Séance du
jeudi 12 décembre 2024 à
14h
3e
législature -
2e
année -
8e
session -
42e
séance
PL 13535-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous passons, Mesdames et Messieurs les députés, au traitement du budget. Simultanément, nous traiterons le RD 1602-A relatif au plan financier quadriennal de l'Etat. Durant le premier débat, le temps de parole est de sept minutes pour le rapporteur sur le budget, M. Jacques Blondin, de trois minutes pour la rapporteure sur le plan financier, Mme Marjorie de Chastonay, et de sept minutes pour les groupes ainsi que pour le Conseil d'Etat. Je cède sans plus attendre le micro à M. Blondin.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il aura fallu cinquante-six heures à la commission des finances pour finaliser le projet de budget dont nous délibérerons pendant ces deux jours. Moment fort et important s'il en est de l'année parlementaire, le vote de ce budget est essentiel pour donner un cadre et des moyens à l'exécutif et à l'administration afin d'atteindre, de réaliser et de respecter les objectifs et programmes départementaux de l'année à venir. Je vous donne le point de vue de la majorité sur les débats, de manière résumée et synthétique.
Dans le contexte particulier et favorable des finances du canton de Genève, un modus vivendi a été trouvé par plusieurs partis pour finaliser le budget 2025. D'un côté de l'échiquier politique, il y a la volonté de faire profiter les contribuables d'une baisse d'impôts, consécutivement à deux années de résultats largement bénéficiaires lors du bouclement des comptes. De l'autre côté de l'échiquier, il y a la volonté de maintenir les prestations en faveur de la population et d'accepter l'augmentation des postes demandés, notamment ceux du DIP pour faire face à l'augmentation des effectifs d'élèves dans les classes. La prise en compte cumulée de ces choix politiques a été la clé qui a permis de trouver un accord soutenu par une large majorité (parti socialiste, les Verts, MCG, LJS, Le Centre, PLR), sans opposition et avec l'abstention de l'UDC.
Mesdames et Messieurs les députés, il m'est impossible, dans cette présentation, de reprendre et de commenter tous les tenants et aboutissants qui ont conduit à l'élaboration du projet de budget que nous vous présentons. Les groupes, lors de leur prise de position, reviendront sur les éléments qu'ils jugent pertinents et ne manqueront pas de les développer, le cas échéant. Pour ma part, je me limiterai à l'essentiel, c'est-à-dire les postes de charges et de produits finalisés, avec mention des positions significatives et des commentaires sur les particularités du contexte économique et fiscal genevois.
Le contexte genevois et géopolitique: les incertitudes et préoccupations persistantes en lien avec les nombreux conflits armés de par le monde, y compris en Europe, auxquelles s'ajoutent de grandes interrogations économiques en raison de mesures protectionnistes en vogue dans plusieurs pays, conduisent logiquement les entreprises à la prudence au moment de fournir des indications sur la marche de leurs affaires en 2025. La particularité du tissu économique genevois montre une évolution de la croissance et des charges importante et variable. S'agissant des personnes morales, moins de cinquante entreprises contribuent à plus de 50% de l'impôt. Pour rappel, les secteurs clés de l'économie genevoise sont le commerce de gros, les activités financières et l'assurance, et l'horlogerie. Ces trois secteurs représentaient, jusqu'en 2019, entre 60% et 65% de l'impôt cantonal sur le bénéfice. Depuis 2020, avec l'abolition des statuts fiscaux, leur part avoisine les 80% ! Enfin, il n'est pas inutile de rappeler la pyramide fiscale inversée genevoise: elle montre que le 1% des contribuables avec les impôts les plus élevés couvre 35% de l'impôt cantonal sur le revenu, 66% de l'impôt cantonal sur la fortune, 85% de l'impôt cantonal sur le capital et 87% de l'impôt cantonal sur le bénéfice. Pour les charges, on constate que les principales subventions aux personnes physiques se montent à quelque 2,33 milliards. Quant aux subventions aux institutions publiques, elles avoisinent les 3,55 milliards.
Je vous rappelle l'évolution du projet de budget dans le temps. Le 12 septembre, le Conseil d'Etat a présenté son projet de budget 2025 en tenant compte des excellents résultats des deux années précédentes et en considérant les réformes fiscales soumises à votation populaire avant le vote du budget au Grand Conseil. Cette première mouture présentait des charges en augmentation de 512,7 millions (+4,9%), pour un montant de 10,88 milliards, des revenus en augmentation de 565,3 millions (+5,5%), pour un montant de 10,99 milliards, et, pour la première fois depuis 2015, un résultat net positif de 4,3 millions.
S'agissant des charges, il fallait entre autres relever, dans cette proposition de budget, la mise en oeuvre de la loi sur l'aide sociale (31,7 millions); la gratuité totale ou partielle des TPG (31,1 millions); l'augmentation des charges mécaniques (18,4 millions); une forte hausse des charges contraintes (+238,3 millions, dont 167,8 millions pour la cohésion sociale); l'octroi de l'annuité à la fonction publique (63,8 millions); un effet de noria qui diminue les charges de 30 millions; l'augmentation nette de 463,9 ETP - dont 131 pour faire face à l'augmentation démographique des élèves et 36 ETP pour la nouvelle structure qui consistera à mettre en place un pôle maternité; l'augmentation du budget de la culture de +9,3 millions; les mesures d'économie du Conseil d'Etat pour 22,8 millions; et la contribution à la RPT en hausse de 54 millions (pour un total de 253 millions) - je rappelle que la RPT, c'est la péréquation financière et la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons. Quant au coût de la dette, qui est de quelque 10 milliards, il se monte à 103 millions, ce qui est, soit dit en passant, historiquement bas - mais cela reste quand même une dette.
En matière de revenus, on constatait principalement une augmentation des revenus fiscaux, hors effets des baisses fiscales, de 776 millions; un impact des baisses fiscales proposées de -351,3 millions; une croissance nette des revenus fiscaux de 424,4 millions; et une hausse de 141 millions des revenus non fiscaux. Vous voyez donc que les chiffres, au niveau des revenus, étaient plus que positifs. Il y avait en plus un ajustement de la méthode de calcul des hypothèses de croissance afin de corriger les écarts significatifs constatés ces dernières années (+206 millions). Quant aux investissements, leur montant global était de 716 millions, en hausse de 20 millions, principalement pour poursuivre le développement des infrastructures, accélérer la transition écologique et soutenir la transition numérique. Les prévisions socio-économiques genevoises qui ont été retenues pour cette première ébauche du budget étaient une inflation à 1%, un PIB à 1,7% et un taux de chômage moyen annuel à 4,5%.
