Séance du jeudi 20 mars 2025 à 20h35
3e législature - 2e année - 11e session - 60e séance

M 3107
Proposition de motion de Angèle-Marie Habiyakare, Masha Alimi, Guy Mettan, Julien Nicolet-dit-Félix, Laura Mach, Pierre Eckert, Christo Ivanov, Léo Peterschmitt, Sophie Demaurex, Yves de Matteis, Marjorie de Chastonay, Louise Trottet, Grégoire Carasso, Patrick Lussi, Cédric Jeanneret, Uzma Khamis Vannini, Emilie Fernandez, Philippe de Rougemont, Sophie Bobillier, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Lara Atassi pour une éducation critique et citoyenne face aux défis contemporains
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 20 et 21 mars 2025.

Débat

Le président. Nous traitons à présent la dernière urgence de la séance, à savoir la M 3107. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je cède le micro à la première signataire, Mme Angèle-Marie Habiyakare.

Mme Angèle-Marie Habiyakare (Ve). Merci, Monsieur le président. Je commencerai par une citation de Dominique Wolton: «Nous autres, humains, nous adorons l'instant, mais n'existons que dans la durée.»

Mesdames les députées, Messieurs les députés, l'histoire et la géographie sont des piliers essentiels de l'éducation citoyenne et critique. Elles permettent aux élèves de comprendre les enjeux sociaux, économiques et géopolitiques actuels, tout en développant un jugement éclairé face à la désinformation. Or, la réforme de la maturité gymnasiale menace de réduire considérablement l'enseignement de ces matières, avec une diminution de 33% pour la géographie (passant de six à quatre heures) et une réduction de 25% à 50% pour l'histoire (passant de huit à six ou quatre heures). De plus, certaines propositions prévoient de concentrer ces enseignements sur la première et la deuxième année, alors que leur importance est accrue en deuxième, troisième et quatrième année, lorsque les élèves acquièrent des droits politiques et doivent être prêts à participer activement à la société.

La transversalité est un point clé de cette réforme au niveau fédéral. Cependant, dans le canton de Genève, l'intégration de cette transversalité reste floue. Le DIP met au même niveau les heures de maîtrise de groupe et des activités transversales non définies, avec des périodes insuffisantes partagées entre ces deux éléments: deux heures par semaine en première et deuxième année, puis seulement une heure et demie en troisième année et trente minutes en quatrième année.

Ces semaines décloisonnées ne peuvent remplacer un enseignement régulier et structuré, particulièrement pour des matières aussi fondamentales que l'histoire et la géographie. Des initiatives comme celle d'un site du service écoles-médias s'intitulant «Histoire et culture numérique - l'enseignement de l'histoire à l'ère du numérique» montrent comment l'histoire et la géographie peuvent être mises au service de ces réflexions modernes et transversales.

Bien que cette réforme mette à l'honneur les sciences dites «dures», ce qui n'est pas un mal en soi - j'ai fait une maturité scientifique, donc ce n'est pas un problème pour moi -, il convient de souligner que des activités transversales floues et non définies ne constituent pas la solution. A la place, il serait bien plus pertinent de mettre l'accent sur ce que nous maîtrisons et qui a prouvé son efficacité: l'histoire et la géographie. Ces disciplines, loin d'être obsolètes, sont des alliées naturelles de la transversalité, et elles permettent d'aborder des enjeux contemporains cruciaux, comme la citoyenneté numérique, les crises environnementales et les défis géopolitiques.

Rappelons également quels sont les objectifs de l'Ordonnance sur la reconnaissance des certificats de maturité gymnasiale (ORM), qui vise à préparer les élèves à assumer des responsabilités dans la société. L'ORM met en avant des compétences comme l'ouverture d'esprit, l'esprit critique et la capacité de jugement. L'histoire et la géographie sont des outils fondamentaux pour atteindre ces objectifs, car elles permettent de développer une compréhension globale du monde et de la société.

