Séance du vendredi 21 mars 2025 à 14h
3e législature - 2e année - 11e session - 61e séance

M 3038-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Yvan Zweifel, Jean-Marc Guinchard, François Baertschi, Jacques Béné, Vincent Canonica, Sophie Demaurex, Francine de Planta, Romain de Sainte Marie, Lionel Dugerdil, Pierre Eckert, Leonard Ferati, Julien Nicolet-dit-Félix, André Pfeffer, Ana Roch, Vincent Subilia pour que les aides COVID ne se retournent pas contre les entreprises qui en ont bénéficié
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 20 et 21 mars 2025.

Débat

Le président. Nous abordons à présent la M 3038-A (catégorie III). Je cède la parole à M. Yvan Zweifel. (Le président prononce le nom «Zweifel» de manière erronée et se reprend.) Excusez-moi ! (Remarque.) S'il vous plaît... Chacun parle sa langue !

M. Yvan Zweifel (PLR). Merci, Monsieur le président. J'avais hâte de voir les progrès que vous aviez faits ! (Rires.) Mesdames et Messieurs, chers collègues, nous avons pris note de la réponse du Conseil d'Etat, que l'on ne peut évidemment que regretter. On rappelle qu'il s'agissait de la queue de comète des aides covid et que dans ce contexte un certain nombre d'entreprises (en gros trois, selon le département de l'économie), actives dans des domaines assez spécifiques, se sont retrouvées dans une situation assez particulière: elles ont bénéficié d'aides covid de la part de l'Etat, mais elles ont fait un peu plus que ça, puisqu'elles ont par ailleurs obtenu d'autres aides.

Il se trouve que par malheur pour elles, ces autres aides étaient par exemple des abandons de créances, ce qui, d'un point de vue comptable (mais je ne voudrais pas entrer trop dans les détails techniques), a pour effet, si vous supprimez une dette au passif, de créer un revenu extraordinaire dans le compte de résultat, un revenu qui est donc imposable. La société, qui était jusque-là dans une situation délicate, se retrouve alors dans une situation non pas bénéficiaire, mais équilibrée, on va dire. Et ce qui se passe avec les aides covid, c'est que l'Etat se retourne tout d'un coup envers la société et lui dit: «Ah, c'est génial, vous avez profité d'une dette qui a été annulée; eh bien maintenant on va se substituer à cette dette et on va vous demander de nous rembourser notre aide !» Sauf que la résultante de cela, c'est que l'entreprise est à nouveau exactement dans la même situation délétère qui était la sienne pendant le covid, c'est-à-dire qu'elle se retrouve tout simplement à faire faillite.

L'idée ici était donc de prendre en considération ces quelques cas extrêmement particuliers, et l'unanimité de la commission a bien compris quelle était la problématique. Il y avait une réponse toute simple à apporter, qui consistait à rouvrir les taxations fiscales. L'administration explique en long et en large que ce n'est pas possible, mais ce n'est pas la vérité. Ce n'est pas que l'administration ne peut pas, c'est qu'elle ne veut pas ! Alors d'accord, ce n'est pas grave, elle ne le fait pas. Enfin si, c'est grave en l'occurrence ! Mais la bonne nouvelle... Je vais citer la fin de ce rapport et en profite pour remercier le département de l'économie et la conseillère d'Etat Mme Bachmann. Selon eux, «le Conseil d'Etat ne dispose [...] d'aucune marge de manoeuvre» - à mon avis, ce n'est pas tout à fait exact - «pour interpréter et prévoir des exceptions aux dispositions fédérales, sauf à considérer qu'une base légale cantonale avec un budget dédié soit élaborée». Ce budget existe, Mesdames et Messieurs, puisque nous avons tous voté à l'unanimité des aides covid pour ces entreprises ! Il s'agit exactement de la même situation.

En conclusion, ce que je souhaite, c'est que ce rapport soit renvoyé au Conseil d'Etat, avec comme mission de faire exactement ce qui est prévu dans les trois dernières lignes de son rapport, c'est-à-dire élaborer une base légale pour ces trois seules entreprises qui sont touchées, de manière que celles-ci ne soient pas discriminées parce qu'elles se trouvent dans une catégorie différente de toutes les autres, qui n'ont pas eu à fournir ces efforts. Merci, Monsieur le président.

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Je dirai juste un mot pour rappeler que la base légale qui régit ces aides covid est fédérale. C'est la première chose. La deuxième, c'est que les cas particuliers, nous les traitons au jour le jour avec l'administration. Notre porte est toujours ouverte et nous sommes orientés solutions. Mais il est vrai que notre marge de manoeuvre est aujourd'hui limitée en ce qui concerne quelques cas particuliers d'entreprises qui, par ailleurs, font souvent recours contre des décisions et perdent devant le tribunal.

Je rappelle que des textes ont aussi été déposés au niveau fédéral. On se serait réjouis de leur acceptation, car cela aurait permis au canton d'avoir plus de marge de manoeuvre. Cependant, non seulement ils ont été refusés, mais le Conseil fédéral n'est pas entré en matière sur d'éventuelles modifications de ce dispositif d'aides covid.

Maintenant, soyons clairs, cette motion de commission, bien que j'en comprenne les objectifs, ne demandait pas au Conseil d'Etat la constitution d'une base légale spécifique avec un budget dédié. Vous pouvez également imaginer qu'au-delà des cas concernés aujourd'hui, d'autres pourraient l'être par analogie. Si c'est le souhait du parlement, je l'invite, le cas échéant, à demander clairement au Conseil d'Etat l'édiction d'une base légale, voire à la rédiger lui-même puisqu'il en a la possibilité. Ce serait aussi une option; elle n'a jusqu'ici pas été prise par le parlement.

Le message a donc été bien reçu, et je ne suis pas certaine qu'un nouveau renvoi de ce texte au Conseil d'Etat change concrètement les choses, puisque nous allons de toute manière poursuivre cette recherche de solutions avec les entreprises concernées. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. J'appelle l'assemblée à se prononcer sur la demande de renvoi au Conseil d'Etat.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 3038 est adopté par 41 oui contre 39 non.

Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 3038 est donc rejeté.