Correctifs aux prévisions, fin octobre-début novembre 2024: conformément à la pratique, le Conseil d'Etat a déposé des amendements pour tenir compte de l'évolution des prévisions de revenus et de charges. Les amendements du Conseil d'Etat présentent des charges en augmentation de 3,4 millions et une diminution des revenus de 255,6 millions... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...principalement les estimations fiscales revues à la baisse et l'effet de la LEFI (loi sur les estimations fiscales de certains immeubles), pour un résultat net du budget à -254,7 millions.
Après avoir pris connaissance du correctif des prévisions des revenus fiscaux pour 2025, les commissaires aux finances se sont très majoritairement accordés pour accepter un budget déficitaire dont il restait encore à déterminer l'importance et les contours, en considérant les nombreux amendements présentés tant par le Conseil d'Etat que par les commissaires et leur groupe. Le budget finalement accepté, qui vous est proposé par la majorité...
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Jacques Blondin. Je prends sur le temps de mon groupe, Monsieur le président.
Le président. Non, non, vous ne pouvez pas. (Remarque.) A ce stade, vous ne pouvez pas dépasser les sept minutes !
M. Jacques Blondin. Ah ! Donc je finis après ? (Remarque.) Je redemanderai la parole.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, je vais aujourd'hui représenter la majorité sur le plan financier quadriennal. La commission des finances a examiné le rapport du Conseil d'Etat pendant deux séances, durant lesquelles elle examinait évidemment aussi le projet de budget 2025. Lors de ces séances, les commissaires ont pu bénéficier de la présentation du plan financier quadriennal par le département, que nous remercions.
Cette planification financière est une présentation des prévisions sur le long terme, c'est-à-dire pour les prochaines années. Ce PFQ inclut des éléments structurels, mais aussi des estimations des charges et des revenus de fonctionnement, des dépenses et des recettes d'investissement, relatives à l'évolution de la dette, à l'évolution de la réserve conjoncturelle ou encore à l'évolution des risques financiers. Bref, le PFQ estime les besoins financiers et évalue si les objectifs sont tenables ou s'il faut mettre en place un plan d'économies. Au-delà de ces considérations générales, il faut quand même préciser un changement de contexte: ce deuxième PFQ nous a été présenté le 9 octobre 2024, c'est-à-dire avant l'annonce de la baisse des recettes fiscales, avant les amendements du Conseil d'Etat au projet de budget 2025 - avant la votation du 24 novembre et alors que le projet de budget était encore excédentaire et incluait l'absorption de la baisse d'impôts votée.
Dans les options retenues par le Conseil d'Etat, il y a notamment la pérennisation, dès 2025, de la mesure qui augmente le montant des subsides partiels d'assurance-maladie; l'entrée en vigueur de la LASLP; la gratuité des transports publics pour les jeunes et le demi-prix pour les bénéficiaires AVS et AI; le soutien aux transitions numérique et écologique, à la formation, à la santé et à la mobilité également. Parmi les mesures structurelles, certaines sont vraiment rédhibitoires - c'est là aussi ce qui a décidé plusieurs groupes à refuser ce PFQ -, par exemple le transfert d'une partie des charges aux communes ou encore la suspension de l'annuité une année sur deux.
En conclusion, une majorité de la commission des finances - les Verts, le PS, le MCG et l'UDC - vous recommande de refuser de prendre acte de ce rapport. Les Verts et le PS s'opposeront à ce PFQ principalement parce qu'ils refusent que la fonction publique soit une variable d'ajustement, avec l'octroi de l'annuité une année sur deux. Lors du vote en commission, le contexte budgétaire avait changé, mais malgré la réévaluation des recettes fiscales, moins bonnes que prévu, les résultats aux comptes étaient positifs. C'est pourquoi maintenir dans le PFQ des projets d'économie sur le dos de la fonction publique, notamment le projet de loi relatif à la répartition des cotisations employé-employeur, est rédhibitoire pour les Verts et le PS. Pour l'UDC, c'est différent: le refus de ce rapport est lié au déficit budgétaire annoncé. Enfin, le MCG s'oppose à ce PFQ car celui-ci vise à faire des économies sur le dos des Genevois avec l'annuité, mais aussi parce que les cotisations LPP seront en défaveur des jeunes. La rétrocession à la France voisine est en défaveur de Genève...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Madame.
Mme Marjorie de Chastonay. Merci, Monsieur le président. ...selon le MCG. Point ! (L'oratrice rit. Rires.) Pour toutes ces raisons, très différentes les unes des autres, la majorité de la commission des finances vous recommande de ne pas prendre acte de ce rapport du Conseil d'Etat et donc de le lui renvoyer. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. (Remarque.) Monsieur, vous avez épuisé votre temps !
Une voix. Il aura de nouveau la parole plus tard: maintenant, c'est au tour des groupes.
Le président. D'accord. Monsieur, vous prendrez donc sur le temps de votre groupe ? (Remarque.) Très bien. Monsieur Martin, vous avez la parole.
M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, le groupe des Vertes et des Verts est heureux de voir qu'il y a une volonté partagée, du moins des partis gouvernementaux, de doter l'Etat de Genève d'un budget ! Un budget qui doit permettre de délivrer les prestations à la population durant l'année 2025. Il me semble important de le signaler parce que c'est la première fois, depuis que j'ai la chance de siéger dans cet hémicycle, qu'un tel compromis est susceptible d'aboutir en réunissant une majorité très large - du moins je l'espère. C'est certainement dû à des circonstances favorables: on se souvient que les comptes de l'Etat de Genève, en 2023, ont présenté un bonus de 1,4 milliard. Il est bien naturel, du moment qu'il y a des recettes, d'en faire bénéficier la population à travers des prestations qui sont à la hauteur des attentes. La gratuité des TPG pour les jeunes et la réduction pour les seniors s'inscrivent également dans cette tendance, de même que d'importants remboursements de la dette, qu'il a été possible de faire avec ces recettes favorables.
Le Conseil d'Etat l'a bien compris en nous présentant, à l'automne, un projet de budget qui allait dans cette direction-là. C'était un budget qui s'élevait, au niveau des charges, à 10,892 milliards, et le budget sur lequel nous allons voter aujourd'hui, celui qui est issu de la commission des finances, est à 10,894 milliards, soit un écart de 2 millions; l'ordre de grandeur est donc pratiquement identique. J'ai envie d'utiliser, dans ces circonstances - si vous le permettez, Monsieur le président, chers collègues -, une expression qui me semble convenir, même si elle est très exotique car empruntée à nos chers voisins vaudois: avec ce budget, nous sommes déçus en bien ! Comme vous ne comprenez certainement pas cette expression, je vais tenter de vous la traduire. (Rires.)
