Séance du
jeudi 24 juin 1993 à
17h
52e
législature -
4e
année -
6e
session -
26e
séance
No 26
MÉMORIAL
DES SÉANCES DU
GRAND CONSEIL
52e LÉGISLATURE
Jeudi 24 juin 1993,
nuit
Présidence:
Mme Micheline Calmy-Rey,présidente
La séance est ouverte à 20 h 45.
Assistent à la séance: MM. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat, Claude Haegi, Dominique Föllmi, Bernard Ziegler, Jean-Philippe Maitre, Olivier Vodoz, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. Charles Bosson, Henri Gougler, Sylvia Leuenberger, Paul Passer, Philippe Schaller, députés.
Mme Marguerite Jacot-Des-Combes est assermentée.
Gilles Stickel est assermenté.
M. Paul Dunner est assermenté.
6. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
La présidente. La décision que nous avons prise tout à l'heure est une décision à huis clos. Par conséquent, je voudrais vous rendre attentifs au fait que les différents documents qui vous ont été délivrés restent confidentiels.
M. Jean-Philippe Maitre m'a demandé de bien vouloir traiter la pétition 936-A, soit le point 18 de l'ordre du jour, immédiatement. Comme il n'y a pas d'opposition à cette manière de faire, il en sera fait ainsi.
7. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Mises aux voix, les conclusions de la commission de l'économie (dépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
Débat
M. Alain Rouiller (S), rapporteur. J'aimerais tout d'abord relever quelques curiosités du rapport de majorité. Je constate que notre collègue, M. Koechlin, architecte a engagé dans son bureau un stagiaire juriste qui a pu l'aider à rédiger d'une façon très juridique son rapport...
Des voix. Oooh!
M. Alain Rouiller. C'est très utile pour les débats.
Des voix. Mauvais, mauvais, mauvais!
La présidente. On continuera quand le calme sera revenu!
M. Alain Rouiller. A la page 45, M. Koechlin a inséré toute une série d'annexes que nous avions, pour la plupart, déjà vues. Les nouvelles sont intéressantes, particulièrement l'annexe N° 10, pages 44, 45, dernières lignes. On parle de l'initiative municipale et les conseillers municipaux se demandaient qui consulter. Il est dommage que la suite n'y figure pas. En effet, un conseiller municipal proposait d'entendre Me Manfrini. Toutefois, il faut savoir que le conseil municipal s'est dit que Me Manfrini était peut-être un peu trop engagé, étant systématiquement consulté par les promoteurs de l'initiative cantonale.
Lorsque l'on fait des citations, il est dommage de s'arrêter avant les passages intéressants. Nous avions vu les annexes au moins deux fois dans les rapports précédents, tels l'avis de droit de Me Manfrini et les considérants du Tribunal. M. Koechlin aurait pu consulter son collègue, M. Burdet, qui nous a déjà donné toutes ces annexes. Monsieur Lombard, vous auriez peut-être souhaité, comme un certain nombre de députés, avoir des éléments nouveaux. Ce rapport de minorité a été rédigé afin que le Grand Conseil puisse prendre connaissance des éléments nouveaux.
Les résultats de l'étude d'impact, les préavis d'ECOTOX, de l'office des transports et de la circulation sont des éléments nouveaux mais qui dérangent, Monsieur Blanc, parce qu'ils sont négatifs...
M. Claude Blanc. Ils sont partiaux!
M. Alain Rouiller. Ils sont partiaux! Monsieur Blanc, vous me faites rire! Ils vous dérangent, Monsieur Blanc! Je ris! Et c'est pour cela que vous refusez de les mentionner. Ce n'est pas possible, on doit pouvoir se prononcer sur ces préavis, ces études d'impact. Dans le rapport de minorité...
M. Armand Lombard. C'est lui qui l'a écrit, c'est pas toi! Il fait ce qu'il veut!
M. Alain Rouiller. Non, le rapport de minorité, c'est moi qui l'ai écrit, cher collègue! Dans ce rapport, vous trouvez une étude d'impact effectuée par Urbaplan et la recommandation finale de cette étude officielle ne laisse planer aucun doute. La conclusion est la suivante: "Il ne paraît pas raisonnable de vouloir réaliser à l'heure actuelle un garage collectif sur le site de la Rôtisserie ". Evidemment, cette décision déplaît aux initiants. Qu'ont-ils fait puisque l'étude d'impact est négative? Ils se sont dit: "Ah, facile, nous allons mandater notre propre bureau pour montrer que l'étude d'impact officielle n'est pas sérieuse! ". Ils ont donc mandaté l'Institut Battelle avec l'objectif, non pas de faire une étude d'impact, mais d'essayer de démontrer que l'étude d'impact officielle était incorrecte ou pouvait être contestée.
C'est peu, et l'on aurait pu penser qu'un institut tel que celui de Battelle pouvait tout de même, du point de vue déontologique, présenter quelque chose de mieux. Troisième point. Le rapporteur de majorité ne nous parle pas du préavis du service d'écotoxicologie. Il faut tout de même savoir que dans la procédure d'étude d'impact, le préavis d'ECOTOX est déterminant.
En effet, ce préavis devrait être déterminant pour l'autorité qui prend la décision de savoir si l'on respecte la loi fédérale sur la protection de l'environnement. Cette conclusion déplaît aux initiants. J'imagine que c'est pour cette raison que le rapporteur n'en fait pas état.
En ce qui concerne la contre-étude de Battelle, le service d'écotoxicologie est très sévère. Il dit qu'il ne s'agit pas d'une étude d'impact au sens de la loi, que ce terme n'est utilisé que comme argument publicitaire et qu'il ne correspond à aucun cahier des charges. On ne pourrait être plus clair.
Ensuite, les préavis de l'office des transports et de la circulation expliquent très clairement que la contre-étude de Battelle ne peut pas être
suivie. Ils le disent d'une façon très polie mais très claire. L'OTC n'adhère pas aux conclusions de l'étude préliminaire de Battelle Europe. Par contre, il suggère la possibilité de faire quelque chose sur le site de l'Alhambra, sous certaines conditions. Ces conditions c'est de réaliser complètement le plan "Circulation 2000 ". Monsieur Blanc, je ris, je souris car les mêmes qui veulent le site de l'Alhambra s'opposent au projet "Circulation 2000 ". Il faut bien savoir que si l'on s'oppose à "Circulation 2000 ", il sera à jamais impossible de réaliser quoi que ce soit sur ce site. Et si cela vous intéresse, je pourrais vous donner des exemples à Morges et à Fribourg...
Des voix. Non!
M. Alain Rouiller. Je vois que quelqu'un fait signe que oui, donc je les donne! (Grand éclat de rires de l'assemblée, car visiblement personne n'a demandé d'exemples.) Si, si, j'ai vu une personne qui acquiesçait. (Grand chahut.) Si, si, Monsieur Annen, c'était vous! A Morges, le Tribunal fédéral a cassé l'autorisation de construire un garage souterrain parce que la municipalité ne voulait pas d'un plan global de la circulation.
Il est amusant de constater ici que ceux qui refusent le plan de circulation demandent qu'un garage se construise. Il faudrait savoir ce que vous voulez! Si l'on veut avoir quelque chose, il faut que des conditions-cadres soient posées en faveur de l'environnement. Le rapport de minorité demande que l'enquête publique, souhaitée par nous-mêmes, soit accompagnée de la mise à l'enquête de l'étude d'impact et des préavis d'ECOTOX et de l'OTC. J'ai rédigé un amendement à la résolution allant dans ce sens. Je l'ai transmis à la présidente. Nous pourrons le voter tout à l'heure.
M. René Koechlin (L), rapporteur. Après treize ans d'efforts de la part des opposants à cette initiative, dont vous êtes, Monsieur Rouiller, vous tentez de la faire échouer pour empêcher que le peuple se prononce. Vous poursuivez sur le ton persifleur que vous venez d'adopter dans votre intervention, lequel révèle clairement votre visage, celui, en l'occurrence, du fossoyeur de l'exercice des droits démocratiques élémentaires! (Applaudissements et bravos sur les bancs de la droite.) Vous dressez l'historique d'une étude d'impact de manière erronée...
M. Alain Rouiller. Ah oui ?
M. René Koechlin. ...parce que vous dites que Battelle a rendu son rapport après celui d'Urbaplan. Cela est faux! C'est précisément parce qu'Urbaplan tardait à rendre son travail, qu'après deux ans d'attente les initiants ont mandaté l'institut Battelle qui a établi un rapport en six mois. Ce n'est qu'après que cet institut eut rendu sa copie qu'enfin nous avons obtenu celle d'Urbaplan.
M. Christian Grobet, président du conseil d'Etat. Arrêtez, arrêtez!
M. René Koechlin. Monsieur Grobet, vous n'êtes pas étranger à ces atermoiements scandaleux! (Ton colérique de l'orateur.)
M. Christian Grobet, président du conseil d'Etat. Vous êtes un mythomane! (Huée, brouhaha.)
M. René Koechlin. Je me souviens que nous nous trouvions dans cette enceinte à débattre de cette initiative et d'une motion qui demandait au Conseil d'Etat de remettre à ce Grand Conseil l'étude d'impact demandée; malheureusement, il y a très peu de témoins car cela remonte à l'époque où se jouait la coupe du monde de football, et une grande partie des députés se trouvaient dans la salle à côté pour regarder je ne sais plus quel match à la télévision. Je me trouvais donc à peu près seul avec le président Grobet!
Des voix. Oooh! Quelle horreur!
M. René Koechlin. Nous avons eu une discussion tout à fait amicale puisqu'il m'a promis... -- et vous savez que quand il me promet quelque chose, évidemment, cela me met aussitôt dans de bonnes dispositions. M. Grobet m'a donc promis que cette étude d'impact, réclamée par la motion pour le 30 septembre, nous serait rendue avant la fin de l'année.
Des voix. Laquelle?
M. René Koechlin. Oui, quelle année? Parce qu'en réalité cette même étude ne nous est parvenue que deux ans plus tard.
Ce sur quoi nous devons nous prononcer aujourd'hui ne concerne pas le fond, sur lequel M. Rouiller peut naturellement lancer le débat. Il n'est pas question de cela ce soir. Nous nous prononcerons sur le fond après que l'initiative aura été mise à l'enquête publique, puis soumise au préavis du conseil municipal, selon la procédure figurant dans mon rapport et recommandée par un expert que nous avons consulté, procédure à laquelle nous nous sommes ralliés en commission et que nous proposons ce soir au Conseil d'Etat de suivre par le biais de la motion que nous soumettons à ce Grand Conseil.
Nous demandons donc au Grand Conseil, d'une part, de prendre acte du rapport que nous lui soumettons et qui comporte la procédure en question et, d'autre part, de se prononcer sur la motion, en lui demandant de bien vouloir la renvoyer au Conseil d'Etat pour qu'il y donne suite. Tout le reste n'est finalement, Monsieur Rouiller, que bla-bla.
Vous avez rédigé un rapport de minorité et remué beaucoup d'air pour demander que les deux études d'impact qui ont été élaborées...
M. Alain Rouiller. Il n'y en a qu'une!
M. René Koechlin. ...ou une étude d'impact, peu importe, je ne me disputerai même pas avec vous sur la question de savoir s'il en existe une ou deux! L'important, d'un point de vue strictement formel, c'est qu'il en existe au moins une. Elle existe, c'est donc fort bien. Vous faites tout "ce foin ", Monsieur, pour exiger que l'on mette un article dans la motion demandant que l'on joigne l'étude d'impact au moment de l'enquête publique, de manière à ce qu'elle puisse être consultée. Mais vous savez qu'il n'est pas nécessaire de l'écrire, c'est une chose facile à faire parce que, lors d'une enquête publique, on peut joindre au dossier à consulter tous les documents utiles à la compréhension de l'objet en question. Ce qui fait qu'il est évident que, si le chef du département des travaux publics fait correctement son travail, au moment de l'enquête publique, il joindra nécessairement et obligatoirement cette étude d'impact.
