Séance du jeudi 14 janvier 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 1re session - 2e séance

M 604-A
7. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Erica Deuber-Pauli, Liliane Johner, Christiane Magnenat Schellack, Jacqueline Jacquiard et Yves Meylan pour une meilleure transparence lors des expériences sur des animaux vivants. ( -) M604
Mémorial 1989 : Développée, 6601. Commission, 6614.

Débat

Mme Vesca Olsommer (Ve). Le groupe écologiste entend d'abord remercier le Conseil d'Etat et ses collaborateurs de leur réponse à la motion 604. Ce rapport présente clairement le travail d'évaluation auquel se livre l'office vétérinaire cantonal avant de délivrer une autorisation d'expérimentation sur les animaux vivants. On voit combien ce travail est exigeant et délicat.

 Ce rapport contient aussi une étude fouillée sur le secret de fonction auquel est astreinte la sous-commission de surveillance. Avant d'y revenir, je ne peux pas m'empêcher de polémiquer quelque peu. Je trouve regrettable parfois que, pour que les autorités administratives modifient leur comportement il faille passer par un éclat public. Il faut se rappeler à cet égard qu'en 1989, deux projets de recherche de la faculté de médecine étaient tombés dans les mains d'une association de protection des animaux. Cette dernière, devant le silence glacé, voire méprisant, des autorités administratives, politiques et scientifiques, avait fait appel à l'opinion publique par l'intermédiaire de la presse.

 Un scandale s'en est suivi, des pétitions ont circulé, l'une munie de vingt-six mille signatures. Si mes renseignements sont bons, le DIAR avait reçu plusieurs milliers de lettres de protestation émanant même de l'étranger. Une de ces expériences a même été annulée par l'Office vétérinaire fédéral. Ces protestations ont démontré que non seulement la population est sensible à la souffrance des animaux, mais qu'elle s'informe de plus en plus, qu'elle a besoin de savoir ce que font les chercheurs, par quels procédés ils obtiennent leurs résultats et qu'elle n'oublie pas que les fonds publics financent en partie la recherche.

 La population demande des comptes aux chercheurs. Il faut donc que ceux-ci sortent de leur tour d'ivoire, ce qu'ils commencent de faire d'ailleurs, mais il faut aussi que les autorités apprennent à dialoguer avec ceux et celles que ces problèmes intéressent. Voilà la leçon à tirer de ces événements. Un peu plus de transparence et de dialogue. Reconnaissons que le climat entre les associations de protection des animaux et les autorités administratives s'est amélioré, notamment avec la nomination d'un nouveau vétérinaire cantonal.

 Cette parenthèse étant fermée, je reviens au secret de fonction auquel sont soumis les membres de la sous-commission de surveillance de l'expérimentation animale qui comprend aussi des représentants des associations de protection des animaux. Ceux qui espéraient voir ce secret de fonction annulé, ou au moins allégé, seront sans doute déçus. Pour sa part, le groupe écologiste estime que les chercheurs ont droit quand même à une protection minimum de leur personnalité et que ce secret de fonction ne peut être entièrement levé.

 Ce qu'il faut comprendre, c'est que ce secret de fonction n'empêche nullement un membre de la sous-commission de travailler pour améliorer le sort des animaux utilisés pour l'expérimentation, pour autant qu'il ait une formation et soit motivé. Il appartient donc avant tout aux associations de protection des animaux, qui ont tellement réclamé un droit de regard sur ces expériences, de prendre leurs responsabilités.

 En dernier lieu, c'est avec une grande satisfaction que je remarque que le rapport reprend, à la page 4, des aspects qui avaient été soulignés en commission, à savoir que les chercheurs devaient parfaire leurs connaissances en éthologie et devaient appliquer les règles d'éthique de l'expérimentation animale. Le groupe écologiste prend très au sérieux les observations qui figurent dans le rapport du Conseil d'Etat et vous prie, Monsieur le chef du département, de voir avec vos collègues, notamment avec M. Föllmi, comment donner suite à ces propositions. Nous y tenons beaucoup et nous ne vous lâcherons pas sur ce point, (Sourires.) Monsieur le conseiller d'Etat. Pour le surplus, nous vous remercions.

M. Jacqueline Jacquiard (MPG). Imaginons, aussi utopique que cela paraisse, qu'un monde fantastique survienne, peuplé de créatures d'une telle puissance et d'une telle intelligence que nous deviendrions, nous les humains, l'élément vivant utilisé pour des recherches de tous ordres. Cette supposition est tellement extravagante qu'il n'y a pas lieu de s'y arrêter une seconde.

 Pourtant, elle permet de mieux réaliser la condition des animaux de notre monde. N'en sommes-nous pas les maîtres absolus? Et eux, ne sont-ils pas des êtres vivants, complètement dépendants, ressentant la souffrance et pressentant souvent des événements dont l'éventualité ne nous effleure même pas? Pour cette raison, nous leur devons respect et reconnaissance, ainsi que l'amélioration de leur condition et la limitation de leur nombre en tant que

matériel d'expérience. Le Conseil d'Etat, dans son rapport, démontre qu'il a compris combien ce problème renfermait d'éléments encore non résolus, de contradictions éthiques et morales, comme aussi de découvertes extraordinaires dont nous sommes les bénéficiaires grâce à des chercheurs et à leurs applications dans une médecine tournée vers la vie.

 Sous la pression de milieux toujours plus larges, des critères de plus en plus précis ont été établis. La loi fédérale de 1978 a été précisément remaniée à cet effet. Ce sont ces critères qui déterminent l'octroi ou non des autorisations d'expériences sur des animaux vivants depuis le 1er décembre 1991. Quant à la transparence demandée par la motion lors des expériences sur des animaux vivants et la levée du secret de fonction, nous remercions le Conseil d'Etat d'y répondre dans un souci de compréhension tendant à rapprocher les antagonismes plutôt qu'à durcir les positions. Son rapport permet de soulever un pan de la chape de plomb qui recouvrait la recherche scientifique et la rendait quasiment inaccessible à ceux qui se préoccupent de la protection des animaux. Nous y voyons l'espoir d'une ouverture et d'une meilleure collaboration dans des limites examinées de part et d'autre.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Je voudrais vous remercier, Madame Olsommer, de vos propos à l'égard de mes collaborateurs. Je suis heureux qu'aient été obtenus le dialogue et la transparence que vous souhaitiez. Vous aviez raison de dire, Madame, que j'avais reçu une abondante correspondance. C'est le sujet pour lequel j'en ai reçu le plus, quatre mille lettres à titre personnel! Et elles ne parlaient pas des expérimentations autorisées.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.