Séance du jeudi 28 avril 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 6e session - 13e séance

M 871-A
7. Rapport de la commission du logement chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Jean-Luc Richardet et David Lachat (reprise par Laurent Moutinot) relative au nombre de places de stationnement par logement. ( -) M871
Mémorial 1993 : Développement, 5002. Commission, 5008.
Rapport de M. Florian Barro (L), commission du logement

La commission du logement du canton, sous la présidence de M. Jacques-André Schneider, a étudié ce projet de loi au cours de la séance du 3 novembre 1993 ainsi que sous la présidence de Mme Geneviève Mottet-Durand les 29 novembre et 13 décembre 1993, les 10 et 24 janvier, les 7 et 28 février 1994.

Assistaient également aux travaux: M. Claude Haegi, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, Mmes C. Rosset, secrétaire adjointe, et K. Bellinazzo-Spahni, adjointe de direction à la direction générale du logement, MM. Pierre Ischi, directeur général du logement, L. Cornut, chef de la division des études d'aménagement et J.-M. Favre, chef de la division de l'équipement du département des travaux publics et de l'énergie.

1. Généralités

La présente proposition de motion a pour objet de réétudier, à la lumière des coûts économiques, des vacances de locations et des récentes études de la commission d'urbanisme, les paramètres qui conduisent à la nécessité d'équiper en places de stationnement de tout projet de construction, en particulier le nombre à prévoir ou imposé.

2. Travaux de la commission

Lors des discussions préliminaires et dans l'exposé des motifs de la proposition de motion, les commissaires ont relevé les points saillants suivants:

Equipement

- les instances publiques chargées de la planification n'ont pas toujours en tête la conséquence du coût qu'engendrent leurs exigences. Les départements aux compétences ciblées, prennent certaines options sur l'équipement des quartiers et voient leur application pratique freinée par un autre département chargé du suivi;

- les communes, bien souvent, se complaisent à imposer un nombre disproportionné de places de stationnement par logement, et surtout exclusivement en sous-sol, dans le but de faire disparaître les véhicules de la surface. Cette conception de l'urbanisme devrait pour le moins s'accompagner de restriction de stationnement sur la voie publique, par mesure compensatoire;

- l'utilisation trop faible de la possibilité de placer des parkings en surface (sur domaine privé), chaque fois que cela est possible.

Construction et location

- le prix de revient d'une place de stationnement en sous-sol se situe entre 25 000 et 35 000 F, bien souvent supérieur au prix du véhicule abrité;

- le prix de location n'atteint pas toujours le rendement souhaité sur le coût économique de la place;

- la place de stationnement est imposée avec le bail d'appartement;

- la difficulté ou la restriction de louer des places en dehors des occupants de l'immeuble où se situe l'immeuble;

- la charge locative de cette place n'entre pas en considération dans le taux d'effort déterminant pour la demande d'allocation logement;

- la crise économique restreint la demande en places de stationnement;

- par endroits la location d'une place équivaut au prix de location d'une chambre.

Société et évolution

- baisse de la demande;

- diversification des modes de transport (deux-roues, transports publics);

- insécurité dans les parkings en sous-sol;

- le domaine public est saturé de véhicules.

3. Auditions

Office des transports et de la circulation (OTC), M. F. Wittwer

L'OTC rappelle que les normes VSS éditées par l'Union suisse des professionnels de la route sont utilisées comme base de référence dans la planification. Ces normes figurent dans le document «Circulation 2000». Selon M. Wittwer, une meilleure utilisation du ratio places en sous-sol et en surface devrait être considérée lors de l'élaboration des plans localisés de quartier. D'autre part, à Genève, la législation, contrairement aux autres cantons, considère les places directement accessibles depuis le domaine public sur le domaine privé comme privées. Cela présente l'avantage de la maîtrise de son exploitation par le propriétaire, mais ne favorise pas l'augmentation de l'aménagement de places en surface. L'OTC confirme qu'il n'a jamais préavisé plus de 1,8 place/logement, et suggère, de par la connaissance acquise dans ce domaine, que le département des travaux publics et de l'énergie ne devrait pas accepter des exigences municipales qui soient au-dessus de ce taux.

