Séance du vendredi 13 décembre 2024 à 17h
3e législature - 2e année - 8e session - 48e séance

PL 13196-A
Rapport de la commission législative chargée d'étudier le projet de loi de Pierre Nicollier, Murat-Julian Alder, Raymond Wicky, Rémy Burri, Adrien Genecand, Serge Hiltpold, Alexandre de Senarclens, Philippe Morel, Véronique Kämpfen, Fabienne Monbaron, Francine de Planta, Alexis Barbey modifiant la loi sur l'organisation des institutions de droit public (LOIDP) (A 2 24) (Quelles compétences pour la gouvernance des institutions de droit public ?)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 21 et 22 novembre 2024.
Rapport de M. Cyril Mizrahi (S)

Premier débat

Le président. Nous poursuivons notre ordre du jour avec le PL 13196-A, traité en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. Cyril Mizrahi.

M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Moi non plus, je n'ai plus beaucoup de voix, mais vous avez l'habitude, donc ça ira très bien ! Mesdames et Messieurs, chers collègues, je vous rappelle très brièvement que ce projet de loi vise à ajouter des exigences s'agissant des membres des conseils d'administration nommés par le Conseil d'Etat, d'une part, et de l'autre, à prévoir des mécanismes de recrutement spécifiques en ce qui concerne la présidence des conseils d'administration. Ce texte n'a pas convaincu la majorité de la commission; à vrai dire, il n'a convaincu que le groupe qui l'a déposé, qui n'a cependant pas rédigé de rapport de minorité.

Ce texte est apparu comme relativement inutile à la majorité de la commission, puisque si vous regardez l'article 16, alinéa 1, lettre c, de la loi sur l'organisation des institutions de droit public, sur les conditions de nomination, il existe déjà des exigences. Cet alinéa comprend en effet l'exigence de «compétences susceptibles de contribuer effectivement au bon fonctionnement des institutions concernées». L'ajout de la mention que les membres désignés par le Conseil d'Etat «doivent répondre au profil d'exigence spécifique nécessaire à la bonne gouvernance de l'institution concernée» ne nous paraissait pas particulièrement pertinent et ne nous semblait pas apporter quoi que ce soit, si ce n'est le risque de créer une sorte de conseil d'administration à deux niveaux, avec des membres censés être plus compétents que les autres. Cela nous semblait finalement dangereux pour la gouvernance de ces institutions et contraire à la vocation démocratique de ces conseils d'administration. Bien entendu, il faut que les membres soient compétents, mais ils représentent aussi différentes sensibilités et pas uniquement des experts et expertes.

Quant à la désignation des présidents de conseils d'administration, c'est finalement le même type de réflexion. Il ne s'agit pas de fonctions salariées, mais de la gouvernance d'institutions de droit public, de service public, dont les conseils d'administration ainsi que les présidences ont une vocation politique et représentative; il ne s'agit donc pas seulement de désigner des experts et expertes.

Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous invite tout simplement à rejeter ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Pierre Nicollier (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, lire ce rapport et ces travaux et entendre mon préopinant - vous transmettrez, Monsieur le président - s'avère très intéressant. Cela signifie que les membres du conseil d'administration peuvent être choisis même s'ils sont incompétents, s'ils ne répondent à aucune exigence du profil nécessaire à la bonne gouvernance d'une institution, puisque avec le refus de ce projet de loi, on dit que les présidents de ces établissements de droit public, contrairement à tous les présidents d'autres organisations, n'ont besoin ni d'être compétents ni d'avoir l'expérience requise pour assumer leur rôle. Par contre, il est vrai que c'est politique, et nous pouvons désigner n'importe qui.

Oui, il existe déjà une règle très générale. Cependant, l'objectif de ce projet de loi est de rendre les profils plus spécifiques, pas d'effectuer un choix ou d'appliquer un filtre basé sur un profil politique; il s'agit de s'assurer que les choix effectués sont basés sur le besoin de l'institution et pas sur le souhait de l'un ou de l'autre, en particulier lorsque les choix sont politiques. Les choix vont continuer à être politiques, par contre, nous voulons nous assurer que les personnes choisies soient compétentes. Je vous remercie.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Ce projet de loi part du postulat que les personnes qui siègent dans les conseils d'administration sont incompétentes, que l'on place le premier venu, à la tête du client. C'est un postulat bien évidemment erroné et profondément scandaleux, quand on y réfléchit. J'imagine que l'on doit penser à un ou deux cas spécifiques, se dire que c'est une généralité et que les personnes nommées par le Conseil d'Etat le sont par faveur ou copinage. Ça va dans la droite ligne du «tous pourris» que les Vertes et les Verts rejettent fortement.

Aujourd'hui, les compétences et les qualifications sont examinées par le gouvernement; cela est déjà fait. La création d'une exigence supplémentaire avec ce projet de loi empêcherait une certaine flexibilité dans les profils qui siégeraient dans les conseils d'administration et brouillerait davantage les pistes. A quel moment allons-nous définir quelle compétence est pertinente pour quelle institution ? Il faudrait créer une grille, ensuite l'uniformiser dans toutes les institutions, déterminer si les candidats s'y conforment ou non. S'ils ne s'y conforment pas, est-ce qu'on ouvre la voie à des recours, à des recours juridiques ? En bref, cette proposition amène beaucoup plus de problèmes que la situation actuelle. En soi, la volonté de clarifier les compétences des personnes siégeant dans des conseils d'administration est tout à fait légitime, mais la manière dont on le propose et le sous-entendu intrinsèque du «tous pourris» de ce projet de loi nous forcent à le refuser.

