Séance du
jeudi 24 mars 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
5e
session -
9e
séance
PL 7074
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, du 9 mars 1929, est modifiée comme suit:
Art. 14 A (nouveau)
1 Lorsqu'un plan localisé de quartier, inscrit dans le périmètre d'un plan d'extension, est modifié notamment par la création ou la suppression d'une ou plusieurs voies de communication ou équipements publics, le Conseil d'Etat adopte le nouveau plan en subordonnant son entrée en vigueur à l'adoption par le Grand Conseil des corrections du plan d'extension concerné. Il soumet la question au Grand Conseil dans un délai de six mois, en lui présentant soit un projet de modification, soit un projet de suppression du tracé de la voie de communication ou de l'équipement public précédemment adopté.
2 Le Grand Conseil décide ensuite soit de conférer à ce nouveau plan la qualité de plan d'extension en l'approuvant comme tel, soit d'abroger pour tout ou partie le plan d'extension existant. Reste réservée la procédure prévue par la loi sur l'expropriation.
3 Lorsqu'un nouveau plan localisé de quartier est adopté par le Conseil d'Etat mais ne comporte aucune création, suppression ou modification de voie de communication ou d'équipement public, il fait partie intégrante du plan d'extension, sans que ce dernier soit de nouveau soumis à l'approbation du Grand Conseil.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'article 9, alinéa 1, de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, du 9 mars 1929 (ci-après LEXT), mentionne que la réalisation des voies de communication et des équipements publics prévus au plan localisé de quartier peut être déclarée d'utilité publique par le Grand Conseil, conformément à l'article 3, lettre a, de la loi sur l'utilité publique. Le plan annexé à la loi portant déclaration d'utilité publique est alors qualifié de plan d'extension (art. 9, al. 2, LEXT).
Les alinéas 2 et 3 de l'article LEXT règlent le cas où la réalisation d'une rue, route, chemin ou équipement public prévue dans un plan d'extension n'a pas été amorcée dans un délai de six ans à partir de son approbation. Dans cette hypothèse, tout propriétaire intéressé peut demander au Conseil d'Etat la modification ou la suppression du tracé de cette rue, route, chemin ou équipement public. Le Conseil d'Etat est alors tenu de soumettre la question au Grand Conseil dans un délai de six mois, en lui présentant soit un projet de modification ou de suppression, soit un projet de confirmation du tracé de la voie de communication ou de l'équipement public précédemment adopté.
En revanche, la LEXT ne règle pas le cas où un plan localisé de quartier qui fait l'objet d'un plan d'extension, est réexaminé et fait l'objet d'une modification conformément à l'article 5, alinéa 11.
Dans l'hypothèse où la modification du plan localisé de quartier, objet du plan d'extension, comporte la création ou la suppression de voies de communication ou d'équipements publics, il se justifie de soumettre ce nouveau plan à l'attention du Grand Conseil, qui décidera soit de le déclarer également plan d'extension, soit d'abroger pour tout ou partie le plan d'extension précédemment adopté. Dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, la procédure suivie sera celle prévue par la loi sur l'expropriation.
En revanche, lorsque la modification envisagée du plan localisé de quartier ne comporte aucune création, suppression ou modification de voies de communication ou d'équipements publics, on ne voit pas pour quelle raison le plan d'extension initial devrait être de nouveau soumis à l'approbation du Grand Conseil. Principalement pour ce motif, le présent projet de loi propose que le nouveau plan localisé de quartier fasse sans autre partie intégrante du plan d'extension existant, sans qu'il soit nécessaire d'en référer au législateur.
C'est donc sans justification formelle que jusqu'à présent le Grand Conseil a voté l'abrogation ou la modification d'un plan d'extension dont les composantes d'utilité publique n'étaient pas modifiées par les changements apportés au plan localisé de quartier qui lui était attaché.
La présente proposition vise ainsi à rectifier une pratique impropre; ce qui devrait en même temps simplifier la procédure et éviter le chevauchement des compétences respectives du Grand Conseil et du Conseil d'Etat en cette matière. Le réexamen du plan d'extension n° 21795-136, du quartier de Contamines offrit l'occasion à la commission d'aménagement de débattre de l'implantation, du gabarit, de l'architecture d'immeubles et d'autres questions qui relèvent du rôle de l'exécutif. Il paraît donc une fois de plus nécessaire de clarifier par un texte de loi la manière dont il convient d'appliquer la règle de séparation des pouvoirs.