Nous sommes déçus - pourquoi ? Nous sommes déçus parce que ce budget intègre les résultats de la votation sur la baisse d'impôts, qui certes fait du bien au porte-monnaie de la population, lui est favorable, mais induit des pertes de recettes fiscales pour l'Etat et donc pour ce budget. Mais, plus particulièrement, nous avons une pensée pour certaines communes, qui voient leur budget de fonctionnement impacté de façon extrêmement défavorable; nous voulions le relever, ce point constitue une déception. Nous sommes déçus également parce que nous n'avons pas trouvé de majorité pour certains de nos amendements chers à nos yeux, notamment sur les musiques actuelles ou sur des questions d'égalité. Déçus aussi de ne pas avoir obtenu de majorité sur l'indexation de la fonction publique: nous considérons que ce n'est pas un signal positif vis-à-vis de cette fonction publique, qui est au front pour remplir les nombreuses missions d'intérêt public incombant à l'Etat de Genève. Déçus encore, et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres, par la baisse des subventions qui existaient jusqu'à maintenant pour les vélos-cargos.
Mais, je l'ai dit, nous sommes déçus en bien. Pourquoi ? Par exemple parce que nous avons réuni une majorité sur un amendement très important concernant les violences domestiques. Déçus en bien également parce que le budget sur lequel nous votons comporte une augmentation - une augmentation substantielle - dans certains domaines comme les prestations sociales et en particulier, cela a déjà été dit, pour les subsides d'assurance-maladie, mais aussi dans le domaine de la formation ou encore de la mobilité. Déçus en bien, pour terminer, parce que ce budget de fonctionnement s'accompagne d'un budget d'investissement conséquent - 756 millions - pour investir à long terme dans des aspects importants en matière de transition écologique; dans la mobilité; dans l'environnement, à travers notamment le budget pour l'arborisation, qui a d'ailleurs été voté récemment; mais aussi dans le domaine de la formation. Et ces investissements, pour les mener à bien, il faut des postes: il faut des gens au sein de l'administration pour s'assurer que les projets avancent, que les investissements sont réalisés comme il se doit.
En conclusion, Monsieur le président, chères et chers collègues, le groupe des Vertes et des Verts entre en matière sur ce projet de budget issu de la commission des finances - nous l'aurions fait également sur le projet proposé initialement par le Conseil d'Etat. Nous saluons le fait qu'une majorité large le soutienne et nous espérons qu'elle sera au rendez-vous, dans quelques heures, pour le voter à l'issue du troisième débat également. Nous renonçons à redéposer les amendements qui n'ont pas trouvé de majorité en commission, pour jouer le jeu de ce projet de budget de compromis, et nous invitons les groupes à faire de même. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Blondin pour qu'il puisse finir son texte.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Je vais effectivement poursuivre le compte rendu du rapport de majorité; ce n'est pas encore la prise de position de mon groupe. J'en étais resté au fait qu'après avoir pris connaissance du correctif des prévisions des revenus fiscaux pour 2025, les commissaires aux finances se sont très majoritairement accordés pour accepter un budget déficitaire, dont il restait encore à déterminer l'importance et les contours en considérant les nombreux amendements présentés tant par le Conseil d'Etat que par les commissaires et leurs groupes.
Le budget finalement accepté par la majorité: après délibération et divers amendements en deuxième et troisième débat, la majorité s'est entendue pour présenter un budget finalisé, avec des charges qui se montent à 10,89 milliards et des revenus à 10,63 milliards, avec un résultat déficitaire à hauteur de 255,7 millions - le déficit maximum admissible, selon l'article 68 de la LGAF, est de 255,8 millions. Le résultat intermédiaire avant amortissement de la réserve budgétaire, prévu par l'article 6A de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, s'élève à -194,6 millions. Les budgets d'investissements nets, d'un montant total de 716 millions, ont également tous été acceptés, ainsi que toutes les politiques publiques.
Composition de la majorité qui soutient ce budget: pour rappel, à l'exception de l'UDC qui s'est abstenue, tous les groupes ont accepté ce budget et invitent le Grand Conseil à en faire de même avec une majorité d'au moins 51 voix, comme le nécessite l'acceptation d'un budget déficitaire. Enfin, la majorité vous demande de refuser tous les amendements qui seraient présentés, de quelque groupe que ce soit ! Je vous remercie de faire preuve de discipline et vous prie d'entrer en matière sur ce budget et, in fine, de l'accepter.
Comme j'ai la parole, Monsieur le président, je peux continuer au nom de mon groupe ? Ou je la reprends tout à l'heure ?
Le président. Si vous voulez, oui.
M. Jacques Blondin. Eh bien oui, tant qu'à faire ! (L'orateur rit. Rires.) Alors permettez-moi maintenant de parler au nom du Centre. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de budget qui nous est présenté est la résultante d'une situation très particulière au canton de Genève. Les bénéfices importants enregistrés ces dernières années dans les comptes alors que les budgets étaient déficitaires démontrent l'extraordinaire résilience de l'économie genevoise. C'est une chance exceptionnelle que nous avons et nous devons impérativement veiller au maintien des conditions-cadres qui assurent la stabilité dont le canton et les entreprises ont besoin. Il ne faut pas oublier que le PIB genevois est de plus de 63 milliards et que les entreprises du canton offrent 425 000 emplois. Certes, les revenus fiscaux très élevés du canton de Genève sont susceptibles de fluctuations importantes, dues à la conjoncture d'une part et d'autre part à notre pyramide fiscale inversée: un nombre limité de contribuables paient une grande part des impôts, qu'il s'agisse de personnes physiques ou morales.
Toutefois, malgré une correction importante des prévisions fiscales, les perspectives à moyen terme restent bonnes et la situation financière du canton saine. La baisse fiscale proposée par la majorité du Grand Conseil et le Conseil d'Etat, acceptée par la population le 24 novembre, est bienvenue et appréciée par la classe moyenne, qui en avait bien besoin. Fort logiquement, cela impacte le budget 2025 et le fait passer d'un bénéfice initial probable de 4,2 millions à un déficit de 255,7 millions. Attendons cependant les comptes 2025 pour voir si ce qui n'est, au stade budgétaire actuel, qu'une estimation des recettes fiscales se confirmera ou si les balances fiscales positives de ces dernières années se maintiendront.