Evidemment, il fallait que vous ayez une raison pour rédiger ce rapport de minorité et dire toutes sortes de choses qui, pour le moment, sont sans rapport avec l'objet que nous traitons ce soir.
M. Bénédict Fontanet (PDC). Je tiens à rassurer M. Rouiller, M. Koechlin n'a pas engagé de juriste dans son bureau. Jai été le bras séculier qui lui a préparé les éléments juridiques du rapport. M. Koechlin n'a, par conséquent, pas augmenté de manière importante ses frais généraux à cause du rapport qu'il devait rédiger.
Une voix. Un bras séculier, ce n'est pas un ventre mou!
M. Bénédict Fontanet. Parle pour toi! (Rires.) Je voulais également ajouter, Monsieur Rouiller, parce que sans me viser expressément vous le sous-entendiez, que le rapport que je devais faire n'était pas attendu depuis mi-1991, car il avait été convenu que l'on attendrait les deux études d'impact dont celle d'Urbaplan; c'est ce qui avait été décidé en commission, mais vous n'en faisiez plus partie à l'époque. Et c'est à la fin novembre qu'il avait été question de préparer un rapport intermédiaire. Ayant été élu président de mon parti entre-temps, c'est René Koechlin qui a repris le flambeau avec tout le talent qu'on lui connaît.
Dire que cette initiative pose un problème est une évidence, puisque cela fait treize ans que le Grand Conseil s'en préoccupe très régulièrement.
Quand on veut tuer son chat on dit qu'il a la rage, lorsqu'on veut "tuer " une initiative, on dit qu'elle pose des problèmes juridiques. Il est vrai que celle-ci en posait de sérieux. En règle générale, les initiatives traitent de sujets abstraits et généraux et là, en l'occurrence, il s'agissait de l'aménagement précis d'un quartier et cela soulevait toute une série de questions.
La commission de l'aménagement s'est penchée sur ces problèmes avec tout le temps nécessaire, et elle soumet ce soir à vos suffrages une proposition de procédure à suivre. C'est ainsi que l'initiative devrait faire l'objet d'une enquête publique dans la "Feuille d'avis officielle ", puis être ensuite transmise à la Ville de Genève avec les observations recueillies dans le cadre de l'enquête publique pour que le Conseil municipal puisse se prononcer et donner son préavis. Ensuite, l'on devrait rouvrir une procédure d'opposition -- parce qu'il est vrai que nos procédures en matière de construction à Genève sont particulièrement simples et peu sophistiquées! Une fois cette procédure
achevée, le Grand Conseil examinerait les observations, le préavis et les oppositions, se prononcerait sur l'initiative, dirait s'il y a lieu de recommander son acceptation ou son refus et, le cas échéant, déciderait d'opposer à cette initiative un contreprojet. Voilà donc ce qui vous est proposé ce soir.
Monsieur Rouiller, pour des raisons que nous n'ignorons pas -- nous connaissons l'affection que vous portez aux parkings au centre-ville, et plus particulièrement à l'intérieur de la petite-ceinture -- je crois que ce soir vous mélangez le fond et la forme.
Que vous soyez d'accord ou pas avec l'initiative 4 et le parking qu'elle préconise, c'est une chose, mais ce soir, il n'est pas question de dire si l'on est d'accord ou pas avec cette initiative. Il s'agit de proposer une procédure pour que le peuple, bien des années après que cette initiative aura rencontré un succès certain, puisse enfin se prononcer. Il n'est pas question d'opposer à ce stade un contreprojet, c'est prématuré. Il faut simplement que notre Grand Conseil détermine quelle procédure doit être suivie pour qu'enfin cette initiative puisse être soumise au vote populaire avec la recommandation que notre Grand Conseil jugera bonne, en temps utile, de formuler avec, le cas échéant, le contreprojet que le Grand Conseil jugera utile ou non de proposer.
C'est cette question qui nous est posée ce soir; que vous en profitiez, Monsieur Rouiller, pour faire de la polémique par rapport à cette initiative que vous abhorrez, on peut le comprendre, mais c'est regrettable parce que ce n'est pas le sujet, ce n'est pas le problème, c'est à ce stade strictement une question de procédure; et de l'avis de notre groupe, le peuple doit enfin pouvoir se prononcer dans cette affaire et il décidera lui-même si cette initiative mérite d'être acceptée ou non. Me référant à la fin de votre rapport de minorité, je tiens à vous rassurer, je ne fais pas partie des joyeux automobilistes invétérés qui veulent absolument bétonner toute la cité. Je souhaite simplement, en bon démocrate, que cette initiative soit soumise au vote populaire dans des circonstances telles que le souverain puisse se prononcer en pleine connaissance de cause.
Vous voulez ensuite, Monsieur Rouiller, et cela apparaît dans votre rapport de minorité, écarter le rapport d'impact qui vous gêne. C'est de bonne guerre! On peut comprendre qu'un rapport ne vous plaise pas. Vous souhaitez que celui aboutissant aux conclusions qui vous sont chères soit retenu, mais ce n'est pas correct. Votre amendement est inutile. Lorsqu'une affaire est soumise à l'enquête publique, comme c'est le cas pour l'initiative 4, le Conseil d'Etat doit ouvrir son dossier à deux reprises pour la procédure d'observation et pour celle d'opposition. Les études d'impact qui ont été faites feront partie du dossier et les gens pourront les consulter. Votre amendement est donc superfétatoire et inutile. C'est pourquoi je vous invite à prendre acte du rapport de majorité d'une part et, d'autre part, à voter la motion que mon collègue Koechlin, moi-même et quelques autres députés proposons ce soir à vos suffrages. Cette affaire n'a que trop tardé; il est temps que le peuple puisse se prononcer.
M. Jean Spielmann (T). Dès le début, nous avons manifesté notre opposition quant à la localisation et les propositions formulées dans l'initiative, pas seulement par rapport à l'urbanisation -- il y avait quelques idées intéressantes -- mais sur le principe même de créer un parking à cet endroit. Lorsque nous avions discuté de cela il y avait encore des possibilités de circulation bien meilleures qu'elles ne le sont aujourd'hui. Avec le temps, on se rend compte que ce n'est pas possible, si ce n'est en trouvant d'autres accès que les accès routiers actuels. Je pense à d'autres types de liaisons par tunnel qui puissent sortir ou entrer dans ce parking. Sans quoi, c'est tout simplement irréalisable, mais cela a été dit et ce n'est pas le sujet de la discussion ce soir.
Dès le début, j'ai dit mon opposition à l'idée de réaliser un parking à cet endroit, vu sa localisation et les décisions prises concernant la circulation des rues-basses. Mais à chaque fois, le sujet est revenu en discussion dans ce parlement. Je me suis prononcé en faveur d'un déroulement de la votation. Je souhaite que l'on cesse de mettre tant d'obstacles juridiques ou politiques à une prise de décision. L'élément fondamental est la manière dont l'initiative a été conçue. Elle a posé une série de problèmes trapus et en pose encore.
L'arrêté du Tribunal fédéral de 1988 est provisoire puisqu'il stipule que la discussion sur ce problème était prématurée à ce moment. Toute une procédure aura certainement lieu. Ce qui me fait dire que la manière la plus intelligente d'agir est d'accepter, de prendre acte du contenu de la motion, de suivre les procédures d'enquêtes publiques, les procédures en autorisation, de prendre acte des oppositions, du dossier, de trancher de l'initiative, contreprojet ou pas, et de soumettre l'initiative à la votation populaire.
C'est la sagesse même de vouloir à chaque fois reprendre le débat de fond; on devrait se réjouir de le reprendre afin de démontrer de manière de plus en plus pertinente l'erreur de réaliser un parking à cet endroit, surtout avec les schémas de circulation prévus. Je propose donc que l'on continue la procédure.
Malheureusement, nous passons beaucoup de temps à cela et beaucoup d'argent est dépensé pour peu de chose, car le temps aidant, on verra qu'il est absurde de réaliser un tel parking. C'est de la musique d'avenir. Rendez-vous donc dans trois ou quatre ans, lorsque l'on sera au bout de ces procédures et que l'on aura l'occasion de reprendre ce dossier. Ce ne sera que la sixième fois!
M. Hermann Jenni (MPG). Lorsque l'on prétend être un expert, on doit avoir un minimum de culture mathématique permettant d'apprécier, avec exactitude, l'effet cumulé des approximations introduites dans un calcul faisant intervenir des paramètres dont la fourchette d'appréciation peut aller du simple au double sur les conclusions d'un tel rapport. Or, dans la prétendue étude scientifique à laquelle se réfère M. Rouiller -- comme si c'était le seul évangile crédible -- cette condition de rigueur mathématique est lamentablement déficiente. J'ai pu le prouver en commission en interrogeant l'expert.
De sorte que l'on peut, à bon droit, se poser des questions sur les critères qui ont guidé le choix du département des travaux publics quant à ces prétendus experts en la matière, surtout lorsque l'on sait que ce département avait et a toujours une opinion préconçue et bien arrêtée sur cet objet. Nous devons dénoncer ici la scandaleuse cabale que vous et vos amis politiques avez montée pour accumuler les obstacles et faire traîner les choses et, finalement, soustraire la décision à la sagesse du souverain pendant déjà plus de treize ans. C'est un scandale qui devra bientôt cesser!
M. Jean-Luc Richardet (S). Je commencerai mon intervention là où M. Jenni a terminé la sienne. Il est vrai, Monsieur Jenni, qu'il y a un scandale dans le traitement de cette initiative. Mais le scandale, contrairement à ce que vous prétendez, ne concerne pas la durée de son instruction, mais provient du fait que son élaboration était mal fondée sous l'aspect juridique. Cela a conduit nos débats dans un véritable cul-de-sac, ce d'autant que cette initiative
avait été rédigée sous la plume d'un ancien conseiller d'Etat. En conséquence, les initiants doivent en porter la responsabilité, car si elle avait été rédigée correctement du point de vue juridique, elle aurait certainement été soumise au peuple depuis belle lurette. Que chacun prenne donc ses responsabilités!
Néanmoins, il est vrai que le Grand Conseil ne s'est pas empressé pour la traiter. Mais le problème posé est ardu, preuve en est qu'aujourd'hui nous ne sommes toujours pas d'accord sur la procédure à adopter. J'aimerais revenir sur la forme de nos débats. J'attire votre attention sur le fait que nous parlons principalement de procédure et non du fond du sujet, à savoir: si l'on peut ou non construire ce parking.
Il a été demandé, conformément à la législation fédérale, de procéder à une étude d'impact. Curieusement, lorsque cette étude a été remise à la commission, la majorité de la commission n'a pas voulu en discuter. La commission d'aménagement n'a pas pris connaissance du contenu de l'étude d'impact ni de ses conclusions. Le débat a été volontairement escamoté sur ce sujet. Nous sommes en divergence sur ce point avec la majorité parce que la commission d'aménagement aurait dû logiquement discuter de tout cela.
Chacun aurait pu s'exprimer sur le fond et la forme des conclusions des experts, Monsieur Jenni. Je vous rappelle que seul un expert peut en contredire un autre. Or, je ne crois pas que vous soyez l'un d'entre eux; en tout cas pas plus que notre collègue Rouiller.