Par ailleurs, dans l'optique d'accélérer les procédures et suivant la logique du système prévu dans la LEXT qui veut qu'un plan localisé de quartier soit d'abord déclaré plan d'extension par le Grand Conseil dès lors qu'il comporte des voies ou équipements d'utilité publique, il est ici proposé que, dans toutes les hypothèses, le Conseil d'Etat puisse adopter un nouveau plan localisé de quartier avant, cas échéant, de le soumettre à l'approbation du Grand Conseil.
Pour ces motifs, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un bon accueil au présent projet de loi.
Préconsultation
M. René Koechlin (L). Il y a une procédure formelle que vous n'avez pas respectée. Vous deviez demander le troisième débat à l'issue du vote sur le deuxième débat concernant le projet précédent.
Le président. Le Conseil d'Etat nous confirme qu'il a ou qu'il aurait demandé le troisième débat. Je vous prie de m'excuser d'avoir été un peu expéditif. Le projet est voté en trois débats.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Excusez-moi, j'ai aussi commis un oubli en ne demandant pas expressément le troisième débat, mais je le demande maintenant. Je pense qu'il serait utile de le faire de cette manière pour la bonne forme.
M. Christian Ferrazino (AdG). Non seulement nous sommes au point 16, et je vois mal que l'on puisse voter l'objet du point 15, mais il y a un problème encore plus fondamental. Même s'il peut paraître un peu formel, c'est un problème de fond. M. Koechlin, qui, il l'a rappelé à plusieurs reprises, n'est pas juriste - et on le remarque - nous demande d'abroger un plan d'extension - parce que c'est ça l'amendement - sans abroger la loi. En d'autres termes, la loi que vous avez votée, Monsieur Koechlin, le 16 décembre resterait en vigueur avec l'amendement que vous proposez, et le plan d'extension, lui, serait abrogé. J'ai alors du mal à vous suivre.
Il est très difficile de comprendre comment vous pouvez demander au Grand Conseil l'abrogation du plan d'extension modifié, tel que voté le 16 décembre, sans demander au préalable l'abrogation de la loi. Il y a donc un problème, mais on ne peut pas le régler au point 16, Monsieur le président, puisque c'est l'objet du point 15 !
M. René Koechlin (L). L'amendement que nous avons proposé constitue l'alinéa 2 du projet de loi. Le premier alinéa, c'est-à-dire l'article du projet présenté précédemment, subsiste. «La loi du 16 décembre 1993 modifiant le plan etc.» est la partie abrogée. C'est l'alinéa 1. Et puis, il y a un deuxième alinéa qui est l'amendement que nous avons proposé.
M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur Koechlin ! (Rires.) Le projet de loi que nous avons, qui est celui modifiant le précédent, est un article unique. Si vous avez fait un amendement qui crée un article 2, il aurait fallu nous le distribuer. (Protestations de M. Koechlin.) Non, non et non ! C'est un article unique ! Ce que nous avons sous les yeux, c'est un article unique avec un seul alinéa. Si vous avez un amendement, il aurait fallu le distribuer afin que l'on puisse en prendre connaissance. Cela n'a pas été le cas. Mais encore une fois, on ne peut pas discuter maintenant de l'objet du point 15 alors que vous avez déjà entamé le point 16, Monsieur le président !
M. John Dupraz (R). Il me semble que M. Ferrazino fait du juridisme pour du juridisme. Vous êtes vraiment un teigneux et un véreux, (Brouhaha.) car l'article unique dit «tel qu'adopté par le Grand Conseil». Alors je crois que le Grand Conseil ne peut l'adopter que par un projet de loi et que la remarque de M. Ferrazino est infondée.
Le président. Je vous propose de considérer que, d'entente entre ce Grand Conseil et le Conseil d'Etat, nous avons voté le projet de loi 7080 en trois débats et nous passons au point 16. (Murmures.)
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Le projet de loi qui nous est présenté amène un certain nombre de remarques. J'en profite pour interroger le chef du département des travaux publics, M. Joye, concernant l'aménagement des quartiers ou localités, puisqu'à cette occasion vous nous donnez la possibilité d'intervenir à ce sujet.
J'ai lu avec intérêt un article qui dit :
«Tensions avec la Ville. Reste qu'en matière d'aménagement en ville, le DTPE doit compter avec les services municipaux compétents dirigés par la socialiste, Mme Jacqueline Burnand, et sa majorité de l'Alternative.»