Autre constat qui nous conforte dans nos choix: la réserve conjoncturelle de 1 milliard de francs ne sera pas activée, car le résultat du budget est inférieur au déficit maximum admissible. Le Centre constate que ce budget, au niveau des charges, ne prévoit aucune suppression de postes - il faut le redire - et que les prestations en faveur de la population, pour ne citer que ces positions, progressent de quelque 600 millions. La finalisation du budget a été grandement facilitée par les mesures proposées par le Conseil d'Etat entre la version du 18 septembre et celle du 6 novembre; qu'il en soit remercié !
Quant aux investissements nets, d'un montant de 716 millions (+20 millions), ils sont salués afin de concrétiser les projets ambitieux en faveur du développement des infrastructures, nécessaires pour accompagner la croissance économique du canton et bien évidemment soutenir la transition numérique, la transition énergétique et la transition écologique.
Le Centre entrera en matière sur ce projet de budget, qui concrétise la prise en compte tant des attentes des partisans de la baisse fiscale que de celles visant à assurer des prestations suffisantes en faveur de la population et à accorder les postes demandés. Je vous remercie de votre attention.
M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, ce budget 2025 n'est pas celui auquel la population était en droit de s'attendre. Il s'agit tout simplement, encore une fois, d'un budget conjoncturel. Au mois de septembre, il était bénéficiaire de 4,5 millions, parce qu'au mois de septembre la conjoncture était bonne ! Trois mois plus tard, la conjoncture est moins bonne et l'on se retrouve aujourd'hui avec un déficit de 250,7 millions.
C'est aussi un budget qui augmente, comme chaque année. En 2007, nous avions un budget de 7,2 milliards; dix-sept ans plus tard, nous sommes à 10,891 millions...
Des voix. Milliards !
M. Stéphane Florey. 10 milliards 891 millions, oui, c'est ce que je disais ! (Rires.) Ça augmente de manière exponentielle et on en revient finalement toujours au même: c'est un budget plus que décevant, puisqu'il est déficitaire sans qu'on assiste, encore une fois, à une quelconque réforme structurelle de la part de l'Etat ! On en revient toujours au même, d'année en année: l'Etat vient avec un budget, avec un nombre incalculable de postes supplémentaires, comme chaque année. Comme chaque année, il y a les petits arrangements entre des partis qui veulent absolument doter l'Etat d'un budget, ce qui est louable (et c'est au final le but de ce parlement), mais au-delà de ça, il n'y a rien ! Il n'y a rien d'autre qu'un budget qui finalement est déficitaire, sans réformes, sans aucune mesure, et encore une fois les chiffres, très certainement, seront largement bénéficiaires lors de l'étude des comptes, qui interviendra l'année prochaine.
Voyant ce budget qui ne nous satisfait pas, l'UDC s'est abstenue pour les raisons que je viens de citer. Nous aurions pu le refuser, comme nous le faisons traditionnellement chaque année: la seule chose qui nous a retenus cette fois-ci, c'est simplement le fait que la population a accepté des baisses d'impôts, dont la dernière qui nous réjouit puisque ce sera bon pour le porte-monnaie de tout un chacun. Mais c'est un projet de loi qui est venu de mon collègue Michael Andersen; de ce fait, comme nous avons aussi un peu «provoqué», entre guillemets, ce déficit, nous aurions été un peu mal pris de refuser purement et simplement le budget. C'est pour ces raisons que nous nous sommes abstenus et que nous nous abstiendrons sur ce budget, sauf - sauf ! - bien entendu s'il devait y avoir des amendements qui le détériorent. Par contre, nous ne changerons pas d'avis même si certains des amendements qui améliorent un tant soit peu ce déficit étaient votés, puisque les amendements proposés aujourd'hui, y compris ceux de l'UDC, ne rendront malheureusement pas ce budget bénéficiaire. Voilà les raisons pour lesquelles nous nous abstiendrons sur ce budget 2025. Je vous remercie.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, nous nous lançons donc aujourd'hui dans le grand marathon de l'année qu'est le budget ! Mais qu'est au juste le budget, hormis un grand rassemblement, un grand raout parlementaire annuel qui nous amène à rester assis sur nos chaises pendant une douzaine d'heures et à écouter, le plus patiemment possible, les déclarations des uns et des autres ? Le budget, pour reprendre une métaphore qui m'est chère, c'est une longue course de fond qui commence en septembre, se poursuit à la commission des finances en octobre et en novembre, avec parfois des changements tels que ceux constatés cette année; si tout se passe comme prévu, on franchit la ligne d'arrivée en décembre, en plénière.
Mais le budget, en réalité, c'est beaucoup plus que cela. C'est un acte politique fort qui, la plupart du temps et comme cela se fait en Suisse, essaie de refléter au mieux un consensus qu'une majorité politique cherche et essaie de trouver. Cette année, vous l'aurez compris, nous nous sommes tous efforcés d'aller dans le sens d'un consensus et le budget que nous défendons aujourd'hui en est le résultat. Pour en revenir à la métaphore de la course à pied, une sorte d'équipe de circonstance s'est constituée au cours de ces derniers mois, qui n'avait pas prévu de courir ensemble dès le début de l'année, et même si cette équipe va un peu moins vite et ne permet pas de faire un chrono ou un temps ni de gagner les trophées que nous cherchons toujours à remporter ici, elle permet en revanche d'offrir une victoire à ceux qui gravitent autour de la course, soit la population genevoise, qui a droit à un budget pour 2025.
Nous le voyons, le budget, comme toute course - si on veut la réussir -, ne se prépare pas et ne se court pas sans tenir compte des circonstances du moment, du niveau de préparation et de la forme des coureurs que nous et la population genevoise sommes, et bien sûr aussi de ce qu'on pourrait appeler le matériel et la météo, à savoir les différentes circonstances qu'on a évoquées tout à l'heure. Le budget 2025 tient donc compte de tous ces éléments qui ne sauraient pas du tout être éludés, on l'aura compris. Par conséquent, il tient compte du fait que la population - et c'est vraiment une chose dont le PLR se félicite - a accepté à deux reprises, entre 2023 et 2024, des baisses d'impôts: d'abord la LEFI, l'année dernière, et, il y a moins de trois semaines, la baisse de l'impôt pour les personnes physiques. Je le répète, nous nous en réjouissons et c'est ce qui a principalement prévalu pour l'acceptation d'un budget sur lequel nous émettrons aussi beaucoup de critiques ! Le projet de budget intègre donc, nous l'avons vu, ces deux baisses d'impôts - voulues et soutenues largement par le peuple - pour offrir plus de pouvoir d'achat à la population et pour qu'elle puisse aussi bénéficier des avantages que doivent lui procurer les très bons résultats des comptes de ces dernières années.
