Séance du jeudi 30 octobre 2025 à 20h45
3e législature - 3e année - 5e session - 27e séance

PL 13489-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de Yves Nidegger, Lionel Dugerdil, Guy Mettan, Florian Dugerdil, André Pfeffer, Patrick Lussi, Christo Ivanov modifiant la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée (LMCE) (H 1 21) (Pour une mobilité vraiment cohérente et vraiment équilibrée)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 10 et 11 avril 2025.
Rapport de majorité de Mme Caroline Marti (S)
Rapport de minorité de M. Stéphane Florey (UDC)

Premier débat

La présidente. Nous passons au PL 13489-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes.

Une voix. Allons-y !

La présidente. Je cède le micro à la rapporteure de majorité, Mme Caroline Marti.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, une révolution copernicienne, c'est comme ça que l'auteur de ce projet de loi a qualifié son propre texte: alors je vous rassure tout de suite, on ne parle pas ici d'héliocentrisme, mais à peine d'un vague schéma de mobilité qui tourne plus ou moins autour de la place Bel-Air. Il s'agit en fait surtout d'un projet de loi qui tourne autour de l'ego de son auteur !

Mesdames et Messieurs les députés, ce que propose notre baron Haussmann de pacotille du bout du lac... (Rires.) ...c'est en effet de revoir complètement le schéma de circulation de la mobilité à Genève, autour de trois ceintures: une première petite ceinture qui traverserait le centre-ville, une moyenne ceinture, celle que l'on connaît et qui est incluse dans la LMCE, et une ceinture autoroutière qui contournerait le canton.

Vous connaissez les schémas et les plans routiers de notre canton et, de ce fait, vous rendez compte que ces ceintures devraient toutes être bouclées par de nouvelles infrastructures. Non pas une, non pas deux, mais trois nouvelles infrastructures routières qui devraient traverser soit la rade soit le lac. Il s'agit de la traversée du lac (on connaît), de la traversée de la rade, qui est également très fortement portée par l'UDC, et enfin du tunnel Trachsel.

Alors je dois avouer que la principale vertu de ce projet de loi, c'est que j'ai appris l'existence de ce projet, qui, tenez-vous bien, remonte à un certain M. Trachsel, lequel a formulé cette proposition de tunnel passant sous la rade en 1896 ! Voilà qui vous montre assez bien d'où viennent et de quand datent les idées et schémas de mobilité sur lesquels se base ce projet de loi !

Les auteurs de ce texte adoptent une posture quasi messianique en disant: «On sait comment on va régler l'ensemble des problèmes de mobilité de notre canton.» Or, ils ne s'appuient sur aucune étude technique ni, évidemment, aucune modélisation des reports de trafic institués par ce nouveau schéma de mobilité. Il n'y a en outre aucune étude sur les coûts d'investissements absolument faramineux que ces nouvelles infrastructures entraîneraient.

Si on entre dans une analyse un peu plus poussée de ce texte, on se rend compte qu'il est totalement contraire au plan d'actions du réseau routier, qu'une très large majorité de ce Grand Conseil a soutenu il y a seulement quelques mois. En effet, ce projet de loi est complètement incompatible avec le principe consistant à limiter l'arrivée et l'entrée de véhicules motorisés en plein centre-ville; cette petite ceinture qui traverserait l'hypercentre de Genève va absolument à l'encontre de cette logique puisqu'elle amènerait des voitures dans le centre-ville.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

Mme Caroline Marti. Merci, Madame la présidente. De ce fait, c'est un projet qui annihilerait tous les efforts de report modal. Cela rendrait nécessaire de remettre à double sens certaines rues qui ne le sont pas, comme le boulevard du Pont-d'Arve. Les personnes qui habitent le long de cet axe soumis à de très fortes nuisances sonores en seraient certainement ravies !

