Séance du jeudi 22 mai 2025 à 20h30
3e législature - 3e année - 1re session - 2e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Ana Roch, présidente.

Assistent à la séance: Mmes Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Carole-Anne Kast et Delphine Bachmann, conseillères d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Anne Hiltpold et Pierre Maudet, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Michael Andersen, Thierry Cerutti, Alia Chaker Mangeat, Patrick Dimier, André Pfeffer, Charles Poncet, Skender Salihi, Vincent Subilia et Celine van Till, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Darius Azarpey, Anne Carron, Stéphane Fontaine, Gabrielle Le Goff, Patrick Lussi et Daniel Noël.

Annonces et dépôts

Néant.

E 3147
Prestation de serment de la remplaçante de Marjorie de CHASTONAY, députée démissionnaire

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de Mme Uzma Khamis Vannini. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Uzma Khamis Vannini entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)

Madame Uzma Khamis Vannini, vous êtes appelée à prêter serment de vos fonctions de députée au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attachée aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;

- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»

A prêté serment: Mme Uzma Khamis Vannini.

La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)

E 3148
Prestation de serment de la députée suppléante (Ve)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de Mme Clarisse Di Rosa. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Mme Clarisse Di Rosa entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)

Madame Clarisse Di Rosa, vous êtes appelée à prêter serment de vos fonctions de députée suppléante au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attachée aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;

- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»

A prêté serment: Mme Clarisse Di Rosa.

La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Vous pouvez maintenant vous retirer ou siéger, selon les besoins de votre groupe. (Applaudissements.)

E 3144
Tirage au sort de la commission de grâce (15 membres titulaires et 17 membres suppléants) (la présidence du Grand Conseil choisit, en plus, la présidence de la commission parmi les membres du Bureau)

La présidente. Sont tirés au sort:

Titulaires: Mmes et MM. Pierre Conne (PLR), Joëlle Fiss (PLR), Natacha Buffet-Desfayes (PLR), Yvan Zweifel (PLR), Jacklean Kalibala (S), Sophie Demaurex (S), Léna Strasser (S), Louise Trottet (Ve), Cédric Jeanneret (Ve), Christian Steiner (MCG), Christian Flury (MCG), Michael Andersen (UDC), Lionel Dugerdil (UDC), Francisco Taboada (LJS) et Alia Chaker Mangeat (LC).

Suppléants: Mmes et MM. Jacques Béné (PLR), Alexandre de Senarclens (PLR), Céline Zuber-Roy (PLR), Celine van Till (PLR), Leonard Ferati (S), Thomas Wenger (S), Caroline Marti (S), Laura Mach (Ve), Lara Atassi (Ve), François Baertschi (MCG), Danièle Magnin (MCG), Julien Ramu (UDC), Virna Conti (UDC), Stefan Balaban (LJS), Djawed Sangdel (LJS), François Erard (LC) et Jean-Marc Guinchard (LC).

Annonce de la présidence de la commission de grâce: Séance du vendredi 23 mai 2025 à 14h

PL 13158-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi de Cyril Aellen, Alberto Velasco, Pierre Conne, Beatriz de Candolle, Alexis Barbey, Nicole Valiquer Grecuccio, Pierre Nicollier, Glenna Baillon-Lopez, Jean Romain, Adrien Genecand modifiant la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ) (E 2 05) (Pour une justice des baux et loyers efficiente et spécialisée)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.
Rapport de majorité de Mme Dilara Bayrak (Ve)
Rapport de minorité de M. Jean-Pierre Pasquier (PLR)

Premier débat

La présidente. Nous commençons le traitement des urgences avec le PL 13158-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Madame Dilara Bayrak, vous avez la parole.

Mme Dilara Bayrak (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Encore une fois, nous traitons d'un projet de loi somme toute relativement technique et qui touche à l'organisation du Pouvoir judiciaire. Ce texte se concentre sur le Tribunal des baux et loyers et la commission de conciliation en matière de baux et loyers, TBL et CCBL pour les initiés.

En quelques mots, le Tribunal de première instance, auquel appartiennent le TBL et la CCBL, s'est réorganisé. Il se trouve que cette démarche a été menée sans que soient consultés les entités et les partenaires sociaux que représentent la Chambre genevoise immobilière et l'ASLOCA. Ceux-ci fournissent des assesseurs, ce qui permet que des décisions de qualité soient rendues dans ce tribunal, très important à Genève, puisque vous connaissez toutes et tous les obstacles que nous rencontrons en matière de baux et loyers. Dans le domaine du logement et du droit fondamental à avoir un toit, les difficultés sont en effet particulièrement importantes.

Cette réorganisation du tribunal, justifiée par des raisons de meilleure utilisation des effectifs de juges, a eu comme conséquence de pousser certains d'entre eux qui ne le faisaient pas avant à pratiquer dans le domaine des baux et loyers, ce qui a malheureusement aussi induit, selon les partenaires sociaux, une baisse de la qualité des décisions rendues par ce tribunal. En effet, auparavant, c'étaient tout le temps les mêmes magistrats qui pratiquaient ce domaine. Or, avec cette réorganisation, on se retrouve avec des constellations dans lesquelles des juges se mettent à exercer dans ce domaine pour des temps extrêmement réduits.

Les partenaires sociaux ont sollicité leurs élus au sein de ce parlement, à savoir MM. Cyril Aellen et Alberto Velasco, et ont déposé ce projet de loi qui permet de revenir à une organisation assurant une spécialisation du TBL et de la CCBL.

Le consensus auquel nous faisons face est tout à fait inédit: il est très rare de voir l'ASLOCA et la CGI, qui sont des ennemis ou, disons, des adversaires de taille, se mettre ensemble et proposer une solution commune après avoir constaté les mêmes problèmes.

Forts de ce constat, nous avons décidé de créer une sous-commission, puisque nous nous sommes rendu compte lors des premières auditions que le Pouvoir judiciaire et les partenaires sociaux nous fournissaient des versions diamétralement opposées. Nous siégeons dans un parlement de milice, et nous avons eu toutes les difficultés du monde à déceler la version qui était la plus proche de la réalité...

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

Mme Dilara Bayrak. Merci, Madame la présidente. Mais, compte tenu du fait que ces partenaires, qui sont des adversaires, pratiquent au quotidien le domaine des baux et loyers (TBL et CCBL inclus), et des retours qu'ils avaient de leurs assesseurs respectifs, le parlement a donné suite à leurs sollicitations et a créé une sous-commission.

Ensuite, celle-ci a été mise sur pause pendant quelque temps, histoire de voir si la réorganisation proposée par le Pouvoir judiciaire allait confirmer ses effets néfastes, ce qui fut le cas. Ce texte a été déposé il y a de nombreuses années, ce qui nous donne le recul nécessaire pour affirmer haut et fort que la réorganisation du Tribunal de première instance, par les effets qu'elle a eus sur le TBL et la CCBL, ne convient pas, n'est pas adéquate et ne permet pas que soient rendues des décisions de qualité, comme c'était le cas auparavant.

Dans cette situation, le Pouvoir judiciaire, qui réfute toute critique, a quand même décidé de déposer un amendement général au projet de loi afin d'en limiter les effets. Il a indiqué au parlement que s'il devait y avoir un texte, celui-ci devrait uniquement préciser que les juges affectés à la tâche du TBL et de la CCBL la pratiqueraient à titre principal. Cette notion extrêmement indéterminée n'a pas convaincu une majorité de la commission, qui s'est sentie quelque peu flouée.

Face au risque que cette intention du Pouvoir judiciaire ne se concrétise pas et ne soit pas appliquée ainsi qu'elle avait été présentée dans le cadre des débats, la commission a accepté un sous-amendement à cet amendement du Pouvoir judiciaire, afin de préciser ce que voulait dire «à titre principal». Cette modification à l'amendement du Pouvoir judiciaire a été acceptée: cette version du texte prévoit que les juges affectés au TBL et à la CCBL pratiquent cette fonction à hauteur d'une demi-charge à tout le moins.

Cela constitue une notion très claire et permet au TPI - et donc au Pouvoir judiciaire - de concrétiser ce qui nous a été présenté en commission, tout en supprimant la notion indéterminée qui pourrait être appliquée de manière alambiquée, et de donner des règles claires dans ce domaine. Je le rappelle encore une fois, au vu de la crise du logement et du consensus entre les deux entités que représentent la CGI et l'ASLOCA, il était important de donner suite à ces craintes afin que la réorganisation du TPI se fasse de manière correcte et conforme à la volonté du peuple. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Jean-Pierre Pasquier (PLR), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la commission judiciaire et de la police a travaillé pendant un certain nombre de mois sur ce projet de loi; elle aurait pu très facilement aboutir à un consensus et à un vote en plénière en catégorie IV, suite à un traitement aux extraits.

Lors d'une dernière séance, nous nous sommes retrouvés face à l'amendement qu'a très bien présenté la rapporteure de majorité, qui définit en fait avec beaucoup plus de précision le nombre de personnes exerçant dans cette juridiction en fixant une quote-part de demi-charge.

Cela constitue vraiment une nouveauté dans la mesure où cet élément ne figure absolument pas dans la loi sur l'organisation judiciaire. Les seules dispositions similaires qu'on retrouve dans cette loi concernent les pleines charges prévues pour le procureur général, les premiers procureurs ainsi que les présidents et les vice-présidents des tribunaux.

Avec cet amendement, voté par la majorité de la commission, le parlement commencerait à définir de manière très précise qu'une demi-charge est présente dans une des juridictions. Cette nouveauté me rappelle l'ancienne loi sur la police, dans laquelle se trouvait la définition du nombre exact de gendarmes et de membres de la police judiciaire en fonction des différents secteurs.

Pour la minorité de la commission, ça ne va pas. Pourquoi ? Parce que cela revient à restreindre la liberté de manoeuvre du Pouvoir judiciaire en lui imposant des contraintes qui n'existent pas aujourd'hui. Il faut le laisser s'organiser comme il le veut, ainsi que cela est prévu à l'article 25 de la loi sur l'organisation judiciaire, dont je cite le premier alinéa: «Dans les limites de la loi, les juridictions règlent elles-mêmes leur organisation.»

Mesdames et Messieurs les députés, cette petite divergence au niveau de la commission a quand même toute son importance, parce que si nous commençons à définir les qualités du personnel et la manière dont il doit travailler, nous ouvrons une boîte de Pandore au sein de l'organisation du Ministère public.

Cela pourrait entraîner un surcoût et contraindre certains magistrats à quitter ces juridictions par manque d'intérêt dans la mesure où cela ne leur permettrait pas d'exercer dans d'autres domaines. Pour toutes ces raisons, la minorité vous invite à voter l'amendement qu'elle dépose et qui consiste à revenir à la proposition du Pouvoir judiciaire. Cette dernière prévoit que les juges alloués au Tribunal des baux et loyers et à la commission de conciliation en matière de baux et loyers se consacrent à titre principal à cette charge, ce qui permet de laisser au Pouvoir judiciaire la marge de manoeuvre pour s'organiser. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Sébastien Desfayes (LC). Madame la présidente, permettez-moi de vous adresser un grand bravo pour votre élection et pour votre magnifique discours; vous serez une digne successeure du légendaire Alberto Velasco, cosignataire de ce projet de loi avec Cyril Aellen, ce qui prouve l'ouverture d'esprit des deux intéressés.

Eh oui, Madame la présidente, il s'agit d'un texte conjoint de la Chambre genevoise immobilière et de l'ASLOCA, qui ne sont pas des ennemis, contrairement à ce qu'a dit la rapporteure de majorité, mais des partenaires dans l'organisation et le bon fonctionnement du Tribunal des baux et loyers.

Ces deux partenaires sont arrivés à un constat assez simple et réel: le droit actuel n'est plus le droit des années 80, tout est devenu plus compliqué. Fini le temps où un avocat pouvait faire le matin des contrats d'entreprises, l'après-midi du bail, le lendemain du droit de la famille et enfin des droits réels; cette époque-là est révolue. Nous vivons dans une époque de spécialistes, et la spécialisation ne va faire que s'accroître ces prochaines années, notamment au travers de l'intelligence artificielle - mais c'est encore une autre question !

Bref, les exigences du droit ont rendu difficile pour des non-spécialistes la pratique de la charge de juge au Tribunal des baux et loyers face à des avocats qui, eux, sont d'ores et déjà des spécialistes. Alors une spécialisation est effectivement nécessaire, mais il faut aussi laisser aux juges la possibilité de se frotter à d'autres domaines du droit; c'est important pour une bonne justice, mais aussi sur un plan personnel et professionnel pour les magistrats, qui ne doivent pas être enfermés dans des carcans dont ils ne pourraient plus s'échapper.

Je crois que le compromis trouvé par l'amendement général du Pouvoir judiciaire est excellent, il laisse une toute petite marge de manoeuvre au Pouvoir judiciaire. Je pense qu'il faudrait s'en tenir à cette version originale. Ensuite, nous avons reçu un amendement de la part de Mme Dilara Bayrak; nous pourrions vivre avec cette proposition également, même si nous préférons la version originale. Quoi qu'il en soit, le groupe Le Centre votera ce projet de loi. Merci.

Une voix. Bravo !