La commission aurait dû procéder à l'audition des experts en question, voire des contre-experts. Elle ne l'a pas fait. Elle aurait dû entendre l'écotoxicologue et l'ingénieur cantonal de la circulation. Ces débats ont été volontairement évités. Il aurait été intéressant, avant de mettre l'IN 4 à l'enquête publique, que le Grand Conseil ait un aperçu des conclusions de l'étude d'impact. C'est la raison pour laquelle la minorité s'est abstenue en commission.
Le peuple se prononcera un jour où l'autre sur le fond, mais il faudra qu'il le fasse de manière claire et en toute connaissance de cause. Il reste encore à déterminer laquelle des deux initiatives doit être soumise en premier à la votation populaire. Est-ce l'initiative communale ou cantonale? Nous n'avons pas débattu de ce sujet et il faudra bien que le Grand Conseil tranche.
Cet aspect de l'initiative a été escamoté en commission pour des raisons purement électoralistes. En effet, lorsque l'année des hannetons arrive, chacun s'agite et flatte son électorat. En l'occurrence, le vôtre est celui des automobilistes. Ce débat aurait dû se faire dans la tranquillité pour que la procédure législative de cette initiative se déroule dans la sérénité. Comme l'a rappelé M. Spielmann, son cheminement sera encore long. Il ne faut pas se leurrer et surtout ne pas faire croire à vos électeurs que l'initiative sur l'Alhambra sera rapidement soumise à la votation populaire.
M. Jacques Torrent (R). Treize ans pour en arriver à ça: un constat d'échec. Ces treize ans de délai me rappellent d'autres discussions qui ont eu lieu lorsque nous devions traiter l'initiative "L'énergie, notre affaire ". Ce n'était pas le sujet préféré des sensibilités politiques que je représente, mais c'était votre "dada ". Que n'avions-nous pas entendu dans ce Grand Conseil sur les droits populaires honteusement et odieusement violés par la "droite réactionnaire "? Nous en sommes à treize ans, et ça ne vous gêne pas outre mesure! On déplore vaguement que le chemin soit encore long.
Nous avons un projet bienvenu pouvant être financé par le secteur privé et un projet présenté par M. Grobet dont nous aimerions savoir comment il sera financé. Qui va payer les restaurations de l'Alhambra, sa transformation de cinéma en théâtre? Ce sont des questions que l'on peut légitimement se poser alors qu'il y a quelques années, on était peut-être un peu moins regardant. Comment vont se financer les manifestations qui pourraient se dérouler dans ce futur théâtre? Il serait intéressant que l'on connaisse ces réponses avant que le peuple ne soit amené à se prononcer.
Au-delà de ce que l'on présentera au peuple, il faut que les gens sachent exactement à combien se montera la facture, qui va payer et comment? C'est pareil pour le "Zénith ", d'ailleurs.
On s'étonne du fait que la population n'affectionne plus la classe politique. Mais lorsque l'on voit ce qui se passe ce soir avec l'Alhambra et ce qui s'est passé avec d'autres initiatives, il est normal que le peuple ne comprenne pas toutes ces arguties. Il ne comprend pas pourquoi il signe des initiatives, pourquoi les délais légaux ne sont pas respectés, et pour quelle raison on ne lui donne pas "in fine " la parole. Le scandale est là.
M. Robert Cramer (Ve). Je commencerai par vous dire: "Oui, Monsieur Torrent, vous avez raison ". C'est un véritable scandale ce délai de treize ans pour cette initiative qui n'a pas encore été soumise au suffrage populaire. Vous pouvez confirmer, Monsieur Torrent, que ce que je dis aujourd'hui n'est pas nouveau, car si vous reprenez le Mémorial des séances du Grand Conseil de 1987, aux pages 1153 et suivantes, vous verrez qu'à l'époque, je ne disais pas autre chose à propos de cette initiative.
Les écologistes ont toujours tenu le même discours au sujet des initiatives suivantes: l'Alhambra, la traversée de la rade et l'initiative proposant 10 000 places de parking. Nous y sommes opposés sur le fond, mais en même temps, nous voulons que les droits populaires soient respectés et que, dans les plus brefs délais, les initiatives soient soumises à la population. C'est une question de respect élémentaire des droits populaires. D'autre part, nous-mêmes avons suffisamment souffert avec l'initiative "L'énergie, notre affaire " des invraisemblables délais que le Grand Conseil avait pris pour la traiter. Nous avons assez tergiversé avec l'initiative de l'Alhambra, cela a assez duré! Il faut aller de l'avant comme le soulignaient tout à l'heure MM. Spielmann et Fontanet.
Dans cette affaire, nous avons été démocrates au point de dire que l'initiative devait être soumise au peuple dans la teneur que les initiants ont voulue. C'est-à-dire, également avec l'article 3 que le Grand Conseil a décidé de supprimer en 1987. Il s'agit d'une décision du Grand Conseil et il n'y a pas lieu d'y revenir.
Permettez-moi d'ajouter que cette initiative devrait être saluée à certains égards parce qu'elle élargit, dans une certaine mesure, l'exercice des droits populaires. Ce sera probablement la première fois que nous verrons à Genève une initiative qui traitera de planification soumise aux électeurs. La procédure de la motion que nous serons appelés à voter tout à l'heure est novatrice car elle élargit les droits populaires puisqu'elle permet aux citoyens eux-mêmes de se faire législateurs en matière de planification.
Elle constituera également un guide sur la façon dont nous-mêmes, députés, qui avons le pouvoir d'approuver les plans -- notamment les plans de zones -- pourrons nous faire législateurs en matière de plans de zones, de telle sorte que ce pouvoir ne soit pas dévolu au seul Conseil d'Etat.
A ce niveau, où sont les divergences? M. Koechlin a indiqué tout à l'heure dans son rapport de majorité que les divergences étaient extrêmement minces. Puisque tout le monde est d'accord sur le fait qu'il faut agir en commençant par une mise à l'enquête publique, la seule question qui se pose est de savoir si oui ou non des documents seront soumis à l'enquête publique. Si oui, lesquels? Vous nous avez dit, Monsieur Koechlin, que des documents étaient soumis à l'enquête publique et que parmi ceux-ci devaient figurer ceux traités dans le rapport de minorité.
Personnellement, je ne comprends pas pourquoi, au lieu de refuser ce rapport de minorité et l'amendement qui vous sera proposé tout à l'heure, vous ne complétez pas cet amendement de telle sorte que les documents qui seront soumis à la population au moment de l'enquête publique ne soient pas simplement ceux évoqués par le rapport de minorité, mais qu'il y en ait d'autres à disposition.
Je pense que l'on a tout à gagner à la transparence. En effet, s'il devait y avoir un autre rapport, en plus de celui de M. Rouiller que nous appuierons d'ailleurs, eh bien, proposez-le nous, Monsieur Koechlin, et nous l'approuverons.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Je comprends l'inquiétude d'un certain nombre de députés quant au temps mis pour traiter cette initiative. Elle pose justement des problèmes délicats.
De grâce, Monsieur Jenni, ne vous en prenez pas à l'exécutif! Il est toujours facile de s'en prendre aux autres alors que la balle est dans le camp de ce Grand Conseil depuis treize ans. Vous êtes responsables du fait que cette initiative n'a pas été soumise plus rapidement à la votation populaire. Je dirai que dans cette affaire, l'exécutif a été le spectateur de longs débats; pour ne pas dire le passager captif d'une procédure interminable.
Dans la succession des rapports revenus des différentes commissions devant votre séance plénière -- et je le dis à titre anecdotique -- je vous rappelle, puisque M. Rouiller a eu la bonne idée de faire un résumé succinct de ces longs débats, que votre Conseil a été saisi le 22 janvier 1987 déjà du rapport sur cette initiative l'invitant à l'accepter avec un contreprojet, que l'on a oublié dans cette affaire, et de la soumettre à la votation populaire.
A ce moment-là, certains députés de l'Entente -- c'est assez paradoxal -- ont pris l'initiative de déposer une motion réclamant qu'il soit procédé à une étude d'impact. Je ne critique pas cette initiative car je pense que cette étude était nécessaire. Mais alors, de grâce, que certains députés de l'Entente ne s'en prennent pas aujourd'hui à cette procédure d'étude d'impact! En effet, cela a pris un certain temps. Il a été difficile de la mener, d'autant plus qu'elle l'a été sous la responsabilité de la commission d'aménagement.
M. Jenni, dans ses divagations habituelles, s'en est pris au département des travaux publics pour le choix du mandataire. J'aimerais rappeler qu'il a été soumis à la commission du développement. Mais il y avait surtout le désir de choisir un mandataire qui soit agréé aussi bien par les initiants que par la commission du développement.
Nous avons eu l'idée de choisir le bureau Urbaplan, spécialisé dans ce domaine, dont les compétences sont reconnues par chacun et qui a, de surcroît, l'avantage d'avoir son siège à Lausanne, donc hors du contexte genevois. L'étude d'impact a été lancée en collaboration avec les initiants représentés par M. de Tolédo et la commission de l'aménagement.
A ce stade, nous avions déjà six mois de retard, puisque M. de Tolédo ne voulait pas donner son agrément sur le contenu de la mission qui devait être confiée au bureau Urbaplan. Il voulait, notamment, que l'étude d'impact -- tenez-vous bien -- soit réalisée sur un projet abstrait sans qu'il y ait de plans, ni rien du tout, ce qui, évidemment, est totalement aberrant!
Finalement, après six mois d'attente, M. de Tolédo a pris les plans du dossier de la requête préalable, vieux d'une dizaine d'années, il a gommé les numéros pour qu'on ne les voie pas et a donné son accord pour que le bureau Urbaplan fasse l'étude sur la base de ces plans-là. Il avait été également convenu, pour éviter des frais excessifs, que le bureau Urbaplan rendrait un rapport intermédiaire.
Ce rapport, Monsieur Koechlin, a été rendu dans les délais. Il a été examiné par la commission de l'aménagement. Or, à ce moment, il fallait donner une suite de mandat pour terminer l'étude. C'est pour cela que le bureau Urbaplan ne s'est pas remis au travail, car les initiants tergiversaient. Il n'est pas correct, Monsieur Koechlin, d'oser prétendre que les initiants s'étaient adressés à l'Institut Battelle parce qu'Urbaplan traînait. Vous savez fort bien -- mais peut-être n'étiez vous pas membre de la commission à cette
période, parce que certains députés, comme M. Fontanet et d'autres, sont venus, sont repartis et cela explique certains oublis; ou peut-être étiez-vous pris dans votre phase poétique, celle qui est la vôtre en certaines circonstances! -- (Rires.) mais toujours est-il que chacun sait que le bureau Urbaplan a cessé ses travaux à la demande de la commission du développement.
Un beau jour, nous avons été avisés qu'une lettre un peu cavalière avait été adressée par M. de Tolédo au bureau Urbaplan, disant: "Nous n'avons plus besoin de vos services. Nous avons mandaté un autre bureau pour la suite des travaux ". Je relève tout de même que les initiants ont payé la moitié de la facture pour la première partie de l'étude et c'est tout à leur honneur.
Ce n'est que quelques mois plus tard que le bureau Urbaplan a repris ses études, après qu'une suite de mandat ait été mise au point par une sous-commission de la commission de l'aménagement. Il est vrai que le bureau Urbaplan avait six mois de retard par rapport à Battelle. Il n'a pas tout à fait rattrapé ce retard puisqu'il a rendu son rapport un ou deux mois après celui de Battelle.
