Séance du
jeudi 7 octobre 1993 à
17h
52e
législature -
4e
année -
8e
session -
36e
séance
P 953-A
TEXTE DE LA PÉTITION
Au courant de l'automne 1992, notre ancien collègue René Guidini adressait au Grand Conseil une pétition munie de sa seule signature.
Cette pétition, élaborée sous la forme d'un texte d'initiative parlementaire ou populaire, visait à soumettre au peuple la possibilité d'élire lui-même le Conseil fédéral.
L'exposé des motifs, rédigé en dix points, motivait son projet:
1. Parfaire le système d'élection par le peuple de nos autorités, au plus haut niveau.
2. Conférer, par là, une véritable caution populaire à l'exécutif fédéral, au moment où notre pays doit s'intégrer à l'Europe du XXIe siècle.
3. Tenir compte de la lourdeur de la charge, en proposant une augmentation raisonnable du nombre des conseillers fédéraux, et en limitant la durée du mandat, chargé à l'assemblée fédérale de proposer des réformes de structures et de fonctionnement.
4. Donner à l'ensemble des citoyennes et des citoyens des responsabilités et des motivations politiques nouvelles, en prouvant qu'il est le souverain, au plein sens du terme.
5. Assurer une pondération linguistique et culturelle, au sein de notre exécutif.
6. Veiller que l'ensemble des cantons puisse avoir accès au Conseil fédéral dans des délais raisonnables (12 à 16 ans).
7. Alléger les pressions actuellement exercées sur l'assemblée fédérale et le Conseil fédéral par certains lobbies financiers, professionnels et syndicaux.
8. Promouvoir un meilleur dialogue entre tous les cantons.
9. Permettre une collaboration plus efficace entre responsables politiques et fonction publique.
10. Donner à la vie politique l'occasion de s'animer pour un principe, sortant, par là, des préoccupations partisanes.
Cette pétition fut adressée, dans un premier temps, à la commission des pétitions où elle fut retenue quelques mois selon les voeux de son auteur, afin d'attendre le résultat de l'élection à la succession de René Felber au Conseil fédéral. Elle fut ensuite transmise à la commission des droits politiques.
Sous la présidence de M. Claude Blanc, député, et en présence de Mme Catherine Rosset, secrétaire adjointe du DIAR et de M. Patrick Ascheri, chef du service votations et élections, la commission procéda le 31 mars 1993 à l'audition de M. René Guidini.
Audition du pétitionnaire
M. Guidini remet aux commissaires un nouveau texte plus conforme au règlement.
Il déclare, en préambule, qu'il n'a pas jugé utile de faire signer sa pétition par d'autres, mais que de nombreuses personnes s'intéressent à ce projet. Il pense qu'une telle initiative rencontrerait l'approbation du peuple, car beaucoup de citoyennes et de citoyens souhaiteraient élire le gouvernement de leur pays au suffrage universel.
M. Guidini développe ensuite les points énoncés dans son exposé des motifs et précise que cette pétition a été déposée bien avant les récents événements qui ont secoué l'Assemblée fédérale, mais que ceux-ci donnent à cette initiative toute sa raison d'être.
Il répond ensuite aux différentes questions et remarques des commissaires:
avec ce système, les grands cantons vont monopoliser le Conseil fédéral.
Non, car actuellement l'ensemble des lobbys fait pression sur l'Assemblée fédérale au moment des élections, et cela ne changerait rien;
La formule magique est remise en cause et le rôle des partis en sera affaibli;
M. .
un parti puissant pourrait placer un candidat dans chaque canton.
Non, car cela susciterait une puissante réaction de la part des citoyens.
M. Guidini termine ensuite son exposé en souhaitant introduire une correction dans son projet.
Art. 85, al. 4 (nouvelle teneur)
«L'élection du Tribunal fédéral et du chancelier ainsi que du général en chef de l'armée fédérale reste de la compétence de l'Assemblée fédérale.»
Discussion de la commission
Le débat s'engage principalement sur l'opportunité d'un tel projet.
Plusieurs commissaires pensent que l'idée n'est pas dénuée d'intérêt, mais qu'elle ne devrait pas émaner d'un parlement cantonal, mais plutôt d'un comité d'initiative populaire. Suite à la proposition d'une commissaire de se renseigner sur une initiative parlementaire déposée par la conseillère nationale Léni Robert, la commission décida de suspendre ses travaux et chargea la rapporteuse de s'informer auprès du Conseil national.
Le 12 mai 1993, la commission reprit ses travaux.
En effet, le Conseil national a été saisi d'une proposition similaire, qui est à l'étude actuellement. L'idée en soi n'est pas nouvelle, le dernier à l'avoir proposée était M. James Schwarzenbach!
Il semble qu'avec une telle proposition, la minorité romande aurait beaucoup de peine à se faire entendre, les Suisses allemands majoritaires voteraient favorablement pour des candidats alémaniques, ce qui paraît normal. Contrairement au canton, qui forme une unité culturelle et lingusitique de dimensions réduites, la Confédération est fortement morcelée.
Actuellement, au Conseil national, est également étudiée la proposition des députés Rhinow et Petitpierre visant à améliorer l'efficacité du gouvernement en faisant nommer par l'Assemblée fédérale quatorze ministres proposés par le Conseil fédéral.
Conclusion
Ayant pris ces divers renseignements et après réflexion, la commission des droits politiques estime que ce n'est pas le rôle du Parlement genevois de proposer l'élection du Conseil fédéral au suffrage universel et que cela ne serait en tout cas pas un bon moyen d'assurer la représentation de la Suisse romande.
Elle reconnaît que le projet de M. Guidini a le mérite de contribuer à une réflexion de fond sur une plus grande efficacité de notre gouvernement, et vous propose à l'unanimité, Mesdames et Messieurs les députés, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Débat
La présidente. Madame Bugnon ?
Une voix. Elle est occupée à la cafétéria ! (Eclats de rires.)
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse. Vous avez reçu une lettre de M. Guidini précisant que le projet annexé à ce rapport n'est pas le bon. Je vous demande d'annexer le projet qu'il a envoyé qui, en effet, est le dernier qu'il a donné à la commission.
Mises aux voix, les conclusions de la commission (dépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.