Mme Masha Alimi (LJS). Ce projet de loi, il faut le souligner, date du 15 août 2022 et a été déposé à la suite de la réorganisation interne du Tribunal civil de novembre 2021, qui a été menée de manière unilatérale et a attribué une charge identique à tous les juges qui siègent en son sein, entraînant dans le domaine très particulier des baux et loyers une dilution des compétences et une dégradation des procédures.

Ce qui est à retenir aujourd'hui, c'est que la commission, après avoir entendu le Pouvoir judiciaire, l'ASLOCA et la Chambre genevoise immobilière, a constaté des positions contradictoires qui, à l'époque, ne lui permettaient pas de se déterminer. Elle a donc décidé de geler ce projet de loi et de laisser le Pouvoir judiciaire dans cette organisation réformée, afin d'en observer de manière pragmatique les effets dans le temps.

En 2025, soit trois ans après cette réforme initiée par le Pouvoir judiciaire, l'ASLOCA, la Chambre genevoise immobilière, l'Association des juristes progressistes et l'Ordre des avocats persistent dans leur démarche consistant à affirmer qu'il est nécessaire de renforcer la spécialisation de la juridiction des baux et loyers. Par ailleurs, l'ASLOCA et la CGI soutiennent toujours ce projet de loi tel quel, constatant que la réorganisation du tribunal ne fonctionne pas de manière optimale.

La commission a également entendu le Pouvoir judiciaire au début de l'année 2025, afin de dresser un bilan. Nous avons reçu des tas de statistiques, mais celles-ci ne déterminent en rien l'efficacité ou l'inefficacité de cette réorganisation interne. Un amendement général au projet de loi a par ailleurs été déposé; il ne nous satisfait pas en raison de son côté vague, qui, à notre sens, ne peut être mesuré efficacement.

Le deuxième amendement proposé est plus précis et permet in fine la garantie d'une meilleure spécialisation des magistrats dans le domaine des baux et loyers. C'est pourquoi Libertés et Justice sociale acceptera ce projet de loi avec le deuxième amendement, qui prévoit que les magistrats exercent leur fonction au Tribunal des baux et loyers et à la commission de conciliation des baux et loyers à tout le moins à hauteur d'une demi-charge. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Yves Nidegger (UDC). Chers collègues, il y a quelque chose d'assez cruel dans le fait de confier à un parlement cantonal le soin de traiter d'une matière que seuls des spécialistes et des gens qui côtoient au quotidien la juridiction des baux et loyers sont aptes à comprendre dans sa dimension concrète. Les partis se retrouvent à devoir se déterminer sur des sujets que, souvent, ils n'ont pas véritablement compris.

Juste deux mots sur l'architecture: le droit du bail, c'est du droit fédéral, régi par le code des obligations. La procédure applicable devant ces juridictions est la procédure civile, qui est aujourd'hui fédérale. Ce qui reste aux cantons, c'est l'organisation judiciaire, et ce qui reste aux juridictions, c'est leur organisation interne.

Ici, par le biais du droit cantonal, on est en train de vouloir déterminer comment, dans le détail - parce qu'il s'agit de demi-charges, de pleines charges et autres -, une juridiction devrait s'organiser en interne. C'est un peu problématique. On est aussi en train de penser...

A un moment donné, il y a eu une réaction, d'un côté de la Chambre immobilière et de l'autre de l'ASLOCA, qui se sont montrées rétives à certaines évolutions de l'organisation de la juridiction. Du fait même qu'historiquement, ce sont elles qui fournissent les magistrats qui y opèrent - parce que ce sont elles qui en font le choix -, elles considèrent un peu cette juridiction comme leur chose, comme une entité qui leur appartient, et estiment qu'il ne faut être imprégné que du droit du bail, à l'exclusion de toutes considérations s'agissant de principes généraux du droit, pour être un bon juge dans ce domaine.

En réalité, le droit du bail, c'est du droit des obligations dans lequel le législateur a choisi son camp; il a considéré qu'il y avait une partie faible, à savoir le locataire, parce que les conséquences d'une résiliation sont pour lui plus graves que pour le bailleur, qui a plus de facilité à retrouver un locataire que le locataire n'en a à trouver un nouveau logement. On a donc orienté le droit du bail en retenant une approche où le locataire peut faire à peu près tout ce qu'il veut sans grandes conséquences et où le bailleur ne peut à peu près rien faire, parce qu'à la moindre erreur, il est sanctionné.

Sont nés de tout cela des juges qui, ne faisant que du droit du bail, ont parfois un peu oublié que les contrats synallagmatiques sont quand même un échange: je vous offre un logement, vous me payez un loyer. Si l'un des deux viole son obligation, eh bien la conséquence est pour ce dernier.

De la part des deux partenaires sociaux qui règnent en quelque sorte sur cette juridiction, il y a eu une réaction à mon sens un peu frileuse consistant à dire que la juridiction évolue dans un sens qui n'est pas le leur. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) J'entends la cloche qui sonne !

La minorité - je relève qu'il s'agit d'une minorité de six voix contre huit - vous propose de refuser cette modification, parce que ceux-là mêmes qui l'ont initiée - vous le remarquerez aux noms des signataires - sont revenus sur leur position avec le temps, lorsqu'ils ont compris ce dont il s'agissait. Laissons aux juridictions le soin de s'organiser dans le détail comme elles l'entendent. La question de la dotation des postes à temps plein ou à demi-charge est une affaire de détails organisationnels; pour le reste, laissons au droit, y compris celui dont nous avons la charge, à savoir l'organisation judiciaire, sa place, qui n'est pas celle-là. En d'autres termes, refusons ce projet de loi.

M. Murat-Julian Alder (PLR). Madame la présidente, au nom de la commission judiciaire et de la police, que j'ai l'honneur de présider pour encore quelques jours, comme en mon propre nom, j'aimerais aussi vous féliciter pour cette très belle élection et vous souhaiter plein succès à la tête de nos travaux pour l'année qui s'annonce.

Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on parle du Tribunal civil, qui, c'est simple, est composé de trois juridictions: le Tribunal de première instance, la commission de conciliation en matière de baux et loyers et le Tribunal des baux et loyers.

Que s'est-il passé ? Il y a trois ans, ce tribunal a décidé de procéder à une réorganisation interne, soit une réallocation de ses propres ressources, précisément dans l'objectif d'éviter de devoir venir nous quémander des postes supplémentaires de magistrats.

Dans le cadre des auditions conduites par la commission, le Tribunal civil a reconnu qu'il avait sous-estimé les conséquences politiques que cette réorganisation allait déclencher. Finalement, c'est dans un cadre très constructif que d'abord en sous-commission, puis en commission judiciaire et de la police, nous avons mené nos travaux sur cet objet.

Le parti libéral-radical est tout à fait conscient de l'évolution de la complexité des affaires civiles, et il ne peut que saluer la réflexion à plus long terme et à plus large échelle sur une spécialisation des différentes juridictions de notre canton, mais il est aussi très attaché au principe de la séparation des pouvoirs et au respect de l'autonomie du Pouvoir judiciaire.

Oui, sur le principe, nous avons une loi sur l'organisation judiciaire, la LOJ, que certains appellent aussi la loi Olivier Jornot, pour une raison évidente, à savoir qu'il en est à l'origine - elle date de l'époque où il était député. Ce texte a la forme d'une loi pour permettre le référendum, mais ça ne veut pas dire que c'est à nous, en tant que députés, d'organiser les juridictions du Pouvoir judiciaire.

Finalement, le Pouvoir judiciaire nous a proposé un amendement, qui s'avère être un compromis et qui a été soutenu par les milieux intéressés. Et c'est à la dernière minute, lors de la dernière séance sur cet objet, que la majorité a déposé un amendement, qui n'a jamais été soumis au Pouvoir judiciaire et dont on n'a jamais pu mesurer les effets. Il ne prévoit pas tout à fait la même chose, mais je vous épargne les subtilités en la matière.

C'est pour cette raison que le PLR, aux côtés des autres formations de la droite - de la vraie droite ! (Rires.) -, vous invite à soutenir l'amendement de M. Pasquier, qui n'est rien d'autre que l'amendement général du Pouvoir judiciaire. Si toutefois le parlement rejette cet amendement, le PLR, qui est un parti constructif, ouvert et respectueux des institutions, ne demandera pas le renvoi en commission et ne refusera pas ce projet de loi. Merci de votre attention.

Mme Caroline Renold (S). Mesdames et Messieurs les députés, cela a été dit, le droit du bail n'est pas un droit ordinaire, mais un droit social qui protège la partie faible et surtout touche au besoin existentiel et au droit fondamental qu'est le logement. Avec un marché du logement genevois extrêmement tendu, la préservation de la paix du logement exige des institutions solides.

Je me permets de faire un peu d'histoire: c'est dans le climat de conflits sociaux des années 30 que les premières commissions de conciliation en matière de baux et loyers ont vu le jour. Elles étaient une réponse à une tension croissante entre bailleurs et locataires, qui existe encore aujourd'hui, dans un canton qui était alors déjà frappé par la pénurie. Le but était clair: apaiser les conflits, permettre le dialogue et éviter l'escalade.

Cette ambition a pris corps en 1978 avec la création d'une juridiction spécialisée, suite à une initiative populaire de l'ASLOCA. Cette institution a survécu à l'introduction du code de procédure civile en 2011, grâce à la mobilisation des milieux intéressés. (Brouhaha.)

La présidente. Un instant, Madame la députée. Je prie les membres de l'UDC de garder le silence. Monsieur Florey, s'il vous plaît ! Merci. Vous pouvez reprendre.

Mme Caroline Renold. Je vous remercie, Madame la présidente. Comme je disais, c'était donc une juridiction des baux et loyers paritaire, composée de magistrats professionnels spécialisés et assistés de deux assesseurs qui représentent d'une part les locataires et de l'autre les bailleurs. Une juridiction rompue au droit technique qu'est le droit du bail et sensibilisée au contexte social du droit au logement et du monde immobilier genevois. Une institution qui a prouvé son efficacité: taux de conciliation extrêmement élevé, rapidité, compétence, spécialisation des juges, dialogue entre les milieux des locataires et immobiliers.

Tout ça jusqu'en 2021, moment où l'équilibre est rompu par une décision gestionnaire du Pouvoir judiciaire, prise sans concertation des partenaires sociaux et qui supprime la spécialisation. Les juges ne sont plus uniquement affectés à la juridiction des baux et loyers, cette charge étant répartie sur l'ensemble des magistrats. La spécialisation est remplacée par une dilution des compétences et une rotation fréquente des membres du tribunal.

Le nombre de juges professionnels siégeant aux baux a triplé, ce qui a d'autant réduit leur spécialisation. Le Pouvoir judiciaire a fait prévaloir une question de gestion technocratique sur une institution établie de la paix du logement, portée par les acteurs du domaine et qui était le fruit d'un choix démocratique.

Comme on vous l'a dit, ce texte était soutenu dans sa version originale par les milieux intéressés, ASLOCA et CGI, qui, pourtant, s'entendent assez rarement sur des projets de lois, avec pour seul but de rétablir l'équilibre qui avait perduré jusqu'alors. Cette proposition continue à être soutenue par l'ASLOCA et la CGI quatre ans après l'entrée en vigueur de la réforme, car celle-ci ne satisfait toujours pas les utilisateurs.

Pourtant, le Pouvoir judiciaire insiste, et la commission judiciaire préfère malheureusement se plier à la gestion du Pouvoir judiciaire plutôt qu'au compromis légitime défendu par les locataires et les bailleurs depuis plus de quarante ans. Le texte que nous votons aujourd'hui est un mauvais compromis; il reprend quasiment l'intégralité de ce que proposait le Pouvoir judiciaire en prévoyant une demi-charge, là où il y avait auparavant une spécialisation complète.

Le parti socialiste votera ce compromis du bout des lèvres et comme pis-aller, mais en sachant que les locataires comme les bailleurs méritent mieux, à savoir le système qui était défendu par les milieux intéressés. Nous vous invitons néanmoins à voter ce projet de loi tel qu'il a été amendé en commission.

Mme Carole-Anne Kast, conseillère d'Etat. Madame la présidente, je vous adresse à mon tour toutes mes félicitations officielles pour votre accession à ce poste important !

Mesdames et Messieurs les députés, j'ai la faiblesse de croire que lorsqu'une solution est jugée un peu moyenne par tout le monde, mais néanmoins acceptable, c'est que l'équilibre parfait a été trouvé.

Alors certes, le Pouvoir judiciaire aurait préféré un peu plus de marge de manoeuvre et les auteurs du projet de loi un peu moins, mais à l'arrivée, nous ne nous battons plus sur le principe de la spécialisation - mis à mal par une décision unilatérale, qui avait certainement ses raisons, mais qui n'avait pas à s'imposer de manière unilatérale aux partenaires de la filière des baux et loyers.

Il est piquant de constater que le processus qui a animé l'excellente commission judiciaire et de la police de notre parlement est absolument représentatif d'une conciliation, comme elle se fait tous les jours en matière de baux et loyers. Nous sommes face à des positions qui se sont rapprochées suite à un dialogue mené en parfaite entente et qui a permis la compréhension des points de vue des uns et des autres. Comme c'est parfois le cas pour le juge professionnel et les deux assesseurs de la commission de conciliation, il en résulte un accord presque abouti qu'il s'agit finalement de boucler.

Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir d'avoir entendu presque dans tout l'hémicycle qu'il pouvait y avoir des préférences en faveur de la solution de la majorité ou de celle de la minorité, mais que, in fine, plusieurs personnes voteraient le projet de loi de compromis tel qu'il ressortirait du vote majoritaire. A mon avis, cela est symptomatique du fait que l'exercice est réussi.

Je n'ai donc plus qu'à vous remercier pour la qualité des travaux de commission, pour l'écoute mutuelle qui a prévalu, notamment entre le Pouvoir judiciaire, les députés et les milieux intéressés, qu'il s'agisse des milieux de défense des locataires ou des bailleurs, et à vous inviter, comme le dit votre serment que nous venons d'entendre, au plus proche de votre conscience, à trouver la meilleure solution de compromis pour ce projet de loi. Merci, Madame la présidente.

La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 13158 est adopté en premier débat par 92 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. A l'article 84, alinéa 2, nous sommes saisis d'un amendement, déposé par le rapporteur de minorité, qui se présente comme suit:

«Art. 84, al. 2 (nouveau)

2 Les juges alloués au Tribunal des baux et loyers et à la commission de conciliation en matière de baux et loyers se consacrent à titre principal à cette charge.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 40 oui.

Mis aux voix, l'art. 84, al. 2 (nouveau), est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 13158 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 85 oui contre 11 non (vote nominal).

Loi 13158 Vote nominal

PL 13651
Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi ratifiant les statuts de la Banque cantonale de Genève (PA 404.00)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.

Premier débat

La présidente. Nous enchaînons avec le PL 13651, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à M. Béné.

M. Jacques Béné (PLR). Merci, Madame la présidente. J'interviens juste pour expliquer, mais Mme Fontanet le fera mieux que moi, qu'il s'agit de la ratification des statuts concernés par la loi 13515 votée le 24 janvier de cette année. Or, la loi nous oblige à revenir devant le Grand Conseil après que les statuts ont été adoptés par l'assemblée générale de la Banque cantonale de Genève. Etant donné qu'ils sont conformes à ce qui a été voté le 24 janvier, je vous recommande de voter ce texte. C'est pour cette même raison que la commission des finances, à l'unanimité, a accepté que ce projet de loi ne revienne pas chez elle et qu'il soit voté en urgence. Voilà, je vous remercie.

M. Laurent Seydoux (LJS). Je serai extrêmement bref. Le groupe LJS acceptera évidemment cette proposition; en outre, il profite du fait que l'on parle de la Banque cantonale de Genève pour rappeler que, suite à la disparition du Credit Suisse, nous comptons sur elle pour soutenir nos petites et moyennes entreprises et, à l'image des autres banques cantonales dans les autres cantons, ne pas oublier les organismes sportifs et culturels de notre canton maintenant que sa situation financière a été assainie. Merci, Madame la présidente.

M. François Baertschi (MCG). Félicitations pour votre élection, Madame la présidente ! Encore ! (Commentaires.) Je peux encore le dire ! (Commentaires.) Je voulais ajouter - je pense qu'il est utile de le dire - qu'il est important de disposer d'une banque cantonale forte à disposition de la population genevoise. Sans doute doit-on encore améliorer... Je sais qu'un effort de communication... Des efforts dans le dialogue avec la population sont menés, mais c'est le substrat de notre économie locale qu'il est nécessaire de développer, ce que fait évidemment bien la banque Raiffeisen, il faut le reconnaître.

Ce type d'organisation financière de proximité est d'une grande importance pour le soutien à l'économie genevoise, à la proximité, et pour notre soutien à nous en tant qu'habitants de ce canton. Les grands ensembles financiers, qui dépendent beaucoup trop des marchés étrangers, représentent en effet une menace. Nous défendons cette vision de la société. Sans en dire plus, le Mouvement Citoyens Genevois vous recommande de voter le présent texte.

La présidente. Merci bien. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 13651 est adopté en premier débat par 91 oui (unanimité des votants).

Le projet de loi 13651 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13651 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 90 oui (unanimité des votants).

Loi 13651 Vote nominal

PL 11715-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Jacques Béné, Gabriel Barrillier, Edouard Cuendet, Jean-Marc Guinchard, Serge Hiltpold, Georges Vuillod, Patrick Lussi, François Baertschi, Jean-Marie Voumard, Stéphane Florey, Michel Amaudruz, Nathalie Fontanet, Lionel Halpérin, Jean Romain, Murat-Julian Alder, Christo Ivanov, Pascal Spuhler, Bénédicte Montant, Patrick Saudan, Danièle Magnin, Vincent Maitre, Francisco Valentin, Jean-Luc Forni, Simone de Montmollin, Jean Sanchez, Pierre Conne, Michel Ducret, Yvan Zweifel, Cyril Aellen, Christian Flury, Bernhard Riedweg modifiant la loi sur les heures d'ouverture des magasins (LHOM) (I 1 05) (Ouverture du dimanche)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de première minorité de M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve)
Rapport de deuxième minorité de Mme Léna Strasser (S)

Premier débat

La présidente. Nous passons à l'urgence suivante, à savoir le PL 11715-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Monsieur Jacques Béné, vous avez la parole.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Dix ans, ce projet de loi a dix ans ! Il a fait souffrir quatre conseillers d'Etat successifs, qui ont tous pensé, avec espoir, pouvoir enfin réunir les partenaires sociaux pour trouver un arrangement, il n'en a rien été. Je vais commencer par un constat, je pense que nous serons nombreux à le partager: le commerce genevois souffre, beaucoup et depuis longtemps.

Il a beaucoup souffert pendant la pandémie; suite au covid, la reprise a été très limitée. Il subit également la concurrence des commerces frontaliers, qui bénéficient d'une flexibilité horaire bien plus grande. Quand je dis frontaliers, ce n'est pas que la France voisine: si vous allez à Chavannes, il y a aussi beaucoup plus de flexibilité, notamment le vendredi soir, quand les Genevois partent en Valais ou dans d'autres contrées suisses. Et puis, il souffre aussi de l'essor de l'e-commerce, qui est, lui, ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Dans ce contexte, l'ouverture dominicale proposée par ce projet de loi, bien que très limitée... On parle de deux dimanches. On a déjà le 31 décembre, qui est officiellement ouvert. On propose d'ouvrir deux dimanches supplémentaires avec les mêmes conditions que celles qui s'appliquent le 31 décembre.

C'est une opportunité, une petite bouffée d'oxygène pour les commerces genevois, une chance de dynamiser un peu notre économie locale et de réduire en partie l'évasion commerciale, surtout juste avant Noël, puisque l'essentiel de ce projet de loi est de proposer une ouverture un dimanche avant Noël et une deuxième à une autre occasion dans l'année, en fonction des activités ou des événements qui peuvent se tenir dans le canton.

L'expérience menée en 2019 et 2020 a été très positive. Il n'y avait pas de convention collective de travail étendue imposée, et ce sont les usages qui s'appliquaient, comme pour le 31 décembre. On a vu des plaques d'immatriculation vaudoises et françaises; ces personnes venaient à Genève pour faire du shopping, ce qui prouve bien que les commerces genevois ont une certaine attractivité et qu'il y a bien un problème quant aux horaires.

Il est prévu que ces ouvertures soient très bien encadrées: elles se feront sur une base de volontariat, il n'y aura pas de dépassement de la durée légale de travail, contrairement à ce qu'on a pu entendre, et les compensations seront même supérieures aux exigences fédérales, puisqu'au niveau fédéral, c'est 50% de compensation, alors que 100% de compensation sont prévus dans ce texte. On voit donc bien qu'il y a aussi un intérêt pour les collaborateurs.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Jacques Béné. Volontiers ! Malgré la volonté populaire, il n'y a pas d'avancée depuis dix ans, parce que la mise en oeuvre reste conditionnée à cette fameuse convention collective de travail étendue, que les syndicats se sont empressés de dénoncer après la votation de 2016, soit au début de l'année 2017, ce dans le but de bloquer toute ouverture dominicale. Ils se sont dit que cela entraînerait des négociations durant lesquelles ils pourraient obtenir plus, afin de bénéficier d'une nouvelle convention collective de travail.

Heureusement, ça n'a pas marché - c'est ce qu'on a déjà dit à l'époque. Pourquoi ? Parce que les petites entreprises ne peuvent pas régater avec ce qui est déjà proposé par les grandes entreprises - Migros, Coop, etc. -, notamment en ce qui concerne la cinquième semaine de vacances, pour ne citer que cet élément, qui est octroyée dans les conventions collectives de ces entreprises. Les patrons des petites boutiques de notre canton n'arrivent malheureusement pas à l'offrir, ayant souvent des revenus inférieurs à ceux de leurs collaborateurs.

A un moment donné, il faut bien essayer de trouver une issue. On avait dit que cette exigence était posée notamment pour pousser le patronat à trouver des solutions. Il veut bien le faire, mais il y a une autre partie, à savoir justement les petits commerces, qu'on souhaite défendre, qui ne veut pas d'une convention collective de travail et qui préfère effectivement conserver les usages.

Si on a mis les usages dans la loi, c'est parce qu'ils correspondent exactement à la convention collective de travail qui avait été dénoncée. Il ne s'agit donc pas de généraliser le travail dominical ou d'augmenter le temps de travail, mais d'autoriser une ouverture très mesurée durant deux dimanches sur l'année, en plus du 31 décembre - ça fait trois dimanches sur les quatre qui sont autorisés au niveau fédéral. Cela ferait notamment le bonheur des étudiants, qui ont de la peine à trouver des revenus complémentaires, ainsi que de tous ceux qui sont sur des listes d'attente pour pouvoir travailler le dimanche.

Je vous remercie d'accepter ce projet de loi. On a bien compris qu'il y aurait un référendum: pour éviter à tous les militants qui ne veulent justement pas de ces ouvertures le dimanche de devoir s'investir en dehors des heures de travail pour aller chercher des signatures, nous avons déposé un amendement prévoyant le référendum automatique, ce qui nous permettrait de régler définitivement, ou en tout cas pour un moment, cette problématique devant la population, que le résultat soit oui ou non. Je vous remercie.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de première minorité. Madame la présidente, à mon tour, je me joins aux félicitations pour votre brillante élection.

Vous le savez, comme le sait cette assemblée et comme le sait notre population, le monde souffre. Il souffre incontestablement des excès du consumérisme. La période de Noël est une sorte d'image hypertrophiée de cette dérive consumériste débridée qui nuit tant à notre environnement et à notre société.

Cette fête, à la base, était une fête païenne qui visait à la renaissance, en créant une sorte de césure pour qu'on se retrouve avec les siens, dans une forme de quiétude. Elle a été transformée par les marchands - chacun le constate - en une espèce de frénésie d'achats contraints socialement, donc inutiles, et bien entendu extrêmement nuisibles, avant tout pour notre environnement.

Ces marchands, on l'a vu à l'instant, ont des entrées dans les parlements - c'est une partie de leur travail -, et ils reviennent avec des coups de boutoir récurrents pour essayer de faire croître cette frénésie consumériste, en particulier durant cette période du mois de décembre, à savoir les semaines qui précèdent les fêtes de Noël.

Le rapporteur de majorité l'a dit, la population a déjà eu l'occasion de se prononcer à trois reprises sur la question, et le projet qui arrive soudain en urgence devant ce parlement est en réalité vieux de dix ans ! On n'a pas très bien compris où était l'urgence vu que ce projet traîne dans les cartons depuis 3655 jours, mais il semble que pouvoir ouvrir deux dimanches de plus par année relève de l'urgence cantonale absolue !

Qu'a dit la population à trois reprises, en 2010, en 2016 et en 2021 ? Son message, Mesdames et Messieurs les députés, a été extrêmement clair, et nul doute qu'elle le réitérera lors du vote référendaire de cet automne ou de cet hiver: elle a dit non, nous ne voulons pas d'ouverture dominicale des commerces, nous ne voulons pas d'élargissement de la LHOM. Le seul vote nuancé a été ce fameux vote de 2016, où la concession a été d'autoriser sous forme de deal, d'arrangement cette ouverture dominicale, à condition qu'une convention collective de travail étendue protège les travailleurs et les travailleuses de ce secteur, qui sont particulièrement précaires.

Il se trouve que les milieux mercantiles, les milieux des marchands n'ont simplement pas rempli la condition qui leur avait été posée par la population. Ils reviennent à réitérées reprises pour dire: «Voilà, il y avait un deal pour cette convention collective de travail, ok, mais on ne peut pas, donc on ne va pas la faire.» Ils réimposent le même texte, sauf qu'ils ôtent tout ce qui en faisait l'intérêt, notamment pour le monde des travailleuses et des travailleurs. Ça ne s'appelle pas de la politique, ça s'appelle du chantage, même du caprice, lorsqu'on parle en termes éducatifs.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Je ne vais pas m'éterniser sur les questions syndicales - mes collègues Léna Strasser et Pierre Eckert mettront en évidence ces points -, mais je vous rends attentifs au fait que ces coups de boutoir se passent à Genève, mais également à Berne, où l'autorisation qui était faite dans la loi fédérale pour quatre dimanches vient de passer à douze. On voit que c'est le mouvement que la droite est en train de suivre, téléguidée par ces marchands.

Nous le disons très clairement: des dimanches d'ouverture, nous n'en voulons pas douze, nous n'en voulons pas quatre, ni deux, ni un; nous irons au référendum et refuserons la clause de référendum obligatoire, parce que nous estimons qu'il est de notre devoir de faire cette campagne de récolte et de défendre notre position, en particulier dans la brochure de votations. Evidemment, nous refuserons ce texte. Merci. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de modification abroge l'article qui conditionne l'ouverture des magasins certains dimanches dans l'année à l'existence d'une convention collective de travail étendue dans la branche du commerce de détail à Genève.