»Or le ministre, quoi qu'il en dise, ne semble pas apprécier, mais pas du tout, le plan directeur de la Ville. Il le juge dépassé et tributaire d'une vision de la fin des années 50, défendant contre les projets de développement de la Ville des zones à faible densification dans des quartiers comme le Mervelet ou La Forêt et recevant tour à tour les opposants aux plans municipaux.»
»M. Joye optera-t-il pour une rupture de l'entente cordiale qui régnait entre son prédécesseur et les autorités d'aménagement de la Ville au-delà des divergences d'opinions personnelles sur la densification des périmètres urbains ?».
Monsieur le conseiller d'Etat, quelle est votre optique, par rapport à ce projet de loi, sur ce problème d'aménagement d'une commune comme la Ville de Genève ? Allez-vous laisser les communes gérer leur densification ?
M. Bernard Annen (L). Monsieur Lyon, je regrette l'interpellation que vous venez de faire et je crois qu'elle n'a pas lieu d'être abordée aujourd'hui. Nos débats sont déjà très longs et je vous suggère d'interpeller M. le chef du département comme le prévoit le règlement, soit par une interpellation normale, soit par une interpellation urgente, mais, je vous en prie, pas à l'occasion d'un projet de loi devant être renvoyé en commission.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Ce projet de loi vise à remettre de l'ordre dans la maison, suite à l'incident que nous avons connu avec le projet de loi précédent. Je suis tout à fait d'accord que l'on renvoie pour discussion ce projet à la commission d'aménagement du canton. La question est de savoir si une législation dans ce domaine est nécessaire ou s'il faut traiter les dossiers en suspens au cas par cas dans le cadre de ces plans d'extension.
Après une brève recherche, on a constaté qu'il y avait au maximum une dizaine de plans d'extension, dont une grande partie des bâtiments projetés est réalisée, mais où les terrains destinés à des équipements publics n'ont pas encore été cédés aux collectivités publiques. Faut-il une loi pour régler ces quelques cas isolés ? C'est une responsabilité que la commission d'aménagement devra prendre après avoir consulté le nombre de plans en cause.
Pour répondre brièvement à M. Lyon au sujet de mes relations avec la Ville, je tiens tout d'abord à dire que j'entretiens d'excellentes relations, ainsi que le département, avec Mme Jacqueline Burnand et son équipe de planificateurs. Il est vrai que j'ai regretté que certains plans élaborés maintenant, par exemple dans le quartier de La Forêt et du Mervelet, relèvent de conceptions auxquelles la Ville s'est pliée. Ce sont des conceptions anciennes qui sont, comme vous l'avez lu, Monsieur Lyon, tributaires de réalisations datant de 1952 ou 1957.
On est en train de faire de l'urbanisme dans des zones de densité 0,2 en cherchant une densité de 1,2. Comme nous ne disposons pas des moyens de notre politique de densification, soit des surfaces de terrain importantes où l'on pourrait réaliser des ensembles construits cohérents, nous nous trouvons dans une situation impossible. Dès que l'on possède deux ou trois parcelles dans un quartier où il y a cent propriétaires de villas, on leur «balance» un projet de construction de rez + 5 + attique. Il y a des formes d'urbanisme beaucoup plus douces que l'on peut appliquer, bien qu'elles présupposent une baisse de la densité, ce qui entraîne des conséquences financières - j'en suis conscient - pour la Ville, au titre des équipements, et pour les propriétaires en raison d'une perte substantielle dans les prix de vente des terrains. Mais ces formes d'urbanisme comportent également de sérieux avantages, notamment une meilleure intégration à un tissu urbain donné.
Une densité de 1,2, celle prévue dans les zones dites de développement, est parfaitement justifiée dans des endroits où il n'y a pas un tissu urbain aussi dense que celui des quartiers. Il y a un problème, comme le démontrent les 10 000 signatures dans le cas du quartier du Mervelet. L'opposition dans le quartier de La Forêt n'est guère moindre. Je pense que si l'on veut augmenter la densité d'un quartier, quelles que soient les considérations de propriétaires de villas vivant dans le confort et de locataires vivant dans des appartements, il faut le faire sur une période de trente ans. On peut passer par des formes urbanistiques beaucoup plus adaptées aux milieux dans lesquels on les insère.
On ne peut pas densifier à la même vitesse et de la même façon dans un quartier très urbanisé que dans un quartier où il y a un terrain de 100 000 m2 à disposition. Les propos du journal ne m'incombent aucunement. J'en laisse le plaisir aux lecteurs et la responsabilité aux journalistes.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.