Séance du
vendredi 28 janvier 1994 à
17h
53e
législature -
1re
année -
3e
session -
3e
séance
M 889
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
que les élèves effectuent un travail productif lors de leurs différents stages;
que la seule modification statutaire prévue à la rentrée de septembre 1994 est la suppression totale ou partielle des indemnités s'élevant à environ 600 francs par mois;
qu'une telle mesure aurait comme effet de rendre plus difficile à beaucoup l'accès à la formation d'infirmiers/infirmières et sages-femmes;
qu'il convient de lier cet aspect financier aux réformes de la formation proprement dite, dont la mise en place se fera ultérieurement,
invite le Conseil d'Etat
à maintenir en l'état les indemnités de formation des élèves infirmiers/infirmières et sages-femmes, afin que les futurs élèves puissent en bénéficier lors de la rentrée 1994.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Situation actuelle
La formation des élèves infirmiers/infirmières et sages-femmes à l'école du Bon Secours se fait soit en 3 ans (IG3 + sages-femmes) pour les titulaires d'une maturité et les diplômés des écoles de culture générale, soit en 4 ans (IG4) pour celles et ceux qui, par exemple, possèdent un CFC.
Dans ces deux cadres de formation, les élèves font des stages à plein temps en milieu hospitalier - 16 semaines en première année - 6 mois et plus les années suivantes. De plus, lors de la dernière année, elles/ils effectuent des veilles et des week-ends, les élèves sages-femmes, dès leur 1re année de formation. Les élèves reçoivent pendant toute la durée de la formation, une indemnité mensuelle d'environ 600 francs. Leur situation est assez similaire à celle des apprentis, puisqu'ils effectuent un travail productif, même s'ils ne sont pas officiellement dans les effectifs du personnel hospitalier.
2. Modifications prévues
Dans le cadre du projet de la Conférence romande des chef/cheffes des départements des affaires sanitaires et sociales (CRASS), l'école du Bon Secours deviendrait une haute école spécialisée (HES). Elle formerait des infirmiers/infirmières en 4 ans. Les élèves auraient le statut d'étudiants/es. Les indemnités seraient réduites, voire supprimées.
a) Cette suppression prendrait effet pour la rentrée 1994.
b) La restructuration de la formation n'entrerait en vigueur qu'ulté-rieurement.
La prochaine volée se trouvera donc dans les mêmes conditions de formation que les précédentes. Le/la futur/e élève aura le statut formel d'étudiant sans avoir pour autant les conditions d'études dont bénéficient en général les étudiants/es, telles que par exemple plusieurs mois de vacances annuelles. Par contre, ils/elles continueront de fournir un réel travail pendant leurs stages.
3. Conséquences
L'aboutissement le plus prévisible de cette mesure sera une sélection sociale accrue. En effet, seules les personnes bénéficiant de revenus suffisants pourront entreprendre cette formation. Les jeunes adultes ayant besoin d'un revenu seront découragés et feront probablement un autre choix de profession. Les adultes, obligés par les circonstances actuelles à une réorientation professionnelle, tout particulièrement les femmes, seront fortement pénalisés par cette mesure. Et last but not least, la possibilité d'obtenir des bourses ou des allocations d'études est, comme on le sait, assez limitée.
Dans le contexte actuel de crise et de chômage, envisager l'élimination totale ou partielle de ces indemnités apparaît véritablement comme une mesure antisociale. Etant donné qu'elle aura non seulement pour effet la restriction de l'accès à des professions de la santé des plus nécessaires, mais aussi un impact sur la diversité de ses effectifs qui est depuis toujours le fondement même de professions que sous-tend la notion de service, où les qualités humaines seront aussi importantes que la qualité de la formation technique.
Enfin, nous vous rappelons que les infirmiers/ères et sages-femmes font défaut en Suisse à l'heure actuelle et que des études tendent à prouver que ce phénomène ira en s'aggravant. C'est la raison pour laquelle le Centre d'information sur les professions de la santé (CIPS) avait entrepris, il y a deux ans, une large campagne d'information et de recrutement. La suppression des indemnités de formation va exactement à fins contraires de cette action en diminuant l'attractivité de ces professions.