Cela, c'est le volet réjouissant et raisonnable du projet de budget dont il sera question pendant ces deux prochains jours. Toutefois, il n'est évidemment pas possible - ni souhaitable - d'éluder complètement la place que cette course budgétaire occupe dans le calendrier des courses budgétaires de ces dernières années. C'est la raison pour laquelle le PLR estime nécessaire, à ce stade, de revenir sur le contexte dans lequel s'inscrivent les différents budgets de ces dernières années.
Quelques rappels, d'abord. La population, vous le savez, a crû d'environ 12% ces douze dernières années et d'environ 1,3% en 2023. Or, sur ces douze dernières années - vous le savez bien car le PLR n'a de cesse de le rappeler, tant par ma voix que par celle de mon collègue à ma droite -, les charges de l'Etat ont elles aussi augmenté, mais de 28% ! Faites ce calcul facile: il s'agit d'une augmentation plus de 2,5 fois supérieure à celle de la population. Un budget de 10,8 milliards ! Quel endroit sur la planète peut proposer - je vous pose la question - 10,8 milliards de dépenses pour environ 520 000 habitants ?! Un petit constat s'impose donc à ce stade: les moyens sont là, ils sont abondamment là, mais il semblerait une nouvelle fois qu'on ne les utilise pas toujours correctement. Pourquoi ?
Vous le savez déjà, et nous le répétons aussi assez régulièrement sur les bancs du PLR: parce que le Conseil d'Etat, l'administration et le Grand Conseil également - il doit prendre ses responsabilités - n'ont de cesse d'avoir des budgets pour lesquels on ne réfléchit pas, ou très peu, aux prestations votées les années précédentes. Est-ce qu'une partie de ces prestations, de ces nouveaux postes proposés sont importants et ont toujours du sens ? Ce sont des questions que nous nous posons, mais que ne se pose pas, d'une année à l'autre, l'ensemble de ceux qui font le budget. Est-ce qu'il y a une réflexion pour réajuster ces différentes prestations votées l'année d'avant ? Non ! Année après année, on reprend les mêmes ingrédients, auxquels on en ajoute bien sûr de nouveaux, mais sans jamais, au grand jamais, se demander sérieusement si les anciens vont bien avec les nouveaux. Au grand jamais on ne se demande si les ingrédients qu'on a rajoutés dans cette grande soupe sont essentiels à la réussite de la recette globale ou s'ils sont, au mieux, de simples exhausteurs de goût - et ça, c'est vraiment au mieux - ou, au pire, des ingrédients coûteux, insipides et inutiles à la réussite du plat qui sera servi pendant toute une année à la population genevoise.
Vous l'aurez sans doute compris, ce budget ne nous satisfait pas complètement puisqu'il ajoute, pour reprendre ce qui a été dit tout à l'heure, un nombre incalculable de nouveaux postes et que leur nombre augmenterait, même si on votait l'amendement du PLR, de 2,8% par rapport à l'année dernière. Vous l'aurez compris, ce budget ne nous satisfait pas complètement car il est déficitaire de près de 256 millions. Mais, maigre consolation, il entre encore dans le déficit maximal admissible et ne le dépasse pas. Vous l'aurez donc compris... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...et je terminerai bientôt, ce budget ne nous satisfait pas complètement, car, cela a été dit, il ne propose aucune réforme structurelle, pourtant appelée de ses voeux et depuis longtemps par le PLR.
Toutefois, le PLR fera cette année l'effort de courir en équipe et de franchir, avec la majorité de ce parlement, la ligne d'arrivée de la grande course annuelle du budget. En effet, au-delà des critiques émises, il pense que c'est important d'avoir un budget, et il remercie encore la population qui par deux fois a soutenu les baisses d'impôts. Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'on étudie un projet de budget, on est en droit de se poser un certain nombre de questions, à commencer par celle-ci: ce budget permet-il de couvrir l'ensemble des besoins de la population ? Dans le cas d'espèce, selon le parti socialiste, la réponse est malheureusement non.
D'abord parce que les besoins augmentent massivement, comme en témoigne d'ailleurs la hausse considérable des dépenses sociales, qui sont certes pour partie liées à des extensions du système de protection sociale suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'aide sociale de même que de celle proposée par le parti socialiste pour une indexation systématique des subsides d'assurance-maladie - mais en majorité, l'accroissement des charges sociales illustre en réalité une précarisation des habitants.
Ensuite, si ce budget ne répond pas à l'entier des besoins de la population, c'est parce qu'il ne revient pas sur l'intégralité des coupes qui ont été opérées lors des exercices précédents. En commission, l'une des représentantes du Cartel intersyndical de la fonction publique nous a cité un exemple qui me semble très parlant: suite aux coupes effectuées dans le budget 2020 au sein du personnel enseignant, la grille horaire des filières préparatoires à l'ECG et du préapprentissage de commerce a été réduite et jamais rétablie depuis lors. Ce sont ainsi des baisses qui perdurent malgré le vote des budgets suivants.
Le Cartel intersyndical de la fonction publique, lequel représente la voix du personnel de l'Etat, celui qui oeuvre au front, qui délivre les services publics au quotidien, nous a également fait part d'un manque de postes aux HUG, ne serait-ce que pour que l'Etat soit en conformité avec l'application du droit du travail et la mise en oeuvre de l'initiative sur les soins infirmiers, d'une pénurie de personnel à l'IMAD, d'une absence de réévaluation des subventions aux associations qui, face à des augmentations de charges notamment liées à l'inflation, se retrouvent à devoir réaliser des économies, soit sur les collaborateurs, soit sur les prestations fournies. Je mentionnerai encore un manque de ressources dans le secteur de la police ou à l'OCPM, ce qui conduit à des retards très importants dans la délivrance de certains permis, comme l'a mis en lumière un récent rapport de la Cour des comptes.
Dans ce contexte, le groupe socialiste a déposé une série d'amendements lors des travaux de commission: un rehaussement général de 2% de l'ensemble des subventions aux associations pour que celles-ci puissent faire face à la hausse des charges due à l'inflation, une augmentation de postes au SPMi et, plus ponctuellement, de subventions dans les domaines culturel, social et de l'aide à la parentalité. Un certain nombre d'entre eux ont été adoptés, d'autres ont été refusés.