Par ailleurs, on limite les possibilités de sites propres pour les transports collectifs, on abandonne l'encouragement au covoiturage, on supprime les transports collectifs sur certains axes majeurs, par exemple la rue de Lyon, la rue des Charmilles ou encore le pont Sous-Terre, ce qui va évidemment contribuer à isoler certains quartiers très densément peuplés du centre-ville. Et puis, on remplace les carrefours à feux par des ronds-points, ce qui non seulement ne permet pas de prioriser un certain nombre de flux et de faire des choix en la matière, mais pose évidemment aussi un énorme problème pour les cyclistes qui empruntent ces ronds-points.

Bref, ce projet de loi n'est ni fait ni à faire, et je vous invite à faire usage de l'invention d'un autre illustre Parisien, non pas baron celui-ci, mais préfet, M. Eugène Poubelle, et à refuser ce texte ! Je vous remercie. (Commentaires. Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. Bon, à présent, il faut quand même revenir à un peu plus de réalité. Il faut avouer, et c'est la réalité, que la LMCE n'a absolument rien résolu dans la mobilité à Genève. On roule toujours aussi mal, entre avant et après la LMCE, ça n'a pas changé. La réalité, c'est ce que les associations professionnelles de transport disent elles-mêmes: la situation devient intenable. Les personnes concernées perdent des heures et des heures dans les bouchons et n'arrivent pas à circuler correctement. Finalement, c'est toute l'économie qui subit les conséquences néfastes de cette LMCE.

L'autre réalité, c'est que, bien que l'ancien conseiller d'Etat chargé de la mobilité se soit évertué pendant toute une législature à la mettre en place, la moyenne ceinture qui devait assurer une fluidité constante sur notre réseau routier n'est pas aboutie. Quand le sera-t-elle ? On n'en sait rien, puisque à chaque fois que l'Etat essaie de la réaliser, il y a tellement d'oppositions que tout est bloqué. On le voit encore aujourd'hui: on a des débats importants concernant le bas de la rue de Lyon, qui devrait être fermé à la circulation.

On le constate aussi avec l'esplanade de Cornavin, qui fait partie du fameux plan directeur du réseau routier - sur ce point, nous, on est tranquilles, on est à peu près le seul groupe à l'avoir refusé, et c'est la raison pour laquelle nous proposons ces changements. Mais pour en revenir à l'esplanade de Cornavin, on va droit dans le mur: les travaux n'ont même pas encore commencé qu'ils ont déjà été repoussés à de multiples reprises. C'est bel et bien la preuve qu'on n'arrive absolument à rien en s'évertuant à appliquer une loi qui pose problème.

Ce parlement n'a pas voulu l'abroger, comme nous l'avions proposé il y a quelques mois. Aujourd'hui, mon collègue est revenu avec un projet de révision de la LMCE, justement pour tenter... Et encore, on n'en a même pas la garantie, mais il s'agit d'au moins tenter quelque chose de plus réaliste concernant la mobilité à Genève. C'est pour ça qu'avec l'appui des milieux du transport professionnel, nous vous proposons une révision de la LMCE au travers de ce projet de loi. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Pour le groupe MCG, il est certain que la situation actuelle est, comment dire, problématique; nos réseaux de circulation sont sclérosés et notre territoire est difficile à gérer en raison de son exiguïté, il faut le reconnaître. Beaucoup de mesures ont été prises de manière malheureuse, notamment par un ancien conseiller d'Etat, qui n'ont fait que rendre plus complexe une situation qui l'était déjà.

Alors chacun peut avoir sa propre vision, il est de tradition de dire qu'il y a autant d'ingénieurs en circulation que d'habitants dans notre canton. Certes. Il est néanmoins intéressant de formuler des propositions pour essayer de sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons actuellement.