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

Mme Angèle-Marie Habiyakare. Merci, Monsieur le président. Réduire l'enseignement de l'histoire et de la géographie reviendrait à priver nos jeunes de la culture générale essentielle à la formation d'une pensée critique et d'un jugement éclairé. Une approche transversale ne se substitue pas à un enseignement en profondeur, mais doit s'enrichir de ces disciplines. Je vous invite donc à soutenir cette motion, comme l'ont fait le parti socialiste, le groupe LJS ainsi que des membres de l'UDC, pour garantir une éducation équilibrée et préparer nos jeunes à relever les défis du monde moderne. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Thierry Arn (LC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion s'inscrit dans le cadre du projet de réforme de la maturité gymnasiale en Suisse. Cette réforme, bien que fédérale, laisse une certaine latitude aux cantons dans l'organisation des grilles horaires.

Dans les scénarios mis en consultation, une baisse significative de 33% du temps d'enseignement de la géographie est prévue, comme l'a dit ma préopinante. Le temps d'enseignement d'histoire baisse lui aussi. De manière plus générale, les périodes d'enseignement des sciences humaines sont diminuées, au profit d'autres matières.

Dans un environnement où nos élèves sont de plus en plus confrontés aux «fake news» et où la compréhension des enjeux géopolitiques mondiaux devient primordiale, est-il opportun de diminuer le temps d'enseignement de ces matières ? Pour Le Centre Genève, la réponse est non.

Cette motion invite également le Conseil d'Etat à étudier la possibilité d'intégrer des périodes d'éducation citoyenne à la grille horaire. Ces cours permettraient à nos élèves de comprendre notre système politique et de s'imprégner des différents rouages du vivre-ensemble, si important dans notre société.

Notre parti défend une société fondée sur la responsabilité individuelle et collective. L'éducation joue un rôle clé dans cet équilibre. Donner aux jeunes des connaissances solides en histoire, en géographie et en citoyenneté, c'est investir dans une démocratie vivante et une société résiliente face aux défis à venir.

Il est de notre responsabilité, en tant que députés, de garantir que les élèves du canton aient accès à un enseignement qui leur permette de comprendre le monde dans lequel ils évoluent. Soutenir cette motion, c'est faire le choix d'une école qui forme des esprits éclairés, critiques et engagés ! Pour toutes ces raisons, nous vous recommandons de l'accepter.

M. Frédéric Saenger (LJS), député suppléant. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je pourrais juste vous dire que la marche du monde actuel constitue le seul argument pour ne pas réduire les cours d'histoire-géo. Sur notre planète en perpétuelle mutation, sombrant trop souvent dans l'absurdité la plus totale, la question de la réduction des cours d'histoire-géographie me semble non seulement contreproductive, mais également dangereuse.

Plus tôt, le roman dystopique «1984» a été évoqué. C'est précisément cette référence qui souligne l'urgence de notre débat. Comment pouvons-nous, en conscience, envisager de priver nos enfants des outils nécessaires pour comprendre le passé, décrypter le présent et anticiper l'avenir ?

L'histoire, c'est le miroir de notre humanité, avec ses triomphes et ses tragédies. La géographie, c'est la carte de notre monde, avec ses richesses et ses inégalités, ses conflits et ses coopérations.

Comment pouvons-nous espérer former des citoyens éclairés, intégrés et épanouis, si nous les privons de ces connaissances fondamentales ? Mais c'est vrai, malheureusement, nous n'apprenons rien, ne retenons rien, ou si peu. Alors réduisons les cours qui permettent d'élever, de comprendre, d'intégrer ! Mieux, supprimons-les, puisqu'ils ne servent à rien ! Virons les profs, faisons le ménage dans l'administration - visiblement, c'est plutôt à la mode ces derniers temps. Sacrifions les matières qui forment l'intelligence, la sensibilité et la conscience, dans une logique de rentabilité à court terme !

La réduction des cours d'histoire-géographie, c'est le signe d'une vision utilitariste de l'éducation, qui privilégie les compétences techniques au détriment des valeurs humaines, c'est le renoncement à l'ambition que nos enfants et leur descendance puissent être meilleurs que nous et devenir des citoyens qui ne souhaitent pas vivre dans une idiocratie et qui soient capables de penser par eux-mêmes, de s'engager pour le bien commun, de construire un monde plus juste et plus fraternel.

C'est pourquoi, au-delà des clivages partisans, des calculs électoraux, Libertés et Justice sociale soutient avec force et conviction cette motion «pour une éducation critique et citoyenne». Merci. (Applaudissements.)