La deuxième question qu'il est justifié de soulever quand on examine un budget est la suivante: celui-ci permet-il à l'Etat de remplir l'ensemble de ses engagements ? Là encore, il faut reconnaître que ce n'est pas totalement le cas, premièrement parce qu'il ne prévoit pas l'indexation des salaires de la fonction publique, ce qui ne constitue certes pas une obligation légale, mais fait partie des conditions-cadres pour le personnel de l'Etat. Cette indexation n'a déjà pas été pleinement octroyée ces dernières années et n'est pas du tout accordée cette année, ce qui représente une perte sèche de pouvoir d'achat pour les fonctionnaires.
Un autre exemple: la loi sur le financement de la solidarité internationale qui, elle, en revanche, constitue un engagement légal et stipule que 0,7% du budget annuel doit être dévolu à des projets de solidarité internationale. Aujourd'hui, on est toujours à 0,2%, ce qui est très regrettable; encore une exigence légale qui n'est pas tenue ! Idem pour les hospitalisations sociales, puisque la loi dispose qu'on ne devrait pas avoir recours à celles-ci dans la politique de la protection de la jeunesse; une nouvelle fois, ce budget ne permet pas de respecter cet engagement. A ce sujet, le parti socialiste a présenté un certain nombre d'amendements dans le cadre des travaux de commission, par exemple une indexation de 0,2% du salaire de la fonction publique, mais également une augmentation de la subvention pour les projets de solidarité internationale.
Voici la troisième question que nous devons nous poser lorsque nous évaluons un budget: celui-ci est-il préférable à l'absence de budget ? Est-il globalement positif pour la population, pour le développement des prestations et pour les services publics ? Ici, la réponse est indéniablement oui. D'une part, une annuité pour la fonction publique est prévue; je rappelle que celle-ci n'est plus allouée automatiquement comme c'était le cas auparavant, mais qu'elle doit être incluse dans le budget pour pouvoir être versée.
D'autre part, ce budget comprend 366 nouveaux postes qui s'ajoutent à un certain nombre d'ETP régularisés et octroyés en crédits supplémentaires. On relève par ailleurs un renforcement du nombre de postes dans les grandes entités subventionnées, notamment les HUG, les TPG et l'IMAD, une importante augmentation de la subvention aux transports publics qui permettra un développement conséquent de l'offre, la poursuite de la mise en oeuvre de l'initiative sur la culture, des subventions aux associations en hausse de 10%, soit pratiquement 50 millions de plus. Ces moyens sont essentiels pour soulager les équipes de l'administration, consolider les services publics et développer les prestations.
Or sans budget, on ne peut pas déployer ces différentes missions, et c'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera l'entrée en matière, considérant que le travail a été fait, et bien fait, au sein de la commission. Des amendements ont été déposés, certains ont été acceptés, d'autres rejetés - je le disais tout à l'heure -, mais nous sommes au final parvenus à un large équilibre, à un consensus en faveur du budget tel que sorti des travaux de commission.
Voilà pourquoi le parti socialiste ne soumettra aucun amendement, refusera ceux déposés par les autres groupes, prendra ses responsabilités, respectera ses engagements et votera le budget tel qu'issu des travaux de commission afin d'assurer le fonctionnement des services publics et des prestations, qui sont absolument nécessaires pour soutenir la population dans ces temps difficiles. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Laurent Seydoux (LJS). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, en préambule, j'adresse un grand remerciement à toutes les personnes impliquées dans l'élaboration de ce budget. Un travail important, indispensable et fruit de nombreux consensus est réalisé pour aboutir à son vote et permettre le bon fonctionnement de notre Etat. On peut constater, au regard de notre proche voisin, combien cela peut s'avérer compliqué si le travail ne s'effectue pas de façon collective.
Mesdames et Messieurs, c'était avec satisfaction que le mouvement Libertés et Justice sociale avait accueilli le premier projet de budget - à l'équilibre - déposé par le Conseil d'Etat, avec une évaluation des rentrées fiscales plus proche des résultats des comptes fortement bénéficiaires des années précédentes. Mais cette satisfaction fut de courte durée, puisqu'une correction des prévisions sur les recettes des personnes morales, fortement à la baisse, et une petite augmentation seulement de celles des personnes physiques créaient un déficit dépassant les 300 millions pour le budget 2025.
Nous saluons l'effort du Conseil d'Etat qui, dans un premier temps, a réduit les charges pour plus de 50 millions afin de parvenir à un déficit de 255 millions, ce qui se situe dans les limites acceptables au vu des mesures d'accompagnement qui avaient été mises en place pour pallier les conséquences de la réforme de la fiscalité des entreprises en 2020 sur sept ans. Mais nous ne sommes pas dupes: les effets de la RFFA ont été largement bénéficiaires pour notre économie.
Cela étant, le budget 2025 tel que sorti de la commission des finances, laquelle a procédé à quelques adaptations pour renforcer les prestations à la société civile en faveur du sport, de la culture ou de l'action sociale, nous convient, et LJS ne déposera aucun amendement.
Toutefois, il est clair qu'un tel déficit ne sera plus acceptable dans les années à venir - en 2027, il n'y aura plus l'excuse de la RFFA - et nécessitera une vraie prise de conscience du Conseil d'Etat et des administrations ainsi que des réformes structurelles en profondeur pour éviter la fuite en avant sur certaines politiques publiques. Nous y reviendrons lors de chaque politique publique, notamment en ce qui concerne la gouvernance dans les départements, en particulier celui de l'instruction publique, mais aussi à l'OCSIN (le service informatique de l'Etat), de même que la gestion de la migration au sein de l'Hospice général.
Les députés du mouvement Libertés et Justice sociale se réjouissent des discussions à venir pour aboutir à un budget de plus de 10 milliards au service de notre population, de nos petites et moyennes entreprises, et des autres cantons suisses qui, ne l'oublions pas, au travers de la péréquation intercantonale - nous sommes parmi les derniers contributeurs en Suisse -, reflètent la prospérité de notre canton. Nous souhaitons également que cette prospérité bénéficie au plus grand nombre à Genève.
Le mouvement Libertés et Justice sociale se battra pour un budget et des politiques publiques au service de la population et non de l'administration. Chers collègues, nous vous encourageons à entrer en matière sur ce projet de budget et à n'accepter aucun amendement. Excellent débat à tous ! Merci.
M. François Baertschi (MCG). Ce budget offre un mélange détonant où alternent les bonnes et les mauvaises nouvelles. Au niveau des recettes fiscales, en septembre, nous avions d'excellentes perspectives, des estimations réjouissantes et un équilibre bienvenu; deux mois plus tard, nous assistions à un reflux qui se compte en centaines de millions, ce qui a véritablement été une douche froide. Cependant, il ne s'agit que d'un budget: la vérité financière sortira à l'heure des comptes, qui seuls nous permettront de déterminer si les finances de Genève sont équilibrées ou non. Nous devons donc composer avec cette incertitude.
