Séance du vendredi 23 mai 2025 à 16h15
3e législature - 3e année - 1re session - 4e séance

La séance est ouverte à 16h15, sous la présidence de Mme Ana Roch, présidente.

Assistent à la séance: Mme et MM. Thierry Apothéloz, Anne Hiltpold et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et M. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Antonio Hodgers, Carole-Anne Kast et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, Jacques Béné, Alia Chaker Mangeat, Sébastien Desfayes, Patrick Dimier, Raphaël Dunand, Leonard Ferati, Uzma Khamis Vannini, Jean-Pierre Pasquier, André Pfeffer, Charles Poncet, Caroline Renold, Skender Salihi, Vincent Subilia, Celine van Till, Pascal Uehlinger et Yvan Zweifel, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Oriana Brücker, Rémy Burri, Anne Carron, Stéphane Fontaine, Christine Jeanneret, Gabrielle Le Goff, Yves Magnin, Philippe Meyer, Daniel Noël et Frédéric Saenger.

Annonces et dépôts

Néant.

E 3151
Prestation de serment de la remplaçante de Xhevrie Osmani, députée démissionnaire

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Nicole Valiquer Grecuccio entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)

Madame Nicole Valiquer Grecuccio, vous êtes appelée à prêter serment de vos fonctions de députée au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attachée aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;

- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»

A prêté serment: Mme Nicole Valiquer Grecuccio.

La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)

E 3129
Election d'une Médiatrice administrative titulaire ou d'un Médiateur administratif titulaire pour traiter de façon extrajudiciaire les différends entre l'administration et les administrés (entrée en fonction : 1er juin 2025 ; durée du mandat : jusqu'au 30 novembre 2028) (classe 27 avec statut d'agente spécialisée ou d'agent spécialisé)

La présidente. La commission législative propose la candidature de M. Pierre-Emmanuel Fehr, avec un préavis favorable du Conseil d'Etat.

Conformément à l'article 115B de la LRGC, nous allons procéder à l'élection à bulletins secrets, en un seul tour à la majorité absolue. Le candidat est élu s'il obtient la majorité des suffrages exprimés, les bulletins blancs et nuls étant comptés dans le calcul de cette majorité. Je prie les huissiers de bien vouloir distribuer les bulletins de vote. (Les députés remplissent leur bulletin de vote.)

Tous les bulletins ont été distribués. Le vote est clos. Je prie les huissiers de bien vouloir récolter les bulletins de vote et les scrutateurs de se rendre à la salle Nicolas-Bogueret pour le dépouillement, accompagnés par M. Tombola. En attendant de connaître le résultat du scrutin, nous passons au point suivant.

Résultat de l'élection: Séance du vendredi 23 mai 2025 à 16h15

Questions écrites urgentes

La présidente. Vous avez reçu par messagerie les questions écrites urgentes suivantes:

Question écrite urgente de Thierry Cerutti : Le vote tardif par correspondance est-il correctement enregistré ? (QUE-2196)

Question écrite urgente de Thierry Cerutti : Appartient-il aux contribuables de financer la propagande communale en période électorale ? (QUE-2197)

Question écrite urgente de François Baertschi : Grand remplacement à la centrale d'achats HUG-CHUV (QUE-2198)

Question écrite urgente de Lionel Dugerdil : Au coeur de la zone de développement industriel et artisanal, la FTI a-t-elle manqué une opportunité en or ? (QUE-2199)

Question écrite urgente de Pierre Nicollier : Grève de mai 2025 : quelle mobilisation ? (QUE-2200)

Question écrite urgente de Pierre Nicollier : Canton congestionné, quelle réalité ? (QUE-2201)

Question écrite urgente de Patricia Bidaux : Un report d'un an de l'entrée en vigueur de la nouvelle maturité est-il possible et bienvenu ? (QUE-2202)

Question écrite urgente de Thierry Cerutti : Interprétation restrictive de l'office cantonal des véhicules concernant la clause de gel de la taxe automobile - un problème d'égalité, de fédéralisme et de conformité constitutionnelle (QUE-2203)

Question écrite urgente de Matthieu Jotterand : En termes financiers, que rapportent à l'Etat les coopératives d'habitation ? (QUE-2204)

Question écrite urgente de Jean-Pierre Tombola : Devenir des étudiants en soins infirmiers exmatriculés ces 5 dernières années de la Haute école de santé de Genève (QUE-2205)

Question écrite urgente de Leonard Ferati : Coût estimé d'une revalorisation salariale des professions du secteur santé-social requérant un bachelor (HES) de la classe 15 à la classe 16 (QUE-2206)

Question écrite urgente de Leonard Ferati : Restriction d'accès à l'Uni Dufour et gestion du droit de manifester à l'Université de Genève (QUE-2207)

Question écrite urgente de Geoffray Sirolli : Indemnisations liées aux expropriations en zone agricole ? (QUE-2208)

Question écrite urgente de Sylvain Thévoz : Mise en cause de la CICAD par des associations et un collectif : l'Etat finance-t-il à son insu une propagande politique ? (QUE-2209)

Question écrite urgente de Michael Andersen : Voie Bleue - Suite de la QUE 2085 (QUE-2210)

Question écrite urgente de Christina Meissner : CERN, SDA et démocratie (QUE-2211)

Question écrite urgente de Jean-Pierre Tombola : Quel est l'état des lieux du personnel des assistants en soins et santé communautaire et des aides en soins et accompagnement (ASA) dans les institutions de santé genevoises HUG, IMAD et EMS et quels sont les besoins de ces catégories de professionnels pour les cinq prochaines années pour chaque institution : 2026, 2027, 2028, 2029 et 2030 ? (QUE-2212)

QUE 2196 QUE 2197 QUE 2198 QUE 2199 QUE 2200 QUE 2201 QUE 2202 QUE 2203 QUE 2204 QUE 2205 QUE 2206 QUE 2207 QUE 2208 QUE 2209 QUE 2210 QUE 2211 QUE 2212

La présidente. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.

Questions écrites

La présidente. Vous avez également reçu par messagerie les questions écrites suivantes:

Question écrite de Masha Alimi : Comment le canton prépare et informe la population genevoise en cas de crise majeure ? (Q-4074)

Question écrite de Pierre Nicollier : HUG : quel sera l'effet de l'introduction du TARDOC et des forfaits ambulatoires pour notre hôpital ? (Q-4075)

Question écrite de Grégoire Carasso : Mesures d'allègement en cas d'assainissement (art. 14 OPB) : vers la fin d'un oreiller de paresse ? Bis repetita (Q-4076)

Question écrite de Caroline Renold : Délégations des tâches publiques à des entreprises privées : quelles sont la taille et l'étendue du mandat de Size ? (Q-4077)

Question écrite de Cédric Jeanneret : U lacustre cyclable (Q-4078)

Question écrite de Léna Strasser : Principe de neutralité, d'impartialité et d'indépendance de l'aide humanitaire - quels garde-fous ? (Q-4079)

Question écrite de Céline Zuber-Roy : Contamination des eaux souterraines aux PFAS : cartographie changeante ? (Q-4080)

Q 4074 Q 4075 Q 4076 Q 4077 Q 4078 Q 4079 Q 4080

La présidente. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.

QUE 2189-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Arber Jahija : Site de Belle-Idée : Bioparc, école et hôpitaux. Pourquoi ne pas développer aussi l'infrastructure sportive existante ?

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2189-A

QUE 2190-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Daniel Noël : Ouverture d'un centre pour RMNA à 10 mètres d'une école primaire : quid de la sécurité des écoliers et des riverains ?

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2190-A

QUE 2191-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Frédéric Saenger : Election municipale : forte proportion de bulletins nuls

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2191-A

QUE 2192-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Souheil Sayegh : Le plan Amok dans les écoles primaires, où en sommes-nous ?

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2192-A

QUE 2193-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Stefan Balaban : Smart City des SIG : la ville du futur... attend toujours le futur

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2193-A

QUE 2194-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Laura Mach : Quelle école voulons-nous ? Les modifications du statut enseignant questionnent notre vision de l'éducation

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2194-A

QUE 2195-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Jacques Béné : Y a-t-il vraiment une augmentation « déguisée » des heures de travail des enseignants du DIP ?

Annonce: Séance du vendredi 11 avril 2025 à 16h15

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2195-A

Q 4064-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Cédric Jeanneret : Désimperméabilisation des voiries
Q 4065-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Sylvain Thévoz : Sablière du Cannelet : quel état des lieux de sortie ?
Q 4066-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Celine van Till : Mesures thérapeutiques institutionnelles : où en est-on aujourd'hui à Genève ?
Q 4067-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Léo Peterschmitt : Fichages des manifestants
Q 4068-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Diego Esteban : Méthode de calcul du bruit des avions
Q 4069-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Sylvain Thévoz : Changement de cap du service éducatif itinérant : quelles conséquences pour les enfants ainsi que pour les professionnelles et professionnels ?
Q 4070-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Leonard Ferati : Sélection à l'Ecole d'avocature (ECAV) : quelles garanties de l'égalité des chances ?
E 3129
Election d'une Médiatrice administrative titulaire ou d'un Médiateur administratif titulaire pour traiter de façon extrajudiciaire les différends entre l'administration et les administrés (entrée en fonction : 1er juin 2025 ; durée du mandat : jusqu'au 30 novembre 2028) (classe 27 avec statut d'agente spécialisée ou d'agent spécialisé)

La présidente. Nous revenons à l'élection 3129. Je suspends la séance jusqu'à l'annonce du résultat.

La séance est suspendue à 16h23.

La séance est reprise à 16h29.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, voici le résultat de l'élection 3129:

Bulletins distribués: 72

Bulletins retrouvés et pris en compte pour le calcul de la majorité absolue: 71

Majorité absolue: 32

Bulletins blancs: 4

Bulletins nuls: 4

Est élu: M. Pierre-Emmanuel Fehr, avec 63 voix. (Applaudissements.) Il prêtera serment à 18h.

M 3126
Proposition de motion de Fabienne Monbaron, Murat-Julian Alder, Céline Zuber-Roy, Pascal Uehlinger, Natacha Buffet-Desfayes, Pierre Nicollier, Francine de Planta, Vincent Subilia, Alexandre de Senarclens, Jacques Béné, Diane Barbier-Mueller, Thierry Oppikofer, Philippe Meyer, Darius Azarpey, Adrien Genecand, Geoffray Sirolli, Rémy Burri, Alexis Barbey, Joëlle Fiss, Jean-Pierre Pasquier, Pierre Conne, François Wolfisberg, Michael Andersen, Lionel Dugerdil, Jacques Blondin, Gabriela Sonderegger, Christo Ivanov, Guy Mettan, Thierry Cerutti, Stéphane Florey, Christian Flury : Paralysie du trafic : conséquence des travaux en lien avec les réseaux thermiques structurants
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.

