Séance du
vendredi 27 mai 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
7e
session -
20e
séance
IU 20
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. M. Vanek a posé un certain nombre de questions liées à la situation de l'entreprise Tavaro, et c'est bien volontiers que le Conseil d'Etat y répond.
Tout d'abord, je répondrai que la situation actuelle de Tavaro, par rapport à celle que nous avons connue il y a de cela plusieurs mois, fait l'objet des préoccupations et de l'action du département de l'économie publique, non pas depuis plusieurs mois, mais depuis plusieurs années. Mais il y a plusieurs mois, la situation était grave. Aujourd'hui, au terme d'entretiens difficiles, répétés, d'actions entreprises auprès de la direction et des partenaires sociaux, nous pouvons dire que le pire a été évité.
A un moment donné, l'existence même de l'entreprise était en jeu. A la suite de ces entretiens, des mesures ont été prises. Je ne les répéterai pas ici puisqu'elles ont été évoquées par voie de presse, mais je puis vous dire qu'en terme de sauvegarde de la substance industrielle de cette entreprise, je crois que nous avons l'essentiel et qu'en revanche les secteurs de production de Tavaro en Valais sont beaucoup plus touchés. Le Valais fait les frais de l'opération et cela n'est pas de nature à nous réjouir, tant s'en faut.
En ce qui concerne les éléments de discussion, ils ont porté sur la substance de l'entreprise, sa capacité de coopération, de reconversion industrielle. Au coeur des discussions, les perspectives de coopération avec une entreprise japonaise ont été abordées. Cela apporterait une ouverture plus technologique pour Tavaro, une perspective de sous-traitance extrêmement importante pour cette entreprise. C'est un renforcement de Tavaro en ce sens que tout le système de recherche et de développement est pour Tavaro-Genève, concentré dorénavant sur Genève.
Par ailleurs, un plan social complet et très détaillé a été mis en place avec le concours des partenaires sociaux. Je voudrais rendre hommage au sens des responsabilités de la FTMH. Vous avez évoqué, avec un soupçon de doute, Monsieur Vanek, le fait que des mesures de chômage partiel aient décidé, à propos de Tavaro, des mesures de réduction d'horaire de travail.
Permettez-moi de vous dire que nous avons été, conjointement avec la FTMH, les initiateurs de ce type de mesures. La FTMH elle-même les a demandées parce que nous avons eu ensemble la conviction qu'il y avait là un passage pour lequel il aurait été vraiment déraisonnable de démanteler l'outil de production, le potentiel humain actif de cette entreprise, et que, probablement, on arriverait à s'en sortir en gardant un plus grand effectif que ce qui était envisagé au départ par la direction de l'entreprise.
Le plan social a été approuvé par la direction, l'Union industrielle de Genève, la FTMH et la commission du personnel. Il a été ratifié à l'unanimité par la commission du personnel. Nous avons fait un travail en profondeur et, une fois encore, nous avons pu compter en la FTMH sur un partenaire absolument responsable et engagé.
Vous avez évoqué des mesures d'accompagnement dans le cadre de la restructuration de Tavaro. Permettez-moi de vous dire qu'elles ont été engagées et que toutes sortes de mesures d'accompagnement sont relatives à la formation, au recyclage et à la reconversion professionnelle des personnes qui sont touchées par la restructuration. Dans le cadre de ces mesures d'accompagnement, nous travaillons avec l'université ouvrière de Genève, l'UOG, notamment, qui se montre être un partenaire actif dans ce secteur.
Je voudrais m'arrêter ici et ne pas répondre à l'éternelle litanie qui concerne le maintien général des conditions-cadres concernant l'industrie, car cela devient franchement lassant. Vous savez parfaitement que le Conseil d'Etat, avec l'appui de ce parlement, se bat au quotidien pour le maintien du tissu industriel le plus dense et le plus diversifié possible dans ce canton. Cela passe par toute une série de conditions-cadres connues, mais que l'on a de la peine à évoquer, car il n'en est probablement jamais fait la synthèse. Les zones industrielles du canton de Genève sont performantes. L'Office pour la promotion de l'industrie est un outil qui fait l'envie des autres cantons, en tout cas ceux de Suisse-romande, à tel point, d'ailleurs, qu'il est amené à engager une opération pilote sur l'ensemble des cantons suisses-romands pour voir si nous ne pourrions pas mettre un outil de même nature à la disposition de la Suisse-romande.
Nous vous répétons que le département de l'économie publique travaille pour le maintien du tissu industriel par des actions concrètes pour un certain nombre d'entreprises en difficulté. Mais vous savez que ce travail ne peut être efficace que s'il est discret. Par conséquent, il est inconcevable de l'évoquer sur la place publique, car la situation des industries serait davantage compromise.
Dans le cadre de la promotion économique, vous savez que les résultats «engrangés» concernent, pour une bonne partie, le renforcement du tissu industriel avec des entreprises qui rejoignent notre canton et ont des compétences technologiques de toute première force, de toute première valeur qui enrichissent ainsi le tissu industriel de ce canton.
Enfin, vous avez évoqué le problème de la reconversion des activités de type militaire. Vous vous êtes réjouis - mais je ne puis partager votre cynisme, même si, sur le plan politique et philosophique, je rejoins une partie du chemin que vous avez fait - que ce type d'activités disparaisse. Bien sûr, de telles activités dans l'industrie de l'armement ne représentent pas un idéal économique en soi. Toutefois, elles sont génératrices d'emplois. Et si on les supprime, elles conduisent à perdre un nombre important d'emplois et nous ne pouvons pas, sans autre - et le terme est de circonstance - la fleur au fusil nous en réjouir.
Dans ce contexte, Monsieur le député, il faut admettre que dans l'industrie d'armement un certain nombre de choses doivent être évoquées de manière sensiblement plus nuancée que vous ne le faites. Un certain nombre d'entreprises genevoises, en particulier dans le cadre des programmes d'aviation militaire, ont pu développer des savoir-faire dans la technologie civile qui leur ont amené des marchés civils qui en font des industries de pointe dans le domaine de l'aviation civile.
Il faut donc être plus nuancé, car il est bien vrai, je suis absolument d'accord avec vous, que l'industrie de l'armement ne représente pas un idéal économique. Mais on ne peut pas sans autre faire «joujou» avec les emplois et avec les débouchés technologiques qui sont parfois induits par ce type d'industrie. Maintenant, une reconversion doit avoir lieu dans ce domaine, et qu'il me soit permis de dire que Genève n'a pas d'autres entreprises d'armement, au sens où on l'entend sur le plan de la Confédération, soit qu'aucune entreprise d'armement ne dépend de la Confédération.
Un certain nombre d'entreprises, elles sont peu nombreuses à Genève, ont des commandes liées à des commandes militaires dans le cadre de la Confédération, et, à cet égard, des programmes de recyclage et de perfectionnement professionnel sont engagés avec la Confédération, des programmes d'encouragement à l'innovation et à la diversification sont déployés. Dans ce contexte, pour les restructurations, vous avez des entreprises qui lâchent des programmes d'armement pour se reconvertir dans de nouveaux créneaux industriels, et vous avez également des mesures d'accompagnement fiscal qui sont liées aux restructurations d'entreprises en tant que telles.
Voilà, Monsieur le député, la réponse que nous pouvions apporter à votre interpellation.
Cette interpellation urgente est close.