C'est pour ça que le groupe MCG a accueilli avec bienveillance ce projet de loi et l'a soutenu, en partant du principe qu'il fallait séparer les divers flux de circulation. Si j'ai bien compris, c'est le principe général sur lequel se base ce texte. Nous pensons que ça vaudrait le coup de véritablement tenter les pistes proposées par ce projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous le voterons et vous demandons d'en faire de même. Merci.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Je serai très rapide. On a de nouveau affaire à un de ces projets de lois issus de nulle part et complètement dysfonctionnels proposés par l'UDC - ça devient une habitude; nous le regrettons. Il faut quand même rapidement le traiter. La rapporteuse de majorité a exposé les principales faiblesses de ce texte, qui est effectivement ancré dans le XIXe siècle, plus précisément en 1896 avec ce tunnel Trachsel, dont nous ignorions l'existence et qui heureusement n'a jamais été réalisé.

Mais il faut dire que l'essentiel de ce projet de loi nous rappelle plutôt les années 60, soit l'époque où on rêvait de mettre des autoroutes quatre pistes sur les quais et de transformer les parcs publics en stationnement pour les automobiles. Il n'est évidemment pas du tout question de complémentarité ou de séparation des flux, mais d'imaginer une ville complètement dévolue à la voiture.

Alors on peut bien comprendre que l'auteur de ce texte souhaite se faire plaisir et proposer un projet de 47 pages auquel il ajoute des annexes composées de réclames qu'il doit patiemment collectionner, issues elles-mêmes des années 50 ou 60. Je peux effectivement concevoir l'autosatisfaction de ce collègue, mais je le prierais, gentiment et respectueusement, de peut-être porter ses pulsions sur d'autres victimes que notre Grand Conseil. Ce parlement est véritablement obstrué par ce genre de projet. Il faut évidemment refuser ce texte. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Yves Nidegger (UDC). Je demande humblement pardon à mon préopinant d'avoir une vision de ce que pourrait être Genève si on utilisait intelligemment les infrastructures telles qu'elles existent, en appliquant les principes de la LMCE de manière sincère, plutôt que de se laisser bloquer par un quarteron d'emmerdeurs qui ne vise qu'une seule chose, à savoir empêcher la population genevoise d'exercer sa liberté première, soit celle de circuler.

Pardon d'avoir une vision un peu historique de ce qui s'est passé. Depuis Jules César, Genève, ce n'est rien d'autre qu'un passage entre le pays des Helvètes et celui des Allobroges, à travers cette masse d'eau que sont la fin du lac et le Rhône. Comme vous l'avez constaté, certains stratèges intelligentissimes s'assurent que pont après pont, passage après passage, on ne passe plus, et donc que Genève meure dans une asphyxie générale, ce qui est en train d'arriver !

Ce qui est proposé ici, ce n'est rien d'autre qu'une anticipation de ce qui vient de se passer. Vous avez entendu la Berne fédérale nous expliquer que la traversée du lac, vous pouvez oublier ! Ça, on le sait depuis toujours, on fait semblant de ne pas l'entendre, mais cela fait dix ans que l'OFROU nous explique que l'on peut envisager un prolongement de l'autoroute de contournement à travers le lac seulement à trois conditions.

La première, c'est que l'on développe le coteau de Cologny, ce qui n'est pas vraiment évident. La deuxième, c'est que l'on s'entende avec les Français pour réaliser cette autoroute, ce prolongement autoroutier, qui n'est finançable que pour autant qu'il s'agisse de lever un goulet d'étranglement (c'est à ça que le fonds doit servir). Il faut donc qu'on s'entende avec la France pour que cette autoroute aboutisse à un endroit connecté avec le réseau routier de l'autre côté. Et finalement, la troisième condition est qu'on ait préalablement élargi l'autoroute de contournement actuelle - chaque jour, elle se transforme en parking pendant près de quatre heures du fait qu'elle est saturée.

Les fonds fédéraux pour le contournement autoroutier ne peuvent en effet être utilisés que si l'on résout un problème d'engorgement et de blocage. Bien entendu, tant et aussi longtemps que l'on sera engorgé sur l'autoroute de contournement, la prolongation de cet engorgement ne sera pas au rendez-vous. Tout cela suppose d'avoir compris ce qui se passe à Berne ainsi que dans la région et de proposer une vision qui ferait véritablement...