Débat

La présidente. Nous reprenons le traitement de nos urgences et abordons la dernière d'entre elles, à savoir la M 3126. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à Mme Fabienne Monbaron, première signataire.

Mme Fabienne Monbaron (PLR). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, je pense qu'il n'y a pas besoin de longues explications. Vous savez tous pourquoi cette motion a été déposée, le sujet est d'actualité. Nous aurions pu ajouter au début de ce texte qui fait état de la multiplication des travaux le mot «notamment», en disant que cette multiplication des travaux était notamment due à la mise en place des réseaux thermiques structurants, car, en réalité, si l'on regarde un peu en arrière, cela fait plusieurs années que notre canton, ses habitants, ses commerçants et ses entreprises souffrent des travaux routiers, et ceux en lien avec les réseaux thermiques structurants, qui certes sont nécessaires, sont la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.

Jusqu'à il y a peu, il était déjà facile de se demander si l'un des services préaviseurs des autorisations de construire ou celui qui délivre lesdites autorisations s'était posé la question de savoir si un chantier autorisé pouvait générer un conflit avec un autre situé à proximité. Aujourd'hui, nous avons la réponse: vraisemblablement, personne ne s'en préoccupe. Avec un résultat que chacun constate: tout est paralysé au centre-ville.

Et quand on dit tout, c'est tout: les transports professionnels, les transports individuels, tous modes confondus, et même les transports publics, qui en viennent à se demander s'ils ne devront pas supprimer certaines courses vu les retards, qui peuvent aller jusqu'à une heure ! Les vélos se retrouvent à zigzaguer entre les autres véhicules, les cyclistes et les piétons subissent les gaz d'échappement et les habitants voisins sont excédés.

Cette situation n'est pas acceptable, les milieux économiques l'ont déjà fait savoir, et la population se manifeste également sur les réseaux sociaux. On dit souvent que les Genevois ont une grande gueule; en l'occurrence, ils ont un réel motif de l'ouvrir. Il n'est pas non plus normal que ce soit à notre parlement de relever cela et que nous devions demander des mesures par rapport à une situation qui n'aurait jamais dû exister.

Au vu du nombre de chantiers déjà en cours - dont certains sur lesquels on ne voit aucun ouvrier pendant plusieurs jours -, on avait déjà l'impression d'une administration travaillant dans sa bulle, loin de la réalité du terrain, qui a choisi de voir si ça passe ou si ça casse, pour ensuite prendre des micromesures destinées à calmer le jeu. Cette fois, ce n'est clairement plus possible !

Il y a quelques mois, la commission des transports a eu l'occasion de se rendre sur différents carrefours au centre-ville en compagnie de l'ingénieur chargé de la régulation des feux, qui lui a expliqué quelles étaient les difficultés rencontrées dans ce domaine. Nous avons pu constater qu'il s'agit d'un travail quasi chirurgical, basé sur un système qui a atteint ses limites. Il n'est donc pas possible d'attendre une solution uniquement de ce côté-là.

Pour ceux d'entre vous qui auraient l'idée de demander un renvoi en commission, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que nous ne souhaitons pas mener de nombreuses auditions pour que ces personnes nous expliquent pourquoi cela ne fonctionne pas; nous préconisons plutôt le vote de cette urgence, car urgence il y a, pour que les personnes rétribuées au sein de l'administration cantonale, des SIG et, in fine, le Conseil d'Etat - puisqu'il semble qu'il faille faire appel à ce dernier - se mettent à travailler conjointement pour trouver des solutions efficaces et durables, et ce rapidement !

Le conseiller d'Etat chargé de la mobilité a annoncé ce jour lancer une concertation dans le but de prendre les mesures que nous préconisons dans cette motion. Nous en rajoutons une couche en demandant de ne pas délivrer d'autorisations de nouvelles ouvertures de chantier sur la voirie...

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

Mme Fabienne Monbaron. ...tant que les mesures palliatives ne se concrétisent pas. Pour la petite histoire, il y a plus de vingt ans, à Wabern, après consultation de la population et des commerçants concernés, puis avec leur accord, on a fermé la route principale durant neuf mois pour permettre la réalisation d'une ligne de tram. Chacun a fait des efforts, les travaux ont été soutenus et le délai a été tenu. Chez nous, ça prend trois ans. Généralement, la coordination fait défaut, malgré la commission de coordination existante; on fait, on défait, on ouvre, on referme, on rouvre, ce qui génère des nuisances encore plus importantes.

Il y a donc largement matière à amélioration. Il faut maintenant que les personnes, services et milieux concernés se parlent, qu'ils avancent ensemble, que ceux qui ont une autorité prennent des mesures et que celles-ci soient communiquées clairement et suffisamment en amont de leur mise en oeuvre. Nous vous remercions de soutenir cette motion. (Applaudissements.)

M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chers collègues, comme les taxis qui viennent de manifester sous nos fenêtres pendant une heure, je sillonne moi aussi chaque jour les rues de Genève dans le cadre de mon métier pour intervenir chez des particuliers ou sur des chantiers. Et je peux vous le dire sans détour, depuis deux semaines, mes ouvriers et moi vivons un véritable calvaire. Nous passons plus de deux heures et demie par jour dans les bouchons, et aux Eaux-Vives, on est pris dans une souricière. Pour accéder au quartier ou en sortir, les embouteillages sont permanents et les temps de trajet sont devenus imprévisibles. Il est impossible de fixer ou de tenir les délais des rendez-vous auprès de nos clients, avec les conséquences que cela implique sur le chiffre d'affaires.

Alors qu'il y a quelques mois, ce plénum a accepté la pétition émanant de l'association de commerçants et d'habitants Ô Vivre Ensemble qui demandait justement au Conseil d'Etat et à la Ville de Genève d'étaler les travaux (je cite: aménagement du BHNS route de Frontenex, réalisation du 30 km/h dans le quartier, volonté de la Ville de Genève de végétaliser la rue des Eaux-Vives) et de ne pas bloquer les accès à ce quartier, là, on trouve le moyen de paralyser totalement le canton. C'est comme si rien ne s'était passé et que rien n'avait été discuté à ce sujet.

Ce que nous demandons, ce n'est pas un traitement de faveur, mais une prise en compte réaliste des contraintes que subissent les commerçants et artisans de ce canton. Ils n'en peuvent plus, c'est la curée, Mesdames et Messieurs ! Genève a toujours su conjuguer innovation et pragmatisme. Je suis convaincu qu'ensemble, nous pouvons trouver des solutions qui améliorent la mobilité sans sacrifier l'économie locale. Au sein du groupe LJS, nous remercions les auteurs de cette motion et soutiendrons l'ensemble des invites. Merci.

Mme Louise Trottet (Ve). Madame la présidente, j'ai failli commettre un crime de lèse-majesté en omettant de saluer votre brillante élection hier ! Cela est désormais fait.

Mesdames les députées, Messieurs les députés, le PLR pose une question importante avec cet objet: comment garantir la fluidité du trafic dans l'intérêt de notre économie, et j'irai même plus loin, dans l'intérêt de notre société en général ? Personne, et je m'en réjouis, ne remet en question la pertinence aiguë des réseaux thermiques structurants (RTS) pour notre souveraineté énergétique, pour la transition écologique, etc. Seulement, et il faut l'admettre, ils aggravent la situation du trafic, déjà fortement congestionné dans notre canton, lequel reste très centré sur la voiture. Pourtant, elle ne constitue pas le mode de transport le plus efficace; n'importe quel ingénieur en transports vous le démontrera aisément.

Mais il faut aller plus loin dans l'argumentation sur cet objet et parler des conséquences, en cas d'inaction du Conseil d'Etat, que pourrait avoir le fait qu'une ambulance ou qu'un camion de pompiers soit bloqué dans le trafic: elles seraient absolument effarantes et il faut les éviter à tout prix ! On peut également mentionner les conséquences sur la qualité de l'air de tous ces bouchons au centre-ville et le risque accru d'accidents que crée tout ce chaos, avec des automobilistes parfois excédés. Des solutions existent, notamment celle consistant à mettre en place des mesures concertées et efficaces afin d'optimiser le trafic.

Il peut par exemple s'agir de mesures permettant de prioriser les transports publics, la mobilité douce et les mobilités actives, mais également bien entendu les personnes à mobilité réduite, les déplacements professionnels, les ayants droit et les véhicules d'urgence. En revanche, il ne s'agit pas, comme proposé dans la presse ce matin par le magistrat chargé de la mobilité, de commencer à discriminer les frontaliers. C'est une idée dangereuse et mauvaise pour notre cohésion sociale.

Le groupe Vert a déposé une proposition de motion qui ira droit en commission. Nous proposons, à choix, soit de voter l'amendement socialiste bienvenu, qui adoucit la proposition PLR, que nous ne pouvons pas voter en l'état, soit de renvoyer ce texte en commission afin qu'il soit traité conjointement avec notre objet. J'ai entendu hier soir dans ce parlement que pour obtenir des réponses rapides, le passage en commission était plus efficace que le fait de demander une réponse au Conseil d'Etat dans les six mois; je vais donc m'y fier. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, cette motion déposée en lien avec les réseaux thermiques structurants n'a finalement plus de sens, parce que ça chauffe tellement en ville qu'on n'a plus besoin de ces réseaux thermiques ! (Rires.)

On constate un manque de coordination concernant ces travaux, et le parlement n'est ici que le porte-parole de la population. On le répète depuis des années, que ce soit avec la Ville de Genève et les communes avoisinantes ou au niveau du canton lui-même, ça ne se coordonne pas: on ouvre, on referme, on rouvre et on referme à nouveau.

Aujourd'hui, même les vélos, les trottinettes, les piétons et les transports collectifs ont de la peine à circuler dans le centre-ville. Et quand on a la chance de voir un ouvrier sur le chantier, on peut se dire que ça avance, mais non, les seules personnes qu'on voit - et qu'on salue ici -, ce sont les personnes en jaune, qui essaient tant bien que mal de réguler le trafic. On se dit qu'ils peuvent donner un coup de main, mais les pauvres subissent les affres de la population, de toutes les personnes présentes à un carrefour, alors qu'ils essaient de faire passer les piétons. Je saisis l'occasion de les remercier pour le travail effectué.