Le MCG soutient ce budget qui comprend à la fois une baisse d'impôts et la gratuité des TPG pour les moins de 25 ans, et ce sans toucher aux prestations, ce qui est important, c'est-à-dire qu'on arrive à offrir une réduction fiscale à l'ensemble de la population sans rogner sur les services à cette même population. Contrairement à certains propos que nous avions entendus lors de la dernière campagne de votation, nous nous rendons compte qu'il est tout à fait possible de trouver de bonnes mesures pour les résidents.
Nous nous opposerons, dans ce budget, aux propositions de coupes qui pénalisent les habitants. De notre côté, nous avons soumis une coupe de 149 millions de francs sur la scandaleuse rétrocession à la France; nous verrons si on nous laisse la possibilité de redéposer cet amendement en plénière, ce qui semble un peu délicat... (Rires.) ...mais quoi qu'il en soit, nous soulignerons que cette possibilité existe et dirons: «Regardez, notre budget est déficitaire, mais malgré tout, nous versons de l'argent de manière inconsidérée de l'autre côté de la frontière.»
Nous avons représenté également deux amendements qui visent un renforcement de la police genevoise et du Pouvoir judiciaire, des secteurs sous-dotés. En effet, les tâches régaliennes de l'Etat doivent impérativement être consolidées, il s'agit de la colonne vertébrale de Genève, et nous ne pouvons pas nous permettre un affaiblissement de celle-ci.
Nous sommes par ailleurs inquiets - je ne vous étonnerai pas - quant au nombre excessif de travailleurs frontaliers permis G: 10%, 20%, parfois 50% au sein de certaines directions ! Cette gestion du personnel, au sens du MCG, est tout à fait calamiteuse. Nous attendons et nous demanderons sans relâche qu'un changement soit opéré, qu'on fasse un véritable effort pour engager localement, pour former localement. De nombreux jeunes, de nombreux talents locaux cherchent à entrer dans la fonction publique; il ne faut pas leur fermer les portes, comme on le fait actuellement.
Dans le même temps, une précarité se développe, un nombre considérable de talents locaux sont gaspillés. On doit préparer l'avenir, et l'avenir se prépare notamment avec tous ces jeunes et ces moins jeunes - des personnes plus âgées pourraient en effet être réintégrées dans l'économie genevoise. L'Etat doit montrer l'exemple, l'Etat doit être impeccable. Malheureusement, force est de constater qu'il ne l'est pas, qu'un important travail reste à accomplir. Notre système étatique doit véritablement déployer des efforts à ce niveau, se remettre en question afin de changer ses méthodes de recrutement et de formation. Nous déplorons des moyens insuffisants pour régler cette question.
Le MCG continuera sans relâche à défendre les habitants du canton à tous les niveaux en soutenant les baisses d'impôts, l'engagement prioritaire des résidents genevois, des jeunes et des personnes de tout âge, un Etat qui montre l'exemple et surtout un canton solidaire de toute sa population, pas seulement des personnes qui disposent des bonnes relations pour entrer dans les bons réseaux, mais de l'entier des citoyens, y compris des exclus au sein de notre canton.
Nous voterons donc ce budget, mais cela ne constitue pas un blanc-seing en faveur de la politique menée à Genève actuellement, parce qu'elle laisse encore nettement à désirer. Une amélioration qualitative est nécessaire, en particulier s'agissant des engagements à l'Etat. Nous avons encore beaucoup de travail devant nous. Nous nous réservons pour les amendements, mais le groupe MCG acceptera l'entrée en matière sur ce projet de budget.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Blondin pour trois minutes.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Puisque nous en sommes au stade des prises de position des différents groupes, Mesdames et Messieurs, j'aimerais exposer quelques considérations du Centre s'agissant du rapport de majorité de la commission des finances sur le plan financier quadriennal, car nous n'en faisions pas partie.
Le Centre prendra acte de ce document qui constitue une feuille de route importante, car il est utile et indispensable de connaître et, si nécessaire, d'estimer les revenus financiers qui seront à disposition pour concrétiser les options et objectifs définis dans le programme de législature.
Les mesures d'économies du Conseil d'Etat (mesures transversales) représentent dans ce PLQ près de 300 millions de francs, et Le Centre se réjouit de voir de quelle manière elles seront mises en oeuvre. Les prestations sociales en faveur de la population, quant à elles, sont pérennisées, voire élargies en raison de besoins nouveaux et avérés, ce qui est important pour la cohésion sociale.
Il reste une grande incertitude, à savoir les décisions du Conseil fédéral et des Chambres, qui, comme vous le savez, cherchent de plus en plus à diminuer les charges de la Confédération. Nous devons prendre en compte l'hypothèse que le canton n'est pas à l'abri d'un transfert de charges substantiel qui, le cas échéant, pourrait compliquer la recherche d'un équilibre budgétaire ces prochaines années. Cela dit, ce PFQ, comme on le nomme, est présenté de manière étayée et transparente. C'est la raison pour laquelle Le Centre en prendra acte. Merci.
Mme Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est le septième projet de budget du canton que j'ai la chance et le plaisir de vous présenter aujourd'hui, et je ne vous cache pas que c'est la première fois qu'un tel texte ressort de la commission des finances sans opposition.
Certes, il y a eu deux abstentions, mais de la part d'un groupe qui, de façon générale, n'accepte jamais le projet de budget, donc je le prends comme quelque chose de très positif: c'est une abstention positive et dynamique de l'Union démocratique du centre, que je remercie, de même que l'ensemble de votre parlement pour ce résultat. J'espère véritablement que celui-ci se maintiendra jusqu'à la fin de vos débats - de nos débats - ce soir ou demain; j'entends déjà des menaces de certains partis... Bon, nous allons devoir nous montrer attentifs et prudents !
Naturellement, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat ne peut pas se déclarer totalement satisfait de vous présenter un budget déficitaire à hauteur de 256 millions. Toutefois, un tel manque à gagner s'explique, comme cela a été indiqué par le rapporteur et d'autres groupes: il s'explique et n'est pas inattendu - j'y reviendrai dans quelques instants. J'aimerais ensuite, une fois que je vous aurai exposé les raisons du déficit, évoquer la santé financière du canton pour relever que celle-ci est bonne.