M. Patrick Lussi (UDC), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, d'emblée, nous tenons à dire que nous sommes quelques députés UDC à avoir été agréablement surpris par le fond de cette motion et sa clairvoyance. Ce texte a l'intelligence de dire que certaines matières sont absolument nécessaires, non seulement pour comprendre notre passé - celui-ci est advenu -, mais surtout pour savoir où nous devons aller et comment.

Je crois que malgré ce que disait Confucius: «L'expérience est une lanterne attachée dans notre dos, qui n'éclaire que le chemin parcouru», eh bien il nous faut, dans le cadre de nos travaux, essayer d'éclairer et de voir, notamment par l'enseignement de la géographie, de l'histoire ainsi que de la citoyenneté - je remercie Mme Habiyakare de l'avoir citée, parce que nous y tenons beaucoup au sein de l'UDC.

Pour ces raisons, notre groupe soutient ce texte, mais il considère que pour que nous puissions vraiment en exploiter tout le potentiel, il est nécessaire que nous le renvoyions en commission.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Pour ma part, derrière cette motion, je vois des enseignants, qui aiment leur métier, qui aiment la branche qu'ils enseignent et qui ont des craintes quand ils constatent que les heures qui leur sont allouées seront potentiellement réduites.

Pour moi, cette motion est positive, elle reflète l'intérêt de ces métiers. Et c'est logique: on parle de personnes qui ont choisi de se former, en l'occurrence en histoire et en géographie, pendant au moins cinq ans à l'université et qui, ensuite, ont décidé d'en faire leur métier, jugeant que l'important, c'était de transmettre les notions qu'ils ont apprises.

J'ai moi aussi la chance d'exercer ce métier. Je le dis clairement, je suis concernée par l'article 24, je le reconnais, mais je pense que certaines choses doivent pouvoir être dites. J'ai cette chance d'avoir fait de cette transmission mon métier. Pour ma part, j'enseigne le droit, également au secondaire, raison pour laquelle je suis aussi concernée par cette réforme de la maturité. Hier après-midi, j'ai eu l'opportunité de participer à la consultation sur cet objet.

Sur les quatre ans que représente un cursus de maturité, nous avons actuellement une heure de droit à l'horaire, nettement plus d'heures si on est en économie et droit, mais une seule si on n'a pas choisi cette OS. Réfléchissez à l'importance du droit dans notre société. Réfléchissez au nombre de conflits, d'erreurs qui pourraient être évités si les personnes connaissaient un peu mieux leurs droits.

Je vous cite par exemple les contrats, le droit du travail, les droits des locataires, les droits des consommateurs. Parlons aussi du droit pénal: connaître le grand débat qui a abouti à l'abolition de la peine de mort, alors que de plus en plus d'élèves pensent qu'on devrait la rétablir, ou se poser la question de l'intérêt de faire de la prévention ou de la répression. Ce sont des débats intéressants à avoir. Il y a aussi le droit international, qui permet de grands débats. Il existe donc dans cette branche toute une série de domaines, alors que, je vous le rappelle, seule une heure est prévue pour tous les collégiens.

Dans le projet de nouvelle maturité - au passage, je m'en réjouis -, deux heures sont prévues. Magnifique ! Deux heures sur les quatre ans ! Evidemment, vous avez compris où je veux en venir; pour ma part, en tant qu'enseignante de droit et étant passionnée par ce domaine, j'estime que ce n'est largement pas suffisant.

Là, vous avez entendu l'avis d'une enseignante de droit. A ma place, je pourrais mettre un professeur de maths; il vous ferait le même raisonnement, en présentant l'importance de sa branche. L'enseignant de français, l'enseignante d'allemand que j'ai derrière moi pourraient vous faire le même plaidoyer.

Le problème, c'est qu'en tant qu'enseignants, nous pensons tous qu'il faudrait prévoir beaucoup plus d'heures dans notre matière, parce que bien entendu, c'est la plus importante pour nous. Ma conclusion, c'est qu'il faut qu'une personne ait une vision au-dessus... Pas une seule personne, mais il faut une vision globale. Ici, on nous présente l'importance de la géographie et de l'histoire, parce que ce sont les branches qui sont actuellement concernées, mais on ne peut pas réagir comme ça. Parce que si on adopte cette motion, peut-être qu'elle entraînera une réaction, mais alors on devra couper ailleurs. Et dans trois mois...

Le président. Merci, Madame la députée.