La question de l'extension des horaires d'ouverture des magasins est régulièrement présentée par la droite de notre parlement comme la recette magique pour sauver un commerce de détail genevois en difficulté - c'est vrai qu'il l'est ! Mais cette rhétorique fumeuse masque très mal une réalité en fait bien plus complexe.

Ce ne sont pas les horaires qui poussent les consommateurs à se détourner des commerces locaux, mais la montée en puissance du commerce en ligne et, surtout, l'écart entre les prix genevois et ceux pratiqués en France voisine. Le véritable enjeu réside dans le pouvoir d'achat des ménages et non dans une flexibilisation des horaires des magasins.

Pour la minorité, il faut cesser de s'acharner à imposer des solutions qui ne sont pas efficaces et ne font que précariser davantage les conditions de travail dans ce secteur. Parce que le coeur du problème est bien là: comment est-ce que l'on concilie le travail du dimanche avec une vie de famille, des responsabilités éducatives ou simplement le droit au repos ? Pour nous, cette fuite en avant est inefficace économiquement, mais surtout injuste socialement.

On nous rétorque, comme l'a fait mon préopinant, que ceux qui travailleront le dimanche ne seront que des volontaires qui seront intéressés par ces horaires, parce que, oui, c'est mieux payé que les autres jours, et que ce seront majoritairement des étudiantes et des étudiants. Mais qui sera là pour ouvrir le matin, pour fermer la caisse, pour gérer les équipes ? Et puis comment les professionnelles employées - je parle au féminin ! - pourraient-elles dire non à une sollicitation pour travailler le dimanche alors qu'elles souhaitent avant tout garder leur emploi et ne pas se mettre en porte-à-faux avec leurs employeurs ?

Et si c'est pour mettre du beurre dans les épinards, alors autant améliorer leurs conditions de travail tout le reste de l'année ! Or, le partenariat social dans le commerce de détail est rendu difficile par la fragmentation du tissu patronal, par l'absence d'adhésion à des organisations représentatives et par le refus d'ouvrir la liste des membres de certaines associations, ce qui empêche de vérifier l'application d'une éventuelle convention.

La minorité considère donc que la suppression de la clause de la CCT étendue sans garantie réelle pour les travailleurs et travailleuses est juste inacceptable. On ne peut pas soutenir ce projet de loi, qui affaiblit vraiment le partenariat social, au lieu de le renforcer.

Et puis, refuser l'élargissement des horaires d'ouverture, c'est rejeter une société où le profit passe avant la qualité de vie, c'est affirmer que le commerce local ne se sauvera ni en sacrifiant ses salariés ni en ouvrant deux dimanches de plus par an - mon collègue l'a dit, ce sera ensuite trois, puis quatre, puis cinq, puis six, puis sept, puis huit, puis neuf, puis dix, puis douze ! -, mais en renforçant la compétitivité, par un service de proximité de qualité et des conditions de travail décentes.

Voilà, au fond, c'est une prise de position en faveur d'un modèle de société plus humaine et c'est pour cela que nous vous appelons à rejeter clairement ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que pour M. Béné et moi, ça doit être la cinquième ou sixième votation sur la loi sur les heures d'ouverture des magasins. C'est un peu cyclique finalement, ça revient environ tous les deux ans, à croire qu'il n'y a pas de solution véritable concernant la vitalité du commerce de détail qui résiderait dans les horaires d'ouverture des magasins.

En effet, la loi actuelle accompagne le partenariat social, le met en avant. Si les magasins souhaitent ouvrir trois dimanches par année et le 31 décembre, elle exige que le partenariat social soit mis en oeuvre via une convention collective de travail étendue dans ce secteur.

Il faut nommer les choses telles qu'elles sont: ce texte est un passage en force de la part de la droite du parlement et du Conseil d'Etat. Passage en force sur le partenariat social, passage en force sur le dialogue entre syndicats et milieux patronaux. Il est vrai qu'avec les conditions actuelles, qui nécessitent une double majorité des employeurs et des employés, les milieux patronaux n'arrivent pas à réunir suffisamment de représentants pour pouvoir négocier cette convention collective de travail étendue.

Le vote qu'on s'apprête à vivre ce soir a prétendument pour but de favoriser le secteur du commerce de détail et d'améliorer sa vitalité. Mais le problème actuel du commerce de détail genevois, la raison de sa souffrance, ce ne sont pas les horaires d'ouverture des magasins, c'est le pouvoir d'achat ! Les Genevoises et les Genevois n'arrêteront pas d'aller faire leurs courses en France parce qu'on ouvre deux dimanches de plus par année ou même un peu plus. Ils le font parce que c'est moins cher ! Ce n'est pas une question d'horaire d'ouverture.

Si des Genevoises et des Genevois souhaitent faire leurs courses à toute heure, ils les font en ligne. Or on ne va pas ouvrir les magasins 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour lutter contre le tourisme d'achat sur internet ! Non, en effet, Mesdames et Messieurs, beaucoup d'études ont montré qu'il ne servait à rien d'ouvrir deux ou trois dimanches en plus par année.

La position du parti socialiste n'est pas tant d'être opposé à l'ouverture des magasins le dimanche, elle consiste surtout à souligner que le secteur du commerce du détail souffre de cas de sous-enchère salariale répétés - c'est l'OCIRT qui le relève. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Si tout allait bien dans ce secteur, alors nous serions ouverts aux négociations, mais, en l'occurrence, les conditions de travail y sont mauvaises.

Par conséquent, le parti socialiste n'est pas en faveur d'élargir davantage les horaires d'ouverture des magasins sans compensation majeure, sans garantie claire et avancée pour les conditions de travail des salariés dans le secteur du commerce de détail. Ce sont les raisons pour lesquelles, Mesdames et Messieurs, nous refuserons ce projet de loi et rejetterons également l'amendement prévoyant un référendum obligatoire...

La présidente. Merci, Monsieur le député.

M. Romain de Sainte Marie. ...afin que nous puissions mobiliser davantage lors de la récolte de signatures, puis voter non une énième fois à cette extension des horaires d'ouverture des magasins ! (Applaudissements.)

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Madame la présidente, toutes mes félicitations pour votre brillante élection !

Les aspects légaux et techniques ayant été très bien exposés par les rapporteurs de majorité et de minorité, je n'y reviendrai pas, mais j'aimerais souligner deux choses. Lorsque vous allez le dimanche à l'aéroport ou à la gare Cornavin, devant les grandes surfaces, il y a la queue, réglée par des Securitas, ce qui démontre bien que cela répond au besoin d'une certaine population qui ne peut pas toujours faire ses courses la semaine.

Deuxième élément: Genève est une ville de tourisme et de congrès, dit-on. Il nous arrive assez fréquemment de croiser des congressistes, qu'on reconnaît aisément à leur badge, et certains d'entre eux prolongent leur séjour à Genève, après les travaux du congrès, jusqu'au dimanche soir. Je me demande toujours ce qu'ils font le dimanche, à part prendre des selfies devant l'horloge fleurie ou le jet d'eau; il n'y a rien, aucune activité, de nombreux restaurants sont fermés et les Rues Basses sont totalement désertes, complètement inanimées.

J'ai compris quelles sont les solutions trouvées par les organisateurs de congrès pour ces parties culturelles (pour ainsi dire): ils affrètent des cars, transportent les congressistes et leurs conjoints et conjointes en France voisine et se rendent avec eux sur les marchés qui existent là-bas. Ensuite, ils vont manger à midi au restaurant panoramique du Salève. Tout ça, ce sont des sous qui partent de l'autre côté de la frontière et qui ne reviennent pas à nos commerçants.

Il a été rappelé à juste titre que c'est un serpent de mer: dix ans de travaux, l'usure de quelques conseillers d'Etat, mais également de quatre ou cinq présidents de commission, si mes souvenirs sont bons, dont Mme Strasser d'ailleurs à l'époque. Tout ça pour arriver à un projet de loi qui, finalement, est un texte non consensuel - je suis d'accord, on le constate -, mais qui selon nous est pragmatique, pratique, et qui fournit des solutions avantageuses, tant aux employeurs qu'aux employés. Le Centre soutiendra donc ce projet, et je vous invite également à accepter l'excellent amendement de notre collègue Jacques Béné. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Eckert pour deux minutes.

M. Pierre Eckert (Ve). Comme je n'ai pas beaucoup de temps, j'accélère un peu; Madame la présidente, je ne vous féliciterai pas, parce que je n'ai plus le temps ! (Rires.)

Le PLR est spécialiste de cette pratique consistant à changer le titre d'un certain nombre de lois de façon un peu fallacieuse. J'ai donc moi-même hésité à changer le titre de cette loi en le remplaçant par: «Concurrencer la messe du dimanche», «Pour une consommation effrénée» ou «Précariser les plus précaires». C'est sur ce dernier point que j'aimerais mettre l'accent.

En plus de l'ouverture des dimanches, le projet de loi qui nous est soumis est très problématique, car il ôte tout espoir au personnel de vente, qui ne dispose actuellement pas d'une convention collective de travail (CCT), de pouvoir un jour en bénéficier. En effet, une grande partie de ce personnel, essentiellement féminin, est concernée par cette situation. La loi votée en 2016 subordonnait l'ouverture des dimanches à l'existence d'une CCT, qui aurait concerné l'ensemble de la branche et pas seulement quelques chaînes de grands magasins.

Sans CCT, le personnel se trouve quasiment à poil, si l'on ose dire, couvert seulement par le mince filet de la loi fédérale sur le travail et par les usages genevois. Ces derniers couvrent bien la rémunération, très proche du salaire minimum, la rétribution du dimanche et la maladie, mais rien de plus. Dans une CCT, on pourrait placer bien plus d'éléments pour protéger le personnel, comme le paiement des heures supplémentaires, le traitement des jours fériés ou du travail de nuit, des restrictions pour les heures de travail coupées ou pour le travail sur appel, entre autres.

Avec la loi que vous vous apprêtez à voter, toutes ces possibilités seront perdues pendant un bon bout de temps pour une part importante du personnel, en grande partie féminin, je le répète. C'est la raison supplémentaire pour laquelle les Vertes et les Verts refuseront fermement cette loi qui met en danger le personnel le plus précaire, et pas seulement le dimanche, mais aussi le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi, le vendredi et le samedi, soit tous les jours de la semaine ! Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Vincent Canonica (LJS). Madame la présidente, permettez-moi tout d'abord de vous adresser toutes mes félicitations pour votre brillante élection, en ma qualité, encore pour quelques jours, de vice-président de la commission de l'économie.

Mesdames et Messieurs les députés, soyons pragmatiques; je vais encore le marteler: le commerce genevois souffre, il souffre, et il souffre ! Les enseignes ferment les unes après les autres. Il est devenu courant de se déplacer en France voisine pour faire ses courses le dimanche, parce que tout est fermé à Genève.

Dans d'autres cantons, notamment à Bâle et à Zurich, les commerces peuvent ouvrir le dimanche avant Noël. L'ouverture du dimanche 22 décembre 2024, bien qu'autorisée tardivement, a été saluée par les commerçants. Il est dans l'intérêt de l'ensemble de la population de trouver des solutions pragmatiques.

La gauche essaie de nous faire croire qu'une ouverture supplémentaire de seulement trois dimanches par an pousserait à la consommation de façon excessive et porterait atteinte à la sauvegarde de l'économie circulaire. Mettre en balance un risque de surconsommation avec une autorisation d'ouvrir les commerces trois jours supplémentaires par an, c'est excessif, réducteur et trompeur.

Le consommateur doit rester libre de ses choix, le bon sens et le respect de la dignité humaine doivent l'emporter. L'argumentation de la gauche selon laquelle cela ne bénéficierait qu'aux grandes surfaces ne saurait davantage convaincre. Il s'agit d'une conviction partisane que la réalité du terrain ne confirme pas.

Enfin, la gauche ne saurait pas non plus nous convaincre par la tactique du salami. Ils tombent dans l'absurdité crasse lorsqu'ils reprochent au Conseil d'Etat l'ouverture de ce fameux dimanche 22 décembre 2024, avant les fêtes de Noël, alors que le Tribunal fédéral a refusé que s'applique l'effet suspensif au recours qui avait été déposé contre cette décision sous le prétexte qu'il s'agirait d'une libéralisation massive des horaires d'ouverture.

J'en appelle à la sagesse confédérale helvétique, qui prône l'usage du compromis là où les intérêts des uns et des autres peuvent et doivent être préservés. Ouvrir trois dimanches par an contre une indemnité compensatoire de 100% selon les usages pour ces jours travaillés, dans la limite de la durée hebdomadaire de travail, est une mesure nécessaire pour préserver nos commerces et donner un coup de pouce aux petites entreprises.

Il est grand temps de redonner vie à notre centre-ville, de permettre à notre ville de vivre par elle-même et pour elle-même, de diminuer le commerce transfrontalier et de donner ainsi un signal positif au commerce local. LJS soutiendra ce projet de loi ainsi que l'amendement du PLR prévoyant le référendum obligatoire.