Ces quelques faits étant rappelés, je voudrais dire qu'il faut suivre la procédure telle qu'elle est suggérée par la commission. Certains ont parlé avec beaucoup d'emphase tout à l'heure des droits démocratiques. Je me permets de considérer que nous sommes arrivés aujourd'hui à la limite de l'exercice des droits populaires.
Lorsque l'on voit la procédure que doit encore suivre cette initiative avant qu'elle ne soit soumise à la votation populaire, et ceci, après treize ans de débats devant votre honorable Conseil, je dois dire qu'il y a tout de même de quoi se poser des questions!
Personnellement, je regrette, non pas, Monsieur Torrent, que le Grand Conseil ne soit pas entré en matière sur le projet de M. Grobet, mais sur le projet du Conseil d'Etat. Il avait, à un moment donné, tenté de trouver un compromis qui aurait permis de sortir d'une impasse manifeste que nous avions pressentie voici à peu près sept ou huit ans. Je me souviens encore des propos de M. Jaques Vernet à ce sujet. Aujourd'hui, nous sommes dans cette impasse.
J'aimerais simplement attirer votre attention sur le fait que le droit fédéral a été modifié, une loi fédérale sur la protection de l'environnement est entrée en vigueur et des ordonnances sur la protection de l'environnement ont été adoptées par le Conseil fédéral. Comme vous le savez fort bien dans cette enceinte, le droit fédéral prime le droit cantonal. Cela signifie que quoi que vote le peuple -- et c'est désagréable dans cette affaire -- il faudra respecter, en fin de compte, les données du droit fédéral.
Je regrette que l'on propose au peuple une solution qui ne respecte pas les exigences du droit fédéral. Il est certain que, dans l'hypothèse où le vote du peuple serait favorable, cela donnerait lieu à de longues procédures de contestation par ceux qui, non sans raison, demanderaient à ce que les exigences en matière de protection de l'environnement soient respectées.
Ils le diront d'autant plus volontiers qu'il y a cette unanimité de faire de Genève la capitale mondiale de l'environnement. Pensez donc! Alors, si l'on est tellement attaché à la protection de l'environnement, on risque, dans cette affaire, d'avoir encore bien des surprises. Vous me permettrez de dire que ce n'est pas d'aujourd'hui que cette initiative est dépassée. Il y a treize ans, elle l'était déjà! Elle me fait penser au projet qui avait été proposé -- et cela m'a intéressé au moment où je refaisais l'historique de l'autoroute de contournement -- en 1960, visant à faire passer l'autoroute à travers Genève, en couvrant le Rhône! A l'époque, il y avait eu le référendum Dériaz -- certains s'en souviendront -- qui avait balayé ce projet aberrant. Il était encore plus fou que celui dont on parle ce soir.
Je trouve aberrant de prévoir un parking de six cent cinquante places à cet emplacement. Mais il est vrai qu'on peut aller devant le peuple. Je regrette que vous n'ayez pas saisi la perche tendue, celle de considérer que le parking de Saint-Antoine, qui a la même capacité et répond aux objectifs de l'initiative, ne constituait pas là le bon contreprojet à cette initiative.
Pour en terminer et répondre aux questions de M. Torrent, je tiens tout de suite à le restaurer... (Rires.) Euh, pardon! Ce sera pour tout à l'heure, cher Monsieur, si vous le voulez bien! ... je tiens à le rassurer. Il me demande combien coûtera le fameux cinéma-théâtre. Il ne coûtera rien du tout, parce qu'il a déjà été réalisé. Il est vrai que l'on doit vous répondre au sujet d'une question écrite sur le coût de cette opération; il est d'environ 800 000 F. Cette somme a été très largement couverte par les loyers que nous avons encaissés pour le cinéma.
Mais, et je le regrette, vous n'avez pas voulu, pour des raisons politiques, apprécier un spectacle à la salle de l'Alhambra. Pour la rentrée de septembre, je me ferai un plaisir de vous envoyer deux billets, Monsieur le député. Il nous manque quelques chaises dans une des loges de côté. On pourrait les réserver aux députés du Grand Conseil, s'ils le souhaitent! (Rires.) Venez à la rentrée aux spectacles du festival de la Bâtie, ou venez, si vous le préférez, à un concert classique donné par un violoniste renommé pour ses performances hors du commun. L'acoustique de cette salle a été appréciée à l'époque par certains grands artistes de music-hall, comme Mistinguett, Maurice Chevalier, et d'autres qui ont chanté dans cette salle historique dont certains voudraient aujourd'hui la démolition. C'est assez fou!
Venez, Monsieur Torrent, vous verrez que cette salle a une acoustique exceptionnelle. Les travaux ont été faits. Il n'y a plus rien à faire. Quant au parking de six cent cinquante places, on a entendu M. de Tolédo, et j'ai quelques doutes quant aux possibilités de financement de ce parking s'il devait se construire. C'est à nouveau un de ces projets du genre Palais Wilson, ou les Minoteries, dont on entretient la chronique jusqu'au jour où l'on s'aperçoit que ce sont des soufflés, et que, derrière, il n'y a pas de financement!
M. René Koechlin (L), rapporteur. Selon son habitude, le président du Conseil d'Etat peint un certain nombre de diables sur la muraille de la vieille-ville et sur les quais du Rhône en évoquant leur couverture abominable et en brandissant un certain nombre d'épouvantails de cet ordre!
Vous venez, Monsieur le président, de nous faire part de vos doutes quant au financement d'un parking. Pourtant, nous avons beaucoup d'exemples de parkings financés, fonctionnant fort bien et ne posant pas de problème quant à leur exploitation. En revanche, nous aurons l'occasion demain de parler d'un autre financement à propos duquel vous n'avez aucun doute, mais je peux vous dire qu'en ce qui nous concerne, nous en avons beaucoup, malheureusement, en ce qui concerne celui du "Zénith ".
Mais revenons à notre affaire. Nous parlerons du Zénith demain. Monsieur Grobet, vous oubliez que la demande d'entreprendre une étude d'impact par la motion de l'Entente, déposée il y a je ne sais combien d'années, répondait à une condition posée par le Tribunal fédéral qui stipulait que l'initiative, pour être soumise au suffrage populaire, devait être précédée d'une étude d'impact. C'est la raison pour laquelle nous avons invité le Conseil d'Etat à entreprendre celle-ci.
Cela dit, nous sommes aujourd'hui en possession de deux études conclues par deux rapports. Par gain de paix, Monsieur Rouiller, et pour éviter à l'avenir de nouvelles contestations lors de prochains débats dans ce Grand Conseil sur le fond de cette initiative, je vous propose de souscrire à votre amendement. Mais alors, en demandant que les deux études soient soumises à l'enquête publique en même temps que les autres documents qui accompagnent l'initiative.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Je voudrais rassurer tout le monde. J'ai oublié de dire tout à l'heure que -- mais M. Koechlin l'avait déjà rappelé -- tout bon chef du département des travaux publics veille à ce que des dossiers complets soient mis à l'enquête publique avec, bien entendu, les deux rapports, les préavis, etc. Je voulais le souligner, car je trouvais que le débat sur cette question prenait une tournure un peu académique.
M. Bénédict Fontanet (PDC). Je dois dire que je suis un tout petit peu jaloux de M. Torrent qui se voit offrir des billets à l'Alhambra par M. Grobet...
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Je vous en donnerai aussi! (Brouhaha.)
M. Bénédict Fontanet. Mais je me réjouis, Monsieur Grobet, avant d'aller entendre quelques concerts de rock au Zénith -- si tant est que cette salle de spectacles voie une fois le jour -- de voir quelques spectacles avec vous à l'Alhambra! Mais, personnellement, je pense que Mistinguett et Chevalier, c'est un peu dépassé, il y a d'autres choses que je préfère!
Des voix. Madonna? Des noms, des noms! (Chahut.)
M. Bénédict Fontanet. Par gain de paix, comme l'annonçait tout à l'heure mon collègue Koechlin, et même si aucun député dans cette salle ne saurait imaginer un seul instant que le chef du département des travaux publics
puisse soumettre à l'enquête public un dossier qui ne serait pas particulièrement complet, je vous suggère d'adopter un amendement à cette motion.
Je vous propose, Madame la présidente, de rajouter, après la première invite, une seconde invite qui dirait:
"Dans ce cadre, à soumettre notamment à l'enquête publique les rapports de Battelle et d'Urbaplan ".
La deuxième invite devenant la troisième. Comme cela, nous retrouverons un peu de sérénité et le peuple pourra se prononcer en toute connaissance de cause sur l'initiative 4, dite de "l'Alhambra ", quoi qu'il puisse en faire.
M. Jacques Torrent (R). Je suis un peu gêné de l'offre généreuse de M. Grobet! Figurez-vous que l'on commence à parler des avantages indus qui seraient accordés aux élus! Le président Grobet a parlé de tous ces projets qui se sont effondrés comme des soufflés, mais certains d'entre eux ont dû attendre tellement longtemps qu'ils n'ont pas pu voir le jour, et on leur a reproché d'avoir disparu.
Monsieur le président Grobet, il faut saluer M. de Tolédo qui est un des promoteurs du parking sous-lacustre. Au début, on a dit que c'était un projet fou, irréalisable, que ce ne serait pas rentable. Envers et contre tout, il a tenu bon, et ce parking est une des rares réalisations genevoises de ces dernières années dont nous bénéficions tous. Je crois qu'il fallait lui rendre justice.
M. Alain Rouiller (S), rapporteur. Je pourrais encore répondre...
Des voix. Noonn...
M. Alain Rouiller. J'ai dit, je pourrais! C'est un conditionnel. Je pourrais répondre point par point aux reproches qui ont été faits, mais comme la majorité fait un grand pas dans notre direction, je ferai mes commentaires à M. Koechlin en aparté pour corriger les quelques points sur lesquels je ne suis pas d'accord avec lui.
J'aimerais toutefois faire une petite constatation. Mesdames et Messieurs de la majorité, vous me flattez beaucoup ce soir! Si, à l'ordinaire, je n'étais pas si modeste, je me dirais qur vous me faites l'honneur de penser qu'à moi tout seul j'ai pu faire tout cela...
M. Michel Balestra. T'es la marionnette!
M. Alain Rouiller. ...et faire durer la procédure pendant treize ans; c'est vraiment trop d'honneur! Mais, par gain de paix, comme l'ont dit MM. Koechlin et Fontanet, je retire, au nom de la minorité, l'amendement que je vous ai transmis et me rallie à l'amendement proposé par M. Fontanet qui va dans la bonne direction. Nous sommes satisfaits que les études d'impact soient soumises à l'enquête publique.
Mis aux voix, l'amendement de M. Fontanet est adopté.
Mise aux voix, la motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
10. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la coordination, le contrôle et le subventionnement des institutions genevoises d'éducation spécialisée pour mineurs et jeunes adultes. ( )
Préconsultation
Mme Monique Vali (PDC). Le groupe démocrate-chrétien accueille avec satisfaction la révision de la loi J 8 9. Cependant, à titre personnel, j'estime que dans une période de restriction budgétaire il serait souhaitable, plutôt que de voir quatre départements allouer des subventions aux institutions d'éducation spécialisée, voir ces institutions regroupées au sein d'un même département. Il y aurait une meilleure coordination, une meilleure photographie de tout ce qui se fait à Genève pour aider les jeunes, qu'ils soient handicapés socialement, physiquement, mentalement alors que maintenant cette répartition de subventions faite par départements permet des pratiques totalement différentes qui, à mon sens, manquent de rigueur.