Mme Céline Zuber-Roy. ...certains diront: «Catastrophe, on enlève les maths, ils ne sauront plus compter ! Cela va déstabiliser la société !» Par conséquent, je vous appelle à renvoyer ce texte en commission, afin que nous ayons une vision d'ensemble et surtout pour que le processus de consultation en cours, dans le cadre duquel les enseignants peuvent donner leur avis, puisse être mené à son terme; il y a encore du travail. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. François Baertschi (MCG). C'est vrai que notre groupe a été agréablement surpris de voir que ce texte avait été déposé, car parmi les quinze éléments qui constituent la charte du MCG, on retrouve en particulier un point, voulu par les membres fondateurs, visant à rétablir l'enseignement de l'histoire suisse dans les établissements scolaires. Nous en avons déjà parlé au sein de ce parlement, en suscitant parfois pas mal d'oppositions, parce qu'il y a chez certains une volonté de ne pas voir l'identité suisse ou l'identité genevoise.

Comme vous le savez, nous sommes attachés à cette identité. Nous ne pouvons donc tout naturellement qu'aller dans le sens de cette motion, qui demande que des branches aussi importantes que l'histoire et la géographie soient privilégiées. Face aux difficultés que traversent le monde et la Genève internationale, nous nous rendons compte qu'il est essentiel d'avoir un minimum de connaissances, de culture générale dans ces deux matières fondamentales, peut-être encore plus pour Genève que pour d'autres régions ou pays.

Pour ces raisons, nous ne pouvons que soutenir ce texte et remercier son auteure de l'avoir déposé. Nous souhaitons que ces matières soient véritablement prises au sérieux. J'ai eu la désagréable surprise il y a peu de temps d'apprendre de la part d'une petite-cousine que via l'instruction publique genevoise, elle avait appris que l'histoire suisse commençait avec la Première Guerre mondiale. En effet, au collège, on ne lui a pas appris toute la période antérieure.

On constate donc de grosses lacunes dans l'enseignement effectif - non pas dans les programmes, mais dans l'enseignement effectif -, et je crois qu'il faudrait aussi vérifier ce genre de choses. Parce qu'entre les belles théories et promesses d'un côté et la dure réalité de l'autre, on constate un écart conséquent. Le MCG pense que ce texte est un premier pas dans la bonne direction et qu'il faut le soutenir. Vu que c'est une motion, on peut sans risque la voter en plénière et aller ensuite bien évidemment beaucoup plus loin. Merci, Monsieur le président, de votre attention.

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je ne vous surprendrai pas en vous disant que le groupe socialiste va soutenir cette excellente motion, notamment pour les raisons qui ont été données et bien présentées par notre collègue Angèle-Marie Habiyakare à l'instant. Nous avons aussi été agréablement surpris de voir que nombre de groupes au sein de ce parlement reconnaissent également la nécessité de maintenir une place suffisante pour l'histoire, la géographie et l'éducation citoyenne. Parce que sans cette place suffisante, comment pouvons-nous former les citoyennes et les citoyens de demain ? S'ils devaient être ignorantes et ignorants de notre histoire, de nos institutions ou du monde qui nous entoure, comment pourraient-ils être prêts à affronter les enjeux d'aujourd'hui et de demain ?

Je trouve pour ma part dommage que le PLR résume finalement toute cette affaire à un débat entre les enseignants et enseignantes de telle et telle matière, en disant que toutes les branches se valent et que ce ne sont au fond que des préoccupations - je caricature un peu - limite corporatistes des différents enseignants et enseignantes.

Il nous dit aussi que c'est dommage qu'on ne fasse pas davantage de droit, parce qu'on pourrait aborder la question de l'abolition de la peine de mort ou... Je ne sais plus, Mme Zuber-Roy avait cité un deuxième exemple. Mais, Madame Zuber-Roy - vous transmettrez, Monsieur le président -, est-ce que vous pensez que les enseignants et enseignantes ont attendu un cours de droit pour aborder ces différents aspects ? Ce sont justement des éléments qui trouvent place dans les cours d'histoire et d'éducation citoyenne, parce que la formation gymnasiale n'est pas une formation pratique, mais un cursus où on doit acquérir une certaine culture générale, ce qui n'exclut pas les aspects plus pratiques que vous avez mentionnés.