Une chose qui m'a fait plaisir en lisant le journal... Mme Trottet a relevé l'aspect concernant les frontaliers dans les annonces du Conseil d'Etat. Pour ma part, je salue la couche supplémentaire que le gouvernement a mise sur la traversée du lac, qui pourrait résoudre tous ces problèmes et faciliter également la circulation. Je sais, et on le sait tous, que ça prendra du temps. Mais que le Conseil d'Etat soit ici remercié pour les travaux qu'il mènera à ce sujet.

Par conséquent, Le Centre, par ma voix, soutiendra le texte déposé par le PLR - et je remercie mon groupe pour ce soutien - et refusera l'amendement socialiste ainsi que le renvoi en commission. La population attend que ça avance et pas forcément qu'on en discute encore et encore, parce qu'au final, on sait tous de quoi on va parler, à savoir des travaux. Et les quinze membres de la commission où serait renvoyé ce texte ne sont pas les maîtres d'ouvrage; ce n'est pas à nous de discuter de ça. Il nous faut vraiment empoigner le problème dès aujourd'hui, et pas dans un, trois ou six mois ! Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

M. François Baertschi (MCG). L'enfer est pavé de bonnes intentions, ainsi en est-il des réseaux thermiques structurants, avec lesquels on nous annonçait le paradis, alors que nous découvrons un enfer immédiat, celui des travaux, d'une ville obstruée, véritablement mise à l'arrêt certains jours, et en plus de ça, des coûts gigantesques qui pourraient atteindre jusqu'à 1 milliard de francs. On ne sait pas trop qui paiera ce montant, ce sera en partie les consommateurs au travers de leur facture d'électricité ainsi que les contribuables, enfin toute personne qui se retrouve captive et qui ne peut pas faire un autre choix que de payer. Tout ça est fait avec de bonnes intentions, mais sans qu'il y ait véritablement de garantie scientifique et technique que les bienfaits annoncés seront réellement présents, malheureusement !

J'entends dans cette salle, et je m'en réjouis, quelques députés prendre conscience de l'importance du trafic frontalier, qui est problématique et dont les effets sont encore démultipliés par ces obstructions. Parce qu'il faut bien en être conscient, à Genève, il existe une sorte de masochisme; on ne sait pas trop d'où ça vient, chacun a beaucoup de bonnes idées, mais elles n'ont aucune cohérence au final. On se retrouve à créer des politiques catastrophiques pour Monsieur et Madame Tout-le-Monde, comme ce paradis qui a véritablement des airs d'enfer. Il est sans doute prédestiné que ce soient les réseaux thermiques qui nous emmènent aux enfers, il s'agit vraisemblablement d'un mauvais réglage des températures ! Mais je suis très pessimiste, et mon groupe l'est également, concernant l'avenir de Genève. Malheureusement, les directions prises ont été mal choisies à tous les niveaux.

Il faut limiter la casse, et c'est ce que permet cette motion, modestement, voire très modestement, mais il faut bien avancer avec les petits moyens dont nous disposons, pour essayer d'atténuer les difficultés. Ce qu'il faudrait, ce sont des mesures plus générales, mais pour ça, il appartient à notre Grand Conseil de trouver des majorités et d'avoir le courage nécessaire pour empoigner ce problème, arrêter de mettre des rustines et véritablement soigner le mal. Merci, Madame la présidente.

M. Matthieu Jotterand (S). L'enfer est peut-être pavé de bonnes intentions, mais c'est également le cas des urgences de ce jour ! Très concrètement, quel est l'intérêt d'une telle motion ? On pourrait facilement envoyer une résolution pour dire en effet qu'il faut faire quelque chose. Je pense que ces dernières semaines, l'ensemble de la population, à moins d'avoir été en vacances exactement à ce moment-là, a remarqué qu'il y avait besoin de faire quelque chose. La problématique est donc bien réelle, on est d'accord. Toutefois, je pense que la population est en droit d'attendre de nous, en tant que parlement, en tant que pouvoir législatif, un peu mieux qu'une petite motion, écrite à la va-vite, juste avant le dépôt des urgences, histoire de dire: «On vous a écoutés !» On vous a écoutés, oui, mais on fait quoi ?

Très concrètement, cette motion privilégie les mauvaises solutions en voulant créer un blocage des autorisations de travaux. Pourquoi ? Parce qu'il y a des travaux liés aux réseaux thermiques structurants, aux transports publics ou encore à plein d'autres choses, notamment à la réfection des conduites de gaz. Si on bloquait ces chantiers, cela pourrait conduire à un danger. Cette motion est donc dangereuse !

On a aussi entendu beaucoup de mauvaises solutions durant ce débat, comme la traversée du lac. J'attends toujours un seul exemple d'une agglomération pour laquelle construire ou élargir un périphérique a permis de décharger le centre-ville en diminuant le nombre de voitures. Pour l'instant, on a fait le contraire: les TPG ont dû retirer des bus de la circulation parce que sinon, c'était le chaos. On limite ainsi encore le nombre de places dans les véhicules de transports publics, ce qui est catastrophique. Pourquoi est-ce qu'on se retrouve dans cette situation ? Il y a une seule solution concrète pour réduire les problèmes d'encombrement en ville, en partant du principe simple et évident que ce qui crée les bouchons, c'est un amas, un surplus de voitures: c'est d'enlever des voitures ! C'est assez simple, on en a le pouvoir. Mesdames et Messieurs, utilisez ce pouvoir pour résoudre le problème des Genevois.

Si vous mettez deux cents personnes dans un bus, vous supprimez deux cents voitures; vous verrez qu'il n'y a pas besoin d'une tonne de bus pour résoudre simplement le problème et laisser les professionnels - M. Fazio le soulignait, ils sont en difficulté actuellement - effectuer leur travail, bénéficier de temps de trajet prévisibles et faire fonctionner l'économie. Faire fonctionner l'économie, c'est réduire le nombre de ces voitures qui, actuellement, bouchent complètement Genève.

Parmi les mauvaises solutions proposées par cette motion, il y en a aussi qui impactent les conditions sociales des ouvriers ainsi que les nuisances pour les riverains, notamment en sous-entendant qu'il faudrait que les travaux aient plus fréquemment lieu la nuit, selon le modèle 3-8. Surtout pas, Mesdames et Messieurs, surtout pas; ce serait encore pire ! Une pensée aussi pour les hommes en jaune, qui gagneraient fortement à être mieux payés, mieux formés et mieux sécurisés.

Par conséquent, nous avons déposé un amendement général, dans le but de proposer une nouvelle motion qui permette de réfléchir en commission, raison pour laquelle nous demandons le renvoi en commission.

La présidente. Vous demandez le renvoi à quelle commission ?

M. Matthieu Jotterand. La commission des transports.

La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Madame la présidente. J'aurais presque pu être d'accord avec une partie du discours de notre collègue socialiste. Cependant, j'y vois une contradiction, c'est qu'au début de son intervention, il vous dit qu'une motion est inutile, et finalement, il prône le renvoi en commission. Je n'ai pas saisi le pourquoi de la chose, ce n'est pas très clair comme discours.

Sur les constats de cette motion, il est évident, et on ne peut pas le nier, qu'ils sont totalement justes. Quand j'entends dire qu'il faut trouver des solutions, il faudrait peut-être se pencher sur ce qu'a voté ce parlement au cours des dix dernières années, notamment le fait que nous ayons proposé à maintes reprises d'avoir un vrai coordinateur des chantiers, mais que cela ait toujours été refusé. Vous avez également refusé l'abolition, l'abrogation de la LMCE - puisqu'il faut quand même l'admettre encore une fois, depuis que cette loi est en vigueur, la situation ne s'est jamais améliorée. Certains rejettent constamment une nouvelle traversée du lac, et la traversée de la rade a également été refusée. Ce parlement s'est aussi opposé à la création des nouvelles routes L1 et L2, tout le monde s'en souvient.

Aujourd'hui, la situation est la suivante: à force de tout refuser, tout est bloqué ! Voilà la réalité actuelle. Il faut simplement arrêter de vouloir fermer des rues. Il faut simplement arrêter de vouloir végétaliser les routes. Il faut simplement arrêter de vouloir fermer la ville à la circulation.

La population et le nombre de véhicules augmentent. Depuis que je suis dans ce parlement, on parle d'une augmentation du trafic de l'ordre de 20% à 30% par année, et c'est encore le cas aujourd'hui. Comment voulez-vous absorber cette réalité si vous bloquez et fermez constamment la circulation en ville ? Ce qui est en train de se passer actuellement au centre-ville - et là, le département est quand même un peu responsable -, c'est qu'on donne des autorisations de fermeture, notamment à la rue de Carouge, et qu'on supprime des places de parc pour végétaliser. On l'a vu à la place de Neuve, cela a aussi bloqué une partie de la circulation.

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. Tous ces éléments font qu'effectivement, l'économie et la population en ont marre et nous demandent de faire quelque chose de concret. C'est pour ça qu'il faut voter cette motion. Je vous remercie, Madame la présidente.

Une voix. Très bien !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je cède le micro à M. Jotterand.

M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Le but de ce renvoi en commission...

La présidente. Désolée, Monsieur Jotterand, mais vous n'avez plus de temps.

M. Matthieu Jotterand. ...est justement d'aboutir à un texte solide. (Le micro de l'orateur est coupé.)

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député. Je cède la parole à M. Steiner pour six secondes.

M. Christian Steiner (MCG). Merci, Madame la présidente. J'aimerais juste dire qu'en matière de bouchons, la cerise sur le gâteau, ce sont les aménagements tactiques ou les essais tels que ceux mis en place à la rue de la Croix-Rouge; on utilise l'aménagement tactique uniquement pour créer des bouchons ! Par conséquent, ça, c'est facile à éviter.

La présidente. Merci. Je passe la parole au conseiller d'Etat Pierre Maudet.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci beaucoup, Madame la présidente, de me donner la parole pour exposer la position du Conseil d'Etat sur cette motion et plus généralement sur le sujet qui anime les discussions. J'ai effectivement pu vérifier cette fin de semaine que Genève était constituée d'environ 550 000 ingénieurs en circulation, qui tous ont des idées, certaines sans doute très bonnes. Quant à celle de l'ingénieur qui vient de s'exprimer - je rebondis dessus au passage, Madame la présidente -, l'idée qui a été soutenue, au demeurant par votre parti notamment, c'était de diminuer le nombre de feux pour fluidifier la situation. Mais visiblement, une expérience qui précisément supprime un feu de circulation pour favoriser le transit est perçue de façon différenciée.

Tout cela pour dire, Mesdames et Messieurs, d'abord par rapport au constat qui a été évoqué tout à l'heure par Mme Monbaron, que celui-ci est partagé par le Conseil d'Etat. La situation n'est pas satisfaisante, elle est même très insatisfaisante. Ce n'est pas nouveau, et les réseaux thermiques structurants sont de ce point de vue là le symptôme d'un mal connu. Cela a été rappelé tout à l'heure par MM. Florey et Jotterand ainsi que par Mme Trottet, le trafic augmente et provoque une congestion.