Je propose que ce projet de loi soit examiné par la commission de l'enseignement dans les meilleurs délais. Enfin, je dirais que les modifications apportées nous satisfont totalement.
M. Thierry Du Pasquier (L). Le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui est en quelque sorte la troisième mouture de la loi sur le subventionnement d'un certain nombre d'institutions privées jouant un rôle très important dans notre canton. C'est une particularité du canton de Genève d'avoir dans sa constitution l'institution de l'Hospice général, qui assume un rôle considérable d'assistance publique sans faire partie, à proprement parler, de l'administration.
A côté de cela, il existe depuis de nombreuses années un certain nombre d'institutions privées assumant des fonctions reconnues par la population et par l'Etat. J'ai dit qu'il y avait eu trois époques différentes en ce qui concerne l'attitude de l'Etat à l'égard de ces institutions. La première remonte au début du siècle. A cette époque, le prix de la journée était d'environ 2 F. A cette époque, ces institutions se finançaient elles-mêmes. Il arrivait qu'en fin d'année elles aient quelques déficits et il avait été prévu que l'Etat, qui reconnaissait déjà leur rôle, assumerait la couverture de ce déficit.
Deuxième époque. En raison des rapports que l'Etat entretenait avec ces institutions, il a demandé... (Brouhaha constant.)
La présidente. Monsieur Du Pasquier, attendez un instant, on n'entend rien! Il y a un brouhaha dans cette salle! J'aimerais juste que la porte de la buvette soit fermée, s'il vous plaît!
M. Thierry Du Pasquier. Je constate qu'il y a des personnes que les questions sociales n'intéressent pas!
Une des conséquences de la reconnaissance de ces institutions par l'Etat a été qu'un rapport de partenariat s'est instauré. L'Etat a posé des conditions à son intervention, notamment en ce qui concerne les conditions de travail, le nombre de postes, la qualité des soins, etc. Cela a immédiatement engendré une considérable hausse des coûts. Petit à petit, le déficit de ces institutions a été pris en charge par l'Etat puis est arrivé à peu près à la totalité du budget de fonctionnement de ces institutions. C'est la deuxième époque, et celle-ci est caractérisée par la loi que nous proposons de modifier aujourd'hui.
Cette loi fait mention à plusieurs reprises des institutions qui sollicitent "l'aide de l'Etat ". Elle pose un certain nombre de conditions complétées par le projet de loi qui vous est soumis. Je souhaiterais qu'à l'occasion de l'examen de ce projet par la commission de l'enseignement, dont je ne fais pas partie, l'on passe à la troisième époque de cette législation, époque caractérisée non pas par un rapport, je dirais infantile, entre l'Etat et ces institutions, mais par un rapport devenu majeur, afin que l'on ne parle plus d'institutions qui demandent l'aide de l'Etat, mais que l'on parle de partenaires avec lesquels l'Etat conclut des contrats d'année en année.
En réalité, cela se passe ainsi. Il faut donc inclure dans la loi cette mutation dans les rapports tels qu'ils existent actuellement entre ces institutions et l'Etat qui en reconnaît la nécessité. C'est un point qui a une grande importance pour ces institutions qui travaillent avec beaucoup de dévouement. J'en connais une, particulièrement, qui abrite une centaine d'enfants et emploie septante éducateurs. Ces personnes qui se dévouent ont droit à une certaine reconnaissance. C'est dans cette perspective que je souhaite que les travaux de la commission améliorent cette loi.
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Je ne me prononcerai que sur un point en préconsultation, la formation de la commission qui nous est proposée. En effet, j'attends les travaux en commission concernant le reste du projet. Ce sont des informations relativement techniques. La composition de la commission exclut les associations des proches des personnes concernées. Or, dans la situation actuelle, la situation budgétaire entre autres, il est certain que la plupart de ces personnes ont une inquiétude majeure face aux réaménagements que nous apportons. Il serait bon d'étudier la possibilité de pouvoir travailler en collaboration avec elles et de les inviter au cours d'une séance de commission telle que prévue.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'enseignement.
Débat
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Vous avez sans doute pu prendre connaissance, par la presse, du contenu de cette motion et des raisons qui nous motivent, Mme Johner et moi-même, à vous la soumettre puisque lundi plusieurs associations actives dans le domaine de la petite enfance ont expliqué leurs craintes suite à la proposition de M. Dominique Föllmi de transférer la surveillance des crèches, garderies et jardins d'enfants du service de protection de la jeunesse aux communes.
Nous sommes, ce soir, le porte-parole de ces associations. Cette motion représente, d'une part, un appui à l'interpellation de Mme Johner au précédent Grand Conseil, et, d'autre part, se veut le relais direct des demandes de ces associations. Si l'on a souvent eu l'occasion de parler d'éducation et d'enseignement dans ce Grand Conseil, notamment dernièrement, suite aux différentes propositions de M. Föllmi concernant l'école genevoise, il est vrai que le domaine de la petite enfance n'a que rarement été évoqué. Pourtant, depuis ces dernières années, il a pris une ampleur considérable. Les parents étant de plus en plus obligés de travailler tous les deux les crèches ont vu leur population considérablement augmenter et de nouvelles structures ont vu le jour.
De même, suite à différentes études, on s'est aperçu que la petite enfance jouait un rôle-clef dans le développement futur de l'enfant et qu'il devait bénéficier d'un encadrement de qualité. Les structures pouvant recevoir des petits enfants se sont beaucoup améliorées, la formation du personnel d'encadrement a été réévaluée et, grâce à tous ces progrès accomplis lentement, mais sûrement, nous assurons dans notre canton un accueil de qualité. De plus, grâce au mandat confié à la protection de la jeunesse, les normes de sécurité ont également été largement améliorées et, à l'heure actuelle, on ne peut pas ouvrir de nouvelles structures d'accueil sans remplir des conditions strictes édictées par des normes régulièrement adaptées aux besoins et à la sécurité des petits enfants.
Cette tâche est actuellement confiée au service de protection de la jeunesse du département de l'instruction publique qui, visiblement, n'arrive pas totalement à y faire face puisqu'à ce jour vingt-trois institutions réparties dans le canton ne respectent pas les normes édictées en septembre 1992. C'est la raison qui nous pousse à demander que ce service soit renforcé, et dans une période de restriction budgétaire, renforcer ne veut pas forcément dire engagement de nouvelles personnes mais, peut-être, restructuration au niveau du service avec la possibilité de s'adjoindre également les conseils de professionnels de la petite enfance. Il importe que des progrès obtenus après des années de discussion et de négociation soient remis en question simplement parce qu'ils ont la malchance d'aboutir en pleine crise budgétaire.
Ceci est valable aussi bien pour les enfants que pour le personnel qui a toujours dû lutter pour obtenir une valorisation des professions touchant au domaine de la petite enfance. Concernant le transfert de compétences, même s'il n'en est qu'au stade de la discussion, il doit être mûrement réfléchi et ne doit donner lieu à aucune disparité entre les communes. En effet, lorsque l'on voit que la Ville de Genève s'est dotée d'une délégation à la petite enfance bien gérée et qui pourrait être à même, le cas échéant, d'assurer la surveillance des institutions, il n'en est pas de même pour la plupart des autres
communes qui, soit n'en ont pas les moyens, soit n'en font pas une priorité. Il n'est pas possible de donner aux communes une autorité de surveillance qui requiert une formation aussi particulière.
En cela, je ne remets pas en cause la confiance que l'on peut faire aux autorités communales. Et je suis à l'aise pour le dire, car je fais plutôt partie de ceux qui défendent l'autonomie des communes. Mais dans ce dossier précis, nous estimons que les communes ne sont pas outillées pour exercer ce rôle. M. Föllmi a répondu à Mme Johner qu'il n'en était qu'au stade des propositions et au début de la négociation, soit, mais alors je pense qu'il ne verra aucun inconvénient à ce que la commission de l'enseignement et de l'éducation, qui se plaint régulièrement de n'intervenir que dans des dossiers terminés, puisse se saisir de ce sujet par le biais de cette motion. Elle pourra dès lors entendre, d'une part l'Association des communes genevoises, et, d'autre part, les associations qui s'opposent à ce transfert. Je vous remercie donc de bien vouloir accepter de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement et de l'éducation.
M. Jean Montessuit (PDC). En ma qualité d'ancien magistrat d'une commune, je ne peux pas manquer d'éprouver, en lisant le texte de cette motion, le sentiment de défiance qu'elle évoque à l'égard des autorités communales. Je voudrais tout de même vous assurer que les autorités communales ne sont pas moins aptes que nous députés, ou que les administrations cantonales, à s'occuper de la petite enfance, et en cela je ne partage pas les préoccupations des initiants.
Cela dit, je crois qu'un dialogue est déjà engagé avec les autorités communales. Je sais même que l'Association des communes genevoises s'est préoccupée de ce problème et je souhaiterais, Madame la présidente, que vous donniez lecture de la lettre que cette association vous a adressée concernant cet objet.
Je pense que le traitement de la petite enfance ne doit pas être normalisé. Les problèmes ne sont pas forcément identiques à Gy et à Genève, et, à cet égard, il faut laisser une marge de manoeuvre et une marge d'adaptation nécessaires. Cela dit, au nom de mon groupe, nous ne nous opposerons pas au renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement pour une étude plus approfondie.
La présidente. Je prie Mme la secrétaire de bien vouloir lire la lettre demandée par M. Montessuit.
(Annexe -- lettre)
Mme Yvonne Humbert (L). Que de méfiance face aux législatifs et aux exécutifs de nos communes dont les représentants sont choisis et élus tout comme vous! Mesdames et Messieurs les députés, sommes-nous vraiment meilleurs que des élus municipaux? Cette méfiance me navre, connaissant la conscience et le sérieux avec lesquels les exécutifs, assermentés eux aussi, étudient et exécutent les dossiers qui leur sont confiés.
Je trouve cette proposition malvenue. Je puis vous affirmer que les communes sont tout à fait aptes pour assumer et surveiller les crèches, les garderies, et cela d'autant plus lorsqu'elles les subventionnent avec générosité. Elles ont le droit et le devoir de savoir de quelle manière l'argent de leurs contribuables est dépensé et, par ce fait, d'être présentes dans les organes de surveillance. Si vous concédez ce droit à la Ville de Genève, qui est aussi une commune, vous devez aussi le consentir aux autres communes par souci d'égalité et d'équité. J'ajouterai, et cela vous ne le mentionnez pas, que les intéressés les plus proches, c'est-à-dire les parents, ont aussi leur mot à dire et sont à même de s'exprimer sur les prestations proposées si elles conviennent ou doivent être améliorées.
Il est aussi question de disparité entre les communes. Fort heureusement, chacune d'entre elles possède son caractère, donc une identité. Les besoins d'une commune urbaine ou suburbaine ne seront pas les mêmes que ceux d'une commune rurale ou résidentielle. Il y aura donc adaptation au milieu dans lequel s'épanouissent ces chers petits; ce qui est souhaitable et logique. Nous vous proposons, afin d'étudier cette motion, de la renvoyer en commission.
Mme Monique Vali (PDC). Le texte de cette motion comprend, à mon sens, deux procès d'intention. Un, à l'égard du chef du département de l'instruction publique (Contestations.) qui a mis en place un projet, et un deuxième à l'égard des communes. Il faut tout de même rappeler que tout le secteur de la petite enfance n'appartient pas au département de l'instruction publique puisqu'il ne le finance pas.