Je pense qu'on ne peut que saluer et appeler de nos voeux que les gymnasiens et les gymnasiennes ainsi que tous les élèves de l'enseignement secondaire II reçoivent des informations sur leurs droits, mais à mon sens ça ne doit pas se faire au détriment des matières dont nous avons parlé.

Et puis - j'en terminerai par là, Monsieur le président - cette approche du PLR fait finalement écho à la vision de la conseillère d'Etat, qui consiste à dire qu'on ne fait une consultation qu'auprès des enseignants et enseignantes. C'est ça qui ne va pas, on doit avoir un débat public. Parce que, Mesdames et Messieurs, cette question de la nouvelle maturité concerne l'ensemble de la population. Nous appelons donc clairement de nos voeux une consultation publique. Je vous remercie de voter cette motion ! (Applaudissements.)

Mme Angèle-Marie Habiyakare (Ve). Il m'est difficile de ne pas réagir aux propos de notre collègue Mme Zuber-Roy, que je salue en tant que bonne enseignante - j'ai reçu plusieurs échos quant à la qualité de ses cours de droit. J'aimerais quand même rappeler que ses propos sont assez faussés. Il y a eu une augmentation pour les cours d'économie et droit, qui passent maintenant à quatre heures, réparties entre les deux matières, faisant de cette branche une discipline fondamentale.

Je me souviens que lorsque j'étais en première année du collège, nous avions une heure d'économie par semaine pendant un semestre et une heure de droit pendant l'autre semestre. Actuellement, dans les propositions qui sont faites, c'est deux heures en première année et en deuxième année, c'est-à-dire deux heures d'économie et deux heures de droit. Il y a donc déjà une petite correction à faire.

De plus, concernant le texte de cette motion, j'ai des doutes par rapport à la lecture qui a été faite, parce que si vous lisez bien l'exposé des motifs, il formule le besoin de défendre la matière et non les enseignants... (Brouhaha.)

Le président. Madame la députée, un instant. Est-ce que je peux rappeler au groupe UDC qu'il reste un quart d'heure de séance et demander à ses membres d'écouter la personne qui s'exprime ? (Remarque.) Non, mais s'il vous plaît, écoutez ! Quand vous parlez, on vous écoute, Monsieur. (Remarque.) Du respect, du respect ! Vous pouvez reprendre, Madame.

Mme Angèle-Marie Habiyakare. Je disais que le débat actuel ne porte pas sur le nombre d'ETP ou le nombre d'heures de cours dont les enseignants bénéficieront pour leur matière, mais plutôt sur l'enjeu de la réduction des heures pour les branches concernées et de l'implication qu'elle aura pour les collégiennes et collégiens.

N'oublions pas que dans cette réforme, la plupart des scénarios proposés suggèrent que ces enseignements ne soient donnés qu'en première et en deuxième année, soit quand les élèves ont entre quinze et seize ans, alors que quand ils ont dix-sept ou dix-huit ans, la majorité des élèves sont intéressés à connaître leurs droits politiques, car ils seront plus tard invités à voter et deviendront éligibles.

En plus, dans les invites de la motion, il est proposé de revoir la répartition par rapport à d'autres familles de disciplines, sans réduire les heures dédiées aux sciences humaines, qui englobent l'économie et le droit, mais plutôt en prenant ces heures parmi les activités transversales, qui ne sont pas définies. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Sangdel... M. Sangdel, excusez-moi ! A cette heure-là, tout est possible ! (Rires.) Vous avez cinquante secondes, Monsieur le député.

M. Djawed Sangdel (LJS). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, toutes les matières sont importantes, mais aujourd'hui, la création de l'ensemble des valeurs dépend de l'histoire. Nous savons tous que la jeunesse est de plus en plus intéressée par certaines autres matières, comme l'IA, la technologie, l'économie et peut-être l'entrepreneuriat. Mais si nous n'enseignons pas l'histoire, nous n'allons pas créer l'avenir; il ne dépend pas du futur, mais du passé et du présent.