M. François Baertschi (MCG). Ainsi donc, nous avons un rapporteur qui part en croisade contre le consumérisme, tel un fier chevalier; encore devrait-il aller écumer la France voisine, où l'ouverture les dimanches est systématique et a lieu non pas un, deux ou trois dimanches par année ou le nombre que l'on veut, mais toutes les semaines, c'est-à-dire une cinquantaine de dimanches par année. Plusieurs chaînes de supermarchés font cela - je ne leur ferai pas de publicité, ils n'en ont pas besoin et ne le méritent pas.

La véritable croisade qu'il faudrait mener, c'est celle contre les achats de l'autre côté de la frontière; c'est une croisade pour les résidents genevois, dans le but de leur permettre d'exercer un travail de qualité à Genève. Il faudrait également garantir aux entreprises une activité équilibrée et un bon fonctionnement.

Lors des travaux en commission, on s'est rendu compte que le véritable enjeu est d'avoir une ouverture par année. En fait, la loi prévoit deux dimanches par année, afin de laisser une certaine marge s'il y a un événement, mais on parle bien d'un dimanche par année ! Et on fait une histoire gigantesque autour de ça !

On avance maintenant les conventions collectives de travail étendues; il faut savoir qu'elles sont complètement impossibles à réaliser du fait qu'on n'arrive pas à trouver suffisamment d'employés syndiqués et suffisamment d'entreprises représentatives pour remplir les conditions imposées par la loi actuelle.

Il faut donc que nous soyons pragmatiques et que nous nous concentrions sur une loi qui nous permettra de décoincer cette affaire, parce qu'on finit par en avoir assez de ce débat. Il faut voter ce texte et l'amendement, qui permettra qu'un vote ait lieu très prochainement. Nous devons trancher cette question, raison pour laquelle le MCG soutient pleinement ce projet de loi et s'inquiète sérieusement de... (Brouhaha.) ...la France voisine - mon voisin est un peu bruyant !

Une voix. Il a raison, j'allais le dire, Monsieur le président... Pardon, Madame la présidente ! (Rires.)

M. François Baertschi. Remettez-le à l'ordre, Madame la présidente ! Non, je plaisante. Je le répète, nous soutiendrons ce projet de loi, je crois qu'il faut le dire trente-six mille fois parce que beaucoup de gens dans cette république ne comprennent pas l'enjeu de cette loi.

M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, en 2019 et en 2020, certains dimanches ont été ouverts à titre expérimental. Le bilan de cette initiative s'est révélé plus que positif. Les données montrent qu'il ne s'agissait pas simplement d'un report de la fréquentation des autres jours, mais bien d'une fréquentation additionnelle dans les commerces.

D'ailleurs, les documents fournis lors des différentes auditions nous ont également présenté la situation des autres cantons, où certaines zones touristiques permettent des ouvertures dominicales, malgré l'absence de base légale.

A Genève, le tourisme d'achat reste un enjeu majeur pour le commerce de détail, tout comme la montée de l'e-commerce, ainsi que cela a déjà été souligné par mes préopinants, sans oublier l'effet lié à la mobilité et aux manifestations, que subit particulièrement le canton de Genève.

Je contredis ce que raconte M. Romain de Sainte Marie - vous transmettrez, Madame la présidente -, et je l'invite à venir constater de ses propres yeux la saturation du trafic le dimanche d'avant Noël sur les routes qui mènent aux commerces français.

L'organisation Genève Commerces se positionne... (Brouhaha.) Vous me dites si je vous dérange ! Parce que je n'arrive même plus à me relire tellement vous parlez fort !

La présidente. Continuez, Monsieur le député.

M. Florian Dugerdil. Je disais... Excusez-moi, il faut que je m'y retrouve ! (Rires. Remarque.) L'organisation Genève Commerces se positionne avec ténacité en faveur de l'ouverture les dimanches, et particulièrement durant la période précédant les fêtes de Noël. Cet organisme souligne toutefois un point crucial, la suppression du lien avec la convention collective de travail, actuellement impossible à étendre.

Mesdames et Messieurs les députés, les différentes auditions et les arguments qui en ressortent démontrent non seulement le bien-fondé de ce projet de loi, mais illustrent également l'importance de son impact économique pour la Genève commerciale ainsi que pour le tourisme de commerce.

Forts de ces éléments solides, une large majorité des membres de la commission de l'économie, c'est-à-dire tous sauf ceux issus de la gauche, vous invitent à accepter ce projet de loi tel qu'amendé. Merci.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Julien Nicolet-dit-Félix pour neuf secondes.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de première minorité. Très rapidement, je prends la parole pour tordre le cou à cette comparaison avec la France voisine sur la répartition des bénéfices entre les petits et les grands commerces, qui ne tient pas. Passez la frontière, une fois n'est pas coutume, je ne saurais vous donner ce conseil de manière récurrente, mais faites-le une fois pour voir: le dimanche, seules les grandes surfaces dans ces épouvantables zones artisanales...

La présidente. Votre temps est écoulé, il vous faut conclure, Monsieur.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Si vous allez au centre de Ferney ou de Saint-Julien, les petits commerces sont fermés, et ils le sont même le lundi matin ! Faites l'expérience et vous en tirerez les conclusions qui s'imposent; refusez ce projet de loi ! (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Béné pour vingt secondes.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Je serai très rapide. Effectivement, on n'arrivera pas à se mettre d'accord, mais il faudrait peut-être aller au bout du raisonnement à gauche: le dimanche, fermons les fleuristes, fermons les boulangeries, arrêtons les TPG, fermons les musées, l'hôpital, l'IMAD ou tous les commerces de l'aéroport !

La présidente. Il vous faut conclure.

M. Jacques Béné. C'est évident qu'avec le raisonnement qu'une ancienne présidente du parti socialiste avait eu au moment du dépôt de ce projet de loi...

La présidente. C'est fini.

M. Jacques Béné. Je termine avec ça: elle avait simplement dit qu'on avait trop favorisé le travail par rapport à l'aide sociale ces dernières années. Je crois qu'avec ça, tout est dit !

Une voix. Bravo !

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est un débat qui a une longue l'histoire et qui se poursuit ! Je tiens à rappeler une première chose au sujet de la convention collective de travail. Pour conclure une CCT, il faut que les deux parties atteignent le quorum. Il est vrai que les patrons ne l'atteignent pas, mais du côté des employés, il n'y a pas non plus de quorum. Je pense qu'il faut juste recadrer le débat, il n'y a pas une partie volontaire et une autre qui ne l'est pas: force est de constater que cette solution de passer par une CCT ne marche pas.

Cela fait dix ans qu'on donne du temps au dialogue. Quand je suis entrée en fonction, j'ai aussi donné du temps au dialogue et j'ai tenté de réunir les deux parties, qui étaient sensibles à l'argument consistant à dire que le commerce de détail souffrait et qu'il fallait pouvoir lui donner un coup de pouce.

Mais, Mesdames et Messieurs, le constat est clair: on n'a pas réussi à se mettre d'accord sur un dimanche d'ouverture avant Noël, et ce malgré le fait que la partie patronale était prête à rémunérer à 200% les heures effectuées ce dimanche-là. Par conséquent, ce temps du dialogue, force est de constater qu'il n'a pas marché. La partie syndicale a refusé, et effectivement, il faudra aller trancher cette question devant le peuple.

J'aimerais quand même rappeler un ou deux chiffres. Les commerçants font 40% de leur chiffre d'affaires au mois de décembre. Et ne me dites pas que si les magasins sont fermés le dimanche, vous n'allez pas acheter de Playmobil à vos enfants; vous irez de l'autre côté de la frontière ou en ligne, mais vous les achèterez quand même !

J'aimerais aussi rappeler qu'une étude sur les habitudes de consommation du Grand Genève a démontré que ces 13% d'augmentation des dépenses effectuées en France voisine représentent un demi-milliard sur l'année 2024. Les dépenses liées au commerce en ligne ont quant à elles triplé depuis 2018. Donc oui, les commerçants subissent la concurrence du commerce en ligne, la concurrence transfrontalière, des hausses de charges, des travaux toute l'année et des manifestations au centre-ville.

Si on partage tous le constat que la situation est difficile, je pense qu'il faut arrêter d'exagérer. Ce projet de loi prévoit d'ouvrir deux dimanches par année, avec des compensations entérinées par la partie patronale et qui ont d'ailleurs déjà été données sans obligation lors de l'ouverture dominicale du 22 décembre 2024 - c'est donc quand même faire preuve d'une bonne foi. L'OCIRT a surveillé de près cette ouverture dominicale, aucun abus n'a été constaté dans les commerces.

Je pense que l'expérience positive qui a été menée devrait plutôt nous donner envie d'avoir confiance et nous pousser à nous dire que ces deux dimanches d'ouverture au mois de décembre ne constituent pas une libéralisation exagérée des horaires de travail. On ne parle pas d'étendre les horaires, on ne parle pas d'ouverture dominicale toute l'année, mais de donner aux commerçants genevois une petite bouffée d'air lors d'une période cruciale, à savoir le mois de décembre, durant lequel ils font, je le répète, 40% de leur chiffre d'affaires.

Le Conseil d'Etat soutiendra évidemment ce projet de loi, qu'il a eu l'occasion d'amender en commission, et vous invite également à voter l'amendement déposé par le PLR, parce que je pense que si le débat doit se jouer devant le peuple - et le Conseil d'Etat n'a aucun problème avec ça -, il conviendra de reconnaître de manière consensuelle dans cet hémicycle que les commerçantes et les commerçants méritent de savoir avant le 20 décembre s'ils peuvent ouvrir avant Noël. Merci de votre attention et du soutien que vous apporterez à ce projet de loi. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 11715 est adopté en premier débat par 64 oui contre 33 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 18 (nouvelle teneur avec modification de la note) et 18A (abrogé).

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement qui propose l'ajout d'un article 3 souligné concernant le référendum obligatoire. La majorité qualifiée des deux tiers est requise pour que cet amendement soit accepté. L'amendement se présente comme suit:

«Art. 3 (souligné) Référendum

En application de l'article 67, alinéa 3, de la constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012, la présente loi est soumise au corps électoral.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 oui contre 33 non (majorité des deux tiers non atteinte).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 11715 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 63 oui contre 33 non (vote nominal).

Loi 11715 Vote nominal

M 3119
Proposition de motion de François Erard, Patricia Bidaux, Jacques Blondin, Alia Chaker Mangeat, Jean-Marc Guinchard, Souheil Sayegh, Thierry Arn pour une protection de la population et une lutte efficace contre le moustique tigre
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.

Débat

La présidente. Nous poursuivons nos urgences avec le traitement de la M 3119 en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à son auteur, M. Erard.

M. François Erard (LC). Merci, Madame la présidente. Moustique tigre: le retour ! Je ne reviendrai pas en détail sur les caractéristiques de cet insecte et les nuisances qu'il cause, puisque j'ai déjà eu l'occasion de le faire en novembre dernier lors du traitement de la M 2958, hélas sans succès. J'aimerais toutefois rappeler ici qu'il a été observé pour la première fois à Genève en 2019, qu'à terme, il va coloniser l'entier du canton et que nous remportons le triste record, par la commune de Thônex, de la population de moustiques tigres la plus élevée de Suisse. Ce problème n'est donc pas marginal, mais vraiment important.

Outre les désagréments qu'il provoque par ses piqûres, le moustique tigre transmet des agents pathogènes viraux, tels que le Zika, le chikungunya ou encore la dengue. Voilà le principal problème, on a là un véritable risque sanitaire causé par cet insecte. (Brouhaha.)

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, est-ce qu'on peut avoir un peu de silence, s'il vous plaît ? Respectez les gens qui prennent la parole en les écoutant. Merci.

M. François Erard. Merci, Madame la présidente. Si aujourd'hui ces maladies sont surtout présentes dans les pays tropicaux, elles vont tôt ou tard arriver chez nous, changement climatique oblige. En 2024, des foyers autochtones ont été recensés en Italie, en Croatie, en France ou encore en Espagne. Un réel problème de santé publique nous attend donc.

Pourquoi Genève est-elle un périmètre à haut risque ? D'abord, notre territoire est petit, très urbanisé, avec une très forte densité de population et un aéroport international. Ce risque s'intensifie actuellement en raison de deux facteurs. Premièrement par l'augmentation des cas importés depuis les régions tropicales par l'aéroport: de nombreux voyageurs qui arrivent sont porteurs de ces virus. Ces personnes ne le savent pas forcément, mais elles arrivent, elles sont là, et si par malheur elles croisent un moustique, surtout présent entre mai et octobre, elles peuvent les transmettre à d'autres personnes. Le premier élément est donc la hausse des cas importés via l'aéroport.

Le second élément est la présence de plus en plus marquée du moustique tigre sur le territoire genevois. Cette situation a d'ailleurs fait l'objet d'un avertissement dans le bulletin de mai du service du médecin cantonal de Genève. Vous l'aurez compris, ce n'est pas en offrant à la population des tapettes à mouches que l'on va réussir à régler ce problème sanitaire majeur !

Aussi, la motion invite le Conseil d'Etat à mettre rapidement en oeuvre une lutte de type TIS sur le modèle tessinois. Que signifie cet acronyme ? Technique de l'insecte stérile. Pourquoi prenons-nous l'exemple du Tessin ? Ce canton a une expérience de plus de vingt ans avec le moustique tigre - il y a été repéré en 2003 - et a donc une certaine avance sur Genève.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. François Erard. Merci, Madame la présidente. Or, le Tessin constate que toutes les mesures prises jusqu'à présent sont largement insuffisantes pour contrecarrer l'effet de cet insecte. Il a dès lors décidé il y a deux ans de mettre en oeuvre un programme de lutte de type TIS en collaboration avec la Haute école spécialisée de la Suisse italienne et l'Université de Bologne.