M. Vicari, vice-président de la commission d'urbanisme

En préambule, M. Vicari tend à corriger une idée préconçue, qui consiste à dire que la détention d'un véhicule est fonction des moyens de transport à disposition. La voiture obéit, selon lui, aux mêmes règles que n'importe quel autre produit de consommation.

L'occupation des logements peut se répartir de la manière suivante:

- 4 logements sur 10 sont occupés par 1 seule personne;

- 3 sur 10 par 2 personnes,

- 3 sur 10 par 3 personnes et plus.

D'autre part, 4 ménages sur 10 ont plus d'une voiture, et 2 sur 10 n'en ont pas.

Ce qui permet de constater qu'il est rare de compter plus d'un véhicule par logement pour 6 d'entre eux sur 10.

La statistique et les études de cas ont démontré que, dans la vie d'un immeuble, le taux passe de 1,4 au début, à 1,0 après 20 ans environ, puis à 1,2 de par le renouvellement de la population. A Meyrin, en l'occurrence, le taux est de 1,31 voiture par logement (statistique de 1991).

M. Vicari a relevé également que sur 1 hectare, par exemple en zone de développement, il était possible de construire 100 logements d'environ 100 m2 et approximativement 45 places de stationnement en surface; d'où la nécessité de compléter par environ 100 places en sous-sol pour arriver au taux de 1,4. Ce taux concerne aussi bien le domaine public que privé.

M. Vicari regrette l'utilisation trop brutale des normes VSS qui ne tiennent pas compte de la structure des ménages, et qui fait abstraction du fait que l'offre des transports publics n'est pas un frein à la possession d'un véhicule.

En conclusion, M. Vicari estime que la réglementation actuelle manque de souplesse, et verrait mieux, en mettant les garde-fous qui s'imposent, que les taux de places dans les projets de constructions ou les PLQ soient précédés d'investigations du périmètre sur la base des paramètres décrits plus haut.

Association des promoteurs constructeurs genevois (APCG)

MM. Barbier-Müller et Payot soutiennent le principe de la révision du taux des places de stationnement, en mentionnant que celui-ci ne devait pas se situer au-dessous de 0,8 à 1,0 et que la liberté devait être donnée aux propriétaires pour porter ce taux plus haut. Ils relèvent que dans la plupart des opérations en gérance portées à leur connaissance les parkings étaient occupés à un ratio de 1,0 place par logement et que les vacances se situaient entre 10 et 35% du total des places offertes. Chaque fois que cela est possible, il est nécessaire d'étudier la répartition des places en sous-sol et en surface en prenant garde à l'irréversibilité des constructions en sous-sol.

Chambre genevoise immobilière (CGI)

MM. Garabédian et Müller ont fait part de leur intérêt pour cette motion en relevant que le but visé, à savoir l'équilibrage de l'offre et de la demande, la réduction des prix de revient des logements et des locations, était louable, mais que cela ne devait pas se faire au détriment du choix du mode de transport. Tout comme l'APCG, la CGI relève qu'il est arrivé que le département des travaux publics et de l'énergie, devant la foison de demandes diverses et différentes des instances consultées, préconise une étude d'impact sur un projet de construction contenant un parking. Ce qui a la fâcheuse conséquence d'entraîner retards et surcoûts. La CGI demande que soit examinée la possibilité de louer des places vacantes aux tiers n'habitant ou n'occupant pas l'immeuble. En effet, cette restriction est parfois imposée au niveau de l'autorisation de construire. En conclusion, à l'exception de l'inscription d'un taux dans la loi, la CGI considère que cette motion constituerait un pas dans la voie de la déréglementation, salutaire à la relance de l'économie en général et immobilière en particulier.

Association des communes genevoises (ACG)

MM. Lamprecht, Hiltpold et Hug exposent leur intérêt pour cette motion, tout en recommandant de ne pas inscrire de taux dans la loi, et préconisent plutôt une approche commune par commune, en fonction de l'infrastructure existante (voirie, transports, services, commerces...) et de l'évolution démographique et sociologique des quartiers. L'ACG relève que la tendance des communes est à la baisse en matière d'exigence de places de stationnement, bien que certaines d'entre elles aient profité de projets privés sur leur territoire pour imposer et s'équiper de places à bon compte. L'ACG se dit également préoccupée par les coûts induits des exigences des communes sur les plans financiers.

