Séance du
jeudi 10 juin 1993 à
17h
52e
législature -
4e
année -
6e
session -
22e
séance
M 861
Débat
Mme Fabienne Bugnon (Ve). En cette période de crise économique où le chômage est en progression continuelle et alarmante, il est de notre devoir à tous de trouver des solutions pour tenter de l'enrayer. Il faut également tenter de faire preuve d'imagination et de lancer des idées novatrices. C'est dans cet esprit que diverses associations féminines se sont réunies à plusieurs reprises et ont mis sur pied, avec les députées motionnaires, la motion qui vous est soumise ce soir.
La coordination de ces associations féminines a été fortement sollicitée par des femmes qui connaissent des situations professionnelles difficiles, soit pour elles, soit pour leur conjoint. C'est suite à cette importante demande que les associations féminines se sont mises au travail pour élaborer ce projet. Si, dans un premier temps, il était plutôt destiné aux chômeuses, il s'est par la suite étendu pour devenir la motion que vous avez sous les yeux. Son contenu n'est pas contraignant puisqu'il demande au Conseil d'Etat d'étudier l'intérêt et la possibilité de créer des entreprises tremplins. Nous n'avons pas la prétention de déposer un projet révolutionnaire et nous avons appris par la bouche de M. Maitre, lors de notre précédente séance de Grand Conseil, que son département travaillait dans une voie similaire. Nous en sommes très satisfaites, et si tel est le cas nous souhaiterions qu'il prenne cette motion comme un appui au travail mené par ses collaborateurs.
L'idée des entreprises tremplins n'est pas totalement nouvelle puisqu'elle existe dans d'autres pays européens et même dans notre pays où des entreprises fictives fonctionnent quelques soirs par semaine dans le but d'approfondir la formation des apprentis. Dans notre proposition, l'objectif recherché est la formation qui fait souvent cruellement défaut aux chômeurs et en particulier aux chômeuses. Selon les statistiques suisses, 17% des femmes et 9% des hommes de plus de vingt ans sont sans formation. Des possibilités d'acquérir des formations pour les adultes existent, mais elles sont semées d'obstacles.
D'abord, les horaires correspondent souvent aux horaires scolaires traditionnels, ce qui ne permet pas d'avoir une activité rémunérée en parallèle. Ensuite, le coût, l'assurance-chômage ne pouvant prendre en charge les formations longues est un obstacle de taille pour les femmes qui ont cessé toute activité rémunérée pour s'occuper de leur famille, car elles n'ont pas droit à une formation financée par l'assurance-chômage. Les formations en emploi deviennent elles aussi précaires en ces périodes de faillites et de restructurations qui aboutissent la plupart du temps à des licenciements obligeant certains travailleurs et travailleuses à interrompre ou même à abandonner leur formation. La réalisation de ce projet permettrait également à des jeunes ayant terminé leur apprentissage de ne pas avoir la caisse de chômage comme premier employeur. Le nombre de ces jeunes formés sans premier emploi est lui aussi en augmentation.
Le fonctionnement de ces entreprises tremplins serait copié sur celui des ateliers protégés et les cadres seraient des ingénieurs, des entrepreneurs, des directeurs ou des ouvriers qualifiés qui traverseraient eux-mêmes une période de chômage. Cela permettrait, d'une part, de mettre leur expérience à profit et, d'autre part, d'avoir eux-mêmes un emploi plus stimulant et dynamisant que l'occupation temporaire, car ils seraient associés à un projet qui, selon le type d'entreprise, pourrait devenir dans l'avenir une réelle entreprise.
Si nous avons été immédiatement conquises par l'idée d'occuper des chômeurs et des chômeuses de manière valorisante, l'aspect financier devait être également largement pris en compte étant donné l'état dans lequel se trouvent les finances cantonales et fédérales. Les associations féminines ont donc pris des contacts et des renseignements. Il en résulte que ces entreprises tremplins pourraient être établies dans des locaux actuellement inoccupés et que leur mise sur pied et leur fonctionnement seraient financés conjointement par les fonds du chômage, le fonds du perfectionnement professionnel et par les recettes des produits et services commercialisés par l'entreprise. L'opération ne demanderait pas de financement supplémentaire et qui sait, en cas de percée sur le marché, pourrait s'autofinancer.
Les entreprises seraient supervisées par l'Etat, comme le propose l'invite, sous l'autorité d'une société anonyme d'économie mixte ou selon une autre formule à déterminer. Comme je vous l'ai dit au début de mon intervention, l'invite contenue dans cette motion n'est volontairement pas contraignante. Elle part d'une idée constructive sous la forme d'une contribution active au problème du chômage. C'est d'ailleurs dans cet esprit que les représentantes de plusieurs partis ont accepté de la soutenir.
Je souhaite que ce Grand Conseil accepte de l'adresser directement au Conseil d'Etat, puisque le département de l'économie planche déjà sur ce sujet.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Comme l'a rappelé Mme Johner, le département de l'économique publique...
La présidente. C'était Mme Bugnon!
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Ah, c'est un lapsus qui honore l'une et l'autre!
Je voulais dire à Mme Bugnon que notre département est en relation avec la société suisse des employés de commerce. Un mandat spécifique lui a été confié. Si cette motion nous est renvoyée directement, nous l'acceptons bien volontiers, cela nous permettra de faire rapport le moment venu sur l'état actuel de nos travaux. Nous allons effectivement dans le même sens que cette motion. C'est une des possibilités qui s'offrent actuellement pour améliorer l'éventail des prestations en matière de formation, et aucune possibilité ne doit être négligée. C'est la raison pour laquelle nous accueillons favorablement cette motion, puisqu'elle vient directement dans le sens de ce qui est entrepris.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue: