Séance du
vendredi 23 mai 2025 à
14h
3e
législature -
3e
année -
1re
session -
3e
séance
La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de Mme Ana Roch, présidente.
Assistent à la séance: Mmes Anne Hiltpold et Carole-Anne Kast, conseillères d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Pierre Maudet et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, Stefan Balaban, Jacques Béné, Alia Chaker Mangeat, Sébastien Desfayes, Patrick Dimier, Raphaël Dunand, Jean-Marc Guinchard, Uzma Khamis Vannini, André Pfeffer, Charles Poncet, Caroline Renold, Skender Salihi, Vincent Subilia, Celine van Till, Pascal Uehlinger et Yvan Zweifel, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Oriana Brücker, Rémy Burri, Anne Carron, Stéphane Fontaine, Christine Jeanneret, Gabrielle Le Goff, Yves Magnin, Philippe Meyer et Daniel Noël.
Annonces et dépôts
Néant.
La présidente. Je vous informe que nous avons reçu la démission de Mme Xhevrie Osmani de son mandat de députée. Je prie Mme Francine de Planta de nous lire le courrier 4161. (Applaudissements à l'issue de la lecture.)
La présidente. Merci, Madame. Il est pris acte de cette démission avec effet à l'issue de la séance. Mme Nicole Valiquer Grecuccio prêtera serment à 16h. La prestation de serment du troisième député suppléant du groupe socialiste est reportée à la prochaine session.
Entrée au Grand Conseil en 2018, Mme Xhevrie Osmani a siégé sept ans sur les bancs socialistes, d'abord en qualité de députée suppléante, puis de députée titulaire.
Au cours de ses mandats, Mme Osmani a assumé la présidence de la commission judiciaire et de la police. Elle a également pris part aux travaux de la commission sur le personnel de l'Etat, de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil et de la commission des affaires communales, régionales et internationales.
En plénière, elle a notamment pris la parole sur des thématiques sociales comme la défense des conditions de travail, et elle est à l'origine de la loi prévoyant la gratuité des camps scolaires.
Outre son mandat de députée, Mme Osmani a siégé au Conseil municipal de Meyrin entre 2015 et 2018 et elle vient d'être élue au Conseil administratif de cette commune.
Nous formons nos voeux les meilleurs pour la suite de sa carrière et lui remettons, fidèles à la tradition, un stylo souvenir. (Applaudissements. La présidente descend de l'estrade, embrasse Mme Xhevrie Osmani et lui remet le stylo souvenir.)
Je donne la parole à M. Jotterand.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Chère Xhevrie, cette session est pleine de protocole et d'adieux. En voici encore un, et non des moindres. Comme Marjorie hier, tu nous quittes pour rejoindre le Conseil administratif d'une grande commune du canton. Un défi qui s'annonce passionnant !
Entrée en 2018 au Grand Conseil, tu as démontré en tout temps une fidélité parfaite à tes valeurs. Dans un monde politique aux lignes parfois mouvantes, tu sais toujours garder la bonne direction, tout en étant ouverte au dialogue et à l'élaboration d'idées. Tu as constamment eu à coeur de défendre l'ensemble de la population. Ces qualités me font penser que tu as tout en main pour remplir le défi qui t'attend. Ce défi est, certes, moins médiatique que celui en Ville de Genève, mais il est certainement tout aussi passionnant: il s'agit d'une commune de près de 30 000 habitantes et habitants, au tissu local riche et varié, où, j'ai cru le comprendre le week-end passé, des constructions pleines et entières se mettent en route, que tu auras l'occasion de suivre.
Evidemment, pour le groupe socialiste, il n'est jamais très agréable de voir partir une camarade travailleuse, sympathique et sincère, mais nous sommes largement réconfortés par le fait que les Meyrinoises et Meyrinois auront une conseillère administrative de valeur et qui se préoccupera sans relâche de la qualité de vie de chacune et de chacun.
Au nom du groupe socialiste, je t'adresse mes sincères remerciements et mes félicitations. Tout de bon pour la suite ! (Longs applaudissements. L'assemblée se lève. M. Matthieu Jotterand donne l'accolade à Mme Xhevrie Osmani et lui offre un bouquet de fleurs.)
La présidente. Je désigne la première vice-présidente de l'assemblée, Mme Dilara Bayrak (Ve), présidente de la commission de grâce. (Applaudissements.)
La présidente. Nous commençons le traitement des extraits avec la R 1066 (catégorie III), qui ne fait l'objet d'aucune demande de parole.
Mise aux voix, la résolution 1066 est adoptée par 56 oui (unanimité des votants).
Débat
La présidente. Nous enchaînons avec la M 3046-A (catégorie III). Je donne la parole à M. Esteban.
M. Diego Esteban (S). Merci, Madame la présidente. J'ai pris connaissance de la réponse du Conseil d'Etat à cette motion, et je vais souligner l'aspect positif: le Conseil d'Etat a l'air d'avoir bien pris conscience des risques, de clarifier les efforts effectués afin de sensibiliser les comités chargés des récoltes de signatures et d'annoncer un peu plus en détail les projets actuellement sur la table visant à mettre en place un test pour un outil de récolte de signatures par voie électronique, ce qui permettrait de contourner le risque que représentent ces sociétés de récolte de signatures.
Les compliments s'arrêtent là. La frustration prend maintenant le dessus, parce que si les enjeux semblent avoir été pris au sérieux, la motion elle-même ne semble pas l'avoir été. Pour entrer dans les détails, le rapport du Conseil d'Etat ne répond pas à deux invites. Il était en effet demandé que l'on vérifie que le salaire minimum soit respecté au sein de ces sociétés, mais rien n'est mentionné à cet égard. C'est également le cas de l'obligation du signalement du recours à ces sociétés: aucune mention dans le rapport du Conseil d'Etat. Une autre piste avait été évoquée dans la motion, à savoir la création d'une base de données des signatures afin d'améliorer les contrôles par la chancellerie. On nous explique pourquoi les dernières réflexions à ce sujet n'ont pas abouti. Comme si, finalement, les avis ne pouvaient pas évoluer - et l'actualité semble l'indiquer -, et que, pour le gouvernement, une décision prise dans le passé devait rester permanente. C'est particulièrement surprenant; pour les membres de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil, qui ont bénéficié cette semaine d'une visite des locaux du service des votations et élections, le Conseil d'Etat savait que des pistes techniques étaient envisagées dans le but de renforcer les contrôles dans le domaine, mais aucune mention n'en est faite dans le rapport - c'est bien dommage !
Enfin, en ce qui concerne la prise en considération des signatures récoltées par divers moyens considérés comme frauduleux, outre les enjeux pénaux, donc le fait d'usurper les signatures, on peut évoquer les récoltes sans mandat. Ces sociétés récoltent des signatures sans avoir été mandatées pour le faire et approchent des comités de récolte en leur disant: «Si vous voulez les signatures, il faut nous mandater. Sinon, tant pis pour vous ! On les garde pour nous et les personnes que vous démarcherez feront savoir qu'elles ont déjà signé.» Il existe diverses techniques de recours à des arguments tout à fait fallacieux dans le seul but d'obtenir la signature, mais le Conseil d'Etat nous dit que les signatures récoltées par ce moyen ne seraient pas forcément illégitimes. La distinction me semble un peu compliquée à faire.
Si certains députés - c'était du moins mon cas en tant que premier signataire - ont recours à une motion plutôt qu'à un projet de loi, c'est parce qu'ils font confiance à l'exécutif pour concrétiser mieux que ce qu'eux-mêmes l'auraient fait dans un projet de loi l'intention exprimée dans cet objet et adoptée - en l'occurrence - par une large majorité du Grand Conseil. Je constate qu'on a perdu six mois et qu'il faudra revenir avec un projet de loi; peut-être aurait-il fallu commencer avec ce type de texte. Ça ne sert à rien de continuer à jouer au ping-pong avec ce rapport, mais je tenais quand même à dire que sa qualité est particulièrement faible. Je pense du reste que c'est une tendance qu'on observe dans d'autres rapports que l'on reçoit sur des motions adoptées parfois par de larges majorités du Grand Conseil. Je remercie d'avance le nouveau Bureau élu de mentionner cet aspect lors de la rencontre à venir avec le Conseil d'Etat. Je vous remercie.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Je vais compléter les propos de notre collègue Diego Esteban. Nous avons lu avec attention le rapport du Conseil d'Etat sur cette motion dont les invites sont à la fois techniques et, on va dire, relationnelles et sociales, considérant la situation particulière des gens employés par ces sociétés, souvent sans trop de scrupules, pour partir à la récolte de signatures. Ce texte demandait que l'OCIRT engage une enquête afin de déterminer dans quelle mesure les conditions de travail de ces gens sont conformes au droit; nous avons en effet l'intuition, tout à fait fondée, qu'elles ne le sont pas, ne serait-ce que par la nature de la tâche qui leur est confiée, c'est-à-dire récolter des signatures. On sait très bien que ces gens-là sont peu ou prou rémunérés à la signature, quand bien même cela peut être maquillé dans certains contrats de travail.
Si, comme cela a été dit, le rapport du Conseil d'Etat reprend - et encore, de manière lacunaire effectivement - les éléments dont nous avons pu discuter durant cette très intéressante visite du service des votations et élections, avant-hier, il n'évoque absolument pas les enjeux sociaux, les enjeux relatifs au droit du travail auquel sont soumises les personnes dans la rue qui constituent l'intermédiaire entre ces textes et le corps électoral appelé à signer, appelé parfois avec insistance, parfois avec des arguments trompeurs. Voilà pourquoi l'Etat doit intervenir: pour garantir que ces gens bénéficient de conditions de travail régulières et que le corps électoral ne soit ni importuné ni trompé dans le cadre de ces récoltes de signatures.
Nous avons déposé il y a quelques semaines un référendum, et le résultat vient de tomber: à peine 6,7% de signatures non valables. C'est un taux un peu incompressible du fait des gens qui signent à deux reprises ou qui ne disposent pas des droits politiques. Or, nous avons appris l'autre soir qu'en ce qui concerne les textes fédéraux, il se monte à plusieurs dizaines de pour cent, voire qu'il avoisine parfois les 50% de signatures non valables dans les lots remis par des sociétés inconnues - il n'y a pas de mandataire sur ce genre de texte. Ces taux alimentent évidemment le soupçon, ils constituent une preuve quasi certaine qu'il existe des pratiques frauduleuses en la matière. On ne peut par conséquent pas se satisfaire de la réponse du Conseil d'Etat, et nous allons travailler de concert avec nos collègues sur des projets législatifs pour que la situation s'améliore. Je vous remercie.
La présidente. Merci bien. La parole n'est plus demandée.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 3046.
La présidente. Au point suivant figure le RD 1614-A (catégorie IV).
Le Grand Conseil prend acte du rapport divers 1614.
La présidente. Nous passons à l'objet suivant, soit le RD 1617 (catégorie III), sur lequel personne ne souhaite s'exprimer.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1617.
La présidente. L'ordre du jour appelle le PL 13511-A (catégorie IV). J'appelle l'assemblée à se prononcer sur cet objet.
Mis aux voix, le projet de loi 13511 est adopté en premier débat par 73 oui (unanimité des votants).
Le projet de loi 13511 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13511 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 80 oui (unanimité des votants).
Débat
La présidente. Nous nous penchons maintenant sur la P 2210-B (catégorie III). Je donne la parole à M. Nidegger.
M. Yves Nidegger (UDC). Merci, Madame la présidente. A propos de la M 3046-A, mon préopinant disait que la qualité du rapport du Conseil d'Etat était quelque peu insuffisante ou légère. Je ne voudrais pas le plagier pour ce point, soit la pétition signée par plus de sept mille parents sous le titre: «Inciter nos enfants à douter de leur identité sexuelle n'est pas le rôle de l'école», mais le rapport qui nous est servi en réponse est une insulte aux pétitionnaires. Il s'agit d'y citer la théorie, c'est-à-dire que seulement si un élève pose une question intime, alors il en est question dans les classes. La pétition a été envoyée au Grand Conseil par des parents outrés par milliers de ce que, en vérité, tout est bon pour arriver à expliquer aux gosses que le mariage se fait entre personnes de même sexe, les enfants aussi, à leur expliquer comment ça se fait, comment ça ne se fait pas et par quel autre moyen et à leur demander si quelqu'un dans la classe serait plus heureux en garçon s'il est une fille ou l'inverse, s'il est un garçon.
La réponse de type «Pravda» consistant à dire: «La vérité officielle, la voici; circulez pour le reste, il n'y a rien à voir» contenue dans ces quelques pages - ce rapport contient cinq pages et demie, même pas: trois pages et demie si l'on prend le rapport lui-même - constitue véritablement une insulte. Je vous demande, avant que ça ne soit la guerre civile... Toucher aux enfants - je ne sais pas si vous êtes au courant, mais ceux qui en ont le savent -, ça ne se fait pas. Le Conseil d'Etat ne met pas ses gros pieds dans l'éducation des enfants pour les inciter à douter de leur identité sur un point aussi fondamental et essentiel pour leur construction qu'est leur identité sexuelle. «Je suis un petit garçon, parce que je suis comme mon papa.» «Je suis une petite fille, parce que je suis comme ma maman.» «Voilà ce que je serai, quand je serai grand»: il s'agit d'éléments fondamentaux, et lorsqu'on dit aux gosses que leurs parents leur ont menti sur un point aussi fondamental que leur identité intime, on se fout de la gueule du monde. On est en Union soviétique ! Je vous demande donc, chers collègues, de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat en exigeant un rapport un tant soit peu sérieux compte tenu de la gravité de la situation.
Mme Lara Atassi (Ve). Madame la présidente, en premier lieu, j'aimerais me joindre aux félicitations pour votre élection. Je n'ai pas encore eu l'occasion de le faire.
J'aimerais ensuite répondre à M. Nidegger qui, dès que quelque chose ne lui plaît pas, évoque l'Union soviétique. Peut-être est-il nostalgique de cette époque. Je tiens à rappeler que les cours d'éducation à la vie affective et sexuelle représentent un droit des élèves et qu'ils ont le droit de recevoir une éducation. Oui, le Conseil d'Etat s'occupe d'éducation, un département entier est même dédié à cette question. L'éducation comporte l'apprentissage du vivre ensemble, et le vivre ensemble, l'apprentissage de l'interaction avec les autres: ça comprend les notions de consentement, de bonnes relations avec les autres sexes, le fait d'éviter les injures et comportements sexistes ainsi que de tolérer les identités et attirances sexuelles différentes des siennes. Il s'agit d'un enseignement complémentaire à celui des parents; les parents enseignent quelque chose, qui peut être très varié selon les familles, et l'école rappelle qu'il faut tolérer tout le monde, c'est tout à fait normal. Je remercie le Conseil d'Etat d'avoir rappelé ceci dans sa réponse. Merci. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Le groupe PLR ne pensait pas devoir prendre la parole sur ce sujet, d'autant plus que ça fera l'objet du point 30 de l'ordre du jour, où l'on aura à traiter d'un projet de loi et d'une motion. Le discours de M. Nidegger contient beaucoup de fantasmes, qui ne sont pas en lien avec la réalité. A la commission de l'enseignement, nous avons pu nous pencher sur ce sujet; nous avons auditionné les personnes chargées de la politique de la promotion de la santé, de la prévention et de l'éducation à la vie affective au sein de l'Etat, et je dois avouer que nous avons été très convaincus par le travail qu'elles effectuent pour nos enfants, notamment sur les questions de prévention d'infections sexuellement transmissibles, sur celles de la pornographie et des réseaux sociaux. Des gens nous ont convaincus par leur message nuancé d'à quel point nos enfants ont besoin de cet accompagnement au cours de leur vie, que celui-ci les structure et leur permet d'éviter les dangers que l'on peut trouver en particulier sur les réseaux sociaux, mais plus généralement dans la vie. A ce titre, nous approuvons le rapport du Conseil d'Etat qui, à mon sens, a parfaitement répondu aux craintes des pétitionnaires. Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Matthieu Jotterand (S). Le groupe socialiste ne pensait pas non plus prendre la parole sur cet objet, mais il souhaite saluer la posture de responsabilité dont fait preuve le PLR à la réception de ce rapport. Attitude qu'il n'a pas toujours eue ces derniers temps par rapport à ces sujets qui suscitent en effet, comme on l'a souligné, le fantasme total de prétendus lobbys qui voudraient attaquer les enfants. Les propos de M. Nidegger à ce titre-là sont assez déplorables, dans le sens où ils essaient de monter en épingle les craintes d'une partie de la société pour le développement des enfants. Ces craintes sont légitimes, mais elles doivent être calmées et dissipées par l'éducation, par l'explication, par la science, et non par l'obscurantisme prôné par l'UDC dans son intervention.
Je rappelle que la suppression de l'éducation affective et/ou sexuelle veut dire très clairement une augmentation des infections sexuellement transmissibles et des violences sexuelles. Il est aussi question d'établir les notions du consentement, de tout ce genre de chose là. Ce fantasme permanent exprimé par M. Nidegger et l'UDC est vraiment susceptible de mettre à mal nos enfants, et il y a là un risque. C'est pour ça qu'aujourd'hui il ne sera heureusement pas suivi, et nous nous en réjouissons.
Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. J'interviens brièvement, car je constate que l'on pourra vous donner toutes les réponses que l'on veut, tenter de vous rassurer comme on peut, vous continuerez à croire ce que l'on vous a dit, à savoir que l'Etat serait en train d'instiller le doute chez les enfants en leur demandant de se questionner. C'est faux, ce n'est pas du tout ce qui est écrit dans le rapport. On vous explique ce que l'on fait, mais je crois que finalement, on n'arrivera jamais à vous rassurer. Nous avons besoin de prendre soin de ces enfants, nous avons besoin d'intervenir pour... Il s'agit de cours d'éducation en vie et santé sexuelles et affectives, nous ne sommes pas du tout en train d'instiller le doute.
J'aimerais aussi dire que nous présentons à nos élèves un programme très important, la lutte contre les «fake news», et je pense que vous pourriez vous en inspirer, parce que vous vous fondez sur des éléments qui n'ont jamais été démontrés. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la pétition 2210 est rejeté par 70 non contre 14 oui.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la pétition 2210.
Premier débat
La présidente. J'ouvre le débat sur le PL 13581-A (catégorie III) en cédant la parole à M. Blondin.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vais être bref. Ce texte relatif à la Fondation Phénix était initialement classé en catégorie IV. Or, lors de la séance de lundi avec les chefs de groupe, nous avons décidé de le classer en catégorie III, et ce uniquement pour vous demander aujourd'hui un renvoi en commission. Nous avons en effet reçu après la rédaction du rapport et son dépôt des informations importantes qui nécessitent une audition supplémentaire de ladite fondation. Je vous remercie donc de répondre favorablement à la demande de renvoi de ce projet de loi à la commission des finances. Merci.
La présidente. Merci bien. Je lance le vote sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13581 à la commission des finances est adopté par 77 oui (unanimité des votants).
La présidente. Nous poursuivons avec la M 2925-B (catégorie III), au sujet de laquelle la parole n'est pas demandée.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2925.
La présidente. Nous arrivons à la M 2750-B (catégorie III). La parole n'est pas demandée.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2750.
La présidente. Au point suivant figure la M 2883-C (catégorie IV).
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2883.
Débat
La présidente. Nous traitons à présent la M 3007-B (catégorie III). La parole échoit à M. de Rougemont.
M. Philippe de Rougemont (Ve). Merci, Madame la présidente. Je vais vous proposer un exercice: nous placer avant l'arrivée de ce projet d'accélérateur géant du CERN. Le Conseil d'Etat et le Grand Conseil votent plusieurs résolutions et projets de lois dans le but de réduire notre consommation d'énergie et d'augmenter la part d'énergie renouvelable dans notre mix énergétique. En outre, on mène une politique de protection des surfaces d'assolement pour un approvisionnement suffisant autant que possible, aujourd'hui et à l'avenir, ainsi qu'une politique visant à réduire la masse de déblais générés par nos multiples travaux, notamment en réduisant le nombre de places de parking souterraines, en réduisant la surface de fondations quand on construit un immeuble, en augmentant la pleine terre, etc.
Vient ensuite le projet de méga-accélérateur du CERN. Qu'est-ce qui se passe ? Avec les chiffres fournis par le CERN lui-même sur l'impact de ce projet, on constate que s'il devait se réaliser, on ferait littéralement exploser les politiques cantonales relatives à la consommation d'énergie, au volume de déblais provenant des chantiers et à la protection des terres agricoles. Comment l'expliquer ? Analysons un peu.
On peut penser que le Conseil d'Etat, qui souhaite répondre favorablement à la motion et qui indique faire tout ce qui est en son pouvoir pour favoriser la réalisation du projet du CERN, est obnubilé par une notion déplacée du prestige technologique - or, la recherche scientifique peut aller dans un autre sens que celui de la «Big Science», qui a d'immenses impacts. On peut supposer que le gouvernement est fasciné par les dizaines de milliards d'euros d'investissement direct dans le canton de Genève. Pour le canton le plus riche du pays le plus riche au monde, je ne sais pas s'il est nécessaire d'aller au-delà des 12 ou 13 milliards de rentrées fiscales que l'on a. Alors qu'est-ce qui reste ? La fascination de se voir associé à un prestige qui, à mon avis, est très dépassé quand on regarde les impacts.
Arrive ensuite, fin mars, le rapport du CERN intitulé «Rapport de faisabilité». Quand on se penche sur ces centaines de pages, ce que l'association Noé 21 a fait, on lit une myriade de constats établis par le CERN lui-même conduisant à la conclusion de la non-faisabilité. Il faut des supraconducteurs: oui, on parviendra à les trouver. Il est nécessaire de parvenir à une température de -273 degrés sur 92 kilomètres: on fera des découvertes, on y arrivera. L'équivalent de trois pyramides de Khéops de déblais sera généré: on trouvera une solution. La consommation d'énergie explosera: oui, mais on va trouver des énergies renouvelables - ce qui veut dire que l'on accaparera la production en énergies renouvelables de la grande région de Genève, voire bien au-delà, pour nourrir ce monstre.
Tout cela m'amène à vous demander de renvoyer au Conseil d'Etat sa réponse, car elle n'est pas responsable et va à l'encontre de nos politiques principales. Je vous remercie de votre attention.
M. Marc Falquet (UDC). Le PLR a déposé ce texte; il est en faveur de cet objet, car il voit de l'argent, mais on peut discuter d'autres éléments liés à cette motion que l'argent.
Compte tenu des invites, je me demande si on a le droit de donner son avis. Une invite contient en effet la formulation suivante: «[...] dissiper les craintes diffusées par certains milieux dont l'objectivité est loin d'être la principale qualité». Ça signifie que si l'on s'oppose à ce projet - notre collègue en a expliqué à juste titre tous les désavantages -, on n'est pas objectif. Alors soyons objectifs !
Est-ce qu'il s'agit d'un projet démocratique ? Non, on n'a rien à dire à ce sujet, on veut nous imposer ce projet - un mégaprojet ! - dont même les scientifiques doutent: ils ne savent pas vraiment à quoi il va servir. Je pense qu'aujourd'hui, la population a d'autres besoins, d'autres demandes, et d'autres nécessités se font sentir, il y a des défis dans tous les sens dans la société, et selon moi, ce n'est pas le moment de chercher l'infiniment petit avec des milliards provenant du contribuable en détruisant les terres agricoles, en bafouant la société à 2000 watts - il faudrait parler d'une société à 2 millions de watts à Genève, si l'on réalise ce projet.
On doit s'y opposer fermement. C'est un projet dépassé, de la technologie de l'ancien siècle ! C'est totalement dépassé ! Des physiciens m'en ont parlé. Je ne vais pas vous redire l'histoire de l'avion qui entre en collision, mais un physicien me l'a expliqué: on fait décoller deux avions pour qu'ils entrent en collision et lorsque les débris sont tombés au sol, on les analyse pour essayer de comprendre comment l'avion était construit. C'est dire la stupidité du système ! Et c'est un éminent physicien qui m'a dit ça !
Même les physiciens vont renoncer à ce projet. Il ne faut pas avoir peur de le critiquer. On dirait qu'on est enfermés: ne surtout pas critiquer, tout le monde est d'accord. Non ! Il y a beaucoup de critiques, ce projet est dépassé, il va contre tous les objectifs en matière d'écologie, d'énergie, dans tous les domaines. En matière d'énergie, il nous bouffe la consommation d'électricité de toute la région, soit de 700 000 habitants. Est-ce que c'est un projet innovant, ça ? Non ! C'est un projet dépassé ! Il faut donc s'y opposer fermement. Tant pis, l'argent se fera ailleurs, pour le bien de la population, il existe des besoins en matière de santé, d'innovation, en matière de technologies propres. Des ruptures technologiques doivent être effectuées, mais pas ce projet. De grâce, renvoyons ce rapport au Conseil d'Etat. Merci beaucoup.
M. Thierry Cerutti (MCG). Ce projet FCC pose problème aussi pour le groupe MCG. Il est ultra complexe, et la logistique d'évacuation des matériaux excavés est incomplète, de même que la consommation d'énergie et la manière de réduire la consommation. Cela reste des problèmes d'«engineering», et finalement, à grand renfort de moyens financiers, on pourrait y arriver.
Néanmoins, est-ce que de tels investissements sont justifiables ? En d'autres termes, est-ce que les résultats scientifiques espérés avec la construction d'une telle machine sont si fondamentaux pour notre société ? Comme la découverte du boson de Higgs, avec la construction du LHC. En l'occurrence, la communauté scientifique ne peut en aucun cas garantir que l'on fera une formidable découverte, car aucune prédiction théorique ne nous indique le chemin à emprunter.
L'argument de la direction générale est que si nous ne le construisons pas, ce seront les Chinois. L'argument est peut-être un peu léger lorsqu'on parle d'un investissement de 25 milliards et plus. En outre, on ne sait pas construire les aimants supraconducteurs; on a atteint la limite avec le NbTi, et la recherche n'est pas assez avancée pour établir un échéancier des solutions. Enfin, même si on ne devait pas apporter le financement et qu'on se convainquait que c'est nécessaire de construire une telle machine, le CERN n'a pas le personnel pour la construire: il manque des milliers de personnes ultra-qualifiées pour réaliser un tel projet, mais aucune instance ne les a, pas même la Chine. Il faudra que les experts actuels, incluant les retraités, forment au CERN un nombre très important de personnes. C'est possible avec le temps, mais on ne parle alors plus de 25 milliards, mais probablement du double du budget indiqué, soit près de 3 milliards pendant vingt ans, en plus des 25 milliards indiqués. Ces montants sont complètement inacceptables. Pour ces raisons, le MCG propose, de même que Marc Falquet, de ne pas soutenir ce projet et de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat.
M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, laissez-nous nous extasier devant de grands projets que l'humanité ne conçoit pas souvent. Comme l'a fait le plus petit collisionneur, actuellement en service, le grand collisionneur du CERN montrera comment trouver les origines du monde. Ce n'est pas une découverte anodine, mais tout à fait majeure.
On nous a dit que si la Chine reprenait le projet, ce ne serait pas grave. Pour ma part, je pense que ça le serait, car ça voudrait dire que nous avons abandonné ce projet, que Genève a abandonné ainsi deux mille physiciens du CERN et que, par conséquent, la Genève internationale a reçu un méchant coup.
Trouver l'origine du monde est un défi auquel nous essayons de faire face depuis de nombreuses décennies; de grands pas ont été faits et on a montré que la technologie utilisée, à savoir celle du collisionneur, peut encore déboucher sur de grandes découvertes physiques.
Il y a en outre le fait que mener à bien un grand projet comme celui-là a un côté enthousiasmant pour tous ceux qui croient dans le monde, qui croient dans la science et feront en sorte que celle-ci puisse répondre aux grandes questions qui nous animent maintenant. Je vous remercie.
Mme Christina Meissner (LC). Madame la présidente, félicitations pour votre élection - c'est la première fois que je prends la parole après celle-ci.
Je ne peux pas m'empêcher de réagir à la réponse du Conseil d'Etat. Vous transmettrez à M. Barbey que l'extase viendra non pas de la découverte de l'origine du monde, mais de la sauvegarde de notre planète, parce qu'aujourd'hui, c'est bien notre futur qui est en jeu - je ne répéterai pas les arguments déjà avancés. Nous sommes face à une urgence, et nous avons les moyens technologiques et scientifiques et l'argent pour sauver notre planète et notre humanité. Voilà la priorité aujourd'hui. Le boson de Higgs attendra ! Il attendra des temps meilleurs, qui viendront si nous faisons ce qu'il faut aujourd'hui, sinon ils ne viendront pas.
Aux arguments avancés, j'aimerais en ajouter un dernier, l'argument démocratique. Comment se fait-il que le gouvernement nous prive, nous, le parlement, mais aussi les citoyens de Genève, de notre capacité de décider dans le cadre de la planification directrice cantonale en demandant à la Confédération de faire de ce projet ce qu'on appelle un plan sectoriel, c'est-à-dire ce qui existe pour l'aéroport - les décisions sont prises au niveau de la Confédération et non pas du canton ? Comme ce sujet ne figurait pas dans cette motion, je me suis permis de déposer une question écrite urgente qui va dans ce sens. J'espère bien avoir les réponses à cette question qui est quand même fondamentale dans un pays et un canton démocratiques. Il faut bien sûr renvoyer au Conseil d'Etat sa réponse: la prochaine sera peut-être meilleure. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Madame la députée. J'ouvre la procédure de vote.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 3007 est adopté par 43 oui contre 24 non et 11 abstentions.
Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 3007 est donc rejeté.
Débat
La présidente. Nous continuons avec la M 2792-B (catégorie III). Monsieur Jacques Jeannerat, vous avez la parole.
M. Jacques Jeannerat (LJS). Merci, Madame la présidente. Cette réponse du Conseil d'Etat sur la motion demandant un contournement de Soral ne satisfait pas le groupe LJS. Dans ce parlement, cela fait plusieurs mois qu'on traite des problèmes rencontrés par les villages qui touchent la frontière. La dernière fois, on nous a parlé d'une feuille de route signée par tous les acteurs du domaine. Rappelez-vous, il y a six ou huit mois, une motion qui concernait l'ensemble de ces petites douanes avait été largement amendée par la commission des transports, justement en raison de l'existence de cette feuille de route.
Cependant, pour les villages qui sont traversés notamment par les frontaliers le matin et le soir, la situation reste problématique. Cette feuille de route permet d'aller de l'avant et aidera les villages concernés, mais il reste le cas isolé de Soral, qui est vraiment dramatique.
En commission, une majorité assez confortable s'est créée pour travailler sur l'évitement de Soral en utilisant des routes et des chemins agricoles existants - c'est ce que demandait la motion. Nous sommes insatisfaits de la réponse donnée par le Conseil d'Etat, qui nous renvoie simplement à cette feuille de route.
Cette dernière est bien pour les traversées de Jussy, de Meinier, de Chancy, mais à Soral, le problème est beaucoup plus important, voire dramatique. Il s'agit pour ce parlement de marquer la volonté d'étudier à fond un contournement de Soral, raison pour laquelle nous demandons que ce rapport soit renvoyé au Conseil d'Etat: qu'il se penche véritablement sur la possibilité d'un contournement de Soral sans créer de nouvelles routes, mais en utilisant des infrastructures qui existent déjà. Merci.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, précédemment, deux motions concernant le contournement des villages ainsi que la fermeture des petites douanes avaient été traitées conjointement par la commission des transports et par ce Grand Conseil. Notre parlement avait décidé de renvoyer la motion dont nous débattons au Conseil d'Etat et la deuxième en commission dans le but d'approfondir les discussions, notamment afin que le gouvernement explique ce qu'il entendait mettre en oeuvre pour réduire la circulation et les nuisances qui en découlent dans les petits villages, en particulier ceux qui jouxtent la frontière.
Le Conseil d'Etat nous a présenté ses travaux, qui comprennent des mesures différenciées tenant compte des spécificités de chaque secteur de notre canton. Ces mesures sont plutôt de type régulation de circulation, encouragement au transfert modal et au covoiturage, avec des plans d'actions relativement développés et élaborés en collaboration avec les communes, y compris les communes françaises frontalières. Je pense qu'on doit laisser au Conseil d'Etat la possibilité de poursuivre ces discussions et réflexions.
D'ailleurs, une majorité de la commission des transports a reconnu que les mesures engagées par le département allaient dans la bonne direction et étaient suffisamment concrètes et solides pour que sur l'autre motion, la majorité de la commission des transports - je crois même l'unanimité - décide de recommander la prise d'acte.
Je ne pense donc pas qu'il soit opportun, concernant cette deuxième motion, qui est en quelque sorte la petite soeur de la première, de renvoyer une nouvelle fois au Conseil d'Etat son rapport. Il a pris conscience de l'ampleur du problème et formule des propositions élaborées en concertation avec les différents acteurs. On doit maintenant laisser le temps et la chance à ces mesures de produire leurs effets, c'est la raison pour laquelle je vous recommande de ne pas renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Christian Steiner (MCG). Ma préopinante a fait une liste de tout un tas de choses et de solutions, mais elle en a oublié une, qui permet, en ce qui concerne le trafic, d'arriver à peu près au même résultat que pendant les vacances, soit 6% ou 7% de trafic en moins. Elle est simple, mais on ne veut pas en parler, elle s'appelle la préférence cantonale. Ça, c'est la première solution. Si on engageait, allez, la moitié des 15 000 demandeurs d'emploi genevois, la conséquence sur le taux de transport individuel des frontaliers, qui est de 80%, serait qu'il y aurait entre 5000 et 6000 voitures de moins, ce qui améliorerait la situation, notamment pour les habitants de Soral.
Pour le reste, nous dire qu'il n'y a pas de solution, ce n'est pas vraiment une réponse satisfaisante. Le MCG propose donc le renvoi de cet objet au Conseil d'Etat afin qu'il trouve une solution digne de ce nom pour les habitants soumis à un trafic incessant, du lever au coucher du soleil. Merci.
Mme Christina Meissner (LC). Je serai brève. Je ne l'avais pas tout de suite réalisé, mais il y a dans cette réponse quelque chose d'extraordinaire, c'est que le Conseil d'Etat explique ne pas être favorable à l'utilisation des voies existantes pour réaliser ce contournement de Soral pour la raison que cela empiéterait sur la zone agricole en diminuant les quotas de la surface d'assolement du canton ! Il faut faire un lien avec le CERN, dont on vient de parler, et rappeler que pour ce projet-là, c'est un empiètement de 50 hectares qui sera demandé ! Par conséquent, excusez-moi, mais je trouve cet argument un peu risible, étant donné que ces petites routes pourraient être utilisées, en tout cas comme situation transitoire. Pour ma part, je suis favorable au renvoi de cette réponse au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Madame la députée. Je lance la procédure de vote sur la demande de renvoi au Conseil d'Etat.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2792 est rejeté par 45 non contre 39 oui.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2792.
La présidente. Au point suivant figure la M 2964-B (catégorie III), sur laquelle personne ne désire s'exprimer.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2964.
Débat
La présidente. Nous nous penchons maintenant sur la M 2982-B (catégorie III), et je cède le micro à M. Matthieu Jotterand.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, quelques mots pour vous dire que cette réponse du Conseil d'Etat, comme apparemment d'autres aujourd'hui, déçoit certains et certaines d'entre nous. A Genève, dans le domaine ferroviaire, on a planifié absolument tout trop petit au cours des dernières décennies. On a planifié trop petit pour la gare de l'aéroport, on a planifié trop petit pour l'extension des voies 7 et 8, on a planifié trop petit pour le CEVA, avec la conséquence qu'on se retrouve maintenant face à un bricolage complet. Et puis, on a une nouvelle fois planifié trop petit pour la gare Cornavin, car le trafic grandes lignes ne pourra pas être absorbé par la gare souterraine à deux voies.
Avec la halte de Vernier-Châtelaine, on a l'occasion de desservir un quartier et de désaturer le tram qui passe de l'autre côté. Le grand bassin de population présent dans ce secteur attend cette desserte. D'ailleurs, pour l'anecdote, certains lots du quartier de l'Etang étaient en vente avec l'argument qu'une halte arriverait. Et on a réussi à construire les immeubles en question plus vite que cette halte, ce qui en dit long sur la lenteur du projet ! Il paraît qu'elle arrive dans quinze ans.
Si on doit le faire en plusieurs fois parce que l'on construit trop petit, le coût total ne sera pas plus faible; au contraire, il sera évidemment bien plus élevé. Pour l'instant, c'est une desserte Genève-La Plaine qui est prévue, raison pour laquelle 160 mètres de quai sont suffisants. Simplement, cela nous empêche pour les cinquante ou cent années à venir d'imaginer une quelconque autre desserte, par exemple des RegioExpress entre l'aéroport, Châtelaine, Lancy et Annemasse ou que sais-je. On s'interdit une certaine flexibilité, et on en a un magnifique exemple avec les RegioExpress, qui ont justement des rames trop longues par rapport au CEVA, ce qui nous oblige à réaliser un bricolage complet, alors que l'infrastructure est neuve et devrait être adaptable pour les décennies à venir.
A l'occasion d'un des prochains points, certains groupes vont largement gesticuler au sujet du nombre de travaux en cours - c'est une vraie problématique pour la population, mais c'est une gesticulation parlementaire qui s'annonce; dans ce cas-ci, nous devons quand même souligner qu'en planifiant trop petit à chaque fois, on se condamne à devoir mener davantage de travaux, et plus souvent, parce qu'évidemment, il faut ensuite agrandir, ce qui est très coûteux et problématique pour la population.
Nous souhaitions apporter ce commentaire, mais comme le groupe socialiste n'est pas dans la gesticulation politique, nous prendrons malgré tout acte du rapport. Nous souhaitions que ces éléments soient relevés et qu'à l'avenir, dans les quinze prochaines années, il soit possible de corriger le tir. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2982.
Débat
La présidente. J'ouvre le débat sur la M 2986-A (catégorie III) et passe la parole à Mme Jennifer Conti.
Mme Jennifer Conti (S), rapporteuse. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les dépités... Députés, pardon ! (L'oratrice rit.) Le dossier électronique du patient est un outil fondamental pour améliorer la qualité et la coordination des soins. En Suisse, il existe actuellement huit dossiers électroniques du patient différents. L'un d'eux nous concerne vu qu'il regroupe les cantons de Vaud, du Valais, de Fribourg, du Jura et de Genève. Il est géré par l'association CARA. Depuis sa création, ce projet de dossier électronique du patient a fait l'objet de nombreuses évaluations externes, qui ont toutes mis en évidence des difficultés importantes. Une d'entre elles est le manque d'adhésion: à ce jour, il n'y a que 30 000 dossiers ouverts avec CARA, pour un budget annuel de 12 millions de francs. Une autre difficulté est liée à la complexité de la plateforme, et la gestion de l'association elle-même est à améliorer.
La commission de la santé a consacré huit séances au traitement de cet objet complexe, qui s'inscrit dans un contexte mouvant. Il y a l'enjeu de la protection des données, et la loi fédérale sur le dossier électronique du patient elle-même est en cours de révision pour tenter de sortir ce projet de l'impasse dans laquelle il se trouve. Je rappelle qu'au niveau suisse, c'est à peine 0,8% des patients qui ont un dossier électronique. En parallèle, on vient d'apprendre que La Poste a annoncé la résiliation de son contrat: dès février 2026, elle ne fournira plus l'infrastructure technique du dossier électronique du patient de l'association CARA.
Ce qui ressort des auditions, c'est que la principale source de blocage est le cadre lui-même, qui date d'il y a une dizaine d'années et qui prévoit une organisation totalement décentralisée du dossier électronique du patient. En synthèse, au lieu des huit dossiers que nous avons actuellement, on ne devrait en avoir qu'un seul pour toute la Suisse.
Face à ces difficultés, la commission de la santé a posé la question du retrait de CARA, mais aucun auditionné ne l'a recommandé, faute d'alternative viable. Nous avons donc formulé un amendement dans ce sens. Il est ressorti de nos auditions qu'en attendant une refonte complète de la loi fédérale sur le dossier électronique du patient allant vers une gestion centralisée, il existe plusieurs pistes d'amélioration: renforcer l'interopérabilité, simplifier les interfaces, associer les usagers au développement du dossier électronique du patient lui-même et, bien évidemment, améliorer la gouvernance de l'association.
Pour conclure, Mesdames et Messieurs les députés, la motion amendée à l'unanimité demande un plan d'actions clair et structuré ainsi qu'une stratégie de sortie à prévoir en cas de besoin, pour que le dossier électronique du patient ne reste pas un projet bloqué par ses défauts d'origine, mais devienne enfin un outil utile aux patients et aux professionnels.
Le traitement de cette motion aujourd'hui était extrêmement important, car dès septembre 2025, la commission interparlementaire de contrôle du dossier électronique du patient va débuter ses travaux. L'unanimité de la commission de la santé vous demande donc de voter la motion telle qu'amendée. Je vous remercie.
M. Léo Peterschmitt (Ve). Je vais très rapidement compléter les propos de ma préopinante. Ce qui est ressorti des auditions de la commission, c'est vraiment que le système est désordonné, que la direction part dans tous les sens, ce qui donne l'impression que la situation change toutes les semaines et qu'on navigue dans le brouillard - ce fut aussi bien le cas pour la commission, qui était confrontée lors de chaque audition à une situation différente, que ça l'est pour CARA et le Conseil d'Etat eux-mêmes.
On espère que le rapport de commission, rédigé par Mme Conti, sera lu par les médias, car y figurent de nombreux éléments relatifs à l'historique et à l'avancement du projet CARA. Cela permettra de transmettre à la population les informations nécessaires pour qu'elle soit tenue au courant de ce dossier, qui est quand même relativement complexe et mérite d'être bien compris. Merci.
M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, la démarche est longue et ardue concernant le dossier électronique du patient, mais il faut bien rappeler que l'enjeu est extrêmement important. Le but est effectivement d'avoir un système de communication partagé dans lequel l'ensemble de nos données de patients puissent être rassemblées au même endroit et accessibles à la fois par les médecins qui nous suivent - les médecins de famille - et par les spécialistes chez qui nous serons orientés pour des consultations.
Le but est d'assurer une bonne coordination des soins et de faire en sorte qu'en tant que patients, nous soyons pris en charge en temps et en heure de manière adéquate, et en évitant ce que nous connaissons aujourd'hui, à savoir des fragmentations de la prise en charge et des redondances, ce qui malheureusement impacte négativement la qualité des soins et engendre des coûts importants.
L'enjeu est donc majeur. Mais aujourd'hui, nous partons d'une situation qui est, passez-moi l'expression, un peu comparable à l'âge de la pierre. Pourquoi ? Parce que tous les hôpitaux et tous les médecins ont des dossiers électroniques pour leur pratique, qui ont été développés avec des logiciels différents et qui ne parlent pas forcément entre eux. Pour faire communiquer tous ces différents outils, qui sont très utiles, voire indispensables au travail des médecins, il faut mettre en place ce qu'on appelle l'interopérabilité - un terme un peu barbare qui signifie que ces systèmes d'information parlent entre eux et que n'importe quelle personne qui a des accès au système dans l'intérêt des patients peut le consulter et y ajouter des informations.
La démarche en cours au niveau de la législation fédérale vise à travailler dans le sens de l'interopérabilité. C'est là tout l'intérêt de cette communauté informatique regroupant différents cantons. Cependant, on part d'une situation très éloignée de l'objectif final.
Il y a bien entendu des problèmes de gouvernance qui ne sont pas du tout évidents, et c'est précisément cet élément des difficultés et des failles relatives à la gouvernance que le SAI avait pointé. Cette motion a été adoptée à l'unanimité au sein de la commission de la santé, et le PLR la soutiendra aujourd'hui. Elle a effectivement pour but, comme cela a été dit par la rapporteure de majorité, non seulement de recevoir de la part du Conseil d'Etat un état des lieux de l'existant sur les différents points que j'ai rappelés, notamment par rapport à l'objectif final, mais également de permettre l'adoption des meilleures stratégies possibles pour poursuivre la mise en place de ce projet dans des délais qui, on l'espère, seront raisonnables, tout en garantissant évidemment une maîtrise de la charge financière pour l'ensemble du projet. Pour toutes ces raisons, je me répète, votons cette motion ! Je vous remercie.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Puisqu'il n'y a pas d'autre prise de parole, je lance la procédure de vote.
Mise aux voix, la motion 2986 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 80 oui (unanimité des votants).
La présidente. Nous poursuivons avec la M 3045-A (catégorie IV), que je mets aux voix.
Mise aux voix, la motion 3045 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 80 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
La présidente. Nous abordons à présent la M 3076-A (catégorie III). Monsieur Conne, vous avez la parole.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur. Merci, Madame la présidente. Chers collègues, la commission de la santé n'a pas souhaité que cet objet soit traité en catégorie IV, bien que l'unanimité ait été le résultat du vote final, parce que le sujet de santé publique dont il est question est important. La catégorie III a ainsi été retenue par la commission, de manière à ce que tous les groupes puissent s'exprimer en plénière sur ce sujet.
Je vais laisser les différents groupes prendre la parole, puis, éventuellement, je conclurai avec quelques mots à la suite de ces interventions. Merci.
La présidente. Monsieur Conne, comme nous sommes aux extraits, vous n'avez droit qu'à une seule prise de parole, vous ne pourrez pas vous exprimer à nouveau sur cet objet.
M. Pierre Conne. Même en tant que rapporteur ?
La présidente. Oui, même en tant que rapporteur. Voulez-vous poursuivre votre intervention ?
M. Pierre Conne. Oui, je continue, parce que je sais ce que je voulais vous dire ! (Rires.) Deux choses. La première, c'est que des questions se sont posées quant au fait qu'on dépiste le cancer, mais pas les autres maladies. La raison est qu'il y a encore beaucoup de cancers qui tuent, même si on est actuellement capable de soigner la moitié d'entre eux et que les maladies cancéreuses sont devenues des maladies chroniques avec lesquelles on vit ou dont on guérit.
Malheureusement, toutes les tumeurs ne peuvent pas être dépistées à l'échelle de la population. Il faut pour ce faire que la maladie cancéreuse que l'on veut dépister soit suffisamment prévalente, c'est-à-dire qu'elle touche suffisamment de personnes pour d'une part qu'il y ait un intérêt de santé publique à la dépister et d'autre part qu'on puisse le faire facilement. On sait que les tests de dépistage sont acceptables pour les personnes qui sont en bonne santé et qui n'ont probablement pas du tout de cancer et que ces personnes n'accepteraient évidemment pas de subir des examens de dépistage invasifs et douloureux.
Cela pose donc déjà un certain nombre de contraintes quant au choix des tumeurs qui peuvent être dépistées. Ensuite, lorsque la tumeur est dépistée, quel que soit son stade, il faut qu'un traitement soit accessible. Parce que dépister des maladies pour lesquelles on ne peut pas faire grand-chose, ça n'a pas d'intérêt, ni pour le patient ni pour la santé publique.
C'est la raison pour laquelle la communauté internationale propose un certain nombre de choix et de stratégies qui permettent d'identifier les tumeurs que l'on peut dépister ou pas. S'agissant des cancers colorectaux, cela peut se faire de façon relativement simple. Néanmoins, il y a un passage obligé pour le dépistage adéquat de cette maladie, c'est la coloscopie - je n'entre pas dans les détails -, qui nécessite bien entendu des compétences spécialisées qui, aujourd'hui, ne sont présentes que chez les gastro-entérologues.
Actuellement, nous n'avons pas suffisamment de gastro-entérologues disponibles dans le canton de Genève pour assurer un dépistage précoce sans que s'appliquent des délais qui pourraient le prétériter. C'est la raison pour laquelle nous proposons d'envisager une formation, comme cela existe dans d'autres domaines de la médecine, non pas de médecins mais de techniciens spécialisés dans la réalisation de l'examen, évidemment sous la supervision de médecins spécialisés...
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Pierre Conne. ...de manière à garantir le nombre de coloscopies suffisantes pour aboutir à ce programme de dépistage, sans gaspiller - en quelque sorte - des formations de gastro-entérologues, qui ont quant à eux des compétences beaucoup plus larges. Il est aussi important de pouvoir faire le bilan, car malheureusement, seuls 22% de la population sont dépistés à ce jour. Merci, Madame la présidente, de m'avoir accordé quelques minutes supplémentaires.
Mme Louise Trottet (Ve). Le groupe Vert tient tout d'abord à remercier le député qui est à l'origine de cette motion pour son texte qui touche un sujet absolument fondamental en médecine, à savoir le dépistage du cancer du côlon, dont on sait, comme l'a mentionné le rapporteur, qu'il est efficace lorsqu'il est réalisé et qu'il permet de sauver bon nombre de vies. On sait également que malheureusement, seuls 22% des personnes qui reçoivent une invitation pour réaliser ce dépistage y ont recours - c'est un taux extrêmement faible !
La tâche à laquelle la commission de la santé s'est attelée durant ses travaux sur cet objet visait à mieux comprendre comment renforcer le taux d'adhésion à ce programme de dépistage, qui est absolument plébiscité par l'ensemble de la communauté scientifique.
Comme indiqué par le rapporteur, un début de réponse consiste par exemple à augmenter les capacités de notre canton à réaliser des coloscopies, notamment via la création d'une filière de techniciens en endoscopie. Probablement qu'il faudra du temps pour qu'une telle filière puisse être réalisée, et il y a toujours la question de la clause du besoin pour les gastro-entérologues.
Un autre volet qui n'a pas été mentionné est celui de l'augmentation du taux d'adhésion au FIT, c'est-à-dire la recherche de sang occulte dans les selles. C'est l'autre versant de ce programme de dépistage, qui est quand même beaucoup moins onéreux, moins invasif et qui parle potentiellement à une partie de la population qui n'a pas forcément envie d'aller faire une coloscopie.
Le groupe Vert va donc évidemment voter cette motion - elle a été adoptée à l'unanimité en commission. Je tenais juste à ajouter qu'à mon sens, ce texte n'est qu'un premier pas. Des statistiques de plus en plus alarmantes pointent une augmentation des cancers du côlon chez des gens de 40 ou 45 ans, soit des personnes qui ne sont pas couvertes par ce programme de dépistage. D'autres pays que le nôtre ont déjà franchi le pas et ont baissé l'âge de dépistage du cancer du côlon à 45 ans. Nous espérons que la Suisse et Genève pourront aussi le faire prochainement. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, de quoi parlons-nous dans ce texte, déposé par mon groupe ? Principalement de prévention. En médecine, la prévention est le porte-parole et l'étendard de la santé de demain. Cet objet vient nous rappeler la triste réalité, à savoir que le cancer tue toujours. En matière de prévention, rien ne sert de courir, il faut partir à point. Et aujourd'hui, à point, pour le dépistage du cancer du côlon, c'est quand on atteint l'âge de 50 ans.
Ma préopinante l'a rappelé, seuls 22% des personnes réagissent à ce questionnaire, ce qui est malheureux et triste, parce qu'il s'agit d'un cancer qu'on peut traiter facilement s'il est décelé rapidement, du moins dans la majorité de ses formes. Le message que je délivrerai aujourd'hui est le suivant: s'il vous plaît, quand vous recevez ce questionnaire... Maintenant, c'est vrai que l'examen... Le rapporteur n'a pas souhaité entrer dans le détail et je ne le ferai pas non plus ! C'est un examen relativement simple, totalement indolore, qu'il s'agisse du FIT ou de la coloscopie en tant que telle. Faites-vous dépister, répondez à ce questionnaire !
Le faible taux de réponse à ce questionnaire nous amène à un autre problème de santé publique, celui de l'accessibilité aux soins, de la clause du besoin et de l'accès aux médecins de famille, qui sont actuellement débordés et qui ont de la peine à remplir le questionnaire pour que leurs patients soient pris en charge par l'assurance et que cet examen leur soit remboursé. C'est ce problème d'accessibilité aux soins que soulève aussi ce texte, notamment en ce qui concerne l'accès à la médecine de famille, qui constitue le premier rempart, mais aussi par rapport à l'accès à la coloscopie, au dépistage, à la prévention. Parlez avec votre médecin de famille ou votre médecin traitant !
Je terminerai en vous disant ceci: répondez à ce questionnaire ! J'ai encore beaucoup beaucoup de patients qui, passé l'âge de 60 ou 65 ans, n'ont pas fait une seule coloscopie et chez qui, malheureusement, on découvre des tumeurs un peu trop tard. C'est triste de le rappeler, mais il est parfois trop tard pour faire bien. Donc faites-vous dépister ! Merci de soutenir cette motion.
M. Marc Saudan (LJS). Comme ma préopinante, je tiens à remercier l'auteur de cette motion, qui a effectivement soulevé un problème. Ce n'est pas le programme de dépistage du cancer du côlon qui est en soi un souci, et je félicite d'ailleurs toutes les personnes qui participent à son élaboration et à sa planification. C'est peut-être plutôt un problème de moyens, notamment en ce qui concerne le nombre de gastro-entérologues. Ce programme reste quand même un succès pour le canton en ce qui concerne son application.
Il y a aussi d'autres programmes qui fonctionnent bien, comme celui du dépistage du cancer du sein. Mais il y a des écueils qu'il convient de soulever, notamment celui du remboursement. Il faut savoir que les nouvelles tarifications de remboursement pour les mammographies réalisées pour un dépistage sont nettement moins importantes que celles qui s'appliquent si on fait une mammographie dans le cadre d'un examen standard.
Cela nécessitera évidemment des moyens supplémentaires de la part du canton, qu'il faudra bien sûr voter et soutenir. Par ailleurs, d'autres cancers pourraient rentrer dans des programmes de dépistage. J'espère que le soutien sera large le jour où l'on viendra devant ce parlement pour obtenir des crédits permettant la mise en place de tels programmes. Evidemment, le groupe LJS soutiendra cette motion. Merci.
La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous passons au vote.
Mise aux voix, la motion 3076 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 72 oui (unanimité des votants).
La présidente. Le prochain point est la P 2177-C (catégorie III), qui ne fait l'objet d'aucune demande de parole.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la pétition 2177.
La présidente. Nous enchaînons avec le PL 13577-A (catégorie IV) et procédons directement au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13577 est adopté en premier débat par 68 oui et 1 abstention.
Le projet de loi 13577 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13577 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 69 oui (unanimité des votants).
La présidente. L'ordre du jour appelle le PL 13574-A (catégorie IV). Nous sommes en procédure de vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13574 est adopté en premier débat par 67 oui (unanimité des votants).
Le projet de loi 13574 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13574 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui (unanimité des votants).
La présidente. Nous passons à l'objet suivant, à savoir la P 2239-A (catégorie IV). Je lance la procédure de vote.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (classement de la pétition 2239) sont adoptées par 68 oui (unanimité des votants).
Premier débat
La présidente. Ayant terminé le traitement des extraits, nous reprenons l'ordre du jour ordinaire avec le point suivant: le PL 13578-A, que nous examinons en catégorie II, trente minutes. La parole revient à M. Yves Nidegger, rapporteur de majorité. (Un instant s'écoule.)
Une voix. Il n'est pas là.
Une autre voix. Il va arriver.
La présidente. Il va arriver ? (Un instant s'écoule. Commentaires.) Bon, en attendant le retour de M. Nidegger, nous allons lancer la discussion en commençant exceptionnellement par la minorité. Monsieur Nicolet-dit-Félix, c'est à vous.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Pour cette première prise de parole, qui sera relativement brève, je vais rapidement contextualiser le projet de loi. Vous le savez, Mesdames et Messieurs, le système démocratique suisse (et genevois par extension) est basé sur l'écoute et le respect des minorités, qu'elles soient géographiques, culturelles, religieuses, linguistiques ou politiques. Ce sont les pères de notre Confédération qui, en 1848, lors de l'élaboration de notre première Constitution fédérale, ont institué ce système garantissant la stabilité de nos institutions. A ce titre, le canton de Genève est tout à fait respectueux des minorités et leur octroie un certain nombre de droits.
Cependant, une modeste faille subsiste dans cette architecture de droits, une faille qui se produit - vous vous en êtes aperçus - lorsqu'un référendum a lieu sans récolte de signatures. Ce cas de figure est susceptible de survenir dans deux situations: d'une part, le référendum est obligatoire quand nous, en tant que parlement, décidons de modifier la constitution; d'autre part, une clause spécifique - qui a failli être utilisée hier soir, une fois de plus - permet à notre Grand Conseil, à la majorité qualifiée, d'imposer le référendum automatique sans collecte de signatures.
Il se trouve que dans ces cas, les groupes minoritaires, qui ont voix au chapitre notamment par l'intermédiaire de la brochure de votation - ils disposent du droit de rédiger eux-mêmes leur texte, ce qui est la moindre des choses lorsqu'on défend un avis -, perdent leur capacité à écrire leur propre argumentaire, et on se retrouve dans la situation un peu absurde où c'est le Conseil d'Etat qui doit assumer l'exposé de la position de groupes qui, par nature, sont opposés à la politique du gouvernement.
Il s'agit d'une faille modeste, et ce projet de loi vise à la rectifier grâce à un dispositif tout simple sur lequel je reviendrais si d'aventure - mais j'espère que ce ne sera pas le cas - le renvoi en commission que je vais proposer était refusé. Pourquoi un renvoi en commission, Mesdames et Messieurs les députés ?
Pour la simple et bonne raison que le travail - si on ose employer ce terme - de la commission a été une sorte de mise en abyme de l'irrespect profond régnant à l'égard des minorités politiques dans ce cadre particulier. En effet, pour être bref, l'examen s'est révélé - précisément - extrêmement bref, étant donné qu'après audition de l'auteur du texte (moi-même), le président, qui se trouve maintenant en face de moi, a décidé de mettre aux voix l'entrée en matière sans même que nous puissions nous prononcer quant aux auditions qu'il aurait convenu de mener, et qu'à une courte majorité, cette entrée en matière a été refusée.
C'est un procédé certes légal, mais tout à fait cavalier, peu usuel dans le fonctionnement de notre parlement et ne rendant pas justice à un projet de loi qui posait une question assurément mineure, mais méritant d'être traitée; en tout cas, mes contacts à la DSOV m'ont confirmé qu'ils se réjouissaient d'être auditionnés sur le sujet.
Pour finir, les conjurés étaient tellement mal à l'aise dans cette situation que la seule personne à accepter de prendre le rapport de majorité a été le président lui-même - ce qui est tout à fait contraire à l'esprit de l'article 188 de la LRGC -, celui qui se trouve actuellement face à moi et qui a manigancé toute cette affaire.
Pour l'ensemble de ces raisons, il semble tout à fait normal, démocratique, opportun et juste de renvoyer cet objet en commission pour que celle-ci, sous une nouvelle présidence, puisse accomplir un travail de qualité. Je sollicite donc le renvoi à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
La présidente. Je vous remercie. Monsieur Nidegger, je vous passe à présent la parole; merci de vous exprimer d'abord sur le projet de loi, puis, à la fin, sur la demande de renvoi en commission.
M. Yves Nidegger (UDC), rapporteur de majorité. Oui, Madame la présidente, je vous remercie. C'est donc moi qui aurais manigancé ce coup de la majorité... Nidegger qui devient majoritaire, ce n'est pas de la manigance, c'est du miracle ! (Rires. Commentaires.) Cela doit probablement tenir à autre chose qu'à de la manigance ! Cela tient surtout au fait que la majorité de la commission a été d'avis qu'il n'était pas nécessaire de conduire des auditions, ayant compris que ce projet de loi ne menait nulle part.
Alors je le confesse, il m'est arrivé à plusieurs occasions de proposer ce mode de faire au sein des commissions où je siège, pas seulement comme président, parce que venant de Berne, je trouve un peu bizarre que quand, de toute évidence, un sujet passera à la trappe, connaîtra un destin tragique et que tout le monde l'entrevoit ainsi, car personne ne s'y intéresse, il existe tout de même une sorte de droit constitutionnel, pour celui qui a déposé le papier coupable de poser la mauvaise question, de bénéficier d'auditions: on doit absolument entendre du monde pour se rendre compte, alors qu'on en est déjà convaincus, qu'il ne convient pas nécessairement d'entrer en matière.
J'estime que c'est du gaspillage de l'argent public, nos jetons coûtent tout de même pas mal d'argent. Lorsqu'une majorité de la commission, d'entrée de cause, considère un texte comme médiocre, il me paraît tout à fait justifié démocratiquement de procéder ainsi, et c'est d'ailleurs le cas à Berne - grande démocratie, la Suisse, Monsieur Nicolet ! Usuellement, on entre en matière sur un texte d'abord parce qu'il y a un intérêt, un besoin d'agir, puis, étant entré en matière, on convoque des auditions pour parfaire notre opinion, pour se renseigner, pour aller au fond des choses; ensuite, on commence à exprimer des avis, pour autant que ce soit nécessaire.
Si toutefois, d'entrée de jeu, on pense que c'est une «Schnapsidee», eh bien on ne le fait pas ! En l'occurrence, pourquoi s'agit-il d'une «Schnapsidee» ? Eh bien parce que... Bon, on vit une époque quelque peu particulière. Quand vous prononcez la formule «égalité de traitement», même si celle-ci concerne des textes parlementaires entre eux, il en résulte immédiatement une espèce de distorsion de l'espace-temps et un blocage des cerveaux: le libellé «égalité de traitement» stoppe toute réflexion.
Ici, on voudrait traiter de la même façon les cas où des membres d'un comité référendaire ont lancé un texte et savent pourquoi ils l'ont fait, se sont postés devant les Migros pour récolter des signatures et, de fait, étant les auteurs d'une proposition, bénéficient du droit de défendre cette même proposition ainsi que de contribuer, au moment de la campagne, à l'élaboration des différentes opinions publiées à propos de la votation, et ceux où il n'y a pas de comité référendaire, estime M. Nicolet: on devrait avoir exactement le même dispositif.
On va dès lors opérer de manière égale qu'il y ait un comité référendaire ou une absence de comité référendaire, ce dernier cas survenant soit lorsque le référendum est obligatoire et qu'il n'est donc pas nécessaire d'en lancer un - c'est la loi qui le prévoit ainsi -, soit quand le Grand Conseil décide de soumettre un certain objet au référendum obligatoire.
Partant, que propose M. Nicolet - qu'il faut remercier pour sa créativité, parce que la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil avait un petit peu nettoyé son agenda et, abstraction faite des examens de compatibilité en cas de démission et de renouvellement, en était arrivée à ne plus avoir d'objets en attente ? M. Nicolet, qui se fait sans doute du souci pour nos rentrées financières, j'imagine, puisque nous avons besoin d'accumuler des jetons de présence... (Exclamations.) Oui, tout à fait ! ...a en effet présenté plusieurs textes, cherchant dans les interstices du possible ce qu'on pourrait bien ajouter à la loi actuelle, jusqu'à vouloir, dans le cas d'espèce qui est celui de l'absence de comité référendaire, conserver le droit d'acteurs qui n'existent pas pour l'accorder à d'autres personnes. Et qui seraient ces autres personnes ? Les députés qui, à propos de la loi faisant l'objet d'un référendum, auraient voté contre celle-ci !
Mesdames et Messieurs, la démocratie directe sert à ce que les partis seuls ne fassent pas tout, à ce que le peuple, lui aussi, puisse parfois participer au débat - c'est ainsi que fonctionne le système suisse de démocratie directe, c'est de là que découle le droit de référendum -, à ce que des non-partis, des associations de citoyens, voire un administré seul, aient la possibilité d'intervenir dans le processus et, au fond, d'entrer en compétition avec un parlement qui a adopté une loi s'ils la jugent mauvaise.
Or que fait-on ici ? On déclare: «Comme il n'y a pas de comité référendaire pour cet objet soumis au vote» - dans le cas où, par hypothèse, le référendum serait obligatoire - «nous allons redonner la parole» - une fois de plus ! - «aux partis politiques qui s'y sont opposés, nous allons chercher les députés dans l'hémicycle qui ont voté non.» Mais enfin, c'est extrêmement dangereux ! Moi, par exemple, je refuse à peu près tout; si vous acceptez le projet de loi de M. Nicolet, vous allez m'entendre dans tous les débats ! Puisque je dis non à tout, je posséderai une espèce de droit, comme si je lançais chaque fois un référendum moi-même, de m'exprimer lors de l'ensemble des votations où un comité référendaire n'est pas requis parce que le référendum est soit obligatoire, soit a été décidé par le Grand Conseil !
Voilà, c'était juste pour vous donner une idée de l'oxymore démocratique dont il est question ici. Et comme cet écueil est apparu très vite lors des discussions, une majorité de six membres de la commission a décidé de ne pas entrer en matière; quatre commissaires (issus des partis qui ont lancé le projet) auraient souhaité entrer en matière tandis que les trois restants se sont abstenus. Je vous recommande de ne pas renvoyer ce texte en commission, car pour une fois, nous avons travaillé correctement, c'est-à-dire qu'à mauvaise question, pas de réponse. Merci donc de refuser la demande de renvoi.
La présidente. Merci. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13578 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est adopté par 41 oui contre 39 non.
Premier débat
La présidente. Nous passons au traitement du PL 13245-B, classé en catégorie II, quarante minutes. (Un instant s'écoule.) Je donne la parole à M. Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci beaucoup, Madame la présidente. Ce projet de loi, qui demande une véritable inclusion pour ne pas séparer les enfants différents, a été étudié à de nombreuses reprises par la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, soit durant sept séances du 20 mars au 5 juin 2024.
Ce texte pose un certain nombre de problèmes. Il propose à son article 8, alinéa 3, ce qui suit: «Chaque école du degré primaire doit être équipée pour accueillir une ou plusieurs classes inclusives et spécialisées au sens de l'art. 33A de la présente loi. Le département définit les modalités, après consultation des communes, des groupements de communes et des milieux concernés.» Ce texte contient en outre un principe de proximité à l'article 33A, alinéa 3: «Les classes inclusives et les classes spécialisées sont réparties dans l'ensemble des établissements d'enseignement régulier du canton. Les élèves sont scolarisés, dans le respect de leurs besoins, dans la classe la plus proche de leur domicile, afin de réduire le temps de transport et de favoriser leur inclusion sociale dans leur quartier ou leur région de domicile.» Je dirais qu'il s'agit ici d'un voeu pieux. En effet, tout le monde devrait avoir une école à côté de la maison et il faudrait éviter que les gens se déplacent en transports publics ou que les familles amènent les enfants à l'école.
J'aimerais rappeler que la Suisse a ratifié il y a dix ans une convention internationale qui scelle les droits des personnes handicapées et ancre celui de participer pleinement à notre vie en société. Il faut cependant reconnaître que les statistiques dans ce domaine en Suisse sont mauvaises, y compris s'agissant de l'éducation. Les chiffres datent de quelques années déjà, mais on peut constater qu'au niveau suisse, environ 50% des enfants en situation de handicap sont intégrés à l'école régulière et 50% fréquentent des établissements séparés. Le canton de Genève n'est d'ailleurs pas particulièrement avancé dans ce domaine.
Vous l'aurez compris, on va vers une inclusion complète des enfants dans les écoles, avec des problèmes d'infrastructures et de classes, problèmes pour lesquels il revient aux communes de trouver des solutions dans un délai extrêmement court, ce qui est quasiment impossible. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, si je tiens à prendre la parole aujourd'hui, ce n'est pas pour paraphraser mon rapport, que vous avez toutes et tous lu, bien entendu; une fois n'est pas coutume, permettez-moi de parler un peu de moi pour expliquer mon engagement. Cela vous étonnera peut-être aujourd'hui, mais mon handicap «premier», entre guillemets, n'est pas la voix, mais la vue.
Dès l'école enfantine, mes parents se sont battus pour que je sois un élève comme les autres. Cela ne voulait pas dire faire abstraction de mes besoins spécifiques. A 16 ans, j'en ai eu assez de perdre de vue mon père sur les pistes de ski, et j'ai découvert le Groupement romand de skieurs aveugles et malvoyants, où j'ai pu progresser et apprendre à aimer le ski. Puis, je me suis engagé pour l'inclusion d'aveugles avec d'autres handicaps dans ce groupe - je les ai du reste personnellement accompagnés pendant de nombreux week-ends -, comme mon ami Saroo, dont j'ai modifié le prénom, autiste avec un déficit intellectuel.
A 29 ans, j'ai passé mon brevet d'avocat et l'année d'après, j'ai créé ma propre étude. Cependant, je n'ai jamais cessé de m'engager dans les associations d'entraide de personnes handicapées, notamment pour que chaque enfant soit, selon la formule consacrée par la littérature juridique, préparé à participer à la vie sociale de manière aussi indépendante que ses capacités le lui permettent.
Saroo travaille certes en emploi adapté, mais pour lui, ça signifie beaucoup d'aller skier avec des personnes avec et sans handicap, de sortir fréquemment de son foyer.
J'aimerais aussi vous parler de Luca, dont le prénom a aussi été modifié - ce témoignage figure déjà dans les rapports sur ce projet de loi. Luca est un enfant avec déficit intellectuel, autisme et troubles du comportement, qui fréquente une classe spécialisée dans une école régulière. Sa mère nous dit: «Un jour, je vais au parc avec Luca. Il s'assied sur une des deux balançoires et moi quelques mètres plus loin. Un enfant inconnu arrive, il s'assied sur l'autre balançoire et commence à raconter des trucs à Luca et à lui poser des questions. Luca sourit, mais ne répond pas. Après quelques minutes, l'enfant s'énerve et s'en va. Puis un autre enfant s'assied sur l'autre balançoire. Il salue Luca puis se tourne vers moi et m'explique qu'il est son camarade d'école. Il n'est aucunement dérangé par le fait que Luca ne lui parle pas. Ils font de la balançoire quelques minutes ensemble, puis l'enfant nous salue et part faire d'autres jeux.» A Genève, Luca n'aurait jamais croisé des enfants sans handicap à l'école, et la deuxième partie de cette scène ne se serait simplement jamais produite.
Mesdames et Messieurs les députés, oui des progrès ont été faits: le nombre de places en école séparée n'a plus augmenté depuis 2011, celui des classes intégrées a presque doublé et la co-intervention a été introduite en classe régulière, ce qu'il faut saluer. Nous pouvons et devons poursuivre nos efforts pour que les Luca, les Lucie et tous les autres enfants apprennent ici aussi à vivre ensemble et à faire société.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Cyril Mizrahi. Merci, Madame la présidente. C'est ce que demande la Convention de l'ONU, ainsi que notre projet de loi, qui prend en considération la diversité des besoins et est soutenu par toutes les associations de personnes concernées. Les auditions nous ont montré qu'au Tessin notamment, cela fonctionne depuis des années et ne coûte pas plus cher. Les syndicats et les communes soutiennent le principe, mais ont émis des craintes, que nous devons entendre, au sujet de la transition. Aussi, un amendement, qui mériterait d'être examiné en commission, vous est présenté afin d'en tenir compte.
Mesdames et Messieurs, comme Marjorie de Chastonay hier, je vous demande de tout mon coeur, mais aussi parce que c'est un choix juste et raisonnable, d'entrer en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Monsieur Mizrahi. Demandez-vous officiellement un renvoi en commission ?
M. Cyril Mizrahi. Pas tout de suite, ce sera fait plus tard.
La présidente. Très bien. La parole est à M. Arn.
M. Thierry Arn (LC). Merci, Madame la présidente. Le sujet des enfants handicapés est émotionnel, car il touche à l'éthique et atteint profondément les valeurs de chacune et de chacun. Le groupe du Centre est très attentif à la question des élèves handicapés et des élèves à besoins particuliers, et nous souhaitons mettre le bien-être des enfants au centre du débat. Notre parti est effectivement convaincu que, lorsque c'est possible, il faut tendre vers l'intégration de ces élèves dans des classes d'enseignement régulier.
Pendant les auditions, le DIP nous a montré sa volonté d'avancer le plus possible dans cette direction. En effet, le département a engagé des discussions avec les communes pour tenter de trouver des solutions afin d'augmenter les CLI (classes intégrées) et de les relier le plus possible aux écoles et classes de l'enseignement régulier. A ce propos, lors de la construction d'une nouvelle école, dans le règlement actuel, il est demandé aux communes de prévoir des classes plus petites et adaptées à l'enseignement spécialisé, notamment les CLI, que je viens de mentionner. Cette demande va donc exactement dans le sens de ce projet de loi.
En revanche, le groupe du Centre considère que ce texte va trop loin et est trop contraignant. D'une part, les ratios seraient inscrits dans la loi et nécessiteraient d'engager beaucoup de personnel supplémentaire. Or, d'après des retours du terrain que nous avons, le personnel est déjà sous pression: il connaît une surcharge de travail lorsqu'il s'occupe de ces enfants à besoins particuliers. D'autre part, les communes, chargées de la construction des écoles, nous ont tout simplement déclaré que les délais inscrits dans la loi n'étaient pas tenables; nous savons tous dans cet hémicycle que la construction de nouveaux bâtiments se heurte à toute sorte d'oppositions, même quand il s'agit d'écoles, voire d'ECPS (école de pédagogie spécialisée).
De même, l'amendement déposé par mon préopinant est, à notre sens, trop contraignant, dans la mesure où il vise à instaurer un moratoire sur l'augmentation du nombre d'établissements spécialisés distincts. Je rappelle que la commission de l'enseignement a dû donner un préavis à la commission des travaux concernant le PL 13562 pour la construction et la rénovation de sept ECPS. Afin d'être conséquents avec la position du Centre, nous ne pouvons que nous opposer à cet amendement. Pour toutes ces raisons, le groupe du Centre vous propose de refuser l'amendement ainsi que ce texte.
Mme Céline Bartolomucci (Ve), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, à Genève, comme cela a été relevé précédemment, près de la moitié des enfants à besoins particuliers sont scolarisés dans des établissements spécialisés à l'écart, loin de leur entourage et de leur quartier. Pourtant, comme cela a été également souligné, en 2014, la Suisse a ratifié la Convention de l'ONU relative aux droits des personnes handicapées. Or, celle-ci ne nous laisse pas le choix: elle consacre le droit de chaque enfant à une éducation inclusive au sein de l'école ordinaire, et ce, sans discrimination. Son article 24 est d'ailleurs clair: l'éducation inclusive est un droit, pas une option, pas un objectif vague, juste un droit.
Ce projet de loi s'inspire d'un modèle qui fonctionne, celui du Tessin, mis en place depuis plus de dix ans. Là-bas, les enfants à besoins particuliers ne sont pas écartés du reste de la société, mais sont scolarisés dans des classes inclusives avec un taux d'encadrement adapté. Les résultats sont là: des élèves épanouis, mieux intégrés socialement, avec même de meilleurs résultats que la moyenne suisse aux tests PISA, le Programme international pour le suivi des acquis des élèves.
Ce texte et l'amendement déposé proposent une transition raisonnable: les ressources du système spécialisé séparatif seront réallouées vers les établissements réguliers sur dix ans. Ce n'est pas une révolution brutale, mais une évolution planifiée, pragmatique et humaine. Il est important de le souligner, ce projet ne supprime pas l'enseignement spécialisé, il l'intègre là où il a toute sa place, dans l'école du quartier, avec le voisinage et l'entourage de l'enfant. Les associations de parents comme Autisme Genève l'ont dit avec émotion et conviction, leurs enfants ne veulent pas être mis à l'écart, mais vivre, apprendre et grandir avec les autres. Or, nous avons aujourd'hui les moyens humains, pédagogiques, légaux et financiers pour répondre à cette demande.
L'inclusion ne se résume pas à une ligne dans un rapport, c'est aussi la volonté de dire que chaque enfant a sa place dans l'école avec tous les autres, et par extension, au sein de notre société. Pour ces raisons, les Vertes et les Verts vous demandent d'entrer en matière sur ce projet de loi et de prendre en compte l'amendement déposé. Je vous remercie.
M. Marc Falquet (UDC). Merci à M. Mizrahi pour son témoignage personnel. Je le côtoie depuis des années, et je sais qu'il est totalement honnête dans ses démarches, modéré, et qu'il adhère tout à fait à l'inclusion. L'inclusion n'est pas un terme de gauche, en tout cas pas dans ce domaine, mais c'est véritablement une question de société: en l'occurrence, avec ce projet de loi, nous débattons d'un sujet de société, puisqu'il vise à ce que les enfants à besoins spécifiques ou qui ont un certain handicap puissent intégrer les écoles normales dans des classes normales ou, si ce n'est pas possible, dans des classes spécialisées. Il est vrai qu'à Genève, on est à la traîne: seulement 50% des élèves à besoins spécifiques sont intégrés dans les écoles normales, et ce texte a pour but d'améliorer un peu la situation.
Ce qui est assez cocasse, c'est que tous les auditionnés étaient en faveur de ce texte. Tous ! Le seul bémol a été amené par les représentants des enseignants, qui reprochaient à ce texte de prévoir un délai de transition trop court pour la mise en oeuvre, ce qui a, je pense, poussé la majorité de la commission à rejeter ce projet de loi. Quoi qu'il en soit, tout le monde est d'accord pour inclure davantage les élèves à besoins spécifiques.
L'amendement qui a été présenté et que certains membres de l'UDC ont signé rallonge ce délai à dix ans, comme on l'a dit; le département aura ainsi tout le temps de prendre des mesures sans être stressé et d'aller dans le sens de l'inclusion, qui est vraiment nécessaire maintenant. Au Tessin, le taux d'inclusion est quatre ou cinq fois plus élevé qu'à Genève - on ne sait pas pourquoi, c'est peut-être un état d'esprit à modifier. En ce qui me concerne, et c'est peut-être aussi le cas d'autres collègues de l'UDC, je vais accepter ce texte, mais uniquement amendé. Merci.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Le groupe PLR entend évidemment l'émotion du premier signataire et des familles. C'est bien normal, vu le sujet: il s'agit d'enfants, l'émotion est donc très présente.
Pourtant, nous estimons ce projet de loi trop contraignant. Il contient un aspect dogmatique, puisqu'il vise à ce que chaque école du degré primaire soit équipée pour accueillir une ou plusieurs classes inclusives et spécialisées. Il veut aussi des ratios très rigides, qui seraient fixés dans la loi, de quatre élèves inclus dans une classe régulière. En outre, tant que cette loi ne serait pas mise en oeuvre, il interdirait l'augmentation du nombre d'établissements spécialisés distincts des établissements réguliers, alors que nous savons que dans ce domaine, nous sommes déjà mal et sous-équipés - cette question fait d'ailleurs l'objet d'un projet de loi vigoureusement combattu par le premier signataire du PL 13245, et on le regrette.
Comme vous le savez, c'est la politique du DIP, mais elle a été reprise et amplifiée par la conseillère d'Etat chargée du département, qui veut développer le nombre de classes intégrées et de classes intégrées mixtes. Ainsi que l'a rappelé le premier signataire, le nombre de co-interventions et de classes intégrées a énormément augmenté; il faut le saluer, mais il ne faut pas passer par un projet de loi aussi contraignant, alors que l'on sait les difficultés à mettre en place ces classes, en particulier au niveau primaire, qui relève des communes.
Je tiens également à rappeler que toute situation ne permet pas une inclusion. Je rappelle enfin que, dans la mesure où les communes sont responsables des établissements primaires, l'ACG s'est très clairement exprimée contre ce texte, considérant qu'il était disproportionné. C'est pour ces motifs que le groupe PLR refusera l'amendement proposé par le parti socialiste et le projet de loi. Je vous remercie, Madame la présidente.
Mme Sophie Demaurex (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y a beaucoup de choses à dire sur l'inclusion, et je crois que certaines ont déjà été soulignées, mais voici ce qui me vient en tête: égalité des chances et non-différence, diversité, richesse, respect des différences et des compétences sociales, non-exclusion, non-stigmatisation. Vous avez compris par ces mots-là que ce sujet tient à coeur aux personnes pour qui l'inclusion n'est pas un plus, n'est ni quelque chose d'optionnel ni quelque chose de dogmatique, mais simplement une réalité du quotidien.
Quand vous vous promenez dans la rue, vous remarquez une société la plus inclusive possible, et nous devons retrouver cette société-là dans les établissements scolaires. Il faut donc se mettre activement au travail, parce que le cloisonnement n'est plus dans l'air du temps. Les crèches développent des politiques inclusives. Et après ? On va séparer à nouveau les enfants ? A nous d'imaginer une continuité des pratiques. On développe des emplois inclusifs. Et alors ? Va-t-on créer des périodes de vie, des tronçons, où l'on est inclus, pas inclus, intégré, pas intégré ? Ce n'est pas possible !
Qu'est-ce qui se fait ailleurs? C'est peut-être compliqué de mettre en place des éléments, mais la Suisse en a les moyens. Qu'est-ce qui se fait ailleurs ? Plusieurs pays ont mis en place des systèmes éducatifs qui favorisent cette pédagogie inclusive. La Finlande, souvent citée comme un modèle en la matière: les enseignants y sont formés à différencier la pédagogie afin d'accompagner les enfants qui ont des besoins spécifiques, des écoles offrent des soutiens spécialisés. Le Canada: le Québec a mis en place une approche inclusive, et les écoles proposent des services spécialisés et favorisent l'intégration des élèves dans des classes régulières. La Suède: les écoles sont accessibles à tous les enfants, y compris ceux à besoins éducatifs particuliers, et le système encourage l'adaptation des méthodes d'enseignement. L'Australie a placé l'inclusion au coeur du système à travers des programmes qui soutiennent les élèves à handicap. Il existe aussi une législation qui promeut l'inclusion. Ces pays ont donc tous en commun une législation en faveur d'une approche inclusive.
A nous d'en faire de même en déployant des dispositions légales et en planifiant une mise en oeuvre. A ce propos, compte tenu des remarques de la commission, nous avons déposé un amendement afin d'allonger le délai de mise en oeuvre. Actualisons cette loi, qui doit comprendre des mesures inclusives. Un renvoi en commission permettrait une entrée en matière et un travail autour des dispositions proposées. Si le sujet semble très important pour tout le monde, la loi, du moins comme elle a été formulée, ne répond pas aux attentes et possibilités que tous les partis mettent en avant. Nous vous proposons un renvoi en commission afin de réfléchir à une loi digne de ce nom et actuelle pour un pays comme la Suisse et une ville comme Genève. Merci. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Je passe la parole aux rapporteurs à ce propos, en commençant par le rapporteur de minorité.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. J'interviens pour annoncer que la minorité accepte le renvoi en commission. Je précise que l'amendement que nous avons proposé vise à supprimer l'article 8, alinéa 3, qui a fait l'objet de critiques notamment par le rapporteur de majorité. En outre, et contrairement à ce qui a été avancé, la position de l'ACG était nuancée: elle partageait l'objectif, mais estimait que des correctifs étaient nécessaires.
Je voulais enfin souligner un point, par rapport à mon collègue du Centre. Il n'est pas correct de dire que ce que nous proposons coûterait plus cher. Nous avons en effet amplement démontré que les taux d'encadrement sont les mêmes, qu'il s'agisse... Ça dépend en réalité des besoins des enfants; pour un enfant qui a des besoins donnés, qu'il soit dans une classe spécialisée ou dans un établissement séparé, le taux d'encadrement sera strictement le même. On constate même avec le projet de la construction d'écoles spécialisées que les écoles spécialisées séparées coûtent en réalité plus cher sous l'angle de l'investissement.
Je voulais juste apporter ces quelques précisions, et je vous invite à voter le renvoi en commission. Merci.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. L'amendement prévoit de biffer l'article 8, alinéa 3, qui posait problème à la commission, et de modifier l'article 150, alinéa 3, faisant passer le délai de cinq à dix ans. Je pense qu'il faut accepter le renvoi en commission pour que nous arrivions à trouver une solution et à alléger un peu ce projet de loi, qui va bien trop loin et est trop contraignant. Si tout le monde fait un pas l'un vers l'autre, je pense qu'on pourra trouver une solution en commission. Je soutiens donc le renvoi.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13245 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 54 oui contre 32 non et 2 abstentions.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de faire une pause de vingt minutes. Nous reprenons nos travaux à 16h15.
La séance est levée à 15h55.