Division de l'équipement du département des travaux publicset de l'énergie (DTP)

M. Favre précise que l'ensemble des constats et propositions faites lors des précédentes auditions confirme, pour le DTP, la justesse d'avoir mandaté M. Vicari et la commission d'urbanisme pour procéder à une étude fouillée de la question. Le rapport est très volumineux et les conclusions dépendent quelque peu de la position du Grand Conseil à cet égard. En l'état, M. Favre constate que le taux moyen de 1,3 est en corrélation avec les différentes déclarations officielles recueillies et qu'il serait peu judicieux de descendre au-dessous de 1,0.

4. Conclusion

Dans les discussions qui suivirent les auditions et lors de la rédaction de la motion amendée, plusieurs propositions ont fait état de mentionner un taux maximum ou un taux minimum ou encore une fourchette, de laisser la liberté au constructeur d'aller au-delà d'un certain minimum, de faire un distinguo entre les différentes zones de constructions et de préconiser l'usage des places en surface. La synthèse de ces propositions se trouve dans le texte de motion amendé ci-dessous qui a été accepté à l'unanimité de la commission.

Nous vous recommandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre les recommandations de la commission et de voter le texte tel que proposé.

PROPOSITION DE MOTION

relative au nombre de places de stationnement par logement

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- la nécessité de réduire le coût de revient des nouveaux logements alourdi par un nombre excessif de parkings;

- les parkings qui demeurent en tout ou partie vides, dans les sous-sols de nombreux immeubles, surtout en périphérie de la Ville de Genève;

- les travaux de la commission d'urbanisme,

invite le Conseil d'Etat

- à informer le Grand Conseil du résultat des études et travaux menés par la commission cantonale d'urbanisme à propos des places de parc par logement;

- à prévoir, en règle générale et principalement en zone de développement, un ratio minimal de 1 place de parc par logement. Au-delà de ce ratio minimal et jusqu'à un ratio maximal de 1,5, le constructeur devrait être libre, mais en aucun cas contraint, de déterminer le ratio idéal, en fonction de son analyse et des besoins du marché;

- à permettre la construction de places de parcs en surface, surtout dans la région périphérique et là où cela est praticable;

- à autoriser la reconversion temporaire des places vacantes, dans le respect de la sécurité des utilisateurs du bâtiment.

Débat

M. Max Schneider (Ve). Je n'ai pas grand-chose à ajouter...

Des voix. Alors, tais-toi !

M. Max Schneider. Je n'ai pas grand-chose à ajouter, puisque cette motion a été discutée en commission et qu'il y a eu consensus.

Mais je fais une demande d'amendement à la troisième invite. Je propose de lui rajouter ce qui suit : «Toute nouvelle place sera pourvue, dans la mesure du possible, d'un revêtement perméable.». C'est ce qui est recommandé par tous les experts en matière d'environnement pour les nouveaux aménagements de parkings.

Le président. Je mets donc aux voix l'amendement de M. Max Schneider qui consiste à rajouter à la troisième invite :

«Toute nouvelle place sera pourvue, dans la mesure du possible, d'un revêtement perméable.».

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mise aux voix, la motion ainsi amendée est adoptée.

Elle est ainsi conçue:

MOTION

relative au nombre de places de stationnement par logement

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- la nécessité de réduire le coût de revient des nouveaux logements alourdi par un nombre excessif de parkings;

- les parkings qui demeurent en tout ou partie vides, dans les sous-sols de nombreux immeubles, surtout en périphérie de la Ville de Genève;

- les travaux de la commission d'urbanisme,

invite le Conseil d'Etat

- à informer le Grand Conseil du résultat des études et travaux menés par la commission cantonale d'urbanisme à propos des places de parc par logement;

- à prévoir, en règle générale et principalement en zone de développement, un ratio minimal de 1 place de parc par logement. Au-delà de ce ratio minimal et jusqu'à un ratio maximal de 1,5, le constructeur devrait être libre, mais en aucun cas contraint, de déterminer le ratio idéal, en fonction de son analyse et des besoins du marché;

- à permettre la construction de places de parcs en surface, surtout dans la région périphérique et là où cela est praticable; toute nouvelle place sera pourvue, dans la mesure du possible, d'un revêtement perméable;

- à autoriser la reconversion temporaire des places vacantes, dans le respect de la sécurité des utilisateurs du bâtiment.