Séance du
jeudi 28 avril 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
6e
session -
13e
séance
I 1883
M. Dominique Hausser (S). Résumé d'un feuilleton à rebondissements multiples. Ce qu'on appelle le Palais Wilson fut construit en 1875, il y cent dix-neuf ans. Hôtel national tout d'abord, il est utilisé entre 1920 et 1937 par la Société des Nations. Depuis cette date, il est loué à diverses organisations internationales et à divers services de l'administration fédérale. En 1966, la Ville de Genève en devient propriétaire...
Le président. Les députés que ce sujet n'intéresse pas sont priés de sortir de la salle !
M. Dominique Hausser. ...et, dès 1984, elle dispose librement du bâtiment. Le 1er août 1987, une partie du Palais Wilson brûle. Suite à la proposition 206, en juin 1989, au Conseil municipal de la Ville de Genève, proposition qui vise à transformer le Palais Wilson en hôtel, l'Hôtel Président en bureaux et à réaliser un centre de congrès ainsi qu'une crèche et un jardin Robinson, un contreprojet vit le jour, contreprojet d'origine socialiste d'ailleurs, qui répondait à ce qu'on a appelé ensuite le projet Haegi. Une autorisation définitive de construire est accordée pour les deux premiers objets, c'est-à-dire la transformation du Palais Wilson et de l'Hôtel Président.
Le 24 juillet 1992, le Conseil d'Etat, le Conseil administratif de la Ville de Genève et les partenaires privés se mettent d'accord pour faire du Palais Wilson une Maison de l'Environnement, à charge pour la Confédération de le restaurer. Le Conseil municipal de la Ville de Genève adopte, le 25 mai 1993, un arrêté qui ratifie l'utilisation du Palais Wilson en Maison de l'Environnement tout en maintenant un droit de superficie à la société anonyme des Hôtels Président pour la réalisation d'un centre de congrès et l'extension de l'hôtel.
Le message du Conseil fédéral 93 085, du 20 octobre 1993, propose au parlement de voter un crédit de 80 millions pour la rénovation du Palais Wilson qui se répartit comme suit : 73,9 millions, dont 6 millions de réserve pour le renchérissement, et 6,1 millions pour une participation à la construction du parking de deux cent vingt places, dont 1 million de réserve pour le renchérissement. Il faut ajouter que ces 80 millions comprennent également une généreuse réserve de 8,45 millions pour imprévus vu les aléas que ce genre de rénovation entraîne. On le voit, ce nouveau projet a suscité l'enthousiasme des Genevois, des autorités fédérales et des milieux concernés des Nations Unies.
Dernier épisode à ce jour, le titre : «Où un héros bien connu de notre littérature enfantine entre en jeu et où on verra que la comparaison s'arrête là !»
C'est avec stupéfaction que les Genevois ont lu dans leur journal préféré la démarche effectuée par le conseiller d'Etat, M. Philippe Joye, auprès de certains parlementaires fédéraux. Au lieu de soutenir ce projet, d'expliquer, le cas échéant, les éléments constitutifs du devis général - qui, comme chacun le sait, ne constitue pas le coût définitif d'une réalisation et qui peut toujours être abaissé au moment de la mise en soumission des travaux en mettant en concurrence diverses entreprises - que fait M. Philippe Joye ? Il écrit à ses amis politiques que le coût des travaux serait excessif et demande une expertise. Cette démarche, incongrue et discourtoise, a amené le Conseil d'Etat à solliciter une audience auprès du conseiller fédéral Otto Stich pour tenter d'éviter les effets catastrophiques tant pour la crédibilité de Genève que pour l'avenir du projet. Vous avez entendu M. Haegi tout à l'heure essayer de nous convaincre qu'il effectuait de nombreuses démarches pour assurer le rôle international de Genève. Je me réjouis de voir ce qui va se passer avec le successeur du GATT !
Cela m'amène à poser les questions suivantes :
1) Est-il exact que M. Philippe Joye a écrit à un ou plusieurs parlementaires fédéraux pour leur suggérer que le devis de rénovation était excessif et que sa lettre a été portée à la connaissance des membres de la commission du Conseil national chargé d'examiner le message «Palais Wilson» du Conseil fédéral 93 085 ?