La présidente. Monsieur le député, vous n'avez plus de temps.

M. Yves Nidegger. Je termine, Madame la présidente. ...ce que la loi sur la circulation dite cohérente et raisonnable proposait, c'est-à-dire une séparation des flux, que j'ai pris la peine de détailler en parcourant toute la ville et ses environs avec mon vélo.

La présidente. Merci, Monsieur le député.

M. Yves Nidegger. Je vous propose donc de renvoyer cet objet en commission puisque... (Le micro de l'orateur est coupé.)

La présidente. Je suis obligée de vous couper.

Une voix. Il a demandé le renvoi en commission.

La présidente. Oui, j'ai entendu. Je passe la parole au rapporteur de minorité pour qu'il s'exprime sur cette demande de renvoi.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Ecoutez, je crois que mon collègue a été suffisamment clair sur les tenants et aboutissants de son projet de loi. Il est évident que si nous voulons traiter correctement la problématique de la LMCE, il nous faut bel et bien renvoyer ce texte en commission. Je vous remercie.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. En ce qui concerne la majorité, il est évidemment temps de mettre fin à la blague et de ne pas filer la métaphore encore plus longtemps en commission, raison pour laquelle j'invite la plénière de ce Grand Conseil à refuser le renvoi ainsi qu'à rejeter dans la foulée ce projet de loi.

La présidente. Merci, Madame la députée. Je lance la procédure de vote.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13489 à la commission des transports est rejeté par 63 non contre 21 oui.

La présidente. Nous continuons notre débat, et je passe la parole à M. Pascal Uehlinger.

M. Pascal Uehlinger (PLR). Merci, Madame la présidente. Comme nous faisons beaucoup d'histoire, j'ajouterai que les Romains avaient compris il y a plus de deux mille ans qu'en principe, quand on veut réaliser de bonnes structures, on construit des routes, et ensuite, on urbanise le long de ces routes.

On peut admettre qu'à Genève, nous avons déjà urbanisé. Par conséquent, on essaie à présent de modifier les routes; c'est ce que demande ce projet de loi. Autant je peux entendre que la notion de petite ceinture puisse être intéressante, autant sa mise en oeuvre me paraît compliquée. Il faudrait effectivement réaliser le tunnel de Trachsel, soit un ouvrage qui aurait dû être construit il y a plus d'un siècle. Ce projet n'a pas été mené, et aujourd'hui, sa faisabilité paraît assez incertaine.

On revient aussi sur la discussion relative à la traversée du lac, qui a été refusée par la population, contrairement à la traversée de la rade... Non, pardon, celle qui a été refusée par la population, c'est bien la traversée de la...

Une voix. Rade !

M. Pascal Uehlinger. La traversée de la rade a été refusée, mais la traversée du lac a été autorisée par la population.

Quels sont les objectifs stratégiques liés à ce projet ? Effectivement, il s'agit de l'élargissement autoroutier. Je me suis déplacé à Berne avec M. Julien Nicolet-dit-Félix pour la deuxième voie ferroviaire entre Genève et Lausanne, mais ce n'est pas forcément le sujet aujourd'hui. Nous avons un deuxième problème dans ce domaine, ce sont les plans d'actions en matière de mobilité. Nous les avons validés, et une partie de ces plans d'actions est incompatible avec certains éléments de ce projet de loi.

Finalement, nous allons tourner en rond avec ce texte. Il contient aussi des demandes assez extravagantes, notamment celle qui veut permettre la circulation dans les deux sens sur le boulevard du Pont-d'Arve alors qu'aujourd'hui, il est à sens unique. La réalisation de cette évolution paraît aussi assez compliquée; beaucoup d'études ont été menées.