Alors je tiens à rassurer les gardiens de nos dépenses publiques: le canton n'aura pas besoin d'engager des cohortes de fonctionnaires chargés de capturer des moustiques mâles et, munis de loupes et de brucelles, de les châtrer dans d'abominables souffrances. (Rires.) Non ! C'est une technique biologique; elle consiste à élever des mâles qui seront irradiés pour être stérilisés avant d'être relâchés dans la nature. Les mâles stériles vont s'accoupler avec des femelles, donc ils ne seront pas privés de ces joyeusetés... (Rires.) ...mais les femelles ne produiront pas de descendance. Vous allez me rétorquer que lâcher des moustiques mâles, c'est imbécile puisque ça va augmenter les risques de piqûre ! Eh bien non, Mesdames et Messieurs, car chez les moustiques, seules les femelles piquent. (Exclamations. Rires.)

Une voix. C'est hyper genré !

Une autre voix. C'est hyper drôle !

Une autre voix. Comme toujours !

Une autre voix. Comme en politique ! (Remarque.)

M. François Erard. Cette technique TIS est largement appliquée depuis soixante ans dans de nombreux pays, et a notamment permis de lutter contre certaines maladies tropicales. Elle est expérimentée depuis deux, trois ans maintenant en Italie, en Grèce, en France ou encore en Allemagne, avec des résultats assez intéressants. Elle ne permet certes pas d'éradiquer l'insecte, mais, en conjugaison avec les autres méthodes préventives, elle permet de diminuer la population de l'ordre de 90%, ce qui est confirmé par les études conduites au Tessin. Chers collègues, il est de notre responsabilité de prévenir les risques sanitaires que la population genevoise va courir à brève échéance, nous vous invitons donc à réserver un bon accueil à la présente proposition de motion. Je vous remercie.

Mme Fabienne Monbaron (PLR). Tout d'abord, j'aimerais remercier les auteurs de cette motion, car il faut dire que les personnes qui ne subissent pas les assauts du moustique tigre ne peuvent pas se rendre compte à quel point celui-ci peut rendre la vie impossible. Il n'est clairement pas envisageable de rester tranquillement dehors quand des moustiques comme celui-ci tournent autour de vous.

Il est vrai que le Tessin est un canton pilote en Suisse, et qu'il teste depuis quelque temps la libération sur son territoire de ces moustiques mâles rendus infertiles en laboratoire pour diminuer l'expansion de cette espèce. Il est aussi vrai que si cette solution est probablement la plus probante, elle doit toutefois être accompagnée des mesures actuellement prises par les communes et le canton. Au travers de sa motion, Le Centre nous propose que cette technologie soit développée dans notre canton directement. Je pense qu'il s'agit a priori d'une bonne idée, parce que, on le sait, la chose la plus compliquée avec ces moustiques «trafiqués», entre guillemets, est de les transporter et de les faire arriver encore vivants à destination.

Or, à moins que les auteurs aient des renseignements supplémentaires qu'ils ne nous auraient pas donnés, on ne trouve dans cette motion aucune indication sur les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la mesure qu'ils préconisent - notamment les locaux, le matériel, le personnel - ni sur le coût que celle-ci engendrerait. Nous vous proposons un renvoi en commission pour avoir des explications plus étayées et un retour sur l'expérience entreprise avec succès au Tessin, en Italie ainsi qu'à Singapour. Dans le cadre d'un autre texte, les services cantonaux avaient été auditionnés en mars 2024, et il serait intéressant de profiter de cette occasion pour savoir ce qui a été mis en place depuis lors avec les communes pour nous prémunir au mieux de la période de reproduction, qui court entre début janvier et fin octobre.

Je vous souffle volontiers une question qui pourrait être posée dans cette commission. Genève a choisi un moyen de distribution du virucide à ces communes très différent de ce qui est proposé dans les autres cantons. La Confédération a en effet proposé aux cantons de recenser le nombre de litres de virucide dont les communes auraient besoin pour leur territoire, leurs bouches d'égout et les espaces dont elles ont la gestion, afin qu'ils puissent remonter ces chiffres à la Confédération et que celle-ci puisse effectuer une commande globale et procéder ensuite à une nouvelle distribution jusqu'au niveau des communes. Les communes des cantons qui ont pu choisir ceci ont pu bénéficier de ce produit pour un prix de 300 francs les 17 litres, mais à Genève, les communes ont été priées de s'adresser à des entreprises privées, et elles ont eu le bonheur de payer 900 francs la même quantité de ce produit. Voilà la question que je vous souffle. Je vous propose d'accepter le renvoi en commission. Merci.

Mme Léna Strasser (S). Beaucoup de travail a déjà été effectué en commission autour du moustique tigre sur la base d'une motion précédente, et le département nous avait démontré avoir pris la problématique au sérieux. Une plateforme spécifique a été mise sur pied pour chercher des solutions, et des personnes se réunissent régulièrement pour avancer sur cette question.

Il nous semble que cette motion, j'allais dire enfonce une porte ouverte - élargit le trou d'une moustiquaire déjà trouée. Voter ce texte ce soir en urgence revient un peu à dire au département: «Continuez à faire ce que vous faites déjà, mais choisissez la solution que nous vous proposons.»

Quant à nous, nous estimons qu'il faudrait renvoyer ce texte en commission pour avoir un état de la situation sur ce qui a été entrepris depuis le traitement de la motion précédente, que nous n'avions pas renvoyée au Conseil d'Etat justement parce que le département avait pris la question au sérieux. Je rejoins ma préopinante sur le renvoi en commission et remercie les personnes ayant pris la parole pour les explications très étayées sur cette problématique, qui semble aujourd'hui une urgence absolue à Genève. Merci beaucoup.

M. Stéphane Florey (UDC). Nous sommes d'avis qu'il faut lutter contre le moustique tigre, mais savoir vraiment comment on le fait est une question importante à laquelle nous sommes ici incapables de répondre. Le groupe UDC renverra ce texte en commission pour qu'il soit étudié et pour voir si les moyens proposés sont efficaces: peut-être que d'autres moyens sont aussi possibles. Pour avoir une réponse à toutes ces questions, nous voterons donc le renvoi en commission de cet objet. Je vous remercie.

Mme Uzma Khamis Vannini (Ve). Je vous adresse à vous, Madame la présidente, ainsi qu'à tout le Bureau toutes mes félicitations pour votre élection !

Madame la présidente, sauf erreur de ma part, un rapport a déjà été rendu par la commission de l'environnement et de l'agriculture sur ce sujet, rapport qui nous a donné certains éléments. Il paraît que la taille ne compte pas, mais avec le moustique tigre, on peut en être sûr ! C'était une pique pour répondre à celui qui a dit que seuls les moustiques femelles piquaient !

Figurez-vous qu'on a vingt ans de recul sur la TIS, qui permettent de connaître les effets de cette technique sur l'humain et sur l'environnement. Les Verts souhaitent aussi renvoyer ce texte en commission, mais nous proposons de le renvoyer à la commission de la santé, si on le veut bien, pour avoir un autre point de vue et pour compléter ce que nous avons déjà appris dans le cadre de la M 2958. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Christian Steiner (MCG). Mes félicitations, Madame la présidente, pour votre brillante élection !

Je côtoie le moustique tigre et la dengue depuis plusieurs années.

Une voix. La dengue aussi ?

M. Christian Steiner. Oui ! Cet insecte transmet entre autres cette maladie. (Remarque.) A ce sujet, il faut préciser qu'il existe quatre sortes de dengue. L'une d'elles, la dengue hémorragique, est particulièrement dangereuse. Elle a été introduite sous forme de guerre bactériologique à Cuba et a causé l'hospitalisation de mon fils.

Pour le reste, on s'étonne un peu d'une motion qui fait référence à M. Gottlieb Dändliker. J'ai eu la chance de côtoyer professionnellement ce dernier, il est parfaitement au fait de la lutte contre le moustique tigre.

D'après mon expérience - je parle de l'île de Cuba -, lutter contre cet insecte demande des mesures et des frais conséquents, c'est-à-dire des inspecteurs et une lutte constante s'agissant des flaques d'eau et de tout interstice où l'eau peut s'infiltrer. Je pense qu'il faut donc renvoyer cette motion en commission, évaluer les dangers, déterminer si l'on est vraiment confronté à ce quatrième type de dengue, hémorragique - potentiellement mortelle -, voir ce que l'on peut faire et la configuration de notre domaine public et savoir combien ça va coûter. Donc oui à un renvoi en commission. Merci.

M. Raphaël Dunand (LJS). Ecoutez, je ne sais pas quel moustique a piqué Le Centre s'agissant de cette proposition de motion, surtout que l'on a traité de ce sujet à la commission de l'environnement il y a à peine six mois. On avait soulevé la question de savoir si on était équipé pour faire face à ce problème de santé publique causé par les virus. Or, le département nous a démontré qu'il était capable de réagir rapidement et qu'une task force était en place. S'il existe un moyen plus utile, comme celui que propose la motion, c'est à étudier.

Je pense qu'il n'y a pas d'urgence et que renvoyer ce texte à la commission de la santé est une bonne chose. Pour agir, le département n'a pas besoin d'une motion supplémentaire, comme il l'a démontré il y a six mois, surtout que le laps de temps est assez court depuis la dernière motion 2958, qui demandait justement d'agir contre le moustique tigre. Il n'y a pas d'urgence, on peut renvoyer cette motion en commission. Je vous demande donc de le faire afin qu'elle soit traitée au mieux. Merci.

M. Jean-Marie Voumard (MCG). Je lis les nouvelles, et je vois dans Swissinfo que Genève va tenir une permanence tous les vendredis après-midi et distribuer un anti-larve qui lutte contre le moustique tigre. Ça s'appelle le Bacillus thuringiensis israelensis, le BTI, et ça se présente sous la forme de granulés. Je souhaite demander à la conseillère d'Etat de nous répondre: où se fait cette distribution ? C'est paru dans Swissinfo et je pense qu'il est important d'en parler. Merci, Madame la présidente.

M. François Erard (LC). Si nous avons demandé l'urgence, c'est qu'il y a une réelle urgence à s'occuper de ce problème, ce n'est pas pour renvoyer cet objet en commission et pour que celle-ci traîne six mois. J'aimerais dire que ce que propose ce texte n'a rien à voir avec ce que proposait la motion à laquelle on a fait référence, celle de l'année dernière. Il contient une seule invite demandant un moyen de lutte efficace contre ce parasite - c'est d'ailleurs le seul.

Sachez que cette motion a aussi été discutée avec M. Gottlieb Dändliker, qui juge très important d'être appuyé pour pouvoir mettre ça en place. Donc j'ai de la peine à comprendre que ce n'est tout d'un coup pas un problème. Je crains fort que d'ici deux, trois ans, il soit vraiment trop tard et que nous nous trouvions face à un problème sanitaire majeur. Quant à moi et quant au Centre, nous n'accepterons pas un renvoi en commission. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

La présidente. Merci bien. La parole revient à M. Pascal Uehlinger pour treize secondes.

M. Pascal Uehlinger (PLR). Merci, Madame la présidente. Je pense que la dernière personne qui a vu Gottlieb aujourd'hui, c'était moi, à 14h. Aujourd'hui, de nouveaux protocoles sont mis en place pour lutter contre la transmission de la maladie et pas uniquement contre le moustique. Je vous propose de renvoyer ce texte à la commission de la santé.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à la conseillère d'Etat, Mme Bachmann.

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. Dans la passion qui m'a saisie tout à l'heure à propos de la LHOM, j'ai oublié de vous féliciter pour votre brillante élection et je souhaitais corriger cela. Madame la présidente, toutes mes félicitations ! (Applaudissements. Rires. Commentaires.)

La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat ! Mesdames et Messieurs, sous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission de la santé. Je lance la procédure de vote.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 3119 à la commission de la santé est adopté par 63 oui contre 7 non et 2 abstentions.

M 3127
Proposition de motion de Léo Peterschmitt, Emilie Fernandez, Sophie Bobillier, Cédric Jeanneret, Louise Trottet, Céline Bartolomucci, David Martin, Dilara Bayrak, Julien Nicolet-dit-Félix, Marc Falquet, Angèle-Marie Habiyakare, Alia Chaker Mangeat, Uzma Khamis Vannini, Pierre Eckert, Jacques Blondin, Yves de Matteis, Marjorie de Chastonay, Masha Alimi, Jean-Marie Voumard, Laura Mach, Xhevrie Osmani, Jean-Marc Guinchard, Grégoire Carasso, Jean-Charles Rielle, Sophie Demaurex, Nicole Valiquer Grecuccio, Léna Strasser, Francisco Taboada, Thomas Wenger, Christo Ivanov, Jean-Pierre Tombola pour un plan d'action dans le domaine de l'accueil et du placement d'enfants hors du milieu familial
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22 et 23 mai 2025.

Débat

La présidente. Nous abordons la prochaine urgence, classée en catégorie II, trente minutes. Je cède le micro à son auteur, M. Léo Peterschmitt.