Débat
Mme Liliane Maury Pasquier (S). Soyez rassurés, je n'ai pas l'intention de reproduire aujourd'hui le débat du 16 décembre. Cependant, j'ai le sentiment que la suppression des indemnités automatiques, accordées aux élèves infirmiers/infirmières et sages-femmes dès le premier jour de leur formation, ne prend pas en compte le travail réellement fourni sur les lieux de stage, notamment en fin de formation. J'avais déjà essayé, le 16 décembre, d'attirer votre attention sur ce point. Je sais que le 16 décembre nous avons voté - enfin, vous avez voté - la suppression de cette allocation mensuelle de 600 F lors du vote du budget 1994, mais, pour l'instant, seulement pour les élèves infirmiers/infirmières et sages-femmes de première année. Les élèves de deuxième et de troisième année bénéficieront encore de cette allocation durant l'année scolaire 1994-1995.
C'est la raison pour laquelle cette motion reste valable et n'est pas vidée de toute sa substance. Je souhaite - et cela va peut-être vous surprendre - son renvoi à la commission de l'enseignement, parce qu'il s'agit là d'un problème touchant à la formation des infirmiers/infirmières et sages-femmes. La description et l'étude de cette formation en commission de l'enseignement pourraient permettre l'extension de la discussion aux autres professions de la santé, également touchées par cette mesure. Ce renvoi nous permettrait d'étudier tranquillement, et non dans l'urgence, ce système de formation, d'évaluer le travail que les élèves effectuent réellement sur leurs lieux de stage et les services qu'ils y rendent. Ce renvoi permettrait peut-être également de proposer un système d'indemnités différent de celui qui était appliqué jusqu'à maintenant et directement lié aux activités des élèves.
Enfin, n'oublions pas que la commission des pétitions a été saisie d'une pétition demandant la même chose que cette motion. Cette pétition devra être étudiée et, peut-être, renvoyée également à la commission de l'enseignement.
M. Gilles Godinat (AdG). J'irai dans le même sens que ma collègue et je ne reviendrai pas non plus sur les arguments développés lors du précédent débat.
Je vous rappelle simplement que nous soutenons la valorisation de la profession d'infirmier/infirmière et sage-femme et les décisions qui ont été prises par la Commission romande des directeurs sanitaires. Cependant, le statut de hautes écoles spécialisées n'est pas encore en place, ce qui fait que les élèves actuellement en formation n'ont pas ce statut. Il n'y a donc pas de raison de les pénaliser avant qu'ils aient obtenu le statut avec les vacances qui vont de pair avec le statut d'étudiant. Nous maintenons donc notre position, à savoir garder les indemnités jusqu'à ce que le statut soit en place. Nous souhaitons que l'on étudie en commission comment effectivement adapter le financement de la formation, raison pour laquelle le renvoi à la commission de l'enseignement me paraît tout à fait adapté.
Mme Isabelle Graf (Ve). Le groupe écologiste soutient la motion 889. Nous souhaiterions néanmoins y apporter une nuance complémentaire. En effet, nous estimons qu'un adulte jeune, qui décide d'entreprendre des études supérieures afin d'accéder à une profession qui exige autant de qualités intellectuelles et humaines - ce qui, dans notre société actuelle, est un challenge audacieux - devrait bénéficier non seulement d'un statut d'étudiant, qui garantirait la qualité de l'enseignement, mais également d'indemnités lors de sa période de stage, comme peuvent en bénéficier d'autres étudiants des professions médicales, les étudiants en médecine, par exemple. C'est pourquoi le groupe écologiste soutient la motion et présentera des amendements.