En ce qui concerne la surveillance, seul un poste et demi du service de la protection de la jeunesse y est affecté. Effectivement, je pense que les communes peuvent assumer cette surveillance. Ayant été moi-même élue d'une commune et présidente d'une commission sociale, je puis vous dire
qu'en tant que telle, on est bien plus interpellé tous les jours, en faisant ses courses, par les mères et les pères des enfants placés, que les fonctionnaires d'un département, aussi qualifiés soient-ils.
Il faut être sérieux! On ne peut pas, par les temps qui courent, demander au département de l'instruction publique de renforcer un service alors qu'on lit dans le rapport de la commission des finances qu'il faut faire des économies et tout ce qui s'en suit. Des normes et des recommandations ont été édictées. Elles seront placées dans le projet tel que l'a prévu le chef du département, sous la responsabilité des élus communaux, des maires et des adjoints. Il n'est pas admissible que l'on mette en doute leur bonne volonté et leur bonne foi. Si ces personnes ne font pas leur travail, le département aura en tout temps la possibilité de retirer la compétence aux communes qui n'auraient pas respecté les directives et les recommandations.
Cette motion, à mon sens, n'a pas lieu d'être parce qu'il faut au moins voir ce qui va se passer avant de dire que ça ne fonctionnera pas. Je serais d'avis de refuser cette motion.
Mme Martine Wenker Coskun (S). Suite à ce que vient de dire Mme Vali, je ne crois pas que ce soit aussi simple que cela. En guise de préambule, j'aimerais préciser que notre groupe n'a pas pu être signataire de cette proposition de motion, vu les délais très brefs qui nous étaient impartis. Cependant, nous étions présents à la conférence de presse qui s'est tenue lundi pour soutenir cette proposition de motion.
La petite enfance, comme vous le savez, est un domaine trop important pour que nous puissions le traiter à la légère. C'est pourquoi nous demandons, dans un premier temps, comme le souhaite également la commission consultative de la petite enfance, que les nouvelles normes minima obligatoires, proposées en son temps par la Ville de Genève et annoncées à la presse par M. Föllmi en octobre 1992, puissent être non seulement publiées et communiquées à tous les établissements, institutions et administrations concernées, mais également appliquées par tous.
En ce qui concerne la délégation par le département de l'instruction publique de la compétence d'autorisation et de surveillance des collectivités de la petite enfance aux communes, il nous paraît important, avant toute décision, de prendre en considération certains facteurs.
Premièrement. L'indépendance de l'organe de surveillance par rapport à l'organe de subventionnement doit être garantie.
Deuxièmement. L'aspect contraignant des normes minima doit pouvoir être appliqué dans tout le canton, sans quoi nous déboucherons sur le concept d'une petite enfance à deux vitesses.
Troisièmement. La garantie du respect de la qualité des prestations et de l'encadrement qui, actuellement, ne paraît plus être garanti.
D'autres questions se posent à nous telles que: Toutes les communes pourront-elles se doter de personnes compétentes pour la surveillance de l'application des normes, les autorisations de diriger, les évaluations du personnel ainsi que la prise de décisions au niveau pédagogique? Si l'on créait un groupe cantonal comme organe régulateur, ne serait-ce pas la création d'un doublon de la protection de la jeunesse au niveau des coûts? Quelles seraient ses sources d'information et les moyens en sa possession pour faire appliquer les normes?
Suite aux problèmes et questions soulevés, nous ne pouvons accepter que l'autorité cantonale se dégage de ses responsabilités alors qu'elle doit être, selon l'ordonnance fédérale, le garant de la qualité d'un encadrement minimum. C'est pourquoi le groupe socialiste vous invite à renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement, afin qu'un sujet aussi important puisse être traité d'une manière approfondie, dans un climat plus serein.
M. Gérard Ramseyer (R). Mesdames les motionnaires, ne m'en veuillez pas de dire que vos textes sont inutilement agressifs à l'égard des communes! Je ne vous en voudrai pas de traiter un peu légèrement une situation dont le contexte paraît vous échapper quelque peu. Pourquoi n'est-il pas possible que l'organe de subventionnement soit l'organe de surveillance? C'est le contraire qui est vrai: quand la garde en crèche d'un enfant coûte 15 000 F par année, c'est pour le moins normal que les communes vérifient l'emploi qui est fait des fonds très importants mis à disposition.
Pourquoi ce transfert de charge à deux vitesses -- c'est l'expression à la mode -- les coûts à charge des communes, le contrôle en main de l'Etat? Où êtes-vous allées chercher que les communes ne sont pas outillées -- c'est votre terminologie -- pour effectuer ce contrôle? Les avez-vous seulement interrogées sur leur situation et leurs projets? Enfin, quand vous parlez, je cite, de "fantaisies communales en matière d'encadrement ", Mesdames, j'ai trouvé votre vocabulaire un tantinet excessif. Conclure de cette suite d'affirmations hasardeuses que le service de protection de la jeunesse doit être renforcé de manière drastique, c'est une façon de proposer les choses, certes primesautière, mais un tout petit peu culottée.
Il y a, Mesdames, un certain nombre de réalités incontournables. Il n'y a aucune autorité communale, même dans les plus petites communes, susceptible de négliger ou de vouloir négliger le contrôle des collectivités de la petite enfance. Il y a par contre des crèches publiques fâcheusement déficitaires et des crèches privées heureusement bénéficiaires, alors que leur surveillance n'est pas identique. Il y a enfin nombre de voies nouvelles qui doivent être explorées en matière de crèches, garderies et jardins d'enfants. Et plusieurs communes y travaillent.
Eu égard à la compétence du service de la protection de la jeunesse, je ne m'opposerai pas à un renvoi en commission de cette motion, mais croyez, Mesdames, que les communes de ce canton sont sincèrement attachées à compléter leur infrastructure sociale dans le respect des critères que vous-mêmes prônez. Simplement, ce n'était pas gentil d'en douter en donnant d'autre part à votre motion un soupçon de corporatisme évidemment discutable.
M. Robert Cramer (Ve). Mme Vali et M. Ramseyer ont dit que derrière cette motion se cachait on ne sait quel noir dessein (Rires.) et quel procès d'intention! Je peux vous garantir que tel n'est pas le cas. Je ne suis pas, comme Mme Vali, un spécialiste de ces questions. Je dois admettre qu'en lisant cette motion, je n'y ai pas trouvé le moindre soupçon d'une attaque contre les autorités communales, mais un souci généré par une triple interrogation.
La première, évoquée dans les considérants, porte sur le rôle que peuvent avoir différents organes dans une commune. Est-il raisonnable, souhaitable que le même organe se trouve être dans le même temps l'autorité de subventionnement et l'autorité de surveillance? Non pas l'autorité de décision, Monsieur Ramseyer, mais l'autorité de surveillance. Je vois là une nuance. Il est possible que ce système soit applicable. C'est en tout cas une question que l'on peut se poser et qui mérite une discussion ne pouvant avoir lieu qu'en commission.
J'ai vu dans cette motion une seconde question portant sur la rationalisation. Comment peut-on rationaliser cela? On entend décharger l'Etat de l'une de ses tâches, mais dans le même temps, cette tâche va être transférée aux communes. Est-il plus rationnel d'avoir, vous nous l'avez dit, Monsieur Ramseyer, un poste et demi au niveau de l'Etat, ou je ne sais combien de quart-temps, de mi-temps ou de postes à plein temps au niveau des communes? C'est une question que l'on peut se poser. Toute rationalisation n'est pas bonne à prendre, et si elle équivaut à diminuer ici pour augmenter sensiblement ailleurs, la collectivité publique, globalement, y perd dans cette rationalisation. Nous ne sommes pas ici uniquement pour examiner les comptes de l'Etat de Genève. Nous devons, de façon plus générale, avoir le souci du bien public.
J'en viens à ma troisième interrogation. Nous qui prônons la décentralisation voulons savoir comment l'appliquer et à quel niveau les choses se passeront, au nom du principe bien connu en droit communautaire de la subsidiarité. Les motionnaires ont le sentiment que le bon niveau, en matière de surveillance, c'est l'échelle cantonale. Aller plus bas, c'est perdre en efficacité et en qualité cette surveillance. Peut-être ont-ils tort, peut-être peut-on descendre plus bas? J'en doute. Mais les expériences des magistrats communaux nous seront utiles. C'est pour toutes ces raisons que je vous prie de bien vouloir renvoyer cette motion en commission parce qu'elle pose des questions substantielles méritant d'être débattues au Grand Conseil.
Mme Liliane Johner (T). Monsieur Montessuit, je veux vous raconter une histoire!
L'assemblée. Aaahhh!
Mme Liliane Johner. Dans une commune qui vous est chère, Carouge, pour ne pas la nommer, suite aux... (L'oratrice a un blanc.)
Des voix. Quoi?
Mme Liliane Johner. ...inscriptions de la garderie et du jardin d'enfants...
M. Jean Montessuit. On connaît déjà l'histoire! (Rires.)
Mme Liliane Johner. Bon! Vous, peut-être, mais les autres pas!
Des voix. On la connaît pas! (Chahut.)
La présidente. Mesdames et Messieurs! Ne troublez pas Mme Johner, laissez-la parler!
Mme Liliane Johner. ...tous les parents n'ont donc pas trouvé de place dans votre garderie. Le comité s'est rendu auprès du Conseil administratif de la commune de Carouge pour lui exposer les faits. Le conseil administratif a répondu: "Il n'y a pas de problème, nous allons ouvrir une classe supplémentaire. " A ce moment-là, le comité a rendu les autorités attentives au fait qu'ouvrir une classe supplémentaire impliquait tout de même du personnel en plus. Etonnement du conseil administratif: "Ah bon! Vous ne pouvez pas faire avec le personnel que vous avez? ".
M. Jean Montessuit. Ils ont vraiment de bonnes raisons.
Mme Liliane Johner. Alors, Monsieur Montessuit, vous comprendrez quand même que nous sommes un peu inquiets. Je suis membre de la Fédération des garderies et des jardins d'enfants depuis vingt ans, et je suis en souci par rapport à certaines communes; je dis bien, certaines. Vous savez, la pratique fait que nous avons vu certaines choses qui ne sont pas admissibles! Nous insistons sur ce sujet car à ce jour, c'est le flou total sur les raisons de cette décision, et surtout sur le délai d'application. A ce jour, les consultations ont été menées uniquement entre l'Etat et le comité de l'Association des communes genevoises. Aucun partenaire n'a été consulté sur ce sujet.
Le rôle de surveillance a été dévolu à l'Etat par ordonnance fédérale. Pourquoi ce revirement? Si le but est de responsabiliser les communes en les soumettant au contrôle d'un organe régulateur qui devrait rendre des comptes au département de l'instruction publique, qui tire avantage alors de cette nouvelle formule? En ces temps budgétaires difficiles, les communes résisteront-elles à l'opportunité de serrer à l'excès les dépenses concernant la petite enfance qu'elles ont elles-mêmes le pouvoir de surveiller? Monsieur Föllmi, vous allez me répondre qu'il ne s'agit là que d'un projet, alors, expliquez-nous pourquoi les milieux intéressés conviennent que cet été déjà ces nouvelles compétences entreront en vigueur.
Cette motion a pour but de placer le débat au niveau du législatif afin que tous les partenaires puissent être consultés, et c'est pourquoi nous sommes ouverts à toute modification des invites qui irait dans le but d'un renvoi en commission afin que puissent être auditionnés les gens de terrain. Même si, dans cette enceinte, se trouvent des représentants des communes qui, dans un premier temps, trouvent l'idée séduisante, ont-ils vraiment été bien informés sur les conséquences qu'un contrôle d'une prise en charge répondant aux critères d'encadrement peut impliquer? Je vous demande de renvoyer cette motion en commission dans le seul but d'avoir une vision large sur la question et de permettre au département de prendre ces décisions en toute connaissance de cause.