M. Léo Peterschmitt (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, cela fait maintenant plusieurs années que le manque de places d'accueil pour mineurs est connu, documenté et dénoncé. Ce Grand Conseil s'est d'ailleurs prononcé à plusieurs reprises sur cette question. Pourtant, les hospitalisations sociales persistent: nous pouvons lire dans la «Tribune de Genève» qu'en ce mois de mai 2025, 17 enfants occupaient des lits hospitaliers, faute de solutions d'accueil adéquates, repoussant des soins électifs et ajoutant une pression supplémentaire sur des équipes soignantes épuisées et non formées à veiller sur les enfants placés.

Face à ce constat et compte tenu de l'historique de cette question au sein du Grand Conseil, nous devons donner les moyens pour concrétiser les promesses formulées en matière de protection de l'enfant. Parce que ce dont il s'agit ici, c'est de l'intérêt supérieur de ce dernier, qui doit représenter une considération primordiale. Les besoins de développement et de protection propres aux enfants et aux jeunes doivent être garantis. Or, qu'on se le dise, l'hôpital n'est ni un lieu approprié pour leur développement ni un lieu de vie pour une ou un enfant non malade, mais bien un espace de soin pour les enfants qui nécessitent une attention médicale.

La convention relative aux droits de l'enfant exige que les placements soient prévus dans une famille d'accueil ou dans un établissement adapté. Le placement n'est pas une décision simple et s'accompagne d'enjeux éthiques forts. Or, le manque de places adéquates rajoute une pression éthique supplémentaire sur une des décisions les plus lourdes de conséquences. Anticiper les moyens suffisants pour éviter un tel manque de places, c'est aussi renforcer la sécurité et l'éthique de ces décisions. Il ne suffit pas de qualifier une pratique comme étant de dernier recours pour qu'elle diminue, il faut créer les conditions concrètes permettant le développement d'alternatives.

C'est pourquoi cette motion demande la mise en oeuvre d'un plan d'action ambitieux dans le domaine de l'accueil et du placement d'enfants hors du milieu familial, ainsi que les ressources nécessaires pour garantir une prise en charge digne, stable et conforme aux besoins spécifiques de ces enfants. Elle s'inscrit dans la continuité des décisions législatives antérieures et vise à fournir les moyens pour développer des alternatives au placement social à l'hôpital. Nous sommes en présence de situations inacceptables qui compromettent notre responsabilité collective envers les enfants les plus vulnérables de notre canton. Pour ces raisons, je vous encourage à soutenir ce texte ainsi que l'amendement déposé par Le Centre. Merci.

M. Pierre Nicollier (PLR). Je souhaite tout d'abord vous féliciter pour votre brillante élection, Madame la présidente !

Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui encore, à Genève, des enfants en bonne santé passent leurs nuits à l'hôpital, non pour y recevoir des soins, mais simplement faute de place dans des foyers ou des familles d'accueil. Ces hospitalisations sont le résultat soit de décisions prises au moment de la naissance, ce qui explique pourquoi la loi autorise des exceptions à l'interdiction de placements hospitaliers, soit de la décision du TPAE d'extraire des enfants de leur milieu familial, car ils y sont en danger. Cette situation n'est pas nouvelle, mais malgré plusieurs interpellations et un changement de loi, elle perdure depuis des années.

Contrairement à ce que la motion laisse entendre, ces hospitalisations coûtent plus cher qu'un placement en foyer ou en famille. En 2019 (les tarifs aux HUG ont augmenté depuis), le SPMi dépensait 1077 francs par nuit pour des hospitalisations sociales et 626 pour une nuit dans une institution d'accueil d'urgence. Un placement en famille d'accueil s'élevait à un montant situé entre 65 et 75 francs par nuit.

Pour rappel, le PLR a déposé un projet de loi, qui a été adopté dans cette enceinte, afin d'interdire les hospitalisations sociales et d'offrir des alternatives conformes aux besoins des enfants. Le département nous avait par ailleurs présenté un plan d'action qui contenait un renforcement du dispositif avec l'ouverture de plusieurs places en foyer, un renforcement de l'AEMO et une augmentation des intervenants en protection de l'enfance.

Le PLR souhaite traiter rapidement cet objet et vous suggère, à la place d'attendre six mois avant de recevoir une réponse, de le renvoyer en commission pour entendre au plus vite le SPMi. En cas de refus du renvoi à la commission de l'enseignement, le PLR soutiendra la voie longue, à savoir le renvoi de la motion au Conseil d'Etat. Merci.

M. Francisco Taboada (LJS). Je me joins bien sûr aux nombreuses félicitations pour votre élection, Madame la présidente, ainsi que pour celle du Bureau !

Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la motion que nous examinons aujourd'hui interpelle notre conscience collective. Elle traite d'une réalité que nous ne pouvons plus ignorer: des enfants sont encore hospitalisés aux HUG non pas parce qu'ils sont malades, mais parce qu'il n'existe pas de solution d'accueil adaptée à leur situation. Ces hospitalisations dites sociales sont à mes yeux symptomatiques d'un système à bout de souffle.

Malheureusement, je sais de quoi je parle. J'ai moi-même passé une grande partie de mon enfance à l'hôpital, de l'âge de 5 ans à l'âge de 13 ans. Je suis donc bien conscient de ce que signifient la solitude, l'angoisse, l'absence d'un cadre de vie normal, d'un rythme scolaire et d'un foyer affectif et structurant. Même avec un personnel extrêmement bienveillant - ce que je tiens à souligner -, un hôpital n'est pas un lieu de vie pour un enfant: ce n'est ni sa mission ni sa vocation.

Ce personnel, parlons-en ! Ces collaboratrices et collaborateurs se retrouvent face à des situations qui sortent de leur cadre de formation. Ils font preuve de dévouement, mais ils sont déjà sous pression. On leur demande de combler des lacunes structurelles du système, ce qui n'est juste ni pour eux ni pour les enfants. Je soutiens donc cette motion avec conviction, et le groupe LJS aussi.

On peut se poser des questions. Pourquoi cette pratique persiste-t-elle, alors qu'elle est interdite par la loi depuis 2022 ? Pourquoi, malgré nos textes, nos engagements et nos votes, 17 enfants sont-ils encore hospitalisés sans raison médicale en mai ?

Il est temps que le Conseil d'Etat nous donne des réponses concrètes. Il ne suffit pas de se contenter de déclarer des principes ! Encore faut-il que ceux-ci soient incarnés dans des moyens réels et des actes. Chaque jour passé dans ce contexte est un jour perdu pour un enfant, un jour de trop pour un personnel hospitalier déjà saturé, et un jour de trop pour notre responsabilité politique ! Je vous remercie, chers collègues, d'accepter ce texte sur le siège. Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Cette motion ne changera fondamentalement rien au problème actuel. Ce n'est pas en demandant de multiplier les moyens à disposition que la situation évoluera. On l'a dit et c'est reconnu par les auteurs, ce fameux plan d'action n'a absolument rien modifié aujourd'hui. Ajouter de l'argent pour un plan qui ne fonctionne pas ne sert par conséquent à rien.

Les contraintes actuelles pour inciter les familles, quelles qu'elles soient, à accueillir des enfants qui devraient être placés en famille d'accueil sont tellement - comment dire ? - fortes qu'aujourd'hui, plus aucune famille d'accueil à Genève ne consent à héberger des enfants placés par la justice. Des services viennent chez vous, mènent une enquête, vous demandent un certain nombre de choses parfois choquantes. On demande par exemple à des familles: «Est-ce que vous êtes bien vaccinés contre la tuberculose ?» Certes, on peut répondre: «Oui, on est vaccinés, il n'y a pas de souci.» Pourtant, quand on pose la question inverse: «Est-ce qu'on a la garantie que les enfants que l'on va abriter sont vaccinés ?», on nous répond: «Ça ne vous regarde pas !» C'est à cause de cette multitude de petites choses, en plus des contraintes d'accueil, que les familles d'accueil ne sont plus intéressées par l'idée d'accueillir des enfants qui devraient être placés chez elles. A cet égard déjà, il faudra donc assouplir la loi sur les familles d'accueil.

Oui, c'est une évidence, le placement d'enfants en milieu hospitalier n'est pas la solution. Ce n'est cependant pas avec cette motion que vous arriverez à changer quoi que ce soit. Certes, ce texte sonne en quelque sorte juste, mais les moyens proposés sonnent faux. C'est pourquoi il est nécessaire de le renvoyer en commission et d'imaginer à la place d'une motion un projet de loi (on a parlé de la loi votée contre le placement en milieu hospitalier: on pourrait la modifier), mais ce n'est pas grâce à cette motion que l'on y parviendra. Donc oui, il faut renvoyer cet objet en commission afin de trouver et de proposer les bonnes solutions. Je vous remercie.

Mme Danièle Magnin (MCG). Ça fait bientôt cinquante ans que je m'occupe de droit de la famille et que je vois des enfants retirés à leurs parents pour des prétextes fondés sur une vision qui ne correspond pas à celle de la famille en question; à Genève, en effet, la psychologie de la pédagogie relève d'une chapelle. De nombreuses familles sont au désespoir parce qu'une évaluation, une expertise qui va dans le sens de cette chapelle a été réalisée, alors que d'autres experts ont détecté d'autres problèmes qui ne sont pas de l'ordre de la maltraitance, mais tout simplement d'un fait comme une maladie, peut-être génétique, ou une autre difficulté. Il y a même eu des députés... Vous savez également que presque à chaque séance, des hommes à qui l'on interdit de voir leurs enfants font la queue derrière la porte.

Je ne souhaite pas vous parler de cet objet en particulier, mais de la raison pour laquelle on doit placer des enfants - on les retire beaucoup trop facilement à leurs parents. Bien entendu, pour des enfants maltraités physiquement ou abusés, la question ne se pose pas, mais l'ensemble... Vouloir une espèce de perfection inatteignable, comme le fait de demander ce que vient de dire notre collègue Falquet... Pardon, ce n'était pas M. Falquet...

Une voix. Florey !

Mme Danièle Magnin. Florey, pardon. Je confonds toujours vos noms, pas vos personnalités. Excusez-moi ! Je voudrais attirer l'attention de ce Grand Conseil sur la nécessité qu'il y a à chercher un petit peu en amont la raison pour laquelle tant d'enfants doivent être placés ! Bien sûr, le MCG soutiendra le renvoi en commission. Merci.

Mme Léna Strasser (S). Félicitations de ma part également pour votre brillante élection, Madame la présidente !

J'aimerais remercier M. Peterschmitt pour le dépôt de ce texte. Les hospitalisations sociales, aujourd'hui on le sait, ne sont pas une solution et doivent cesser: elles mettent à mal les HUG (cet aspect est ressorti dans la presse) et représentent une situation catastrophique pour les enfants qui les subissent et pour le personnel qui doit s'en occuper dans un cadre inadéquat à un accueil éducatif.

Cette thématique revient très régulièrement dans notre parlement, nous la connaissons toutes et tous. L'hôpital est surchargé, l'ensemble du dispositif d'accueil aussi. Dans ce Grand Conseil, nous avons tenté de renforcer le système de familles d'accueil et d'en trouver de nouvelles, puis nous avons accepté un projet de loi pour interdire la pratique des hospitalisations sociales. Pourtant, proscrire cette pratique sans donner les moyens d'augmenter les places en foyer n'est pas une solution - on le voit, ça n'a pas fonctionné. Nous avons essayé d'obtenir des ressources dans le cadre du dernier budget que nous avons voté, mais le PLR, qui avait proposé le projet de loi évoqué, a refusé d'allouer des ressources supplémentaires dans ce domaine.

Les hospitalisations sociales doivent aujourd'hui cesser. Certes, ce texte ne propose pas de pistes concrètes - il laisse ce travail aux professionnels concernés -, mais il demande des réponses et surtout des moyens. Nous le soutiendrons et espérons que le Conseil d'Etat mettra rapidement en oeuvre des solutions concrètes pour répondre à cette problématique. Merci.

Mme Patricia Bidaux (LC). Félicitations, Madame la présidente, pour votre brillante élection !

Mesdames les députées, Messieurs les députés, il existe deux mots que nous ne devrions jamais associer: hospitalisation et social. Le premier renvoie à des soins médicaux, le second aux relations, à l'inclusion dans la société. Leur rapprochement révèle une défaillance grave de notre système de protection de l'enfance. Durant la précédente législature, et cela a été rappelé, nous avons débattu d'un projet de loi porté par le PLR qui visait à prohiber formellement les hospitalisations dites sociales. Or, la réalité du terrain avait conduit ce parlement à amender ce texte pendant le travail en commission pour que l'on ne décrète pas une interdiction sans donner de solutions, comme cela a été relevé; un alinéa 2 qui stipule que «les hospitalisations sociales d'enfants ne doivent être permises qu'en dernier recours et si aucune alternative n'a pu être trouvée» a été ajouté à l'article 32 de la loi sur la jeunesse.

Ce texte - vous transmettrez au député Florey, Madame la présidente - va bel et bien apporter un changement (je le crois fortement et Le Centre aussi), parce qu'organiser un plan signifie amener des solutions, des projets qui permettent de changer la situation. C'est faux de dire que cette motion n'amènera rien: elle apporte une réponse à une situation que nous ne pouvons plus tolérer. Aujourd'hui, précisément par faute de moyens, ces hospitalisations sociales explosent. En tant qu'infirmière en milieu carcéral, je me rappelle avoir promené des enfants qui pouvaient rester en prison avec leur mère, mais qui ne voyaient pas la lumière du jour, ce qui n'est pas supportable ! Ce parlement doit faire cesser ce genre de pratique.