Je le relève une dernière fois, il n'y a pas besoin d'être pilote pour présider le conseil d'administration de l'aéroport, il n'y a pas besoin d'être médecin pour présider le conseil d'administration des HUG, il n'y a pas besoin d'être chauffeur des TPG pour présider le conseil... (Remarque.) Merci, Monsieur Florey, on note que vous n'êtes pas candidat - vous transmettrez, Monsieur le président ! Ce projet de loi ne présente pas d'intérêt. C'est pourquoi, tout en vous remerciant pour la proposition, nous le refuserons. Peut-être que sans le sous-entendu, cela aurait été meilleur. Merci.

M. Amar Madani (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas la première fois que le PLR attaque ces conseils d'administration. Cet objet propose de les professionnaliser. Ils sont censés représenter les forces politiques exprimant les différentes volontés politiques. Si nous suivons les exigences émises par le groupe PLR, nous entrons dans l'opérationnel. C'est pourquoi le MCG refusera ce texte. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Stéphane Florey (UDC). Il faut un peu revenir à la réalité des faits. On sait tous très bien comment ça se passe: bien souvent, les attributions se font à l'occasion d'une campagne du Grand Conseil: quelqu'un se serait démarqué mais n'aurait pas été élu; c'est en quelque sorte un remerciement de bon procédé. (Commentaires.) C'est exclusivement... Le fait que ces personnes sont nommées dans ces conseils d'administration est valable pour tous les partis. Ça, c'est le premier point.

Deuxièmement, depuis que ce Grand Conseil a imposé la parité, il est encore plus difficile de trouver des personnes qui ont de réelles compétences. (Remarque.) Vous pouvez très bien avoir une femme parfaitement compétente... Madame Kast, vous pouvez rouspéter tout ce que vous voulez, mais on peut inverser le problème ! (Commentaires.) On peut très bien se retrouver avec une femme extrêmement compétente... (Remarque.) Oui, vous pouvez acquiescer, merci ! (Rires.) ...mais qui se voit refuser le poste au profit d'un homme, parce que ce Grand Conseil a imposé la parité. C'est là aussi un non-sens et c'est regrettable sur le fond. Aujourd'hui, on se retrouve avec pléthore de membres dans ces conseils d'administration qui soit sont incompétents soit n'ont pas la volonté de siéger spécifiquement dans ces conseils, alors qu'ils auraient très bien pu faire l'affaire dans un autre conseil ou dans une autre commission. (Brouhaha.)

Il serait juste de renvoyer ce texte en commission pour en rediscuter et pour que nous visions les compétences de ces personnes, que nous fixions cela dans la loi et arrêtions de désigner des personnes soit par copinage soit parce qu'elles font partie d'un genre particulier. Je demande le renvoi de ce projet de loi en commission pour que celle-ci se penche une fois pour toutes sur la question des compétences, qu'elle trouve une solution et les inscrive dans la loi. Nous réglerons ainsi ce problème.

J'ajoute encore un point. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il y a quelques années s'est tenu tout un débat sur la question de sortir le politique de ces conseils d'administration: peut-être que ce serait le moment de se redemander s'il faut absolument politiser ou non tous ces conseils. La plupart servent à une seule chose: grâce aux jetons de présence, remplir les caisses des partis, qui placent...

Le président. Merci, Monsieur le député. Vous devez terminer.

M. Stéphane Florey. ...des gens. Merci.

Le président. Je vous remercie. La parole est à... (Remarque.)

M. Stéphane Florey. J'ai demandé le renvoi !

Le président. Ah, oui, oui ! C'est vrai ! (Rires.) Du calme ! Du calme ! Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Je vais m'exprimer uniquement sur le renvoi en commission sollicité. J'allais dire que je regrettais que l'UDC ait changé de position, mais en fait non ! L'UDC n'a pas changé de position, parce que l'UDC n'était pas présente au moment du vote. (Remarque.) J'espère que s'il y a un renvoi en commission, elle sera, cette fois-ci, présente. Non, blague dans le coin, je pense que l'UDC comme d'autres a un petit problème avec le fait qu'il y ait des décisions majoritaires dans le parlement et dans le peuple. En l'occurrence, la commission a fait le travail. Ce texte n'obtient tout simplement pas la majorité de la commission, et, à mon avis, de la plénière non plus. Ça ne sert par conséquent à rien de le renvoyer en commission, et je vous suggère de refuser de le faire. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je lance le vote sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13196 à la commission législative est adopté par 43 oui contre 35 non et 2 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote. Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Le président. On ne sait pas combien ça va coûter, mais ça ne fait rien ! C'est un renvoi en commission, donc nous verrons. (Commentaires.) Vous vous en foutez, quoi ! Mais ça ne fait rien.

Mesdames et Messieurs les députés, comme promis, nous arrêtons là nos débats. Si celles et ceux qui n'ont pas pris leur paquet hier veulent le reprendre avant de quitter la salle, ils peuvent, comme on l'avait décidé, le déposer à la salle Moïse-Ducommun, dans la cour à côté des escaliers, et le récupérer ce soir avant 21h ou ce week-end avec leur badge. Vous pouvez aussi, si vous le désirez, laisser vos ordinateurs ainsi que vos affaires pour participer au cortège. Mais si vous n'y participez pas, vous pouvez évidemment reprendre vos affaires et le petit paquet en question.

Je vous souhaite à toutes et tous de belles fêtes de fin d'année, un joyeux Noël en compagnie de vos familles ainsi qu'une belle année ! (Applaudissements.)

Des voix. Merci !