M. Philippe Fontaine (R). Il est frappant de voir, lorsque l'on aborde les sujets de la petite enfance, que ceux-ci sont souvent mal connus, en particulier par les gens concernés dans les communes. Ils sont mal connus pourquoi? C'est un domaine dont l'évolution a été très importante ces dernières années, à cause d'une demande en augmentation. S'occuper d'enfants dans une garderie ou dans une crèche est devenu aujourd'hui une réelle profession. Il y a des diplômés, des concours, des examens; garanties d'un travail de qualité. Comme tout travail de qualité, il mérite des salaires de qualité, et aussi, bien sûr, un contrôle de qualité.
Il est important de bien connaître tous les critères de ces professions pour pouvoir réellement exercer un contrôle efficace. Il sera peut-être possible d'organiser ce contrôle dans les communes, mais alors, il faudra que cette qualité se retrouve de la même façon tant à Gy, à Bellevue, qu'à Genève. S'il est vrai, Madame Humbert, comme vous le disiez tout à l'heure, que chaque commune possède ses caractères et son identité, moi je dis que les enfants que l'on trouve ici ou là sont les mêmes et que ceux-ci ont des problèmes identiques. Je dis que les difficultés qu'ils peuvent avoir dans leurs familles ici ou là sont les mêmes.
S'occuper d'enfants, gérer des crèches n'est plus aujourd'hui une question d'amateurisme, c'est devenu une réelle profession, il faut que chacun en soit conscient. J'espère que les travaux au sein de la commission de l'enseignement nous rassureront sur les décisions qui seront prises. (Quelques applaudissements.)
M. Armand Lombard (L). (Chahut, contestation.)
La présidente. Allez-y, Monsieur Lombard!
M. Armand Lombard. J'y vais, Madame la présidente! Laissez-moi juste, en conclusion de ce débat, raconter une petite histoire à Mme Johner!
L'assemblée. Aaahhh!
M. Armand Lombard. Elle parle d'une crèche qui existait à Chêne-Bougeries lorsque j'habitais dans cette commune. Cette crèche s'occupait de quatre-vingts enfants. Les relations avec la commune étaient tout à fait agréables et la commune avait une grande confiance en cette crèche. Mais voilà, cette crèche était espagnole, les petits enfants, les dames qui les surveillaient étaient également espagnoles, elles n'avaient ni licence, ni cinq ans d'études, n'avaient pas passé leurs multiples certificats de qualité helvétique, et la crèche a dû être fermée car ces dames n'étaient pas compétentes aux yeux de la République et des autorités.
Je crois remarquer dans cette motion une certaine inconséquence politique au sujet des communes et de leur action. Elle me surprend particulièrement -- c'est pourquoi je profite quand même de le dire maintenant même si ce débat a été long -- parce que j'ai entendu M. Boesch sur ce même sujet en matière de parascolaire, et maintenant, j'entends Mmes Johner et Bugnon défendre leur motion. Le transfert sur les communes de charges couvertes jusqu'alors par le canton leur apparaît comme néfaste. Mieux vaut, disent-elles, une bonne centralisation avec ses bons contrôles, ses chers fonctionnaires, ses directives qui mettent tout le monde dans le même panier, son égalité incontournable et autres. Je crois, si j'ose vous le faire remarquer, que vous nous faites là une grosse crise de passéisme, et surtout, que vous manquez un intéressant virage de l'histoire institutionnelle moderne.
L'Etat est construit à Genève sur trois niveaux subsidiaires: le peuple, les communes, le canton. Les communes sont un ensemble démocratique aussi, elles sont proches de la communauté et la connaissent de près, et leur administration a un visage plus humain que celui que peut avoir une autorité plus haute qui connaît moins les gens de la communauté. Le canton avait pris en charge de multiples mandats dans le domaine social et celui de la formation. Aujourd'hui, il est écrasé de tâches et devient inefficace par le volume même de son administration. Il se rappelle qu'il dispose de quarante-cinq structures de gestion et se met à les utiliser pour la gestion des crèches, en particulier, et pour celle du parascolaire, dans un autre domaine.
Mes chers collègues, soucieux des problèmes sociaux, soucieux des plus démunis, des personnes âgées et des jeunes, saluez ou essayez de saluer au contraire cette démarche où l'on rapproche les services des gens qui en ont besoin. Quant à votre crainte d'inégalité d'application, prenez soin de remarquer que le canton -- comme n'importe quelle entreprise -- le fait avec ses filiales, ses succursales et doit, bien entendu, produire un cahier des charges avant de remettre à la structure communale une tâche nouvelle. Ce cahier des charges indique les exigences et décrit les contrôles. C'est une procédure de grande qualité qu'il engage.
Vous aurez deux parlements pour ce contrôle: le communal et le cantonal. Cela devrait suffire à vous rendre plus positives sur des fonctionnements qui devront se multiplier et qui éviteront les étouffements financiers, les engorgements, les mécompréhensions d'une administration centrale trop éloignée des bénéficiaires et qui produit de l'inégalité par son application anonyme. C'est la raison pour laquelle je souhaite que cette motion puisse être, à défaut...
La présidente. Je prie les députés du fond de la salle de ne pas avoir de contacts avec la tribune de la presse.
Des voix. Ouhhh!
La présidente. Non, mais il y a une grande conversation menée là-bas au coin! Je vous en prie, allez à la buvette et invitez Mme Buffat!
M. Armand Lombard. A défaut, disais-je, nous pourrons discuter de ce projet en commission et j'espère que nous pourrons trouver un terrain d'entente dans cette nouvelle perspective, et pas simplement sur des brisures idéologiques.
Mme Marlène Dupraz (T). Ce que je viens d'entendre ressemble vraiment à des attaques dilatoires. (Contestations.) M. Lombard a
soulevé tout à l'heure le problème des contrôles. Il a surtout fait allusion aux contrôles administratifs en parlant des fonctionnaires. Je crois qu'il les a bien visés. Or, lorsque nous parlons de contrôles, j'espère bien comprendre qu'il s'agit aussi de contrôle médical, contrôle des obligations sur le plan professionnel. C'est très bien d'avoir des bénévoles de qualité avec un bon coeur, mais je pense que l'on peut aussi faire des erreurs, et en matière d'éducation et de surveillance des enfants en très bas âge il est important d'avoir une formation suffisante. Je ne pense pas que l'on puisse seulement faire confiance aux qualités de coeur. (Brouhaha, protestations de M. Lombard.)
La présidente. Monsieur Lombard, je vous en prie!
Mme Marlène Dupraz. Si nous demandons que le contrôle ne soit pas effectué par les communes qui subventionnent c'est pour éviter l'embarras dans lequel elles se trouveraient si elles devaient devoir départager les responsabilités et faire la part des choses en cas de conflit. Il ne s'agit pas seulement d'un contrôle purement bureaucratique.
M. Dominique Föllmi, conseiller d'Etat. Je prends acte de votre décision, fortement majoritaire, qui est de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement et, par conséquent, de faire en sorte, Monsieur Blanc...
Des voix. Monsieur Blanc! (M. Blanc se promène dans les bancs du PDC.)
La présidente. Monsieur Blanc, on vous interpelle!
M. Dominique Föllmi, conseiller d'Etat. Excusez-moi de vous déranger, Monsieur Blanc, je suis désolé! (Brouhaha, chahut.) Avant de discuter avec les partenaires concernés -- comme je vous l'ai expliqué la dernière fois en réponse à l'interpellation de Mme Johner -- il fallait préalablement savoir si les communes étaient intéressées par ce projet. Il se trouve qu'elles sont très intéressées par cette responsabilité, donc, contrairement à ce que vous pensez, vous ferez le travail à la place de mes services, vous entendrez les différentes instances concernées, vous me ferez part de votre avis et j'en tiendrai compte. Je ne m'oppose pas du tout à ces discussions. Je voudrais simplement ajouter encore une ou deux choses.
En ce qui concerne le développement de la petite enfance, il a été spectaculaire au cours de ces dernières années, voire ces derniers mois. Monsieur Fontaine, vous avez raison, c'est un domaine qui n'est pas très bien connu par le Grand Conseil, pour la simple raison que la responsabilité en matière de politique de la petite enfance appartient, non pas à l'Etat, mais aux communes. Les communes ont beaucoup fait en la matière; la Ville de Genève en particulier. Je regrette que M. Rossetti ne soit pas là parce qu'il aurait pu le dire, d'autant plus qu'il est en charge de ce dicastère. Il a les infrastructures nécessaires et une commission municipale s'intéresse particulièrement à ces questions. Quant à la responsabilité de l'Etat, elle se situe sur deux plans. D'une part, au niveau de la formation, Monsieur Fontaine, et je devrais vous rappeler que nous avons transformé une école privée en une école publique rattachée au centre des professions de la santé et de la petite enfance, et que nous avons aujourd'hui une très bonne formation sur trois ans d'éducatrices de la petite enfance. Par la même occasion, les traitements du personnel ont été revus. Dès lors, en ce qui concerne l'exposé des motifs des deux motionnaires, je ne peux pas l'accepter tel quel, surtout lorsque vous affirmez, Mesdames Johner et Bugnon, que la petite enfance a toujours été le parent pauvre de l'éducation, alors que je vois l'évolution spectaculaire de ce secteur.
Le deuxième point concerne les normes. Nous avions procédé au retrait des normes dites: "cyclamens " il y a quelques années déjà. J'ai repris cette question et procédé à une vaste consultation qui a abouti après des mois de discussions. Mais maintenant, ce sera la commission de l'enseignement qui le fera. En ce qui concerne les normes, il a fallu trois ans de consultations de tous les partenaires pour arriver à un certain accord grâce aussi à l'appui de la commission municipale de la Ville de Genève qui a joué là un rôle majeur. J'ai présenté ces normes l'automne dernier et nous avons encore peaufiné le texte. Vous voudrez bien l'analyser, puisque vous l'avez entre vos mains, et vous verrez qu'il est particulièrement favorable à la politique et au développement de la petite enfance. Tous les partenaires vont recevoir ce texte. Il a été envoyé lundi.
Vous relevez que des institutions communales n'appliquent pas encore ces normes. C'est évident, puisqu'elles concernent l'encadrement des enfants et la formation du personnel. A partir du moment où les normes viennent d'être édictées, le personnel, du jour au lendemain, ne répond pas totalement aux critères. C'est bien un objectif à atteindre, c'est l'évidence même. Nous
avons mis en place une commission d'équivalence au niveau de l'Etat avec les partenaires pour apprécier notamment s'il y a équivalence ou non avec les formations qui ne sont pas genevoises. Nous mettrons en place, étape par étape, les dispositions dans les établissements telles qu'elles figurent dans ce document bleu, qui sera le cadre de notre action.
Quant au service de la protection de la jeunesse, vous dites, dans votre exposé des motifs, que vous ne voulez pas que je le démantèle. Cette demande est étonnante lorsque l'on sait qu'il y a quatre-vingt trois postes de travail dans ce service et que cette surveillance des institutions concerne le cahier des charges de 1,5 poste! J'aurais besoin de ces personnes pour procéder à des vérifications et à un contrôle d'autres activités, notamment des placements familiaux.