Et puis, la dernière problématique, c'est celle des ronds-points. Actuellement, on pense que les ronds-points sont des solutions, alors qu'ils ne le sont que dans un seul cas, à savoir quand le flux de circulation va dans un sens. On admettra qu'à Genève, les flux de circulation vont dans tous les sens et rarement dans un sens seulement; c'est pour ça que les feux sont probablement plus adaptés.

Pour tous ces motifs, je vous propose de renvoyer ce projet de loi aux calendes grecques ! (Rires.) 

M. Christian Steiner (MCG). Ce projet de loi traite d'un vrai problème, à savoir les difficultés de mobilité qu'on connaît à Genève, et il propose une modification de la LMCE. Cette loi mérite d'être modifiée, parce que de l'aveu même de son initiateur, le conseiller d'Etat de l'époque, elle manque de précision. Elle peut être interprétée comme on veut, d'ailleurs on en a la preuve ce soir.

Je pense qu'une des solutions serait effectivement de renvoyer ce texte en commission. Il y a certainement beaucoup d'erreurs à corriger, mais il faut surtout que l'office cantonal des transports reprenne la main, contre des municipalités qui ont souvent une approche totalement dogmatique et anti-bagnole, qui ne vont pas dans le bon sens et qui nous mènent à la situation actuelle, totalement insatisfaisante. Par conséquent, je propose un renvoi en commission afin que nous traitions sur le fond les problèmes de mobilité que personne ne saurait nier à Genève. Merci.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Est-ce que les rapporteurs souhaitent s'exprimer ? (Commentaires.) Ce n'est pas le cas, très bien. Nous passons directement au vote.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13489 à la commission des transports est rejeté par 64 non contre 23 oui.

La présidente. Nous reprenons notre débat. Je cède le micro à M. Jacques Jeannerat.

M. Jacques Jeannerat (LJS). Merci, Madame la présidente. Figurez-vous que j'ai fait une lecture attentive de ce projet de loi et du rapport. Des éléments m'ont interpellé, alors j'ai fait une seconde lecture. Je me suis arrêté à la deuxième ligne: date de dépôt, 24 mars 2025. Je me suis dit, il y a une erreur. Alors j'ai appelé M. Thorens - on m'a dit qu'il était en réunion - pour savoir s'il n'y avait pas eu une erreur, s'il ne s'agissait pas en réalité du 24 mars 1975 ! Comme M. Thorens était absent, j'ai appelé M. Koelliker. On m'a dit: «Il est en réunion.» Je pensais qu'il y avait une erreur de typographie, tellement les propositions sont vieillottes ! C'est comme si Merlin l'enchanteur réécrivait la Bible !

Bon, ne jetons pas tout. Il y a quand même l'élément de la séparation des flux. C'est intéressant, on y arrive petit à petit, mais on ne peut pas la faire partout. Nous avons un projet, la route de Ferney et la route des Nations: dans quelques années, quand le chantier du tram sera terminé à la route de Ferney, nous aurons une voie pour les piétons, les vélos et les trams et transports publics, et la route des Nations sera réservée aux deux-roues et quatre-roues motorisés. On peut donc réaliser un peu de temps en temps une séparation des flux de modes de transport.

Non, soyons sérieux, ce projet de loi a cinquante ans de retard ! Je propose qu'on le refuse ! (Commentaires.)

M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, je discutais tout à l'heure en aparté avec une personne fort aimable qui trouvait sympas nos débats sur la politique des transports. Ça manquait un peu de piquant: nous revoilà avec la guerre des transports.

Moi, j'ai failli hésiter quant au renvoi en commission: je me suis dit, tiens, ça pourrait être sympa d'en rediscuter encore et encore. Mais non, je vous rassure, Monsieur le président ! (Rires.)

Cette LMCE, M. Jeannerat l'a lue et relue. Moi, je ne l'ai pas lue... (Rires.) ...je vous le dis tout de suite ! Pourquoi ? Parce que finalement, on en fait ce qu'on en veut. Au fond, ça peut être écrit noir sur blanc, on finit par l'interpréter un peu comme on en a envie, au gré des départements et de leurs conseillers d'Etat.

