Séance du
vendredi 17 septembre 1993 à
17h
52e
législature -
4e
année -
7e
session -
33e
séance
PL 7022
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Une subvention annuelle de 300'000 F est accordée pour les exercices 1994, 1995 et 1996, au centre de consultation pour l'aide aux victimes d'infractions, mis en place dans le cadre de la législation fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions.
Art. 2
Cette subvention est inscrite, au budget et aux comptes, sous la rubrique no 849900.365.08.
Art. 3
Elle est financée par la part du droit des pauvres attribuée à l'Etat, qui est inscrite, au budget et aux comptes, sous la rubrique no 849900.441.01.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Introduction
1.1. A la suite d'une initiative populaire adoptée par le peuple en décembre 1984, la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (ci-après LAVI) a été approuvée par l'Assemblée fédérale le 14 octobre 1991. Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 1993.
1.2. Les objectifs généraux de la loi sont les suivants:
a) offrir à la victime un appui ponctuel pour supporter les conséquences immédiates de l'infraction et, en cas de besoin, un appui continu pour surmonter les handicaps liés à l'infraction;
b) renforcer les droits de la victime dans le cadre de la procédure pénale, de manière à éviter le phénomène de «victimisation secondaire» (seconde atteinte psychique liée au fait de devoir revivre en procédure les faits à l'origine de la procédure);
c) obtenir une réparation effective des dommages subis.
1.3. Les tâches concrètes imparties aux cantons par la loi fédérale sont les suivantes:
a) adaptation de l'accueil par la police des victimes d'atteintes corporelles, sexuelles et psychiques;
b) adaptation de la procédure pénale cantonale;
c) mise en place d'une instance d'indemnisation et de réparation morale;
d) création d'un centre de consultation indépendant de l'administration.
1.4. Les travaux de mise en place du dispositif cantonal se présentent de la manière suivante:
a) adoption par le Grand Conseil du projet de loi 6892 modifiant le code de procédure pénale (E35) en avril 1992;
b) règlement du Conseil d'Etat relatif à l'instance d'indemnisation, entrant en fonction le 1er septembre 1993;
c) mise en place de l'instance d'indemnisation;
d) mise en place du centre de consultation.
1.5. Les différents documents législatifs et réglementaires seront remis à la commission du Grand Conseil chargée d'examiner ce projet de loi. Il en sera de même des statuts du centre de consultation.
2. Définition de la notion de victime d'infraction
La notion de victime d'infraction au sens de la LAVI fait référence à des infractions précises définies dans le code pénal suisse.
Ces infractions sont généralement constatées par la police.
On trouvera ci-après la statistique des interventions de la police genevoise en matière d'infractions entrant dans le cadre de la LAVI.
1991
1992
Homicides
10
2
Lésions corporelles
319
3131)
Vols à l'arraché
241
2442)
Agressions
179
144
Contraintes
12
13
Prises d'otages
1
0
Viols
12
12
Attentats à la pudeur
41
353)
Attentats à la pudeur avec violence
9
124)
824
775
1) Lésions corporelles: le chiffre indiqué comprend 183 victimes de sexe masculin, 7 victimes de moins de 16 ans et 5 victimes de plus de 65 ans.
2) Vols à l'arraché: ces 244 infractions concernent 217 femmes, dont 91 ont plus de 65 ans.
3) Attentats à la pudeur: sur 35 infractions, 33 concernent des filles, dont 28 sont âgées de moins de 16 ans.
4) Attentats à la pudeur avec violence: parmi les 12 situations, 9 concernent les filles, dont 2 sont âgées de moins de 16 ans.
Par ailleurs, une enquête conduite par le Ministère public de la Confédération auprès d'un échantillon représentatif de victimes d'infractions au sens de la LAVI a permis de mettre en évidence que 40 % des victimes souhaitaient pouvoir disposer d'une aide. Par extrapolation, on peut estimer que, dans notre canton, environ 350 personnes auront donc recours au dispositif mis en place par la LAVI.
3. Instance d'indemnisation et de réparation morale
3.1. A teneur de la loi fédérale, toute victime peut demander, dans un délai de deux ans à compter de la date d'une infraction, une indemnisation ou une réparation morale dans le canton où l'infraction a été commise.