Aujourd'hui, votre action politique consiste à contrôler des collectivités publiques, alors que nous avons des crèches privées à surveiller et tout le placement dans les institutions et les familles à prendre en considération. Si vous estimez que la priorité c'est de contrôler les communes, des collectivités qui ont des responsabilités publiques; c'est la population qui vérifie le fonctionnement des autorités communales, je suis étonné. Le Grand Conseil veut-il porter son effort sur le contrôle des communes estimant qu'elles ne font pas leur travail? C'est votre appréciation aujourd'hui. Peut-être qu'après avoir entendu en commission l'Association des communes genevoises et les différentes communes concernées vous changerez d'avis.
Pour ma part, ce n'est pas le secteur majeur à contrôler. Il y a d'autres domaines de placement qui doivent être suivis et c'est dans cette direction que je porte mes priorités, et non sur les communes. Cela d'autant plus en raison du principe de subsidiarité. Je me plie à votre décision. On en discutera longuement en commission et lorsque vous aurez terminé vos travaux vous m'indiquerez ce qu'il faut faire et je suivrai vos indications, car vous êtes maintenant maîtres de l'opération.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Madame la présidente, il est incroyable de voir comme le chef du département de l'instruction publique se fâche chaque fois qu'on lui demande qu'un sujet soit traité par la commission de l'enseignement et de l'éducation. (Ton énervé de l'oratrice. Protestations, chahut.)
Il faut se demander, dans ce parlement, à quoi sert cette commission de l'enseignement et de l'éducation. Si elle sert uniquement à traiter des dossiers terminés, bouclés où toutes les décisions ont été prises, elle est inutile et fait perdre du temps aux députés et je crois que cela ne vaut pas la peine de la maintenir! On vous demande simplement de pouvoir traiter un dossier avec vous, comme cela se fait d'ailleurs avec d'autres conseillers d'Etat et d'autres départements. (L'oratrice hausse encore le ton d'un cran.) Ça s'est fait! Pourquoi vouloir toujours opposer la commission de l'enseignement au travail que vous faites? C'est tout de même ridicule. On peut travailler en commun! Je ne comprends pas cette attitude! (Bravos, applaudissements.)
M. Jean Montessuit (PDC). Après avoir entendu le président du département et Mme Bugnon, il nous semble incroyable que Mme Bugnon se fâche pour un tel sujet. Nous en concluons qu'il n'est pas nécessaire de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement et nous vous proposons de passer au vote immédiat sur la motion.
M. Bénédict Fontanet (PDC). J'appuie la proposition de M. Montessuit; il faut refuser le renvoi en commission et refuser cette motion. Ça suffit! A chaque fois que M. Föllmi présente un projet ... (Dénégations et protestations de la gauche.) et qu'il en discute, à chaque fois, comme par hasard, une motion surgit pour le court-circuiter et pour que l'on en discute en commission.
Madame Bugnon, si vous voulez élaborer les projets conjointement ou à la place de M. Föllmi, faites-vous élire au Conseil d'Etat! Il ne faut pas mélanger les pouvoirs, notre Conseil a celui de traiter les sujets une fois que ceux-ci sont bouclés et qu'ils ont été étudiés par le Conseil d'Etat. En l'espèce, ce n'est pas le cas. Cette motion est pernicieuse et nous la refuserons! (Bravos de l'Entente.)
M. Philippe Fontaine (R). (Vacarme incessant.)
La présidente. Laissez parler M. Fontaine!
M. Philippe Fontaine. J'ai le sentiment que nous "dépassons un peu les bornes "! (Protestations de toutes parts.) parce que nous sommes en cette fin du mois de juin, fatigués par une année de travail; en plus il est fort tard! Ce que j'ai ressenti dans le discours du président Föllmi, c'est un peu de regrets, de vexation, mais je le dis sans véhémence, je l'ai perçu, Monsieur le président, dans le ton, car je vous admire depuis longtemps et je vous connais bien...
L'assemblée. Aaahhh!
M. Philippe Fontaine. ...et je vous "sens " bien, si j'ose dire! (Eclats de rire de l'assemblée.) Je crois que l'emportement de ma collègue Bugnon est dû au fait que c'est un sujet qui lui tient très particulièrement à coeur. (Exclamations de toutes parts.) Il faut lui en être gré, et ce n'est pas parce qu'elle a eu un coup de colère, que je ressens comme bénéfique à quelque part, qu'il faut profiter de cela pour changer d'avis au dernier moment. Cela ne m'apparaît pas très honnête sur le plan intellectuel. (Brouhaha constant.)
Ce qui ressort de tous ces problèmes, c'est qu'il y a, et je vous demande d'y être sensible aussi, une profonde inquiétude chez les professionnels de ce domaine bien particulier. (Charivari.) Cette inquiétude-là n'est pas financière, mais professionnelle par rapport à des problèmes essentiellement pédagogiques. Je suis très frappé du fait que dans cette motion, le mot "pédagogique " ne soit pas sorti une seule fois de la bouche des différents intervenants. Cela montre qu'il sera nécessaire d'étudier ce problème en commission. Je vous demande de maintenir les décisions que vous avez souhaitées tout à l'heure afin que nous puissions sereinement travailler en commission.
Mme Marlène Dupraz (T). (Tumulte dans l'assemblée et protestations contre Mme Dupraz.) Vous m'écouterez encore cinq minutes, que cela vous plaise ou non! Le problème de la petite enfance est très souvent mal connu et c'est la raison pour laquelle cette motion doit être renvoyée en commission. Vous êtes tous parents, toutes mères, tous pères et lorsque vous placez vos enfants en crèche ou en garderie, vous êtes très contents de pouvoir retrouver vos enfants sains, avec un esprit sain...
M. Michel Balestra. Dans un corps sain! (Eclats de rire, raffut du diable.)
Mme Marlène Dupraz. (L'oratrice a de la peine à se faire comprendre.) Dans la réalité, ce n'est pas toujours le cas. On s'en aperçoit beaucoup trop tard, lorsqu'on les a négligés, lorsque la surveillance dans une crèche a été délaissée. Vous savez très bien que la petite enfance a fait l'objet, dans d'autres pays, d'études sérieuses et de surveillance très très proche. On entreprend le dépistage des anomalies précocement et c'est dans ce sens-là que je trouve que la surveillance n'est pas seulement bureaucratique ou administrative. Dans le cadre de la santé de la petite enfance, il est important aussi de pouvoir suivre la croissance de l'enfant, et c'est justement du personnel formé, conscient et responsable qui pourra remplir ce rôle et ces responsabilités. Je pense que la motion n'est pas de trop, elle n'en dit pas beaucoup, mais cela recouvre des réalités plus importantes... (Brouhaha intense.)
La présidente. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît! Laissez-la parler. Attendez un moment, Madame Dupraz, on reprendra quand le calme sera revenu.
Mme Marlène Dupraz. Vous avez l'air de prendre les petits enfants comme des petits individus à négliger, mais c'est vous qui le paierez plus tard! (Protestations de l'Entente, huées.) Vous savez très bien que l'Association des parents d'enfants handicapés se rend compte, souvent beaucoup trop tard, que quand il y a eu accident et qu'il n'a pas été porté à leur connaissance, ce sont les parents qui paient les frais de l'existence d'un enfant handicapé.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Il ne s'agit pas du tout de dire qui est compétent et qui ne l'est pas dans l'affaire. Il s'agit seulement d'une demande. Nous aimerions pour une fois discuter d'un sujet qui nous intéresse. Il ne suffit pas d'aborder au sein de ce Grand Conseil des problèmes de circulation ou de logement, mais de s'intéresser également aux petits enfants. On aimerait vraiment pouvoir discuter de cette motion à la commission de l'enseignement.
Monsieur Föllmi, c'est vrai que chaque fois que l'on vous demande quelque chose, vous avez l'impression qu'on ne vous aime pas! Monsieur Föllmi, on vous aime, mais... (Hilarité générale et applaudissements de toutes parts.) ...on aimerait discuter... (Claquements de pupitres.) C'est un réel souci, on aimerait que ça aille le mieux possible pour nos enfants et que...
L'assemblée. Harcèlement, harcèlement, harcèlement...
Mme Maria Roth-Bernasconi. ...le travail se fasse...
La présidente. Si vous continuez, je suspends la séance et on reste jusqu'à minuit!
L'assemblée en liesse reprend de plus belle. Harcèlement, harcèlement, harcèlement... (Chambard sur tous les bancs.)
Mme Maria Roth-Bernasconi. Je vois très bien que ce thème n'intéresse pas beaucoup les députés, car il est vrai que les petits enfants ce n'est pas l'électorat primordial de la droite! (Rires, cacophonie.)
M. Gérard Ramseyer (R). Madame la présidente, j'aimerais humblement vous demander si le Grand Conseil, en tant que tel, est soumis aux normes de surveillance des collectivités de la petite enfance?
La présidente. Ça serait pas mal, parce que vous faites une belle classe de gros bébés ce soir! (Eclats de rires.) (La présidente passe la parole à M. Föllmi sous les protestations de toute l'assemblée.)
Une voix. Dis-lui que c'est réciproque... et que tu l'attends au parking! (Hilarité générale.) (M. Föllmi debout, se rassied sans dire un mot.) (L'assemblée exulte.)
La proposition de renvoi de cette motion est mise aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
La proposition de renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement est adoptée par 46 oui contre 43 non.
Débat
M. Michel Jörimann (S). La commission des pétitions s'excuse, tout d'abord, d'avoir déposé cette résolution dans des délais extrêmement courts, même si j'en ai faxé le texte à tous les groupes de ce parlement mardi après-midi, mais il y a urgence et vous avez accepté d'en discuter.
Si vous avez lu l'exposé des motifs, vous comprendrez le pourquoi d'une procédure inhabituelle mais qui n'est pas proscrite par notre règlement. C'est qu'il y a péril en la demeure. Et cette demeure, c'est la Maison de la radio du boulevard Carl-Vogt. Le personnel, qu'il soit administratif, technique ou journalistique craint pour son emploi. Les rumeurs les plus alarmistes courent, en effet, autour d'un projet intitulé "Opéra " et qui vise à regrouper en un seul endroit les services de la radio, c'est-à-dire à Lausanne. Il est vrai que le flou entretenu autour de ce projet ne fait qu'aviver l'inquiétude. Pour certains, les plus optimistes, il ne s'agit que d'un projet susceptible d'être renvoyé à ses auteurs, avec prière de revoir la copie. Pour d'autres, plus alarmistes, il est sur le point d'être accepté durant cet été ou au tout début de l'automne. Ils en veulent pour preuve la démolition d'un studio genevois. Par ailleurs, depuis cinq ans, les contrats passés avec les journalistes sont, en réalité, des mandats de correspondants stipulant que Genève n'est qu'un lieu de travail provisoire.
On comprend, dans ces conditions, que des employés de la SSR à Genève se sentent menacés dans leurs conditions de travail. Mais, au-delà du problème déjà assez douloureux de l'emploi, s'en pose un autre qui nous concerne tous. Car ne laisser à Genève qu'une "antenne ", c'est bien le mot qui convient, c'est donner une part congrue à tout le rayonnement culturel de ce canton, aux institutions internationales qui ont leur siège ici.
Certes, nous ne sommes pas meilleurs que les autres. Mais il se trouve que pour des raisons géopolitiques et historiques qu'il est inutile de souligner, Genève constitue un pôle, et qu'à l'heure où d'aucuns s'efforcent de faire triompher un slogan peut-être maladroit "Genève gagne ", la réduction des studios genevois apparaît comme singulièrement amère.
La Radio suisse romande à Genève est un service public. C'est en cela que son sort nous concerne tous, et c'est la raison pour laquelle la commission des pétitions, unanime, m'a chargé de rédiger cette résolution et de vous inviter à la renvoyer au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
La séance est levée à 22 h 55.