Tout ça pour vous dire que pour nous éviter de retourner en commission et de susciter de nouvelles frustrations quant à la moyenne ceinture qui se fera ou pas, quant à la traversée du lac ou de la rade qui... ne se fera pas - malheureusement, disons ! -, et enfin pour nous permettre d'avancer sur d'autres projets, nous avons décidé de refuser malheureusement ce projet de loi et nous vous demanderons d'en faire de même. Je vous remercie.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Je serai très bref, Madame la présidente, parce qu'effectivement ce débat peut donner un sentiment de déjà-vu. Je dois concéder à son auteur, M. Nidegger, que son appréciation de la traversée du lac est exacte et que c'est un des paramètres du problème. La topographie est têtue, et à Genève, il faut franchir un plan d'eau. Reste à savoir s'il faut le franchir avec une route ou avec une voie ferrée. Cet élément existe véritablement depuis César et est recensé comme étant problématique pour notre cité; c'est en effet un élément structurant.

Pour vous mettre toutes et tous à l'aise, je crois savoir que l'UDC a déposé une initiative pour reposer la question au peuple concernant la traversée de la rade, si je ne m'abuse. C'est un texte pour lequel vous avez recueilli un certain nombre de signatures et qui devrait permettre à chacune et à chacun de refaire l'ensemble de ce débat des cinquante ou deux mille dernières années.

Plus sérieusement, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat souhaite vous rendre attentifs, au-delà du fait que l'UDC veut la peau de la LMCE... On le sait, à réitérées reprises, elle l'a démontré. Je vois qu'il a même un petit sourire... (Rires.) On a testé la technique de l'abrogation, et maintenant, un petit peu en contradiction - je reprends les propos de M. Mizrahi - avec ce qui s'est dit tout à l'heure, puisque vous en rajoutez une couche, vous essayez d'avoir sa peau en la rendant encore plus invivable qu'elle ne l'est objectivement aujourd'hui.

Il faut admettre, et le Conseil d'Etat vous le concède, que cette LMCE, comme l'a dit M. Sayegh, eh bien on peut la prendre de différentes façons. Il y a matière à interprétation. Ce qui est sûr, c'est que nous souhaitons, le Conseil d'Etat et une majorité du Grand Conseil avec lui, veiller à ce que l'on puisse renforcer le réseau dédié aux transports publics dans l'hypercentre, parce que la place est limitée, l'UDC le sait avec son initiative contre une Suisse à dix millions. La place se restreint, et donc il faut pouvoir davantage partager l'espace. Il faut, et là nous vous rejoignons, veiller à ce que la fluidité puisse advenir de manière plus efficace. Mais comme vous le savez aussi, il y a des recours qui sont un peu contrariants, et on ne peut pas déployer pleinement la LMCE. Et puis, nous le savons aussi, et c'est un objectif de cette législature que vous avez soutenu à une très large majorité à travers les plans d'actions - le Conseil d'Etat vous en remercie -, nous devons mettre bon ordre dans la hiérarchie du réseau routier.

Pour toutes ces raisons, il faut évidemment refuser ce projet de loi. Il faut souhaiter que l'UDC passe à une autre marotte que celle de vouloir à tout prix la peau de cette LMCE, que l'on puisse, et là je rejoins M. Nidegger, avoir une fois pour toutes une position sur la traversée du lac, respectivement sur la traversée de la rade, et que nous soyons en mesure lors de cette législature, comme on a commencé à le faire - et j'ai bon espoir pour ma part qu'on y arrive -, de trouver ensemble un compromis sur la politique des transports à l'horizon 2050, parce que les Genevoises et les Genevois méritent effectivement une amélioration de la capacité de circuler dans notre cité.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 13489 est rejeté en premier débat par 69 non contre 23 oui.