2) Le Conseil d'Etat peut-il porter à la connaissance du Grand Conseil le contenu exact de cette lettre ?
3) M. Philippe Joye a-t-il effectué cette démarche sans en informer les autorités fédérales concernées, en tant que maître de l'ouvrage, et la Ville de Genève, propriétaire du Palais Wilson ?
4) M. Philippe Joye s'était-il préalablement informé au sujet du devis estimatif auprès de la commission chargée par la Confédération de mener le projet et dans laquelle l'Etat de Genève est représenté ?
5) La démarche de M. Philippe Joye ayant eu pour conséquence de diminuer le crédit du Conseil fédéral de 5 millions de francs - de 80 à 75 millions - le Conseil d'Etat peut-il confirmer que les dépassements éventuels seront pris en charge par l'Etat de Genève sans remettre en cause la qualité du projet ?
6) Comment le Conseil d'Etat envisage-t-il de favoriser la lutte contre le chômage après une démarche qui retardera de six mois au moins la procédure parlementaire fédérale d'approbation du crédit et, par conséquent, de l'ouverture de ce chantier offrant plusieurs centaines de places de travail ?
7) Le Conseil administratif de la Ville de Genève a, semble-t-il, protesté contre les démarches de M. Philippe Joye. Le Conseil d'Etat peut-il porter à la connaissance du Grand Conseil le contenu de la lettre du Conseil administratif de la Ville de Genève ?
8) En résumé, le Conseil d'Etat peut-il affirmer être totalement acquis au projet de rénovation du Palais Wilson, de son affection à la Maison de l'Environnement et que, par conséquent, il s'engagera, de toutes ses forces et avec tous les moyens nécessaires, à assurer le succès de cette opération ?
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Je ne vois pas très bien l'objectif poursuivi par l'interpellant si ce n'est de laisser planer des doutes sur l'action conduite par notre collègue du département des travaux publics.
Vous avez fait la remarque que j'avais «tenté» de dire, au début de la séance, que beaucoup de démarches étaient effectuées; je tiens à vous dire que je n'ai rien «tenté» du tout, j'ai simplement dit ce que nous faisions. Ce sont des faits. Ce soir le Conseil d'Etat voulait vous faire part de sa préoccupation quant à la présence des organisations à Genève et des difficultés qui sont les siennes pour conduire dans les meilleures conditions le dossier de l'Organisation mondiale du commerce. Cela pour que vous réalisiez à quel point les conditions dans lesquelles nous travaillons dans ce domaine ont changé. Nous sommes mobilisés sur ce thème, nous l'avons dit dès le début de la législature : ce sont des faits ! C'est dans cet esprit que M. Philippe Joye, a tout de suite pris des mesures pour débloquer une situation momentanément paralysée. C'est pourquoi il est allé dans le sens de la Confédération pour permettre de surmonter les difficultés administratives qui pouvaient compromettre encore plus longuement l'ouverture du chantier.
Je réponds rapidement à vos questions.
1) C'est faux !
Je ne répète pas les questions, vous les avez déjà entendues !
2) Cette question n'est valable que si on avait répondu affirmativement à la première question ! (Rires.)
3) C'est faux !
4) Oui !
5) Réponse affirmative !
6) Faux !
7) C'est avec plaisir que je vous ferai connaître le contenu de cette lettre.
8) J'en viens à l'essentiel. Oui, Monsieur le député ! En effet, le Conseil d'Etat, tout comme le Conseil d'Etat précédent, s'est engagé et il marque aujourd'hui une détermination encore plus grande, compte tenu de ce que je vous ai dit préalablement.
Votre interpellation est intitulée : «A quoi joue le Conseil d'Etat ?». Le Conseil d'Etat ne joue pas, il travaille dans le sens que vous attendez, pour que Genève puisse continuer le rôle qui est le sien dans le domaine international. C'est aujourd'hui plus difficile qu'hier. Merci de nous soutenir.
M. Jean-Pierre Lyon. Et la Ville de Genève dans tout ça ?
Le président. Monsieur Dominique Hausser, souhaitez-vous répliquer ?
M. Dominique Hausser (S). Monsieur le président, je répliquerai à la prochaine séance. Monsieur Haegi, je n'ai malheureusement pas entendu la réponse à la question 7 !
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Avec plaisir ! (Aahh de satisfaction et rires.)