Pour cette raison, le groupe LJS vous invite à soutenir cette motion et à donner ainsi la possibilité à nos jeunes des futures générations de mieux comprendre leur histoire, pour qu'ils puissent créer des valeurs pour l'avenir. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'aurais presque envie de vous dire que vous avez tous raison. Oui, l'histoire est importante. Oui, la géographie est importante. Oui, l'éducation citoyenne est importante. Mais ça, ça ne fait pas une maturité. Dans la future maturité, vous avez treize disciplines fondamentales: le français, l'allemand ou l'italien - première langue, nationale -, une autre langue - probablement l'anglais -, les maths, l'informatique, la biologie, la chimie, la physique, la géographie, l'histoire, l'économie et le droit, la philosophie, les arts et la musique, en plus des options spécifiques et complémentaires, du travail de maturité et de tout ce qu'on doit faire en transversalité. Et l'éducation physique, très importante également !

Vous avez donc tout à fait raison: l'histoire, c'est fondamental, la géographie aussi. Mais je suis au regret de vous dire, Mesdames et Messieurs, qu'il faudra faire des choix. Aujourd'hui, rien n'est décidé. Des propositions sont en consultation. Si vous voulez une consultation et qu'elle soit publique, même si je ne suis pas convaincue que l'entier de la population soit concerné par cette maturité... Que vous, Mesdames et Messieurs les députés, soyez concernés, oui. A ce moment-là, renvoyez le texte en commission, pour qu'on puisse vous donner toutes les explications et que vous puissiez choisir là où vous allez couper. Parce que vous ne pourrez pas tout garder.

Le plan d'étude, cadre fédéral, pose un certain nombre de pourcentages dans les familles de disciplines, qui sont des minima. Aujourd'hui, certains d'entre eux ne sont pas atteints, notamment en art, alors que d'autres le sont, notamment en sciences. Et je vous rappelle la pétition des enseignants de maths, qui sont venus vous dire à quel point il était important d'enseigner les sciences et les maths, et que leur discipline était également fondamentale.

A un moment donné, il faudra faire des choix. La maturité genevoise consacre actuellement 34% aux langues. Le minimum prévu par la réforme est de 27%. Si vous voulez maintenir la géographie et l'histoire dans une proportion plus importante, il faudra probablement couper dans les langues. Est-ce que vous assumerez ? Est-ce que vous irez dire aux enseignants de langue qu'il faudra moins d'heures dans leurs matières ?

C'est ça, la problématique, et j'aimerais pouvoir vous l'expliquer en commission. Je vous propose donc de renvoyer cette motion à la commission des pétitions... (Remarque.) Pardon, vous avez tout à fait raison, à la commission de l'enseignement !

J'aimerais aussi rappeler que nous avons des spécificités genevoises, comme l'espagnol ou la philosophie - la philosophie, on n'est pas obligé de la maintenir. Est-ce qu'on va la garder ou non ? On pourrait décider de ne pas la maintenir, car c'est une spécificité genevoise. Et ensuite, vous viendrez tous nous dire que la philosophie, c'est fondamental. Oui, ça l'est; tout est important, tout a du sens. Mais à un moment donné, il faudra qu'on fasse des choix, ou alors vous viendrez nous dire qu'il faut étendre la grille horaire des élèves, mais je pense que nos élèves... Vous avez probablement aussi lu l'article publié en fin d'année dans lequel ils disaient qu'ils avaient beaucoup d'heures et que la pression était importante avec toutes ces disciplines.

Donc j'entends que la géographie, l'histoire et l'éducation citoyenne, c'est important, bien sûr, mais il faudra qu'on puisse trancher et faire des arbitrages. C'est l'objet de la consultation en cours. Différentes grilles et propositions ont été mises en consultation, afin que nous puissions trouver un bon équilibre entre les pourcentages des familles de disciplines. C'est ça qui est aujourd'hui en discussion; rien n'est décidé. Par conséquent, je trouverais très dommage que vous votiez cette motion ce soir, sur le siège, sans même avoir l'entier des explications. Je vous garantis qu'on aurait ensuite une pétition des autres enseignants.

Je ne veux pas faire la guerre des disciplines, mais c'est ce qui risque d'arriver. Prenez donc au moins le temps de recevoir des explications à la commission de l'enseignement sur les pourcentages de disciplines, afin que nous vous présentions ce qui est en train d'être discuté. Je rappelle que rien n'est acté. Merci beaucoup, Mesdames et Messieurs les députés.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons voter en premier sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 3107 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 59 non contre 31 oui.

Mise aux voix, la motion 3107 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 61 oui contre 29 non et 2 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 3107 Vote nominal