M. Pierre-François Unger (PDC). La motion qui vous est soumise invite le Conseil d'Etat à maintenir les indemnités de formation des élèves infirmiers/infirmières ainsi que des élèves sages-femmes. Cette motion nous invite à revenir sur un sujet voté il y tout juste un mois. Il apparaît donc que les règles de notre démocratie ne semblent pas être comprises de la même manière par tous. Cette motion nous donne cependant l'occasion de revenir sur un sujet important.
Une seule invite est adressée au Conseil d'Etat : l'octroi de 600 F par mois pendant la durée des études. Quels sont les arguments développés par les motionnaires ?
Premièrement, les étudiantes et étudiants effectueraient un travail productif. Si cette affirmation est vraie, une indemnité mensuelle de 600 F est inadéquate, car elle légitimerait l'esclavagisme. En réalité, elle est fausse. Il n'est en effet pas correct d'assimiler la formation sur le terrain à un travail productif. Les étudiantes et étudiants sont l'objet d'un encadrement clinique, tant par les enseignants de l'école que par les professionnels des services. Les contrats entres écoles et hôpitaux sont, à ce titre, très clairs. Une indemnité de 600 F ne ferait que légitimer d'éventuelles entorses à ces contrats.
Deuxièmement, ces 600 F viseraient à indemniser le travail de nuit et de week-end. Il n'est sans doute pas inutile de rappeler que les étudiantes infirmières doivent effectuer trois nuits en trois ans, ce qui, vous en conviendrez, est sans doute très inférieur au nombre de nuits blanches librement consenties. (Rires.) Quant aux week-ends, la Croix-Rouge n'émet aucune exigence. Il s'agit d'une affaire contractuelle entre écoles et hôpitaux.
Troisièmement, la pénurie de personnel soignant serait vaincue par ces 600 F. S'il est vrai que le centre d'information sur les professions de la santé a entrepris, il y a deux ans, une large campagne d'information et de recrutement, vous devriez également, Mesdames et Messieurs les motionnaires, avoir l'honnêteté de signaler que celle-ci a été interrompue en raison du très grand nombre d'inscriptions déposées.
En réalité, pour ce qui concerne la formation d'infirmiers, d'infirmières et de sages-femmes, les enjeux, de notre point de vue, se situent à un tout autre niveau. L'évolution, d'une part, de la complexité des soins et, d'autre part, du rôle sanitaire propre de l'infirmière dans le système de santé a considérablement transformé la profession d'infirmier. De simple exécutante qu'elle était il y a vingt ans encore, l'infirmière est devenue une actrice dont le rôle est central. Dans le système actuel de santé, elle dispose, et doit disposer, d'une très large autonomie. Sa mission, notamment dans le développement incontournable de la prévention, de l'écoute, de l'enseignement, du conseil aux consommateurs de soins, ne cesse de prendre de l'importance.
Sur ce terrain d'approche qualitative, nous n'hésiterions pas une seconde à vous suivre et nous pouvons vous assurer que nous ferons tout ce qui est possible pour que les étudiantes et étudiants de l'école puissent, lorsque celle-ci aura son statut de haute école spécialisée, bénéficier de l'accès aux bourses d'études de la manière la plus aisée qui soit pour ceux qui en ont besoin.
Ces 600 F ressemblent plus à une piécette coupable jetée dans une sébile qu'à la mise en valeur d'une formation qui mérite mieux que cela. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons le rejet de cette motion.
M. Nicolas Brunschwig (L). Au début de l'intervention de Mme Maury Pasquier, j'ai pensé que nous allions aborder quelque chose de nouveau et j'ai été soulagé. Malheureusement, je constate que nous avons déjà eu ce débat lors du budget alors que, en l'occurrence, ce budget a été voté en tenant compte de cet élément. Il serait totalement faux de revenir par le biais d'une motion sur ce problème.
En ce qui concerne l'intervention de Mme Graf, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris, bien que je croie avoir entendu son message disant que le groupe écologiste aimerait que l'on aborde ce problème non seulement pour ces élèves-là, mais également pour toute une série de formation dans certaines professions. Cela me semble assez irréaliste dans la situation financière actuelle. Lorsque l'on parle de choix, une fois de plus, par le biais de cette motion, on montre que ce parlement est parfois incapable d'en faire.