Ils sont hospitalisés, un enfant est d'ailleurs actuellement hospitalisé pour cette raison-là. Alors s'il vous plaît, n'en restons pas là et ne baissons pas les bras !

Au vu de ce qui précède, Le Centre a déposé un amendement - qui vous a été transmis avec beaucoup de retard, j'en suis désolée. Du reste, il répond à la demande de la députée MCG, qui souhaitait que l'on sache pourquoi les enfants sont retirés de leur famille. Pour ma part, je suggère que dans ce plan d'action, on réfléchisse à la manière de mieux placer les enfants, mais aussi de prévenir les placements d'enfants, car sans cela, le système va se nourrir lui-même.

Je propose d'ajouter à la fin de l'invite «à veiller à une implication coordonnée de tous les services de l'Etat concernés et du réseau associatif» le texte suivant: «des communes» - car si l'on ne travaille pas avec les communes, cette motion ne pourra pas prendre corps - «y compris la mise en place d'un programme ambitieux d'actions préventives en milieu familial (APFM)». Prévenir, c'est éviter le placement, accompagner, c'est protéger durablement et agir en amont... (Commentaires.) ...c'est notre responsabilité politique. Je présente un amendement, si vous permettez ! Acceptez ce texte et soutenez l'amendement proposé pour un ambitieux plan d'action et pour une ambitieuse ambition... Enfin, non ! (L'oratrice rit.)

Une voix. C'est tard !

Mme Patricia Bidaux. ...pour un ambitieux travail de prévention. Je suis désolée, c'est un thème qui me touche tellement ! (Applaudissements.)

Mme Sophie Bobillier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion contient une demande simple mais essentielle: que l'on donne les moyens nécessaires pour que les bébés et les enfants puissent rester auprès de leurs parents aussi souvent que possible et que, en cas de véritable impossibilité, l'on puisse leur offrir un lieu adapté, humain et chaleureux, et non un lit d'hôpital.

Le Grand Conseil l'a dit et répété, on ne doit pas placer des enfants à l'hôpital quand ils ne sont pas malades. Les y placer juste parce qu'il n'y a pas de place ailleurs, c'est insoutenable et inacceptable, et c'est mépriser les ressources institutionnelles. Même la loi dont il a été question stipule que ces hospitalisations sociales doivent rester absolument exceptionnelles.

Et pourtant ! Aujourd'hui encore, des enfants se retrouvent seuls à l'hôpital, non parce qu'ils ont besoin de soins médicaux, mais parce qu'il n'y a pas de places disponibles en foyer. Ce sont les médias - nous les remercions chaleureusement - qui nous montrent cette réalité invisible: des bébés seuls, des tout-petits sans personne à leurs côtés. Ces enfants passent des jours, des semaines, parfois de nombreux mois dans une chambre d'hôpital, sans parents ni éducateurs, mais uniquement avec le personnel soignant. Celui-ci fait ce qu'il peut, mais il ne peut pas tout faire. Certains enfants finissent par ne plus pleurer et ne tendent plus les bras, car ils comprennent à leur façon que personne ne viendra.

Oui, le personnel soignant accomplit un travail remarquable, mais ce n'est pas à lui d'élever ces enfants. L'hôpital ne doit pas être leur maison, comme l'a justement dit Francisco Taboada. Nous demandons donc que les services de protection de l'enfance aient les moyens d'effectuer leur travail, qu'ils puissent mettre en place des solutions dans le but d'éviter de séparer un enfant de ses parents. Si ce n'est vraiment pas possible, nous demandons que l'enfant soit accueilli dans un endroit adapté, comme un foyer parent-enfant (par exemple, la Maison Dora ou l'OBB) ou un foyer pour bébés (Piccolo par exemple, ou d'autres) et que ces foyers aient les places disponibles pour pallier ces situations dramatiques. Nous ne pouvons accepter que l'hôpital représente la solution par défaut: un enfant n'a rien à faire là-bas quand il n'est pas malade. On parle ici de dignité et d'humanité, et surtout de ce que l'on veut offrir à ces enfants, qui sont les plus fragiles d'entre nous et dont le cadre de vie est déterminant et essentiel pour l'avenir. Je vous remercie, Madame la présidente. (Applaudissements.)

M. Jean-Marie Voumard (MCG). Bravo pour votre élection, Madame la présidente ! J'ai oublié de vous le dire - nous sommes deux.

Je vous rappelle que j'ai siégé dix ans à la FOJ, la Fondation officielle de la jeunesse, et que celle-ci avait déjà des problèmes s'agissant des familles d'accueil. Je trouve que ce texte est de bon augure, parce qu'il est nécessaire de lutter là contre. Les hôpitaux sont évidemment nécessaires, mais pas dans ces cas-là, ou alors en dernier recours. Cette motion a mon appui, je l'ai même signée, et je pense qu'il faut aller de l'avant et la défendre. Je vous remercie, Madame la présidente. (Applaudissements.)

Mme Carole-Anne Kast, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en tant que suppléante de la conseillère d'Etat chargée du DIP, retenue par une conférence intercantonale, je porte la voix de l'exécutif et de l'administration cantonale au sujet de cette question. Celle-ci, comme la plupart des gens l'ont relevé, préoccupe beaucoup le gouvernement et les services en milieu hospitalier ou éducatif qui s'occupent de ces enfants, et je vous assure que le Conseil d'Etat met en place de nombreuses mesures pour atteindre les objectifs de la loi: ne procéder à des hospitalisations sociales qu'en dernier recours et les faire durer le moins longtemps possible.

Cependant, Mesdames et Messieurs, je tiens à vous présenter très succinctement les actions menées par l'administration cantonale pour vous donner peut-être envie d'en apprendre plus en commission. Pour reprendre la formule consacrée, supprimer les hospitalisations sociales, Mesdames et Messieurs les députés, ça ne se décrète pas, ça se construit. Afin de rendre honneur au travail de toutes les équipes qui essaient effectivement de les supprimer, et parce que vous avez l'impression que c'est davantage la presse qui vous informe que le Conseil d'Etat lui-même - je le regrette -, j'aimerais vous dire ce qu'entreprend le gouvernement.

Un texte, une motion de la commission de contrôle de gestion intitulée «Pour que les hospitalisations sociales cessent», demandait la mise en place d'un plan d'action - son renvoi en commission date, sauf erreur de ma part, de 2017 et son vote de 2019. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat - mes prédécesseurs - a bel et bien mis en place un plan d'action, et ce depuis 2017, époque où le nombre d'hospitalisations sociales était encore plus élevé qu'aujourd'hui. Je vous cite ces actions:

- ouverture de places dans le foyer OBB, à la FOJ justement (M. Voumard évoquait son expérience là-bas, ce foyer se trouve dans la commune que j'ai eu l'honneur d'administrer, je le connais donc bien), pour un coût annuel de 1,5 million;

- lancement en 2018 de l'AEMO petite enfance, c'est-à-dire l'assistance parentale en milieu ouvert, donc de l'accompagnement à domicile, avec pour mandataire AGAPÉ, pour 705 000 francs par an;

- lancement de l'AEMO de crise, pour les adolescents, avec 36 places simultanées en permanence en 2024, pour 1,78 million de francs;

- lancement en 2022 de l'accompagnement et soutien parental à domicile, pour des parents d'enfants de 6 à 18 ans, avec pour mandataire Astural, pour 1,19 million de francs;

- ouverture en 2019 du foyer Yamba, toujours à la FOJ, mais, sauf erreur de ma part, cette fois pas à Onex, avec 14 places pour les 0-5 ans, pour 4,81 millions de francs annuels;

- reprise du foyer de l'Aubépine par la FOJ en 2020, pour 2,32 millions de francs, avant tout pour des enfants de 12 à 18 ans avec troubles psychiatriques;

- lancement de la section protection et accompagnement judiciaire, AEMO judiciaire délivrée par le SPMi, avec 63 places pour des familles, tous âges, pour 1,05 million de francs;

- renforcement de l'équipe mobile OEJ-HUG - vous l'avez dit, le personnel soignant ne peut pas forcément effectuer un travail éducatif auprès de ces enfants -, pour un peu moins de 1 million de francs annuels;

- ouverture en 2022 de places au sein de l'association MAETIS pour les adolescents, pour 3,22 millions de francs;

- ouverture en 2023 de la maison Dora-foyer parents-enfant avec présence thérapeutique, pour 1,69 million de francs, avec la FOJ pour mandataire;

- dispositif transitoire de prise en charge en pédagogie spécialisée en 2023, pour 1,5 million de francs;

- placements à domicile (4 familles concomitantes) avec le soutien du TPAE en 2024, pour 2,08 millions de francs, avec AGAPÉ comme mandataire.

Mesdames et Messieurs les députés, vous pouvez considérer que ce n'est pas encore assez, mais vous ne pouvez pas dire que l'administration ne fait rien, car c'est injuste et déloyal, d'autant que vous n'avez pas été aussi curieux que vous auriez dû l'être, sachant que ce sujet, comme vous l'avez dit, est d'une grande importance.

Je dois aussi rappeler certains éléments. Comment en arrive-t-on à être placé en hospitalisation sociale ? Madame Magnin - vous transmettrez, Madame la présidente -, un enfant n'y arrive pas parce qu'il a été retiré à sa famille. L'hospitalisation sociale se produit dans deux cas. Premièrement, si, à la naissance, le personnel soignant est préoccupé par la situation et a besoin de l'évaluer avec la mère, la plupart du temps, ou le père, s'il est là, avant de permettre un retour à domicile avec des mesures adéquates. Voilà la première porte d'entrée.

Deuxièmement, l'hospitalisation sociale peut faire suite à des clauses péril. En tant que magistrate chargée de la police, je les vois passer. Lorsque des policiers arrivent au domicile de petits enfants dont les parents ne s'occupent pas parce qu'ils n'arrivent plus à prendre soin d'eux-mêmes, et donc de leur progéniture, que peuvent-ils faire face à cela ? Ils ne vont pas se substituer aux parents, ils confient par conséquent les enfants à l'UMUS, qui les place en hospitalisation sociale. Il s'agit d'une clause péril, qui vise à protéger ces enfants.

Bien sûr, ça ne devrait durer peut-être que vingt-quatre ou quarante-huit heures; malheureusement, par manque de places, vous l'avez relevé, le placement dure parfois plus longtemps. D'ailleurs, je peux vous donner les chiffres pour 2024, car je les ai: en moyenne, les hospitalisations sociales ont duré environ un mois, toutes catégories confondues, que ce soit les enfants qui restent plus longtemps suite à une prise en charge hospitalière au moment de la naissance ou ceux conduits à l'hôpital en raison de situations qui représentent un danger pour eux et qui exigent une protection et une mise à l'abri.

Il faut savoir que certaines vont durer quarante-huit heures, septante-deux heures; ça ne devrait jamais excéder cette durée, mais évidemment, certaines situations sont plus complexes et nécessitent plus de temps. Ce n'est pas forcément en désaccord avec les parents: pour de nombreuses hospitalisations, les parents ne sont pas écartés du processus. Eux-mêmes sont conscients qu'ils ne peuvent pas offrir un cadre sécurisant à leurs enfants, à leurs tout petits enfants, et qu'il est essentiel de trouver pour ceux-ci une place à l'abri où ils pourront maintenir les relations. Les équipes travaillent aussi à ce que ce lien-là soit conservé.

Bien sûr, chaque cas est un cas de trop, et il ne devrait pas y en avoir. Il faut cependant être pragmatique, Mesdames et Messieurs les députés: nous n'arriverons jamais à trouver une réponse en foyer dans la minute, et un laps de temps sera toujours nécessaire (en espérant qu'il soit le moins long possible) pour que l'on puisse prendre en charge ces enfants et les mettre à l'abri.

En conclusion, je ne peux que vous inviter à traiter ce sujet avec l'importance qu'il mérite en le renvoyant en commission. Il s'agit non pas de décréter, mais de considérer le travail accompli par les éducateurs, le DIP et les HUG, afin de véritablement renforcer le dispositif, en donnant les moyens aux équipes, en trouvant des solutions innovantes et en soutenant l'administration, qui fait tout son possible pour que les hospitalisations sociales se produisent en dernier recours, en cas d'urgence, et durent le moins longtemps possible. Merci.

La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous votons sur le renvoi à la commission de l'enseignement.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 3127 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 46 non contre 43 oui.

La présidente. Le renvoi ayant été refusé, je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter sur l'amendement de Mme Bidaux et cosignataires, dont je vous donne lecture:

«2e invite (nouvelle teneur)

- à veiller à une implication coordonnée de tous les services de l'Etat concernés et du réseau associatif, des communes y compris la mise en place d'un programme ambitieux d'actions préventives en milieu familial (APFM);»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 87 oui contre 1 non.

Mise aux voix, la motion 3127 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 85 oui et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 3127 Vote nominal

La présidente. Sur ce dernier point, je vous remercie pour votre soutien. (Applaudissements.) Mesdames et Messieurs, je vous propose de rentrer chez vous. A demain, et merci beaucoup.

La séance est levée à 22h50.