5 créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Les oppositions à la modification des zones formées par

- Le Fonds mondial pour la nature - WWF Suisse;

- Madame Christine WYSS,

sont rejetées, dans la mesure où elles sont recevables, pour les motifs exposés dans le rapport de la commission chargée de l'étude de la présente loi.

Art. 4

Un exemplaire du plan no 28579-507-516 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.