M. Dominique Hausser (S). J'aimerais rappeler à ce parlement, et tout particulièrement au médecin chef de service des établissements hospitaliers, que les étudiants en médecine, lorsqu'ils sont en stage, sont indemnisés. Je ne vois pas pourquoi d'autres professionnels de la santé ne pourraient pas bénéficier de ce même traitement.
Mme Liliane Maury Pasquier (S). Je souhaite dire à M. Brunschwig que cette proposition de motion avait effectivement été déposée en décembre, que nous avions demandé qu'elle soit traitée en même temps que le budget, ce qui n'a pas été le cas. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je pense que le renvoi à la commission de l'enseignement pourrait nous permettre d'en discuter plus calmement. Une deuxième remarque, qui n'est peut-être pas très calme, s'adresse à M. Unger. Je suis choquée lorsqu'il parle de non-productivité, alors que j'ai rencontré, pas plus tard que ce matin, une élève sage-femme qui a passé sa semaine en service de néonatalogie seule à s'occuper de treize nouveau-nés, a priori pas en bonne santé. Si une telle situation n'est pas de la productivité, alors je ne sais pas ce que c'est !
M. Pierre-François Unger (PDC). Je souhaite signaler à mon éminent collègue Hausser que le débat sur les indemnités des stagiaires médecins n'est pas à l'ordre du jour. (Huées et sifflements.)
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Notre groupe soutiendra la demande de renvoi à la commission de l'enseignement et de l'éducation. En effet, selon le débat qui se déroule en ce moment, la question essentielle reste de savoir quel genre de formation les infirmières doivent avoir. La décision ne peut évidemment être genevoise. Les conditions de leur formation sont un vrai problème, un vrai débat en ce moment. La qualité de la formation des infirmières n'est pas une question strictement genevoise puisqu'elle est réglementée par la Croix-Rouge suisse. Les diplômes sont reconnus par la Croix-Rouge suisse et l'instruction publique genevoise ne peut décider de ce que seront ces diplômes.
Cependant, notre chef du département de l'action sociale et de la santé représente notre canton dans les discussions nationales de la Conférence des directeurs et il peut se faire le porte-parole du point de vue genevois.
Le point de vue genevois a été clairement exprimé par l'école d'infirmières du Bon Secours, qui estime que les études doivent se situer à un niveau d'études tertiaire, c'est-à-dire à un niveau d'institut universitaire.
La discussion sur les indemnités concerne très directement la question de la formation, car, au plan suisse, le problème est le suivant. Les formations d'infirmières sont-elles des apprentissages ou sont-elles des études supérieures ?
Les décisions et les discussions sur les indemnités concerne cette question du degré des études d'infirmière. Or je pense qu'à Genève, et même au parlement genevois, on est d'accord pour dire que ces études ne sont pas d'un niveau d'apprentissage, d'autant plus que, comme vous le savez, pour commencer ces études il faut avoir dix-huit ans et qu'à l'école de Genève 90 % des élèves infirmières ont une maturité.
Je crois qu'il est particulièrement judicieux de discuter de cette question à la commission de l'enseignement et de l'éducation, même si, par ailleurs, ce problème est inscrit à l'ordre du jour du département de l'action sociale et de la santé. C'est en effet ce dernier département qui finance les indemnités. Mais le fond de la discussion concerne la formation. Nous sommes un cas particulier à Genève. En effet, nous sommes les seuls à avoir la formation des infirmières inclue dans le département de l'instruction publique, alors que le reste du pays a intégré cette formation dans les départements touchant à la santé. C'est donc à M. Segond de représenter le point de vue genevois parmi ses collègues qui sont en charge de ce dossier dans leur canton. Mais la discussion porte essentiellement sur la formation et doit avoir lieu à la commission de l'enseignement et de l'éducation.