Ce déficit - vous le savez, c'est connu - est lié à l'entrée en vigueur, au 1er janvier 2025, de la loi sur l'estimation fiscale des immeubles, une loi qui avait été plébiscitée par le peuple et que la justice, pour l'instant, a jugée conforme; un recours a été déposé au Tribunal fédéral, mais pour l'heure, ce texte est jugé conforme. Le deuxième facteur est la baisse de l'impôt sur le revenu qui a été acceptée par la population le 24 novembre dernier.
A elles deux, ces réformes ont un impact au temps T - il est vraiment important d'insister là-dessus, parce qu'on ne connaît pas encore les effets dynamiques que pourront engendrer ces diminutions fiscales à l'avenir - de 410 millions. Que cela signifie-t-il, Mesdames et Messieurs les députés ? Cela implique que sans ces deux révisions, le budget 2025 aurait été excédentaire d'un montant de 154 millions. Nous connaissons donc les raisons du déficit dans le projet de budget.
Je dois ajouter un élément: malgré la prise en compte de la répercussion des réductions d'impôts, malgré la revue à la baisse des estimations faisant suite au questionnaire sur l'année 2025 envoyé à plus de 300 entreprises - leurs réponses étaient moins positives que ce que nous aurions probablement souhaité -, si nous examinons la situation, les recettes fiscales augmentent de 173 millions, donc de 2% par rapport au budget 2024, et les revenus globaux de 3%, soit de 310 millions.
Mieux: si l'on compare les chiffres avec ceux du budget 2019 - c'est intéressant, puisqu'il s'agit du premier budget que j'ai eu à défendre -, les revenus issus de l'impôt ont progressé de 25%. C'est dire si nous ne connaissons pas de problème de rentrées fiscales ! Effectivement, Monsieur le député Seydoux, merci à la RFFA, merci au secteur économique extrêmement résilient et performant que nous avons la chance d'héberger dans notre canton. Je parle du tissu économique, parce que même si les personnes physiques versent aussi des impôts, c'est surtout au niveau des personnes morales que nous avons observé de très importantes différences avant et après la réforme de la fiscalité des entreprises.
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai entendu des reproches: les charges sont en hausse, le nombre de postes augmente fortement. Je vais citer quelques chiffres. S'agissant des postes, si l'on prend en compte uniquement la croissance des charges de personnel, lesquelles comprennent l'octroi de l'annuité cette année, on constate que la hausse est de 1,9%. Je vous rappelle que lors de la précédente législature, le Conseil d'Etat s'était fixé un seuil maximum d'augmentation de 2%; nous le respectons encore aujourd'hui en ce qui concerne les postes.
Ce qui est plus inquiétant, c'est l'alourdissement des charges de transfert, qui représentent plus de 6 milliards: 6,6 milliards, pour être exacte. A quoi correspondent les charges de transfert dans un budget ? Il s'agit des charges contraintes comme les prestations sociales, qui augmentent de plus de 170 millions, soit +7,8% depuis 2024 et +47% depuis 2019. Ce sont des charges que nous n'avons pas le choix d'assumer, dont nous devons nous acquitter.
Parmi les charges de transfert figure encore la participation à la solidarité confédérale, la RPT - elle a été évoquée tout à l'heure -, qui croît de 53 millions dans le projet de budget, soit de 14,4%. Bien entendu, le fait que la contribution genevoise à la péréquation augmente signifie que notre canton se porte bien, que sa santé financière est bonne, que les revenus sont suffisants, que notre taux de chômage est acceptable.
A ce stade, je pense qu'il est important de revenir sur la santé financière de notre canton. Mesdames et Messieurs, ce n'est pas sur la base d'un budget que l'on détermine si une collectivité publique se trouve en bonne santé financière ou non. Un budget, je le souligne, ne constitue qu'une autorisation de dépenses, ce ne sont pas encore les dépenses elles-mêmes, ce ne sont pas les chiffres avérés de l'année en cours. En effet, je rappelle que c'est au moment des comptes que l'on juge de la situation financière d'un canton et que depuis dix ans, Mesdames et Messieurs, à l'exception de l'année 2020, ceux de Genève ont été positifs, et ce malgré des budgets déficitaires.
Les comptes 2022 et 2023 se sont même avérés exceptionnels: ils nous ont permis de diminuer considérablement la dette financière, ils nous ont permis d'améliorer notre note Standard & Poor's. L'Etat a pris des mesures de sorte qu'une discrépance n'apparaisse plus entre les estimations fiscales telles qu'elles ressortent des budgets et les résultats que l'on retrouve aux comptes.
Sur cette base, Mesdames et Messieurs, je crois que le présent projet de budget répond à des demandes formulées dans des lois que vous avez votées, répond à des besoins de la population exprimés lors de votations, répond à des attentes de l'ensemble des groupes: il comprend des baisses d'impôts, des moyens pour les transports publics, des ressources pour l'action sociale. Dans le contexte actuel, il est susceptible de rassembler, et j'espère que vous confirmerez votre position en commission lors du vote.
Avant de conclure, comme chaque année, je tiens à remercier l'entier des équipes, des directions financières et des services qui ont contribué à la préparation de ce budget. Je salue particulièrement les différents services qui ont assisté aux travaux de la commission des finances: la DGFE, l'office du personnel de l'Etat, l'AFC et notamment mes collaborateurs qui participent à ces séances.
Je remercie également le président de la commission des finances, M. Jacques Béné, le secrétaire scientifique, M. Raphaël Audria, ainsi que tous les députés de la commission des finances, parce que même si nous ne sommes pas toujours d'accord, l'accueil y est toujours extrêmement cordial et chaleureux. Bien que je n'aie pas apporté de bonbons cette année, vous avez quand même voté sans opposition, et je vous remercie pour cela, pour le climat de travail agréable.
S'agissant du plan financier quadriennal, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat prend note que le parlement refusera vraisemblablement d'en prendre acte. Le Conseil d'Etat tient à vous assurer qu'il travaille chaque année à ce programme qui est nécessaire pour les services, mais nous le préparons aux mois de juillet et août et n'avons pas les moyens de le remanier totalement par la suite afin qu'il corresponde à l'évolution de la situation. Pour nous, il s'agit d'un guide, pas d'une valeur absolue; chaque année, le PFQ est revu à l'aune de l'année nouvelle, à l'aune des changements qui interviennent. Merci beaucoup, Mesdames et Messieurs les députés.
Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets à votre approbation l'entrée en matière sur le projet de budget.
Mis aux voix, le projet de loi 13535 est adopté en premier débat par 83 oui et 9 abstentions.