Vous ne m'en voudrez pas, Madame la présidente, de filer la métaphore médicale, elle est de circonstance lorsqu'on traite du trafic à Genève: on peut parler de congestion, de thrombose, de caillots, de rupture d'anévrisme, et lorsqu'il y a - c'est malheureusement parfois le cas - une intervention policière musclée durant un après-midi dans un quartier, par exemple celui des Pâquis, c'est bien logique que l'intervention se déroule, mais force est de constater que cela bloque l'ensemble de la ville. Lorsque le surlendemain, c'est un incendie au centre de la rive droite qui bloque le trafic en début de journée, bien évidemment, cela fiche en l'air l'intégralité du dispositif pour l'ensemble de la journée.

Cette situation, on la connaît, vous la connaissez, mais c'est vrai que depuis dix jours environ, on fait face à un surcroît de difficultés avec les travaux liés à l'introduction des réseaux thermiques structurants, qui ont fait l'objet d'une conférence de presse par les SIG en début d'année et qui sont annoncés et planifiés depuis un an.

On voit que n'importe quel incident entraîne pour l'ensemble du trafic des blocages particulièrement conséquents. Et malheureusement, je l'ai dit ce matin dans la presse, c'est ce à quoi nous devons nous attendre pour les trois prochaines années. Les SIG ont présenté ces travaux extrêmement importants, et je me permets ici de répondre, Madame la présidente, à quelques reproches qui ont été adressés tout à l'heure et dont je prends volontiers acte. Mais ces reproches, Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez, ils ne sont pas nouveaux. Le rythme, la chronologie avec laquelle les travaux se font, sont tributaires notamment des recours, sur lesquels nous n'avons pas prise et qui sont parfois longs à traiter du côté du Pouvoir judiciaire. Ces recours viennent dans certains cas de la gauche, dans d'autres ils viennent de la droite.

La rue de Carouge en est un bon exemple. Il s'agit d'un axe municipal - et j'ajoute cet élément ici, Mesdames et Messieurs les députés, parce qu'il y a un enchevêtrement de compétences municipales et cantonales en la matière. Cet axe municipal est très important parce qu'un tram y passe, mais cela reste du réseau secondaire. Il y a eu des demandes d'autorisation. Celles-ci ont évidemment été suspendues une fois les recours déposés. Tout d'un coup, les recours sont levés et la commune peut poursuivre les travaux. Il se trouve qu'ils étaient rendus nécessaires depuis des années par les conduites de gaz dont la vétusté menaçait de causer, vous l'imaginez bien, de gros problèmes pour tous les immeubles avoisinants.

Il faut savoir qu'il y a 6500 demandes d'autorisation de chantier par année, qui vont du dégrappage d'un mètre carré à des travaux beaucoup plus conséquents, comme ceux de la rue Pierre-Fatio. Ces travaux font l'objet de procédures compliquées, qu'on peut envisager de simplifier - je ne vous cache pas que c'est mon intention. Mais il faut aussi comprendre que l'autorisation que l'on octroie pour qu'ils puissent se dérouler passe par toute une série d'offices qui rendent des préavis liants.

Pour vous donner un exemple de cette complexité, je relève que pendant longtemps, on a privilégié les travaux durant l'été. En raison du réchauffement climatique, il est de moins en moins possible de les réaliser à cette période de l'année. En raison des températures, l'OCIRT (l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail) interdit la réalisation de travaux durant la journée au-delà d'un certain seuil. Alors faut-il les faire la nuit ? Si c'est la solution qu'on retient, on a immédiatement des oppositions de riverains qui, évidemment et à bon droit, ne souhaitent pas qu'on les dérange durant la nuit. Ces arbitrages sont compliqués, Mesdames et Messieurs les députés.

Il n'en demeure pas moins que deux notions fondamentales guideront la réponse que le Conseil d'Etat apportera à cette motion - je pars de l'idée, Madame la présidente, que ce texte nous sera renvoyé, cela ne fait en effet pas vraiment sens de l'envoyer en commission. Parmi ces deux paramètres fondamentaux, il y a d'abord la sécurité, cela a été dit tout à l'heure. Je ne peux pas tolérer, et ce indépendamment de la casquette de la santé que je coiffe également, qu'en raison de goulots d'étranglement et de caillots dans la circulation, en raison de l'impossibilité de passer avec des véhicules d'urgence, des personnes voient leur vie menacée; qu'il s'agisse des pompiers ou des ambulances, c'est totalement inadmissible !

On ne peut pas non plus considérer comme acceptable que des gens qui vivent du transport professionnel - et c'est ici une réponse aux milieux économiques, qui ont bien fait de nous interpeller - doivent multiplier par deux ou par trois le temps passé dans les embouteillages; je pense ici à des artisans, à des gens actifs dans la restauration, traiteurs et autres.

En moyenne, on a cinq heures et demie de bouchons par jour à Genève. Cinq heures et demie, Mesdames et Messieurs les députés, sur certains axes. Et ça augmente maintenant de façon dramatique. Evidemment, pour notre économie, pour l'emploi, pour le tissu vital de notre société, c'est extrêmement problématique. Il faut prendre en compte ce paramètre de sécurité ainsi que le paramètre de tranquillité, avec les arbitrages que nous proposerons, qui viseront peut-être à concentrer les chantiers sur une période réduite, avec des horaires plus larges - les travaux commenceront plus tôt et finiront plus tard -, ce qui permettra de concentrer les nuisances; c'est une option sur laquelle nous allons travailler.

Il nous a été reproché, et j'entends cette critique, de ne pas suffisamment coordonner. Pas plus tard que cet après-midi à 14h a eu lieu une séance avec les milieux économiques pour parler de ces questions-là. Toutefois, lors de cette séance, Mesdames et Messieurs, c'est important de le dire, il y avait beaucoup de docteurs autour de la table, mais peu de patients. Ce que je veux dire par là, c'est que chacune et chacun va devoir faire un effort. Je crois que Mme Monbaron l'a dit, et je le souligne moi-même: en matière de circulation, par exemple, nous avons besoin que le milieu économique fasse passer le message aux entreprises. Je pense ici à celles qui se trouvent dans la zone industrielle de Meyrin-Satigny, au sein de laquelle, je vous le rappelle, il y a cent mille places de parc privées, souvent gratuites et mises à disposition des employés, alors qu'on développe des plans pour convaincre les employés de basculer, là où c'est possible, vers un transfert modal et l'utilisation des transports publics. On attend donc aussi des entreprises qu'elles donnent à leurs employés et employées des signes très clairs concernant ce changement dans la manière de se déplacer.

Et je rectifie un propos qu'on m'a attribué: je n'ai parlé nulle part de frontaliers, j'ai parlé de pendulaires. La question n'est pas de savoir si on vient de France ou pas; on peut venir du canton de Vaud, de France, de la couronne urbaine, la problématique quotidienne que l'on connaît, ce n'est pas celle des frontaliers, mais celle des pendulaires, dont les frontaliers représentent en effet une part extrêmement importante. Mais on ne peut pas - et là, je me tourne vers le MCG, parce que vous êtes en pointe là-dessus -, et vous ne le souhaitez d'ailleurs pas, développer pour les Français, côté français, toutes les infrastructures possibles et imaginables. Par conséquent, sauf à considérer qu'on muscle le dispositif de covoiturage, on va malheureusement subir ces nuisances encore un certain temps. Mais j'espère vous avoir à nos côtés lorsqu'on devra concrétiser ici la motion, votée par une large majorité de ce parlement, visant à favoriser les P+R côté français - voilà une réponse très concrète !

Madame la présidente, je vais conclure, parce que je ne veux pas prendre trop de temps. Le Conseil d'Etat accueille bien volontiers cette motion, il est préoccupé et insatisfait de la situation, il prend à coeur cette mission donnée par le parlement et vous répondra rapidement. Mais je vous le dis, Mesdames et Messieurs, ça passera peut-être par une proposition de modification réglementaire, voire légale - je sais qu'il n'y a pas de tabou pour vous. Parce qu'une difficulté qu'on rencontre aujourd'hui, c'est l'enchevêtrement des compétences, la multiplication des médecins sur le patient, l'absence de capacité d'arbitrer. Je prends volontiers ce rôle, mais il faut m'en donner les prérogatives et la possibilité, le cas échéant, de passer par des mesures un peu plus musclées, en concertation évidemment. Cela dans le but de déployer un résultat en faveur d'abord de la sécurité, ensuite de l'économie et de celles et ceux qui vivent des transports, avec également quelques contraintes pour favoriser un basculement vers les transports publics que nous appelons de nos voeux. Là non plus, ce n'est pas possible d'avoir un encolonnement de bus à la rue de Coutance, démonstration de l'inefficacité des transports en commun, parce que quelques personnes décident de rester toutes seules au volant de leur voiture, de forcer le passage sur la place Lise-Girardin et de congestionner l'ensemble de la ville.

Voilà, Mesdames et Messieurs, le message du Conseil d'Etat est le suivant: prenons ensemble en main ce délicat dossier, chacun avec ses responsabilités, et agissons rapidement, car nous ne pouvons pas nous contenter de cette situation. Et si cette motion nous est renvoyée, nous vous donnons rendez-vous rapidement pour une réponse, peut-être avec quelques adaptations à apporter quant à la façon d'octroyer les autorisations de chantier. Je vous remercie de votre attention.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports. Je prie l'assemblée de se prononcer sur cette demande.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 3126 à la commission des transports est rejeté par 54 non contre 30 oui.

La présidente. La demande de renvoi en commission ayant été rejetée, nous passons au vote sur l'amendement général déposé par Mme Caroline Marti et consorts, qui se présente comme suit:

«invite le Conseil d'Etat

- à réaliser urgemment le séquençage des travaux, notamment ceux liés aux réseaux thermiques structurants, afin de garantir la fluidité des différents modes de transport sur les réseaux primaire et secondaire;

- à créer, fluidifier et sécuriser des itinéraires alternatifs pour les différents modes de transport afin de compenser les axes routiers obstrués par des travaux;

- à optimiser l'emprise des chantiers sur les voies de circulation afin de bloquer uniquement la surface absolument nécessaire au bon déroulement des travaux;

- à tenir compte des travaux en cours lors de l'octroi de nouvelles autorisations de procéder à des travaux sur les voies de circulation dans les zones 1 et 2;

- à étudier, avec SIG et les entreprises concernées, toutes les mesures permettant de réduire au maximum la durée de ces travaux.»

Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 57 non contre 31 oui.

Mise aux voix, la motion 3126 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 60 oui contre 32 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 3126 Vote nominal

PL 13372-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier le projet de loi de François Baertschi, Mauro Poggia, Daniel Sormanni, Ana Roch, Skender Salihi, Jean-Marie Voumard, Roger Golay, Thierry Cerutti, Sami Gashi, Gabriela Sonderegger, Arber Jahija, Danièle Magnin, Sandro Pistis, Philippe Morel modifiant la loi sur la formation professionnelle (LFP) (C 2 05) (500 millions pour augmenter les structures de formation)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 21 et 22 novembre 2024.
Rapport de majorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de minorité de M. Arber Jahija (MCG)

Premier débat

La présidente. Les urgences étant terminées, nous reprenons le traitement de l'ordre du jour ordinaire avec le PL 13372-A, classé en catégorie II, trente minutes. La parole échoit à M. Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le MCG nous propose un projet de loi qui constitue une fausse bonne idée, à savoir allouer un montant de 500 millions sur cinq ans (donc 100 millions par année) à un fonds genevois de formation professionnelle. Or un tel mécanisme existe déjà actuellement: il s'agit d'un organisme paritaire, les prélèvements à destination du fonds s'effectuent sur la masse salariale.

Retraçons la genèse de cette affaire: à la base, la FFPC (Fondation pour la formation professionnelle et continue) représentait l'aboutissement d'une initiative populaire lancée par les syndicats et qui avait été acceptée par le peuple. Les milieux patronaux s'y étaient opposés à l'époque, sans succès. Dans l'intervalle, ils se sont extrêmement attachés à ce dispositif qui, depuis un certain nombre d'années, est devenu une fondation de droit public dotée de la personnalité juridique.

Cette fondation remplissait différentes fonctions sur la base d'un budget constitué d'une part des cotisations versées par les employeurs, d'autre part de subventions étatiques. Il y avait un budget ordinaire pour la formation de base et un budget extraordinaire pour la formation continue. La décision a été prise de changer de structure, de passer à un système de cotisations en pourcentage de la masse salariale et de supprimer toute forme de subvention étatique, de sorte que seules les entreprises financent cet organe aujourd'hui.

Tout existe donc dans la loi, et il convient de refuser l'entrée en matière sur le PL 13372. La Fondation pour la formation professionnelle et continue existe à Genève depuis 2009, elle est extrêmement active, c'est une entité tripartite dont les membres sont le patronat, les partenaires sociaux et l'Etat. Par conséquent, Mesdames et Messieurs, je vous demande de bien vouloir voter contre l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Arber Jahija (MCG), rapporteur de minorité. Le PL 13372 en appelle à la responsabilité du parlement et de l'Etat pour faire face, en amont, au risque de pénurie de main-d'oeuvre auquel le canton sera prochainement confronté. Certains domaines stratégiques en forte croissance, comme la santé et l'informatique, tournent déjà en sous-effectifs à l'heure actuelle en raison du manque de structures formatrices.

Pour combler le retard du canton, la solution envisagée par les auteurs de ce projet de loi est de procéder à des investissements plus conséquents dans le domaine de la formation, qui constitue le levier d'accès au marché de l'emploi. Force est de constater les effets limités du dispositif actuel sur la formation quand on voit que les entreprises genevoises ont recruté pas moins de 25 000 nouveaux travailleurs frontaliers permis G au cours de la seule année 2024. Cette solution de facilité consistant à contourner les carences de l'Etat en matière de formation en important toujours davantage de main-d'oeuvre extérieure traduit, hélas, une absence de gestion prévisionnelle à moyen et long terme sur cette question de la part de nos autorités.

En tant qu'élus, il nous appartient d'agir pour faire baisser les taux de chômage et d'aide sociale qui, en moyenne, sont deux fois plus élevés à Genève que dans le reste de la Suisse. Nous devons promouvoir la formation de nos jeunes afin qu'ils bénéficient d'un avenir professionnel sûr et d'une existence digne. C'est la raison pour laquelle le Mouvement Citoyens Genevois vous invite, Mesdames et Messieurs, à soutenir davantage le financement de la formation en votant ce projet de loi. Je vous remercie.

Mme Céline Bartolomucci (Ve), députée suppléante. Mesdames et Messieurs, les auteurs du projet de loi partent d'un constat que nous partageons: la formation professionnelle est essentielle et mérite d'être renforcée. Toutefois, la réponse proposée ici est malheureusement inadaptée. D'abord, ce texte manque totalement de clarté. Si vous en lisez le contenu, on nous parle d'une subvention de 500 millions sur cinq ans, mais pour quelles priorités ? Pour quoi faire ? Quels secteurs en bénéficieraient, comment ? Absolument rien n'y est précisé. Bien que partant d'un bon sentiment, cet objet n'est donc ni réfléchi ni abouti; il s'agit d'une sorte de chèque en blanc, sans véritable projet.

De plus, comme évoqué par le rapporteur de majorité, un fonds en faveur de la formation professionnelle existe déjà; il est financé par la FFPC, fondation qui fonctionne sur un modèle tripartite associant l'Etat, les entreprises et les syndicats. Ajouter un fonds parallèle sans coordination ni objectifs clairs serait parfaitement inefficace et coûteux.

La formation professionnelle connaît certes de nombreux défis, mais ce projet de loi, de par son manque de précision, n'y répondra pas. Il faut un accompagnement des entreprises, une meilleure orientation des jeunes et une adaptation des formations aux besoins réels du marché du travail. Plutôt que de créer un nouveau dispositif flou et faisant office de doublon, nous devons miser sur une stratégie cohérente et ciblée. C'est pourquoi les Vertes et les Verts refuseront ce texte. Je vous remercie.

M. Thierry Arn (LC). Nous sommes tous d'accord quant à l'importance cruciale de la formation professionnelle à Genève, filière qui fait ses preuves depuis de nombreuses années. Le Centre considère que ce projet de loi, en l'état, constitue une fausse bonne idée. C'est pourquoi nous appelons à le refuser. Je ne reviendrai pas sur le premier argument, à savoir que le mécanisme proposé est redondant, puisqu'un tel fonds existe déjà.

Deuxièmement, le texte manque de vision et de précision: aucun secteur prioritaire n'est identifié, aucun objectif concret n'est défini, aucune stratégie n'est détaillée. On nous parle de 500 millions de francs sur cinq ans, mais sans planification, sans critères d'allocation, sans suivi prévu. Ce n'est pas un investissement structurant, c'est tout simplement un chèque en blanc !

Enfin, le problème ne se pose pas seulement en termes financiers. Comme l'a souligné le représentant du département, il s'agit d'un défi d'ordre organisationnel: des enseignants, des locaux, des partenariats intercantonaux ainsi qu'un véritable pilotage des cursus sont nécessaires. Injecter de l'argent dans un système sans avoir clarifié ses leviers revient à construire sur du sable.

En somme, les auteurs du présent projet de loi ignorent les mécanismes existants, évitent les questions de fond et proposent une solution coûteuse, floue et mal arrimée aux besoins réels. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, le groupe du Centre vous invite à refuser cet objet.

M. Thierry Oppikofer (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, avec ce texte qui, a priori, semble bien vertueux - qui ne veut pas d'une meilleure formation professionnelle pour nos jeunes ? -, nous sommes une fois de plus en présence d'une idée peu aboutie - cela a été noté par une préopinante - relevant davantage d'une impulsion mal contrôlée que d'une réelle réflexion. Au sein de certains groupes, ce phénomène se constate assez fréquemment dans le cadre de motions, mais cette fois-ci, il se manifeste sous la forme plus contraignante d'un projet de loi.

En l'occurrence, nos éminents collègues du MCG nous proposent d'injecter 500 millions - un demi-milliard ! - d'argent public sur cinq ans dans la création d'un fonds genevois de formation professionnelle, ignorant ou semblant ignorer (c'est du moins ce qui est apparu lors des auditions) qu'il existe déjà, depuis l'an de grâce 2009, une FFPC (et non un FFPC, Monsieur le rapporteur de minorité), fondation pour la formation professionnelle et continue, FFPC qui avait d'ailleurs été précédée, dès 1988 - cela ne date vraiment pas d'hier -, d'un fonds en faveur de la formation et du perfectionnement professionnel.

Mieux - et cela a été rappelé par le rapporteur de majorité -, cette FFPC est issue d'une initiative populaire lancée par les syndicats, il s'agit d'une fondation de droit public; non seulement elle fonctionne très bien, mais en outre, elle n'est même plus financée par l'Etat, mais entièrement par les entreprises en fonction de leur masse salariale.

Son président, notre ancien collègue député Nicolas Rufener, a expliqué en commission qu'il doutait que le PL 13372 visant à financer massivement la formation professionnelle «débouche sur quelque chose d'utile, de praticable et qui réponde à de réels besoins». La conseillère d'Etat Anne Hiltpold, quant à elle, a mentionné les nombreuses structures, publiques, paritaires ou privées, qui existent déjà, allant du conseil pour le développement de l'employabilité à l'OFPC, sans oublier la FFPC déjà citée.

La totalité de la commission de l'enseignement, à l'exception de nos deux collègues MCG, a refusé l'entrée en matière sur ce projet de loi. Le groupe PLR vous recommande de suivre cet excellent exemple et de rejeter cet objet tout à fait superfétatoire. Merci, Madame la présidente.

M. Djawed Sangdel (LJS). Chers collègues, investir dans l'éducation doit toujours être notre priorité. C'est grâce à notre implication financière dans la formation que nous pourrons créer de la valeur dans divers domaines.

Certes, le constat est juste: la main-d'oeuvre qualifiée manque, mais ce n'est pas la conséquence d'un manque de fonds. Il faudrait conduire une analyse avec l'ensemble des parties prenantes afin de comprendre les vrais enjeux, les réels problèmes. Pourquoi n'y a-t-il pas suffisamment de jeunes qui ont envie de poursuivre leur parcours dans certaines filières professionnelles ? Qu'est-ce qui nous manque: des dispositifs d'orientation, des conseils pour les diriger vers certains domaines où la demande du marché est importante ? Encore une fois, ce n'est pas vraiment une question de financement.

Injecter 500 millions dans une fondation sans avoir préalablement mené une analyse avec les personnes expertes, sans disposer de données empiriques résultant de faits réels risque même de mettre en danger notre système éducatif, c'est-à-dire que nous allons investir sans réflexion, sans plan stratégique, juste pour constater que nous faisons face à un manque de personnel qualifié.

Le groupe LJS est toujours favorable à l'investissement dans le système de formation, surtout quand il s'agit des jeunes, mais dans le cas d'espèce, c'est du gaspillage de fonds publics. Je vous invite à refuser ce projet de loi tel que présenté. Merci.

M. François Baertschi (MCG). En préambule, Madame la présidente, je vous demanderai de rappeler au préopinant l'article 24 de la LRGC, qui prescrit de s'abstenir d'intervenir quand un intérêt personnel entre en conflit avec celui de la collectivité.

Cela étant, nous sommes dans ce débat face à un système sclérosé, face à un Conseil d'Etat sclérosé, face à des partis politiques sclérosés sans la moindre ambition, sans la moindre vision pour nos talents locaux qui sont actuellement à la peine.

On entend parfois la conseillère d'Etat se plaindre de manquer de moyens, d'avoir de la peine à recruter - enfin, peut-être pas elle, mais certains autres de ses collègues, dans des domaines spécifiques, peinent à recruter. Dans le même temps, énormément de jeunes sont en rade. Il y a ici un véritable enjeu d'avenir lié à la formation.

L'argument de la fondation qui a été invoqué est un faux problème, parce que le fonctionnement de celle-ci repose sur d'autres bases que celles proposées dans ce projet de loi, qui demande que l'Etat mène une politique proactive dans le domaine de la formation professionnelle.

Nous observons que les partis sclérosés de ce Grand Conseil s'opposent à engager une action ambitieuse en la matière, nous en prenons acte: nous prenons acte de leur refus d'aider la population genevoise, de leur refus de permettre aux jeunes de se former de manière dynamique. Il s'agit d'un geste politique.

De notre côté, nous constatons la difficulté dans laquelle se trouvent de nombreux travailleurs, de nombreux jeunes de ce canton qui présentent des déficits de formation. On nous parle d'employabilité, le Conseil d'Etat nous parle d'employabilité, mais je regrette: le système que vous offrez est misérable. Pour notre part, nous proposons une solution; que vous en vouliez ou non, nous vous l'avons soumise.

Nous ne sommes pas seulement un parti qui se plaint de l'afflux massif de frontaliers - ce qui, par ailleurs, représente un véritable problème -, nous défendons d'abord les résidents genevois. Or nous nous apercevons qu'il n'y a pas de volonté de les soutenir dans cette assemblée. Nous en prenons acte. A bon entendeur ! Merci, Madame la présidente.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, je suis heureux d'entendre M. Baertschi, pour une fois - vous transmettrez, Madame la présidente -, ne pas aborder directement la question des frontaliers et s'intéresser enfin aux Genevoises et aux Genevois !

Il est vrai que l'éducation et la formation professionnelle représentent des vecteurs essentiels pour lutter contre le chômage, c'est certain, et je suis enchanté aujourd'hui, en mai 2025, après toutes ces années à avoir côtoyé François Baertschi dans ce parlement, de constater qu'il a enfin compris que la formation joue un rôle beaucoup plus important dans ce domaine, est plus efficace que la fermeture de nos frontières aux travailleuses et travailleurs frontaliers. Merci, Monsieur Baertschi !

Maintenant, il faut se montrer visionnaire, faire preuve d'une certaine vision pour la formation professionnelle, d'une vision politique. Je regrette que l'auteur de ce projet de loi n'ait pas eu suffisamment de vision pour s'apercevoir qu'il existe déjà une fondation en faveur de la formation professionnelle et continue. Interrogé en commission, il l'a admis: il n'était même pas au courant ! En rédigeant son texte, ce député ne s'est même pas renseigné pour savoir s'il existait déjà pareille entité, mais il nous fait tout de même part de sa vision. Or si cette vision ne porte même pas assez loin pour simplement découvrir qu'il existe déjà une fondation, elle n'ira pas beaucoup plus loin pour Genève, malheureusement.

Ensuite, il évoque le manque d'ambition des partis sclérosés qui composent notre Grand Conseil. Alors bon, les partis sclérosés... Je peine à comprendre véritablement le sens de ce terme, mais quant au manque d'ambition, qu'est-ce que l'ambition ? Est-ce que c'est la foire d'empoigne ? Si vous voulez, Monsieur Baertschi, je dépose un amendement pour verser 2 milliards à cette nouvelle fondation et je proclame: «Le parti socialiste fait preuve d'ambition pour Genève, au contraire du MCG qui n'en a pas, puisqu'il ne propose que 500 millions !» Qui dit mieux ? 2 milliards, Monsieur Baertschi !

Des voix. 3 milliards !

M. Romain de Sainte Marie. 3 milliards ! On va voir aujourd'hui qui a de l'ambition pour Genève !

Soyons un minimum sérieux dans cette assemblée. Il ne s'agit pas de jouer la surenchère sans effectuer de travail sérieux, on ne peut pas ignorer qu'il existe déjà une fondation et articuler le chiffre d'une enveloppe de 500 millions pour la formation professionnelle juste pour pouvoir dire: «Regardez, nous avons de l'ambition pour Genève !» Non !

Madame la présidente, vous transmettrez à M. Baertschi que le MCG aurait pu soutenir la formation professionnelle à l'époque où nous avons traité le PL 11560 que le parti socialiste avait déposé et qui visait à augmenter le financement de la fondation pour la formation professionnelle et continue; il aurait fallu écouter à ce moment-là pour s'apercevoir qu'il existe une fondation et que le groupe socialiste avait déjà fait preuve d'ambition en demandant une hausse de son financement afin d'accroître le nombre de places d'apprentissage à Genève.

Mais non, le MCG avait alors refusé ce texte, mais par contre, il fait aujourd'hui montre de sa grande ambition en présentant ici un projet de loi qui n'a ni queue ni tête ! Mesdames et Messieurs, le parti socialiste vous invite à faire preuve de raison, à soutenir la formation professionnelle et continue, certes, mais de manière intelligente, pas de cette façon. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Djawed Sangdel (LJS). J'aimerais faire passer un message à M. Baertschi, car je ne comprends pas sa référence à un prétendu intérêt personnel. Juste pour son information, je suis pour ma part impliqué dans le domaine de la formation universitaire.

On parle ici d'un investissement accidentel, hasardeux, et ce n'est pas acceptable dans ce parlement. Avant de dépenser de l'argent public, il faut effectuer une analyse, il faut un vrai besoin.

Notre rôle, notre devoir est de défendre l'intérêt public. Je ne vois pas quel intérêt personnel serait en jeu, je veux juste clarifier le fait qu'il n'y a pas d'intérêt personnel. Seul compte l'intérêt commun en faveur de notre canton et de la population, et les investissements doivent découler d'une analyse empirique. Le groupe LJS ne soutiendra pas ce projet de loi. Merci.

La présidente. Je vous remercie. La parole retourne à M. Baertschi pour trente-quatre secondes.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Madame la présidente. Vous transmettrez au député Romain de Sainte Marie, grand donneur de leçons, qu'il confond plusieurs éléments qui n'ont rien à voir les uns avec les autres. La fondation dont il parle n'a aucun lien avec celle proposée dans ce projet de loi.

D'ailleurs, l'enjeu principal n'est pas la fondation, mais de faire en sorte que l'Etat... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...puisse financer la formation professionnelle et mener une politique proactive en la matière.

Si vous aviez lu correctement le texte - parce qu'apparemment, vous ne savez pas lire... (Exclamations.) Je m'étonne...

La présidente. Monsieur Baertschi, votre temps de parole est épuisé.

M. François Baertschi. Je m'étonne de votre peu d'attention et je vous demande de relire soigneusement ce... (Le micro de l'orateur est coupé.)

La présidente. Vous avez largement dépassé votre temps, merci. Je repasse la parole à M. de Sainte Marie pour six secondes. Six secondes ! Je n'hésiterai pas à couper le micro, Monsieur, si vous débordez. (Remarque.) Non, vous n'avez pas été mis en cause. Six secondes !

M. Romain de Sainte Marie (S). Madame la présidente, on m'a accusé de ne pas savoir lire ! Je vois la cheffe de l'instruction publique réagir, j'espère qu'elle pourra rectifier ce propos sur mes compétences en lecture... (Rire.) ...déjà que celles en syntaxe n'étaient pas forcément fameuses. Merci, Monsieur Baertschi. J'ai pourtant bien lu l'exposé des motifs, qui reprend exactement les buts de la FFPC...

La présidente. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Romain de Sainte Marie. Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)

M. Arber Jahija (MCG), rapporteur de minorité. Il faut savoir que le MCG, budget après budget, n'a cessé de proposer des moyens supplémentaires en faveur de la formation afin de pallier le manque de personnel qualifié. Force est de constater que les mêmes partis s'y opposent systématiquement. Quand nous présentons un projet ambitieux, on trouve toujours les moyens de le refuser. Merci, Madame la présidente.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais rappeler que de nombreuses formations ont été développées à l'OFPC, il y en a de plus en plus. Le département s'emploie à améliorer, quantifier, mieux cibler les besoins de l'économie et à proposer des cursus complémentaires afin de rattraper un certain retard.

Ce projet de loi - je l'ai déjà indiqué - constitue une fausse bonne idée et présente de grandes lacunes: pas de priorités, pas de planification, pas de vision. Nous sommes contre un chèque en blanc, une nouvelle usine à gaz...

La présidente. Vous passez sur le temps du groupe.

M. Christo Ivanov. J'aurai terminé bien avant, Madame la présidente, merci beaucoup ! Pour toutes ces raisons, chers collègues, je vous demande de bien vouloir refuser l'entrée en matière sur le PL 13372. Je vous remercie.

Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai particulièrement apprécié ce moment où vous vous battiez presque pour nous accorder davantage de moyens en enchérissant de plus en plus, c'était surréaliste !

En préambule, j'aimerais souligner - je l'avais déjà fait en commission - que nous sommes tous d'accord, au départ - je vous ai entendus -, de renforcer la formation professionnelle, de prévenir le risque de pénurie de main-d'oeuvre dans certains métiers, risque de pénurie dont nous sommes tout à fait conscients. A cet égard, le but du projet de loi est louable - vous l'avez tous relevé -, il s'agit d'un souhait partagé par vous toutes et tous ainsi que par le Conseil d'Etat.

Le renforcement de la formation professionnelle constitue une mesure que nous avons inscrite dans notre programme de législature et qui figure dans la feuille de route du département. Nous y travaillons - c'est d'ailleurs ce que nous vous avons expliqué en commission - et ne sommes pas convaincus que ce texte y contribue.

Pour atteindre cet objectif, nous avons formulé plusieurs axes d'action dont le développement est en cours. Cela commence par l'orientation, ainsi que plusieurs d'entre vous l'ont relevé: comment mieux orienter les jeunes ? Nous y oeuvrons: il y a désormais des conseillers Go-Apprentissage et des villages des métiers dans tous les établissements afin que les jeunes découvrent les différentes professions et formations, notamment les filières professionnelles. La formation professionnelle doit être valorisée, nous travaillons dans ce sens.

Nous y expliquons d'ailleurs qu'un titre obtenu dans le cadre d'un cursus professionnel mène à tout, y compris à des études supérieures. Pour cela, il faut passer une maturité professionnelle. Nous avons dès lors augmenté le nombre de places en maturité professionnelle, parce que nous voulons être cohérents avec notre message, et ce notamment grâce aux moyens que vous nous avez octroyés dans le budget 2025, pour lesquels nous vous remercions.

Le renforcement de la formation professionnelle passe également par une mission d'information auprès des parents. On sait que les parents sont les plus grands prescripteurs en ce qui concerne les choix professionnels de leurs enfants, donc ils doivent être informés des options qui existent pour être convaincus. Notre journal «Le Génie des métiers», adressé à tous les parents des jeunes du cycle d'orientation, est destiné à mettre en valeur les différents cursus professionnels et métiers; cette publication sera déployée de manière plus importante quant au nombre de pages et à la fréquence de parution.

Enfin, il convient d'accompagner les entreprises, parce qu'on sait aujourd'hui qu'il manque des places d'apprentissage. On parle de valoriser les filières professionnelles, on parle de convaincre des jeunes, Mesdames et Messieurs, mais nombre d'entre eux souhaiteraient entrer en apprentissage et ne trouvent pas de place. Alors certes, nous devons sans doute renforcer nos structures de formation et offrir davantage de places en école à plein temps, mais nous avons également besoin de places dans les entreprises. Pour cela, nous nous employons à développer des contacts.

Nous devons accompagner les entreprises, les convaincre; elles n'ont pas forcément besoin de ressources financières, mais plutôt de savoir comment suivre certains jeunes qui rencontrent des difficultés. Il s'agit de les amener à comprendre qu'elles doivent faire leur part: si elles veulent de la main-d'oeuvre qualifiée, cela passe aussi par la formation qu'elles délivrent.

Voilà tous les axes sur lesquels nous travaillons. Nous déployons encore d'énormes efforts en matière de formation continue. Vous avez évoqué la problématique des personnes au chômage, en particulier des Genevois. Aujourd'hui, notre service de formation continue forme de plus en plus d'adultes, des Genevoises et Genevois qui ne possèdent pas de diplôme et qui en ont impérativement besoin pour retrouver un poste et retourner sur le marché de l'emploi. Le nombre de titres délivrés à l'issue d'une formation pour adultes a augmenté de près de 30%, nous sommes actifs en la matière.

Nous ne sommes pas persuadés qu'une enveloppe de 500 millions soit nécessaire, même s'il faut quelques ressources, bien sûr. Nous nous réjouissons que vous vous montriez enclins à nous soutenir - à vous entendre, j'ose espérer que ce sera le cas - lorsque des besoins seront mis en avant pour poursuivre la politique que nous menons depuis des mois dans le but de renforcer la formation professionnelle. Je vous remercie, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés.

La présidente. Merci beaucoup, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 13372 est rejeté en premier débat par 72 non contre 12 oui.

PL 13403-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier le projet de loi de Stéphane Florey, André Pfeffer, Marc Falquet, Patrick Lussi, Guy Mettan, Daniel Noël, Lionel Dugerdil, Michael Andersen, Florian Dugerdil, Yves Nidegger, Julien Ramu, Charles Poncet, Virna Conti modifiant la loi sur l'instruction publique (LIP) (C 1 10) (Pour que les directeurs d'établissements consacrent une partie de leur temps de travail à l'enseignement) (Réforme structurelle III)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 10 et 11 avril 2025.
Rapport de majorité de Mme Ana Roch (MCG)
Rapport de minorité de M. Christo Ivanov (UDC)

Premier débat

La présidente. Nous passons au PL 13403-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité, rédigé par mes soins, est repris par... Je ne sais pas ! (La présidente rit. Un instant s'écoule.) C'est M. François Baertschi qui le reprend, je lui cède la parole.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Tout d'abord, je tiens à féliciter notre présidente pour son excellent rapport, que je reprends un peu au pied levé; je vous prie de m'excuser si malheureusement mon intervention n'égale pas celle qu'aurait pu offrir la titulaire de cette fonction de rapporteure sur cet objet.

Nous sommes face à un projet de loi qui demande que les directeurs d'école ne fassent pas seulement des tâches administratives et qu'ils ne soient pas déconnectés du travail des enseignants - si j'ai bien compris l'avis des auteurs. J'aimerais revenir sur les propos que tenait lors d'un précédent débat mon vis-à-vis, qui était rapporteur de majorité et qui maintenant se retrouve rapporteur de minorité. Je peux lui rendre la politesse en lui disant que ce projet de loi est une fausse bonne idée. (Remarque.) Oui, chacun son tour !

Effectivement, il est faux de penser que cette proposition pourrait améliorer la qualité du travail mené par les directeurs; par ailleurs, cela perturberait un peu l'organisation de la structure scolaire, raisons pour lesquelles la majorité de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport a refusé ce projet de loi. Je reviendrai sur le sujet ultérieurement et laisse à mes chers collègues le soin de défendre cette position mieux que moi ! Merci, Madame la présidente.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'ai vu que la rapporteure de majorité refilait la patate chaude à ses petits camarades ! En tant que rapporteur de minorité, je souligne que ce projet de loi vise à rétablir un article de loi qui avait été adopté par amendement en 2015, à savoir l'article 59 LIP tel qu'il était en vigueur durant la période 2015-2020. A l'époque, j'avais déposé l'amendement en question, qui avait été accepté en deuxième débat.

Cette disposition, introduite lors de la révision complète de la LIP, faisait suite à la M 2100, qui proposait déjà d'intégrer cette mesure. La motion en question demandait que les directeurs d'établissement consacrent une partie de leur temps de travail à l'enseignement. Elle avait été largement acceptée par le Grand Conseil. Le 27 février 2020, le parlement adoptait le PL 12315, déposé par le parti socialiste notamment, qui actait la fin de l'obligation pour les directeurs des établissements primaires de consacrer une partie de leur temps à l'enseignement.

Le but de ce projet de loi est de permettre aux directeurs de rester connectés avec leurs classes et d'assurer des remplacements, souvent au pied levé, lorsqu'on ne trouve personne pour donner les cours. Cela ne représenterait que quelques heures par semaine, voire par mois. Ce n'est pas du tout une usine à gaz, mais une proposition qui correspond à la réalité du terrain. Cette mesure est déjà en vigueur dans plusieurs cantons, notamment Berne, Fribourg, le Valais et Neuchâtel.

Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport vous demande d'accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Jean-Charles Rielle (S). Madame la présidente, félicitations pour votre brillante élection ! Je vous souhaite une très belle année comme première citoyenne de notre canton !

Chères et chers collègues, plus que des réflexions théoriques, j'aimerais insister sur un point essentiel: la disponibilité ! Et je veux l'illustrer par un seul exemple, que je pourrais multiplier par des dizaines d'autres, vécus pendant plus de vingt-cinq ans comme médecin responsable de région du service de santé de l'enfance et de la jeunesse, chargé notamment de plus de cinquante écoles primaires.

Un enfant arrive un matin à l'école en refusant d'enlever son bonnet. En dessous, il porte une coupe de cheveux infligée par sa famille pour le punir. Une telle situation relève d'une atteinte à l'intégrité corporelle et doit être immédiatement signalée. Si le directeur est en train d'enseigner, il ne peut pas intervenir immédiatement. Cette disponibilité est donc cruciale !

Le faux problème de la proximité, parlons-en ! Il faut dénoncer un mépris sous-jacent pour les tâches administratives et une vision réductrice du rôle des directrices et directeurs, comme si celui-ci se limitait à diriger une équipe. La proximité est partout, dans les couloirs, avec les enseignants, avec les parents dans la gestion des différentes problématiques familiales - les familles recomposées en sont l'illustration -, avec les mairies des communes où se situent les écoles, avec les autres entités comme l'OMP, etc.

Il faut souligner également la problématique des établissements multisites: en cas d'urgence dans une autre école, le directeur doit pouvoir se déplacer sans délai. Enfin, le nombre croissant d'élèves et la complexité des responsabilités administratives justifient pleinement le besoin de directeurs qui se consacrent entièrement à leurs missions, et nécessiteraient plutôt que l'on consolide le rôle de la direction.

Dans l'enseignement primaire, il y a près de 40 000 élèves, répartis dans plusieurs établissements. Si l'on rapporte ce total au nombre de directeurs, on obtient 670 élèves par directeur d'établissement, ces derniers gérant en moyenne 2,8 écoles chacun.

Le cahier des charges des directeurs s'articule autour de six grands piliers: le pilotage pédagogique, l'encadrement, la sécurité et le suivi de la scolarité des élèves, l'école inclusive, la gestion des ressources humaines et la gestion administrative et financière.

Les directeurs, notamment ceux qui travaillent avec plusieurs communes, doivent gérer des enveloppes budgétaires parfois complexes, certaines prestations étant subventionnées de manière différente selon les communes. Ils doivent ainsi respecter les règles imposées par le DIP tout en rendant compte aux communes concernées, ce qui implique la gestion d'importants flux financiers.

Le dernier pilier concerne les relations avec les partenaires extérieurs, qui incluent non seulement les communes et le DIP, mais aussi le tissu associatif et institutionnel local: police municipale, maisons de quartier, travailleurs sociaux hors murs, etc.

Différents éléments permettent aux directeurs de garder cette proximité: les visites en classe, la présence de l'équipe de direction - qui comprend des coordinateurs pédagogiques et des maîtres adjoints -, les relations quotidiennes avec les élèves, les enseignants, les familles et les partenaires institutionnels tels que les communes, le parascolaire ou encore le GIAP. Cette proximité leur permet d'avoir une compréhension fine du terrain et des situations individuelles des élèves. La proximité avec les élèves et le terrain est donc bien réelle, sans qu'il soit nécessaire de confier au directeur un rôle d'enseignant à proprement parler.

Vous l'aurez compris, le groupe socialiste vous invite à rejeter ce projet de loi qui va à l'encontre de l'intérêt de nos enfants, de leurs parents, des enseignantes et enseignants et de l'insertion de nos écoles dans les communes genevoises. Je vous remercie, Madame la présidente. (Applaudissements.)

M. Thierry Arn (LC). Comme cela a été dit, le but de ce projet de loi était de redonner du temps d'enseignement aux directeurs d'école, comme c'était le cas durant la période 2015-2020. Selon les auteurs du texte, cela leur permet de garder un contact avec la réalité du terrain. Or, comme l'a relevé mon préopinant, la réalité du terrain, c'est une moyenne de 670 élèves par directeur à Genève. Je précise au passage que ça ne fait pas moins de 1340 parents d'élèves par directeur ! Rien qu'avec ça, la tâche est déjà énorme !

La réalité du terrain, cela a également été mentionné, ce sont des établissements multisites, avec pour certains pas moins de cinq écoles; pour ceux que je connais, ils peuvent s'étendre de Soral jusqu'à Compesières. Dès lors, je vois mal comment un directeur pourrait enseigner et se déplacer sur les différents sites. La réalité du terrain, ce sont les responsabilités multiples des directeurs; elles ont toutes été listées par mon préopinant, je n'y reviendrai pas.

Pour toutes ces raisons, Le Centre est convaincu que ce cahier des charges est largement suffisant pour les femmes et les hommes qui dirigent les établissements scolaires. Nous sommes certains que les directions maintiennent le contact avec la réalité du terrain au travers de toutes leurs missions et responsabilités. Il nous paraît souhaitable que les directions puissent garder la tête hors de l'eau afin d'être en mesure de prendre soin de leur personnel, qui doit pouvoir dispenser un enseignement de qualité aux élèves. Mon groupe vous demande donc de refuser ce projet de loi.

Mme Francine de Planta (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, les directions d'établissement ont été mises en place par le DIP en 2008 avec l'introduction de 93 directeurs et directrices, afin d'assurer une gestion de proximité, de renforcer le lien avec les familles et les communes et de garantir la mise en oeuvre des réformes HarmoS ainsi que du plan d'études romand.

On peut le reconnaître, les débuts ont été un peu difficiles, mais depuis 2008, cette fonction a été clarifiée. Le rôle des directeurs et des directrices a sensiblement évolué; aujourd'hui, la fonction a pleinement trouvé sa place, elle est reconnue et indispensable, raison pour laquelle ils doivent être soutenus.

Mes préopinants l'ont rappelé, l'enseignement primaire ne représente pas moins de 40 000 élèves, avec une moyenne de 600 élèves par directeur d'établissement. Ces derniers ont un cahier des charges extrêmement dense. Je me permets de le répéter, on leur demande d'assurer de nombreuses tâches: un pilotage pédagogique, c'est-à-dire vérifier la qualité de l'enseignement, un encadrement, à savoir veiller à la sécurité et au suivi de la scolarité des élèves, la mise en place de l'école inclusive, la gestion des ressources humaines, puisque ce sont eux qui suivent et évaluent leurs collaborateurs, la gestion administrative et financière, sans oublier les relations avec tous les partenaires extérieurs.

Il faut aussi rappeler que les directeurs et les directrices sont généralement issus du sérail puisque pour la plupart, ils ont été enseignants ou enseignantes. Par conséquent, le terrain, ils le connaissent. Ils ont toutefois choisi d'évoluer vers une autre fonction. Ce maintien du contact avec le terrain, ils l'effectuent également par des visites en classe régulières, comme cela a été relevé. Je crois enfin qu'il est important de souligner que pour les élèves, un directeur ou une directrice est une figure d'autorité dans leur établissement.

Mesdames et Messieurs les députés, l'école d'aujourd'hui est plus complexe que celle que nous connaissions auparavant. Les missions confiées aux directeurs et directrices d'établissement sont lourdes, mais elles sont remplies par des hommes et des femmes motivés et engagés, qu'il y a lieu de soutenir. C'est pourquoi le PLR vous invite, comme la majorité de la commission, à refuser ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Laura Mach (Ve). Madame la présidente, je crois que je dois moi aussi vous adresser mes félicitations pour votre élection !

Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi soulève une question importante à nos yeux, à savoir le lien que peut garder une direction avec le terrain; c'est vraiment une préoccupation que notre groupe partage. Nous reconnaissons qu'au vu du nombre d'élèves et d'écoles différentes sous la responsabilité d'une même direction, il est légitime de se poser la question du lien à la réalité du terrain et de l'incarnation d'un rôle d'autorité.

Cependant, la méthode proposée, qui veut amener la direction au contact direct des classes, ne semble pas correspondre à la volonté des professionnels, déjà débordés par leurs multiples tâches. Pour répondre à la question de la proximité avec le terrain, le département a proposé la création de nouveaux postes de maîtres adjoints, qui ont été acceptés dans le cadre du budget 2025 - leur effet ne peut donc pas encore être mesuré.

Les auditions ont permis d'entendre les directeurs, mais notre groupe regrette qu'elles n'aient pas été plus larges, notamment en incluant la voix des enseignants. Compte tenu de ces réserves, et tout en restant dans l'attente des effets sur la dynamique scolaire obtenus par la présence de davantage de maîtres adjoints, nous refuserons ce projet de loi, qui ne semble pas rencontrer l'adhésion des principaux intéressés. Je vous remercie de votre attention.

M. Djawed Sangdel (LJS). Chers collègues, ce projet de loi pose une bonne question, en lien avec l'aspect de qualité. Il faut que les directeurs des écoles soient connectés avec l'ensemble des parties prenantes: les enfants, les parents, les enseignants ainsi que tout autre partenaire. Dans le cas contraire, si les directeurs restent enfermés dans les classes, bien évidemment, ce contact est perdu. Le groupe LJS vous invite donc à refuser ce projet de loi, comme dix commissaires l'ont fait.

M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, la minorité entend les arguments de la majorité, mais il y a quand même un point à relever, c'est que lors de l'étude de cet objet, une commissaire remplaçante qui est enseignante a exprimé un avis tout à fait contraire à celui défendu par la majorité. Elle nous a dit que les directeurs qui enseignaient avaient une vision différente, plus favorable et même plus enrichissante par rapport à ceux qui n'enseignaient pas.

Il y a donc la théorie d'un côté et de l'autre ce témoignage issu de la pratique que nous avons reçu de la part de cette enseignante, qui est venue nous expliquer que les directeurs qui enseignaient apportaient quelque chose de plus aux enseignants ainsi qu'aux enfants grâce à cette réalité du terrain. Selon les avis des uns et des autres, tout diverge. Je voulais juste ajouter l'avis de cette enseignante entendu en commission. Merci.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. J'aimerais rebondir sur ce qu'a dit ma préopinante Mme Mach - vous transmettrez, Madame la présidente. Il faut rappeler que lorsque le système a démarré en 2008, il y avait 93 directeurs d'école. Aujourd'hui, ce nombre est de 59, et, il est vrai, certains d'entre eux gèrent entre trois et cinq écoles.

Toutefois, il faut reconnaître que des maîtres adjoints ont été introduits, les fameux MA, afin d'apporter un soutien aux directeurs. Je pense que cette évolution va certainement se poursuivre dans le futur, pour épauler les directeurs d'écoles primaires.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Christo Ivanov. Merci, Madame la présidente. Voilà, Mesdames et Messieurs, une raison de plus pour soutenir ce projet de loi, qui, à ce qu'il semble, ne vous a malheureusement pas convaincus, mais qui correspond à une réalité du terrain.

Aujourd'hui, le poste de maître adjoint représente un demi ETP par directeur. Je pense que dans le futur, cela va augmenter. Aussi, le projet de loi trouve bien sa cible. La preuve, c'est qu'on développe en parallèle le rôle des maîtres adjoints, justement pour combler le travail de la direction. Le fait qu'il y ait de tels maîtres est une raison de plus pour garantir que les directeurs soient connectés avec leurs élèves.

Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport vous demande d'accepter l'entrée en matière sur le PL 13403. J'ai dit ! Merci.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Il est certain que le flou et le côté un peu indéterminé de ce projet de loi font qu'il a de graves défauts, qui sont d'une certaine manière rédhibitoires. De plus, il convient de souligner deux éléments importants, qui plaident contre ce texte: le cahier des charges très dense des directeurs d'école et la multiplicité des tâches qu'ils ont à effectuer. Sans revenir sur le détail des débats, qui ont été relativement fournis, je vous demande, au nom de la majorité, de refuser le présent projet de loi.

Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez énoncé un certain nombre de choses, et je ne veux pas revenir sur tout ce qui a été dit et qui est tout à fait juste pour la quasi-unanimité des interventions des différents groupes. J'aimerais juste préciser qu'à ma connaissance, le cas d'un directeur qui enseignait, relevé par une députée en commission, ne concernait pas une école primaire, ce qui change un peu la donne.

J'aimerais également revenir sur les éléments suivants: le nombre d'élèves ne fait qu'augmenter, le nombre d'établissements n'a pas changé depuis des années - nous sommes à 59 établissements pour 168 écoles, disséminées dans tout le canton - et la situation n'a fait que se complexifier, cela a été relevé, notamment via l'évolution du cahier des charges. Aujourd'hui, être directeur d'école, c'est aussi gérer beaucoup de parents et des situations de plus en plus difficiles - ce point a également été évoqué.

J'aimerais aussi vous dire que le Conseil d'Etat considère que le rôle d'un directeur n'est pas d'enseigner, mais de piloter un établissement, de faire en sorte qu'il fonctionne et de prendre soin de son personnel: il a donc également un rôle en matière de ressources humaines, puisque les enseignants qui travaillent dans les écoles lui sont rattachés hiérarchiquement. Ce rôle, ainsi que toutes les autres tâches qui incombent à un directeur, ne lui permettent pas d'enseigner - ce n'est d'ailleurs pas sa mission !

Par conséquent, le Conseil d'Etat est opposé à ce projet de loi, estimant que celui-ci va à l'encontre du mouvement actuel, qui, compte tenu de l'évolution de la situation, vise plutôt à renforcer les directions et à leur apporter un soutien à travers la création de postes de maîtres adjoints. Dans certaines écoles où le directeur n'est pas présent sur place, le maître adjoint peut effectuer un certain nombre de tâches. Vous l'avez dit, il y a des établissements dont les écoles se situent dans cinq communes différentes, et le directeur ne peut pas se dédoubler. On considère dès lors qu'il faut plutôt renforcer la dotation des maîtres adjoints.

Comme indiqué précédemment, nous demanderons aussi un renforcement de la dotation des coordinateurs pédagogiques. Mais aujourd'hui, le rôle des directeurs au sein de nos 59 établissements n'est plus d'enseigner, raison pour laquelle nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser ce projet de loi. Merci.

La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 13403 est rejeté en premier débat par 69 non contre 10 oui.

La présidente. Je vous octroie une pause de dix minutes. Nous nous retrouvons à 18h pour les différentes prestations de serment.

La séance est levée à 17h50.