M. Andreas Saurer (Ve). Je constate que j'apprends tous les jours quelque chose. (Rires et applaudissements.) On en a bien besoin ! Aujourd'hui, j'apprends que je n'étais pas un homme libre, mais un esclave. Monsieur Unger, vous dites que nous avons travaillé avec des salaires d'esclave. Effectivement, c'est vrai, en tant que médecin-stagiaire, nous avons travaillé à l'hôpital avec une rémunération de 500 ou 600 F. Mais je vous rappelle que nous avons pu bénéficier - en tout cas théoriquement - de bourses. Là se situe le problème. Nous souhaitons une approche globale, c'est-à-dire que l'on discute du problème du statut de la formation d'infirmière, de l'intégration de cette formation dans les hautes écoles spécialisées et, parallèlement, du problème des bourses.
Monsieur Segond, vous avez beaucoup de qualités, mais quelquefois vous foncez comme un TGV. Vous allez un peu rapidement alors que je pense que, dans certains cas, il serait préférable de se hâter lentement pour éviter trop de dégâts à gauche et à droite. C'est pour cette raison qu'il serait préférable d'aménager un peu les choses et, surtout, d'aborder le problème globalement, ce que nous essayons de faire tant en médecine, avec une médecine holistique, que dans le domaine des études d'infirmière, et cela grâce à une approche globale. Je souhaiterais donc que le Conseil d'Etat essaie d'utiliser le même mode d'approche. C'est la raison pour laquelle je demande que cette motion soit renvoyée à la commission adéquate.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Je suis heureux d'avoir à nouveau l'occasion de répondre aux différentes questions posées et de dissiper un malentendu qui, j'en ai l'impression, est sciemment entretenu.
Aujourd'hui, les élèves infirmières sont les seules élèves en formation qui touchent, au cours de leurs études, dès le début, deux types de prestations financières. Elles touchent, comme n'importe quel autre étudiant, des allocations d'études servies au titre de la loi sur les allocations d'études. Elles perçoivent ensuite, bénéficiant d'une sorte de régime d'apprentie, un présalaire de 600 F par mois dès le premier jour de leur formation, indépendamment de tout stage et alors que, très certainement, elles ne sont pas productives aux premiers jours de leur formation.
Cette situation est profondément anormale. Elle est injuste par rapport aux autres jeunes en formation qui, lorsqu'ils sont à l'université, touchent les allocations d'études mais pas un présalaire et, lorsqu'ils sont en stage, touchent une indemnité de stagiaire mais plus d'allocations d'études.
Cette situation, Monsieur Saurer, a occupé la Conférence des directeurs de la santé à partir de septembre 1991. La décision a été prise... (M. Saurer converse avec Mme Maulini-Dreyfus.) ...si vous voulez bien m'écouter ! ...a été prise en décembre 1992, quinze mois après que le sujet ait été abordé pour la première fois. Il a été décidé de la mettre en vigueur pour la rentrée de septembre 1994. Il y a donc eu trois ans entre l'ouverture du dossier et l'entrée en vigueur. Si c'est la vitesse des TGV, alors je me méprends sur celle des omnibus !
Cette décision est plus importante que vous ne le croyez : sur le plan romand - elle a été prise sur le plan romand - elle représente chaque année 66 millions de dépenses pour des indemnités de formation dès le premier jour. C'est l'équivalent de 660 postes d'infirmière au pied du lit du malade.
Vous nous demandez, en toute circonstance et en toute occasion, de faire des choix. Nous voulons ici ramener les élèves infirmières au régime ordinaire de la formation, comme des étudiantes. Vous avez justement dit qu'elles étaient à Genève dépendantes du département de l'instruction publique : c'est donc bien l'affirmation d'une qualité d'étudiantes. D'autre part, elles bénéficient du régime des allocations d'études comme tous les autres étudiants en formation.