3.2. L'indemnisation est soumise à conditions d'octroi, en fonction du revenu de la victime:
a) elle est totale si le revenu déterminant de la victime est inférieur ou égal au plafond des prestations complémentaires fédérales, soit, en 1993, 16'140 F;
b) elle est partielle si son revenu se situe entre le montant précité et le triple de celui-ci, soit, en 1993, entre 16'140 F et 48'420 F;
c) elle est nulle au-delà du triple, soit, en 1993, 48'420 F.
3.3. La réparation morale concerne les cas d'atteinte grave, dans des circonstances particulières (atteintes sexuelles). Elle peut intervenir seule ou en cumul avec l'indemnisation.
3.4. Les sommes accordées au titre d'indemnisation ou de réparation morale ouvrent subrogation du canton dans les prétentions que fait valoir la victime devant le juge en raison de l'infraction.
La Confédération charge le canton de prévoir une procédure simple, rapide et gratuite.
3.5. En application de la loi fédérale, le Conseil d'Etat a crè, par voie réglementaire, l'instance cantonale d'indemnisation, constituée de trois membres dont au moins une femme.
La présidence de ladite instance a été confiée à une juge de carrière, assistée de deux assesseurs, représentant respectivement les milieux des assurances et les milieux sociaux.
Le greffe de l'instance est tenu par l'hospice général.
En raison de l'analogie avec la pratique de l'assistance publique (avances pouvant donner lieu à un recouvrement), le Conseil d'Etat a confié à l'hospice général la charge de verser les montants alloués par l'instance et d'en exercer le recouvrement selon les dispositions prévues par la législation fédérale.
4. Centre de consultation
4.1. Principes généraux
L'article 3 de la loi fédérale précise clairement l'obligation pour les cantons de veiller à l'existence d'un centre de consultation, dont l'autonomie d'activité doit être garantie.
Les tâches d'un centre de consultation LAVI sont:
a) dispenser une information sur l'aide aux victimes;
b) fournir soi-même, ou en faisant appel à des tiers, une aide médicale, psychologique, sociale, matérielle et juridique.
Le centre doit être organisé de manière à fournir en tout temps une aide immédiate, à court ou à long terme.
Les prestastions du centre sont gratuites. Elles doivent prendre en charge les frais (médicaux, d'avocat, de procédure) que la situation personnelle de la victime empêcherait d'assumer.
4.2. Application locale
Le centre de consultation est confié à une association au sens des articles 60 et suivants du code civil suisse.
4.3. Cahier des charges et fonctionnement du centre
4.3.1.
Conformément aux directives fédérales, dont la pertinence a été confirmée par les différents acteurs du système social, le centre de consultation remplit les tâches suivantes:
a) information des personnes concernées et intéressées:
sur les droits des victimes d'infractions et la procédure LAVI;
sur les prestations offertes par les associations partenaires du réseau local (Solidarité Femmes, Viol-Secours, lieux d'hébergement d'urgence, services sociaux, etc.);
b) accueil permanent:
réponse téléphonique (écoute, information et orientation);
accueil de jour dans les locaux appropriés (entretien en vue d'orientation vers les services compétents);
dépannage urgent;
c) concertation avec les partenaires du réseau d'aide afin de veiller à ce que les victimes reçoivent l'aide demandée de manière appropriée.
4.3.2.
Les principes fondamentaux devant conduire l'action du centre de consultation sont les suivants:
a) l'aide apportée aux victimes est fournie par les partenaires du réseau d'aide, selon leur domaine de compétence;
b) à défaut, le centre de consultation prend en charge les consultants lorsque les associations du réseau ne peuvent intervenir.
Par ailleurs, le centre sera chargé de veiller aux relations entre les partenaires du réseau et les autres instances cantonales LAVI (police, instance d'indemnisation).
4.3.3.
Le personnel du centre sera composé de 3 personnes, soit 2,2 postes, tous travailleurs sociaux.
Le budget prévisionnel de fonctionnement 1994 est le suivant:
frais de personnel
220'000 F
frais généraux
60'000 F
frais de dépannage
20'000 F
remboursement de prestations fournies par les tiers
80'000 F
information
20'000 F
Total
400'000 F
dont à déduire une part de la subvention fédérale de
100'000 F
Total final
300'000 F
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver le présent projet de loi et accorder le montant de 300'000 F pour les exercices 1994, 1995 et 1996 à l'Association du Centre de consultation LAVI Genève.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.