Cette décision a été prise correctement quant à la forme. Elle a également été prise correctement dans les délais : elle doit entrer en vigueur en septembre 1994 et elle ne touchera que les élèves qui s'inscriront en septembre 1994. S'étant inscrites sur d'autres bases, les élèves des volées précédentes auront encore le maintien du régime ordinaire pendant deux ans pour celles qui sont en deuxième année, pendant un an pour celles qui sont en troisième année. Le démantèlement se fait donc en l'espace de trois ans, période correspondant à la durée des études.
Pour Genève, cela représente 4,5 millions. Nous avons déjà eu cette discussion lors du débat budgétaire. A l'époque, vous aviez soutenu cette mesure. Je vous prie donc de la confirmer en rejetant cette motion. Cette mesure n'a aucun effet d'injustice. Au contraire, elle met les élèves infirmières au même régime que tous les autres jeunes en formation.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Monsieur Segond, vous avez parlé de deux types d'allocations que les élèves infirmières reçoivent. Je désirerais connaître quelle est la limite de ces allocations d'études. S'agit-il de bourses d'études ? J'aimerais savoir si les infirmières ont droit à une indemnité de stage lorsqu'elles travaillent. J'aimerais également connaître quelles seront les conséquences d'un statut d'étudiante pour les infirmières. Lors des discussions budgétaires sur ce sujet, j'ai dit qu'il me semblait que ce n'était pas la même chose de faire des études à l'université ou une école d'infirmière. C'est tout à fait différent. Quand vous êtes étudiant à l'université vous pouvez travailler à côté. Quand vous faites des stages d'infirmière vous ne pouvez pas travailler en parallèle parce que vous travaillez de 7 h du matin à 16 h, ou même 20 h. Alors, à mon avis, la situation est très différente.
J'aimerais aussi que l'on regarde les conséquences. Si on a un statut d'étudiant, il faut également qu'il y ait un changement au niveau du métier. Le salaire, notamment, doit correspondre à ceux de personnes ayant fait des études universitaires. Et cela n'est pas le cas actuellement.
A nouveau, j'ai un peu l'impression qu'on se trouve face à un métier de femmes et l'on agit dans ce cas comme lors de différents problèmes concernant l'égalité entre homme et femme. On enlève les petits avantages que les femmes ont actuellement avant de donner une vraie égalité. Regardez par exemple l'âge des femmes à la retraite. C'est exactement le même problème. Je trouve que cela est vraiment inacceptable.
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Je pense que c'est un débat difficile en plénière. Mais, pour le cas où ce débat ne se ferait pas en commission, je désire faire encore une remarque.
M. Segond dit que la suppression des indemnités aux élèves infirmières les met au même régime que tous les autres étudiants. Cela est faux pour la raison suivante. La discussion des indemnités fait partie de la discussion de la formation en général parce que la suppression des indemnités sans discussion globale sur le statut de la formation des infirmières signifie mettre les élèves infirmières au même régime que les apprentis sans le présalaire des apprentis. La question est bien celle-ci. S'agit-il d'études supérieures ou d'un apprentissage ?
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Je regrette de contredire Mme Maulini. La question n'est pas là. Les élèves de l'école d'infirmières, comme tous les autres élèves, ont droit aux allocations d'études, sous certaines conditions de revenus, comme pour toutes les autres formations. S'ajoute à cela une indemnité forfaitaire, qui est un présalaire, de 600 F par mois dès le premier jour de formation. C'est cette indemnité-là que nous supprimons, mais le régime des allocations d'études est intégralement maintenu pour les infirmières.
M. Gilles Godinat (AdG). Je vais répondre brièvement au président du département. Vous avez parlé de démantèlement et c'est exactement cela qui m'inquiète. J'espère que c'est un lapsus parce que, dans la réalité... (Manifestations.) Vous avez dit démantèlement. Ce que je vois c'est que le statut d'étudiant pour les élèves infirmières n'est pas encore en place. Alors, tant qu'il n'est pas en place, maintenons les indemnités. C'est le minimum !
Mise aux voix, la proposition de renvoi de cette motion en commission est rejetée.
Mise aux voix, la motion est rejetée.